Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 140 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Pour l’adoption | 92 |
Contre | 230 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 131 rectifié, présenté par M. Poadja, Mme Billon et MM. Henno et Kern, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Après les mots :
Confidentialité et
insérer les mots :
la vérification de
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Cet amendement vise à permettre aux services administratifs de s’assurer d’une réception effective et prouvable des documents envoyés par le demandeur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 208 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
… L’article L. 723-10 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’office ne peut fonder sa décision exclusivement sur des informations relatives à des circonstances de fait propres au demandeur d’asile ou spécifiques à son récit restées confidentielles à l’égard de l’intéressé. » ;
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement vise à garantir que, lorsqu’il est fait application du dispositif de non-divulgation d’informations ou de sources par l’OFPRA, celui-ci ne puisse fonder sa décision exclusivement sur des informations qui seraient restées confidentielles pour le demandeur.
Il ne vous aura pas échappé, mes chers collègues, comme il n’aura pas échappé pas à M. le rapporteur, qu’une telle garantie existe pour la Cour nationale du droit d’asile en vertu de l’article L. 733-4 du CESEDA.
Peut-être m’opposerez-vous, monsieur le rapporteur, que la CNDA est une juridiction, alors que l’OFPRA est un établissement public administratif. Ce à quoi je vous rétorquerai que rien n’empêche d’appliquer cette garantie aux instructions devant l’OFPRA. Il est tout de même assez désobligeant de prendre une décision en se fondant sur des informations ou des circonstances dont le demandeur ne pourrait avoir connaissance.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. La particularité de l’intervention de M. Sueur est qu’il pose la question, y répond et répond ensuite aux arguments que je n’ai pas encore avancés… Autant me rasseoir, ce sera plus simple ! (Sourires.)
Cela étant dit, l’OFPRA a parfois connaissance d’informations à caractère confidentiel qu’elle ne peut divulguer. Toutefois, les décisions de l’OFPRA doivent être motivées de façon à permettre au demandeur d’exercer un recours. C’est en raison de cette garantie essentielle que la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Je partage les arguments de M. le rapporteur.
Loin de la théorie, nous avons récemment eu à connaître de tels cas : les décisions de l’OFPRA, malgré le caractère confidentiel des informations en sa possession, doivent toujours être motivées. Toutes les garanties sont donc apportées.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 208 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 209 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
… Au 2° de l’article L. 723-11, après le mot : « effective », sont insérés les mots : « non temporaire » ;
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Il s’agit de corriger un décalage pouvant exister entre les articles L. 723-11 et L. 713-2 du CESEDA, qui indiquent respectivement les conditions dans lesquelles l’OFPRA doit prononcer une décision d’irrecevabilité d’une demande et celles d’un refus de protection subsidiaire.
Nous proposons d’aligner l’article L.723-11 sur les dispositions de l’article L. 713-2 en précisant qu’une décision d’irrecevabilité ne peut être prise que si la protection dont bénéficie le demandeur dans son pays d’origine est non seulement effective, mais aussi non temporaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à préciser la notion d’asile interne permettant à l’OFPRA de prendre une décision d’irrecevabilité.
L’asile interne permet de rejeter une demande d’asile lorsque la personne concernée peut avoir accès à une protection sur une partie du territoire de son pays d’origine.
Les dispositions de cet amendement indiquent que la protection accordée dans le pays doit être non temporaire. Or, dans la mesure où l’article L. 723-11 du CESEDA prévoit que cette protection est effective, nous pensons que l’intention des auteurs de l’amendement est satisfaite par le droit en vigueur.
Pour cette raison, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Leconte, l’amendement n° 209 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Yves Leconte. Je ne peux pas retirer cet amendement.
Pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté, les précisions que le législateur a apportées à l’article L. 713-2 doivent être étendues aux dispositions de l’article L. 723-11. Nous vous proposons donc d’harmoniser ces dispositions en adoptant cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 209 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 132 rectifié, présenté par M. Poadja, Mme Billon et MM. Henno et Kern, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Après les mots :
confidentialité et
insérer les mots :
et la vérification de
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Ici encore, même si je ne me fais guère d’illusion sur le sort qui sera réservé à cet amendement, il s’agit de s’assurer d’une réception effective et prouvable des documents par le demandeur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 210 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Lorsqu’il est informé du retrait d’une demande d’asile, l’OFPRA ne doit pas être obligé de clore le dossier.
L’Office, s’il suspecte l’existence de pressions ou d’intimidations, en raison du récit ou de l’histoire personnelle du demandeur, doit s’assurer que la demande de retrait est bien le fruit de la seule volonté de ce dernier et non fermer automatiquement le dossier.
Mme la présidente. L’amendement n° 211 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
4° bis À la première phrase de l’article L. 723-12, après le mot : « informe », sont insérés les mots : « , oralement lors de l’entretien ou à tout moment par écrit, » ;
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Il s’agit de préciser que cette demande peut se faire oralement lors de l’entretien ou à tout moment par écrit.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’amendement n° 210 rectifié bis tend à supprimer la compétence liée de l’OFPRA pour clore un dossier lorsque le demandeur a lui-même retiré sa demande d’asile. Il semble pourtant logique de prévoir cette mesure, déjà votée par le Sénat en 2015. La commission est donc défavorable à cet amendement.
L’amendement n° 211 rectifié bis, quant à lui, vise à inscrire dans la loi les modalités par lesquelles le demandeur informe l’Office du retrait de sa demande. Je rappelle que le principe est prévu par la loi et que ses modalités pratiques le sont par voie réglementaire. Il n’est pas utile de remettre en cause ce dispositif. L’avis est donc également défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Si d’autres que nous assistaient à nos débats, ils pourraient trouver étrange de vouloir forcer la personne qui retire d’elle-même sa demande d’asile à la maintenir. Curieuse façon de concevoir les choses…
Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Monsieur le ministre d’État, là encore, votre réponse peut sembler rationnelle. Toutefois, n’oublions pas que nous parlons de demandeurs d’asile qui peuvent subir des pressions de la part des autorités de leur pays d’origine, parfois sur notre territoire.
C’est la raison pour laquelle il est absolument indispensable de mettre en place des garanties permettant de s’assurer, autant qu’il est possible, que le retrait de la demande d’asile n’est pas le fait de pressions venues du pays d’origine, en particulier sur la famille du demandeur restée sur place.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Comme sur la question de la langue dans laquelle conduire les entretiens, M. le rapporteur et M. Karoutchi supposent que le demandeur d’asile est en pleine possession de ses moyens. Or, en raison du parcours chaotique qui a pu le mener jusqu’en France et de sa vulnérabilité, tel n’est pas le cas.
Il est déjà arrivé qu’une personne ait déposé une demande d’asile avant de la retirer pour les raisons qu’évoquait à l’instant Jean-Yves Leconte : s’il ne rentre pas au pays, on fait comprendre au demandeur d’asile que sa femme, ses enfants pourraient avoir à en subir les conséquences. Ce sont aussi les passeurs qui font pression, parce qu’ils veulent le diriger vers un autre pays pour lui soutirer encore quelque argent…
Pour ces raisons, nous pensons qu’il n’est pas inutile d’adopter cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 210 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 211 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 213 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 26
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
… À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 723-15, après le mot « présentée », sont insérés les mots : « dans les trois ans » ;
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Toujours pour améliorer le texte, notre groupe propose qu’une demande d’asile présentée plus de trois ans après une décision définitive de rejet devra être considérée, non comme une demande de réexamen, mais comme une demande d’asile pleine et entière.
En raison des changements qui ont pu se produire dans cet intervalle de trois ans, tant pour le demandeur que dans le pays dont il est originaire, il nous paraît nécessaire de garantir au demandeur que sa demande bénéficiera de toutes les garanties liées à un examen de droit commun et non d’un examen qui pourrait être considéré comme étant « au rabais ».
M. Philippe Dallier. Pourquoi « au rabais » ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir qu’une nouvelle demande d’asile, présentée trois ans après le rejet définitif d’une première demande, soit considérée comme une demande nouvelle et non comme une demande de réexamen.
La loi du 29 juillet 2015 a clarifié la notion de demande de réexamen, en prévoyant qu’est considérée ainsi toute nouvelle demande présentée après qu’une décision définitive a été prise sur une demande antérieure. Cette procédure a été conçue pour traiter le plus rapidement possible des demandes pouvant apparaître comme manifestement dilatoires, tout en assurant la garantie des droits des demandeurs qui apporteraient des faits nouveaux à la connaissance de l’OFPRA.
L’Office va ainsi apprécier la nouveauté et la portée des arguments invoqués par le demandeur afin de déterminer s’ils « augmentent de manière significative la probabilité que le demandeur justifie des conditions requises pour prétendre à une protection ».
Si la demande de réexamen est recevable, elle est examinée selon la procédure accélérée et fait donc l’objet d’un examen individuel par l’OFPRA. La procédure paraît donc parfaitement équilibrée.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Je suis un peu peiné par les amendements proposés.
Une personne qui a vu sa demande d’asile rejetée a théoriquement quitté notre sol.
M. François Bonhomme. Théoriquement !
M. Jean-Pierre Sueur. Dans 13 % des cas !
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Je sais bien que les mesures ne sont jamais exécutées, mais nous voulons justement remédier à ce problème, et si possible en l’espace de six mois.
Soit nous décidons que tout le monde peut venir à tout moment et que les déboutés du droit d’asile ne sont jamais éloignés, soit nous faisons respecter nos procédures. Autrement, ce n’est même pas la peine d’examiner ce projet de loi : autant laisser tout le monde venir à tout moment et rester sur notre territoire. Si tel était le cas, on irait au-devant de grandes difficultés !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je m’apprêtais à retirer l’amendement devant l’argumentation juridique de M. le rapporteur. Au regard de la considération de M. le ministre d’État, qui ne reprend nullement les arguments de M. le rapporteur, je vais le maintenir.
C’est le cinquante-cinquième amendement sur lequel vous donnez un avis défavorable,…
M. Jean-Pierre Sueur. … sachant que vous n’avez émis aucun avis favorable.
Nous respectons votre choix, monsieur le ministre d’État, mais peut-être pourriez-vous considérer que quelques idées des sénateurs des groupes d’opposition, de la gauche, peuvent être retenues, vous qui faites preuve d’un esprit si ouvert dans votre bonne ville de Lyon et dans d’autres aspects de votre vie politique, ce dont nous avons eu parfois l’occasion de nous réjouir.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je ne vais pas m’occuper de ce qui s’est passé à Lyon… (Sourires.)
Depuis un moment, tous les amendements tournent autour de la question de savoir si l’OFPRA fait correctement son travail. Un coup, on se demande si les courriers sont vraiment envoyés, une autre fois si les entretiens sont réellement menés et, quand ils ont lieu, si le demandeur d’asile comprend la langue choisie… Franchement, je ne comprends pas ces amendements, alors que tout le monde souligne, ici comme ailleurs, la qualité du travail de l’OFPRA, organisme autonome qui compte dans ses rangs des gens dévoués et consciencieux.
Un réexamen, ce n’est pas bonjour, bonsoir. Il ne dure pas trente secondes : sans reprendre la totalité de la procédure, l’OFPRA conduit un vrai travail d’enquête pour savoir si la situation a changé ou non.
Enfin, pardon de le dire, mais je partage totalement l’opinion du ministre d’État : je ne comprends pas que, dans l’hémicycle du Sénat, on puisse accepter qu’une personne dont la demande a été rejetée par l’OFPRA, puis par la CNDA et qui aurait dû quitter le territoire français ait des exigences sur la manière dont on traite son dossier. À un moment, face à l’opinion publique, il faut peut-être arrêter ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Après ce que je viens d’entendre, je pense qu’il est nécessaire de compléter nos propos.
Je suis très étonnée de ce que vient de dire Roger Karoutchi : il n’est pas question de mettre en cause la qualité du travail de l’OFPRA.
M. Roger Karoutchi. Si !
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Ce qui est amusant, c’est que vous avez voté contre un amendement que j’ai défendu, qui visait à donner davantage de latitude à l’OFPRA.
M. Roger Karoutchi. Non, ça n’avait rien à voir !
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Nous parlons de droits, Roger Karoutchi. Nous parlons d’un certain nombre de règles. C’est comme si vous disiez que le code de procédure pénale n’a pas de raison d’exister, parce qu’on fait confiance au juge. En l’espèce, il s’agit d’encadrer un certain nombre de procédures d’examen des dossiers.
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas vrai !
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Si, parce que ces gens se trouvent dans une situation que la plupart d’entre nous, et c’est tant mieux, ne connaîtront jamais. Nous opposer qu’il ne faut pas s’attacher à ces détails n’est pas à la hauteur des enjeux !
M. Roger Karoutchi. Si !
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Je terminerai par une adresse personnelle au ministre d’État : comme vous répondez en vous tournant essentiellement vers la droite de l’hémicycle, du coup, Jean-Pierre Sueur s’est vexé et n’a pas retiré son amendement. (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Dallier. À quoi ça tient !
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Monsieur le ministre d’État, si vous voulez refuser un amendement que nous avons déposé, ayez la gentillesse de nous le dire. (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Éliane Assassi. Les yeux dans les yeux !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 213 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 134 rectifié, présenté par M. Poadja, Mme Billon et MM. Henno et Kern, est ainsi libellé :
Alinéa 27
Après les mots :
confidentialité et
insérer les mots :
et la vérification de
L’amendement n° 135 rectifié, également présenté par M. Poadja, Mme Billon et MM. Henno et Kern, est ainsi libellé :
Alinéa 28
Après les mots :
confidentialité et
insérer les mots :
et la vérification de
La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter ces deux amendements.
Mme Annick Billon. Je vais vous épargner l’argumentaire : c’est le même que pour les amendements précédents.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote sur l’article.
M. Fabien Gay. En présentant l’amendement n° 38, ma collègue Michelle Gréaume est revenue sur le concept de pays d’origine sûr. Comme nous l’avons souligné, cette liste n’a pas été réexaminée, ce qui pose plusieurs problèmes.
En Albanie, par exemple, sont pointés la corruption, les obstacles à l’accès à la justice, les traitements inhumains et dégradants, les discriminations en raison de l’orientation sexuelle et de l’origine ethnique, les violences faites aux femmes et aux mineurs, notamment la traite de personnes, les entraves au droit d’asile, les entraves à la liberté d’expression, les pratiques de vendetta.
En Géorgie persistent les traitements inhumains et dégradants, la détention arbitraire. La situation des minorités sexuelles, ethniques et religieuses y est notamment problématique.
En Serbie règne encore une corruption endémique, de sorte que l’État de droit n’y est pas garanti. Les traitements inhumains de la part de la police sont fréquents. La situation des minorités ethniques, notamment des Roms, est préoccupante. Les discriminations en raison de la religion, du handicap ou de l’orientation sexuelle, ainsi que les violences faites aux femmes et aux mineurs, sont monnaie courante. Le droit d’asile y est méconnu.
Au Kosovo, la corruption et la criminalité organisée règnent. Le fonctionnement des institutions de l’État de droit, à commencer par la justice, est défaillant. Les discriminations en raison de l’orientation sexuelle et les violences à l’égard des homosexuels sont préoccupantes. Les minorités ethniques sont dans une situation déplorable. La liberté de la presse n’est pas garantie, et les journalistes font l’objet de menaces. Les femmes et les mineurs sont victimes de violences spécifiques. Le Kosovo est à la fois une source et une destination du trafic d’êtres humains.
Reconnaître ces pays ou régions autonomes de l’ex-Yougoslavie comme des pays sûrs soulève un certain nombre de questions, eu égard à l’état de délabrement de leurs institutions, lorsqu’elles existent encore.
Le fait que les ressortissants de ces pays aient déposé des milliers de demandes d’asile en France illustre bien la nécessité de nous assurer la sûreté de nos décisions. Pour ces motifs, nous ne voterons pas l’article 5.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard, , pour explication de vote sur l’article.
M. Alain Richard. Les propos tenus par M. Gay constituent des attaques non motivées et particulièrement acrimonieuses contre deux pays, l’Albanie et la Serbie, ayant fait d’énormes efforts de rétablissement de l’État de droit. Aidée par l’Union européenne, l’Albanie a procédé à une réorganisation complète de son système judiciaire. La Serbie a mené à leur terme les négociations en vue de son adhésion à l’Union européenne sur le chapitre « État de droit ». Vos affirmations, mon cher collègue, sont contraires à la réalité et particulièrement offensantes.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur l’article.
M. Jean-Yves Leconte. Pour toutes les raisons ayant justifié le dépôt des amendements que nous avons défendus, dont aucun n’a été adopté, nous voterons contre cet article, qui vise à supprimer un certain nombre de garanties et de verrous de sécurité pour les demandeurs d’asile. Il s’agit pour nous de mettre en cause non pas l’OFPRA, monsieur Karoutchi, mais l’évolution du cadre de travail qu’on lui impose.
Par ailleurs, compte tenu des évolutions que connaissent les pays du sud-est de l’Europe, il est effectivement souhaitable que l’Union européenne continue résolument à leur offrir une perspective européenne, de manière à asseoir et à renforcer leur progression vers l’État de droit.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l’article.
M. David Assouline. Je voudrais dire à M. Karoutchi, qui se pose en défenseur de l’OFPRA dans cet hémicycle, que c’est une institution à laquelle on a demandé beaucoup, dans un contexte où elle est plus sollicitée que par le passé. Elle travaille remarquablement, et nous ne pouvons que nous louer de la disponibilité de sa direction pour répondre aux questions des parlementaires. Sa position est difficile, car elle est chargée d’appliquer des dispositions qu’elle n’élabore pas. Laissez-la de côté dans ce débat.
M. Roger Karoutchi. C’est vous qui n’arrêtez pas !
M. David Assouline. Personne ici n’accuse l’OFPRA ! Nous disons simplement que la réduction des droits et des délais ne facilitera pas son travail. Je n’ai d’ailleurs jamais entendu l’OFPRA demander aux parlementaires de restreindre les droits et les procédures afin de lui faciliter la tâche.
En réalité, l’OFPRA ne dispose pas des moyens humains nécessaires pour faire face à l’accroissement du nombre des demandes d’asile attendu pour les prochaines années compte tenu de l’instabilité du monde.
Je vous donne deux rendez-vous, mes chers collègues : lors du vote du budget, nous verrons qui veut donner à l’OFPRA les moyens d’instruire les demandes d’asile de façon rapide et digne ; lors de l’évaluation du dispositif, nous verrons si les procédures que vous vous apprêtez à voter auront permis de renforcer son efficacité.