M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Raison, rapporteur. Je viens de le vérifier : la sanction est également applicable aux producteurs.

Selon les estimations du ministère, avec un taux de 2 %, les montants concernés pourraient atteindre 5 000 euros. Et pour une grosse entreprise, les amendes peuvent aller jusqu’à 40 millions d’euros.

Le taux de 2 % nous semble donc suffisant et celui de 5 %, excessif. Pour cette raison, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. La rédaction du texte issue des travaux de la commission, à l’Assemblée nationale, prévoyait une sanction de 75 000 euros.

Les députés ont considéré, et moi avec eux, qu’un tel montant pouvait être très important pour un producteur, eu égard à l’infraction constatée.

Par contre, pour une entreprise bien installée, qui a pignon sur rue, une telle somme peut représenter assez peu au regard du préjudice subi par le producteur, notamment en matière de rémunération.

Nous nous sommes arrêtés sur un pourcentage de 2 % qui permet d’aboutir, en cas de refus de contractualisation, à une sanction financière moyenne de 6 500 euros pour un producteur, ce qui reste une somme raisonnable.

Par ailleurs, les agriculteurs, les producteurs, seront rarement concernés. En effet, je pense qu’un producteur ne saurait à aucun moment être responsable d’un refus de contractualisation. Cette responsabilité est plutôt à chercher du côté de la transformation ou de la distribution.

Ce taux de 2 % nous semble équilibré : il s’agit d’un bon niveau de sanction, cohérent avec le message que nous souhaitons faire passer sur la réussite de la contractualisation entre producteurs, transformateurs et distributeurs.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 56.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 269 rectifié bis, présenté par MM. Courteau, Cabanel, Lalande, Bérit-Débat, Vaugrenard et Montaugé, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Le fait, pour les contrats mentionnés à l’article L. 665-3, de ne pas inclure dans la proposition de contrat écrit une clause relative au versement d’un acompte dans les conditions prévues au même article ;

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Cet amendement est indissociable de l’amendement n° 270 rectifié, à l’article 5.

Quel est le problème ? Pour essayer de mieux me faire comprendre, je vais vous rapporter ce que certains viticulteurs m’ont expliqué.

Selon eux, malgré les engagements contractuels, le vin vendu n’est retiré qu’au bon vouloir du négoce et le paiement n’intervient que soixante jours après la retiraison, ce qui provoque parfois des problèmes de trésorerie.

Ainsi, les viticulteurs doivent supporter les frais de stockage d’un vin qui ne leur appartient plus, et cela durant des mois.

Mais il y a plus important : certains négociants jouent sur l’importance de ces stocks, à la veille des vendanges, par exemple, pour tenter de renégocier les prix à la baisse sous différents prétextes et même parfois, me précise-t-on, pour remettre en cause les contrats.

En l’espèce, c’est donc le pot de terre contre le pot de fer. D’où mon interrogation : que valent, dans certains cas et dans certaines situations, les accords interprofessionnels ?

Face à cette situation, j’avais fait adopter, en 2008, un amendement visant à obliger l’acheteur à verser un acompte de 15 % à la signature du contrat. Malheureusement, cette mesure a été assortie de la possibilité d’y déroger dans le cadre d’accords interprofessionnels étendus.

Le fait que cet acompte n’ait jamais été versé témoigne du déséquilibre des rapports entre vignerons et négociants. Nous proposons donc, par cet amendement, et par l’amendement n° 270 rectifié, de remettre l’ouvrage sur le métier afin de sécuriser les transactions commerciales en garantissant le versement d’un acompte de 15 % dans un délai de dix jours à compter de la signature du contrat.

Il convient d’imposer, lors des premières ventes de vin, la présence d’une clause prescrivant le paiement d’un acompte dans la proposition de contrat écrit que l’acheteur doit remettre au vendeur. Tel est l’objet de cet amendement, indissociable de l’amendement n° 270 rectifié qui sera examiné à l’article 5.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Raison, rapporteur. En écoutant M. Courteau, je me disais qu’il était plus agréable d’être parlementaire français que hollandais : il aurait pu nous parler de la blanquette de Limoux, je parlerai de champagne et de vins du Val de Loire. Discuter d’un dossier agricole en France est somme toute plus agréable que dans bien d’autres pays européens. (Sourires.)

Dans la mesure où les accords interprofessionnels sont très fréquents, le délai d’acompte prévu à l’article L. 665-3 est assez peu utilisé.

Mais les accords interprofessionnels prévoient que des acomptes seront versés tout au long du contrat. En Champagne, par exemple, le prix est réglé en quatre échéances à partir du mois de décembre qui suit la récolte – la dernière intervenant avant la récolte suivante et la première est au moins de 25 %.

Dans le Val de Loire, les vins achetés hors contrats pluriannuels sont payés dans les délais de droit commun, l’acompte n’est donc pas une préoccupation essentielle.

Je rappelle également que les accords interprofessionnels nécessitent l’unanimité et donc l’accord des producteurs. Cela doit faire l’objet de négociations pour que ce délai de versement soit le plus adapté aux contraintes géographiques vinicoles.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Il me semble nécessaire de bien faire comprendre ce qui se passe en réalité.

Les viticulteurs vont bientôt vendanger la récolte de 2018. En général, la contractualisation a lieu très rapidement, avant la fin de l’année. Comme l’a souligné M. Courteau, l’acheteur ne vient parfois retirer son vin que dix ou douze mois après la signature du contrat : la conservation du vin en l’état, souvent par le froid, est donc à la charge du producteur pendant tout ce temps, ce qui engendre des frais supplémentaires, alors qu’il n’a pas encore touché le moindre euro.

Dans quelle profession voit-on cela ? Imaginez-vous acheter votre baguette et dire au boulanger que vous ne la paierez que dans soixante jours ?

Essayons d’être raisonnables et de protéger les viticulteurs en prévoyant simplement un acompte significatif eu égard aux frais engagés par les producteurs pour maintenir le vin en l’état.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Tout a été dit ou presque par Henri Cabanel, qui parle d’expérience.

Voilà quelque temps, des viticulteurs m’ont raconté avoir signé un contrat avec le négoce sur la base d’un prix. La retiraison devait avoir lieu en avril ; en mai, le vin était encore chez les viticulteurs. En juin, en juillet, en août, aucune retiraison… Ce n’est qu’en septembre, à la veille des vendanges, que le vin a été retiré, avec une baisse significative des prix, à prendre ou à laisser.

Que croyez-vous que les viticulteurs aient dit ? Rien, car ils avaient trop peur que le vin leur reste sur les bras et, surtout, que le négociant ne veuille plus jamais leur en acheter. Nous en revenons à l’histoire du pot de terre contre le pot de fer…

Si j’ai bien compris, avec les avis défavorables émis par la commission et par le Gouvernement, les choses vont perdurer. C’est ainsi, mais il revient à chacun de prendre ses responsabilités.

M. le président. Il ne faut jamais désespérer, monsieur Courteau, le débat n’est pas fini et le vote n’a pas encore eu lieu…

La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.

M. Franck Montaugé. J’aurais aimé, sur un amendement aussi important et concret que celui-là, qui a un rapport direct avec le titre Ier de ce texte et la question du revenu des producteurs, que les conditions dans lesquelles nous l’avons examiné en commission soient différentes.

Sans faire aucun reproche à qui que ce soit, il ne nous a pas été permis, pour des raisons de temps que Mme Primas a déjà évoquées, de nous expliquer sur le fondement des amendements que nous présentons.

Je suis convaincu que la commission, sur un tel sujet, qui emporte des conséquences aussi profondes et évidentes pour tout le monde, aurait émis un avis favorable sur cet amendement – tout du moins, je veux le croire.

Monsieur le ministre, c’est parce que nous partageons le même objectif que je vous demande de bien vouloir reconsidérer votre position. Il s’agit d’une question concrète qui a un rapport direct avec le revenu des producteurs – des viticulteurs, en l’occurrence. Ils méritent que l’on se soucie d’eux.

M. Roland Courteau. Vous nous devez des explications, monsieur le ministre !

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote.

Mme Françoise Férat. Je connais sans doute assez mal l’organisation de certains territoires viticoles de France, mais je comprends et mesure, à travers les propos qui ont été tenus par nos collègues, les difficultés rencontrées – il ne s’agit même plus de difficultés, ce qu’ils vivent est tout simplement insupportable.

Toutefois, je crains que l’adoption de cet amendement ne règle rien.

M. Roland Courteau. Il sécurisera !

Mme Françoise Férat. Le rapporteur a cité la Champagne en exemple. Permettez-moi de conforter ses propos : c’est bien l’interprofession qui aide à régler ce genre de problème.

Je ne suis pas donneuse de leçons, contrairement à certains de nos collègues dans cet hémicycle, mais je crois qu’il faut un débat et une organisation différente en amont pour régler ces problèmes.

M. Roland Courteau. Pas d’explications du ministre ?

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 269 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 58, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Le fait d’acheter un produit en dessous du coût de production estimé par l’indicateur de l’Observatoire de formation des prix et des marges correspondant ;

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Il s’agit d’un amendement à but punitif, motivé par la volonté d’octroyer un revenu décent à nos agriculteurs.

Aujourd’hui, la quasi-totalité des filières agricoles vend en dessous de ses coûts de production, ce qui ne permet pas aux producteurs de dégager un salaire.

Dans la filière bovine, par exemple, les éleveurs vendent les carcasses 3,60 euros le kilo, alors qu’il faudrait les vendre 4,50 euros pour leur permettre de vivre de leur travail.

Les agriculteurs ne travaillent pas pour rien. C’est la raison pour laquelle nous proposons de sanctionner l’achat de produits en dessous de leur coût de production, déterminé par les indicateurs fournis par l’Observatoire de la formation des prix et des marges.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Raison, rapporteur. Dans certains cas très précis et conjoncturels, il peut être nécessaire, pour un producteur, de vendre à perte.

En revanche, dans un tel cas, l’article L. 420-5 du code de commerce relatif aux prix abusivement bas – à savoir une différence non justifiée entre le prix de vente et les coûts de production – s’applique. Dans ce cadre, on pourrait donc considérer que cet amendement est satisfait.

Je tiens surtout à faire une mise en garde : s’il était adopté, cet amendement instaurerait en fait des prix minimums. Or il n’y a rien de plus dangereux, car cela revient à créer une sorte de sous-salaire minimum au profit du producteur. Les prix minimums sont non seulement très administrés, mais aussi contre-productifs.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. L’adoption de cet amendement reviendrait à fixer un prix, ce que le droit communautaire ne permet pas.

Nous en revenons au débat que nous avons tenu voilà quelques instants sur la notion de prix plancher. Nous souhaitons, à travers la négociation, aller au-delà de ces prix planchers pour assurer une meilleure rémunération aux producteurs.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 58.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 57 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 576 rectifié est présenté par MM. Bérit-Débat, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, M. J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Le fait, pour un acheteur, de ne pas apporter de justifications ou de contreparties à des obligations pesant uniquement à la charge du vendeur.

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 57.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement, dans la lignée de ceux qui viennent d’être défendus, n’a qu’un seul but : conserver un équilibre entre les différentes parties au contrat.

En effet, comme le rappelle l’organisation syndicale majoritaire, certaines clauses contractuelles font peser des obligations uniquement à la charge de l’une des parties.

Vous l’aurez compris, cela crée une situation de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, alors que rien ne justifie une telle unilatéralité et qu’aucune contrepartie n’est mise en place.

En outre, ce déséquilibre peut constituer une pratique restrictive de concurrence sanctionnée par l’article L. 442-6 du code de commerce.

Cet amendement vise donc à sanctionner les pratiques constatées entre les producteurs et leurs premiers acheteurs sur la même base que le sont les relations industrie-commerce.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l’amendement n° 576 rectifié.

M. Claude Bérit-Débat. Cet amendement part d’un constat unanime et vérifié par de nombreux agriculteurs : les clauses contractuelles font souvent peser des obligations uniquement à la charge de l’une des parties, le vendeur.

De telles pratiques sont non seulement dénuées de signification, mais aussi, le cas échéant, de contrepartie. Or, comme l’a souligné Mme Cukierman, cette situation de déséquilibre manifeste entre les droits et obligations des parties constitue une pratique restrictive de concurrence sanctionnée par l’article L. 442-6 du code de commerce.

Cet amendement vise donc à instaurer une mesure qui relève de la justice à l’égard de nos producteurs, sur l’ensemble de nos territoires. Les pratiques abusives de ce type, constatées entre les producteurs et leurs premiers acheteurs, devront être sanctionnées sur la même base que le sont les relations industrie-commerce.

Cette mesure rejoint un avis de la commission d’examen des pratiques commerciales rendu à la fin de 2017 qui mentionnait déjà la persistance de ces pratiques illégales dans le secteur laitier, après avoir constaté la présence de clauses abusives intégrées par une entreprise dans ses contrats à l’endroit de ses fournisseurs, producteurs de lait. Cet exemple n’est pas anodin, monsieur le ministre.

Cet amendement fait d’une pierre deux coups, puisqu’il traite d’une problématique qui concerne aussi bien les relations entre le producteur et son premier acheteur que les contrats en aval.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Michel Raison, rapporteur. Le fait de prévoir des obligations uniquement à la charge d’une partie au contrat sans contrepartie figure déjà parmi les pratiques restrictives de concurrence constituant un « déséquilibre significatif » sanctionnées par l’article L. 442-6 du code de commerce. Cet article s’applique à tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers.

Ce manquement est difficilement contrôlable par les agents chargés de constater les manquements, puisqu’il comporte une part subjective. Un des points forts de ce projet de loi, monsieur le ministre, est d’ailleurs de permettre au médiateur de recommander la modification des contrats présentant un caractère déséquilibré. Il s’agit d’une protection supplémentaire du producteur.

Enfin, l’acheteur a l’obligation d’expliquer ses réserves sur la proposition de contrat dans un délai raisonnable, ce qui permet déjà d’apporter en partie les justifications demandées.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Je partage pleinement l’objectif de sanctionner des contrats qui ne soient pas équilibrés, mais la rédaction actuelle du texte le permet déjà. Ces amendements sont donc satisfaits.

Par ailleurs, le débat parlementaire a introduit dans le projet de loi l’obligation du retour formel de l’acheteur sur la proposition de contrat. En l’absence de réponse écrite de l’acheteur en cas de refus de la proposition de contrat, une sanction est prévue. Ces amendements sont donc également satisfaits sur ce point.

Il n’y a pas lieu de complexifier davantage le dispositif : le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 57 et 576 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 577 rectifié, présenté par MM. Tissot, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Botrel, Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Le fait, pour un acheteur, de suspendre la collecte ou la livraison des produits agricoles concernés, en cas de blocage de la négociation avec le producteur, dans le cas de la production laitière ou de denrées périssables définies par décret.

La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement vise à sanctionner tout chantage à la collecte et au déréférencement sur les producteurs.

Cette pratique induit un déséquilibre majeur dans les négociations en faveur des acheteurs industriels, tout particulièrement dans le cas de denrées périssables comme le lait.

Nous proposons donc d’appliquer l’amende administrative prévue à l’article 2 de ce texte à de tels cas.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Raison, rapporteur. Cet amendement pose plusieurs problèmes.

Il ne s’applique tout d’abord qu’aux relations entre producteurs et acheteurs. Parler de déréférencement est donc quelque peu erroné, puisque cette notion concerne les relations entre fournisseurs et distributeurs.

De plus, les sanctions ne pouvant s’appliquer que lorsque le contrat est en cours, l’acheteur ne peut arrêter la collecte du produit pendant l’exécution du contrat, sous peine de s’exposer à des sanctions.

Enfin, en cours de contrat, si le chantage a lieu au moment de la renégociation, le producteur peut invoquer les dispositions de l’article L. 442-6 du code de commerce qui sanctionne le fait de tenter d’obtenir, sous la menace d’une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions abusives concernant les prix.

Nous avons complété ce dispositif précédemment en adoptant l’amendement de MM. Labbé et Decool qui garantit trois mois supplémentaires de collecte assurée au prix du contrat pour le producteur qui rencontre des difficultés de renouvellement de son contrat laitier. Cela revient à limiter le chantage à la collecte et laisse au producteur le temps de se tourner vers un autre acheteur.

Votre amendement pouvant pratiquement être considéré comme satisfait, la commission y est défavorable, mon cher collègue.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement est satisfait.

Comme je l’ai souligné lors de la discussion d’un amendement précédent, la collecte ne peut être interrompue en cas de litige, conformément aux dispositions du code de commerce.

Pour ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Tissot, l’amendement n° 577 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Tissot. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 577 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 573 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 13, deuxième phrase

Remplacer le mot :

deux

par le mot :

cinq

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. Dans son alinéa 13, l’article 2 du projet de loi prévoit que le montant de l’amende peut être doublé en cas de réitération du manquement aux règles dans un délai de deux ans à compter de la première commission des faits.

Nous proposons de porter ce délai à cinq ans, ce qui ne nous semble pas disproportionné dans des cas de récidive. Si nous souhaitons réellement lutter contre les comportements commerciaux préjudiciables, nous devons prendre des dispositions suffisamment dissuasives.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Raison, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Ce délai de deux ans correspond à celui encouru en cas de manquement à certaines obligations prévues dans le code de commerce. Ces manquements sont assortis d’une période de prescription de trois ans.

Il nous semble pertinent d’adopter une même approche pour le code de commerce et le code rural et de la pêche maritime, afin de ne pas introduire de décalages.

Bien souvent le caractère dissuasif tient moins au montant de la sanction qu’au dispositif du name and shame que nous avons souhaité mettre en place et que la commission des affaires économiques du Sénat a repris et prolongé de deux à cinq ans. Cette approche me semble plus judicieuse.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 573 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
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Article 4

Article 3

L’article L. 631-26 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « Les manquements mentionnés à l’article L. 631-25 sont constatés par des agents désignés par décret en Conseil d’État. » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les agents mentionnés au premier alinéa du présent article peuvent, après une procédure contradictoire, enjoindre à l’auteur d’un des manquements mentionnés à l’article L. 631-25 de se conformer à ses obligations, en lui impartissant un délai raisonnable ne pouvant pas excéder trois mois. Si, à l’issue de ce délai, le manquement persiste, l’agent le constate par un procès-verbal qu’il transmet à l’autorité administrative compétente pour prononcer la sanction, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article. » – (Adopté.)

Article 3
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Article additionnel après l'article 4 - Amendements n° 65 et 97 rectifié quinquies

Article 4

I. – L’article L. 631-27 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « au I de » sont remplacés par le mot : « à » ;

2° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il peut demander aux parties communication de tout élément nécessaire à la médiation. » ;

3° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il recommande la suppression ou la modification des projets de contrats et accords-cadres ou des contrats et accords-cadres dont il estime qu’ils présentent un caractère abusif ou manifestement déséquilibré ou qu’il estime non conformes au II de l’article L. 631-24. » ;

4° Le quatrième alinéa est complété par les mots : « ou de sa propre initiative » ;

5° Après le même quatrième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Il peut saisir le ministre chargé de l’économie de toute clause des contrats ou accords-cadres qu’il estime illicite afin que le ministre puisse introduire une action devant la juridiction civile ou commerciale compétente pour faire constater la nullité de ces clauses ou contrats. En ce cas, le ministre en informe les parties sans délai.

« Il peut émettre à la demande d’une organisation membre d’une interprofession tout avis ou recommandation sur les indicateurs mentionnés à l’avant dernier alinéa du II de l’article L. 631-24. » ;

5° bis (nouveau) Après le sixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut décider de rendre publiques ses conclusions, avis ou recommandations, y compris ceux auxquels il est parvenu au terme d’une médiation, sous réserve de l’accord préalable des parties s’agissant des litiges visés au deuxième alinéa du présent article. » ;

6° À la fin du dernier alinéa, les mots : « même code » sont remplacés par les mots : « code de commerce ».

II. – L’article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« Art. L. 631-28. – Tout litige entre professionnels relatif à l’exécution d’un contrat ou d’un accord-cadre mentionné à l’article L. 631-24 ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires doit, préalablement à toute saisine du juge, faire l’objet d’une procédure de médiation par le médiateur des relations commerciales agricoles, sauf si le contrat prévoit un dispositif de médiation équivalent ou en cas de recours à l’arbitrage.

« Le médiateur des relations commerciales agricoles fixe la durée de la médiation, qui ne peut excéder un mois, renouvelable une fois sous réserve de l’accord préalable de chaque partie. Le chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative est applicable à cette médiation.

« En cas d’échec de la médiation menée par le médiateur des relations commerciales en application du premier alinéa du présent article, toute partie au litige peut saisir le président du tribunal compétent pour qu’il statue sur le litige en la forme des référés. »

III. – (Non modifié) À l’article L. 631-29 du code rural et de la pêche maritime, la référence : « au III de l’article L. 631-24 » est remplacée par la référence : « à l’article L. 631-24-2 » et la référence : « au I de l’article L. 631-24 » est remplacée par la référence : « à l’article L. 631-24-2 ».