M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 5.
Article 6
I. – Après le II de l’article L. 161-31 du code de la sécurité sociale, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – Par dérogation au I, cette carte électronique peut contenir des informations nominatives relatives à la personne qui remplit auprès du titulaire de la carte la qualité de proche aidant au sens de l’article L. 3142-22 du code du travail ou de personne de confiance au sens de l’article L. 1111-6 du code de la santé publique ou de l’article L. 311-5-1 du code de l’action sociale et des familles. Ces informations sont intégrées sur simple demande de la personne titulaire de la carte ou de la personne agissant en son nom, cosignée par la personne désignée. Elles peuvent être retirées à tout moment à la demande de l’une d’entre elles. »
II. – Il est notifié à tout bénéficiaire de l’allocation ou des prestations prévues à l’article L. 821-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 232-1 et L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles, au moment de la reconnaissance de ses droits, la possibilité qu’il a de désigner à sa caisse d’assurance maladie d’affiliation une personne de confiance au sens de l’article L. 1111-6 du code de la santé publique ou de l’article L. 311-5-1 du code de l’action sociale et des familles. Cette désignation est faite par écrit et cosignée par la personne désignée. Elle est révisable et révocable à tout moment à la demande de l’une d’entre elles.
III. – Toute personne ayant la qualité de proche aidant ou de personne de confiance est destinataire d’un guide de l’aidant portant à sa connaissance l’ensemble des droits dont il peut bénéficier ainsi que les ressources disponibles pour l’accompagner.
Un site internet d’information, de renseignement et d’orientation à destination des proches aidants et des aidants familiaux est mis en place.
IV. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous abordons la discussion d’un article important, qui traite des modalités d’information relatives aux proches aidants.
Plusieurs de nos collègues se sont étonné que la commission des affaires sociales propose d’intégrer à la carte Vitale de la personne aidée des données relatives à l’identité de son proche aidant, et réciproquement.
Je m’interrogeais moi-même sur ce point avant les auditions, mais, après avoir travaillé et y avoir réfléchi, il me semble que la carte Vitale est un vecteur de support pertinent pour ces informations. Elle rassemble certaines données pertinentes relatives au parcours de soins de la personne. Nous estimons que, à ce titre, l’identité de l’aidant y a toute sa place.
Par ailleurs, la proposition que nous formulons est parfaitement conforme au droit en vigueur puisque, aux termes du 7° de l’article 3 de l’arrêté du 14 mars 2007 relatif aux données contenues dans la carte Vitale, cette dernière peut contenir « les données personnelles concernant les coordonnées d’une personne à prévenir en cas de nécessité si le titulaire de la carte y a consenti ». La question du consentement se pose évidemment, comme l’ont rappelé les représentants de la CNIL lorsque nous les avons auditionnés.
L’article 6 ne présente donc aucune menace pour la confidentialité des données personnelles et identifie un support parfaitement pertinent.
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, sur l’article.
Mme Jocelyne Guidez. Les précédents articles de la proposition de loi abordaient, coordonnaient et développaient les droits des proches aidants.
L’article 6 s’intéresse à leur vie, leur existence, leur accompagnement et leur reconnaissance. Il vise à les détecter dès que le diagnostic de la personne qu’il accompagne est posé. Cette détection permettra de leur donner une existence et de ne plus les rendre invisibles. Ainsi identifiés, ils pourront être destinataires des informations nécessaires à leur parcours d’aidant.
Le duo aidant-aidé sera identifié sur les cartes Vitale des deux intéressés. Cela légitimera la place de l’aidant auprès des médecins et pharmaciens de l’aidé, par exemple. Cela évitera le « suraccident » en permettant aux services de secours de détecter que la personne qu’ils ont en charge, potentiellement incapable de s’exprimer sur le moment, apporte un soutien vital à une personne. Ainsi, l’aidé pourra être contacté et pris en charge.
Cet article prévoit également la mise en place d’une plateforme numérique. Celle-ci proposera un parcours personnalisé à l’aidant en lui posant trois questions : qui êtes-vous, où habitez-vous et quel type de personnes aidez-vous ?
L’aidant sera alors renvoyé vers les bons services de sa commune et de son département, l’association de proximité qui pourrait l’assister dans sa vie d’aidant, et l’association la plus pertinente concernant le handicap ou la dépendance de la personne qu’elle assiste.
Madame la secrétaire d’État, trop d’information tue l’information, et l’isolement tue les proches aidants ! Ils doivent être soutenus.
Le guide de l’aidant, payant, de plus de cent pages, n’est pas satisfaisant, pas plus que le site internet pour les personnes âgées, qui ne propose pas de personnalisation. C’est pourtant en proposant un parcours « clé en main » que nous pourrons accompagner efficacement les aidants. Encore une fois, je regrette l’absence de débat avec le Gouvernement qui ne propose aucun compromis.
Détection, accompagnement et reconnaissance, tels sont les enjeux de cet article, madame la secrétaire d’État. Les dispositions concernant la carte Vitale auraient dû vous intéresser. Sans proposition de votre part, ce sera donc l’ensemble du dispositif.
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, sur l’article.
Mme Nadine Grelet-Certenais. En commission, nous avions émis quelques réserves sur cette proposition, parce que nous craignions de potentielles dérives liées à l’utilisation de cette carte d’aidant. Nous avions suggéré d’utiliser plutôt le DMP, le dossier médical partagé, qui offre, lui, toutes les garanties en termes de sécurisation des données personnelles.
Toutefois, on nous a rétorqué en commission que le DMP n’était pas encore complètement mis en place et que notre proposition devrait attendre, car il y avait urgence à trouver assez rapidement un support. Nous l’avons entendu, et, même si nous ne sommes qu’à moitié satisfaits par cette mesure, nous allons la voter.
M. le président. L’amendement n° 14, présenté par M. Henno, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après les mots :
dérogation au I,
insérer les mots :
et dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. Le présent amendement tend à prévoir que la matière visée par l’article 6 soit explicitée par un décret en Conseil d’État, qui préciserait, premièrement, l’organisme destinataire de la demande de la personne aidée d’intégrer le nom de son aidant au sein de sa carte Vitale, et, deuxièmement, les modalités de communication du guide du proche aidant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. Il est déjà prévu au grand IV de l’article 6 qu’un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.
Cet amendement étant satisfait, le Gouvernement en sollicite le retrait.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 14 est-il maintenu ?
M. Olivier Henno, rapporteur. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 13, présenté par M. Henno, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, ou à la personne auprès de laquelle le proche aidant ou la personne de confiance intervient
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir une réciprocité dans le mécanisme introduit par le texte sur la possibilité d’intégrer le nom de la personne aidante sur la carte Vitale de la personne aidée. L’amendement tend à élargir le champ du mécanisme, en permettant à l’aidé de figurer sur la carte Vitale de l’aidant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. La mention sur la carte Vitale de l’aidant est une option intéressante. Néanmoins, cette mesure n’aura de sens que s’il peut exister un mécanisme coordonné entre les différents acteurs, notamment les professionnels médico-sociaux concernés, permettant alors de déclencher automatiquement une alerte et d’assurer une prise en charge de la personne aidée.
Ce sujet est plus complexe qu’il n’y paraît. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. L’amendement n° 15, présenté par M. Henno, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
1° Supprimer les mots :
à sa caisse d’assurance maladie d’affiliation
2° Après les mots :
au sens
insérer les mots :
et selon les modalités
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser le destinataire de la désignation de la personne de confiance d’une personne qui n’est pas admise en soins hospitaliers ou médico-sociaux. La caisse primaire d’assurance maladie n’étant pas le bon interlocuteur, il est préférable de renvoyer au médecin traitant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. L’amendement vise à modifier le destinataire de la déclaration de la personne de confiance.
La caisse primaire d’assurance maladie n’étant pas le destinataire le plus pertinent, il est en effet plus judicieux que cette information soit adressée au médecin traitant ou bien, par exemple, la direction de l’établissement accueillant la personne.
Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour explication de vote.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Nous nous sommes interrogés sur l’intérêt de mettre le médecin traitant à la place de la caisse primaire d’assurance maladie. Que se passe-t-il lorsqu’une personne n’a pas de médecin traitant ? J’ai reçu les témoignages d’infirmières relatant plusieurs cas de patients dont l’état de santé était très dégradé et qui n’avaient pas de médecin traitant. Ne faudrait-il pas garder tout de même les deux destinataires de ce type d’informations ?
M. le président. L’amendement n° 16, présenté par M. Henno, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Supprimer les mots :
ou de personne de confiance
II. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
et des aidants familiaux
par les mots :
leur proposant un parcours individualisé et territorialisé
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement vise à préciser l’objet du site internet créé par le texte, afin que ce dernier remplisse réellement et pratiquement la mission de soutien individuel que le législateur lui assigne.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. Nous partageons l’objectif de renforcer l’information des aidants mais, dans les faits, comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, les outils et dispositifs existent déjà. Ils vont évoluer et permettre de répondre concrètement aux différents besoins, à la suite de la concertation.
Je tiens à rappeler que les centres locaux d’information et de coordination, ainsi que les CCAS, les centres communaux d’action sociale et les CIAS, les centres intercommunaux d’action sociale, sont également investis dans l’information et l’orientation des aidants.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 6, modifié.
(L’article 6 est adopté.)
Article additionnel après l’article 6
M. le président. L’amendement n° 10, présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, MM. Kanner et Daudigny, Mmes Féret, Jasmin et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er février 2019, un rapport sur la mise en place d’une politique publique spécifique de soutien et d’accompagnement notamment scolaire à l’égard des jeunes aidants.
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Même si je sais que ce type de demandes ne reçoit jamais de réponse très favorable, cet amendement tend à demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement.
En effet, une enquête inédite, réalisée par Ipsos Public Affairs et Novartis en octobre 2017, et commanditée par l’association Jeunes AiDants Ensemble et APF France handicap, a montré la nécessité de se saisir de la problématique des jeunes aidants, qui a un impact décisif dans le développement et l’insertion scolaire et sociale des enfants et des adolescents dans cette situation.
Nous demandons un rapport au Gouvernement visant à définir les contours d’une politique publique capable d’accompagner les jeunes aidants dans leur quotidien. Être proche aidant adulte est déjà une situation pour le moins difficile à gérer sur les plans personnel et professionnel, mais être jeune aidant scolarisé ou en études l’est d’autant plus.
Pour le jeune qui se trouve en situation d’aidant, il s’agit d’un enjeu crucial pour sa vie personnelle, scolaire ou professionnelle. Quelle égalité des chances pour ces enfants ? Près de la moitié d’entre eux affirment apporter leur aide quant à la gestion de la maison ou l’aide à la toilette, par exemple. Ces tâches quotidiennes ne sont pas sans incidence, vous le savez, sur le parcours scolaire de ces jeunes, qui se retrouvent bien souvent isolés et en décrochage.
Près d’un jeune aidant sur deux est favorable à ce que l’on lui propose de l’aide pour s’occuper de la personne aidée. Trois champs d’aides sont évoqués prioritairement : des temps d’échange avec d’autres jeunes aidants, tout d’abord, l’appui d’une aide familiale, ensuite, et l’aménagement du temps scolaire ou universitaire, enfin.
Ce rapport pourrait servir de base à l’intégration de mesures dédiées aux jeunes proches aidants, notamment dans le cadre de l’examen parlementaire du projet de loi pour une école de la confiance, présenté il y a peu au Conseil supérieur de l’éducation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Olivier Henno, rapporteur. L’argumentation de notre collègue est intéressante et assez pertinente. Toutefois, la jurisprudence constante de la commission est de ne pas multiplier les demandes de rapports.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, pour tenter de vous rassurer, je précise que la question des jeunes aidants est bien prise en compte dans la concertation.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 10.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 7
I. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour les organismes de sécurité sociale de l’application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
II. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. – (Adopté.)
Intitulé de la proposition de loi
M. le président. L’amendement n° 17, présenté par M. Henno, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer les mots :
: un enjeu social et sociétal majeur
La parole est à M. le rapporteur.
M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement vise à simplifier l’intitulé de la proposition de loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. Il me semble que le titre du présent texte reprend les mots prononcés par Agnès Buzyn lors de l’examen de la proposition de loi de M. le député Pierre Dharréville, le 8 mars dernier. Cet amendement vise à les supprimer.
Sur cette proposition, je ne puis que m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. En conséquence, l’intitulé de la proposition de loi est ainsi modifié.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.
Mme Jocelyne Guidez. Madame la secrétaire d’État, vous ne pouvez pas mesurer mon désarroi, au moment où le Sénat s’apprête à adopter ma proposition de loi.
Votre intervention, et l’expression de vos positions sur chaque amendement et chaque article montrent l’absence de réelle considération de ce gouvernement pour l’initiative parlementaire. Les aidants ne s’y tromperont pas.
Vous n’avez présenté aucun amendement. Ce discours stérile n’est pas plus à la hauteur de l’enjeu que le renvoi en commission que vous aviez fait adopter au début de l’année 2018 sur le texte du député Pierre Dharréville.
Malgré la présentation en juin dernier de mon initiative auprès du cabinet de Mme la ministre des solidarités et de la santé, votre collègue avouait, au début du mois d’octobre, devant mon groupe politique, qu’elle n’avait pas connaissance de son contenu. Pourtant, mes demandes de coconstruction étaient régulières. J’ai dû attendre quarante-huit heures avant la séance publique, et après que les arbitrages ont été rendus, pour que le Gouvernement me propose d’en discuter ! C’est tout bonnement de l’amateurisme et de l’irrespect pour le Parlement et, plus encore, pour les proches aidants.
Ce texte sera examiné le 6 décembre prochain à l’Assemblée nationale. Oserez-vous tenir votre majorité pour qu’elle le retoque ? Oserez-vous asservir à ce point l’Assemblée nationale ? Oserez-vous expliquer à votre majorité qu’il faudra, la veille du Téléthon, refuser d’apporter le soutien, l’assistance et l’accompagnement réclamés par les proches aidants ? Oserez-vous inscrire dans le projet de loi Dépendance des mesures identiques, ayant la même finalité, que celles que vous avez balayées d’un revers de main, une année auparavant ? Oserez-vous donc, pour des raisons politiques de recherche de paternité d’un texte, ne pas entendre la détresse des proches aidants et prendre cette population en otage, au point de les laisser dans l’isolement ?
Madame la secrétaire d’État, si ce projet est le vôtre, je vous souhaite bien du courage ! Du courage pour regarder en face les personnes concernées, et leurs représentants, en leur disant que vous entendez leurs préoccupations, alors que vous avez bloqué l’adoption des mesures qu’ils demandent !
J’en appelle donc à la raison. J’en appelle surtout à l’intime conviction des députés de votre majorité, pour qu’ils comprennent que le courage politique, c’est de se battre pour ses convictions et l’intérêt général. S’ils n’arrivent pas à nous rejoindre sur cet enjeu humain et transpartisan, alors la démocratie meurt à petit feu, car les Français, eux, soutiennent ces mesures.
Ici, il ne s’agit pas d’ouvrir la boîte de Pandore, bien au contraire. Il s’agit d’apporter simplement des mesures de justice, attendues, souhaitées, désirées et salutaires.
Sachez, madame la secrétaire d’État, que je suis déterminée. Trop de proches aidants attendent cette loi. Aujourd’hui, le Gouvernement n’a pas été capable de me démontrer que mes propositions n’étaient pas acceptables.
Mes chers collègues, votons d’une seule voix ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera cette proposition de loi, car, comme cela a été souligné, c’est un combat que notre collègue Pierre Dharréville a mené à l’Assemblée nationale, à la suite d’une « mission parlementaire flash ».
D’ailleurs, sa proposition de loi a été rejetée, sous le prétexte fallacieux qu’il manquait des données suffisamment précises quant au coût des mesures proposées. Je me réjouis que le Sénat n’ait pas pris en compte cette dimension au moment d’examiner la proposition de notre collègue Jocelyne Guidez.
Hélas, une même unanimité ne s’est pas exprimée, hier, sur notre proposition de loi concernant l’allocation aux adultes handicapés. Pourtant, le but de ce texte était aussi d’apporter une aide et d’améliorer les conditions de vie des personnes en situation de handicap.
Au sein du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, nous n’avons ni a priori ni position dogmatique ; quand une proposition de loi nous semble juste, nous la votons, et avec un certain enthousiasme !
En revanche, je tiens moi aussi à regretter l’attitude du Gouvernement, qui me rend extrêmement perplexe quant au rôle attribué à nos deux assemblées, à l’Assemblée nationale comme au Sénat.
Le président de la commission des affaires sociales, Alain Milon, l’a dit avec beaucoup de force et de gravité, mais je pourrais ajouter un exemple à ceux qu’il a cités. Nous avons été à l’initiative d’une bataille portant sur les retraites agricoles ; sur ce sujet, nous avons recueilli, ici, l’unanimité ; le Gouvernement nous a alors promis d’élaborer un texte de loi qui, tout en allant dans le même sens, serait bien meilleur… Résultat : les retraités agricoles attendent encore ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Cette attitude doit absolument cesser. Le dogmatisme se trouve du côté du Gouvernement, qui se moque pas mal des parlementaires et ne légifère que pour mener des réformes à sa guise, en convoquant des sortes de collectifs – lesquels regrouperaient des experts – et en ne donnant pas la parole aux parlementaires, qu’ils siègent à l’Assemblée nationale ou au Sénat. Or, cela, ce n’est pas possible dans un pays démocratique ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, mes premiers mots seront pour féliciter ma collègue Jocelyne Guidez de sa détermination et de son engagement pris – et tenu – à l’endroit de ces milliers d’aidants familiaux, pour lesquels nous formons une pensée et dont nous partageons le quotidien.
Madame la secrétaire d’État, vous avez ici, au Sénat, la chambre de la représentation des territoires, autrement dit des élus nationaux en lien direct avec la proximité. Vous êtes témoin ce soir d’un fait exceptionnel, d’une belle unanimité : le pays entier vous parle à travers nos voix ! (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Contrairement aux membres du Gouvernement, nombreux sont, ici, ceux qui ont occupé des fonctions d’élu local : conseiller municipal, maire, conseiller départemental, conseiller régional. (Applaudissements sur les mêmes travées. – Mme Victoire Jasmin applaudit également.)
Ils ont été confrontés à ceux qui ne sont rien. Leur quotidien ne ressemble pas au vôtre, celui du monde de la rationalité et de l’efficacité, où l’humanité se traite au moyen de tableurs Excel. Aussi, écoutez-les, madame la secrétaire d’État ! Écoutez ces élus qui savent, qui connaissent et qui touchent du doigt une réalité difficile à percevoir d’en haut !
Cette loi, vous auriez pu l’accepter comme un moyen, comme un texte vous facilitant la recherche de solutions visibles, palpables et emblématiques, comme une façon de dire aux oubliés de votre « nouveau monde » que vous pensez à eux, comme une belle occasion de faire taire l’idée que votre premier de cordée serait le « président des riches ».
Un immense Martiniquais, d’envergure universelle, qui me guide au quotidien – je veux parler d’Aimé Césaire –, nous rappelait tous les jours cette belle formule : « […] Un pas, un autre pas, encore un autre pas et tenir gagné chaque pas ! » Cette proposition de loi colle à cette maxime raisonnable ; elle est pleine de bon sens.
Les aidants souffrent, madame la secrétaire d’État. Entendez-les ! Écoutez-les ! Ils sont, eux, les derniers de cordée, et il ne faudrait pas qu’ils dévissent. Ils apportent un soutien indéniable, humain et, par leur travail, ils soulagent l’État d’un « pognon de dingue », qu’il aurait fallu mettre dans des politiques publiques de la dépendance.
Cette loi mérite notre soutien. Ces citoyens en souffrance aussi ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour explication de vote.
Mme Nassimah Dindar. Permettez-moi tout d’abord de féliciter, comme l’ensemble de mes collègues, Jocelyne Guidez et Olivier Henno de tout le travail réalisé lors des auditions, au cours desquelles nous avons entendu de nombreuses associations.
Choquée par votre discours introductif, madame la secrétaire d’État, j’ai souhaité dire ces quelques mots, moi, jeune sénatrice. Si l’aptitude du Sénat à créer des droits nouveaux est autorisée, alors votre discours a été particulièrement heurtant pour les élus que nous sommes.
Simone de Beauvoir, que nous avons tous lue, écrivait en 1960 : « L’individu ne reçoit une dimension humaine que par la reconnaissance d’autrui ». Je crois que, aujourd’hui, la politique gouvernementale gagnerait en dimension humaine par la reconnaissance de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)