Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la mission « Conseil et contrôle de l’État ». Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2019 prévoit une hausse de 2,4 % des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », qui sera ainsi dotée de 680,8 millions d’euros.
Cette hausse, non prévue par la programmation triennale, bénéficie essentiellement au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives », qui concentre près des deux tiers des crédits de la mission, avec un budget de 420 millions d’euros. L’augmentation de 14 millions d’euros des crédits pour ce programme s’accompagne d’une création de 132 emplois, portant le plafond à 4 147 emplois pour 2019. Ces moyens supplémentaires sont toutefois très inégalement répartis parmi les juridictions administratives.
En réalité, une seule de ces juridictions en est la principale destinataire : la Cour nationale du droit d’asile. Ses moyens seront portés à un niveau inédit : avec 122 agents supplémentaires, son plafond atteindra 648 emplois. Je m’en satisfais, car la capacité de jugement de la CNDA mérite impérativement d’être renforcée.
L’étau dans lequel la CNDA est prise depuis plusieurs années se resserre : d’une part, elle doit réduire ses délais de jugement, conformément aux objectifs votés et fixés à cinq mois pour les procédures normales. D’autre part, elle est confrontée à une véritable envolée du contentieux de l’asile : 40 000 affaires entrantes en 2016, 53 600 en 2017, et 65 000 affaires attendues d’ici à la fin de cette année ! Et avec plus de 45 000 requêtes traitées l’an dernier, la CNDA est la première juridiction administrative française par le nombre d’affaires jugées, comme l’avait déjà souligné notre collègue François-Noël Buffet.
Monsieur le ministre, vous me voyez convaincu par la nécessité d’augmenter les ressources de la CNDA. Cependant, cette augmentation laisse craindre un effet d’éviction au détriment des autres juridictions administratives. Ce PLF leur prévoit 10 nouveaux emplois pour 2019, alors que la CNDA a bénéficié de 80 % des créations d’emplois du programme ces quatre dernières années. Les contentieux administratifs de masse sont pourtant en progression : contentieux des étrangers, contentieux sociaux, contentieux fiscaux…
Vous conviendrez, monsieur le ministre, qu’une telle situation est préoccupante pour ces juridictions. Une dégradation des délais de jugement, faute de moyens suffisants, serait particulièrement mal venue, alors même que le Comité action publique 2022 préconise une réduction de ces délais dans l’ensemble des juridictions.
Je serai plus bref sur les crédits des autres programmes, qui sont quasi stables par rapport à 2018.
Le budget du Conseil économique, social et environnemental, le CESE, atteindra 40,2 millions d’euros en 2019. Ce budget s’en tient au plafond fixé par la programmation pluriannuelle.
Les éventuelles conséquences du projet de révision constitutionnelle ne sont donc pas prises en compte par ce PLF. Le projet de réforme prévoit à ce jour de renforcer la mission consultative du CESE, avec sa consultation plus fréquente sur les projets de loi, ou le recueil dématérialisé des pétitions citoyennes. Dans l’attente de cette réforme, le CESE poursuit en 2019 deux axes de rénovation initiés en 2016 : la réaffirmation de son activité consultative, d’une part, la rénovation de son régime financier et comptable, qui aboutira notamment à une première certification de ses comptes en 2019, d’autre part.
Je conclus mon intervention sur les crédits de la Cour des comptes et des autres juridictions financières, qui atteignent 220 millions d’euros en 2019.
Les 2,2 millions d’euros de crédits supplémentaires financeront notamment la création de 15 emplois. Cela dit, le plafond d’emplois n’augmente pas, il reste stable à 1 840 emplois depuis 2009 et il devrait encore être sous-consommé l’an prochain. Les juridictions financières absorberont donc à moyens quasi constants l’extension de leur activité.
Certaines de leurs nouvelles missions sont en effet appelées à s’étendre dans le futur, qu’il s’agisse de l’expérimentation de la certification des comptes des collectivités territoriales ou des contrôles des établissements sociaux et médico-sociaux et des cliniques privées.
Pour conclure, mes chers collègues, je vous invite à suivre l’avis de la commission des finances et à adopter les crédits de cette mission.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Michel Canevet, rapporteur spécial de la commission des finances, pour la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Direction de l’action du Gouvernement » comporte trois programmes, le programme 129 consacré à la coordination du travail gouvernemental, le programme 308 tourné vers les autorités administratives indépendantes et le programme 333 dédié aux moyens des administrations déconcentrées.
C’est un budget de l’ordre de 1,33 milliard d’euros, qui recouvre des sujets extrêmement variés, mais qui rassemble notamment tous les services du Premier ministre.
Les propositions budgétaires pour l’année 2019 portent sur la création de 24 nouveaux postes en solde net, sachant que 36 redéploiements sont également prévus, ce qui témoigne des efforts consentis en 2019, en particulier s’agissant des effectifs de l’ANSSI, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, en augmentation de 45 postes. Le Groupement interministériel de contrôle, chargé d’un certain nombre de missions d’écoute et de contrôle, gagne également 15 postes.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, voit pour sa part ses effectifs croître de 12 postes, ce qui nécessite aussi des moyens supplémentaires.
À périmètre constant, on observe deux opérations de transfert, l’une sur la budgétisation des loyers, l’autre sur le transfert à Bercy de la Direction interministérielle de la transformation publique, issue de la séparation du Secrétariat général à la modernisation de l’action publique en deux entités, l’autre étant la Direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication de l’État, la DINSIC, qui reste pour sa part dans le périmètre de la mission.
La plupart des services sont aujourd’hui localisés sur le site de Ségur-Fontenoy, un nouveau centre de gouvernement construit au cours des dernières années, qui a vu tout d’abord s’installer la CNIL et le Défenseur des droits en 2017, avant que tous les services du Premier ministre n’y soient transférés en 2018. Aujourd’hui, 2 300 collaborateurs travaillent sur le site, ce qui garantit une certaine efficience de fonctionnement et une rationalisation des moyens. Auparavant, ces services étaient dispersés sur une quinzaine de sites. L’on espère que cette mutualisation permettra de réaliser des économies.
J’ai eu l’occasion, ces dernières années, d’évoquer cette opération, d’un coût global de 370 millions d’euros. L’État devrait être propriétaire des locaux en 2029 et une société, la SOVAFIM, a été utilisée afin de pouvoir mener l’opération à bien.
Treize autorités indépendantes figurent dans le périmètre de la mission, dont le CSA, qui absorbe l’essentiel du budget, et la CNIL.
Cette mission comprend également la Direction de l’information légale et administrative, la DILA, chargée de toute l’information légale de l’État. On observe en 2019 une baisse considérable des effectifs de cette direction, lesquels sont passés en quelques années de 773 à 663. Il convient de souligner cet effort assez important de réduction des effectifs. Les recettes de la DILA proviennent pour l’essentiel des annonces légales, qu’il s’agisse du Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, le BODACC, ou du Bulletin officiel des annonces de marchés publics, le BOAMP. Le projet de loi PACTE va certainement influer sur les recettes de la DILA, puisqu’il prévoit une réduction du coût des annonces légales. J’appelle donc votre attention sur ce point, mes chers collègues, même si je pense que les efforts de rationalisation qui ont été effectués et les excédents qui existent encore permettront à la DILA de passer ce cap. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Olivier Cadic, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Coordination du travail gouvernemental ». Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la cyberdéfense est un enjeu majeur. Pour vous en convaincre, je vous invite à lire l’article paru dans Le Monde d’hier, intitulé « La cyberguerre est déclarée ».
Les menaces sont croissantes, multiples et sophistiquées. À titre d’exemple, pour pirater un casino, des hackeurs sont passés par un thermomètre situé dans un aquarium relié aux ordinateurs de la réception du casino.
La cybermenace est prise en compte par l’État avec la création et la montée en puissance de l’ANSSI. Ses compétences ont été étendues en 2018 suivant les conclusions de la Revue stratégique de cyberdéfense, ainsi que par les dispositions de la loi de programmation militaire 2019-2025 et celles qui sont issues de la transposition de la directive NIS – Network and Information Security.
Pour conduire cette politique, l’ANSSI voit ses moyens progresser en 2019. Ses effectifs passeront de 555 à 595 équivalents temps plein ou ETP, avec 25 emplois au titre de son schéma initial et 17 qui auraient dû être créés en 2018, mais que l’Agence n’a pas été en mesure de financer en raison de la sous-évaluation des crédits de titre 2.
Avec un turn-over de 15 %, l’ANSSI doit recruter une petite centaine de collaborateurs chaque année. Le montant des rémunérations demandées à l’embauche par les jeunes ingénieurs excède désormais celui des cadres qu’ils remplacent. Ces tensions ont conduit également à un rebasage de la masse salariale en titre 2, celle-ci progressant de 8 %.
Hors titre 2, et pour la seule ANSSI, les crédits progressent de 9 % en crédits de paiement et de 35 % en autorisations d’engagement en raison de l’engagement des trois dernières annuités du bail de la tour Mercure où l’ANSSI est installée, et qui viendra à échéance le 1er janvier 2022. Il faut engager dès maintenant les études pour rechercher une nouvelle implantation.
Nous sommes satisfaits de cette évolution des crédits de l’ANSSI. Pour autant, nous devons vous faire part de notre inquiétude et relever deux points de vulnérabilité.
Le premier concerne le retard persistant de mise en œuvre de la politique de sécurité des systèmes d’information de l’État. On peut légitimement être inquiet. Le faible portage politique par les ministres et l’insuffisance des capacités d’investissement de la DINSIC et des DSI ministérielles par rapport aux enjeux de sécurité sont assez consternant.
Nous lançons un cri d’alarme. Les administrations multiplient les programmes informatiques pour réaliser des économies, mais au détriment des investissements de cybersécurité.
Notre second point de préoccupation, ce sont les problèmes structurels de recrutement et de fidélisation des ingénieurs spécialistes de cybersécurité. Rachel Mazuir y reviendra.
Globalement, nous sommes satisfaits de l’évolution des crédits de cette action dans le programme 129. Il faut les maintenir. La commission a exprimé un avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Rachel Mazuir, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Coordination du travail gouvernemental ». Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos complétera celui de notre collègue Olivier Cadic.
Dans un budget marqué par la volonté de réduire la dépense publique, les crédits de l’action n° 02 du programme 129 progressent assez nettement. Il faut s’en réjouir. Ils soutiennent la montée en puissance de trois organismes essentiels pour la sécurité nationale : le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, ou SGDSN, l’ANSSI et le Groupement interministériel de contrôle, ou GIC. Il me semble que nous ne mesurons pas encore très bien en France l’importance de la cybersécurité.
Première observation : nous constatons une intensification de l’activité, signe d’une aggravation des menaces.
Deuxième observation : le GIC est le pivot interministériel de gestion de l’ensemble des techniques de renseignement sur autorisation du Premier ministre et sous le contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, la CNCTR. L’évolution des menaces et les modifications fréquentes du cadre légal ont entraîné une intensification de son activité. En conséquence, il a adapté son organisation et doit réaliser des investissements portant sur ses systèmes informatiques et ses infrastructures.
En 2019, 15 emplois devraient être créés. Toutefois, le Groupement s’est heurté à des difficultés de recrutement liées, premièrement, à la transformation progressive de sa structure d’effectifs, deuxièmement, à l’allongement de la durée d’instruction des demandes d’habilitation – cela décourage certains candidats –, troisièmement, à des conditions d’hébergement insuffisantes pour faire face à la progression des effectifs – un effort budgétaire est toutefois réalisé avec l’acquisition, sur les crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », d’un nouveau site qui devrait être opérationnel en 2020 –, enfin, quatrièmement, à la faiblesse du vivier et à la vive concurrence dans certaines spécialités informatiques.
Ce problème concerne autant le GIC que l’ANSSI, et ce sera ma troisième observation. Les ingénieurs informaticiens continuent d’être très recherchés dans le public, et encore plus dans le privé. L’insuffisance du vivier issu de la formation en école d’ingénieurs ou en université est patente. Cela induit de fortes tensions sur le marché du travail. Les administrations ne pourront suivre sans aligner les rémunérations, mais ce pourrait être un puits sans fond sans une action plus intense pour inciter les universités et les grandes écoles à développer ces filières et à les rendre plus attractives.
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Rachel Mazuir, rapporteur pour avis. C’est un enjeu majeur de société, qui devrait être porté au plus haut niveau de l’État. Nous comptons sur le Premier ministre pour s’en saisir promptement et énergiquement !
En attendant, il convient de doter ces organismes des crédits nécessaires à l’exécution de leur mission.
Comme l’a rappelé Olivier Cadic, la commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». (Mmes Christine Lavarde et Frédérique Puissat, ainsi que MM. Philippe Bonnecarrère et Olivier Cadic applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA). Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au sein de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », la commission des affaires sociales examine le budget et l’activité de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, la MILDECA, chargée de l’élaboration et du pilotage de la politique gouvernementale dans ce domaine.
Le budget de la MILDECA a diminué de 25 % depuis 2012, et cette baisse des crédits se poursuivra l’an prochain, à hauteur de 1,9 %. La commission des affaires sociales a néanmoins donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la MILDECA, qui s’élèveront à 17,5 millions d’euros en 2019, invitant à considérer l’ensemble des moyens mobilisés pour la lutte contre les addictions. Le fonds de concours « drogues », dont un dixième est reversé chaque année à la MILDECA, voit quant à lui son montant stabilisé autour de 13 millions d’euros.
Des données encourageantes ont été publiées l’an dernier : le nombre de fumeurs quotidiens a diminué d’un million et l’on observe des tendances baissières de la consommation de tabac, d’alcool et de cannabis chez les jeunes de 17 ans. Néanmoins, la hausse des addictions comportementales, l’augmentation du nombre de consommateurs quotidiens de cannabis et le développement de l’usage de cocaïne, notamment de « crack », appellent à intensifier la lutte contre les addictions.
En outre, le développement dans l’Hexagone de la prescription de médicaments opioïdes forts invite à une vigilance extrême. Alors que le nombre de décès par surdose et celui des hospitalisations dues à ces médicaments augmentent, l’objectif des autorités sanitaires doit être de garantir l’accessibilité des opioïdes, tout en sécurisant au mieux leur utilisation.
Dans ce contexte, je déplore que l’annonce du nouveau plan national de mobilisation contre les addictions 2018–2022 ait été reportée à maintes reprises depuis plus de six mois. Je m’interroge sur les raisons d’un tel report. En tout état de cause, j’espère que nos observations sur la grande dispersion des mesures des plans précédents auront été prises en considération.
En 2019, à la suite de l’adoption de la loi de programmation de la justice, la répression de l’usage de stupéfiants devrait pouvoir être punie par une amende forfaitaire délictuelle, au même titre que la vente d’alcool aux mineurs. Je tiens pour ma part à rappeler mon attachement aux stages de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants, qui pourront continuer à être mis en œuvre.
Enfin, la politique de réduction des risques et des dommages liés à la consommation de drogues a été complétée ces dernières années par l’expérimentation de deux salles de consommation à moindre risque, à Paris et Strasbourg. La capacité d’accueil de l’unique structure parisienne semble insuffisante pour répondre à l’ampleur des usages de drogues illicites dans la capitale et son agglomération.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour avis. Les bénéfices sanitaires et sociaux de ces structures n’étant plus à prouver, je regrette que seules deux expérimentations aient pu aboutir à travers la France et je serais très favorable à ce que Mme la ministre de la santé modifie le cahier des charges de l’expérimentation afin d’en allonger la durée. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (M. Patrick Kanner applaudit.)
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, pour la mission « Pouvoirs publics ». Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme chaque année, je commencerai mon intervention par dire que parler en trois minutes chrono de la présidence de la République et de son budget, du Conseil constitutionnel et de son budget, de l’Assemblée nationale et de son budget, du Sénat et de son budget, de la Chaîne parlementaire et de son budget, sans oublier la Cour de justice de la République, n’a pas de sens !
Je le dis chaque année, car j’ai connu des périodes dans cette assemblée où l’on pouvait s’exprimer de manière plus précise… (Sourires.) Je vois, monsieur Karoutchi, que vous opinez, je vous en remercie.
Les dépenses de la mission « Pouvoirs publics » restent stables en 2019, puisqu’elles diminuent de 0,04 % – je vois que M. Raynal en est satisfait… Saluons cette contribution à la maîtrise des finances publiques !
Toutefois, pour ce qui est de l’Élysée, vous vous souvenez que du temps de M. François Hollande, les dépenses s’élevaient à 100 millions d’euros par an. (M. Patrick Kanner acquiesce.) Nous en sommes, monsieur Alain Richard, à 103 millions.
M. Claude Raynal. Serait-ce un dérapage ? Une dérive ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis. Je soutiens certaines dépenses de ce budget, celles qui concernent la sécurité, en particulier en matière informatique et de cyberdéfense. Ces dépenses sont tout à fait nécessaires.
En revanche, le fait d’ajouter à ces 103 millions d’euros 2,5 millions en provenance des réserves peut prêter à quelques remarques.
En ce qui concerne le Sénat, que nous aimons tous, bien évidemment, le budget reste stable. Toutefois, il ne doit pas vous échapper, mes chers collègues, que nous faisons appel à nos réserves pour 24,9 millions. Remarquez bien que le budget de l’Assemblée nationale reste également stable, mais qu’elle fait appel à ses réserves à hauteur de 46,9 millions.
Or, mes chers collègues, chacun comprend bien que les réserves ne sont pas inépuisables. Ainsi, ces budgets sont stables de manière optique et nous devons rester très attentifs.
Pour ce qui est du Conseil constitutionnel, des efforts notoires sont faits en matière de personnel pour privilégier les cadres A, compte tenu de la masse de travail que représentent les questions prioritaires de constitutionnalité.
Nous avons eu avec le président du Conseil constitutionnel un débat approfondi sur la question des « portes étroites », dénomination trouvée par un brillant esprit pour parler des contributions envoyées au Conseil par une personne pour lui faire part de son avis et le cas échéant l’influencer. Laurent Fabius nous a indiqué qu’il n’avait pas encore pris de décision quant à la publication de ces contributions. Pour ma part, je crois qu’elles doivent être mentionnées sur le site du Conseil, mais je ne suis pas certain qu’elles doivent être publiées, afin de ne pas entraîner de confusion entre les pièces de la procédure et les divers documents de lobbying.
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis. Vous aurez compris, madame la présidente, que j’allais le faire… Pourtant, je ne vous ai pas parlé de la Chaîne parlementaire, ce sera pour la prochaine fois !
Moyennant l’intéressante stabilité que j’évoquais au début de mon propos, la commission des lois a décidé de donner un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Patrick Kanner, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, pour les programmes « Conseil d’État et autres juridictions administratives » et « Cour des comptes et autres juridictions financières » de la mission « Conseil et contrôle de l’État ». Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2019, les moyens alloués aux juridictions administratives et financières sont en légère progression, comme cela vient d’être évoqué.
Concernant les juridictions administratives, les moyens supplémentaires sont presque exclusivement destinés à la Cour nationale du droit d’asile, CNDA, qui fait face à une hausse sans précédent du nombre des affaires enregistrées : 34 % d’affaires en plus en 2017. La Cour bénéficie ainsi de 122 nouveaux emplois sur les 132 créés, ce qui devrait lui permettre, à la fin de l’année 2019, d’absorber le flux de saisines et d’atteindre les délais légaux de traitement des affaires qui lui sont imposés.
Il reste donc 10 postes à répartir entre les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, qui font figure de laissés pour compte dans ce budget, alors même qu’ils subissent, depuis plusieurs années, une augmentation constante de leur activité liée à la progression des contentieux de masse et à la dévolution de nouvelles compétences par le législateur. Peut-être devrions-nous réaliser une étude pour mesurer l’impact sur le terrain des décisions que nous prenons !
Pour faire face à cette situation, des économies ont été recherchées avec le développement des téléprocédures, de la médiation et le recours aux effectifs d’aide à la décision.
Parallèlement, les juridictions administratives ont mis en place différents outils destinés à renforcer leur efficacité, comme la multiplication des procédures à juge unique ou le dispositif prévu par le décret du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative, appelé aussi décret JADE, qui permet d’évacuer rapidement de nombreuses affaires peu complexes.
Mes chers collègues, je dois vous dire qu’il ne me paraît pas possible d’aller plus loin dans les réformes de procédure, sous peine d’abîmer définitivement la justice administrative, en portant atteinte aux principes mêmes qui la régissent – j’utilise le mot « abîmer », parce qu’il a été employé durant mes auditions.
Quant aux juridictions financières, l’augmentation des crédits en 2019 permettra la création de seulement 15 postes équivalents temps plein travaillé, ce qui permettra de se rapprocher du plafond d’emplois fixé depuis 2010 à 1 840, alors même que les missions de ces juridictions se sont multipliées dans les années récentes.
Il résulte de cette situation un ordonnancement dans la priorité donnée aux travaux, qui se traduit mécaniquement par une concentration des contrôles sur les situations qui présentent le plus de risques, voire par un véritable effet d’éviction sur les missions traditionnelles des juridictions financières, et en particulier sur le contrôle budgétaire. Le recul du contrôle de légalité dans les territoires aboutit, nous a-t-on dit, à ce type de choix – ils sont cornéliens certes, mais doivent tout de même nous inquiéter.
Dans la mesure où les juridictions administratives et financières continuent, tant bien que mal, à afficher des performances satisfaisantes, qui sont en grande partie le résultat du volontarisme et du professionnalisme dont font preuve les magistrats et les personnels de ces juridictions, la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes 165 et 164 de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».
Néanmoins, si nous ne prenons pas de mesures adaptées, ces juridictions connaîtront dans les années à venir de graves difficultés de fonctionnement. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Yves Leconte, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, pour les programmes « Coordination du travail gouvernemental » et « Protection des droits et libertés » de la mission « Direction de l’action du Gouvernement ». Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le dernier gouvernement Cazeneuve comportait 563 membres de cabinet, le premier gouvernement Philippe, 300, soit une baisse de 47 %. Pourtant, alors que la réduction du nombre des membres de cabinet a été faite au nom des économies, la baisse de la dotation budgétaire est limitée à 18 % entre ces deux gouvernements.
Dans le même temps, on constate qu’avec des cabinets réduits l’interministériel fonctionne différemment, parfois moins bien. Les administrations se parlent entre elles, et pas toujours sous un contrôle politique. C’est l’une des raisons qui expliquent que la coordination du travail gouvernemental est un budget important.
La mission « Direction de l’action du Gouvernement » comporte trois programmes : « Coordination du travail gouvernemental », « Protection des droits et libertés » et « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées ». Nous sommes également saisis du budget annexe « Publications officielles et information administrative », qui regroupe les crédits de la direction de l’information légale et administrative, DILA.
Je me limiterai à quelques remarques générales, inspirées des auditions que j’ai menées.
Premièrement, je n’ai pas été complètement convaincu par l’équilibre actuel de France Stratégie et par sa place dans l’architecture gouvernementale. Un instrument de prospective doit être plus indépendant et plus interministériel qu’il ne l’est aujourd’hui. Il faut aussi s’interroger sur la nature de ses liens avec les autres structures qu’il est censé coordonner ; cette question se pose notamment pour le nouveau Haut conseil pour le climat annoncé il y a quelques jours.
Ma deuxième remarque porte sur les loyers budgétaires. Il ne faudrait pas étioler l’esprit de la LOLF, en empêchant d’avoir une analyse par mission et programme des coûts réels pour l’État des différentes opérations.
Troisième sujet, la DILA. Son modèle économique évolue : elle était un opérateur de service public, qui délivrait de l’information, ses missions vont maintenant plus loin. Toutefois, l’équilibre ne semble pas encore stabilisé et il serait intéressant d’assurer une meilleure connexion avec les sites internet des préfectures, des ambassades et des consulats.
Ma quatrième remarque concerne la coordination du travail gouvernemental. Comme MM. Cadic et Mazuir, je crois qu’il est nécessaire de maintenir les crédits de l’ANSSI et du GIC. Assurer des moyens suffisants au GIC est indispensable pour sécuriser la mise en œuvre des techniques de renseignement. C’est une condition indispensable pour la crédibilité de la loi sur le renseignement.
Cinquièmement, il est indispensable que les autorités administratives indépendantes disposent d’un personnel qu’elles choisissent. Pour cela, elles doivent totalement maîtriser leur budget et ne pas être soumises à des régulations budgétaires.
Parmi les autorités administratives indépendantes, la CNIL doit faire face cette année à la mise en place du règlement européen sur la protection des données personnelles, le RGPD, qui est un enjeu pour les collectivités locales…