Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, tendant à mieux maîtriser le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales et à simplifier certaines normes réglementaires relatives à la pratique et aux équipements sportifs
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Mes chers collègues, je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les interventions des orateurs valaient explication de vote.

Je mets aux voix la proposition de résolution.

(La proposition de résolution est adoptée.)

M. le président. Je constate que la proposition de résolution a été adoptée à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, tendant à mieux maîtriser le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales et à simplifier certaines normes réglementaires relatives à la pratique et aux équipements sportifs
 

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Avenir des lignes LGV et aménagement du territoire

Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Républicains, sur « les scénarios du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures du 1er février 2018 au regard de l’avenir des lignes LGV et de l’aménagement du territoire ».

Nous allons procéder au débat sous la forme d’une série de questions-réponses dont les modalités ont été fixées par la conférence des présidents.

Je vous rappelle que l’auteur du débat disposera d’un temps de parole de dix minutes, y compris la réplique, puis le Gouvernement répondra pour une durée équivalente.

Dans le débat, la parole est à M. Gérard Cornu, pour le groupe auteur de la demande.

M. Gérard Cornu, pour le groupe Les Républicains. Je me réjouis de l’initiative du groupe Les Républicains qui permet de débattre sereinement des conclusions du Conseil d’orientation des infrastructures, le COI, sur un sujet caractérisé depuis trop longtemps, il faut oser le dire, par les annonces et la fuite en avant, et par une technique bien connue en politique et bien éprouvée, qui veut que les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent !

La mission confiée au COI consistait donc à évaluer les besoins en termes de mobilité, à étudier les projets de transport sur tout le territoire et à les prioriser selon une grille comportant six critères d’évaluation : environnement, mobilité pour tous-solidarité, qualité de vie-efficience, sécurité et sûreté, aménagement du territoire, enfin création de valeur socio-économique. Il s’agissait aussi de trouver des pistes de financement associées, en fonction des différents scénarios.

Car avec une dette publique établie à 2 500 milliards d’euros à la fin de l’année 2017, soit plus de 95 % de notre PIB, il est plus que temps de céder enfin au réalisme, d’en finir avec les promesses qui n’engendrent que frustrations et déceptions, et donc de tenir compte de la contrainte financière. C’est également ce que préconise le rapport Spinetta, qui ne fait que renforcer les conclusions du COI.

Partageant a priori cette approche faite de rigueur et de pragmatisme, j’ai accepté d’être membre du COI, composé de dix élus locaux, nationaux et européens de différentes sensibilités politiques, et de six personnalités qualifiées. J’ai d’ailleurs eu le plaisir de retrouver deux collègues sénateurs, Hervé Maurey et Michel Dagbert, ainsi que notre ancien collègue Louis Nègre, spécialiste de ces sujets. Le rapport du COI s’intitule Mobilité du quotidien : répondre aux urgences et préparer lavenir. On ne saurait mieux dire !

Certaines réactions à ce rapport ont été vives, ce n’est pas une surprise. Je le comprends d’ailleurs, d’autant que le rôle des élus, notamment des sénateurs, est de défendre ardemment leur territoire. Ils le font avec pugnacité et compétence, ce que nul ne peut leur reprocher.

Cependant, ce rapport est guidé par une logique forte, qui vise à transformer en actes les intentions affichées. Si l’expression des politiques générales est admise par tous, en tirer les conséquences concrètes, en rupture avec les habitudes antérieures, est forcément plus délicat.

Il n’est pas question de délaisser le ferroviaire ni de se désengager des territoires ruraux, comme on a pu l’entendre dire depuis la parution du rapport.

Il n’est pas question non plus de ne maintenir que les lignes qui seraient considérées comme rentables ou susceptibles de l’être.

Il est question, simplement, de mieux prioriser les dépenses de l’État : le transport ferroviaire doit répondre à des besoins effectifs. Si l’on estime que l’on ne peut plus se permettre de maintenir un trafic qui ne serait pas suffisamment utile, il est bien évident qu’il faut trouver des modes alternatifs de transport permettant aux habitants de circuler le plus facilement possible.

Le travail du COI a donc consisté à analyser une série de projets et leur coût, face aux crédits disponibles – j’insiste bien sur ce dernier point.

Depuis octobre 2017, de multiples auditions, réunions et déplacements ont eu lieu. Plus de quarante projets ont été passés en revue, dont une demi-douzaine de LGV et une quinzaine de tronçons autoroutiers, sans oublier les projets fluviaux.

Nous avons discuté, fait des choix et proposé au Gouvernement trois scénarios, construits à partir du périmètre actuel des transports de l’État, dans tous les modes, excepté l’aérien qui sera traité dans le cadre des Assises de l’aérien.

Trois scénarios donc, l’un à 48 milliards d’euros, l’autre à 60 milliards d’euros et enfin le dernier à 80 milliards d’euros. C’est-à-dire que le COI a fait le choix de repousser plus ou moins loin dans le temps les grands travaux en les découpant, dans certains cas, en phases successives.

Le premier scénario est celui de l’orthodoxie financière. Il prévoit sans ressources supplémentaires d’accorder 2,4 milliards d’euros par an à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, soit 48 milliards d’euros en vingt ans, ce qui laisse très peu de marges de manœuvre et oblige à une pause de cinq à dix ans pour les grands projets. Ce scénario repousse autour de 2050 l’ambition de les avoir achevés. C’est finalement un scénario « au fil de l’eau », qui s’éloigne assez peu de la politique qui a toujours prévalu jusqu’à présent. Il n’a pas ma préférence, même s’il a le mérite d’avoir été mis noir sur blanc.

Le deuxième scénario prévoit 60 milliards d’euros en vingt ans pour l’AFITF, soit 3 milliards d’euros de dépenses par an – 55 % au-dessus des dépenses 2012-2016. Il s’agit de consentir un effort accru, considérable et soutenu dans la durée pour affecter 600 millions d’euros supplémentaires à l’AFITF à partir de recettes existantes ou de nouvelles recettes à trouver. Ce scénario permet d’avancer les premières phases des grands projets les plus utiles et de réduire la saturation des principaux nœuds ferroviaires. Les projets sont ensuite poursuivis de façon progressive.

L’effort est encore accru avec le troisième scénario, qui prévoit 80 milliards en vingt ans pour l’AFITF, soit 3,5 milliards d’euros par an à court terme d’ici à 2022, puis 4,4 milliards d’euros par an durant les dix années suivantes, et ensuite 4 milliards d’euros par an. Ce scénario, qui conduit à doubler pendant au moins dix ans la dépense, précise les possibilités concrètes pour accélérer telle ou telle opération. Néanmoins, d’après le COI, un tel niveau semble difficile à atteindre, d’une part, pour les collectivités territoriales appelées à cofinancer, d’autre part, pour l’État supposé être en mesure de dégager des moyens accrus.

Cela étant, j’assume, quel que soit le scénario qui sera finalement retenu par le Gouvernement, la priorité accordée dans le rapport à la résorption des nœuds ferroviaires, car ceux-ci sont à l’origine de nombreux dysfonctionnements. J’assume également le choix de la rénovation des trains du quotidien au détriment de la création de lignes nouvelles, dont les financements sont de toute façon impossibles à identifier, du côté de l’État comme des collectivités locales.

Oui, il est absolument fondamental de traiter prioritairement les nœuds ferroviaires afin de rendre les gares plus efficaces et fiables, de décongestionner les accès aux principales gares et de préparer la création de lignes nouvelles, sous peine de contribuer encore plus à leur saturation. C’est une urgence et une priorité absolue.

Les usagers ne savent pas toujours qu’un train à l’arrêt n’est pas forcément en panne et qu’il peut tout simplement être obligé d’attendre son tour. S’agissant des TGV, cet engorgement, ces retards ne sont pas admissibles. Il n’est pas non plus admissible que les TGV soient trop souvent contraints de ralentir à l’approche des gares, alors qu’ils sont conçus pour rouler à une vitesse bien plus élevée. La résorption des nœuds ferroviaires permettra aux TGV circulant de conserver leur vitesse optimale. À quoi sert-il d’avoir construit des lignes spécifiques si les TGV sont obligés d’y rouler à la vitesse de TER à cause des nœuds ferroviaires ?

Les nœuds ferroviaires franciliens qui perturbent l’accès aux grandes gares franciliennes doivent être prioritairement décongestionnés, et pas seulement à Paris. On parle trop souvent – à tort selon moi– de Paris, qui aurait été privilégié.

Il faut également traiter le nœud ferroviaire lyonnais, qui présente le plus grand caractère d’urgence. Mais aussi traiter les nœuds ferroviaires du nord de Toulouse et du sud de Bordeaux, Marseille et Nice, sans oublier – le rapport le précise d’ailleurs – d’agir rapidement sur des nœuds de plus petite ampleur.

La prochaine ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs est devenue inéluctable depuis l’adoption du quatrième « paquet ferroviaire » en décembre 2016. Nous en discuterons tout à l’heure lors de l’examen de la proposition de loi d’Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, et de Louis Nègre, notre ancien collègue sénateur. Cette ouverture impose la mise à niveau de notre patrimoine ferroviaire, qui a commencé à se déliter avec la priorité accordée à la création de nouvelles lignes de TGV.

C’est pourquoi le COI a insisté, au-delà des nœuds ferroviaires, sur le maillage du territoire, en préconisant la régénération des lignes de trains du quotidien et la rénovation des lignes ferroviaires existantes.

Pour conclure, est-ce la fin de l’histoire pour les projets qui ne sont pas retenus par le Conseil d’orientation des infrastructures ? Bien sûr que non ! Le COI a rejeté très peu de projets. Dans la plupart des cas, il a simplement considéré que tel ou tel projet était moins prioritaire et pouvait attendre. Ces projets pourront donc être réexaminés dans le cadre d’une clause de revoyure.

Le COI a fait des propositions en vue d’une programmation qui a vocation à être inscrite dans la loi d’orientation sur les mobilités. Il appartient maintenant au Gouvernement de décider des suites qu’il entend donner à ces propositions, puis de les traduire dans un projet de loi soumis à la représentation nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. Je vous remercie, mon cher collègue, d’avoir strictement respecté les dix minutes imparties. Néanmoins, comme vous avez totalement épuisé votre temps de parole, vous n’aurez plus aucune possibilité de répondre à la fin du débat.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, lors de son discours du 1er juillet à Rennes, le Président de la République a souhaité que la politique des mobilités se recentre sur les préoccupations premières de nos concitoyens et de nos entreprises : les transports du quotidien, la lutte contre la congestion des grandes agglomérations, l’accès à l’emploi et aux services dans les territoires, l’optimisation de nos systèmes logistiques. Il a voulu également que cette réforme s’engage dès le début du quinquennat.

Les besoins de nos territoires, de nos concitoyens, de nos entreprises, évoluent, vous le savez, rapidement, et le secteur des transports doit contribuer activement à la transition écologique, dans un contexte marqué par les contraintes qui pèsent sur les capacités financières des pouvoirs publics : sur celles de l’État et, j’en suis consciente, sur celles des collectivités.

L’État et les collectivités territoriales doivent donc anticiper et accompagner ces évolutions en révisant en profondeur leurs stratégies et leurs modes d’action.

En effet, pour ne prendre que l’exemple du ferroviaire qui sera au cœur de nos échanges pendant les prochains jours, si l’inauguration de quatre lignes à grande vitesse au cours des deux dernières années peut être un légitime motif de satisfaction, voire de fierté, qui peut se satisfaire de la dégradation continue de nos infrastructures de transports, des 5 300 kilomètres de notre réseau ferré sur lesquels nos trains circulent au ralenti et ne sont plus à même de répondre aux besoins des usagers ?

Il y a donc urgence à revisiter nos choix d’investissement et, là où des promesses non financées ont longtemps créé de faux espoirs, abîmé la confiance de nos concitoyens dans les engagements de l’État, nourri le sentiment d’abandon de nombreux territoires, nous voulons leur proposer un nouveau cadre d’action et de programmation tourné vers les besoins du quotidien, équilibré en ressources et en dépenses.

Ce besoin de changement, votre Haute Assemblée l’appelle de ses vœux depuis plusieurs années.

Ce besoin de changement, nos concitoyens l’ont exprimé avec impatience dans les ateliers territoriaux des Assises nationales de la mobilité.

Cette impatience, celle dont vous êtes également les témoins dans vos territoires, je la comprends, je la partage et je mesure l’urgence de lui apporter une réponse, au risque de voir se creuser les fractures sociales et territoriales.

Le Gouvernement s’est donc employé à ouvrir une page nouvelle, faite d’écoute, de cohérence et de sincérité.

C’est le sens de la mise en place en septembre dernier du Conseil d’orientation des infrastructures, présidé par Philippe Duron. Ce conseil, je l’ai souhaité composé de femmes et d’hommes en prise directe avec les besoins des territoires et de nos concitoyens. J’ai souhaité qu’il représente la diversité des collectivités territoriales. J’ai souhaité que ses travaux puissent s’enrichir de la diversité des horizons tant professionnels que politiques de ses membres.

Permettez-moi de saluer, devant vous, l’engagement de vos collègues qui ont activement contribué aux travaux du COI : Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, Gérard Cornu, que je remercie d’être à l’initiative de ce débat, et Michel Dagbert. La mission confiée était ardue, ils n’ont ménagé ni leur temps ni leurs efforts pour réussir cette ambition collective.

Au final, c’est bien à l’unanimité des membres du COI que le rapport qui m’a été remis le 1er février dernier a été adopté. Il débouchera, vous le savez, sur une loi de programmation qui vous sera présentée dans les prochaines semaines, et répondra ainsi à la première recommandation formulée par la commission des finances du Sénat en septembre 2016 dans son rapport Infrastructures de transport : sélectionner rigoureusement, financer durablement. Celui-ci préconisait d’« adopter, au début de chaque législature, une loi de programmation des infrastructures de transport, établissant une liste hiérarchisée des grands projets et une programmation financière pluriannuelle, sur la base des travaux d’une commission permanente composée d’élus nationaux, locaux et d’experts, qui sera ensuite chargée d’examiner tous les ans l’avancement des projets programmés et de proposer, le cas échéant, des ajustements ». Cette recommandation ne restera pas lettre morte.

C’est l’objectif même de la démarche dans laquelle le Gouvernement s’est engagé.

C’est l’exercice courageux auquel se sont employés les membres du COI durant quatre mois d’un travail considérable qui fera date, ponctué par plus de cinq cents auditions.

Ce rapport réinterroge de fond en comble notre politique d’investissements dans les infrastructures, en repartant d’une question simple et primordiale : à quels besoins devons-nous répondre en priorité ?

Il propose trois scénarios. C’est là aussi le caractère inédit de ce travail : les membres du COI ont placé les besoins d’investissements face aux réalités des moyens que nous devons y consacrer.

Le scénario n° 1, à ressources constantes, permet juste de satisfaire les besoins d’entretien du patrimoine existant. Il fait donc preuve de sincérité en montrant ce qu’il est possible de faire à ressources constantes.

Le scénario n° 2 permet de répondre aux priorités fixées par le Président de la République et nécessite d’affecter au secteur des transports des moyens supplémentaires significatifs, à hauteur de 600 millions d’euros par an.

Le scénario n° 3 correspond à l’accélération des projets du scénario n° 2 pour mieux répondre aux attentes des territoires. Cependant, il mobilise environ 80 milliards d’euros en vingt ans en direction de l’AFITF, soit un doublement des dépenses par rapport à la période 2012-2016, et ce pendant au moins dix ans.

Les trois scénarios, je le répète, ont le mérite de la cohérence. Ils mettent tout le monde face à la complexité et à la réalité de l’équation qui s’impose à nous.

Quel que soit le scénario que nous choisirons, le rapport nous recommande un certain nombre de priorités. Je dois dire que j’y ai retrouvé beaucoup de mes convictions ! Elles répondent en effet toutes au cœur du combat que je mène pour les transports du quotidien.

Il préconise tout d’abord l’entretien et la régénération des réseaux existants. Chacun a en tête les innombrables exemples d’un réseau, qu’il soit ferroviaire, routier ou fluvial, qui marque des signes de fatigue par manque d’entretien. Ce n’est tout simplement plus tenable. Il s’agit là d’un besoin que je qualifierai d’élémentaire, de vital !

L’autre priorité mise en avant, à laquelle je sais que vous êtes particulièrement attentifs, est le désenclavement de tous nos territoires. Voilà un exemple d’une politique d’infrastructures qui ne tourne plus rond : c’est ce que je me dis quand, dans mes déplacements, je suis confrontée à des habitants, à des élus, qui désespèrent de voir la modernisation de certains axes routiers repoussée de contrat de plan en contrat de plan, de décennie en décennie, alors que ces chantiers sont pourtant indispensables ! Il ne s’agit pas de grands travaux, mais de contournements de bourgs, d’aménagements de sécurité, de créneaux de dépassement, indispensables pour relier correctement tout notre territoire.

Je l’ai indiqué, je suis convaincue que ce désenclavement routier peut être achevé en l’espace d’une décennie. Voilà une belle ambition, une ambition utile !

De la même façon, le ferroviaire doit pleinement s’adapter à l’émergence des métropoles où nous devons renforcer la place du train pour transporter beaucoup de voyageurs. Il nous faut en effet, comme vous l’avez souligné à juste titre, monsieur Cornu, traiter les nœuds ferroviaires pour rendre nos plus grandes gares pleinement efficaces et fiables.

La place du ferroviaire reste naturellement essentielle dans le désenclavement des territoires au travers des « petites lignes », terme impropre pour qualifier des lignes souvent essentielles aux besoins de mobilité de nombreux territoires.

La dernière priorité est celle des mobilités douces, dont le vélo, bien sûr. Je me suis réjouie que le COI ait fait de ce mode de transport propre, extrêmement pertinent sur de nombreux trajets du quotidien, un élément central d’une politique d’équipement. Cela participe d’une prise de conscience en faveur de laquelle je milite beaucoup.

Quant aux projets d’infrastructures tant discutés, le COI a apporté au débat une vision nouvelle, qui me semble extrêmement novatrice et utile. En effet, sur bon nombre de projets, le débat ne peut se résumer à la question de faire ou de ne pas faire. Le rapport souligne parfaitement qu’un grand projet peut très bien se réaliser et répondre à nos priorités, selon le rythme et le phasage qu’on lui donne.

Le rapport du COI ouvre, je le souhaite, une nouvelle page et une nouvelle approche dans nos choix d’investissement. Il nous donne les outils nécessaires pour sortir des impasses financières et politiques sans renoncer à notre ambition collective de répondre aux besoins de mobilité de nos concitoyens.

En effet, il ne s’agit pas de dépenser moins, de faire des économies. Nous aurons même à investir plus, à engager davantage de moyens pour nos infrastructures ! Mais l’enjeu est aussi et d’abord d’investir mieux, c’est-à-dire de faire des choix pertinents pour nos concitoyens, de répondre à leurs besoins, de telle sorte que chaque euro investi soit le plus utile possible.

Le Gouvernement fera bientôt connaître ses choix. Il vous appartiendra de débattre de ces investissements et d’une programmation sincère de nos infrastructures pour les prochaines années, à la fois pour améliorer le quotidien de chacun, mais aussi pour la crédibilité de la parole publique.

Ce débat, nous l’engageons aujourd’hui, et je m’en réjouis, car je suis convaincue qu’il viendra très utilement compléter les nombreuses consultations que j’ai engagées depuis le mois de février et qui m’ont permis d’échanger directement avec certains d’entre vous.

À l’aune de ce débat, consciente que de vos travées trouveront à s’exprimer les légitimes attentes des territoires que vous représentez, je veux vous rendre attentifs au défi que nous avons à relever ensemble, celui de définir une stratégie ambitieuse, réaliste et cohérente, car, pour reprendre les propos de vos collègues Hervé Maurey et Louis-Jean de Nicolaÿ dans leur rapport de mai dernier, « si chacun de ces projets, pris individuellement, peut paraître fondé, leur agrégation ne répond à aucun moment à une stratégie d’ensemble véritablement réfléchie et intégrée ». C’est cette stratégie que je souhaite pouvoir construire avec vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

Débat interactif

M. le président. Je rappelle que les auteurs des questions disposent de deux minutes au maximum, y compris la réplique. Le Gouvernement a la possibilité d’y répondre pour une durée équivalente.

Dans le débat interactif, la parole est à Mme Denise Saint-Pé.

Mme Denise Saint-Pé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, 105 kilomètres, c’est la distance de la ligne LGV Bordeaux-Dax que le rapport Duron condamne.

Ce projet, qui avait été étudié et débattu dans le cadre du Grand projet du Sud-Ouest, le GPSO, a été repoussé à un horizon incertain, alors qu’il avait été validé par le territoire.

Il ne s’agit pas d’une discussion technocratique, car le GPSO bénéficie d’un important soutien populaire, comme l’atteste un récent sondage IFOP Sud-Ouest : 80 % des sondés en Nouvelle-Aquitaine sont favorables à la ligne Bordeaux-Toulouse et 78 % à la ligne Bordeaux-Dax.

Cette ligne Bordeaux-Dax est le maillon essentiel de l’axe ferroviaire du sud-ouest de l’Europe ; c’est « le » premier maillon de la future connexion du réseau ferré français au réseau espagnol.

Qu’on ne s’y trompe pas, l’axe ferroviaire Paris-Bordeaux-Valladolid-Madrid est considéré comme l’un des axes stratégiques du réseau européen pour relier la péninsule ibérique au reste de l’Europe par la façade atlantique, tant pour le fret que pour le trafic voyageurs.

Les temps de parcours compétitifs, l’augmentation du nombre de dessertes ferroviaires constituent de réels gains de performances. À l’échelle de la France, GPSO place Pau sous la barre des 4 heures pour rallier Paris, seuil essentiel pour le report modal de plus de la moitié des passagers de l’avion vers le rail.

D’autant plus que la ligne Dax-Espagne est envisagée comme une solution de transport écologique et durable en réponse au trafic de poids lourds et aux 44 millions de tonnes de marchandises qui franchissent chaque année la frontière entre la France et l’Espagne.

Seule la ligne complémentaire à l’offre TER au sud de Bordeaux rendra possible l’augmentation de capacité nécessaire au développement du fret ferroviaire de Bordeaux à Hendaye.

M. le président. Veuillez conclure !

Mme Denise Saint-Pé. Madame la ministre, quelles perspectives envisagez-vous dans la future loi d’orientation sur les mobilités pour la ligne LGV Bordeaux-Dax ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Florence Lassarade applaudit également.)

M. le président. J’invite les différents orateurs à respecter strictement les temps de parole.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Madame la sénatrice, je mène un dialogue permanent avec les collectivités de Nouvelle-Aquitaine, notamment avec le président du conseil régional, Alain Rousset. J’ai encore échangé récemment avec une délégation d’élus conduite par ma collègue Geneviève Darrieussecq.

Le COI souligne que le GPSO représente un coût très important eu égard aux trajectoires financières et aux ressources disponibles.

En outre, de façon très lucide, le COI indique qu’il est nécessaire, quel que soit le phasage du projet, de commencer par la désaturation des nœuds ferroviaires de Bordeaux et de Toulouse. C’est une priorité, et ce quel que soit le phasage. Il est donc important que l’ensemble des partenaires se mobilisent autour de cet objectif.

S’agissant plus précisément du trajet Bordeaux-Dax, le COI a proposé de différer le financement de la ligne à une étape ultérieure, mais également de sécuriser le tracé prévu, qui a fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique. Sans attendre la réalisation de ce projet, il convient aussi d’étudier avec SNCF Réseau les améliorations concrètes pouvant être apportées aux lignes existantes, les reports modaux, notamment pour les poids lourds, ne devant pas attendre la mise en service de la future ligne à grande vitesse.

Comme vous le savez, les collectivités territoriales ont également proposé de travailler sur des sources de financement complémentaires. Nous sommes en train d’étudier toutes les propositions. C’est en intégrant ces sources de financement complémentaire à l’échelle des régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie que nous présenterons à votre assemblée, dans le cadre de la loi de programmation, un phasage complet du projet GPSO.

M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert.

M. Michel Dagbert. Madame la ministre, vous ne serez pas étonnée de m’entendre saluer le travail réalisé par le Conseil d’orientation des infrastructures.

En effet, il était plus qu’utile de lister de la manière la plus exhaustive possible l’ensemble des infrastructures dont certaines sont légitimement attendues par les territoires, par nos concitoyens et par les élus qui les portent.

Le COI propose trois hypothèses faisant chacune apparaître le besoin de financement en regard du scénario retenu.

Pour autant, nos concitoyens sont habitués à ce qu’on leur donne à fois la température qu’il fera demain et la température ressentie ! (Sourires.) Une fois de plus, le constat est amer pour les élus des territoires à la suite de la publication du rapport, puisque nous pourrions superposer plusieurs cartes : celle des déserts médicaux, celle des fermetures de classes dans les secteurs ruraux, celle des fermetures de services publics et, enfin, celle des lignes dites « non rentables » qui pourraient être appelées à disparaître !

Mon intervention vise une fois de plus à vous alerter sur l’indispensable desserte des villes moyennes par le rail.

Nos collègues élus en charge des collectivités autorités organisatrices de transport s’attachent à maintenir un maillage territorial digne de ce nom : ce serait un très mauvais signal que de venir fragiliser leurs efforts visant à assurer la mobilité pour tous.

Cela peut se traduire de différentes manières. J’en veux pour exemple le renoncement à l’électrification de la ligne Rang-du-Fliers-Amiens ou encore la menace d’une moindre desserte TGV des villes de Lens et de Béthune dans mon département.

Madame la ministre, comment faire pour que nos villes moyennes bénéficient, demain encore, d’une connexion au réseau grande vitesse qui fait la fierté de la France ?