M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour présenter l’amendement n° 267 rectifié.

Mme Catherine Deroche. L’adoption de cet amendement, identique au précédent, serait notamment utile aux élèves en situation de décrochage scolaire.

M. le président. L’amendement n° 30 rectifié bis, présenté par Mme Guidez, M. Delahaye, Mmes Létard et Vullien, MM. Bonnecarrère et Janssens, Mmes Dindar et Vermeillet, MM. Longeot et Détraigne, Mme Sollogoub, M. Médevielle, Mme de la Provôté, MM. Kern, Canevet, Cigolotti, Louault, Moga et Le Nay, Mme Gatel, M. Capo-Canellas, Mme Billon et M. Mizzon, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

la dernière

par les mots :

l’avant-dernière

et le mot :

troisième

par le mot :

quatrième

La parole est à Mme Jocelyne Guidez.

Mme Jocelyne Guidez. J’ajoute à ce qui a déjà été dit que les premiers signes du décrochage se font souvent sentir dès le début de la scolarité au collège, via l’absentéisme de l’élève, avant de s’accentuer en classe de quatrième ; cet amendement vise donc à ce que cette nouvelle classe soit mise en place à partir de la quatrième, et non de la troisième.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Forissier, rapporteur. La commission approuve le dispositif visant à préparer les élèves de collège à la voie professionnelle et à l’apprentissage par des enseignements dédiés et des stages, sans renoncer à la transmission du socle de connaissances prévu pour ces élèves.

Nous avons des doutes sur la portée de ce dispositif et sur son articulation avec les « prépa-pro » qui existent au collège. Préparer des élèves de quatrième, âgés d’environ 13 ou 14 ans, à la voie professionnelle nécessiterait des aménagements par voie réglementaire, notamment pour que le temps de stage soit progressif de la quatrième à la troisième. Il est clair que le manque de maturité poserait souvent un problème.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 30 rectifié bis, réserver ce dispositif à la seule classe de quatrième nous semble inopportun et, aujourd’hui, impossible à mettre en œuvre juridiquement. Ces classes doivent en effet permettre de préparer les élèves à la voie professionnelle et à l’apprentissage, mais en vue de leur orientation à la sortie du collège, bien entendu : la passerelle ne doit pas avoir lieu avant.

J’émets donc, au nom de la commission, un avis de sagesse positive sur les amendements identiques nos 153 et 267 rectifié. Quant à l’amendement n° 30 rectifié bis, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable sur ces amendements.

Il ne faut pas confondre deux choses : la classe de troisième « prépa-métiers », dont nous venons de parler, prévue à l’article 8 bis, a bien pour objectif de proposer à des élèves volontaires, prêts à se remobiliser autour d’un projet de formation, un accompagnement dans la construction d’un projet vers la voie professionnelle et l’apprentissage ; cette classe permet de renforcer la découverte des métiers tout en poursuivant l’acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

Mais la création de la prépa-métiers n’a pas pour objectif de créer des filières dès la classe de quatrième ; le risque, bien réel, serait, pour le jeune, de ne plus pouvoir repartir vers d’autres voies. Il faut qu’à tout moment le jeune ait le choix.

Il faut permettre à un élève volontaire de troisième de préparer son orientation professionnelle : une telle possibilité permet d’enjamber la sortie de troisième en la préparant, par la découverte des métiers. Mais étendre ce dispositif aux élèves de quatrième pourrait nuire à l’acquisition des éléments fondamentaux qui constituent le socle commun nécessaire à la mobilité professionnelle.

Qu’il y ait besoin d’agir, en matière de prévention du décrochage scolaire, dès le très jeune âge, dès la classe de quatrième, et parfois même avant, c’est certain. Mais le faire en instaurant une préparation à la voie professionnelle dès la quatrième, nous n’y sommes pas favorables.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 153 et 267 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 30 rectifié bis n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 8 bis, modifié.

(Larticle 8 bis est adopté.)

Article 8 bis
Dossier législatif : projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel
Article 9

Article 8 ter

(Non modifié)

I. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 4153-6 du code du travail, les mots : « de recevoir en stage des mineurs » sont remplacés par les mots : « d’affecter des mineurs en stage au service du bar ».

II. – Au premier alinéa de l’article L. 3336-4 du code de la santé publique, les mots : « de recevoir en stage des mineurs » sont remplacés par les mots : « d’affecter des mineurs en stage au service du bar ».

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 75 rectifié bis est présenté par M. Lefèvre, Mme Bruguière, MM. Piednoir, Brisson, Perrin, Raison et Saury, Mme Micouleau, MM. de Legge, Bazin, Bascher et de Nicolaÿ, Mmes Deromedi, L. Darcos et Chauvin, M. Cambon, Mmes Lassarade et Garriaud-Maylam, M. Revet, Mme Lherbier, MM. B. Fournier, Pierre et Savin, Mmes Duranton et A.M. Bertrand, MM. Laménie et Meurant, Mme Berthet, MM. Cuypers, J.M. Boyer, Duplomb, Vaspart, Mayet, Charon et Babary, Mme Raimond-Pavero et M. Sido.

L’amendement n° 126 rectifié est présenté par MM. Kern, Bonnecarrère, Bockel, Longeot, Laugier et Janssens, Mmes Férat, de la Provôté, Billon, Sollogoub, Vullien, Loisier et Guidez, MM. Moga et Mizzon, Mme Gatel et MM. Médevielle et Cigolotti.

L’amendement n° 195 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Decool, A. Marc, Lagourgue, Fouché et Malhuret, Mme Mélot, M. Wattebled, Mme Goy-Chavent et M. L. Hervé.

L’amendement n° 518 rectifié bis est présenté par Mme Lamure, MM. Pellevat et Savary, Mmes Troendlé et Di Folco, M. Bouchet, Mme Deroche, MM. Paul et Daubresse, Mmes Gruny, Lopez et Delmont-Koropoulis, MM. Bizet, Chevrollier, Grand, Mandelli, Huré, Longuet et Buffet, Mme Deseyne et MM. Pointereau, Gremillet et Bansard.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l’alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Au deuxième alinéa du même article L. 4153-6, les mots : « de plus de seize ans » sont supprimés.

II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Au deuxième alinéa du même article L. 3336-4, les mots : « de plus de seize ans » sont supprimés.

La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° 75 rectifié bis.

M. Antoine Lefèvre. L’objectif du Gouvernement est de développer massivement l’offre d’apprentissage sur le territoire en faisant en sorte que le système s’adapte aux besoins des jeunes et des entreprises, plutôt que les jeunes et les entreprises aient à s’adapter aux contraintes du système.

Le secteur de l’hôtellerie et de la restauration est un secteur d’activité en tension où les difficultés de recrutement sont très fortes et deviennent un véritable problème, en particulier dans les zones les plus touristiques de notre pays, dont on souhaite qu’il demeure la première destination touristique mondiale.

Afin d’accroître le nombre de candidats potentiels à l’intégration d’une filière d’apprentissage dans le secteur de la restauration, il est proposé d’ouvrir cette possibilité à tous les mineurs dans les conditions de droit commun, soit, selon les termes de l’article L. 6222-1 du code du travail, à partir de 16 ans ou dès 15 ans pour les mineurs qui justifient avoir accompli la scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire.

Cela éviterait de laisser au bord du chemin les jeunes qui ont terminé leur scolarité de premier cycle et qui souhaitent s’engager dans une filière professionnelle fortement pourvoyeuse d’emplois dans des zones géographiques attractives.

Les dispositions proposées garantissent en outre la coordination de cette nouvelle rédaction du code du travail avec l’article correspondant dans le code de la santé publique.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 126 rectifié.

M. Jean-François Longeot. Je défends cet amendement au nom de mon collègue Claude Kern.

Comme il vient d’être indiqué, le nouveau CAP « Commercialisation et services en hôtel-café-restaurant », né de la fusion des anciens CAP « Employés de restaurant », « Service en café-brasserie » et « Service hôtelier », est source de nombreuses difficultés pour les jeunes de moins de 16 ans, qui ne sont plus autorisés à souscrire un contrat d’apprentissage en vue de préparer ce nouveau CAP.

À ces jeunes, il est opposé une fin de non-recevoir quant à la possibilité de suivre une formation dans un domaine qu’ils ont au préalable choisi en connaissance de cause, et pour lequel ils se sont pleinement engagés. C’est peu compréhensible eu égard à l’esprit de simplification qui anime le Gouvernement, et à l’heure où ce dernier annonce faire du développement de l’apprentissage une de ses priorités.

En effet, aujourd’hui, nombre de jeunes sortant de troisième, et donc éligibles à l’apprentissage et/ou aux stages, ont, du fait d’un faible taux de redoublement, moins de 16 ans, voire moins de 15 ans.

Cet amendement vise donc à ouvrir cette possibilité d’apprentissage à tous les mineurs à partir de 16 ans, ou dès 15 ans pour ceux qui justifient avoir accompli la scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire.

Les dispositions proposées garantissent en outre la coordination de cette nouvelle rédaction du code du travail avec l’article correspondant dans le code de la santé publique.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 195 rectifié bis.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être défendu.

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l’amendement n° 518 rectifié bis.

Mme Élisabeth Lamure. Le secteur de l’hôtellerie et de la restauration est en tension, avec de grandes difficultés de recrutement, ce qui crée de nombreux problèmes, notamment dans les zones les touristiques.

Cet amendement vise donc à ouvrir la filière à partir de 16 ans ou dès 15 ans pour les mineurs qui justifient avoir accompli la scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Forissier, rapporteur. Une telle extension s’inscrit dans la logique de l’article 8 ter, qui vise à faciliter l’emploi d’apprentis dans les entreprises de débit de boissons, comme les cafés, hôtels et restaurants. Cela permettra aux apprentis de 15 ans ayant validé leur scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire de bénéficier des mêmes dérogations que les apprentis mineurs d’au moins 16 ans. Bien entendu, il s’agit d’une dérogation, et non d’une généralisation systématique.

La commission émet un avis favorable sur ces quatre amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il y a, me semble-t-il, deux problématiques distinctes.

Premièrement, de jeunes mineurs peuvent-ils avoir un contrat d’apprentissage dans le secteur de l’hôtellerie, de la restauration et des débits de boissons ? L’article 8 ter du présent projet de loi prévoit de préciser et d’assouplir le dispositif actuel, en limitant le champ de l’agrément aux seuls jeunes affectés au service du bar pour les besoins de la formation professionnelle. Je pense qu’il faut tenir bon sur ce point. Un apprenti peut très bien servir en salle sans que cela pose problème. Mais, pour le service du bar, c’est plus compliqué. D’ailleurs, ces mineurs n’ont pas le droit de consommer eux-mêmes de l’alcool. Mieux vaut éviter qu’ils n’en servent toute la journée.

Deuxièmement, comme l’alcool est un sujet très sensible, le droit commun, qui permet de recruter comme apprentis des mineurs âgés d’au moins 16 ans et même des mineurs âgés de 15 ans révolus et sortis de la classe de troisième, ne s’applique pas dans ce secteur, où il faut avoir « plus de 16 ans ». Nous souhaitons maintenir cette règle, par mesure de précaution.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces quatre amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 75 rectifié bis, 126 rectifié, 195 rectifié bis et 518 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 8 ter, modifié.

(Larticle 8 ter est adopté.)

Article 8 ter (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel
Article 9 bis

Article 9

Le titre II du livre II de la sixième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° L’article L. 6222-18 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Passé ce délai, le contrat peut être rompu par accord écrit signé des deux parties. » ;

b) Le troisième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« À défaut, le contrat peut être rompu en cas de faute grave de l’apprenti, d’inaptitude constatée par le médecin du travail dans les conditions définies à l’article L. 4624-4 ou en cas de décès d’un employeur maître d’apprentissage dans le cadre d’une entreprise unipersonnelle. La rupture prend la forme d’un licenciement prononcé selon les modalités prévues aux articles L. 1232-2 à L. 1232-6 et L. 1332-3 à L. 1332-5, après l’intervention du médiateur mentionné à l’article L. 6222-39 ou, pour les apprentis du secteur public non industriel et commercial, du service désigné comme étant chargé de la médiation. En cas d’inaptitude constatée par le médecin du travail, l’employeur n’est pas tenu à une obligation de reclassement.

« Au-delà de la période prévue au premier alinéa du présent article, la rupture du contrat d’apprentissage peut intervenir à l’initiative de l’apprenti et après respect d’un préavis, dans des conditions déterminées par décret. L’apprenti doit, au préalable, solliciter le médiateur mentionné à l’article L. 6222-39 ou, pour les apprentis du secteur public non industriel et commercial, le service désigné comme étant chargé de la médiation. Si l’apprenti est mineur, l’acte de rupture doit être conjointement signé par son représentant légal. Lorsque l’apprenti mineur ne parvient pas à obtenir de réponse de son représentant légal, il peut solliciter le médiateur mentionné au même article L. 6222-39. Le médiateur intervient, dans un délai maximum de quinze jours calendaires consécutifs à la demande de l’apprenti, afin d’obtenir l’accord ou non du représentant légal sur l’acte de rupture du contrat. Une copie de cet acte est adressée, pour information, à l’établissement de formation dans lequel l’apprenti est inscrit.

« En cas de liquidation judiciaire sans maintien de l’activité ou lorsqu’il est mis fin au maintien de l’activité en application du dernier alinéa de l’article L. 641-10 du code de commerce et qu’il doit être mis fin au contrat d’apprentissage, le liquidateur notifie la rupture du contrat à l’apprenti. Dans cette hypothèse, les dispositions de l’article L. 1243-4 du présent code s’appliquent, à l’exception de celles relatives à l’indemnité prévue à l’article L. 1243-8. » ;

c) Le dernier alinéa est supprimé ;

2° Après le même article L. 6222-18, sont insérés des articles L. 6222-18-1 et L. 6222-18-2 ainsi rédigés :

« Art. L. 6222-18-1. – Lorsque le centre de formation d’apprentis prononce l’exclusion définitive de l’apprenti, l’employeur peut engager à son encontre une procédure de licenciement. Cette exclusion constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement, qui est prononcé dans les conditions prévues par les dispositions du code du travail relatives à la rupture du contrat de travail pour motif personnel.

« À défaut pour l’apprenti d’être inscrit dans un nouveau centre de formation d’apprentis dans un délai de deux mois à compter de son exclusion définitive, son maintien dans l’entreprise est subordonné à la conclusion soit d’un contrat de travail dans les conditions du droit commun, soit d’un avenant mettant fin à la période d’apprentissage lorsque le contrat d’apprentissage est conclu pour une durée indéterminée.

« Art. L. 6222-18-2. – En cas de rupture du contrat d’apprentissage en application de l’article L. 6222-18, le centre de formation dans lequel est inscrit l’apprenti prend les dispositions nécessaires pour lui permettre de suivre sa formation théorique pendant six mois et contribue à lui trouver un nouvel employeur susceptible de lui permettre d’achever son cycle de formation. » ;

3° À l’article L. 6222-21, les mots : « les deux premiers mois d’apprentissage » sont remplacés par les mots : « la période prévue au premier alinéa de l’article L. 6222-18 » ;

4° La section 1 du chapitre V est complétée par un article L. 6225-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6225-3-1. – En cas de rupture du contrat d’apprentissage en application de l’article L. 6225-3, le centre de formation dans lequel est inscrit l’apprenti prend les dispositions nécessaires pour lui permettre de suivre sa formation théorique pendant six mois et contribue à lui trouver un nouvel employeur susceptible de lui permettre d’achever de son cycle de formation. »

M. le président. L’amendement n° 210, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement a pour objet de supprimer la disposition facilitant les modalités de rupture du contrat d’apprentissage. Cet article crée en effet de nouveaux cas de résiliation unilatérale du contrat sur l’initiative de l’employeur et prive les apprentis de la protection des conseils de prud’hommes.

Actuellement, un employeur qui souhaite mettre fin au contrat de son apprenti peut librement le faire pendant les quarante-cinq premiers jours. Au-delà de ce délai, sauf accord des deux parties, la rupture du contrat ne peut être prononcée que par un juge.

Cette protection particulière de l’apprenti se justifie notamment par le fait qu’il n’est pas un salarié comme les autres. Il s’agit d’un salarié en formation. L’employeur qui l’embauche prend la responsabilité de le former et ne doit pas pouvoir mettre fin à son engagement sans contrôle, d’autant plus que la rupture du contrat de travail de l’apprenti met bien souvent fin à sa formation, l’empêchant d’obtenir son diplôme.

Cet article fait référence à un médiateur rattaché aux tribunaux de commerce. Il est déjà possible pour une entreprise et son apprenti d’avoir recours à un médiateur lorsqu’ils ont la volonté de résoudre un différend. Or, bien souvent, lorsque l’employeur prend l’initiative de rompre le contrat d’apprentissage, c’est qu’il est déjà trop tard pour résoudre le différend. C’est pourquoi, en cas de rupture du contrat, l’intervention d’un médiateur ne doit pas pouvoir remplacer celle d’un juge.

Enfin, pour rappel, le taux de rupture des contrats d’apprentissage s’élève actuellement à 27 %. Il apparaît paradoxal que cette loi prétende favoriser l’apprentissage tout en facilitant les ruptures de contrat, ce qui aurait pour conséquence inévitable d’augmenter le nombre d’apprentis n’ayant pas pu achever leur formation.

Pour ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Forissier, rapporteur. Je suis défavorable à cet amendement, car il est contraire à la position de la commission. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Céline Brulin. Ça, c’est de l’argument ! (Sourires sur les mêmes travées.)

M. Michel Forissier, rapporteur. Vous étiez bien présents en commission, mes chers collègues !

L’article 9 assouplit les conditions de rupture du contrat d’apprentissage tout en maintenant des garanties pour l’apprenti : rapprochement avec les conditions de rupture d’un contrat à durée indéterminée et intervention du médiateur consulaire.

À nos yeux, en cas de rupture de contrat, l’essentiel est de trouver une solution permettant à l’apprenti de poursuivre sa formation. Un maître d’apprentissage, qui est bien souvent aussi un artisan et un patron de petite entreprise, ne rompt pas un contrat de gaieté de cœur ! Il y a certainement des raisons, souvent de part et d’autre : l’apprenti peut se rendre compte que le métier est trop pénible, trop salissant, etc.

L’objectif est de garder l’apprenti dans la filière d’apprentissage. Les mesures que nous instituons semblent de nature à favoriser l’embauche d’apprentis par les entreprises. Proposer une solution de transfert du contrat d’apprentissage permettra de ne pas perdre un apprenti et de régler le problème à l’amiable. C’est toujours mieux que d’aller aux prud’hommes avec une procédure contentieuse interminable qui ferait perdre un an à l’apprenti !

Nous maintenons donc notre avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Même avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je voterai contre cet amendement.

Si un artisan décide de prendre un apprenti, c’est qu’il a véritablement envie de transmettre son savoir. Dès lors, s’il y a rupture du contrat, c’est qu’un problème est apparu. Ce n’est, me semble-t-il, pas une bonne chose d’aller aux prud’hommes, surtout si l’on veut développer l’apprentissage.

La présence du médiateur permet au jeune de ne pas rester sur le bord du chemin : il a la possibilité de continuer son apprentissage au CFA et de trouver une autre entreprise.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 210.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 461, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 6222-18 du code du travail est modifié :

1° Après le mot : « obligations », la fin de la seconde phrase du deuxième alinéa est supprimée ;

2° Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas d’inaptitude de l’apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer, l’employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient. En cas de refus de l’apprenti, le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, prononce la rupture du contrat d’apprentissage. »

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Cet amendement a pour objet de lutter contre un des fléaux de l’apprentissage : le nombre de ruptures de contrat.

Plus d’un quart des contrats signés sont rompus avant leur terme, dans un cursus qui est souvent vu comme le dernier rempart contre le déclassement. Si les justifications des employeurs trouvent bien souvent leur source dans une impréparation des jeunes, la question des inaptitudes est bien présente. Que l’inaptitude ait été repérée dès la visite médicale préalable ou au cours du cursus, c’est bien souvent particulièrement difficile pour ces jeunes apprentis.

Il faut se mettre à leur place : soit l’apprentissage relève d’un choix propre, et c’est tout un plan d’avenir qui s’effondre ; soit ils ont été poussés vers cette voie trop souvent dévalorisée, et la déclaration d’inaptitude constitue la fermeture de la dernière porte pour obtenir une qualification.

De la même manière, il s’agit aussi bien souvent d’un moment difficile pour les employeurs, qui, d’une part, ont souvent construit leur équipe avec l’apprenti et, d’autre part, se sont engagés.

Le dispositif que nous proposons consiste à prévoir un reclassement pour inaptitude qui permette à la fois aux jeunes de voir leur réorientation facilitée et aux employeurs d’avoir une certaine stabilité dans leur effectif. On peut par exemple penser aux allergies qui se déclenchent parfois à l’âge adulte, notamment vis-à-vis des matières premières. Par exemple, un apprenti boulanger qui commencerait à souffrir d’une allergie à la farine pourrait changer de métier tout en restant dans la même structure, en s’orientant vers l’aspect commercial de l’entreprise.

Bien entendu – c’est un élément à prendre en compte –, on parle de jeunes qui voient leur plan d’avenir remis en cause ; cela implique une certaine pédagogie et un accompagnement dans la réorientation.

Le reclassement doit constituer un outil de continuité dans le parcours du jeune et lui permettre de poursuivre à la fois son enseignement en CFA et l’acquisition de son métier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Forissier, rapporteur. Cette proposition est contraire à l’objectif de l’apprentissage. Si l’apprenti est inapte à occuper le poste correspondant au métier qu’il a choisi et prépare par l’apprentissage, son reclassement à un autre poste dans l’entreprise, qui est très souvent une petite entreprise, relève tout simplement de l’utopie.

Mieux vaut, me semble-t-il, passer par la case CFA, ainsi que nous l’avons prévu dans d’autres articles. Je connais bien les entreprises de petite taille…

M. Fabien Gay. Nous les connaissons aussi !

M. Michel Forissier, rapporteur. Il m’est arrivé d’avoir de jeunes apprentis en taille de pierre dont on se rendait compte qu’ils avaient des problèmes de dos à 16 ans et ne pourraient pas lever une charge. Dans ce cas, ce n’est pas la peine d’insister : la morphologie de l’individu est ce qu’elle est. On se débrouillait alors grâce aux chambres des métiers, même si ce n’était pas inscrit dans la loi.

Il existe une culture de l’apprentissage. Dans nos métiers, l’apprenti est quelqu’un que l’on protège et non pas que l’on exploite !

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Même avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 461.

(Lamendement nest pas adopté.)