M. Claude Malhuret. Cet amendement vise à aligner la durée de validité des droits voisins pour les éditeurs de presse et les agences de presse sur la durée de cinq années défendue par la France à Bruxelles, dans le contexte des négociations en cours sur l’article 11 du projet de directive européenne.
À l’ère de l’instantanéité des échanges d’information, une durée de vingt ans serait excessive. Le projet de directive a retenu une durée de cinq années, qui correspond également à la position de la France dans la négociation.
Sachant que la position du Conseil européen est de ramener la durée de ces droits à un an, nous souhaitons renforcer la position de notre pays sans la décrédibiliser, en inscrivant dès à présent une durée de validité de ces droits de cinq ans dans la présente proposition de loi.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié bis.
M. Jean-Pierre Leleux. Je serai très bref, dans la mesure où le sujet a été largement évoqué lors de la discussion générale. Comme nombre de mes collègues, je propose de fixer la durée des droits voisins à cinq ans.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.
Mme Françoise Laborde. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. David Assouline, rapporteur. À titre personnel, je suis favorable à une durée de vingt ans. C’est la durée des droits voisins que j’ai proposée, car la tradition française veut que celle-ci soit de cinquante ans.
Cela étant, je sais bien que la directive européenne fixe une durée de cinq ans et que cela correspond à la position française. C’est pourquoi j’estime que ces trois amendements ont leur légitimité. Personnellement, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat, tout en précisant que la commission en tant que telle a émis un avis favorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Nous suivrons la position du rapporteur. Nous étions favorables à une durée de vingt ans, mais, comme je l’ai indiqué lors de discussion générale, il ne s’agit pas d’un point d’achoppement. Si le Sénat vote pour une durée de cinq ans, ce sera également une bonne chose.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié ter, 2 rectifié bis et 4 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Article 3
Le titre unique du livre II de la première partie du code de la propriété intellectuelle est complété par un chapitre VIII ainsi rédigé :
« CHAPITRE VIII
« Droits des éditeurs et des agences de presse
« Art. L. 218-1. – I. – On entend par publication de presse au sens du présent chapitre une collection composée principalement d’œuvres littéraires de nature journalistique, qui peut également comprendre d’autres œuvres ou objets protégés et constitue une unité au sein d’une publication périodique ou régulièrement actualisée portant un titre unique dans le but de fournir au public des informations sur l’actualité ou d’autres sujets publiées sur tout support à l’initiative, sous la responsabilité éditoriale et sous le contrôle d’un prestataire de services.
« Les périodiques qui sont publiés à des fins scientifiques ou universitaires, telles que les revues scientifiques, ne sont pas couverts par la présente définition.
« II (nouveau). – On entend par agence de presse au sens du présent chapitre toute entreprise mentionnée à l’article 1er de l’ordonnance n° 45-2646 du 2 novembre 1945 portant réglementation des agences de presse.
« Art. L. 218-2. – L’autorisation de l’éditeur de presse ou de l’agence de presse est requise avant toute reproduction ou communication au public de ses publications de presse sous une forme numérique par un service de communication au public en ligne d’œuvres et d’objets protégés.
« Art. L. 218-3. – Les droits des éditeurs de presse et des agences de presse mentionnés à l’article L. 218-1 peuvent être cédés ou faire l’objet d’une licence.
« Ces titulaires de droits peuvent confier la gestion de leurs droits mentionnés à un ou plusieurs organismes de gestion collective régis par le titre II du livre III.
« Art. L. 218-4. – La rémunération due au titre de la reproduction et de la représentation des publications de presse sous une forme numérique est assise sur les recettes de l’exploitation ou, à défaut, évaluée forfaitairement, notamment dans les cas prévus à l’article L. 131-4.
« Art. L. 218-5. – I. – Les journalistes professionnels ou assimilés, au sens des articles L. 7111-3 et suivants du code du travail, auteurs des œuvres présentes dans les publications de presse mentionnées à l’article L. 218-1 du présent code ont droit à une part de la rémunération mentionnée à l’article L. 218-4. Cette part ainsi que les modalités de sa répartition entre les auteurs concernés sont fixées dans des conditions déterminées par un accord d’entreprise ou, à défaut, par tout autre accord collectif, au sens des articles L. 2222-1 et suivants du code du travail. Cette rémunération complémentaire n’a pas le caractère de salaire.
« II. – (Supprimé)
« CHAPITRE IX
(Division et intitulé supprimés)
« Art. L. 219-1 à L. 219-5. – (Supprimés)
Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par M. Ouzoulias, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette demande d’autorisation n’emporte pas obligation pour l’éditeur de presse producteur de recourir à un hébergement direct des contenus sur les plateformes d’un service automatisé de référencement.
II. – Alinéa 8
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La cession de droits ou l’accord de licence n’emporte pas obligation pour l’éditeur de presse producteur de recourir à un hébergement direct des contenus sur les plateformes d’un service automatisé de référencement.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Compte tenu des enjeux financiers, on peut douter, dans l’hypothèse où cette loi serait promulguée, que les GAFA viennent ici, tels les bourgeois de Calais, avec la corde au cou en forme de soumission… Les choses ne s’arrêteront pas là !
Il s’agit d’un amendement d’appel, qui vise à vous faire remarquer, mes chers collègues, la nécessité de réfléchir déjà à ce qui va arriver après, notamment, à tout ce que les plateformes pourront mettre en place pour contourner les procédures que nous établissons aujourd’hui.
Je formulerai par ailleurs une remarque très brève : je vous rappelle que, pour les phonogrammes, la loi prévoit une rémunération forfaitaire ou une rémunération assise sur les recettes de l’exploitation. Par exemple, pour la radio, il s’agit de 5 % des recettes, tandis que pour les discothèques, elle s’établit à hauteur de 1,65 %. Aussi, je me demande si, dans un second temps, nous ne pourrions pas réfléchir à ce type de rémunération forfaitaire, qui éviterait à certains éditeurs d’être soumis à une pression trop forte des plateformes qui, comme l’a très justement dit la présidente de la commission de la culture, se trouvent dans une situation monopolistique.
J’ai compris ce que le rapporteur pensait de mon amendement et de sa rédaction. Je le retirerai aussitôt qu’il se sera exprimé, ma prise de position valant également explication de vote.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. David Assouline, rapporteur. Comme l’a anticipé son auteur, je demanderai le retrait de cet amendement.
J’ai déjà dit ce que je pensais au cours de la discussion générale : les dispositions de cet amendement ont le mérite de poser un débat qui sera l’un des principaux enjeux de la mise en œuvre de ce texte. Malheureusement, elles ont trait au droit de la concurrence, ce qui n’est pas tout à fait le même sujet, et leur rédaction n’est pas sécurisée juridiquement.
Tout en remerciant son auteur d’avoir ouvert ce débat, je demande donc le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Franck Riester, ministre. Le Gouvernement comprend le débat, mais il considère que la question est plutôt de nature contractuelle. Je demanderai donc à l’auteur de l’amendement de bien vouloir le retirer, faute de quoi j’y serais défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Ouzoulias, l’amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Pierre Ouzoulias. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 3 est retiré.
L’amendement n° 5, présenté par M. Assouline, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer le mot :
mentionnés
La parole est à M. le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Article 3 bis (nouveau)
Au premier alinéa de l’article L. 331-5 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou d’un programme » sont remplacés par les mots : « , d’un programme ou d’une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 3 ter (nouveau)
Au deuxième alinéa de l’article L. 331-7 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou à un programme » sont remplacés par les mots : « , à un programme ou à une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 3 quater (nouveau)
À l’article L. 331-10 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou d’un phonogramme » sont remplacés par les mots : « , d’un phonogramme ou d’une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 3 quinquies (nouveau)
L’article L. 331-11 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « ou d’un programme » sont remplacés par les mots : « , d’un programme ou d’une publication de presse » et les mots : « ou du programme » sont remplacés par les mots : « , du programme ou de la publication de presse » ;
2° Au second alinéa, les mots : « un programme » sont remplacés par les mots : « , un programme ou une publication de presse » et les mots : « ou d’un programme » sont remplacés par les mots : « , d’un programme ou d’une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 3 sexies (nouveau)
Au deuxième alinéa de l’article L. 331-31 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou un programme » sont remplacés par les mots : « , un programme ou une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 3 septies (nouveau)
À l’article L. 331-37 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou d’un phonogramme » sont remplacés par les mots : « , d’un phonogramme ou d’une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 3 octies (nouveau)
Au premier alinéa de l’article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou d’un programme » sont remplacés par les mots : « , d’un programme ou d’une publication de presse » et les mots : « ou de l’entreprise de communication audiovisuelle » sont remplacés par les mots : « , de l’entreprise de communication audiovisuelle, de l’éditeur de presse ou de l’agence de presse ». – (Adopté.)
Article 3 nonies (nouveau)
Au I de l’article L. 335-4-1 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou d’un programme » sont remplacés par les mots : « , d’un programme ou d’une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 3 decies (nouveau)
Au III de l’article L. 335-4-2 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « ou un programme » sont remplacés par les mots : « , un programme ou une publication de presse ». – (Adopté.)
Article 4
Après que la Commission européenne l’a déclarée compatible avec le droit de l’Union européenne, la présente loi s’applique trois mois après sa promulgation. – (Adopté.)
Article 5 (nouveau)
La présente loi est applicable dans les îles Wallis et Futuna. – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et républicain.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 45 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 342 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements.)
Mes chers collègues, je vous remercie et vous félicite de nous avoir permis d’achever l’examen de ce texte dans les temps.
La parole est à M. le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur. Je tiens vraiment à remercier l’ensemble de mes collègues, qui sont restés jusqu’à maintenant pour témoigner de l’unanimité qui existe au Sénat.
Je remercie de nouveau le Gouvernement d’avoir immédiatement accompagné la démarche du Sénat, qui, elle-même, accompagne la démarche du Gouvernement dans les négociations européennes. Je salue également le cabinet du ministre, qui a tout de suite collaboré et travaillé, afin notamment que la consolidation juridique du texte soit la plus proche possible de la directive européenne.
Je souhaite évidemment rendre hommage aux services de la commission de la culture, qui ont été très réactifs dans une période où, je le rappelle, le Sénat avait suspendu ses travaux : alors que la proposition de loi venait d’être mise à l’ordre du jour de la Haute Assemblée, il fallait bien mener toutes les auditions nécessaires, puisque nous avons tenu à voir les acteurs essentiels sur cette question. Enfin, je remercie la présidente de la commission de la culture, qui a permis ce travail.
J’espère que l’unanimité qui s’est exprimée sur ce texte, qui a encore du chemin à parcourir, lui donnera davantage de force et que les députés y apporteront leur pierre dans un esprit de coconstruction entre Sénat, Gouvernement et Assemblée nationale.
6
Adoption des conclusions de la conférence des présidents
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune observation sur les conclusions de la conférence des présidents.
Elles sont donc adoptées.
7
Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour un rappel au règlement.
M. Pierre Ouzoulias. Mon rappel au règlement porte sur Parcoursup.
Je trouve extrêmement fâcheux que nous ayons dû demander à plusieurs reprises au Gouvernement, dans cet hémicycle, des pièces qui nous semblaient essentielles pour exercer de façon correcte le contrôle de son action.
Au banc des commissions, le président Bas avait obtenu du Gouvernement son engagement de transmettre ces pièces, que nous attendons toujours. Or nous avons découvert cette semaine que le Défenseur des droits avait eu communication de ces données et que celles-ci avaient éclairé son rapport. Nous aurions aimé qu’elles éclairassent aussi notre activité de contrôle de l’action gouvernementale !
Nous vivons une période dans laquelle, finalement, le Défenseur des droits défend non seulement les particuliers, mais aussi les droits du Parlement. À mon sens, il y a là une rupture dans la relation entre le Gouvernement et le Parlement dont nous ne pouvons pas nous satisfaire.
De nouveau, nous réclamons les documents que nous a promis le Gouvernement. Il serait malheureux que nous soyons obligés, encore une fois, de demander à M. Toubon de nous les transmettre.
Mme la présidente. Acte est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
8
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 20 janvier 2019, à quatorze heures et le soir :
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises (texte de la commission n° 255, 2018-2019).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures quarante.)
nomination de membres de deux commissions
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a présenté deux candidatures pour deux commissions permanentes.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 du règlement, ces candidatures sont ratifiées :
Mme Marie-Noëlle Lienemann est membre de la commission des affaires économiques ;
Mme Michelle Gréaume est membre de la commission des affaires sociales.
Direction des comptes rendus
ÉTIENNE BOULENGER