M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, je ne puis que protester moi aussi contre les conditions dans lesquelles nous travaillons.
Cet amendement est censé apporter des précisions sur les collectivités bénéficiaires du fonds de soutien exceptionnel, un dispositif qui fait l’objet d’une concertation avec l’ADF. Or vous ne pouvez pas nous confirmer l’accord de cette association sur votre amendement. En outre, il ne nous est pas possible, dans un temps aussi limité, de réaliser les simulations nécessaires.
Il est vrai que la rectification apportée permettra aux départements bénéficiaires de ne pas subir de plafonnement. En outre, l’amendement vise à mettre en place un plancher, qui permettra à ceux qui étaient bénéficiaires du fonds de soutien exceptionnel et qui ne le sont plus au titre du fonds de stabilisation de conserver 50 % du montant perçu en 2018.
Une telle mesure peut se comprendre, mais le ministre ne nous a pas confirmé qu’il avait l’accord de l’ADF sur ce point. C’est pourquoi je vais émettre un avis de sagesse sur cet amendement.
Pour répondre à Marc Laménie, la mise en place de ce plancher permettra aux Ardennes de conserver une attribution supérieure à ce qu’elle aurait été sans lui : elle devrait atteindre 2 millions, au lieu de 800 000 euros.
À titre personnel, je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Je ne vais pas présenter à nouveau les arguments que Philippe Dallier et moi-même avons avancés.
Pour le département du Nord, le reste à charge du RSA atteint 300 millions d’euros. On ne peut donc pas dire qu’un montant de 115 millions d’euros pour la péréquation verticale soit considérable, en particulier par rapport aux enjeux sociaux et pour les départements les plus pauvres.
Avant sa rectification, cet amendement visait un plafond, ce qui présentait un inconvénient majeur, celui de sanctionner les trois départements les plus soumis aux dépenses sociales : le Nord, la Seine-Saint-Denis et La Réunion. Retirer le plafonnement change les choses. Il n’en reste pas moins que la méthode est tout à fait contestable.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je vais également m’abstenir sur cet amendement, parce que je ne veux pas voter à l’aveugle. Je trouve incroyable que l’on ne puisse pas nous fournir au moins un tableau récapitulatif de ses conséquences département par département. Nous travaillons dans des conditions qui ne sont pas acceptables, d’où mon abstention.
Je ne suis pas certain que le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, soit complètement ravi de ce que nous sommes en train de faire. M’abstenir est le mieux que je puisse faire ! Franchement, j’aurais plutôt envie de voter contre.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. J’ai bien entendu l’argumentation de notre rapporteur spécial Charles Guené, mais je reste dubitatif. Par conséquent, je m’abstiendrai également.
Évidemment, chacun plaide pour son territoire. Les Ardennes, comme de nombreux autres départements, se trouvent dans une situation très difficile. Vous savez, monsieur le ministre, que le représentant de l’État a saisi, il y a quelque temps, la chambre régionale des comptes. En outre, le versement des subventions aux communes subit un retard à hauteur de 20 ou 30 millions d’euros, alors même que les communes concernées ont réalisé les opérations d’investissement correspondantes.
Certes, notre département n’est pas à l’échelle de la Seine-Saint-Denis, du Nord ou du Val-d’Oise, mais il perd 1 000 habitants par an, ce qui crée des problèmes particuliers.
L’amendement qui nous est présenté et qui me semble avoir une approche très technocratique soulève encore de fortes incertitudes. Sincèrement, on n’y comprend plus grand-chose ! C’est pourquoi je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Sébastien Lecornu, ministre. L’intervention de M. le sénateur des Ardennes m’a stimulé !
Monsieur le sénateur, je veux bien être accusé d’être technocratique ou ce que l’on voudra, et me faire enguirlander par le Sénat pendant un quart d’heure sur la forme – je m’en suis excusé –, mais enfin, si nous avons déposé cet amendement, c’est pour les Ardennes, entre autres départements !
La garantie de sortie à 50 % fait justement partie des effets de bord dont nous nous sommes aperçus et que nous essayons de corriger. Nous avons justement été prévenus par le sénateur Huré, votre collègue, et par le président du conseil départemental des Ardennes, de sorte que nous avons déposé cette mesure devant le Sénat.
M. Philippe Dallier. Il est tout de même fou que l’on ne s’en soit pas rendu compte avant !
M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur Dallier, je ne doute pas que vous ferez mieux quand vous serez à ma place, ce qui, compte tenu de votre talent, ne manquera pas d’arriver rapidement. (Exclamations amusées.)
Je veux bien tout ce que l’on veut, et le Gouvernement a certainement tous les défauts de la terre. Mais nous avons reçu l’amendement de l’ADF seulement cette semaine.
M. Philippe Dallier. Et ils n’ont fait aucune simulation ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Si ! Je ne vais pas recommencer : je me suis déjà exprimé sur ce point. Tout paraît toujours simple vu de l’extérieur, mais les choses sont parfois plus complexes en réalité.
Monsieur Laménie, franchement, il m’est difficile d’entendre dire que les sénateurs des Ardennes s’abstiendront sur l’amendement du Gouvernement, alors que celui-ci vise justement à tenir compte de ce que les élus nous disaient, lors d’un repas républicain, à l’occasion d’un déplacement dans les Ardennes. Je le dis avec tranquillité et respect, mais il faut que les choses soient dites, parce que le méchant gouvernement n’a pas que des défauts.
M. Roger Karoutchi. Nous n’avons pas dit cela !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-991 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l’article 81 ter, modifié.
(L’article 81 ter est adopté.)
Article additionnel après l’article 81 ter
M. le président. L’amendement n° II-25 rectifié ter, présenté par MM. Grand, Bas, Milon et Daubresse, Mme Micouleau, MM. Joyandet et Courtial, Mme Bruguière, MM. Calvet, Lefèvre, Panunzi, Sol et Le Gleut, Mmes Berthet, Deroche et Puissat, MM. Chaize et Chatillon, Mme Imbert, MM. Mouiller, Pierre et Kennel, Mme L. Darcos, MM. Laménie, Bonhomme, Cuypers, Pemezec, Nougein, Poniatowski, Bonne, D. Laurent, del Picchia et Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat, F. Gerbaud, Lanfranchi Dorgal et Lamure, MM. Charon, Saury, Pellevat, Karoutchi, Piednoir, Genest, Babary, J.M. Boyer, Duplomb, Dufaut, Reichardt, Sido et Revet et Mmes Keller, A.M. Bertrand, Lassarade, Bories, Morhet-Richaud et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 81 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa du III de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, ce taux est ramené à 5 % lorsque le maître d’ouvrage est une commune de moins de 1 000 habitants. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Cet amendement a pour objet les communes de moins de 1 000 habitants. Je ne puis être en conflit d’intérêts, puisqu’il n’y en a aucune dans mon département. (Nouveaux sourires.)
Cette proposition fait écho à un vote du Sénat de la fin 2017. La Haute Assemblée, dans sa sagesse, a voté de nouveau cette mesure à la faveur de l’examen d’une proposition de loi en juin 2018. Nous souhaitons que la contribution obligatoire sur un projet d’investissement pour les communes, qui est de 20 %, soit abaissée à 5 % pour les communes de moins de 1 000 habitants.
Il s’agit de permettre aux 75 % de communes de moins de 1 000 habitants, qui n’ont pas beaucoup de moyens financiers, de mobiliser autour d’elles des contributions des autres collectivités ou de l’État, et cela pour réaliser un minimum d’investissements. Chacun sait que, pour ces communes, il est difficile de financer 20 % d’un investissement. Par les temps qui courent, fixer ce taux à 5 % serait un geste significatif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. L’année dernière, nous avons émis un avis défavorable sur un amendement du même type ; vous ne serez pas étonné que la commission ait récidivé, mes chers collègues.
Aujourd’hui, contrairement à ce qui se faisait dans le passé, obtenir 80 % de financement sur investissement pour une collectivité est très difficile. Les aides des départements ont plutôt fondu en pourcentage, et même si la DETR a été légèrement « poussée », il est très rare d’arriver à ce seuil. Votre proposition pose donc un problème qui est plus théorique que pratique, car l’on ne connaît pas de cas où la question se pose.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur Karoutchi, j’ai bien noté qu’aucune commune de votre département n’était concernée, mais je vous précise que, en pratique, des dérogations existent déjà. C’est le cas aujourd’hui dans l’Aude, qui a été victime d’une catastrophe naturelle, pour prendre un exemple à la fois très récent et très tragique.
D’une certaine manière, cet amendement est déjà satisfait. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. J’entends bien ce qui m’est dit, mais je vais maintenir cet amendement. On m’objecte qu’il est déjà très difficile d’atteindre les 20 %. Justement, et c’est encore plus difficile pour les petites communes que pour les autres. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, les investissements ne sont pas comparables à ceux du Grand Paris. Les 80 % à rechercher, ou plus si l’on retient le seuil de 5 %, ne représentent pas les mêmes sommes.
Monsieur le ministre, vous me dites qu’il existe parfois des dérogations. Faisons en sorte que cela devienne la règle ! Si le cas en question est tellement rare, comme vous avez l’air de le dire, laissons ces communes tranquilles.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. Roger Karoutchi. Fichez-leur la paix ! (Sourires.)
Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. J’étais extrêmement réservé au départ sur ce sujet. Par prudence, j’estimais qu’il fallait éviter que certaines communes ne cherchent à faire réaliser par d’autres les investissements qu’elles prévoient, puisque, finalement, c’est à cela que revient cette mesure.
Toutefois – d’autres diraient « en même temps » –, lorsqu’un pont communal s’effondre, bloquant la commune, qui n’a plus qu’un seul accès, ou même qui n’en a plus du tout, comment fait-elle ?
M. Loïc Hervé. Tout à fait !
M. Jérôme Bascher. Elle n’a absolument pas les moyens de financer 20 % des travaux. Il faut donc prendre en compte les travaux exceptionnels. Peut-être pourrait-on rectifier cette proposition, pour renvoyer à un décret ou à un arrêté énumérant ces exceptions.
Pour ma part, je vais voter cet amendement. Il faut que les 20 % soient la règle, mais que, pour des investissements exceptionnels, on puisse envisager les 5 %.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. On ne va pas batailler sur cette question, qui, je le répète, est plus théorique que pratique.
M. Jérôme Bascher. Non !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Monsieur Bascher, le cas que vous citez ne peut pas exister. Quand une commune est coupée du monde, ne vous inquiétez pas, on s’occupe de rétablir le lien, sans se préoccuper de ses capacités budgétaires.
Les choses ne se passent pas ainsi, cher collègue. Il y a énormément d’exemptions à la règle générale. Il y en a pour l’outre-mer, pour la Corse, pour la rénovation des monuments protégés, pour les opérations ayant pour objet de réparer des dégâts causés par des calamités, et j’en passe. Si un pont s’effondre, je vous assure que la préfecture fait tout ce qu’il faut pour que, le plus rapidement possible, un pont transitoire soit mis en place. On est dans un pays où un tel cas ne peut pas se présenter.
M. Loïc Hervé. Mais qui paie ?
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Il peut arriver qu’une route de montagne s’écroule ; elle est réparée, même si la route est communale. Tout de même ! Nous vivons dans un pays où l’État vient en soutien de nos communes. Le cas évoqué n’existe pas.
M. Loïc Hervé. Si !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Vous n’avez aucun exemple à me donner. Monsieur Hervé, l’autre jour, vous m’avez parlé d’une commune. Comment s’appelait-elle, déjà ?
M. Loïc Hervé. Magland !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Voilà. Cette commune, Magland, rencontre des difficultés.
M. Loïc Hervé. La DGF y est négative !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Oui, sauf qu’elle a un potentiel financier deux fois supérieur à la norme. J’ai vérifié : 1 400 euros par habitant, alors que la moyenne est à 600 euros ou 700 euros.
M. Loïc Hervé. Cette commune a sur son territoire la station de Flaine !
M. Roger Karoutchi. De grâce, pas de bataille de territoires !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Mes chers collègues, comme le cas ne se produira jamais, vous pouvez adopter cet amendement si vous voulez. Votre vote n’aura aucune conséquence, sauf peut-être en termes d’image. Nous sommes dans la symbolique pure, et je n’aime pas cela. D’ailleurs, monsieur Karoutchi, d’habitude, vous préférez comme moi l’action au symbole.
Mes chers collègues, je crois que nous avons toujours intérêt à responsabiliser chacun des investisseurs. Quand une commune décide d’investir, je trouve positif qu’elle avance 20 % des sommes nécessaires. De la même façon, je n’aime pas la gratuité. Je préfère que les gens paient toujours un petit quelque chose.
Je le répète, je préfère le seuil des 20 % à celui des 5 %.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Pour ma part, je trouve cet amendement tout à fait sensé. J’ai connu un cas où ce problème s’est posé : la commune de Saint-Sigismond, en Haute-Savoie, a été confrontée à un aléa important, non couvert par un arrêté de catastrophe naturelle ; elle a donc dû négocier âprement une dérogation dans le cadre du Fonds Barnier. Mme le maire de Saint-Sigismond a mis des semaines à négocier cela.
Monsieur le rapporteur spécial, vous parliez d’une route de montagne qui s’effondre. C’est exactement ce qui s’est passé à Saint-Sigismond, voilà deux ans. Il faut simplifier les dispositifs, ce que s’emploient à faire les auteurs de cet amendement !
Pour en revenir à la commune de Magland, vous oubliez de dire, monsieur le rapporteur spécial, qu’elle est le siège de la station de Flaine. C’est pour cela que son potentiel fiscal est supérieur à la moyenne. Je vous invite à venir sur le terrain pour échanger avec le maire. S’il le faut, je le ferai venir au Sénat, pour qu’il vous rencontre et qu’il vous explique la réalité de cette commune, qui mérite mieux que d’être invectivée dans l’hémicycle !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Mais non ! Je ne l’ai pas invectivée.
M. Roger Karoutchi. Du calme !
M. le président. Il n’y a eu aucune invective, mes chers collègues.
Je mets aux voix l’amendement n° II-25 rectifié ter.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 81 ter.
compte de concours financiers : avances aux collectivités territoriales
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Avances aux collectivités territoriales |
110 610 910 447 |
110 610 910 447 |
Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie |
6 000 000 |
6 000 000 |
Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes |
110 604 910 447 |
110 604 910 447 |
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».
Articles de récapitulation des crédits
M. le président. Tous les crédits afférents aux missions ayant été examinés, le Sénat va maintenant statuer, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, sur les articles qui portent récapitulation de ces crédits.
TITRE PREMIER
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2019. – CRÉDITS ET DÉCOUVERTS
M. le président. Je vais appeler les articles 39 à 42 et les états B à E qui leur sont respectivement annexés, relatifs aux crédits et découverts pour 2019.
La direction de la séance du Sénat a procédé à la rectification des états B et D, de manière à tenir compte des votes qui sont intervenus lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances.
i. – crédits des missions
Article 39 et état B
Il est ouvert aux ministres, pour 2019, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant, respectivement, aux montants de 421 834 567 591 € et de 408 620 613 722 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.
ÉTAT B
RÉPARTITION, PAR MISSION ET PROGRAMME, DES CRÉDITS DU BUDGET GÉNÉRAL
BUDGET GÉNÉRAL