M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Bien entendu, le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi.
Je remercie de nouveau Mme Jocelyne Guidez de la qualité de son travail et, comme je l’ai indiqué précédemment, de la minutie de ses interventions. Ce texte est véritablement réfléchi.
Je ne reviendrai pas sur le sujet, madame la secrétaire d’État, mais je regrette moi aussi votre intervention et la position retenue par le Gouvernement.
Néanmoins, étant de nature optimiste, je soulignerai aussi que, quelle que soit la suite des événements, le sujet est sur la table. Aux associations représentant les nombreux aidants qui, aujourd’hui, nous écoutent, je veux dire que le combat continue et qu’il y aura d’autres échéances ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – Mme Victoire Jasmin applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour explication de vote.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Je tiens, bien évidemment, à remercier nos collègues de tout le travail accompli et des riches échanges que nous avons eus autour de cette proposition de loi.
C’est une vraie reconnaissance pour ses aidants, qui, dans la situation où ils se trouvent, ont besoin d’un statut et d’un message fort. Le texte est aussi un moyen de sensibiliser les employeurs et les directeurs des ressources humaines qui, dans les milieux professionnels, n’ont pas la possibilité d’apporter une réponse officielle à ces travailleurs en grande difficulté.
L’objectif est donc bien d’offrir une réelle possibilité de choix à la personne qui veut, à un moment donné, pouvoir aider l’un de ses proches. Évidemment, il faut réunir les conditions pour cela, étant rappelé – cela a été dit – qu’il s’agit, non pas de déconnecter ces personnes du monde de l’emploi, mais bien au contraire de les aider à concilier leur vie professionnelle et leur vie personnelle.
Donc bravo à tous, mes chers collègues, et, bien évidemment, nous voterons en faveur de la proposition de loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour explication de vote.
Mme Laure Darcos. À mon tour, je souhaite remercier Jocelyne Guidez et Olivier Henno de cette proposition de loi, dont la valeur symbolique est très forte. La prise de conscience est là ! Je déplore moi aussi la position du Gouvernement, mais je pense que notre vote de ce soir aura un écho bien au-delà de notre assemblée.
Je voudrais relier le présent débat à celui que nous allons avoir, tout de suite après, sur la scolarisation des enfants atteints de handicap. En effet, combien d’entre nous, élus locaux, ont eu face à eux certains de ces aidants, en l’occurrence des parents désespérés de voir que l’un ou plusieurs de leurs enfants ne pouvaient pas encore accéder à une scolarisation normale ?
Prenons le cas d’un restaurateur – Jocelyne Guidez et moi-même en connaissons un – qui se rend le matin à l’école, à qui l’on explique que l’on ne peut pas accueillir son enfant ce jour-là et qui, pourtant, doit tenir son restaurant… De tels exemples, madame la secrétaire d’État, ne peuvent pas nous laisser totalement insensibles.
Je ne sais pas dans combien de temps vous allez légiférer sur les aidants. Mais, aujourd’hui – mon collègue Philippe Mouiller l’a souligné –, ces aidants nous écoutent. Combien de situations personnelles et professionnelles sont en jeu ? Nous parlons de personnes qui se battent pour leurs parents ou leurs enfants, pour leur permettre d’avoir une vie décente et d’être accompagnés.
Bien évidemment, je voterai cette proposition de loi, et des deux mains, en espérant que toute l’assemblée ici présente fera de même. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour explication de vote.
M. Guillaume Arnell. Je ne dirai que quelques mots, monsieur le président, en tant que seul représentant du RDSE, mais je me suis longuement exprimé à la tribune lors de la discussion générale.
Mes chers collègues, il est des moments où l’on se sent bien au sein de cet hémicycle ; et nous en vivons un !
Je suis ému d’avoir pu prendre part longuement à ce débat, pour avoir été, comme d’autres, j’en suis certain, personnellement concerné par cette situation. Je crois que l’exemple que nous donnons aujourd’hui, par-delà nos différentes formations politiques, est un bel exemple de ce que nous pouvons faire ensemble, pour les autres, sans dogmatisme, stigmatisation ou consigne.
Le groupe du RDSE adresse ses félicitations à Jocelyne Guidez et au rapporteur, qui nous a éclairés tout au long de ces débats, et, bien entendu, nous voterons la proposition de loi à l’unanimité. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Je voudrais à mon tour féliciter ma collègue Jocelyne Guidez, ainsi que le rapporteur Olivier Henno, de cette proposition de loi. C’est une lumière pour toutes les personnes en souffrance ayant besoin d’un aidant et pour les aidants eux-mêmes, qui s’investissent dans une tâche souvent très lourde. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)
Comme mon collègue Jean-Pierre Decool l’a indiqué lors de la discussion générale, le groupe Les Indépendants – République et Territoires, s’associant à l’ensemble des groupes qui se sont déjà exprimés, votera la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Antoine Karam, pour explication de vote.
M. Antoine Karam. Ma collègue du groupe La République En Marche ayant dû se retirer, elle m’a demandé d’exprimer, au nom de mon groupe, une abstention positive.
Néanmoins, mes chers collègues, vous aurez observé que, depuis le début de l’après-midi, je porte, à la place du cœur, ce badge. (M. Antoine Karam désigne le badge du collectif « Je t’Aide » épinglé sur sa veste.)
Mme Catherine Morin-Desailly. Votez le texte, alors !
M. Antoine Karam. Pour ma part, à titre personnel, je vais voter pour. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
En effet, je me considère comme un proche aidant. Voilà quatre jours, mon frère aîné, atteint d’une maladie irréversible, la maladie d’Alzheimer, a fêté ses soixante-douze ans. C’était un homme fort, puissant, un animateur hors pair, qui dirigeait les maisons de la culture sur mon territoire ; aujourd’hui, c’est un homme couché, qui ne reconnaît plus personne.
Je me considère comme un bénévole, un proche aidant, et, lorsque je retournerai ce week-end sur mon territoire, je lui dirai que des femmes et des hommes, aujourd’hui, contribuent à aider ceux dont on pense qu’ils ne pourront jamais retrouver une vie normale.
C’est pour cette raison que, pour ma part, à titre personnel, je voterai en faveur de ce texte – avec vous, mes chers collègues. (Applaudissements prolongés. – Mme Victoire Jasmin, M. Guillaume Arnell, M. Pierre Ouzoulias et Mmes et MM. les sénateurs du groupe Union Centriste se lèvent pour saluer l’orateur.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. Je voudrais revenir sur quelques propos qui ont été tenus.
Venant tout juste d’être nommée au Gouvernement, peut-être est-il nécessaire que je rappelle d’où je viens. J’ai été élue locale : adjointe sur une commune, vice-présidente d’un centre communal d’action sociale et conseillère communautaire. J’ai travaillé dans la fonction publique et dans le secteur privé, ayant reçu une formation de travailleur social. J’ai donc plus de vingt-cinq ans d’expérience professionnelle, au contact, notamment, de publics âgés et de personnes handicapées. Je suis également ancienne députée, fonction que j’ai quittée voilà quinze jours.
Je veux également rappeler que le travail parlementaire porte ses fruits. Voilà deux semaines, une proposition de loi relative au don du sang déposée sur l’initiative du groupe Les Républicains a été adoptée. Il en est allé de même pour une proposition de loi relative aux dons de jours pour les aidants familiaux. Pourtant, ces deux textes émanaient de l’opposition.
Il ne s’agit donc absolument pas d’un jeu de positions. Dès lors que les idées sont utiles et que la rédaction convient, nous adoptons les propositions de loi.
Je ne puis non plus laisser dire que le travail des parlementaires est limité. J’en veux pour preuve le travail de coconstruction que j’ai pu mener, en tant que rapporteur pour l’Assemblée nationale, sur le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dit « ÉLAN », avec Mme Dominique Estrosi Sassone. Nous sommes partis d’un texte comportant 65 articles pour aboutir à une CMP conclusive à 234 articles. Le travail parlementaire existe donc bien.
Enfin, le Gouvernement n’est pas opposé à cette proposition de loi. (Protestations.) Il y a, autour de la question des proches aidants, un enjeu social et sociétal réel, majeur, appelant une méthode de travail…
M. Pierre Ouzoulias. Comme si nous n’en avions pas !
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État. … et des solutions qui soient globales, mais surtout d’envergure. La façon de travailler de notre gouvernement repose, en effet, sur la concertation et l’écoute de l’ensemble des acteurs. (Nouvelles protestations.)
Mme Catherine Morin-Desailly. Bien sûr ! Nous ignorons ces méthodes, au Sénat !...
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour explication de vote.
M. Hervé Marseille. À mon tour, je remercie nos collègues Jocelyne Guidez et Olivier Henno, ainsi que toutes celles et tous ceux qui les ont accompagnés dans cette démarche, ayant abouti à un travail reconnu, comme en témoignent les réactions sur l’ensemble des travées de cette assemblée.
J’ai bien écouté les propos de Mme la secrétaire d’État. Je n’en suis pas étonné – malheureusement, ici, au Sénat, nous avons l’habitude de ce genre de positionnements –, mais ils ne me convainquent pas pour autant.
Rares sont les textes qui passent en première lecture au Sénat. C’est un signe, mes chers collègues. Il n’y en a eu pratiquement aucun et, à ce titre, d’ailleurs, nous avons eu un mois de septembre extrêmement sympathique. (Sourires.)
Malheureusement, nous sommes habitués à ne pas être entendus, même quand une unanimité se dessine sur un texte. Pourquoi ? Tout simplement parce que la majorité à l’Assemblée nationale voudra élaborer son propre texte et que l’on s’y conforme.
Nous savons très bien que ces décisions ne sont pas prises au ministère ou au sein de la majorité, qui n’aura qu’à voter. Elles sont prises ailleurs, principalement à Bercy. Je suis désolé, je dois le dire, de cette situation. Dans ce pays, il y a un Parlement, et il cherche à travailler. Nous avons tendu la main à de nombreuses reprises. Nous n’arrivons pas à obtenir le dialogue que nous demandons et, pour le bien public, je le regrette.
On nous annonce une réforme institutionnelle ; soyez assurée, madame la secrétaire d’État, que nous y serons particulièrement attentifs.
Cette réforme consiste à diminuer le nombre de parlementaires. C’est tellement ennuyeux, les parlementaires ! Rendez-vous compte, ils discutent, ils présentent des amendements, ils ne votent pas… (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain.) Pourtant, ce n’est pas compliqué : il suffit de voter les textes apportés par le Gouvernement. Pourquoi perd-on du temps à discuter ?
Heureusement, à l’Assemblée nationale, un groupe de trois cents et quelques députés vote les textes sans même les regarder ! Et l’on n’en parle plus ! (Sourires.)
La loi ÉLAN est évoquée. Bien sûr ! On a commencé par diminuer le montant des aides personnalisées au logement et, ensuite, on a discuté du reste… Franchement, tout cela est désolant ! Pour des problèmes d’esthétique et de cosmétique politiques, on passe à côté de décisions qui rassemblent et vont dans le sens du bien public.
J’en suis désolé pour vous, madame la secrétaire d’État, mais c’est vous qui êtes présente aujourd’hui pour répondre, et voyez que ce texte fait l’unanimité. Les conditions dans lesquelles nous avons travaillé dessus avec ma collègue Jocelyne Guidez ne sont pas convenables. Il n’y a pas de respect !
Je puis vous dire – je m’exprime ici, aussi en ma qualité de président de groupe – que, pour le bien public, pour le respect du Sénat et du Parlement, c’est très regrettable.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Hervé Marseille. Aucune de vos explications ne permettra de comprendre comment, sur un texte comme celui-là, porteur d’une volonté générale et commune, il a été impossible d’aboutir aujourd’hui ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Union Centriste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 7 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 323 |
Pour l’adoption | 323 |
Le Sénat a adopté. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent longuement.)
Mme Jocelyne Guidez. Merci à tous !
4
Scolarisation des enfants en situation de handicap
Débat organisé à la demande du groupe Union Centriste
M. le président. L’ordre du jour appelle le débat portant sur la scolarisation des enfants en situation de handicap, organisé à la demande du groupe Union Centriste.
Mes chers collègues, je vous rappelle que ce débat a été inscrit au sein d’un espace réservé et que je devrai, quoi qu’il arrive, lever la séance à vingt heures quinze.
La parole est à Mme Annick Billon, pour le groupe auteur de la demande.
Mme Annick Billon, pour le groupe Union Centriste. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, mes chers collègues, aujourd’hui, en France, près de 320 000 enfants en situation de handicap sont scolarisés ; ils étaient seulement 100 000 en 2006.
Nous pouvons nous féliciter de l’impact positif qu’a eu la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, loi que le groupe centriste d’alors avait votée à l’unanimité au Sénat.
Cette grande question de la scolarisation des enfants en situation de handicap est fondamentale. En effet, elle nous interroge bien au-delà du monde éducatif et du monde des accompagnants spécialisés. Elle vient questionner la capacité d’inclusion de notre société, notre rapport à ce qui est différent. En cela, la réponse des pouvoirs publics aux défis qui restent à relever sera légitimement scrutée avec attention.
Je tiens, à ce titre, à remercier la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, Catherine Morin-Desailly, d’avoir encouragé la tenue de ce débat aujourd’hui.
Si le nombre d’enfants et d’adolescents en situation de handicap a beaucoup progressé au cours des dernières années, il convient toutefois de regarder par-delà les chiffres, toujours nécessaires, mais jamais suffisants.
De quoi parlons-nous quand nous parlons de la scolarisation d’un enfant handicapé ? Nous parlons non seulement d’enfants, mais aussi de parents et de familles et de leur vie quotidienne. Nous nous devons, mes chers collègues, de toujours garder à l’esprit leur difficile réalité.
Lorsque nous parlons d’enfants en situation de handicap, n’oublions pas qu’il existe de multiples situations en la matière : handicaps moteurs, troubles « dys », autisme, et bien d’autres encore. Très différentes, ces situations nécessitent des réponses adaptées.
Lorsque nous parlons de scolarisation, veillons à considérer l’école dans son ensemble. Il s’agit en effet d’adapter les établissements, quels que soient leur implantation et leur degré, afin qu’ils puissent accueillir le plus grand nombre d’enfants à même de bénéficier de l’enseignement ordinaire.
Enfin, lorsque nous parlons de ces situations, nous nous devons aussi de prendre en compte ce qui se passe au-dehors des murs de l’école, mais en affecte la vie quotidienne.
Je souhaite mentionner ici la place des familles et des aidants, tous deux essentiels à l’équilibre de l’enfant, donc à son intégration scolaire et sociale.
J’ai été personnellement interpellée, dans mon département de Vendée, sur la place accordée aujourd’hui aux enfants handicapés à l’école. Ainsi, une chef d’établissement de Fontenay-le-Comte m’a alertée sur les difficultés que rencontre au quotidien le corps enseignant : manque de moyens, manque d’encadrement, manque d’instituts médico-éducatifs. Cette addition de manques se révèle préjudiciable à tous les enfants, avec ou sans handicap, comme aux enseignants.
Elle m’a également mise en garde sur la difficile coordination entre les classes ordinaires et les dispositifs ULIS, les unités localisées pour l’inclusion scolaire. Les élèves ULIS sont en effet intégrés dans les classes, mais sans être comptabilisés dans les effectifs, ce qui pose des problèmes d’ouverture ou de fermeture de classes. Je suis sûre que nombre de mes collègues ici présents seraient facilement à même de nous présenter des exemples similaires.
Cette même chef d’établissement m’a également fait part de son indignation quant à la situation salariale des AESH, les accompagnants des élèves en situation de handicap, qui ont remplacé les AVS, les auxiliaires de vie scolaire. C’est là un point crucial de la question du handicap en milieu scolaire. En effet, comment imaginer qu’un enfant en situation de handicap puisse s’intégrer à l’école sans l’aide d’une personne spécialisée ?
Or comment recruter un nombre suffisant de ces personnes de manière pérenne – j’insiste sur l’importance de la pérennité de l’accompagnement, source de stabilité pour l’enfant –, en proposant des salaires aussi bas et un statut aussi précaire ? De fait, les contrats à durée déterminée et les temps partiels de vingt-quatre heures hebdomadaires leur permettent difficilement d’accéder à un emploi complémentaire.
Je note que le Gouvernement a engagé des mesures pour rendre plus attractif le métier d’AESH. Au demeurant, plus que d’« attraction », il devrait avant tout être question de décence.
Au-delà de la question des personnels accompagnants, nous pensons qu’il convient aujourd’hui de poser les bases d’une nouvelle réflexion sur l’amélioration des structures existantes et la mise en place de solutions personnalisées. Il est en effet important d’améliorer, tant quantitativement que qualitativement, l’accompagnement des élèves handicapés. Scolariser les enfants en situation de handicap sans leur apporter le soutien dont ils ont besoin, c’est fragiliser l’ensemble du système éducatif. Il convient donc d’encourager la coopération entre les secteurs médico-social et scolaire, pour être au plus près des différents besoins de l’enfant ou de l’adolescent.
Les instituts médico-éducatifs peuvent à cet égard jouer un rôle intéressant dans la mise en place de solutions personnalisées. Or la mise à disposition d’enseignants à laquelle s’est engagée l’éducation nationale se révèle très variable selon les régions et souffre d’une sous-estimation chronique des besoins. Ces structures méritent d’être mieux épaulées dans leurs missions, car elles offrent des services spécialisés et sont bien souvent une solution nécessaire à la prise en charge adaptée de l’enfant et à son épanouissement, en complément bien sûr du rôle des familles et de l’école.
La stratégie du Gouvernement en matière de handicap à l’école, menée conjointement par M. Jean-Michel Blanquer et Mme Sophie Cluzel, présente certes des éléments intéressants. Ainsi, le principe de l’intégration du numérique et des dernières innovations technologiques au service de l’intégration des personnes en situation de handicap dans la société nous paraît aller dans le bon sens. De même, le coup de projecteur accordé à l’autisme permettra, je l’espère, de mieux prendre en compte les multiples facettes de cette maladie complexe et encore trop méconnue.
Toutefois, monsieur le secrétaire d’État, quelles conclusions tirer de la mise en place de telles mesures, alors que, dans le même temps, le Gouvernement et la majorité de l’Assemblée nationale réduisent à seulement 20 % la part des logements adaptés dans les constructions de logements neufs, malgré les efforts déployés par le Sénat ?
Vous l’aurez compris, le groupe Union Centriste sera extrêmement attentif à ce que les mesures que prendra le Gouvernement permettent une amélioration significative de la situation des élèves en situation de handicap. Nous veillerons de façon tout aussi exigeante à ce que s’améliore la vie de leurs familles et des personnels qui les accompagnent au quotidien.
Je sais pouvoir compter sur Mme Catherine Morin-Desailly, qui veillera à ce que la commission de la culture et de l’éducation poursuive le travail de contrôle qu’elle a souhaité engager au lendemain de la rentrée.
Il y va, monsieur le secrétaire d’État, de la société dans laquelle nous voulons vivre. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Mme Élisabeth Doineau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, tous les élus ont un jour été confrontés au désarroi de parents à la recherche d’une structure d’accueil pour leur enfant porteur d’un handicap. Nous sommes évidemment très sensibles à la requête des familles, qui souhaitent le meilleur pour leurs enfants.
Depuis la loi du 11 février 2005, les chiffres sont encourageants au niveau national : le nombre d’enfants scolarisés en situation de handicap a plus que triplé. Le nombre d’élèves accueillis est passé d’environ 100 000 en 2006 à près de 350 000 en 2018. Dans 98 % des cas, les demandes d’accompagnement sont satisfaites. Certes, quantitativement, la réponse est bien réelle. Mais correspond-elle toujours aux attentes ? À quel sort sont livrés les 2 % qui restent sur la touche ?
Nous devons analyser l’effectivité du droit à l’éducation et mesurer la portée et les limites de l’universalité des droits de l’enfant. En effet, derrière ces chiffres se cachent de grandes disparités entre les situations, mais aussi entre les départements, disparités à la mesure de la pluralité des handicaps.
Les questions liées aux délais de prise en charge et à la continuité de l’accompagnement sont particulièrement saillantes. L’attente est insoutenable pour les familles, d’autant que le délai de réponse de quatre mois imposé à la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées est une gageure, qui dissimule de fortes disparités entre les départements.
Les auteurs de la proposition de loi examinée récemment à l’Assemblée nationale prévoyaient de diviser par deux ce délai. Sans moyen supplémentaire peut-on y parvenir ? Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un chantier prioritaire.
Je m’attarderai sur la situation en Mayenne, territoire que je connais bien. Dans mon département, la direction de l’autonomie s’est structurée pour répondre au mieux et au plus près des personnes en situation de handicap. Grâce à un partenariat et une coordination exemplaire entre les différents intervenants que sont le conseil départemental, l’éducation nationale, les collectivités et les institutions, quelque 2 400 élèves en situation de handicap ont accès à l’éducation.
Certes, pour 32 enfants de notre département, seul un plan B a pu être mis en œuvre, aucun enfant ne devant rester sans accueil. Admettons-le, certaines solutions ne sont pas à la hauteur des attentes des parents. Ce préjudice scolaire est vécu comme un préjudice moral, psychologique, voire physique.
Pour toutes les situations rencontrées, l’objectif prioritaire est de favoriser l’inclusion scolaire dans le milieu dit « ordinaire ». C’est le cas de 89 % des enfants en situation de handicap en Mayenne. Pour 11 % d’entre eux, la nécessité de soins thérapeutiques n’est pas compatible avec l’inclusion scolaire.
La prise en charge du handicap appelle des solutions innovantes. Dans mon département, il a été créé une unité localisée pour l’inclusion scolaire, une ULIS, intitulée « Appui en milieu ordinaire ».
Les adolescents sont accueillis en CAP au sein de trois établissements scolaires différents. Un enseignant répartit son temps entre les trois établissements, afin de répondre aux difficultés rencontrées par les élèves et d’apporter les adaptations nécessaires, en lien avec les enseignants. Cette success story résulte d’une initiative qui n’est pas d’origine « académique », mais qui se révèle donner d’excellents résultats puisque ces élèves ont pu accéder au diplôme du CAP et, par conséquent, à l’emploi.
Un tel exemple illustre la nécessité de faire preuve d’imagination pour répondre à toutes les situations, dans l’intérêt exclusif de l’enfant.
Les résultats intéressants obtenus en Mayenne sont le fruit d’une volonté politique de coopération efficace de tous les acteurs concernés, au bénéfice des enfants en situation de handicap.
L’enfant en situation de handicap est à la fois un enfant, un patient et un élève. L’approche transversale des politiques publiques sur la question du handicap est à approfondir pour gommer les rigidités et ne pas pénaliser encore davantage les enfants et leurs familles.
La recherche du bien-être de l’enfant est une quête du bonheur par la famille. Je conclurai donc par ces mots de Jacques Prévert :
« Le bonheur, en partant, m’a dit qu’il reviendrait…
Que quand la colère hisserait le drapeau blanc, il comprendrait… » (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)