M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question concerne l’aménagement routier du nœud lyonnais.
On évoque depuis de nombreuses années l’aménagement du contournement de Lyon par l’ouest, ce qui permettrait de réaliser une boucle à l’image du périphérique parisien.
Or, lors de la récente inauguration de la liaison entre l’A 6 et l’A 89, Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur, a indiqué que le contournement ouest de la ville de Lyon, qu’il avait pourtant lui-même défendu, contournement reliant l’A 6, au nord, à l’A 7, au sud, ne se réaliserait finalement jamais.
On connaît pourtant tous les méfaits de l’étranglement du fameux tunnel de Fourvière, qui fait de Lyon une grande capitale du bouchon ! (Sourires.)
Il semble que ce soit maintenant exclusivement par l’est que s’esquisse progressivement un grand contournement routier de l’agglomération lyonnaise, lequel engendrera – mais je devrais dire « amplifiera » – des conséquences lourdes pour le département de l’Ain au regard des reports de circulation qui vont s’opérer et des nuisances associées.
C’est la raison pour laquelle je souhaite connaître les dispositions que le Gouvernement entend prendre afin de tenir compte de la situation de l’Ain et de faire en sorte que les aménagements utiles soient envisagés dans le cadre d’une vraie concertation, notamment pour les autoroutes A 432 et A 46.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Patrick Chaize, je suis tout à fait consciente des enjeux liés aux nuisances entraînées par la traversée de l’agglomération lyonnaise. Le trafic de transit y représente plus de 90 000 véhicules par jour, dont 24 000 poids lourds.
Comme vous le savez, la métropole lyonnaise souhaite pouvoir réduire le trafic traversant le cœur de son agglomération et le déplacer sur un autre itinéraire, afin de transformer l’axe A 6-A 7 en boulevard urbain.
Les premiers résultats des études privilégient l’hypothèse d’un contournement par l’est, qui mobiliserait moins de crédits à court terme et qui pourrait être lancé plus rapidement.
Ce contournement comporterait des aménagements sur les réseaux concédés d’une valeur comprise entre 260 et 680 millions d’euros dont la faisabilité doit encore être confirmée.
Cependant, un contournement par l’est ne capterait pas naturellement le trafic de transit, dans la mesure où il rallongerait de 35 kilomètres l’itinéraire nord-sud. Il faut donc travailler à des dispositifs d’incitation pour que le report du trafic en transit ait véritablement lieu.
J’ai demandé au préfet de région d’associer étroitement les élus de la métropole, mais aussi ceux des départements de l’Isère et de l’Ain, aux différents comités de pilotage sur les études. Les élus des territoires concernés ont participé à une réunion organisée le 23 février dernier. Je veillerai à ce qu’il en soit de même lors des futures réunions sur le projet.
Dans ce cadre, il sera utile de disposer d’une véritable comparaison de l’ensemble des éléments sur toutes les solutions. Nous pourrons alors, dans la concertation, et en liaison étroite avec les acteurs locaux, arrêter une stratégie de long terme sur ces trafics de transit autour du nœud lyonnais.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour la réplique.
Vous disposez d’un peu plus d’une minute, mon cher collègue.
M. Patrick Chaize. Merci de ces précisions, madame la ministre.
Vous comprenez bien que nous nous trouvons aujourd’hui dans un brouillard des plus épais. L’écart que vous évoquez sur les coûts du contournement par l’est me fait davantage penser à un râteau qu’à une fourchette ! (Sourires.)
Comment comparer les options alors que l’on ne connaît pas les résultats des études réalisées pour le contournement par l’ouest ?
Cette situation donne le sentiment d’une non-transparence très perturbante, notamment pour les élus du département de l’Ain qui subiront, de fait, les conséquences d’une telle décision.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.
M. Philippe Bonnecarrère. Madame la ministre, avant d’évoquer le projet autoroutier Castres-Toulouse, je voudrais vous souhaiter de trouver l’issue la plus favorable dans le dossier important pour notre pays dont vous assumez la responsabilité.
Comme certains de mes collègues probablement, j’avoue avoir quelques scrupules à aborder des questions, certes importantes pour nos territoires, mais de nature très différente des sujets nationaux qui concentrent votre attention.
L’autoroute Castres-Toulouse a fait l’objet d’un engagement depuis plusieurs années. Voilà quelques mois, madame la ministre, vous avez bien voulu confirmer que l’État respecterait cet engagement même si, dans le meilleur des mondes, la délégation autoroutière n’est peut-être pas le mode que vous auriez choisi. Toutefois, comme vous le savez, le territoire castrais-mazamétain ne s’est jamais vu proposer d’autre solution, raison pour laquelle l’ensemble des parties prenantes a retenu le principe d’une délégation.
Il s’agit d’un enjeu essentiel pour le bassin castrais–mazamétain, ainsi que pour l’ouest de notre département, qui représente environ 150 000 habitants.
Ce projet respecte les priorités présidentielles que vous avez rappelées dans le domaine du transport du quotidien ou de l’emploi.
Le rapport Duron a reconnu le caractère prioritaire de ce projet, puisqu’il figure en première partie du scénario 2 lorsqu’on consulte les annexes.
En conséquence, madame la ministre, pouvez-vous confirmer à mes concitoyens tarnais votre engagement en faveur de la mise en œuvre du projet autoroutier Castres-Toulouse dans le cadre du choix, espéré, du scénario 2 ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Philippe Bonnecarrère, vous savez mon attachement à l’amélioration de la desserte du bassin d’emplois de Castres-Mazamet et, plus globalement, à celle des territoires de l’est toulousain.
Il s’agit vraiment d’un très bel exemple de ce que doit être notre politique en termes de mobilité.
Je me rends à Toulouse jeudi. J’aurai l’occasion de vous y rencontrer avec les membres du conseil régional et les présidents des conseils départementaux, pour approfondir notre réflexion autour de ces enjeux.
En tout cas, le désenclavement du sud du Tarn est un objectif que nous cherchons à atteindre depuis maintenant plus de trente ans. Il faut garantir l’accessibilité de ce territoire en construisant une infrastructure adaptée aux besoins de la population et de l’économie locale, et favoriser ainsi une meilleure structuration de l’aire métropolitaine toulousaine, en soutenant le développement d’un réseau de villes moyennes organisé en étoile autour de Toulouse.
L’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique a été menée au début de l’année 2017 et a conduit la commission d’enquête à émettre un avis favorable sur le projet. Je vous le confirme, les engagements que j’avais pris concernant la poursuite des procédures seront tenus. L’arrêté préfectoral déclarant d’utilité publique les travaux de doublement de la bretelle de l’A 680 a été signé le 22 décembre 2017. S’agissant de la section Verfeil-Castres, un important travail d’étude et de concertation avec les acteurs locaux était nécessaire pour lever les réserves formulées par la commission d’enquête.
Mon objectif est clair : l’aménagement doit être réalisé conformément au calendrier proposé par le Conseil d’orientation des infrastructures dans son rapport. Nous aurons l’occasion d’en débattre prochainement dans cet hémicycle lors de l’examen du volet relatif à la programmation des infrastructures du projet de loi d’orientation sur les mobilités.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour la réplique.
M. Philippe Bonnecarrère. Je vous remercie du soin que vous prenez, madame la ministre, à respecter les engagements pris, lesquels s’inscrivent dans le prolongement des entretiens que vous nous avez accordés. Vous confirmez ainsi aux Tarnais que la réalisation du projet autoroutier Castres-Toulouse pourrait être respectée. Nous restons bien sûr attentifs à l’issue du travail technique, qui se poursuivra notamment à l’occasion de notre rendez-vous de jeudi prochain.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question rejoint celle qui a été posée par Mme Éliane Assassi.
Depuis le courant des années deux mille, la très grande majorité des autoroutes françaises sont régies par des partenariats public-privé, qui prennent la forme de concessions ou, plus rarement, de marchés de partenariat. Dans ces deux cas, l’État confie à un partenaire privé une mission globale. Pour une concession, les recettes proviennent du paiement des péages par les usagers. Pour un marché de partenariat, la rémunération du partenaire privé est assurée par un loyer financé in fine par le contribuable.
En dix ans, les tarifs des péages ont connu une hausse de plus de 20 %, soit une augmentation supérieure à l’inflation. Le 1er février dernier, ces tarifs ont encore augmenté de 1 % à 4 %. Ces augmentations sont difficilement acceptables lorsque l’on sait que, dans le même temps, les sociétés privées autoroutières se portent particulièrement bien, avec une rentabilité élevée qui se situe entre 20 % et 24 %.
L’ARAFER avait d’ailleurs indiqué que les augmentations des tarifs de péages prévues excédaient le juste niveau qu’il était légitime de faire supporter aux usagers. L’autorité de régulation estimait notamment que le niveau de rémunération des sociétés concessionnaires devait être plus conforme aux risques supportés. À titre d’exemple, le coût du trajet sur l’A 28 entre Rouen et Alençon coûte 23,70 euros pour 161 kilomètres.
Le nouveau plan d’investissement autoroutier devrait être l’occasion d’amender certaines clauses du cahier des charges des conventions de concession.
Madame la ministre, vous venez de réaffirmer le rôle régulateur de l’État, qui imposerait des critères précis et stricts dans ces conventions, afin d’encadrer, entre autres choses, les augmentations de tarifs des péages. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce point ?
Je signale enfin un manque de transparence, puisque l’accord conclu le 9 avril 2015 entre l’État et les sociétés d’autoroutes n’a toujours pas été communiqué, en dépit de l’avis de la CADA, la Commission d’accès aux documents administratifs, et de l’injonction du tribunal administratif.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Houllegatte, vous m’interrogez sur les concessions autoroutières. Il faut tout de même avoir en tête que le système des concessions a permis le développement de 9 000 kilomètres d’autoroutes de très grande qualité, qui représentent un actif estimé à 150 milliards d’euros ayant vocation à revenir à l’État au terme des concessions.
Comme en témoignent nombre d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qui réclamaient de telles infrastructures sur votre territoire, ces autoroutes présentent de multiples avantages non seulement en termes de sécurité – le nombre de victimes y est très inférieur à celui que l’on a à constater sur les réseaux secondaires –, mais aussi de qualité d’entretien et de travaux et, donc, d’emplois. Aujourd’hui, le réseau concédé représente environ 75 % du réseau autoroutier français.
Le choix a été fait de réaliser ce développement autoroutier sous forme de concessions, système dans lequel la rémunération du partenaire privé tient compte du risque lié aux variations de trafic.
On peut s’interroger pour l’avenir, notamment au terme des conventions de concession, sur le fait de savoir si celles-ci restent le meilleur modèle. En effet, dès lors que le trafic sur ces autoroutes concédées est stable, il faut se demander si les modèles de partenariat public-privé ne seraient pas davantage adaptés en évitant de rémunérer un risque qui n’existerait pas.
Quoi qu’il en soit, je vous le confirme, depuis l’adoption de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques ou « loi Macron », de nouveaux outils ont été mis en place pour contrôler les sociétés concessionnaires, pour la passation des marchés comme pour le respect de leurs engagements. L’ARAFER dispose dorénavant de tous les leviers nécessaires pour assurer le contrôle de ces sociétés concessionnaires.
M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce débat sur les infrastructures routières, à la suite de la présentation du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures, était plus que nécessaire tant ses conclusions ont été arrêtées arbitrairement, sans aucune concertation préalable avec les élus locaux.
Comme en 2012 et la fameuse commission Mobilité 21, l’État revient sur ses engagements en supprimant des opérations pour lesquelles il avait pourtant contractualisé un financement avec les collectivités locales.
La méthode est pour le moins scandaleuse, et je peux vous dire que, sur le terrain, elle porte un coup fatal à la crédibilité de l’État !
Chez nous, dans notre département, c’est la poursuite de la liaison est-ouest d’Avignon, dite « voie LEO », qui a été retoquée. Dans son rapport, le COI estime devoir réévaluer l’opportunité du projet et le reporte… à 2037. Rien que ça !
Ainsi, cette liaison autoroutière, dont le principe a été arrêté en 1987, afin de relier l’A 7 et l’A 9 par le sud d’Avignon, resterait en l’état. Seule la première tranche du projet décidée à la suite de la déclaration d’utilité publique de 2003 a été inaugurée en 2010, après un investissement de 130 millions d’euros d’argent public, pour un trafic de 5 000 véhicules par jour seulement ! Pourquoi ? Parce que ce premier tronçon ne débouche sur rien !
Le 28 septembre 2016, les financeurs s’étaient engagés, lors d’une réunion à la préfecture de région, à inscrire au contrat de plan État-région la réalisation d’une partie de la deuxième tranche, longue d’un kilomètre et demi. C’est ce petit barreau qui est remis en cause par le Conseil d’orientation des infrastructures !
Autant vous dire, madame la ministre, que la réaction de tous les élus concernés a été violente, solidaire et déterminée. Les députés d’Avignon et de Châteaurenard ont d’abord rencontré votre directeur de cabinet, M. Papinutti. Puis, le 14 mars dernier, une imposante délégation composée du maire d’Avignon, du président de l’agglomération, des cinq parlementaires locaux, ainsi que des représentants des deux départements et de la région s’est rendue à Matignon pour saisir le Premier ministre de ce dossier.
À cette occasion, nous avons clairement exprimé deux exigences.
Premièrement, nous voulons obtenir la réalisation totale de la tranche 2 de la LEO, dont le coût est estimé à 147 millions d’euros, afin de mettre un terme à l’enfer que subissent quotidiennement les 20 000 riverains de la rocade urbaine d’Avignon, qui voient passer sous leurs fenêtres 44 000 véhicules par jour dont 3 000 poids lourds…
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Alain Dufaut. … transitant par cette rocade pour relier l’A 7 à l’A 9, ce qui entraîne une pollution hors norme avec des conséquences sanitaires très graves.
M. le président. Il faut vraiment conclure !
M. Alain Dufaut. Deuxièmement, nous souhaitons la mise en œuvre de la tranche 3, qui prévoit un viaduc sur le Rhône.
Madame la ministre, quels engagements l’État peut-il prendre aujourd’hui au regard de cette double exigence ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Je tiens à le souligner, le COI, qui a fourni un travail dont je veux de nouveau souligner la qualité, n’est pas l’État. Ce rapport a été établi par une équipe associant des sénateurs – je remercie à ce titre le président Hervé Maurey –, des députés, ainsi que des élus régionaux, départementaux et des élus des grandes agglomérations. Il s’agit donc d’un travail non seulement d’experts, mais aussi d’élus. Je tiens également à rappeler les nombreuses concertations organisées par le COI, qui a également conduit des visites sur le terrain.
S’agissant de la rocade d’Avignon, le Conseil d’orientation des infrastructures n’aurait pas nécessairement eu à se prononcer sur ce projet. En installant le Conseil d’orientation des infrastructures, nous avons voulu disposer d’une vision d’ensemble sur les très grandes infrastructures. Les projets qui se déroulent dans le cadre des contrats de plan ont a priori vocation à être poursuivis dans ce cadre.
Je suis bien consciente de l’importance des problèmes de congestion et de la nécessité de délester la rocade sud d’Avignon, qui est totalement saturée. C’est un constat que nous partageons.
La première tranche, dite « T1 », a été mise en service en octobre 2010. La réalisation des tranches T2 et T3 reste à faire. Je vous le confirme, les engagements pris dans le cadre des contrats de plan pour la première phase de la tranche T2 seront honorés. Les phases suivantes ont vocation à trouver leur place dans les prochains contrats de plan.
Enfin, comme vous le savez, la tranche T3 est en réalité un nouveau pont d’Avignon, dont le coût sera probablement important, et dont la maîtrise d’ouvrage pourrait sans doute être assurée par un concessionnaire. Restera à déterminer qui de l’État ou des collectivités locales pourrait porter ce dossier.
Quoi qu’il en soit, j’ai bien conscience de l’importance de ce projet, dont la réalisation doit se poursuivre dans le cadre des contrats de plan et sous la forme d’une concession s’agissant de la tranche T3.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.
Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en mars 2017, un avenant au contrat de plan État-région Nouvelle-Aquitaine était signé. Pour le volet routier, il se traduisait par une augmentation de 25 millions d’euros de la participation de l’État et de la région, afin de mener à bien l’opération d’aménagement de la RN 141 entre Angoulême et Limoges, consistant en la mise à deux fois deux voies de la section Chasseneuil-sur-Bonnieure-Exideuil-sur-Vienne dans le département de la Charente, que vous connaissez bien, madame la ministre.
Ces crédits supplémentaires permettront de finaliser l’aménagement en deux fois deux voies de la section Roumazières-Loubert-Exideuil-sur-Vienne, avec la réalisation de la première phase d’ici à 2020, et de préparer la réalisation de la seconde phase entre Chasseneuil-sur-Bonnieure et Roumazières-Loubert, en effectuant les études et acquisitions foncières, ainsi que les travaux préparatoires.
On s’en souvient, le 20 septembre dernier, vous annonciez une augmentation de 100 millions d’euros de l’enveloppe des crédits de l’État affectés en 2018 à l’entretien des routes, soit une augmentation de plus de 30 % par rapport à 2017.
Madame la ministre, ma question est la suivante : compte tenu à la fois de cette annonce d’une augmentation considérable des crédits de l’État alloués au domaine routier et de l’état catastrophique de la ligne ferroviaire entre Angoulême et Limoges – je vous rappelle que les trains ne circulent plus sur cette ligne depuis plusieurs semaines –, peut-on espérer que les aménagements de l’axe routier Angoulême-Limoges, qui est aussi l’axe reliant Limoges à la capitale bordelaise, puissent bénéficier de moyens financiers supplémentaires de la part de l’État ? Peut-on également espérer une avancée plus rapide des travaux d’aménagement à deux fois deux voies de la RN 141, notamment pour la réalisation de la seconde phase ?
Vous le savez, la Charente a tout autant besoin de l’achèvement des travaux d’urgence et de sécurité sur la RN 141 que de la réhabilitation de la ligne ferroviaire Limoges-Angoulême, que nous appelons « ligne du quotidien », en vue de sa mise en performance. L’un n’empêche pas l’autre : le département a besoin des deux infrastructures, même si ma question porte aujourd’hui sur le volet routier.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Madame la sénatrice Nicole Bonnefoy, vous le savez, je suis pleinement consciente de l’importance d’un aménagement rapide de la RN 141, des enjeux la concernant en matière de fiabilisation des temps de parcours, d’amélioration de la sécurité routière et de la qualité de vie des riverains.
La RN 141 correspond à la section ouest de la route Centre Europe Atlantique, qui est une liaison transversale très importante pour le réseau national français, puisqu’elle rattache la façade atlantique au sillon rhodanien. Compte tenu des niveaux de trafic supportés et des enjeux que je viens de rappeler, cet axe a clairement vocation à être progressivement aménagé en deux fois deux voies.
Cet aménagement est aujourd’hui bien avancé, puisqu’il est réalisé aux trois quarts sur l’itinéraire entre Royan et Limoges. Il se poursuit grâce à la mobilisation de plus de 150 millions d’euros dans l’actuel contrat de plan, dont près de 80 millions d’euros financés par l’État.
À ce titre, les efforts de l’État et de ses partenaires se concentrent sur deux sections : entre La Vigerie et Villesèche et entre Chasseneuil-sur-Bonnieure et Exideuil-sur-Vienne.
S’agissant de la section La Vigerie-Villesèche, les travaux ont démarré à l’automne 2016, avec la construction d’un ouvrage d’art, et se poursuivront en 2018. Pour ce qui concerne la section Chasseneuille-sur-Bonnieure-Exideuil-sur-Vienne, qui constitue le dernier segment de la RN 141 à aménager à deux fois deux voies entre Limoges et Angoulême, et ce sur vingt kilomètres, le coût total de l’opération est évalué à 180 millions d’euros. Malgré un contexte budgétaire fortement tendu, plus de 10 millions d’euros ont été programmés en 2018 pour construire un pont-rail et engager les travaux de terrassement prévus sur la section Roumazières-Loubert-Exideuil-sur-Vienne, ce qui témoigne de la volonté de l’État de faire avancer ce dossier.
Il va de soi que ces aménagements seront mis en œuvre. Ils ont d’ailleurs vocation à se poursuivre dans le cadre du plan de désenclavement, qui fera partie de la loi de programmation des infrastructures dont nous aurons prochainement l’occasion de débattre devant votre assemblée.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur la RN 135.
Vous me direz que c’est un petit bout de route nationale entre la RN 4 et la coquette préfecture de la Meuse, Bar-le-Duc, et que je ne fais ici que défendre les infrastructures desservant mon département, comme le font bon nombre d’élus pour les leurs, généralement oubliées par le Conseil d’orientation des infrastructures.
En l’espèce, mon intervention a une dimension nationale qui la justifie.
Madame la ministre, j’attire donc votre attention en tant que ministre chargée des infrastructures ainsi que, plus largement, l’attention du Gouvernement au travers du ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, et de son secrétaire d’État, Sébastien Lecornu, qui connaît admirablement bien le sujet, sur un morceau de RN 135 : il servira principalement à l’avenir d’accès national au Cigéo, le centre de stockage souterrain en couche géologique profonde des déchets nucléaires à haute activité et à vie longue, actuellement en projet.
Ce projet de RN 135, qui connaît une évolution lente depuis une vingtaine d’années, mais certes comparable au rythme de toutes les réalisations nationales en la matière, doit cependant bénéficier, au-delà de l’accord signé en 2017, d’un double engagement.
Premièrement, il convient de ne pas reporter à 2021 le début effectif des travaux. Deuxièmement, il faut intégrer cette réflexion dans une réflexion d’ensemble sur la desserte du site de Cigéo.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Gérard Longuet, vous m’interrogez sur les intentions du Gouvernement concernant la RN 135. En effet, cette route nationale fait partie des mesures d’accompagnement du projet Cigéo. Comme vous le savez, le trafic sur la RN 135 s’élève à environ 10 000 véhicules par jour sur sa section centrale et monte à 14 000 véhicules par jour au niveau de ses sections extrêmes à Bar-le-Duc et Ligny-en-Barrois.
L’État a anticipé l’augmentation du trafic liée au développement du secteur de Bar-le-Duc et a déjà réalisé le contournement de la ville et la déviation de Longeville-en-Barrois. L’autre extrémité du barreau, au droit de Ligny-en-Barrois, sera également traitée avec la mise en œuvre de la déviation de Velaines, actuellement inscrite au contrat de plan pour un montant de 48 millions d’euros, dont un peu plus de 27 millions d’euros de l’État. Une convention de financement vient d’être signée entre l’État et les collectivités.
Cette opération doit se poursuivre avec des travaux préparatoires qui pourraient débuter en 2019. Il nous faut encore examiner, en lien avec le projet Cigéo, les aménagements qui pourront être réalisés sur les morceaux manquants, la déviation de Tronville-en-Barrois et l’aménagement à deux fois deux voies entre Longeville-en-Barrois et Tannois. Nous devrons disposer d’un diagnostic global de cet itinéraire pour anticiper les améliorations à engager sur cet axe, à la fois en termes de confort de circulation, de sécurité routière et de qualité de service à moyen et long terme.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour la réplique.
Vous disposez de quarante et une secondes, mon cher collègue.
M. Gérard Longuet. Quarante et une secondes ? C’est trop, monsieur le président ! C’est vraiment d’une générosité extrême ! (Sourires.)
Plus sérieusement, je vous remercie, madame la ministre, de prendre en compte la cohérence des actions gouvernementales, qu’il s’agisse de votre secteur ou de celui de l’énergie. En effet, l’aménagement en question doit permettre l’engagement du chantier, sans qu’il constitue à l’avenir une gêne majeure pour les riverains de la RN 135 et les habitants de Ligny-en-Barrois, dont la commune sera traversée par de nombreux engins.