M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, sur l’article.
Mme Élisabeth Lamure. Nous arrivons au chapitre qui s’intitule « Des règles plus simples pour le public ». Or ce titre prometteur risque de décevoir les entreprises. En effet, à part deux articles qui proposent de revenir sur des surtranspositions de normes européennes, ce chapitre ne comprend pas grand-chose de nature à simplifier la vie des entreprises. Nous aurions donc pu aller plus loin.
Avec plusieurs de mes collègues, j’avais déposé à cet effet un amendement visant à confier à un organe ad hoc le soin de simplifier et d’améliorer le droit pour les entreprises, notamment en traitant les problématiques de surtransposition. Cet organe aurait été le pendant du Conseil national d’évaluation des normes, créé en 2013 sur une initiative parlementaire et chargé du contrôle et de l’évaluation des normes applicables aux collectivités locales.
En nous déplaçant dans plusieurs pays voisins avec mes collègues de la délégation aux entreprises, nous avons observé que de tels organismes ont déjà été mis en place au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Suède, en Allemagne. Je l’ai indiqué hier dans la discussion, l’action du NKR en Allemagne a notamment permis d’alléger la charge administrative dans ce pays de 14 milliards d’euros en cinq ans.
Mon amendement, qui reprenait la proposition de loi que nous avons déposée en septembre avec Olivier Cadic, avait pour objet de réactiver le Conseil de la simplification pour les entreprises, qui a existé de 2014 à 2017, mais en renouvelant ses missions et sa composition. Il aurait ainsi été chargé de contre-expertiser les études d’impact produites par l’administration et de proposer des simplifications du droit en vigueur. Malheureusement, cet amendement a été déclaré irrecevable, au titre de l’article 40 de la Constitution, au motif que les missions de ce conseil auraient été trop larges pour être absorbées à moyens constants par les services du Premier ministre. Pourtant, ces services assuraient le secrétariat du Conseil de la simplification entre 2014 et 2017.
Je regrette que le débat ne puisse avoir lieu sur cette proposition, d’autant plus que, lors de l’examen de ce projet de loi à l’Assemblée nationale, la députée Alice Thourot avait également déposé un amendement proposant la création d’un conseil d’amélioration du droit pour les entreprises, amendement qui a pu, lui, être discuté en séance. Il y a en quelque sorte deux poids, deux mesures.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, sur l’article.
Mme Sophie Taillé-Polian. L’article 29 rend possible l’expérimentation du relayage, conformément à ce qu’avait souhaité le précédent gouvernement, concernant le répit des aidants. Je salue la mise en place expérimentale de ce dispositif, qui est attendu par de nombreux acteurs de l’autonomie, même si je m’étonne qu’il trouve sa place dans ce texte : d’autres mesures, bien plus liées à la confiance de nos concitoyens dans leur d’administration, n’y figurent pas. Mais passons…
À la première lecture de ce texte, j’étais un peu inquiète, parce que l’article 29 proposait un cadre juridique dérogatoire visant à donner au dispositif toute la souplesse permise par le droit européen, mais sans présenter un certain nombre de garanties ni pour les professionnels ni pour les personnes aidées. Quelle protection alors pour les salariés de l’aide à domicile ? Aucune ! D’autant que personne ici n’ignore que la branche de l’aide et des services à la personne connaît un taux d’accident du travail trois fois supérieur à la moyenne et en progression de 45 % ces dix dernières années.
Je tiens donc à saluer le travail de notre rapporteur, Mme Gruny, qui a permis le retour du cadre sécurisé de l’application de la convention collective du particulier employeur.
Parce que je crois à l’intérêt de ce dispositif modifié, j’en soutiendrai l’adoption. Mais je souhaiterais obtenir quelques précisions.
Bien que mises en exergue par votre rapport, madame la rapporteur, quid des dispositions relatives à la formation des « baluchonneurs », c’est-à-dire des professionnels ? Leur formation, initiale comme continue, est une exigence qui devrait être sanctuarisée.
Enfin, combien d’expérimentations pourront être envisagées sur nos territoires ? Quelles seront les modalités d’évaluation de ces expérimentations, si ce n’est l’évaluation comptable de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA ?
Monsieur le secrétaire d’État, les acteurs locaux, plus que jamais mobilisés sur le grand chantier de la perte d’autonomie, attendent des réponses à ces questions.
M. le président. L’amendement n° 155 rectifié, présenté par M. Bocquet, Mmes Assassi, Benbassa, Cohen et Cukierman, MM. Foucaud, Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud, MM. Savoldelli, Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Pour rester dans l’esprit de ce que vient de dire ma collègue Sophie Taillé-Polian, nous pourrions retirer notre amendement si nous obtenons des éléments de réponse.
Nous avons suivi les travaux de l’Assemblée nationale. Il en ressort que des salariés ne seraient plus soumis aux règles relatives au régime d’équivalence : temps de pause, durées maximales quotidienne et hebdomadaire de travail et de travail de nuit, durée minimale de repos quotidien, comme prévus par les conventions et accords collectifs applicables aux établissements et services employeurs.
Il ne s’agit pas de débattre de la solution de répit pour les aidants familiaux, ce n’est pas le sujet – c’est un peu l’ambiguïté de cette partie du texte. La question est de savoir quelles garanties seront apportées aux salariés.
Je rappelle le chiffre : dans la branche de l’aide et des services à la personne, le taux d’accidents du travail est trois fois supérieur à la moyenne – 94,6 accidents du travail pour 1 000 salariés, en progression de 45 % ces dix dernières années.
Si nous obtenons des réponses, nous retirerons notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Comme vous, j’ai été bien étonnée de trouver cet article concernant l’aide aux proches aidants des personnes dépendantes dans un texte dont l’objet est tout autre, de surcroît dans ce chapitre compte tenu de son titre.
Je rappelle par ailleurs que le Sénat avait supprimé en 2015 un article similaire contenu dans le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement. Nos rapporteurs, Georges Labazée et Gérard Roche, avaient considéré à l’époque que l’expérimentation proposée n’était pas viable, faute notamment de financement – on ne va pas se voiler la face : là est le sujet. Il faut croire que le raisonnement de nos collègues avait convaincu le gouvernement et la majorité des députés de l’époque, puisque l’article en question n’avait pas été réintroduit dans la suite de la navette.
Les réserves exprimées en 2015 sont toujours d’actualité : notre rapport fait part de notre scepticisme face à cette expérimentation. Toutefois, la commission spéciale a souhaité lui laisser une chance afin de pouvoir tirer un bilan. Nous avons souhaité améliorer le texte proposé en prévoyant l’application de la convention collective du particulier employeur et en prévoyant une évaluation par la CNSA.
Je suis consciente des difficultés. Le changement de convention collective en fonction de là où l’on est, l’application de la directive européenne, tout cela soulève bien des questions. Reste que la situation du proche aidant nous préoccupe tous, sur tous les territoires. Nous nous sommes donc dit que supprimer l’article serait certainement plus gênant qu’autre chose. Nous espérons en tout cas que le Gouvernement entendra nos inquiétudes et nous permettra d’accompagner cette expérimentation.
La commission a forcément émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Mme Taillé-Polian a dit tout l’intérêt de ce dispositif, notamment pour soulager les aidants et leur offrir des solutions attendues depuis longtemps.
Une telle disposition avait été introduite dans le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, mais elle avait été retirée en première lecture puisque le rapport annexé renvoyait à une étude préalable et à l’organisation d’une concertation. C’est ce renvoi à l’étude qui explique que cet article n’ait pas été pas réintégré au cours de la navette.
Le gouvernement précédent avait confié à Joëlle Huillier, députée de l’Isère jusqu’en 2017, une mission relative aux conditions de mise en œuvre du relayage en France. Ce rapport, rendu en février 2017, soulignait à nouveau l’intérêt du dispositif pour les aidants et les personnes aidées et recommandait la mise en œuvre d’une expérimentation. C’est pour ces raisons que le Gouvernement ne souhaite pas la suppression de l’article.
La commission spéciale a introduit un certain nombre de dispositions, notamment au sujet de la convention collective. Nous souhaitons aussi mettre à profit la période d’expérimentation, qui sera bornée par une forme de clause de revoyure, pour bien vérifier qu’il n’y aura pas d’effets de bord pour les « baluchonneurs » et pour l’ensemble des personnels concernés. Cette clause de revoyure permettra de corriger ces éventuels effets de bord et de garantir la sécurité juridique, que vous appelez de vos vœux, de l’éventuelle généralisation de cette expérimentation, que nous souhaitons sur le fond.
Nous avons aussi comme projet, du fait de l’expérimentation, d’ouvrir les concertations nécessaires avec les conseils départementaux, qui sont en première ligne sur la question de l’accompagnement des familles et des personnes sujettes à la dépendance, de manière à déterminer, dans le cadre de l’habilitation, comment et dans quel volume l’expérimentation pourrait être menée, à la fois pour vérifier les éventuels effets de bord et pour faire en sorte d’aller plus avant dans la sécurité juridique de ce dispositif.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons le maintien de l’article. Nous prenons l’engagement que les textes seront travaillés avec l’ensemble des acteurs, en tout premier lieu avec celles et ceux qui sont intéressés de très près au financement du dispositif – je pense à la CNSA et aux conseils départementaux –, et que la durée d’expérimentation nous permettra de nous prémunir contre les effets de bord que j’ai évoqués, de manière que celles et ceux qui sont directement concernés, qui travailleront dans ce secteur, puissent être pleinement accompagnés à l’issue de l’expérimentation.
M. le président. Monsieur Savoldelli, avez-vous été convaincu ?
M. Pascal Savoldelli. On nous met quand même dans un sacré embarras ! Si nous maintenons notre amendement, on va nous dire qu’il dessert un besoin qu’on connaît tous : une solution de répit pour les aidants familiaux ; mais, d’un autre côté, nous n’avons eu aucune réponse – ou alors un peu légère.
Puisqu’une expérimentation a déjà été menée, il fallait aborder la question du droit collectif. Le texte aurait pu prévoir ainsi les conditions législatives, par exemple du temps de pause, du temps de travail, des modalités de travail, à partir du résultat de cette expérimentation. On le sait, ce « baluchonnage » concerne les populations les plus fragiles. On ne peut donc pas se cacher derrière son petit doigt. Je l’ai dit tout à l’heure : chez ces salariés, les accidents de travail ont augmenté de 45 %.
Nous retirons notre amendement, mais, franchement, tout cela manque de sérieux et de rigueur.
M. le président. L’amendement n° 155 rectifié est retiré.
L’amendement n° 219, présenté par Mme Gruny, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le mot :
réserve
insérer les mots :
, dans les cas où ils ont recours à leurs salariés,
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Avant de présenter mon amendement, je veux juste rappeler, monsieur le secrétaire d’État, que le vrai problème, c’est le financement.
Vous évoquez les conseils départementaux. Je suis élue du département de l’Aisne, et, à partir du mois de novembre, nous pleurons auprès de l’État pour qu’il nous aide financièrement, parce que nous n’arrivons pas à boucler notre budget.
Sincèrement, il faut aborder ce sujet de société essentiel en prévoyant un financement à la clé. Sinon, on en sera au même point à la fin du quinquennat.
J’en viens à mon amendement.
Il s’agit d’un amendement de cohérence, par lequel on ajoute une précision relative à l’application de la convention collective du particulier employeur aux prestations de relayage. Comme on a modifié le texte par ailleurs, il y avait un point à corriger.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est réservé, pour ne pas dire défavorable. En effet, nous considérons que l’adoption de cet amendement enfermerait un peu trop le dispositif, surtout dans un cadre expérimental ; cela n’enlève rien aux éléments que j’ai apportés précédemment.
En ce qui concerne la question du financement, vous me permettrez de faire une parenthèse. Il se trouve que, lundi dernier, l’Assemblée des départements de France a été reçue par le Premier ministre et par un certain nombre de membres du Gouvernement, dont j’étais, pour étudier la manière dont pourrait être stabilisé, consolidé, conforté le financement, par les départements, des allocations individuelles de solidarité. Nous savons en effet que le déséquilibre ou les difficultés de financement de ces prestations s’inscrivent désormais dans une durée extrêmement longue.
Nous travaillons sur le fondement de la mission animée par votre collègue Alain Richard et par l’ancien préfet Dominique Bur.
Nous avons fait à l’Assemblée des départements de France un certain nombre de propositions sur la prise en charge du reste à charge, selon ce qu’on appelle le « scénario 2 », c’est-à-dire à hauteur de 600 millions d’euros par an.
Les discussions sont en cours, mais je puis d’ores et déjà vous affirmer que, lors de cette réunion, le Premier ministre a proposé aux départements, comme entrée en matière, une aide de l’État augmentée de 200 millions d’euros par an pendant trois ans, jusqu’à la réforme de la fiscalité. Ce montant de 200 millions d’euros par an représente plus que la moyenne des fonds d’urgence votés au cours des six dernières années, qui s’élevaient à 140 millions d’euros par an, afin de permettre aux départements de faire face à leurs difficultés de financement, notamment en fin d’exercice.
Nous considérons qu’un tel accompagnement de l’État permettrait aux départements de faire face, à tout le moins, à leurs difficultés conjoncturelles. Cela s’inscrit dans la perspective tant de la refonte de la fiscalité locale que de la mise en œuvre, à laquelle le Premier ministre a rappelé son attachement, d’une allocation sociale unique, qui sera l’occasion de refondre l’ensemble de ces dispositifs.
Le travail avance donc, et tant le Premier ministre que le président de l’ADF sont convenus que, sur ces questions, il faudrait idéalement aboutir et trouver un accord avant la fin du mois de mai.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Nous voterons l’amendement présenté par la rapporteur, Mme Gruny. Il vient préciser – et c’est heureux – cette bonne idée qu’est l’aide au répit, que nous avions soutenue, comme Sophie Taillé-Polian l’a rappelé. Cette mesure mettra un peu de concret dans le dispositif en faveur des aidants de la personne âgée, qu’ils soient volontaires ou salariés. Derrière les bonnes idées, il faut savoir être pragmatique et avoir les moyens de réaliser l’expérimentation.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je soutiendrai cet amendement.
Pour faire suite à l’intervention de Mme Gruny, rapporteur de la commission spéciale, je voudrais dire qu’il est vrai que les problématiques de vieillissement de la population et de dépendance, suivies tant par la commission spéciale que par la commission des affaires sociales du Sénat, sont particulièrement importantes.
Pour ce qui concerne les finances publiques, vous avez évoqué, monsieur le secrétaire d’État, les compensations ou le fonds d’urgence. Lors de l’examen de la loi de finances pour 2018, notre commission des finances a étudié les dispositions de l’État en faveur de certains départements – Mme Gruny a mentionné celui dont elle est élue, l’Aisne, je parle, pour ma part, de son voisin, les Ardennes. Il y a des départements dans une situation très difficile. Je ne suis plus conseiller général depuis 2015, mais, au fil des mois et des années, malheureusement, la situation financière de certains départements s’est fortement dégradée, en raison de dispositifs à caractère social, dont le reste à charge pour les départements demeure important.
Il y a bien ce fonds d’urgence, d’environ 100 millions d’euros, de mémoire ; néanmoins, je ne suis pas sûr que les départements en aient tous perçu, ces derniers temps, des aides – je pense à au moins une vingtaine d’entre eux. Il est donc vraiment nécessaire de prendre en compte les situations très difficiles des collectivités départementales, car, vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, il y a des attentes fortes des départements compte tenu de leurs engagements financiers au titre de la solidarité.
M. le président. L’amendement n° 32 rectifié bis, présenté par M. Mouiller, Mme Garriaud-Maylam, MM. Pillet, D. Laurent, Pellevat, Bonne et Henno, Mme Eustache-Brinio, MM. Longeot, Kern, Mandelli, Rapin, Daubresse, Brisson et Chaize, Mme Lavarde, MM. Cuypers, B. Fournier, Morisset et Milon, Mme Dumas, MM. Revet et Pointereau, Mmes Imbert, Malet et Canayer, M. Forissier, Mme Deromedi, MM. Maurey, Lefèvre et Bazin, Mme Morhet-Richaud, MM. Karoutchi, Savary, Canevet, Mayet et H. Leroy, Mmes L. Darcos et Renaud-Garabedian, MM. Bansard, Bonhomme, Savin, Gilles, Perrin et Raison, Mme Billon, MM. Chatillon, Frassa, Reichardt et Paccaud, Mmes Duranton et Deroche et M. Kennel, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 3
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
Les établissements et services expérimentateurs assurent l’accueil, l’information et la coordination des prestations de suppléance en :
a) Veillant à l’information des proches aidants sur leurs droits, sur les prestations de suppléance et leurs conditions de mise en œuvre ;
b) Assurant une évaluation de la situation de la personne en perte d’autonomie et des besoins du proche aidant en amont de la prestation de suppléance, tout au long de l’intervention ainsi qu’au terme de celle-ci ;
c) Organisant le lien et la coordination avec les autres intervenants au domicile.
II. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les salariés mentionnés au II bénéficient du suivi médical renforcé prévu à l’article L. 4624-2 du code du travail.
III. – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les rapports mentionnés au présent IV devront apprécier notamment l’impact des expérimentations sur la santé des salariés mentionnés au II ainsi que sur leurs conditions de travail.
IV. – Alinéa 14
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Celui-ci précise notamment la nature et le périmètre des prestations à domicile de suppléance du proche aidant donnant lieu à expérimentation ainsi que les niveaux de qualification et de formation minimaux des salariés mentionnés au I du présent article.
La parole est à Mme Agnès Canayer.
Mme Agnès Canayer. Le soutien des aidants des personnes en perte d’autonomie, Mme le rapporteur de la commission spéciale l’a justement rappelé, est une question de société et un enjeu fort de l’intervention sociale et médico-sociale. Dès lors, la prise en compte des besoins spécifiques, notamment de répit, de ces personnes doit passer par le déploiement de dispositifs adaptés et sécurisés.
L’expérimentation prévue à cet article va dans le sens d’une meilleure prise en compte de la situation des aidants, mais cette prestation de suppléance ne peut s’apprécier uniquement sous l’angle de la dérogation au droit du travail. C’est pourquoi, sans remettre en cause l’intention louable qui fait l’objet de l’article 29, il convient d’apporter quelques garanties aux personnes aidées, aux aidants et à leur famille. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Les auteurs de l’amendement soulignent les interrogations, qui sont bien réelles, que suscite ce dispositif. Cet amendement tend donc à apporter diverses dispositions de nature à mieux encadrer l’expérimentation du relayage.
Néanmoins, on peut craindre que, en encadrant à l’excès l’expérimentation, on en arrive à décourager les initiatives. L’amendement vise notamment à faire peser sur les établissements expérimentateurs une responsabilité relative à l’information des personnes aidées et des aidants ainsi qu’à la coordination des intervenants. Quand on sait les difficultés que connaissent aujourd’hui les EHPAD, on peut craindre que ceux-ci se refusent à participer à un dispositif expérimental qui demanderait un surcroît de travail au profit de personnes extérieures.
De même, le suivi médical renforcé qui est proposé correspond à des inquiétudes que je partage, mais il semble difficile à mettre en place dans le mode « mandataire », les intervenants étant des salariés du particulier employeur, employés pour une période courte.
Malgré un certain scepticisme, la commission spéciale a souhaité autoriser cette expérimentation et elle veut laisser une certaine souplesse au dispositif. Le bilan qui en sera tiré permettra, le cas échéant, de le préciser. Je vous propose par conséquent, ma chère collègue, de retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. J’aurai le même avis : une demande de retrait.
Je saisis l’occasion qui m’est donnée pour prendre plusieurs engagements devant vous, madame la sénatrice.
Je veux d’abord indiquer que le caractère expérimental et l’évaluation envisagée du dispositif permettront d’en apprécier les impacts, tant pour les personnes âgées ou handicapées accompagnées que pour leurs aidants et les salariés assurant les prestations ; cela sera introduit dans le cahier des charges. Celui-ci prévoira un suivi régulier du relayeur au cours de sa prestation, ainsi que la possibilité de bénéficier à tout moment d’une écoute, pour répondre à une situation difficile nécessitant un conseil, ou, dans les cas extrêmes – un accident ou une dégradation de l’état de santé de la personne aidée –, d’un remplacement ou d’un soutien, en plus des conditions dites « de droit commun ».
De la même manière, la question de l’organisation des prestations – leur nature ou leur fonctionnement –, ainsi que les conditions minimales de diplôme, de formation ou d’expérience exigés seront abordées lors de l’élaboration du décret d’application fixant le cahier des charges de l’expérimentation.
Sur ces points, nous prenons donc l’engagement d’aller dans le sens que vous souhaitez, poursuivant ainsi les objectifs que vous visez, sans encadrer l’expérimentation de manière aussi drastique que ce que tend à faire votre amendement. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame Canayer, l’amendement n° 32 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Agnès Canayer. J’entends les engagements du Gouvernement visant à sécuriser le dispositif, ainsi que la volonté de Mme le rapporteur, que nous partageons, de donner de la liberté dans la mise en place de cette expérimentation attendue. Je retire donc l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 32 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l’article 29, modifié.
(L’article 29 est adopté.)
Article 30
(Suppression maintenue)
Article additionnel après l’article 30
M. le président. L’amendement n° 156, présenté par MM. Bocquet, Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 611-2 du code de commerce est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Lorsque les dirigeants d’une société commerciale transformant des produits agricoles ou commercialisant des produits alimentaires ne procèdent pas au dépôt des comptes dans les conditions et délais prévus aux articles L. 232-21 à L. 232-23, le président du tribunal de commerce adresse à la société une injonction de le faire à bref délai sous astreinte. Le montant de cette astreinte ne peut excéder 2 % du chiffre d’affaires journalier moyen hors taxes réalisé en France par la société au titre de cette activité par jour de retard à compter de la date fixée par l’injonction. »
II. – Le sixième alinéa de l’article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime est supprimé.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. L’amendement que nous vous proposons a également été déposé à l’Assemblée nationale et cosigné par des députés de l’ensemble des groupes. Il vise à renforcer l’efficacité du dispositif de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, qui prévoit des sanctions spécifiques pour les sociétés transformant des produits agricoles ou commercialisant des produits alimentaires et manquant à leurs obligations en matière de dépôt de leurs comptes.
Vous le savez, la publicité des comptes revêt une importance particulière dans le secteur agricole et agroalimentaire, en raison d’une répartition très inégale de la valeur ajoutée. Cette question a été au cœur des discussions lors des états généraux de l’alimentation ; certains acteurs de ce secteur continuent toutefois de manquer à leurs obligations, en raison notamment de la faiblesse des sanctions. C’est pourquoi le présent amendement a pour objet de renforcer ces sanctions, en supprimant l’intervention du président de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires et en confiant directement au président du tribunal de commerce la mission d’adresser à ces sociétés des injonctions sous astreinte.
Lors des débats à l’Assemblée nationale, vous avez répondu, monsieur le secrétaire d’État, que cette question serait au cœur de la discussion qui accompagnera l’examen du projet de loi sur l’agriculture issu des états généraux de l’alimentation. Vous allez sans doute nous faire la même réponse. Or nous vous indiquons, comme cela a été dit à l’Assemblée nationale, qu’il y a, selon nous, urgence sur ces problèmes-là. Donc, nous maintiendrons notre amendement, quel que soit votre avis. (Sourires.)