M. Jacques Mézard, ministre. Effectivement, monsieur le président. L’avis est évidemment favorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 148 et 783.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1093, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Leur caractère exceptionnel s’apprécie, entre autres critères, en fonction des caractéristiques du territoire, du type d’urbanisation du secteur, de la distance entre les constructions ou de la desserte par les réseaux ou par les équipements collectifs. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je viens d’évoquer cet amendement : il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 12 quater A, modifié.
(L’article 12 quater A est adopté.)
Article 12 quater B (nouveau)
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Le début du 2° de l’article L. 111-4 est ainsi rédigé :
« 2° Les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, celles nécessaires à l’exploitation agricole ou utilisées en vue de la transformation, du conditionnement et de la commercialisation des produits agricoles lorsque ces activités constituent le prolongement de l’acte de production, celles situées sur l’exploitation ou dans les locaux de celle-ci et destinées à une activité d’accueil touristique complémentaire de l’activité agricole, notamment hébergement et restauration, dès lors qu’elles ne sont pas… (le reste sans changement). » ;
2° Le début du 1° de l’article L. 151-11 est ainsi rédigé :
« 1° Autoriser les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, celles nécessaires à l’exploitation agricole ou utilisées en vue de la transformation, du conditionnement et de la commercialisation des produits agricoles lorsque ces activités constituent le prolongement de l’acte de production, celles situées sur l’exploitation ou dans les locaux de celle-ci et destinées à une activité d’accueil touristique complémentaire de l’activité agricole, notamment hébergement et restauration, dès lors qu’elles ne sont pas… (le reste sans changement). »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 147 est présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 550 est présenté par MM. Duran et Daunis, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 918 rectifié est présenté par MM. Labbé, Dantec et Guérini et Mme Laborde.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 147.
Mme Cécile Cukierman. Je retire cet amendement, car il me paraît un peu excessif. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 147 est retiré.
La parole est à M. Alain Duran, pour présenter l’amendement n° 550.
M. Alain Duran. Actuellement, les constructions et installations nécessaires à l’exploitation agricole sont permises. C’est l’article L. 311–1 du code rural qui définit la notion d’activité agricole, à savoir les activités exercées dans le prolongement de l’exploitation agricole, telle la vente des produits de la ferme, ou ayant pour support l’exploitation – gîtes ruraux, agritourisme, hébergement touristique, etc.
La commission des affaires économiques a voulu aller plus loin en autorisant les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l’exploitation agricole, ou utilisées en vue de la transformation, du conditionnement et de la commercialisation des produits agricoles, lorsque ces activités constituent le prolongement de l’acte de production, ou encore en vue d’une activité d’accueil touristique complémentaire de l’activité agricole, notamment pour l’hébergement et la restauration.
Ces constructions seraient rendues possibles y compris en RNU – règlement national d’urbanisme - donc sans encadrement par un document d’urbanisme.
Les évolutions récentes ont permis de trouver un équilibre entre l’impératif d’une gestion économe de l’espace agricole, le maintien de la vocation agricole des espaces et du bâti existant et la nécessité de permettre l’installation, l’évolution et le développement agricole.
Mes chers collègues, au travers de cet amendement, nous vous proposons d’en rester au texte actuel et donc de supprimer cet article additionnel.
M. Marc Daunis. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 918 rectifié.
M. Ronan Dantec. On l’a bien compris : d’amendement en amendement, deux visions sont en train de s’opposer.
M. Michel Vaspart. Tout à fait !
M. Ronan Dantec. Les uns considèrent que l’on est aujourd’hui en incapacité de développer nos territoires, que plus personne ne peut construire nulle part, que tous les agriculteurs sont bloqués dans leur développement. Telle serait la réalité de la France, d’un pays qui s’effondre. Et, de leur côté, les autres regardent le monde… (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. Jacques Genest. Oh là !
M. Marc-Philippe Daubresse. La France vue du toit du monde !
M. Ronan Dantec. Ils s’aperçoivent que, finalement, à travers le monde, les États qui maîtrisent le mieux leur urbanisme sont en général classés parmi les pays développés ; et que, sauf exception, moins l’urbanisme est maîtrisé, plus le pays est pauvre.
Ils regardent la France comme un pays que beaucoup d’États, y compris parmi ses voisins, admirent pour sa capacité à préserver ses paysages,…
M. Jacques Genest. Oh là là !
M. Ronan Dantec. … lesquels font d’elle la première destination touristique au monde.
Or j’ai quand même l’impression que, d’amendement en amendement, le paysage français est de plus en plus menacé. Heureusement, nous ne sommes qu’au Sénat… (Vives protestations sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. Laurent Duplomb. Oh !
M. Jean-Pierre Vial. On ne peut pas dire cela !
M. Jacques Genest. C’est désagréable !
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Mon cher collègue, si vous n’êtes pas content, vous pouvez toujours démissionner !
M. Ronan Dantec. Chers collègues, j’essaye de vous expliquer où est aujourd’hui le clivage… (Nouvelles protestations.)
M. Pierre Louault. Évidemment, vous habitez en ville !
M. le président. Monsieur Dantec, ne vous laissez pas perturber. Mes chers collègues, respecter la parole de l’orateur.
M. Ronan Dantec. Chers collègues, je trouve ces réactions extrêmement intéressantes !
Ce pays a besoin de répondre à des situations exceptionnelles : il peut y avoir des blocages, et nous sommes là pour trouver les réponses qu’ils exigent.
Certains parmi vous le savent, je suis le premier à chercher, quand un blocage précis se fait jour, à quel endroit il faut réagir. Mais on ne peut pas limiter à tel point les règles, y compris pour se passer du PLU : or c’est bien ce que le Sénat est en train de voter, à travers plusieurs amendements ! De telles mesures vont conduire à miter le paysage, elles vont affaiblir le pays en le privant de l’un de ses principaux atouts économiques. (M. Jacques Genest s’exclame.)
Tel est, aujourd’hui, le clivage. Nous sommes là pour faire de la politique ; je suis donc là pour expliquer où sont les clivages. Ainsi, vous comprenez bien le sens de notre amendement !
M. Pierre Louault. C’est tout vu !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Monsieur Dantec, vous restez dans une posture et dans une démarche pour le moins idéologiques.
M. Jacques Genest. C’est clair !
M. Ronan Dantec. Je ne suis pas le seul à défendre ces dispositions !
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Mes chers collègues, à travers l’article 12 quater B, nous avons repris des travaux que le Sénat avait accomplis au titre de la proposition de loi de Jacques Genest. Alain Duran l’a rappelé, il s’agit de cas extrêmement circonscrits – il en a donné la liste, et je ne vous les rappellerai pas à mon tour.
Je vous indique simplement que les autorisations en question sont encadrées par le PLU et que – Alain Duran l’a également souligné –, en RNU, l’instruction des permis est assurée par les services de l’État. Cette procédure représente, me semble-t-il, une garantie.
Encore une fois, nous n’avons pas souhaité faire n’importe quoi, nous avons tout simplement voulu inclure, dans le présent texte, certaines mesures d’une proposition de loi qui nous semblait pragmatique et réaliste.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
M. Jacques Genest. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Je vais m’efforcer d’éviter les postures – tout en regardant le monde, moi aussi, monsieur Dantec.
Si le Gouvernement est favorable à ces amendements, c’est pour une simple et bonne raison. Les mesures que la commission a introduites dans le présent texte élargissent considérablement les possibilités d’extension. Or il existe déjà des dispositions permettant de répondre aux demandes des agriculteurs. (M. Jacques Genest hoche la tête en signe de dénégation.)
Toute posture mise à part, c’est une évidence : en étendant le champ des exceptions aux activités touristiques et commerciales des exploitations, cet article va à l’encontre des objectifs de lutte contre la consommation excessive des espaces agricoles.
Surtout, ces constructions peuvent déjà être autorisées, sur délibération motivée du conseil municipal, dans les communes qui sont en règlement national d’urbanisme, ainsi qu’à l’intérieur des STECAL pour les communes qui sont couvertes par un PLU.
Aujourd’hui, l’autorisation dépend donc de l’avis du conseil municipal. (M. Jacques Genest manifeste son désaccord.) J’entends constamment qu’il faut faire confiance aux capacités de décision des collectivités territoriales, des conseils municipaux et, en l’occurrence, des maires. Précisément, il me semble que le droit actuel va dans ce sens, en permettant aux conseils municipaux d’autoriser de telles extensions.
Voilà pourquoi, sans opposer un monde à l’autre, nous sommes favorables à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Jacques Genest, pour explication de vote.
M. Jacques Genest. Monsieur le ministre, si j’avais déposé la proposition de loi évoquée par Mme la rapporteur, c’était pour mettre un terme à des blocages.
Dans beaucoup de régions, les agriculteurs vivent chichement : ces extensions leur permettraient de diversifier leurs activités, en développant le tourisme sur leur exploitation.
Vous affirmez que, dans ce domaine, les autorisations dépendent d’une délibération du conseil municipal : non ! C’est toujours l’administration qui décide en dernier lieu et, aujourd’hui, on a tendance à vouloir empêcher le développement rural.
M. Laurent Duplomb. Eh oui !
M. Jacques Genest. Enfin, je ne comprends pas la fâcheuse tendance de ce gouvernement à ne pas aimer les agriculteurs : il est allé jusqu’à refuser la revalorisation de leurs pensions, alors qu’ils ne touchent pour ainsi dire rien ! Vraiment, au Gouvernement, vous n’aimez pas le rural !
M. Michel Savin. Eh oui ! Ce sont des urbains !
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.
Mme Nadia Sollogoub. Mes chers collègues, nous sommes tous pareils dans cette assemblée, nous nous appuyons sur des cas concrets dont nous avons pu avoir connaissance.
J’ai en tête l’exemple de deux frères qui avaient hérité de leur père agriculteur. L’un élevait les vaches, l’autre faisait du fromage. Ils devaient être l’un à côté de l’autre pour mener leur activité. Le frère qui gérait la stabulation a obtenu son permis de construire ; en revanche, celui qui fabriquait des fromages était considéré, non comme un agriculteur, mais comme un artisan, voire un commerçant. Il n’a jamais pu obtenir le permis de construire pour la chambre froide, qui aurait permis de faire le fromage et le vendre.
À cet égard, il faut conserver cet article : il est tout à fait de bon sens !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 550 et 918 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1094, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéas 3 et 5
1° Remplacer les mots :
utilisées en vue de
par les mots :
forestière, à
2° Remplacer les mots :
du conditionnement et de
par les mots :
au conditionnement et à
3° Remplacer la seconde occurrence du mot :
celles
par les mots :
ou aux activités
4° Remplacer les mots :
notamment hébergement et restauration
par les mots :
comprenant mais non limitée à l’hébergement touristique et à la restauration
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Cet amendement tend à préciser la rédaction de l’article, en mentionnant les activités forestières au côté des activités agricoles, par parallélisme avec les autres dispositions du code de l’urbanisme.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 12 quater B, modifié.
(L’article 12 quater B est adopté.)
Article 12 quater
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° A (nouveau) À la première phrase du second alinéa de l’article L. 111-5, le mot : « conforme » est supprimé ;
1° Le 3° de l’article L. 142-4 est abrogé ;
2° (nouveau) À la seconde phrase du 2° de l’article L. 151-11, les deux occurrences du mot : « conforme » sont supprimées.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 146 est présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 551 est présenté par MM. Duran et Daunis, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 917 rectifié est présenté par MM. Labbé, Dantec et Guérini et Mme Laborde.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 146.
Mme Cécile Cukierman. Cet article vise à rationaliser la procédure de consultation de la commission départementale de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, la CDPENAF, pour ce qui concerne les dérogations à l’interdiction de construire hors des parties urbanisées des communes. Inséré dans le présent texte par l’Assemblée nationale, il visait initialement à regrouper deux procédures qui nécessitaient les mêmes autorisations, lorsqu’une commune n’était couverte ni par un PLU ni par un SCOT.
Or, au Sénat, la commission des affaires économiques a fait le choix d’aller plus loin. Dans deux cas précis, elle a transformé en avis simple l’avis conforme de la CDPENAF. Il s’agit, premièrement, du changement de destination d’un bâtiment en zone agricole d’une commune disposant d’un PLU ; et, deuxièmement, des constructions d’intérêt communal hors zone urbanisée d’une commune soumise au RNU.
Selon ses promoteurs, cette disposition donne davantage de souplesse aux maires, qu’il s’agisse d’autoriser des projets importants pour le développement de leur commune ou de faire évoluer les constructions en zone agricole afin d’en diversifier les fonctions.
Pour notre part, nous estimons que, lorsque ces dérogations ont pour conséquence de réduire les surfaces à vocation agricole des zones non urbanisées, la commission départementale a un rôle fondamental à jouer. En passant d’un avis conforme à un avis simple, on permet clairement aux maires de faire ce que bon leur semble (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.),…
M. Jacques Genest. Arrêtez !
M. Marc-Philippe Daubresse. C’est pour le moins excessif !
Mme Cécile Cukierman. … ce qui n’est pas toujours souhaitable.
Nous ne souhaitons pas un développement urbain à outrance. Nous restons attachés au principe d’une urbanisation limitée dans ces zones, et nous demandons donc la suppression de cet article.
Chers collègues, à l’oral, les signes de ponctuation ne s’expriment pas. Je n’ai pas donc mis de guillemets à la formule que je viens d’employer. Mais, nous le savons tous, dans les communes, les prises de décision font l’objet de rapports de force…
Selon nous, en maintenant l’avis conforme, l’on sécurise également le maire dans son rôle, dans sa capacité à décider en lien avec les services de l’État, et l’on évite les dérives que l’on a pu constater dans l’ensemble des territoires.
M. le président. La parole est à M. Alain Duran, pour présenter l’amendement n° 551.
M. Alain Duran. M. le ministre vient de l’indiquer, en dehors des parties actuellement urbanisées d’une commune sous RNU, le code de l’urbanisme prévoit que le conseil municipal peut autoriser l’implantation de constructions ou d’installations si l’intérêt de la commune le justifie, en particulier pour éviter une diminution de la population communale.
Pour éviter les abus, la loi ALUR a soumis ces autorisations à un avis conforme de la CDPENAF. Or la commission des affaires économiques le transforme en un avis simple.
L’avis conforme de la CDPENAF est une garantie essentielle quant aux dérogations à la règle d’inconstructibilité des terrains situés hors des parties urbanisées des communes soumises au RNU. Voilà pourquoi nous proposons, à travers cet amendement, la suppression du présent article.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 917 rectifié.
M. Ronan Dantec. Guidée par un souci de simplification tout à fait louable, l’intention initiale des auteurs de l’article 12 quater était de supprimer un doublon procédural concernant l’avis de la CDPENAF pour les constructions sur les territoires non couverts par les SCOT. Jusqu’alors, il n’y avait pas de difficulté quant au principe : l’Assemblée nationale avait fait son travail en cherchant à simplifier la procédure.
Toutefois, en regardant le dispositif proposé de plus près et avec davantage d’attention, on constate qu’il entraîne un tout autre effet.
Mes chers collègues, j’attire votre attention sur le troisième alinéa de cet article : « Le 3° de l’article L. 142–4 est abrogé. » Il s’agit là d’un point très important.
En effet, derrière cette petite phrase anodine, se cache en réalité la levée de l’interdiction issue de la loi dite « ALUR », hors des parties urbanisées des communes non couvertes par un SCOT, des constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et de leur extension mesurée, ainsi que des constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, visées au 4° de l’article L. 111–4 du code de l’urbanisme. Il s’agit, autrement dit, de toutes les activités engendrant des nuisances, notamment d’activités dégradant les milieux naturels et les paysages, par exemple les décharges publiques. Voyez l’ampleur des conséquences !
Ainsi, au-delà de la simplification, cet article permettrait un réel déverrouillage des règles d’urbanisme.
En outre – les précédents orateurs l’ont déjà dit –, la commission des affaires économiques a modifié cet article pour transformer les avis conformes de la CDPENAF en avis simples, afin de permettre au préfet de disposer d’un véritable pouvoir d’appréciation.
Avec cet amendement, nous proposons également de revenir à l’équilibre trouvé avec l’avis conforme.
Bref, tel qu’il est rédigé, cet article déverrouille totalement le dispositif conçu par la loi ALUR ; et, en plus, il supprime l’avis conforme.
Bien sûr, on observe des difficultés à cet égard. Je suis extrêmement attentif aux éleveurs de chèvres,…
M. Bruno Sido. Ah !
M. Ronan Dantec. … mais un certain nombre de difficultés pourraient être traitées par une commission décidant à l’unanimité. L’avis conforme va précisément dans ce sens, celui d’un consensus de l’ensemble des acteurs. En pareil cas, il faut adopter des dispositions particulières, car de toute évidence la loi n’a pas tout prévu. Mais, au nom de tels exemples, on est en train de supprimer les mesures d’encadrement. Ce n’est pas ainsi qu’il faut procéder !
J’en ai déjà discuté avec mon collègue Michel Vaspart à propos de la loi Littoral : nous devons trouver, collectivement, des instances au sein desquelles il est possible de mettre un terme, par consensus, à telle ou telle aberration. Mais il ne faut certainement pas supprimer les règles d’encadrement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. En la matière, comme l’a dit Marc-Philippe Daubresse lors de la discussion générale, et comme M. le ministre l’a demandé à maintes reprises dans cette enceinte, nous allons faire, plus que jamais, confiance aux maires et aux élus locaux.
L’avis conforme de la CDPENAF n’est transformé en avis simple que dans deux cas bien précis. De plus, le maire pourra toujours faire appel à cette commission départementale et s’appuyer sur son expertise consultative pour refuser ou autoriser un projet, notamment dans le cadre de la revitalisation des territoires ruraux.
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Selon les articles appelés en discussion, la confiance faite aux maires est visiblement à géométrie variable…
M. Bruno Sido. C’est comme cela !
M. Jacques Mézard, ministre. C’est assez habituel, et ce n’est pas moi qui prétendrai que, tous autant que nous sommes, nous nous exprimons toujours de manière univoque. À ce propos, j’ai particulièrement apprécié l’expression qu’a employée la sénatrice Cécile Cukierman. Cette formule témoigne, envers les élus locaux, d’une confiance que l’on peut dire toute relative…
M. Bruno Sido. Pour le moins !
M. Jacques Mézard, ministre. J’émets donc un avis favorable sur ces amendements, car il y a des cas où il est préférable de maintenir les choses en l’état.
M. le président. La parole est à M. Jacques Genest, pour explication de vote.
M. Jacques Genest. Mes chers collègues, je suis tout de même un peu surpris. Hier, dans cette enceinte, tout le monde disait : « Il faut faire confiance aux maires. » Aujourd’hui, certains, peut-être surtout aux extrêmes, affirment : « Les maires font n’importe quoi. »
Mme Cécile Cukierman. Et voilà…
M. Jacques Genest. Ces propos émanent probablement de personnes qui n’ont jamais été maires… Or, quand vous êtes maire, vous ne faites pas n’importe quoi, non seulement parce que les électeurs sont toujours derrière vous pour vous rappeler à l’ordre, mais aussi parce que vous tenez au pays ! (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains.)
En outre, la composition des CDPENAF pose question… Dans certains départements, on y trouve les défenseurs, très honnêtes, de l’un des bassins de l’Ardèche. Eh bien, en tant que membres de ces commissions, ils décident de ce qui doit se faire à 300 kilomètres de chez eux, dans des secteurs qu’ils ne connaissent même pas.
Somme toute, mieux vaut faire confiance à l’État, puisque c’est le préfet qui décide en dernier ressort, qu’à des gens qui ne représentent qu’eux-mêmes. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. En précisant, à la fin de mon intervention, que mes propos au sujet des maires étaient entre guillemets, je pensais désamorcer la polémique. Mais, apparemment, notre collègue Jacques Genest n’a pas compris…
M. Jean-Pierre Vial. Il a très bien compris !
Mme Cécile Cukierman. Je vais donc utiliser les deux minutes trente auxquelles j’ai droit (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.) pour clarifier mes propos, éviter toute mésentente entre nous et prévenir tout procès d’intention.
Certains, ici, connaîtraient la réalité du terrain, quand d’autres ne la connaîtraient pas ; certains connaîtraient le travail des maires, quand d’autres ne le connaîtraient pas ; en somme, il y aurait ici deux camps, les gentils, qui défendraient les territoires,…
M. Jacques Genest. Eh oui !
Mme Cécile Cukierman. … et les méchants technocrates, dogmatiques, apparatchiks,…
M. Roger Karoutchi. Tout ça ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Cécile Cukierman. … qui n’auraient rien compris à la réalité.
Monsieur Genest, vous voyez que, dans la caricature, nous pouvons être ex aequo ! (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Jacques Grosperrin s’exclame.)
Plus sérieusement – je me suis d’ailleurs exprimée avec beaucoup de sérieux en défendant l’amendement n° 146 –, nous le savons : être élu local, ce n’est pas simple tous les jours. Il faut prendre en compte des réalités, des rapports de force, des demandes qui peuvent être contradictoires. (M. Jacques Genest s’exclame.) Bien sûr que si, monsieur Genest : ne me la faites pas à l’envers, vous le savez très bien ! (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Au cours d’une même journée, entre le matin et le soir, les personnes qu’un élu local reçoit peuvent lui adresser des demandes différentes, voire contradictoires : il doit y répondre en trouvant un équilibre. Vous connaissez suffisamment la réalité et la pratique du terrain : je ne vous mets pas en cause à ce titre. Mais, précisément, ne me faites pas offense en prétendant que vous n’avez jamais dû faire face à de telles difficultés pour garder la maîtrise d’une politique communale !
Soyons sérieux, évitons les caricatures.