M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Comme pour l’amendement précédent, il ne me paraît pas souhaitable d’insérer dans la loi des dispositions, qui ne seront pas applicables en pratique.
J’ajoute que les logements actuellement construits sont, malheureusement, plus petits que ceux d’avant et que ces cas de relogement sont souvent l’occasion d’octroyer un logement plus adapté à la personne.
Les conditions d’une aide à la mobilité, prise en charge par l’organisme chargé de l’opération d’urbanisme, sont déjà prévues dans le code de la construction et de l’habitation, qui prévoit également que le nouveau contrat de bail donne lieu au versement d’un dépôt de garantie d’un montant au plus égal à celui de l’ancien logement. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. L’avis est également défavorable. Si je comprends bien l’amendement, les mesures que vous proposez s’appliquent à la fois dans le secteur privé et dans le parc social.
De ce fait, un locataire du secteur privé concerné par cet amendement, c’est-à-dire dépendant de la loi de 1948 et devant être relogé, devrait se voir proposer un logement de même surface avec un dépôt de garantie et un loyer identiques. C’est inapplicable : par exemple, le dépôt de garantie peut avoir été versé des dizaines d’années auparavant !
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Il nous semble que, quand un bailleur social demande la mutation d’un locataire et que celui-ci reste chez le même bailleur, il serait bon d’éviter un nouveau dépôt de garantie, même s’il date de Mathusalem…
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 195.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 35 bis
(Non modifié)
L’article L. 442-12 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au début du dernier alinéa, le mot : « et » est supprimé ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« – les enfants qui font l’objet d’un droit de visite et d’hébergement. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 206 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° Au premier alinéa, les mots : « vivant au foyer » sont remplacés par les mots : « composant le ménage » ;
…° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « auxquels les organismes d’habitations à loyer modéré attribuent les logements mentionnés à l’article L. 441-1 et répondant aux conditions fixées par décret en Conseil d’État » ;
…° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – les autres personnes vivant au foyer, répondant aux conditions fixées par le décret en Conseil d’État mentionné au deuxième alinéa du présent article ou étant en possession d’un des documents mentionnés à l’article L. 311-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, à savoir : » ;
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Je pense que nous allons vivre, malgré l’heure tardive, un grand moment, celui où la commission et le Gouvernement vont donner un avis favorable sur un amendement du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ce qui nous permettrait, mes chers collègues, d’adopter, pour la première fois sur ce projet de loi, un amendement issu de notre groupe ! Cela récompenserait notre abnégation… (Sourires sur différentes travées et au banc des commissions.)
Le plan quinquennal pour le logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme propose une réforme structurelle de l’accès au logement pour les personnes sans domicile. Cela implique d’orienter en priorité vers le logement les personnes en hébergement d’urgence.
Or, ces dispositifs sont plus que jamais saturés. Le parc des hébergements d’urgence peine à jouer son rôle de tremplin vers le logement. Le 115, monsieur le secrétaire d’État, ne répond plus !
L’une des causes de cette stagnation réside dans le fait que certains couples ou familles hébergés dans les structures d’urgence ne peuvent pas accéder au logement social, car un conjoint seulement remplit les conditions de régularité du séjour posées par l’article L. 442-12 du code de la construction et de l’habitation, alors que l’autre conjoint a fait la demande d’un titre de séjour ou d’une demande d’asile et se trouve dans l’attente d’une décision définitive relative à son droit au séjour.
C’est pourquoi nous proposons dans cet amendement de distinguer le titulaire du bail, dont le séjour est régulier, du conjoint – époux, concubin notoire ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité –, qui sera considéré comme une personne vivant au sein du foyer.
Cette possibilité permettrait à des ménages d’accélérer leur sortie des dispositifs d’hébergement d’urgence, d’autant que la loi autorise déjà le transfert d’un bail d’habitation à loyer modéré du titulaire décédé vers un concubin notoire, dont le séjour n’est pas régulier.
M. le président. L’amendement n° 944 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Dantec et Guérini, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
…° Au premier alinéa, les mots : « vivant au foyer » sont remplacés par les mots : « composant le ménage » ;
…° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« 1° Le ou les titulaires du bail auxquels les organismes d’habitations à loyer modéré attribuent les logements visés à l’article L. 441-1 et répondant aux conditions fixées par décret en Conseil d’État ; »
…° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 2° Les autres personnes vivant au foyer, répondant aux conditions fixées par le décret en Conseil d’État mentionné au 1° ou étant en possession d’un des documents mentionnés à l’article L. 311-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et de la demande d’asile, à savoir : » ;
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement est presque identique à celui qui vient d’être présenté et les arguments sont les mêmes. Nous sommes donc en soutien du groupe CRCE et nous espérons aussi un avis favorable de la commission et du Gouvernement…
Plus sérieusement, il faut bien prendre conscience que cet amendement est une question d’humanité, parce qu’il y a aujourd’hui un véritable problème pour ces familles, dont l’un des membres est demandeur d’asile et l’autre régularisé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je vais certainement vous décevoir à cet instant, monsieur Gay, mais je suis certaine que, d’ici à la fin de nos débats, vous obtiendrez quelques satisfactions, même si elles ne sont peut-être pas à la hauteur de ce que vous espériez… (Sourires sur différentes travées.)
Ces amendements tendent à revenir sur la condition de régularité du séjour des personnes bénéficiant d’un logement social. Monsieur Gay, vous avez fait référence à la loi, mais c’est en réalité la Cour de cassation qui a fait de la loi une interprétation assez étonnante.
Si l’hébergement d’urgence est inconditionnel, ce n’est pas le cas du logement social. L’avis est donc défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le sujet soulevé par ces amendements est très important. Depuis des années, nous sommes dans une forme d’hypocrisie, puisque certaines personnes ne sont ni expulsables ni régularisables, et lorsque je visite un centre d’hébergement d’urgence, j’entends souvent les mêmes histoires familiales de gens qui attendent des années dans ces centres, parce que, conformément à ce qui a été appelé la circulaire Valls, il manque à l’un des parents quelques mois pour pouvoir bénéficier d’un titre de séjour, donc de l’accès à un logement social.
Cette situation n’est souhaitable pour personne. Vous pointez donc du doigt un sujet d’une importance très forte.
M. Fabien Gay. Comme souvent !
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. C’est pourquoi le Gouvernement va continuer de travailler sur cette question. Néanmoins, je ne peux pas donner un avis favorable sur ces amendements, parce que la question qui se pose est plus globale et que nous ne pouvons pas tirer une généralité de situations aussi précises que celles que j’ai évoquées.
Au fond, ces amendements posent une autre question : comment sortir les gens des centres d’hébergement d’urgence et leur donner un logement ? Aujourd’hui, ces centres accueillent souvent près de 25 % de travailleurs pauvres, ainsi que beaucoup de réfugiés. Or ce sont des personnes qui n’ont pas de problème de régularisation.
C’est pour cela que la politique de logement d’abord que nous avons engagée est si compliquée à mettre en place. Nous y mettons beaucoup de moyens, nous travaillons en lien étroit avec les associations et il faut aller de l’avant.
En tout cas, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces amendements, même si je comprends pleinement la question qui est soulevée.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 944 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 35 bis.
(L’article 35 bis est adopté.)
Article 36
I. – Le I de l’article L. 441-2-8 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après la référence : « L. 313-19 », sont insérés les mots : « ainsi qu’un représentant du service intégré d’accueil et d’orientation mentionné à l’article L. 345-2-4 du code de l’action sociale et des familles » ;
2° (Supprimé)
II et III. – (Supprimés)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° 799 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° 929 rectifié est présenté par MM. Labbé, Dantec et Guérini.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 3 et 4
Rétablir les 2° du I, II et III dans la rédaction suivante :
2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Le plan prévoit un système de cotation de la demande dans le respect des priorités et des critères définis à l’article L. 441-1. Il précise son principe et ses modalités, notamment les critères choisis et leur pondération, ainsi que les conditions dans lesquelles le refus d’un logement adapté aux besoins et aux capacités du demandeur peut modifier la cotation de sa demande. La cotation est intégrée dans le dispositif de gestion de la demande mentionné à l’article L. 441-2-7. Le public et les demandeurs de logement social reçoivent une information appropriée sur le système mis en place dans le cadre du service d’accueil et d’information. »
II. – Le 7° de l’article L. 441-2-9 du même code est complété par les mots : « , de même que les modalités d’application du système de cotation prévu au troisième alinéa du I du même article L. 441–2–8 ».
III. – Le I entre en vigueur à une date fixée par le décret prévu au 7° de l’article L. 441-2-9 du code de la construction et de l’habitation et au plus tard le 31 décembre 2021.
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 799.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Cet amendement ne va pas vous étonner, puisqu’il vise à réintroduire un article du projet de loi initial, que la commission des affaires économiques a supprimé. Je voudrais simplement apporter quelques éléments de réponse aux objections formulées en commission.
La commission semble craindre que le dispositif prévu ne soit contraignant au regard des réalités locales et des situations d’urgence. Je pense le contraire : dans le respect des critères de priorité fixés par la loi pour l’attribution des logements sociaux, les intercommunalités pourront concevoir un système adapté aux enjeux spécifiques de leur territoire.
En effet, dans le système de cotation que nous proposons, seul le principe est fixé par la loi, les modalités précises de mise en œuvre, en particulier la pondération des critères, étant laissées au libre arbitre des intercommunalités.
Ensuite, je suis convaincu que le système de cotation permettra de mieux lutter contre la vacance dans le parc de logements sociaux. Or c’est un objectif qui me paraît essentiel. Aujourd’hui, lorsqu’il n’y a pas suffisamment de candidats pour un logement attribué par contingent – il en faut au moins trois –, l’appartement ne peut pas être attribué et reste donc vacant. Le fait de passer d’une logique de stock à une logique de flux permet d’éviter cette difficulté.
Vous l’aurez compris, je persiste et je signe, si vous me permettez cette expression, et je vous propose de rétablir la disposition qui a été supprimée en commission.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 929 rectifié.
M. Joël Labbé. Cette fois-ci, c’est le Gouvernement qui a présenté un amendement identique au nôtre. Je considère donc qu’il est défendu !
M. le président. L’amendement n° 363 rectifié bis, présenté par MM. Houpert, Bascher et Guerriau, Mmes Garriaud-Maylam, Vullien, Deromedi et de Cidrac, MM. Capus, H. Leroy et Rapin et Mme Lassarade, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rétablir le 2° dans la rédaction suivante
2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Le plan prévoit un système de cotation de la demande dans le respect des priorités et des critères définis à l’article L. 441-1. Il précise son principe et ses modalités, notamment les critères choisis et leur pondération selon la qualification de l’offre et les objectifs de mixité sociale, ainsi que les conditions dans lesquelles le refus d’un logement adapté aux besoins et aux capacités du demandeur peut modifier la cotation de sa demande. La cotation est intégrée dans le dispositif de gestion de la demande mentionné à l’article L. 441-2-7. Le public et les demandeurs de logement social reçoivent une information appropriée sur le système mis en place dans le cadre du service d’accueil et d’information. »
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. L’amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission est défavorable à ces trois amendements. Je suis désolée, monsieur le secrétaire d’État, nous n’avons pas supprimé le système de la cotation, mais nous avons simplement souhaité qu’il ne soit pas généralisé. Pourquoi ? À notre sens, la généralisation de ce dispositif pourrait en pratique se révéler très contraignante en empêchant de s’adapter aux réalités locales et de répondre aux situations d’urgence.
Je souligne également que, lors de la conférence de consensus sur le logement, un certain nombre de participants s’étaient élevés contre cette généralisation du système de cotation. La commission des affaires économiques a souhaité en rester au droit actuel, c’est-à-dire que le système demeure, mais qu’il soit facultatif. Il laisse donc bien la possibilité aux EPCI de décider de la mise en place de ce dispositif en fonction de la situation de leur territoire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 363 rectifié bis ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 799 et 929 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 363 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 36.
(L’article 36 est adopté.)
Article 37
(Non modifié)
I. – Au sixième alinéa de l’article L. 441-1-5 du code de la construction et de l’habitation, après le mot : « ville », sont insérés les mots : « à la demande du maire de la commune sur le territoire de laquelle se trouve le quartier, ».
II. – Le onzième alinéa de l’article L. 441-1-6 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Après la deuxième phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Cette commission assure le suivi et l’évaluation de la convention intercommunale d’attribution. » ;
2° À la troisième phrase, les mots : « Cette commission » sont remplacés par le mot : « Elle » et le mot : « les » est remplacé par le mot : « certains » ;
3° L’avant-dernière phrase est ainsi rédigée : « Elle émet alors des avis quant à l’opportunité de présenter en commission d’attribution les dossiers présentés par les réservataires. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 196 est présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 895 rectifié est présenté par M. D. Dubois, Mme Létard et les membres du groupe Union Centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
I. – L’article L. 441-1-5 du code de la construction et de l’habilitation est ainsi modifié :
1° Le sixième alinéa est supprimé ;
2° Après le même sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les logements situés dans les quartiers prioritaires de la ville, ces orientations peuvent fixer des plafonds de ressources dérogatoires à ceux prévus à l’article L. 441-1. »
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 196.
Mme Cécile Cukierman. L’article 37 tend à simplifier le dispositif d’attribution de logements dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Outre le fait que ces quartiers sont souvent partie intégrante de communes dont la population et le maillage urbain n’ont qu’assez peu à voir avec les villes résidentielles et touristiques de certaines agglomérations favorisées, il importe d’éviter qu’ils ne soient, plus encore qu’ils ne le sont aujourd’hui, victimes des processus ségrégatifs développés depuis un peu plus de quarante ans.
La première attaque, qu’on le veuille ou non, fut portée par le gouvernement Barre qui, en suspendant le mode de financement ordinaire des HLM pour développer le financement PLA,…
M. Julien Bargeton. Ouh là !
Mme Cécile Cukierman. Ça fait du bien à cette heure-ci de revenir un peu en arrière !
Je reprends : le gouvernement Barre, en suspendant le mode de financement ordinaire des HLM pour développer le financement PLA et en créant les aides personnelles au logement, a été à l’origine d’une croissance constante de la dépense publique pour compenser les effets pervers du marché.
La loi Méhaignerie, qui prétendait lutter contre l’inertie de la loi de décembre 1948, a conduit à la marchandisation du logement, la constitution et la croissance des copropriétés dégradées, la flambée des loyers du secteur privé et la segmentation du marché, comme des aspirants locataires.
Le « pognon de dingue » que la France dépense pour couvrir les désordres du marché, monsieur le secrétaire d’État, il vient de là, et votre texte, malheureusement, risque fort d’y contribuer plus encore.
Aussi, il convient d’éviter aux quartiers prioritaires de la politique de la ville de devenir, plus encore qu’ils ne peuvent l’être aujourd’hui, des « ghettos de la misère », aussi lépreux que peuvent être rutilants les « ghettos du gotha », édifiés parfois à quelques kilomètres des premiers.
Si l’article 37 entend laisser libre cours à l’appréciation des acteurs locaux en matière de logement, laissons-leur donc la possibilité d’attribuer un certain nombre de logements à des personnes dont les ressources pourraient dépasser les plafonds retenus.
Nous avons besoin, pour donner un exemple, que soient logés dans ces quartiers une partie des agents du secteur public qui y travaillent, y font lien et y interviennent, l’un pour l’éducation, l’autre pour la sécurité et la tranquillité publique, et j’en passe, de même qu’on peut attendre de certains professionnels de santé qu’ils installent leur cabinet et leur domicile auprès de leur patientèle.
Cet amendement a donc pour objet de favoriser la mixité sociale et la solidarité au sein de ces quartiers.
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour présenter l’amendement n° 895 rectifié.
M. Michel Canevet. Je ne partage bien entendu pas l’argumentaire qui vient d’être développé à l’instant par notre collègue.
Mme Cécile Cukierman. Cela me rassure !
M. Michel Canevet. Pour autant, notre amendement vise bien à favoriser la mixité sociale dans les quartiers prioritaires de la ville.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission souhaite avoir l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques.
Sur la première proposition, la rédaction issue de l’Assemblée nationale me semblait un bon compromis, car cette pré-CAL ne pourra être réunie que sur demande du maire de la commune où se trouve un QPV.
Sur la seconde proposition, actuellement, les dispositions légales et réglementaires permettent déjà au préfet de fixer des plafonds de ressources dérogatoires, par immeuble ou par secteur dans les QPV, pour favoriser la mixité sociale. Il en est de même pour un immeuble ou un ensemble immobilier occupé à plus de 65 % par des ménages bénéficiant des APL. Je m’interroge : ne risque-t-on pas de créer des inégalités de traitement entre quartiers proches, mais appartenant à des EPCI différents ?
M. le secrétaire d’État s’est engagé devant les députés à tirer le bilan de l’application de ces dérogations par les préfets.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. J’émets un avis défavorable. Effectivement, à l’Assemblée nationale, je m’étais engagé à présenter un retour d’expérience. On est typiquement dans un cas où la loi permet déjà ce que les auteurs des amendements proposent, c’est-à-dire que la CAL, au niveau des EPCI, peut décider directement des dérogations au plafond de ressources.
Il s’avère que, depuis 2005, l’article R. 441-1-1 du code de la construction et de l’habitation, issu du décret du 23 mars 2005, dispose précisément et très clairement que « le préfet peut fixer par arrêté des règles dérogeant localement et temporairement aux conditions de ressources » – donc aux plafonds de ressources –, s’il s’agit de « faciliter les échanges de logements dans l’intérêt des familles, pour permettre l’installation d’activités nécessaires à la vie économique et sociale, ainsi que pour favoriser la mixité sociale dans les grands ensembles et les quartiers » mentionnés dans un autre article. Cela répond précisément au souhait manifesté par les auteurs de ces amendements.
Ce qui est incroyable, c’est que beaucoup de remontées de terrain nous demandent de laisser plus de liberté pour fixer ces plafonds de ressources, alors même que le droit en vigueur le permet déjà via les préfets.
Nous avons interrogé un certain nombre de préfets, pas tous, depuis la première lecture à l’Assemblée nationale. Il ressort de ces échanges que les collectivités locales ne les sollicitent pas pour le faire. C’est un premier retour à prendre avec précaution : est-ce un moyen de renvoyer la balle dans le camp d’en face ? Je n’en sais rien, mais, en tout état de cause, je pense qu’il y a un déficit d’information sur ces possibilités de dérogation. Il suffit que les collectivités demandent aux préfets de prendre un arrêté, charge à eux de décider si ces demandes sont justifiées.
Je prends devant vous l’engagement, d’une part, de continuer ce retour d’expérience, et, d’autre part, de repasser le message de manière insistante auprès nos préfets pour que ces derniers informent les collectivités qu’elles ont la possibilité de demander des dérogations. À mon avis, il vaut mieux suivre cette voie, plutôt que de remodifier la loi, qui me paraît déjà complète sur le sujet.
M. le président. Madame le rapporteur, quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Défavorable.
M. Michel Canevet. Je retire notre amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 895 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 196.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 37.
(L’article 37 est adopté.)
Article additionnel après l’article 37
M. le président. L’amendement n° 664 rectifié, présenté par MM. Dallier et Bascher, Mmes Boulay-Espéronnier, Chain-Larché, Delmont-Koropoulis, Deroche et Deromedi, M. P. Dominati, Mmes Dumas et Eustache-Brinio, M. B. Fournier, Mme Lamure, MM. Lefèvre, H. Leroy et Mandelli, Mme Micouleau, MM. Milon, Rapin et Sido et Mmes Thomas et Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 37
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 443-15-2-3 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les aliénations de logements réalisées en application du présent article sont exclues du champ d’application de l’accord collectif de location du 16 mars 2005 relatif aux congés pour vente par lots aux locataires dans les ensembles immobiliers d’habitation, étendu et rendu obligatoire par le décret n° 2006-1366 du 10 novembre 2006. »
La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Madame la rapporteur, je présume que vous allez demander l’avis du Gouvernement, mais je tente ma chance.
Cet amendement concerne les conditions dans lesquelles l’Association foncière logement, l’AFL, peut céder ses logements, ce qu’elle a l’obligation de faire, je vous le rappelle, puisqu’elle se constitue un patrimoine en bénéficiant d’avantages. La contrepartie, c’est qu’elle a l’obligation de revendre ce patrimoine au bout d’un certain temps. Or l’AFL est sous le régime des accords collectifs du 9 juin 1998 et du 16 mars 2005, qui avaient été négociés entre les principales organisations représentatives de bailleurs et celles des locataires pour traiter des difficultés suscitées par la délivrance de congés pour vente aux locataires.
L’article 1.1 de l’accord vise la mise en vente par lots de plus de dix logements dans un même immeuble. Il organise donc la procédure. Je précise qu’il s’agit de la vente de logements libres de toute occupation. Or l’AFL ne délivre pas de congés pour vente et maintient ses locataires en place dans les mêmes conditions de location que dans le cas où ils ne souhaitent pas se porter acquéreurs. Pour autant, même en l’absence de délivrance d’un congé pour vendre, il ressort que les obligations d’information du locataire qui a reçu une offre d’achat de son logement sont les mêmes que celles bénéficiant au locataire qui réceptionne un congé pour vendre.
La mise en place des accords collectifs des locataires se révèle extrêmement contraignante pour l’AFL et contre-productive pour la mise en œuvre du plan de cession, notamment au regard des contraintes administratives et des délais à respecter.
Par ailleurs, la mise en application des accords collectifs se justifie d’autant moins que l’AFL s’engage à apporter une information totale et complète aux locataires, futurs accédants, sur la résidence, le logement, l’environnement, la propriété et la copropriété, les prêts immobiliers, les diagnostics, entre autres éléments, dans des conditions similaires à celles prévues par les accords.
Il est donc demandé, au travers de cet amendement, d’exclure les ventes à l’unité – qu’il s’agisse de logements vacants ou vendus à leur occupant – effectuées par l’AFL du champ d’application des accords collectifs de location relatifs aux congés pour vendre.