Sommaire
Présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann
Secrétaires :
Mme Jacky Deromedi, M. Daniel Dubois.
2. Candidature à une commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne
3. Candidatures à une commission d’enquête
4. Orientation et réussite des étudiants. – Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation
5. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
6. Orientation et réussite des étudiants. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme Frédérique Gerbaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales
Discussion générale (suite) :
Mme Frédérique Vidal, ministre
Clôture de la discussion générale.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 3 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.
Amendement n° 173 de M. Olivier Paccaud. – Rejet par scrutin public n° 58.
Amendement n° 143 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Rejet.
Amendement n° 85 rectifié de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 141 rectifié bis de Mme Françoise Laborde. – Retrait.
Amendement n° 84 de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 101 rectifié de Mme Sylvie Robert. – Adoption.
Amendement n° 102 rectifié de Mme Sylvie Robert. – Rejet.
Amendement n° 131 rectifié bis de Mme Françoise Laborde. – Rejet.
Amendement n° 103 rectifié de Mme Sylvie Robert. – Rejet.
Amendement n° 4 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.
Amendement n° 81 rectifié de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 86 rectifié bis de Mme Dominique Estrosi Sassone. – Adoption.
Amendement n° 54 rectifié bis de M. Laurent Lafon. – Retrait.
Amendement n° 64 rectifié de M. Jean-Pierre Grand. – Adoption.
Amendement n° 104 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 206 du Gouvernement.
Amendement n° 8 de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 9 de M. Pierre Ouzoulias. – Retrait.
Amendement n° 106 rectifié de Mme Sylvie Robert.
Amendement n° 57 rectifié bis de M. Laurent Lafon.
Amendement n° 82 rectifié de M. Claude Malhuret.
Amendement n° 144 rectifié bis de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 145 rectifié bis de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 10 de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 11 de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 65 rectifié de M. Jean-Pierre Grand.
Amendement n° 83 de Mme Colette Mélot.
Amendement n° 36 de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 160 rectifié de M. Stéphane Piednoir.
Amendements identiques nos 13 de M. Pierre Ouzoulias et 155 rectifié de Mme Colette Mélot.
Amendement n° 109 rectifié de Mme Sylvie Robert.
Amendement n° 134 rectifié de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 135 rectifié de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 53 rectifié quater de M. Laurent Lafon.
Amendement n° 14 de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 17 rectifié de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 116 rectifié de Mme Sylvie Robert.
Amendement n° 188 de M. Laurent Lafon.
Amendement n° 138 rectifié bis de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 154 rectifié de Mme Colette Mélot.
Amendement n° 137 rectifié bis de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 139 rectifié bis de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 166 de M. Laurent Lafon.
Amendement n° 203 du Gouvernement.
Amendement n° 33 de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 136 rectifié ter de Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 80 de M. Claude Malhuret.
Amendement n° 18 de M. Pierre Ouzoulias.
Amendement n° 91 rectifié ter de M. Michel Savin.
Amendements identiques nos 34 de M. Pierre Ouzoulias et 187 rectifié bis de Mme Françoise Laborde.
7. Candidatures à deux éventuelles commissions mixtes paritaires
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. David Assouline
8. Orientation et réussite des étudiants. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 206 du Gouvernement (suite). – Adoption.
Amendement n° 8 de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 106 rectifié de Mme Sylvie Robert (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 57 rectifié bis de M. Laurent Lafon (suite). – Rejet.
Amendement n° 82 rectifié de M. Claude Malhuret (suite) – Retrait.
Amendement n° 144 rectifié bis de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet.
Amendement n° 145 rectifié bis de Mme Françoise Laborde (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 10 de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Rejet.
Amendement n° 11 de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Rejet.
Amendement n° 65 rectifié de M. Jean-Pierre Grand (suite). – Retrait.
Amendement n° 83 de Mme Colette Mélot (suite). – Retrait.
Amendement n° 36 de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Rejet.
Amendement n° 160 rectifié de M. Stéphane Piednoir (suite). – Rejet.
Amendements identiques nos 13 de M. Pierre Ouzoulias et 155 rectifié de Mme Colette Mélot (suite). – Rejet des deux amendements.
Amendement n° 109 rectifié de Mme Sylvie Robert (suite). – Rejet.
Amendements identiques nos 32 de M. Pierre Ouzoulias, 111 rectifié de Mme Sylvie Robert et 133 rectifié de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet des trois amendements.
Amendement n° 134 rectifié de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet.
Amendement n° 135 rectifié de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet.
Amendement n° 53 rectifié quater de M. Laurent Lafon (suite). – Retrait.
Amendement n° 14 de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Rejet.
Amendement n° 17 rectifié de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Rejet.
Amendement n° 116 rectifié de Mme Sylvie Robert (suite). – Rejet.
Amendement n° 188 de M. Laurent Lafon (suite). – Adoption.
Amendement n° 138 rectifié bis de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet.
Amendement n° 154 rectifié de Mme Colette Mélot (suite). – Retrait.
Amendement n° 137 rectifié bis de Mme Françoise Laborde (suite). – Adoption.
Amendement n° 139 rectifié bis de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet.
Amendement n° 166 de M. Laurent Lafon (suite). – Retrait.
Amendement n° 33 de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Rejet.
Amendement n° 136 rectifié ter de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet.
Amendement n° 80 de M. Claude Malhuret (suite). – Retrait.
Amendement n° 18 de M. Pierre Ouzoulias (suite). – Devenu sans objet.
Amendement n° 91 rectifié ter de M. Michel Savin (suite). – Adoption.
Amendements identiques nos 34 de M. Pierre Ouzoulias et 187 rectifié bis de Mme Françoise Laborde (suite). – Rejet des deux amendements.
Amendement n° 146 rectifié bis de Mme Françoise Laborde. – Rejet.
Amendement n° 89 rectifié ter de Mme Nassimah Dindar. – Adoption.
Amendement n° 5 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.
Amendement n° 7 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.
Amendement n° 105 rectifié de Mme Sylvie Robert. – Rejet.
Amendement n° 204 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 6 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.
Amendement n° 108 rectifié de M. Claude Raynal. – Rejet.
Amendement n° 12 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.
Amendement n° 194 de la commission. – Retrait.
Amendement n° 15 de M. Pierre Ouzoulias. – Rejet.
Amendement n° 175 de M. Stéphane Piednoir. – Retrait.
Amendement n° 49 rectifié ter de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 94 rectifié bis de M. Claude Malhuret. – Retrait.
Amendement n° 174 de M. Olivier Paccaud. – Retrait.
Amendement n° 180 rectifié de M. Olivier Paccaud. – Rejet.
Amendement n° 184 rectifié bis de Mme Françoise Laborde. – Retrait.
Amendement n° 185 rectifié bis de Mme Françoise Laborde. – Retrait.
Amendement n° 113 rectifié de Mme Claudine Lepage. – Adoption.
Amendement n° 186 rectifié bis de Mme Françoise Laborde. – Devenu sans objet.
Renvoi de la suite de la discussion.
Nomination des membres d’une commission d’enquête
Nomination de membres de deux éventuelles commissions mixtes paritaires
compte rendu intégral
Présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann
vice-présidente
Secrétaires :
Mme Jacky Deromedi,
M. Daniel Dubois.
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Candidature à la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne
Mme la présidente. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne a été publiée.
Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
3
Candidatures à une commission d’enquête
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la désignation des vingt et un membres de la commission d’enquête sur l’organisation et les moyens des services de l’État pour faire face à l’évolution de la menace terroriste après la chute de l’État Islamique, créée sur l’initiative du groupe Union Centriste, en application du droit de tirage prévu par l’article 6 bis du règlement.
En application de l’article 8, alinéas 3 à 11, et de l’article 11 de notre règlement, la liste des candidats établie par les groupes a été publiée.
Elle sera ratifiée si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure.
4
Orientation et réussite des étudiants
Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants (projet n° 193, texte de la commission n° 242, rapport n° 241, avis n° 233).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Madame la présidente, madame la présidente de la commission, chère Catherine Morin-Desailly, monsieur le rapporteur, cher Jacques Grosperrin, madame la rapporteur pour avis, chère Frédérique Gerbaud, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, au cœur du projet de loi qui vous est soumis aujourd’hui, il y a une ambition, celle de refonder durablement l’entrée dans l’enseignement supérieur autour de trois principes : la confiance, l’ouverture et la réussite.
La confiance, tout d’abord. Elle a été ébranlée par le recours au tirage au sort et les difficultés de toutes sortes que les lycéens et leurs familles ont rencontrées avec « Admission post bac », ou APB. Il nous faut donc, à présent, instituer de nouvelles règles, de nouvelles procédures, qui soient claires, justes et transparentes.
Nous avons tous ici en mémoire la situation rencontrée cet été. Notre responsabilité collective, c’est d’y apporter des réponses qui nous permettent d’aborder sereinement la rentrée 2018. C’est une nécessité juridique, certes, et la Commission nationale de l’informatique et des libertés – CNIL – ainsi que le Conseil d’État l’ont dit très clairement. Mais, plus profondément, c’est une obligation politique : nous avons le devoir de refonder, sur des bases saines, l’entrée dans le premier cycle de l’enseignement supérieur et d’accompagner enfin de manière satisfaisante les étudiants et leurs familles.
C’est la raison pour laquelle, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, j’ai souhaité que « Parcoursup » ne soit pas une sorte de boîte noire automatisée, comme l’était APB, dans laquelle les candidats entraient une série de vœux et dont il sortait, à l’issue d’un processus obscur aux yeux de l’immense majorité des familles, une proposition et une seule – dans le meilleur des cas…
J’ai tenu à ce que Parcoursup devienne le lieu d’un dialogue : un candidat exprime son intérêt pour des formations et des établissements, ceux-ci lui répondent et peuvent lui faire une proposition adaptée à son projet et à sa motivation et, à la fin, le futur étudiant et sa famille choisissent d’accepter l’une de ces propositions.
Il ne s’agit pas d’optimiser un logiciel d’affectation. L’enjeu, c’est de permettre aux futurs étudiants et à leurs familles de décider de leur avenir et de le faire sur la base de propositions concrètes, après un dialogue avec les équipes pédagogiques et en étant pleinement informés des débouchés professionnels des formations. C’est la condition même de la confiance.
Le deuxième principe, c’est l’ouverture. Le baccalauréat est le premier grade de l’enseignement supérieur et chacun des jeunes qui l’obtiennent se voit garantir le droit d’y poursuivre ses études. C’est un principe fondamental, auquel nous devons redonner tout son sens.
Ce sens, c’est celui d’une formation qui conduit vers la réussite et, plus largement, vers l’emploi. Nous ne devons jamais perdre cet objectif de vue, c’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’est engagé dans une démarche globale, qui articule la réforme de l’entrée en premier cycle, la modernisation de la scolarité au lycée et du baccalauréat et la rénovation profonde de nos politiques de formation professionnelle et d’apprentissage tout au long de la vie.
La conviction profonde du Gouvernement, c’est que notre pays et notre économie ont besoin de qualifications, qui sont souvent nouvelles, voire inconnues à ce jour. Les métiers se transforment, le cadre de notre vie collective aussi, et le grand défi que nous avons à relever, c’est celui d’armer notre jeunesse pour lui permettre de trouver toute sa place.
Vous êtes aujourd’hui saisis d’un texte qui porte sur l’entrée dans l’enseignement supérieur. Je sais – vos amendements en témoignent – que vous avez également à l’esprit les autres chantiers ouverts par le Gouvernement. Le Sénat aura à y tenir toute sa place le moment venu, mais je crois utile qu’au fil de nos débats nous puissions ainsi replacer ce projet de loi dans le cadre d’une vision plus globale.
Au cœur de cette vision, il y a une volonté, celle de garantir à chacun de nos jeunes qu’il aura toutes les chances d’aller jusqu’au bout de ses possibilités et de ses projets. Or, nous le savons, il faut, pour cela, mieux informer et ouvrir plus largement les portes des formations et des qualifications à notre jeunesse, à toute notre jeunesse.
La réalité, c’est que le système actuel ne rendait pas les bacheliers égaux. En effet, ceux qui étaient issus des filières technologiques et professionnelles étaient nombreux à ne pas parvenir à obtenir la poursuite d’études de leur choix, notamment en BTS et en IUT. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite, en plein accord avec votre rapporteur, développer fortement ces formations et prendre les mesures utiles afin de permettre à ces bacheliers d’y accéder effectivement, s’ils le souhaitent.
L’ouverture, c’est aussi l’ouverture sociale et territoriale. Je sais, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, l’attachement profond de la Haute Assemblée pour la méritocratie républicaine et pour cette idée simple, selon laquelle un jeune lycéen doit, où qu’il réside dans notre pays – en métropole ou en outre-mer, en milieu urbain ou dans un territoire rural –, avoir les mêmes chances d’aller jusqu’au bout de ses capacités, et ce quels que soient son origine sociale ou son milieu.
Ce principe irrigue profondément le texte qui vous est aujourd’hui soumis, car il réaffirme deux objectifs simples : les futurs étudiants doivent pouvoir accéder aux formations d’enseignement supérieur proposées dans leur académie à proximité de chez eux, mais ils doivent aussi pouvoir, si c’est leur projet, rejoindre d’autres formations ou d’autres établissements, partout en France.
La réalité, c’est qu’avec APB les futurs étudiants se sont trouvés enfermés dans leur académie, dès lors qu’ils souhaitaient rejoindre une filière en tension. Ils n’avaient en effet plus aucune chance – je dis bien, plus aucune – de rejoindre une université située dans une autre académie, s’ils voulaient faire du droit ou médecine, par exemple. C’est pourquoi le Gouvernement propose, au travers de ce projet de loi, de rendre à nouveau possible la mobilité géographique dans les formations universitaires.
Bien entendu, je veillerai à ce que toutes les formations conservent un bassin naturel de recrutement, les futurs étudiants en étant systématiquement informés sur Parcoursup, mais il y aura, dans chacune d’elles, un nombre minimal de places ouvertes aux bacheliers venus d’autres académies. Ce nombre devra être pensé et proposé par les recteurs pour préserver l’attractivité des territoires, dans lesquels les universités continueront à jouer un rôle de référence.
De même, l’introduction de planchers minimaux de boursiers dans les cursus, y compris dans les filières sélectives, permettra de garantir que le principe de méritocratie républicaine se doublera d’un principe d’ouverture sociale. Nous pourrons nous appuyer largement sur les initiatives qui marchent, comme les « cordées de la réussite », pour continuer à lever l’autocensure et accompagner tous les étudiants.
Enfin – je veux le souligner –, c’est bien pour favoriser l’ouverture sociale et géographique de notre enseignement supérieur que le Gouvernement a souhaité placer la vie étudiante au cœur du plan Étudiants, qui traduit également une ambition nouvelle dans ce domaine.
C’est tout le sens de la suppression du régime autonome de sécurité sociale, qui ne permettait pas aux étudiants de bénéficier du même niveau de service et d’accompagnement que les assurés du régime général. Et, là encore, c’étaient bien les étudiants les plus fragiles qui n’étaient plus en mesure de supporter les fréquents retards de remboursement et qui, parfois, étaient contraints de renoncer aux soins.
C’est tout le sens également de la refondation de nos politiques de prévention en direction des étudiants et des jeunes actifs, qui ont trop longtemps été laissés de côté dans ce domaine. En plein accord avec Agnès Buzyn, et en cohérence avec la stratégie nationale de santé, nous avons fait le choix d’une nouvelle organisation nationale et territoriale de nos actions en matière de prévention. Votre rapporteur pour avis a souhaité clarifier le texte à ce sujet, le Gouvernement s’en réjouit.
C’est tout le sens, enfin, du choix que nous avons fait de rendre 100 millions d’euros de pouvoir d’achat aux étudiants grâce à la suppression, dès 2018, de leur cotisation de sécurité sociale étudiante et la création d’une contribution « vie étudiante ». Cette contribution permettra de donner un nouvel élan aux actions de vie étudiante dans les universités et les établissements et de renforcer la vie de campus, qui joue un rôle si important dans les parcours de réussite.
Car le troisième principe, c’est bien de placer la réussite des étudiants au cœur de notre système d’enseignement supérieur. Je veux être très claire sur ce point : la réussite ne se décrète pas et, comme professeur d’université, je mesure toutes les raisons de douter des démarches volontaristes qui tombent d’en haut, lorsqu’il s’agit de parler de pédagogie et d’accompagnement.
Mais je sais aussi, pour l’avoir vu et l’avoir vécu, que nous avons le devoir de mieux prendre en compte les besoins et les attentes singulières de nos bacheliers, qui sont tous profondément différents.
Nombreux sont aujourd’hui les enseignants-chercheurs et les enseignants qui s’efforcent, souvent sans moyens ni cadre véritable, d’accompagner les étudiants qui en ont le plus besoin. Certes, comme j’ai pu le constater au cours des dernières semaines, en dialoguant avec plus de cinquante présidents d’université, dans un nombre grandissant d’établissements, cet accompagnement s’est peu à peu structuré : tous se sont saisis de la question de la diversité des publics. Ce qui manque désormais, ce sont des moyens supplémentaires et un cadre institutionnel.
Les moyens sont là : le Premier ministre a annoncé, dès le lancement du plan Étudiants, qu’il s’accompagnait d’un investissement de plus de un milliard d’euros sur le quinquennat à travers à la fois le Grand plan d’investissement, notamment l’appel « Nouveaux cursus à l’université », qui a été doté de 450 millions, au lieu des 250 millions initialement prévus, et un effort budgétaire supplémentaire de 500 millions d’euros sur cinq ans.
Au demeurant, vous l’avez constaté lors du débat budgétaire, des crédits supplémentaires, fléchés vers l’augmentation des capacités d’accueil et la mise en place des modules d’accompagnement pédagogique, ont été ouverts. Et je vous confirme que les moyens que vous avez votés arrivent effectivement dans les établissements. Les recteurs d’académie travaillent avec les présidents d’université pour utiliser ces nouveaux financements de la manière le plus efficace possible.
Quant au cadre institutionnel, c’est le présent projet de loi qui va nous permettre de le mettre en place, grâce à la consécration des dispositifs d’accompagnement et des parcours personnalisés, qui prendront désormais toute leur place dans l’offre de formation, et non pas à côté, et qui permettront de mieux accompagner vers la professionnalisation, que ce soit après trois, cinq ou huit années d’études.
L’objectif, vous le savez, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, c’est qu’un étudiant puisse désormais obtenir son diplôme de licence au rythme qui lui convient, en bénéficiant de modules de méthodologie ou d’enseignements de consolidation dans les disciplines où il en a besoin.
Il s’agit d’aller plus loin, beaucoup plus loin, dans la logique de spécialisation progressive, autour d’une licence modulaire, en s’appuyant sur les connaissances, mais aussi les compétences, et d’imaginer de nouvelles manières de travailler à la professionnalisation des cursus de premier cycle.
C’est pourquoi, si le Parlement adopte, comme je l’espère, le projet de loi qui vous est soumis, je serai amenée, dans les prochaines semaines, à ouvrir la concertation sur les évolutions nécessaires de l’arrêté « Licence » et du cadre national des formations, afin de permettre aux établissements de disposer de toute la latitude nécessaire pour accueillir, dans les meilleures conditions, les étudiants dès la rentrée prochaine.
Nous devons aussi donner davantage d’informations, en particulier sur les sujets qui intéressent les étudiants et leur famille. Il s’agit notamment de clarifier les attendus des formations. Ces attendus existent dans la pratique depuis des années : nous savons bien que, au moment où débute son premier cours, tout enseignant est obligé de présupposer que les étudiants qui sont en face de lui maîtrisent certaines notions enseignées dans le secondaire. C’est une réalité !
La difficulté, c’est que les étudiants, eux, en ont rarement été informés et pensent, en toute bonne foi, qu’ils peuvent s’engager dans le cursus de leur choix, sans avoir besoin d’un accompagnement complémentaire dans certaines disciplines.
Parfois, la difficulté est même plus profonde. Chacun de nous connaît le poids des imaginaires collectifs, qui jouent un rôle majeur dans l’orientation. Je pense, par exemple, au cursus de STAPS, qui fait une place très importante aux sciences et dans lequel des milliers d’étudiants s’engagent, en pensant qu’il s’agit d’une formation uniquement sportive.
L’objectif des attendus, c’est donc de redonner toutes les cartes à nos futurs étudiants et de leur permettre de décider en toute connaissance de cause, en disposant de toutes les informations nécessaires, par exemple sur le taux de réussite, les modalités de poursuite des études ou l’insertion professionnelle.
Certains craignent qu’informer ainsi les étudiants sur le contenu réel d’une formation, sur les attentes de leurs futurs enseignants et sur les possibilités de poursuivre les études ou de trouver un emploi ne risque de les décourager.
Pour ma part, je ne crois pas que dire aux étudiants les choses comme elles sont pour leur permettre de décider, c’est prendre le risque de les décourager. Au contraire, notre rôle à tous, comme adultes, c’est de leur donner toutes les informations nécessaires et de les accompagner dans leur choix, une fois que celui-ci est fait.
Nous avons un devoir de vérité, pour permettre à nos étudiants de faire leur choix en étant pleinement éclairés, et un devoir de responsabilité, en les accompagnant lorsque leur décision est prise en toute connaissance de cause.
C’est pourquoi la rénovation de l’orientation a été placée au cœur de ce projet de loi. Chacun le sait – le Sénat lui-même y a insisté à de très nombreuses reprises –, nous avons à faire, dans ce domaine, de profonds progrès. Le dispositif de deux professeurs principaux par classe, déjà mis en place par Jean-Michel Blanquer, y contribuera, comme les nouveaux outils qui seront pensés pour s’appliquer tout au long du cycle du lycée réformé.
La plateforme Parcoursup constitue l’un de ces outils d’orientation et d’information. Elle doit être exemplaire dans ce domaine, comme dans tous les autres.
Au-delà des données pédagogiques et des informations sur les taux de réussite ou d’insertion professionnelle, je sais que vous êtes nombreux à vouloir garantir que ces informations soient obligatoirement et systématiquement offertes sur la plateforme. Le Gouvernement y est favorable.
Je veux être très claire : quand un lycéen voudra rejoindre une formation dont les attendus sont, sur certains points, en décalage avec son parcours, il pourra néanmoins le faire. Aucune porte ne lui sera fermée, mais il devra accepter de bénéficier d’un accompagnement personnalisé lui donnant toutes les chances de réussir.
En somme, aux étudiants, la liberté du choix de leur formation, mais accompagnés et sur la base d’informations claires ; aux universités et aux établissements d’enseignement supérieur, la responsabilité pédagogique. Tel est l’équilibre fondamental de ce projet de loi.
Confiance, ouverture et réussite, tels sont donc les principes fondateurs de ce projet ; ils sont issus de la très large concertation que j’ai engagée, dès juillet dernier, avec l’ensemble de ceux qui font vivre l’enseignement supérieur : les étudiants, les lycéens et les parents d’élève, mais aussi les enseignants-chercheurs, les enseignants, les chefs d’établissement, les présidents d’université et les représentants du monde socio-économique.
C’est cette concertation qui a permis d’élaborer le projet de loi qui vous est soumis et de rassembler largement autour de lui. Événement peu courant, le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, le CNESER, a émis un avis favorable sur ce texte ; j’y vois le signe de l’écho qu’il a rencontré auprès de la communauté universitaire, qui est aujourd’hui à pied d’œuvre pour préparer la prochaine rentrée.
Je veux, d’ailleurs, rendre hommage devant vous à l’ensemble de la communauté universitaire. Partout en France, les équipes pédagogiques ont engagé un travail remarquable pour être prêtes en temps et en heure. C’est un travail lourd, exigeant, parfois ingrat, mais nécessaire pour reconstruire l’ensemble du premier cycle universitaire.
Afin de joindre les actes à la parole et au-delà des 24 millions d’euros qui ont déjà été dégagés pour accompagner cette réforme, je souhaite ouvrir, dans les prochaines semaines, une large concertation afin de reconnaître pleinement l’engagement pédagogique des personnels universitaires.
Vous le savez, les circonstances qui président à cette réforme sont particulières. Les décisions de la CNIL et du Conseil d’État nous ont obligés à saisir le législateur dans des délais resserrés afin de construire le nouveau cadre légal qui sera applicable dès la prochaine rentrée. Dans ces conditions, je souhaite vous remercier d’avoir accepté l’engagement, par le Gouvernement, de la procédure accélérée.
Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je suis certaine que la Haute Assemblée pourra se retrouver dans les principes que j’évoquais à l’instant et dans le projet de loi qui vous est soumis, car il a été largement nourri par des travaux menés ici même il y a parfois plusieurs années, sans qu’ils obtiennent toujours l’attention nécessaire de la part du Gouvernement.
C’est vrai dans tous les domaines, que ce soit l’orientation, à laquelle Guy-Dominique Kennel a consacré un rapport important au nom de votre commission de la culture, de l’éducation et de la communication, ou encore le régime étudiant de sécurité sociale, sur lequel Catherine Procaccia a beaucoup travaillé. Le Sénat a donc été précurseur sur de nombreux sujets. J’en veux aussi pour preuve l’attention accordée par votre rapporteur à la notion de prérequis dans ses différents rapports budgétaires, à un moment où la question n’était que rarement abordée.
Parce que les délais nous obligent et dans l’intérêt direct des étudiants et de leurs familles, mais aussi par conviction – je crois profondément que le Sénat doit pouvoir imprimer sa marque à ce projet de loi –, j’ai souhaité construire une relation de confiance avec votre commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Sa présidente, Catherine Morin-Desailly, que je salue, a bien voulu accepter de m’accompagner dans cette démarche et je l’en remercie chaleureusement. Je veux également saluer la qualité du travail réalisé par votre rapporteur, Jacques Grosperrin, qui s’est d’ores et déjà traduit par de profondes évolutions du texte en commission. (Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.)
Je souhaite également remercier la commission des affaires sociales, notamment son président, Alain Milon, de s’être pleinement saisie de la question de la sécurité sociale étudiante. Je salue votre rapporteur pour avis, Frédérique Gerbaud, qui a porté de nombreuses propositions relatives aux politiques de prévention à destination des étudiants.
Ce travail, je suis certaine que nous pourrons le poursuivre ensemble en séance publique. Nous ne serons sans doute pas d’accord sur tous les points, mais je sais que la Haute Assemblée est toujours au rendez-vous lorsqu’il s’agit de légiférer dans un esprit de responsabilité sur des sujets cruciaux et complexes. Nous avons eu l’occasion de le constater, que ce soit en 2007, en 2013 ou, plus récemment encore, avec la réforme de l’entrée en master, dans laquelle le Sénat a joué un rôle considérable – je pense notamment à l’engagement de Jean-Léonce Dupont sur ce sujet.
Dès l’ouverture de ce débat, je veux vous assurer du fait que le Gouvernement entend bien donner toute sa place à l’initiative sénatoriale et accueillera toutes les propositions qui permettront de mettre en place des modalités justes, claires, humaines et effectives d’entrée dans l’enseignement supérieur.
Le seul devoir qui s’impose à nous est de rétablir la confiance de notre jeunesse envers l’État et de montrer que celui-ci la prend bien en considération, en l’accompagnant, dans son épanouissement citoyen comme dans son insertion professionnelle.
C’est notre responsabilité collective, et je sais que la Haute Assemblée sera au rendez-vous. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Catherine Procaccia applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur pour avis, mes chers collègues, « la sélection, selon Larousse, est notamment l’action de choisir les personnes qui conviennent le mieux. C’est donc une démarche positive et constructive. Mais elle impose aussi, lorsqu’il s’agit de notre jeunesse, de nos enfants, qu’aucun d’eux ne soit laissé seul et sans espérance. »
Cette belle formule – presque un programme ! – est celle par laquelle notre éminent ancien collègue Jean-Léonce Dupont concluait son propos, à cette même tribune, il y a à peine un an, lors de l’examen de la proposition de loi sur la sélection à l’entrée du master. Il a, par son initiative, très largement contribué à faire avancer le sujet de la sélection à l’université et je tenais à lui en rendre hommage aujourd’hui.
C’est ce même esprit qui nous anime aujourd’hui : la conviction que la sélection est bénéfique, qu’elle est une chance et que nous devons donner à chacun les moyens de la saisir. C’était le sens de la « sélection pour tous », pour laquelle plaidait Jean-Léonce Dupont et que je fais volontiers mienne aujourd’hui.
Sélection : ce n’est pas un mot que je prononce à la légère, tant je connais les réactions épidermiques qu’il suscite. L’échec du projet d’Alain Devaquet et, plus encore, le souvenir terrible du décès de Malik Oussekine l’ont fait entrer pour plus de trente ans au dictionnaire des mots tabous de la politique française. Vous-même, madame la ministre, vous n’avez pas vraiment osé le prononcer : le mot est introuvable dans le texte que nous examinons aujourd’hui et je ne l’ai pas entendu dans votre propos.
Je voudrais saisir cette occasion pour rendre hommage à Alain Devaquet, disparu récemment, qui fut l’un de vos illustres prédécesseurs. Il avait lancé une ambitieuse réforme de l’université que nous peinons encore aujourd’hui à mettre en musique.
Vingt ans plus tard, en 2007, nous avons avancé sur l’autonomie des universités. Et aujourd’hui, trente ans après le retrait du projet de loi Devaquet, la sélection à l’université refait son entrée dans notre droit, à la faveur de ce projet de loi. Et je m’en réjouis !
En effet, la sélection est juste et égalitaire, elle est profondément républicaine et est le gage de la réussite de nos étudiants. Permettez-moi de revenir sur cette idée forte : la sélection, ce n’est pas fermer les portes de l’université devant telle ou telle personne ; la sélection, c’est que chaque jeune puisse élaborer un parcours adapté à ses compétences et ambitions, mais aussi aux perspectives d’insertion professionnelle qui pourront être les siennes.
Pour cela, ces jeunes ne doivent pas être laissés seuls devant le choix de leur formation. Il est sain qu’ils soient, eux aussi, choisis par leur formation d’accueil, comme, une fois diplômés, ils choisiront leur voie professionnelle et comme ils seront aussi choisis par leur premier employeur.
Cessons nos fausses pudeurs de chaisières ! L’offre d’enseignement supérieur en France est déjà sélective à plus de 50 % et ce sont ces filières qui sont massivement plébiscitées par les étudiants : BTS, IUT, bilicences, classes préparatoires, IEP. Alors, soyons courageux et offrons la « sélection pour tous », afin que tous choisissent et soient choisis !
Malheureusement, au lieu de cela, pendant plus de trente ans, faute d’assumer la sélection à l’entrée de l’université, nous avons collectivement instauré – et j’en prends ma part de responsabilité – une sélection par l’échec, autrement plus cruelle et hypocrite !
Je ne reviendrai pas sur les – trop fameux – 60 % d’étudiants qui n’obtiennent pas leur licence en trois ans… Cette sélection par l’échec, que notre commission a inlassablement dénoncée, frappe de plein fouet les classes populaires et moyennes, ainsi que les bacheliers technologiques et professionnels. Elle génère déception, désillusion et amertume dans la société.
Dans le journal Le Monde daté d’aujourd’hui, un article montre toutes les difficultés que rencontre un professeur dans son enseignement. Interrogé par les journalistes, il explique notamment qu’il en est quasiment réduit à faire un cours d’alphabétisation pour adulte et qu’il ne dispose évidemment pas des outils pour cela. Une autre conclut : « Que de lâchetés et petites démissions de l’école pour en arriver là ! »
L’hypocrisie de cette prétendue absence de sélection a même été poussée jusqu’à son paroxysme avec le tirage au sort, qui trouva ses lettres de noblesse dans une circulaire de Mme Najat Vallaud-Belkacem, entre les deux tours de la dernière élection présidentielle.
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Il paraît qu’il s’agissait d’un mode de sélection « juste », mais il a pourtant écarté de certaines formations des candidats qui avaient tout pour y réussir et a affecté, dans ces mêmes formations, des jeunes qui sont allés droit à l’échec.
Alors, madame la ministre, vous qui introduisez enfin la sélection à l’entrée dans notre enseignement supérieur, je dois vous reconnaître un certain courage politique et je tenais à le saluer, mais osez aller jusqu’au bout et assumez une réforme majeure de l’enseignement supérieur français, qui en a tant besoin ! Napoléon Bonaparte disait : « On ne peut pas faire semblant d’avoir du courage. »
Si l’introduction de la sélection dans l’enseignement supérieur constitue pour moi un satisfecit majeur, je reconnais aussi volontiers que le plan Étudiants présente d’autres avancées intéressantes : un début de concrétisation du continuum « bac+3 / bac–3 » ou encore l’amélioration de l’orientation en classe de terminale.
Ces efforts sont louables, mais ils devront être amplifiés. Une mission d’information, réunie sur l’initiative de notre présidente de commission, Catherine Morin-Desailly, et consacrée à l’orientation scolaire, avait adopté de nombreuses propositions à cet effet, qui mériteront un regard attentif.
Ce satisfecit étant donné, permettez-moi d’émettre de nombreuses inquiétudes sur ce projet de loi, Parcoursup et, plus généralement, le plan Étudiants !
La première de mes inquiétudes tient, bien entendu, à la vitesse avec laquelle cette réforme a été menée. Certes, madame la ministre, vous n’aviez pas vraiment le choix, la CNIL et le Conseil d’État vous ayant mise en demeure de changer le système d’entrée à l’université dès la rentrée 2018, mais quelque 830 000 candidats et leurs familles – nous savons tous à quel point ces dernières sont impliquées – vont peut-être essuyer les plâtres du nouveau dispositif.
Je crains en particulier que le mécanisme de « ruissellement » des places disponibles que vous avez choisi ne soit terriblement anxiogène pour 90 % des candidats, qui n’auront aucune réponse positive pendant de longues semaines d’attente.
Compte tenu de la disparition de la hiérarchisation des vœux, les établissements vont devoir examiner un nombre considérable de dossiers, en moyenne plus de 1 000 par licence, avec des pics probablement supérieurs à 15 000 pour les formations les plus demandées.
Ma deuxième inquiétude tient aux places qui devront être ouvertes à la prochaine rentrée : alors que plus de 30 000 candidats supplémentaires devraient se presser aux portes de l’enseignement supérieur l’an prochain, le Gouvernement prévoit l’ouverture de 22 000 places. Certes, 135 000 places étaient restées vacantes à la fin d’APB 2017, mais je vous demande solennellement, madame la ministre, une vigilance toute particulière sur les ouvertures que vous envisagez.
Il faut, en premier lieu, privilégier les ouvertures de places dans les IUT et les STS, afin de garantir aux bacheliers technologiques et professionnels des places adaptées à leur profil, à leurs souhaits et à leur insertion professionnelle. Sinon, ces bacheliers risquent d’être les grandes victimes de votre réforme. J’ai bien entendu les engagements que vous avez pris à cette tribune, madame la ministre, y compris sur les moyens.
Il faut ensuite ouvrir des places prioritairement dans les filières qui insèrent et préparent aux « métiers du futur », et, même si je sais que cela ne plaît pas sur toutes les travées lorsque je dis cette vérité toute simple, en fermer dans celles qui ne débouchent sur aucune insertion professionnelle. Il s’agit non pas d’instaurer des numerus clausus, comme je l’ai entendu dire, mais de mettre toutes les chances de réussite du côté de nos jeunes. C’est pourquoi notre commission a souhaité que les modifications des capacités d’accueil soient corrélées aux taux de réussite et d’insertion professionnelle des formations. C’est du réalisme et du bon sens !
Ma troisième inquiétude, enfin, concerne la procédure dite « du dernier mot au candidat », qui obligera le recteur à faire une proposition de formation à tout candidat qui se trouvera sans inscription à l’issue de la procédure normale de Parcoursup. Ce dispositif ressemble au « droit à la poursuite d’études » en master, qui nous avait laissés très réservés voilà deux ans. En effet, les rectorats vont devoir traiter, en plein cœur de l’été et au cas par cas, tous les étudiants sans proposition de formation : il s’agira probablement de plusieurs milliers de dossiers. Notre commission a souhaité que l’établissement dont la formation est envisagée ait son mot à dire au cours de ce processus, c’est-à-dire non seulement qu’il soit partie prenante du dialogue entre le recteur et le candidat, mais aussi qu’il donne son accord explicite pour l’inscription du candidat. C’est en effet l’établissement qui sera le plus à même de vérifier que le profil du candidat qu’on lui propose correspond bien à la formation qu’il dispense.
Madame la ministre, j’ai bien entendu vos propos, et c’est dans un esprit également constructif, mais non complaisant, que notre commission a examiné le projet de loi qui nous était soumis. Nous y avons apporté notre marque, la marque du Sénat, et nous allons poursuivre ce travail dans cet hémicycle grâce aux amendements déposés par nos collègues. Je tiens à les remercier par avance des débats nourris et respectueux qui vont se dérouler.
Permettez-moi, en conclusion, de rappeler que notre commission a délégué l’examen au fond des articles 3 et 3 bis à la commission des affaires sociales, dont je veux ici saluer le président, Alain Milon, et la rapporteur pour avis, Frédérique Gerbaud, que je serai heureux d’entendre sur ces articles. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
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Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
Mme la présidente. Mes chers collègues, j’ai le grand plaisir de saluer la présence, dans notre tribune d’honneur, d’une délégation de députés de la Knesset, conduite par M. Meir Cohen, vice-président de cette assemblée. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la ministre, se lèvent.)
Cette délégation est accueillie par notre collègue Philippe Dallier, président du groupe d’amitié France-Israël, et par nos collègues membres de ce groupe.
Mesdames, messieurs les députés, votre venue traduit la volonté de renforcer le dialogue entre nos deux institutions, notamment en matière de lutte contre le terrorisme, dialogue qui se poursuivra par un déplacement du groupe d’amitié en Israël en mai prochain, dans un contexte marqué par la célébration du soixante-dixième anniversaire de la création de l’État d’Israël.
Je signale également que se tiendra prochainement la « saison croisée » France-Israël, qui marquera une nouvelle et importante étape dans les relations entre les deux pays.
Culture, innovation, sciences, éducation, francophonie seront au cœur de cette « saison croisée », qui se déroulera simultanément dans les deux pays, de juin à novembre 2018.
Au nom du Sénat de la République française, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe La République En Marche et du groupe socialiste et républicain.)
6
Orientation et réussite des étudiants
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme la rapporteur pour avis.
Mme Frédérique Gerbaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales s’est saisie pour avis de l’article 3 du projet de loi supprimant le régime de sécurité sociale étudiant. Elle a étendu son examen, sur le même volet de la santé, à l’article 3 bis.
Ce n’est pas la première fois que le Sénat est appelé à débattre de ces sujets : une proposition de loi mettant fin au régime social étudiant a été votée en novembre 2014 dans notre hémicycle, sur l’initiative de notre collègue Catherine Procaccia.
La réforme engagée par le projet de loi s’inscrit dans le droit fil des préconisations de notre assemblée. Elle fait également écho à des réflexions engagées par la commission des affaires sociales, dès 2012, au sein d’un groupe de travail.
Les constats posés alors, étayés depuis par de nombreux rapports, demeurent en grande partie d’actualité.
Lors de sa création en 1948, le régime étudiant avait vocation à favoriser l’autonomie des jeunes et à prendre en compte leurs besoins spécifiques en matière de santé. Or il ne semble plus répondre efficacement à cet objectif : les allers et retours vers et depuis le régime étudiant, par nature transitoire, peuvent être sources de dysfonctionnements et, in fine, entraver l’accès des jeunes à la santé.
Notre but n’est pas de remettre ici en question la capacité des organismes gestionnaires, qui ne sont pas seuls responsables d’un système porteur en lui-même de complexité et de lourdeur administrative. La qualité du service offert, souvent critiquée, s’est d’ailleurs améliorée avec l’adossement en 2015 d’un des opérateurs, La Mutuelle des étudiants, au régime général.
Dans le prolongement de cette évolution, le projet de loi a pour objet d’engager une réforme structurelle qui devrait entraîner une simplification des démarches pour les jeunes et leurs familles, puisque les étudiants demeureront rattachés au régime de leurs parents.
La commission des affaires sociales a approuvé cette réforme, tout en étant vigilante quant aux conditions de sa réussite.
Je mettrai l’accent sur trois enjeux.
Le premier enjeu est organisationnel. La suppression du régime étudiant va impliquer un profond bouleversement, en particulier pour le réseau des mutuelles étudiantes régionales. Après la réforme du régime social des indépendants, l’intégration d’une grande partie de leurs personnels au sein du régime général, d’ici au mois de septembre 2019, sera un nouveau défi pour l’assurance maladie. Nous serons attentifs à ce que ce transfert se déroule dans les meilleures conditions.
Par ailleurs, la suppression de la cotisation pour les étudiants dès la rentrée prochaine est certes positive pour les familles, mais son impact sur l’équilibre des comptes sociaux devra être précisé dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous y veillerons.
Le deuxième enjeu est l’exigence de qualité du service rendu aux étudiants, à laquelle ils sont à juste titre attentifs, et la prise en compte par l’assurance maladie des besoins propres à ce public, comme la confidentialité des échanges, la dématérialisation des démarches, l’accueil des étudiants étrangers ou encore l’adaptation des supports de communication. Finalement, ce qui est en jeu, c’est l’appropriation de notre système de protection sociale par les jeunes au moment où ils en découvrent le fonctionnement.
Nous le savons, beaucoup de pédagogie reste à faire. C’est pourquoi il est important que les représentants des étudiants demeurent associés au nouveau dispositif. L’Assemblée nationale a fait un premier pas en ce sens en introduisant un représentant au sein du conseil de la Caisse nationale d’assurance maladie ; la commission des affaires sociales a proposé de porter ce nombre à deux, ce qui permettra une représentation pluraliste des associations étudiantes, et donc l’expression de leur diversité.
Le troisième enjeu est celui de la prévention en matière de santé. Là aussi, les attentes sont fortes, même si des actions ont déjà été mises en place par les mutuelles étudiantes ou d’autres acteurs. Tous les sujets, qu’il s’agisse des thématiques liées aux addictions, à la contraception, au stress, ne sont pas spécifiques aux étudiants, et n’ont pas vocation à l’être, mais la plupart de mes interlocuteurs ont mis en avant la nécessité de parler aux étudiants et d’agir auprès d’eux selon des modalités adaptées, en privilégiant des actions de terrain et en associant leurs pairs.
La commission des affaires sociales a précisé le pilotage des actions de prévention en matière de santé en direction des étudiants, soulignant l’articulation entre les priorités de santé publique et la prise en compte des spécificités de la vie étudiante. Cette bonne coordination devra reposer sur une action volontariste des ministères de la santé et de l’enseignement supérieur, ainsi que sur des moyens dédiés pour que ces actions se diffusent largement dans les territoires.
Dans ce cadre, les actions favorisant l’accès aux soins, par exemple par le développement des centres de santé universitaires, me paraissent répondre à un réel besoin. Si la commission des affaires sociales a proposé de supprimer l’article 3 bis, qui a pour objet de demander un rapport sur ce sujet, elle n’en reste pas moins sensible à cet enjeu, qui renvoie toutefois à des questions dont le champ dépasse l’objet du présent projet de loi.
Vous l’aurez compris, la commission des affaires sociales est favorable à la réforme technique engagée avec la suppression du régime étudiant, tout en souhaitant que celle-ci contribue à servir un objectif plus large : la santé des jeunes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Exception d’irrecevabilité
Mme la présidente. Je suis saisie, par Mme Assassi, MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, d’une motion n° 193.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à l’orientation et la réussite des étudiants (n° 242, 2017-2018).
En application du dernier alinéa de l’article 44 du règlement, ont seuls droit à la parole l’auteur de l’initiative ou son représentant pour dix minutes maximum, un orateur d’opinion contraire pour dix minutes maximum, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond, ainsi que le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Fabien Gay, pour la motion.
M. Fabien Gay. Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur pour avis, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi de rappeler quelques articles de notre Constitution, qui me semblent avoir été oubliés dans le processus législatif en cours : l’article 34 précise notamment que « la loi détermine les principes fondamentaux de l’enseignement » ; l’article 24 dispose quant à lui que « le Parlement vote la loi ».
Lors des débats à l’Assemblée nationale, vous avez déclaré, madame la ministre, que la plateforme serait la « face visible de la réforme », et que la nouvelle rédaction de l’article L. 612-3 du code de l’éducation apporterait « une base juridique solide à la nouvelle plateforme Parcoursup, qui va gérer les inscriptions pour la rentrée 2018 ».
Dans un sursaut de légalisme, vous avez même rappelé ce principe de droit en vertu duquel « on ne peut pas prendre des décrets ou des arrêtés avant d’avoir voté la loi ». Et pourtant, vous faites exactement l’inverse. Sans prendre le soin de nous le présenter lors de votre audition par la commission de la culture, vous avez promulgué, trois jours après, un arrêté qui organise la plateforme Parcoursup selon les dispositions de la loi dont nous commençons l’examen au Sénat seulement aujourd’hui.
Notre groupe a déposé un recours en annulation de ce texte auprès du Conseil d’État et vos explications lors de nos débats seront susceptibles d’être mises à profit par cette juridiction pour examiner notre requête. Notre Haute Assemblée se voit ainsi confier un rôle inattendu dans le contrôle de légalité d’un acte subalterne. Vous attaquez le bicamérisme par la base !
En déposant ce recours en annulation, nous défendons la règle constitutionnelle de la hiérarchie des normes, les prérogatives du Sénat et la nécessité d’une relation de confiance, qui doit nécessairement régir les relations du Gouvernement avec le Parlement. Nous souhaitons aussi éviter aux candidats et à leurs familles les risques de recours contentieux qui pourraient naître des décisions prises sur la base d’un acte juridique illégal.
De plus, à partir de cet arrêté litigieux, de nombreuses universités ont intégré dans Parcoursup des attendus qui mettent à profit les libertés qu’il offre, mais selon une interprétation que vous avez vous-même condamnée. Je pense notamment à l’exigence du BAFA. Que dire des lycéens qui découvrent en cours d’année scolaire, à la lecture de ces attendus, qu’ils n’ont pas choisi la bonne filière ? Tous ces problèmes pourraient légitimement déboucher sur des contentieux dont la gestion incombera aux universités et aux rectorats.
Plus grave encore, à l’Assemblée nationale, vous avez proféré la menace suivante, madame la ministre : « Si ce projet de loi n’est pas voté par le Parlement, nous procéderons l’an prochain comme cette année, par tirage au sort ».
Je vous rappelle qu’aux termes exprès de l’article L. 612-3 du code de l’éducation « les dispositions relatives à la répartition entre les établissements et les formations excluent toute sélection ». À ce titre, le tirage au sort est parfaitement illégal, et je ne comprends pas comment vous pouvez contraindre notre décision en nous menaçant d’appliquer des dispositions qui violent le droit.
La représentation nationale et les membres du Gouvernement, plus que quiconque, se doivent de respecter la loi et de la défendre. Je vous demande donc solennellement de ne pas nous forcer, dans la discussion, à un choix entre votre projet et des pratiques illégales. Nous ne manquerons pas de faire valoir nos droits au moyen de rappels au règlement pour imposer un débat respectueux de la loi.
Par ailleurs, le Gouvernement a engagé une réflexion sur le rôle du Parlement, dont il veut simplifier le fonctionnement et accélérer le travail. Je m’étonne donc que ce légitime objectif ne s’applique pas à ce projet de loi. Nombre de ses dispositions relèvent en effet du décret ou de l’arrêté, mais il est vrai que votre pratique tend à abroger cette hiérarchie des normes.
Nous comprenons bien cette volonté tactique de dissimuler, par des développements amphigouriques, ce qui constitue l’objet principal de votre réforme, et que vous ne voulez pas assumer politiquement. En revanche, j’ai entendu que M. le rapporteur l’assumait pour vous… (Mme la ministre sourit.)
Nous pensons, à l’inverse, qu’une bonne loi est une loi lisible et intelligible, qui transpose en droit des choix politiques clairement énoncés.
Le code de l’éducation actuel interdit la sélection pour l’entrée à l’université, tout en autorisant un grand nombre d’établissements à déroger à ce principe de droit. Vous voulez étendre ce système dérogatoire à l’ensemble des établissements. Alors, pourquoi ne pas le dire franchement ? Vous pourriez alors réduire le premier article de votre projet de loi à deux simples phrases, que je vous livre : « Le premier cycle est ouvert à tous les titulaires du baccalauréat. Les inscriptions sont prononcées par le président ou le directeur de l’établissement dans la limite des capacités d’accueil. » Voilà, c’est simple ! Tout le reste relève du décret. Nous saisirons donc le Conseil constitutionnel pour lui demander de délégaliser ces dispositions et vous obliger à les prendre par décret.
Enfin, vous défendez aujourd’hui ce projet de loi, alors que votre collègue ministre de l’éducation nationale présentera sa réforme du baccalauréat au conseil des ministres dès la semaine prochaine.
M. Pierre Mathiot, chargé d’une mission sur la réforme du baccalauréat, expliquait à la commission de la culture la semaine dernière que, si ses préconisations étaient retenues, il faudrait nécessairement réécrire le texte que vous nous soumettez aujourd’hui. Il relevait à raison que votre projet donnait une place marginale au baccalauréat et que l’entrée à l’université se déciderait essentiellement à partir des notes du lycée.
Nous le savons, d’autres réformes sont en cours, sur l’apprentissage ou encore sur le statut des enseignants. Toutes ces réformes participent d’un projet d’ensemble qui fait système. Il eût été préférable, pour la qualité de nos débats et le respect du rôle du Sénat dans le dispositif législatif, que le Gouvernement nous le présentât globalement.
Au lieu de cela, nous sommes réduits à examiner, dans l’urgence, des textes qui défilent devant notre assemblée comme des perles que l’on enfile sur un collier. Cette tactique de saturation de l’espace législatif par un déferlement continu de textes partiels imposés dans le cadre de la procédure accélérée est, sans conteste, réfléchie. Je pense même qu’elle est, de la part de l’exécutif, une stratégie politique pour asphyxier le Parlement et étouffer toute mobilisation populaire.
Elle aboutit néanmoins à des projets et des dispositifs élaborés dans la précipitation et sans réelle étude d’impact. En l’occurrence, vos services et ceux des universités sont incapables de nous expliquer de quels moyens ils vont disposer pour analyser la grande masse des dossiers de candidature ou mettre en place des dispositifs d’accompagnement pédagogique. À ces problèmes matériels s’ajoutent les interrogations légitimes des spécialistes, qui doutent des capacités du nouveau logiciel à trier les huit millions de vœux non hiérarchisés des lycéennes et lycéens.
À tout le moins, et avant de lancer cette nouvelle plateforme, il eût été de bonne politique d’analyser dans le détail le fonctionnement de celle qu’elle remplace, à savoir APB. Ainsi, alors que la réforme est lancée, votre service des systèmes d’information et des études statistiques vient seulement de publier les résultats d’une enquête sur les choix d’orientation après le baccalauréat.
Les enseignants des lycées et des universités, leurs organisations représentatives vous ont alerté sur les difficultés qu’ils pressentent pour organiser la rentrée dans de bonnes conditions : celle de septembre 2017 a été chaotique ; celle de 2018 s’annonce apocalyptique !
Madame la ministre, si votre intention est vraiment de trouver une place dans l’enseignement supérieur à tous les nouveaux bacheliers, comme vous l’avez déclaré à plusieurs reprises, alors, vous n’avez pas besoin de cette loi, mais il vous faut dégager rapidement des moyens supplémentaires. Et si vous ne savez pas comment trouver les 500 millions d’euros nécessaires sur cinq ans, demandez conseil à M. le ministre de l’économie, lui qui a réussi l’exploit de trouver en quelques minutes 4 milliards d’euros pour les 1 % les plus riches en supprimant l’ISF. (Exclamations sur différentes travées.)
Pour conclure, je souhaite m’adresser à vous, mes chers collègues …
M. Roger Karoutchi. Pas pour trouver 500 millions d’euros, j’espère… (Sourires.)
M. Fabien Gay. Même à vous, monsieur Karoutchi. (Nouveaux sourires.)
Agissons en responsabilité et ne prenons pas le risque d’être comptables des dysfonctionnements à venir. Compte tenu des problèmes constitutionnels, juridiques, organisationnels et matériels que pourrait poser ce projet de loi, nous vous proposons de le déclarer irrecevable. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, contre la motion.
Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, certains membres de notre commission se sont, ces dernières semaines, légitimement posé un certain nombre de questions. Il est vrai que le calendrier est resserré, et que l’année universitaire ne s’arrête pas juste parce que nous sommes en train de réfléchir et de légiférer sur l’organisation de la future rentrée scolaire et universitaire. Ces mêmes collègues ont d’ailleurs explicitement interrogé Mme la ministre en commission sur l’éventualité de l’application par anticipation d’une loi non encore débattue au Sénat.
Au cours de cette séance, Mme la ministre a bien reprécisé que, si les vœux étaient progressivement enregistrés, les seules dispositions du parcours qui sont en vigueur n’avaient pas besoin de base législative. Les premières décisions qui feront grief seront prises après l’adoption de ce projet de loi.
La commission, qui s’est réunie ce matin, s’est prononcée contre cette motion, arguant de son souhait de débattre du texte en l’état.
Je rappellerai aussi, pour mémoire, que la CNIL et le Conseil d’État ont mis en demeure le Gouvernement de changer la procédure avant les prochaines affectations dans l’enseignement supérieur. Je sais que certains collègues souhaiteraient que nous ayons une « année blanche », en quelque sorte, mais cela ne serait possible que dans un monde idéal, où il n’y aurait plus de rentrée universitaire à organiser. On laisserait ainsi au milieu du gué des étudiants qui s’apprêtent à passer leur baccalauréat.
Mes chers collègues, nous devons assumer notre responsabilité collective, tout d’abord en débattant du mieux possible de ce texte de loi, qui est extrêmement important et qui nous touche tous. En même temps, et ce faisant, nous enverrons un signe rassurant aux étudiants et à leurs familles, qui s’inquiètent toujours un peu quand il y a du changement dans l’air.
Vous l’aurez compris, je suis contre l’adoption de cette motion. (MM. Arnaud de Belenet et Jean-Marc Gabouty applaudissent.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur Gay, je suis élu du Doubs, département qui a envoyé siéger sur ces travées un homme illustre, Edgar Faure, qui disait : « Tout ce qui est excessif est insignifiant ! »
Je ne sais pas si vos propos sont insignifiants, mais je vous donne à méditer sur ce que disait Lénine : « Les faits sont têtus ! » (Exclamations.)
Je dirais même que les chiffres sont têtus. Peut-on accepter que 86 000 étudiants se retrouvent sur le bord du chemin en juillet 2017 parce qu’ils n’avaient toujours pas d’affectation ? Peut-on accepter que quelque 3 800 lycéens se soient retrouvés sans aucune affectation à l’issue du processus APB ? Non, on ne peut pas l’accepter, mes chers collègues !
M. Fabien Gay. Je suis d’accord avec vous.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Si nous votons votre motion, cela veut dire que l’on revient au tirage au sort, à APB, …
M. Fabien Gay. Non !
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. … à un ensemble de procédures iniques, injustes, qui ne sont pas de nature à rassurer nos jeunes.
Vous l’avez bien compris, je ne suis pas un représentant du Gouvernement, et je suis fier d’être membre du groupe Les Républicains. (Exclamations.)
Néanmoins, je pense que nous devons faire preuve de responsabilité, d’autant que la CNIL et le Conseil d’État ont mis le Gouvernement en demeure de changer les règles. Nous devons donc l’accompagner en légiférant sur un sujet important pour nos jeunes. Quelque 850 000 lycéens et étudiants redoublant attendent beaucoup de nous ; ne rajoutons pas de l’anxiété aux difficultés qu’ils peuvent déjà rencontrer à ce jour.
La commission a émis un avis défavorable à l’adoption de cette motion.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Madame la présidente, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est évidemment défavorable à cette motion, mais je voudrais quand même rappeler deux choses.
D’abord, je fais totalement confiance au Conseil d’État, auquel ce texte a été soumis en amont : en autorisant sa présentation au Parlement, il a estimé qu’il respectait la hiérarchie des normes.
Ensuite, si vous lisez la loi qui est actuellement en vigueur, vous noterez qu’elle prévoit une procédure de préinscription nationale informatisée de nature à informer les lycéens et à leur permettre d’émettre leurs vœux. Or la plateforme Parcoursup, telle qu’elle fonctionne actuellement, est bien une plateforme de préinscription nationale automatisée donnant de l’information aux lycéens et leur permettant d’émettre des vœux.
J’ai eu l’occasion de le dire à la commission, et je le répète ici aujourd’hui : vous imaginez bien que je n’aurais pas pris le risque d’avoir 850 000 dossiers papier à traiter à la main. Comme vous l’avez rappelé, au moment où je m’exprimais devant l’Assemblée nationale, nous ne savions pas encore que la circulaire sur le tirage au sort serait déclarée illégale, donc nous pensions encore avoir cette possibilité. Aujourd’hui, nous ne l’avons plus ; la seule autre solution serait donc de revenir aux dossiers papier, comme à l’époque où je m’inscrivais à l’université. Évidemment, je ne souhaite pas en arriver là, donc j’ai fait en sorte que l’arrêté soit parfaitement conforme au droit en vigueur.
J’en profite pour revenir sur un point qui a été longuement discuté, sans pour autant relancer un débat sur les mots. Il a été rappelé que 54 % des formations en France sélectionnent : ces formations répondent « oui » ou « non » aux candidats. Je souhaite pour ma part que les formations non sélectives continuent à accueillir l’ensemble des étudiants en leur répondant « oui » tout simplement, ou « oui, si vous acceptez que nous vous accompagnions vers la réussite ». Je n’appelle pas cela de la sélection ; si vous souhaitez le faire, je n’entrerai pas dans ce débat. L’important, c’est que vous vous rendiez compte qu’il nous faut des jeunes formés, diplômés, avec des compétences, parce que l’économie de notre pays en a besoin.
Mme Françoise Gatel. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Je pense que notre propos n’a pas été compris. Nous étions sur un débat juridique et nous avons glissé sur les moyens, ce qui est intéressant.
J’ai entendu Mme la ministre prendre l’engagement solennel, devant la représentation nationale, que tous les bacheliers auraient une place à l’université.
M. Pierre Ouzoulias. Or M. Grosperrin nous dit que, si on ne vote pas la loi, il n’y aura pas de places. Il y a donc une contradiction, de laquelle je tire le constat que M. Grosperrin ne croit absolument pas que Mme la ministre pourra mettre tous les moyens en œuvre pour accueillir tous les bacheliers. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Pourquoi sommes-nous ici aujourd’hui ? C’est parce que nous avons tous constaté, en tant qu’élus, parents ou enseignants, que le système en vigueur ne fonctionne pas, ou fonctionne mal ; M. le rapporteur l’a bien expliqué.
M. Fabien Gay a quant à lui insisté sur des points juridiques tout à fait exacts. Le débat est cornélien ; il est quelque peu juridique, il est peut-être aussi quelque peu hypocrite. La loi doit avant tout être assise sur le bon sens. Nous sommes dans un État de droit et, pour ma part, j’aurais tendance à répondre à M. Gay que, même si j’ai été, comme tous les parlementaires, quelque peu vexé par la procédure un tant soit peu hâtive retenue par le Gouvernement, néanmoins, comme le dit le proverbe, « nécessité fait loi ».
On ne peut pas conserver en l’état le système APB, dont nous avons tous constaté qu’il est une catastrophe. Dès lors, monsieur Gay, même si je partage votre gêne concernant la forme, en revanche, sur le fond, j’estime que nous devons aujourd’hui corriger ces erreurs. Tel est bien l’objet du texte dont nous débattons ; c’est pourquoi je voterai contre votre motion, quand bien même ce que vous avez dit, sur la forme ou sur le fond, serait juste.
Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 193, tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 57 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 268 |
Pour l’adoption | 15 |
Contre | 243 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Discussion générale (suite)
M. Antoine Karam. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, madame la rapporteur pour avis, mes chers collègues, le plan Étudiants, dont ce projet de loi est la pierre angulaire, relève enfin le défi de l’accompagnement vers la réussite de tous les jeunes, dans leur diversité.
Nous sommes dans une situation unique. En effet, le droit en vigueur n’est plus applicable en l’état, et nous devons donc définir, de toute urgence, un nouveau cadre légal. Je pense que nous mesurons tous ici l’ampleur de la tâche qui nous incombe.
Les difficultés rencontrées lors de la campagne 2017 d’APB ont révélé le caractère injuste, non seulement du recours au tirage au sort, mais aussi de ce système dans son ensemble. La plus grande injustice réside dans cette honteuse sélection par l’échec.
Alors, n’ayons pas peur de dire que ce texte apporte une réponse équilibrée et pragmatique à une situation, devenue insupportable, dont nous sommes collectivement responsables.
La première ambition de ce projet de loi est de replacer de l’humain et de la justice au bon endroit, par un accompagnement personnalisé vers la réussite.
En maintenant le principe de liberté de choix du candidat, nous ne fermons aucune porte à notre jeunesse à ce moment charnière qu’est le passage de l’enseignement secondaire à l’enseignement supérieur. Mesurons bien la complexité de ce moment : c’est aussi le passage de l’adolescence à l’âge adulte, celui où nos enfants se construisent et où chacun d’entre eux affirme son identité et ses choix. Il nous faut donc aider chaque lycéen en le considérant comme une personne qui va réussir.
Par ailleurs, l’introduction d’attendus consultables sur la nouvelle plateforme Parcoursup offrira des garanties supplémentaires quant à la prise de conscience par les candidats des difficultés de telle ou telle filière. Il s’agit d’une logique de personnalisation des parcours et de responsabilisation des candidats, qui seront désormais davantage acteurs de leur réussite. Les futurs étudiants seront informés aussi bien sur le contenu de la formation que sur ses débouchés.
Un autre axe primordial de ce texte est la continuité du processus d’accompagnement des jeunes, qui doit être garantie par une meilleure coordination entre le lycée et l’enseignement supérieur.
Les dispositifs d’accompagnement de Parcoursup ne peuvent être hors sol, mais doivent s’inscrire au plus près des étudiants, dans une logique de parcours et d’élaboration d’un projet. L’orientation est un processus long que nous devrons enclencher dès l’entrée au lycée. À cet égard, l’introduction de « semaines de l’orientation » est une bonne chose. Le projet de loi prévoit qu’elles soient organisées en concertation avec les universités. Nous nous en félicitons, car le renforcement de la cohérence entre le lycée et l’enseignement supérieur est, de notre point de vue, essentiel.
En raison de leur éloignement et de leur isolement, les territoires ultramarins devront faire l’objet d’une attention particulière. En matière d’orientation, il nous faut y promouvoir les formations relatives aux filières d’avenir. Je pense à l’économie bleue, au bois, à la biodiversité, mais aussi aux ressources halieutiques et minières. Nous devons offrir une voie à ceux qui cherchent des débouchés sur leur territoire d’origine. Nous proposerons également de faciliter la poursuite des études de nos bacheliers ultramarins dans l’Hexagone, en particulier pour ceux dont la filière est en tension dans leur académie d’origine.
La seconde grande ambition de ce texte est d’améliorer les conditions de vie de nos étudiants.
Cela concerne d’abord – et c’est un vrai progrès – la santé étudiante. Nous ne pouvons que nous féliciter de la volonté de mettre fin aux dérives récurrentes de la sécurité sociale étudiante.
Le texte prévoit ensuite la création d’une contribution unique « vie étudiante » qui rendra le système plus lisible et plus cohérent. Du reste, l’Assemblée nationale a souhaité que cette contribution soit également destinée à l’accueil des étudiants et, en particulier, de ceux qui viennent d’outre-mer ou de l’étranger. Il s’agit là d’un point important, car les jeunes Ultramarins sont souvent en proie à de grandes difficultés d’adaptation et d’installation. Cette contribution suscite toutefois quelques interrogations autour de son fléchage, qui sera opéré d’abord par le CROUS, puis par chaque établissement. La programmation des actions financées devra donc faire l’objet d’une grande transparence.
Je souhaite aussi saluer le travail effectué, dans un esprit constructif, par notre commission et son rapporteur sur l’ensemble de ce texte.
Les avancées apportées, aussi bien au profit des bacheliers technologiques et professionnels que sur la plateforme Parcoursup, montrent bien l’importance du Sénat dans l’élaboration de la loi.
Notre groupe reste toutefois attaché à ce que ce projet de loi demeure fidèle à l’esprit du plan Étudiants.
Aussi, si certains considèrent le dispositif prévu trop sélectif, l’enseignant que je suis ne peut que leur faire part du désarroi de ces étudiants mal orientés qui se retrouvent en échec dès leur entrée à l’université.
Laisser ces jeunes perdre une année, voire deux, dans une filière qui ne leur correspond pas, ce n’est pas garantir leur liberté d’étudier, c’est négliger la responsabilité que nous avons de mieux les accompagner vers la réussite.
À l’inverse, ouvrir la voie à une sélection accrue pilotée par les établissements de l’enseignement supérieur, et ce au nom de leur autonomie, c’est prendre le risque d’entamer un mouvement vers une université à deux vitesses, une université qui discrimine alors qu’elle doit proposer à tous les étudiants une voie vers la réussite.
Nous pouvons ménager l’autonomie des établissements sans pour autant bloquer les procédures, en respectant le droit des élèves à être affectés dans l’université de leur choix en fonction de leurs compétences. Il s’agit là d’un point d’équilibre essentiel pour faire de ce texte une réforme juste et efficace. Les mouvements étudiants de 1986, qui ont vu la mort tragique de Malik Oussekine, cet étudiant comme tous les autres, dénonçaient déjà ces mêmes dérives.
Alors, profitons de ce débat, mes chers collègues, pour dire aux étudiants que non seulement nous les entendons, mais nous les écoutons. Plutôt que d’agiter des épouvantails, mettons-nous humblement à leur école, à l’école de leur vie, donc de leur avenir.
Vous l’aurez compris, notre groupe est favorable à ce texte indispensable. Nous le souhaitons aussi juste qu’efficace ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, pour introduire notre débat, j’aimerais vous citer plusieurs passages du discours prononcé par notre ancien collègue Edgar Faure, en 1968, à l’occasion de la présentation de sa loi de refondation de l’université, qui allait être adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale comme par le Sénat.
Dans les circonstances que vous connaissez, et alors que l’université devait affronter le défi, bien plus grand qu’aujourd’hui, de l’accueil de 80 000 étudiants supplémentaires, Edgar Faure avait réaffirmé les principes républicains de notre enseignement, que vous reniez aujourd’hui, et engagé des moyens matériels considérables au service de cette ambition politique qui vous fait tant défaut.
Il faisait le rappel suivant : « L’État est débiteur de l’enseignement envers la jeunesse et, plus généralement, il est débiteur de l’éducation envers la nation. » C’est en vertu de cette exigence morale et quasi philosophique qu’il excluait le recours à la sélection pour écarter de l’université les cohortes supplémentaires qu’elle n’arrivait plus à recevoir.
À celles et ceux qui le pressaient d’établir « un filtrage supplémentaire selon les possibilités d’accueil », il répondait justement : « Que deviendront les bacheliers éliminés des facultés les plus exigeantes ? Ils iront encombrer celles qui n’auront pas pratiqué la sélection. Il en résultera donc un transfert d’une faculté à une autre. » Il ajoutait, pour expliquer son refus de la sélection : « La dernière raison, la plus profonde et la plus déterminante, touche le fond de l’enseignement : que faire des hommes ? Si ces bacheliers se sont apprêtés à s’inscrire dans des facultés et si nous les en empêchons, où iront-ils ? Que vont-ils faire ? »
Mes chers collègues, alors que nous commençons l’examen de ce texte, qui est loin d’être technique, puisqu’il touche aux fondements du pacte républicain en matière d’enseignement, alors que vous vous apprêtez, sans doute, à donner aux universités les moyens pratiques de rejeter les candidats qu’elles ne veulent ou qu’elles ne peuvent accueillir, gardez à l’esprit cette question pour bien prendre conscience du poids de vos responsabilités : que vont-ils faire ?
En 1968, sous la pression d’un mouvement étudiant que vous ne connaissez pas encore, madame la ministre, le gouvernement de la République avait engagé un plan d’investissement d’urgence très ambitieux, dont l’objectif était de ne laisser aucun bachelier sans affectation. Ainsi, en quelques mois, il avait transformé l’immeuble laissé vacant par le départ de l’OTAN à Paris, porte Dauphine, en une université qui put accueillir près de 6 000 étudiants à l’automne de la même année. Aujourd’hui, l’université de Paris-Dauphine est un établissement d’enseignement qui sélectionne ses étudiants et fixe librement le coût de ses formations, une université pour l’élite. Vous me permettrez de voir dans cette reconversion radicale un symbole de la dérive lente et continue de notre système universitaire.
Depuis plus de vingt ans, à l’exception de quelques rares périodes de rémission, les gouvernements successifs ont abandonné l’ambition d’apporter aux universités les moyens dont elles ont besoin pour donner aux bacheliers les mêmes droits à poursuivre leur formation dans le cycle supérieur. Leur unique dessein comptable fut de gérer la pénurie.
Notre système d’enseignement pâtit durement de cet abandon accepté. Depuis dix ans, le budget moyen par étudiant n’a cessé de baisser, jusqu’à un niveau bien inférieur à celui de nos partenaires européens. Pis, la proportion de titulaires d’un doctorat a diminué.
Les inégalités sociales et géographiques d’accès aux formations supérieures se sont quant à elles accrues. Ainsi, 34 % des bacheliers de l’académie de Rouen accèdent à l’université, contre 49 % dans l’académie de Paris. Dans cette dernière académie, 20 % ont intégré une classe préparatoire aux grandes écoles, contre 7 % dans l’académie d’Amiens et 5 % en Guyane. Les disparités sociales sont, elles, devenues abyssales.
L’arrivée prévisible de 40 000 bacheliers supplémentaires aurait pu être mise à profit pour tenter de corriger ce déclassement global de notre enseignement supérieur. Las ! elle a été gérée comme un nouveau fardeau. Fuyant ses responsabilités, le précédent gouvernement a reporté sur les établissements la responsabilité de l’inique décision d’écarter cet « excédent » par un tirage au sort illégal. Quant à votre gouvernement, madame la ministre, en refusant d’augmenter votre budget pour satisfaire pleinement cette demande croissante d’accès aux savoirs, il vous oblige finalement au même exercice mécanique : éloigner les indésirables.
Avec plus d’adresse, ce recours à la sélection, vous ne l’assumez ni politiquement ni matériellement, et vous en rejetez la responsabilité et la charge sur les universités. Ce faisant, vous mettez à bas les fondements républicains de notre éducation nationale.
M. Gérard Longuet. Il ne faut pas exagérer !
M. Pierre Ouzoulias. Jusqu’à présent, ce sont les étudiants qui choisissaient leur université ; suivant votre projet, ce sont les universités qui sélectionneront leurs étudiants.
M. Gérard Longuet. Enfin !
M. Pierre Ouzoulias. En rompant le lien qui les unit à la Nation, vous instaurez la concurrence générale entre les établissements, les étudiants et les formations. C’est l’objectif libéral de votre réforme.
Nous nous y opposerons, en républicains, par la promotion d’un autre idéal, celui qu’exposait Condorcet, le 20 avril 1792, devant l’Assemblée législative : « Offrir à tous les individus de l’espèce humaine les moyens de pourvoir à leurs besoins, d’assurer leur bien-être, de connaître et d’exercer leurs droits, d’entendre et de remplir leurs devoirs ; assurer à chacun d’eux la facilité de perfectionner son industrie, de se rendre capable des fonctions sociales auxquelles il a droit d’être appelé, de développer toute l’étendue des talents qu’il a reçus de la nature et, par là, établir entre les citoyens une égalité de fait, et rendre réelle l’égalité politique reconnue par la loi. Tel doit être le premier but d’une instruction nationale. » C’est celui que nous défendrons ici ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste – M. Patrice Joly et Mme Marie-Pierre Monier applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Lafon. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Laurent Lafon. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, madame la rapporteur pour avis, mes chers collègues, le projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants a pour objet, avant tout, de mettre fin au système de tirage au sort qui a prévalu l’année dernière pour l’inscription des étudiants à l’université.
Même si les délais d’élaboration de la loi et de mise en œuvre de la nouvelle procédure peuvent sembler courts, nous partageons la préoccupation du Gouvernement : il importe de mettre en place un système opérationnel pour assurer la prochaine rentrée universitaire en tenant compte des impératifs de calendrier que constituent, d’une part, les épreuves du baccalauréat en mai et juin prochains et, d’autre part, le début des cours dans l’enseignement supérieur en septembre et en octobre. La mise en demeure de la CNIL et l’arrêt rendu par le Conseil d’État en 2017 rendaient de toute façon inéluctable une nouvelle organisation pour la rentrée 2018.
Autant le dire tout de suite, nous partageons les grandes orientations qui sous-tendent ce texte.
Il s’agit, en premier lieu, de mettre en place un processus de sélection dans les filières en tension, pour éviter que des bacheliers ne se trouvent affectés dans des filières où ils seront en difficulté et que nombre d’entre eux abandonneront quelques semaines ou quelques mois après leur entrée à l’université. Je tiens d’ailleurs dès à présent à saluer, comme l’a fait notre rapporteur il y a quelques minutes, le travail de notre ancien collègue Jean-Léonce Dupont qui, il y a plusieurs mois, avait déjà travaillé, dans ce même hémicycle, dans la même direction.
En second lieu, ce texte maintient le principe de l’accès à l’enseignement supérieur pour chaque bachelier qui le souhaite ; c’est le corollaire de la mise en place de la sélection, ou cela l’équilibre.
Par ailleurs, le projet de loi instaure un principe d’accompagnement pour les étudiants dont le niveau est insuffisant pour réussir leur première année.
Enfin, il crée des liens entre les lycées et les établissements d’enseignement supérieur en impliquant les professeurs principaux et les conseils de classe dans la procédure d’orientation et en transmettant les notes obtenues en première et en terminale aux établissements d’enseignement supérieur.
Deux dispositions d’une autre nature nous semblent, elles aussi, aller dans la bonne direction.
Il s’agit, d’une part, de la suppression du régime de sécurité sociale spécifique aux étudiants et de son rattachement au régime général. Force est de reconnaître que cette spécificité ne se justifiait plus et n’était pas efficiente en termes de délais de remboursement ou de coûts de gestion.
Il s’agit, d’autre part, de la possibilité offerte à tout étudiant qui le demande d’effectuer une année de césure sans que cela pénalise son parcours étudiant.
Si les grandes orientations du texte vont dans le bon sens, il nous paraît néanmoins insuffisant sur plusieurs aspects. Il serait selon nous erroné de penser que la réforme de l’enseignement supérieur et celle de l’orientation devraient s’arrêter à ce texte. En quelque sorte, ce projet de loi ouvre des pistes qu’il conviendra d’approfondir à travers d’autres textes législatifs.
C’est notamment le cas de la question, centrale à nos yeux, de l’orientation. Le chômage frappe en France près d’un jeune sur quatre, et le taux d’échec dans les premières années d’université est énorme : 60 % des étudiants inscrits en première année n’auront pas leur licence. Ces deux chiffres illustrent bien les défauts de notre système d’orientation. C’est un sujet qui préoccupe depuis plusieurs années la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat. La question reste malheureusement d’actualité ; il serait bon que le Gouvernement s’inspire du rapport de notre collègue Guy-Dominique Kennel sur ce sujet essentiel.
Autant le dire, nous ne pensons pas que le présent projet de loi améliorera significativement la situation dans ce domaine. Peut-être permettra-t-il aux quatre filières en tension d’afficher des taux de réussite plus satisfaisants en première année et durant le cycle de la licence, mais cela ne sera pas suffisant au regard de l’ampleur des difficultés.
La question de l’orientation nécessite d’être repensée au prisme d’une triple idée.
Nous devons, d’abord, aider le jeune à trouver les filières qui correspondent le mieux à ses aptitudes, bien entendu, mais aussi aux perspectives d’emploi dans le marché du travail.
Il faudrait, ensuite, mettre en place un système d’orientation qui commence dès la fin de la troisième et continue jusqu’à la fin de la licence ; cela donnerait au jeune, en fonction de sa maturité et de sa capacité à se projeter dans l’avenir, la possibilité d’avoir différents temps d’orientation.
Enfin, nous voudrions accorder au jeune un droit à l’erreur en lui permettant de changer d’orientation non seulement au cours de ses années de lycée, mais aussi au cours de son premier cycle d’enseignement supérieur.
De ce point de vue, le présent projet de loi n’aborde que faiblement la question de l’orientation. C’est pourquoi, malgré son titre, il ne peut s’agir pour nous d’une vraie réforme de l’orientation des jeunes.
Le deuxième sujet sur lequel ce projet de loi nous paraît insuffisant est l’organisation du premier cycle de l’université. La licence est encore très marquée par des schémas anciens, pour lesquels des évolutions devront intervenir.
De ce point de vue, plusieurs idées nous semblent devoir être approfondies.
Il faudrait organiser le premier cycle de manière plus souple, en permettant à l’étudiant de changer de filière sans qu’il doive recommencer au point de départ, avec le sentiment d’avoir perdu plusieurs mois. C’est pourquoi nous privilégions un système modulaire, capitalisable et semestriel, qui serait plus souple et donnerait plus de facilité pour s’orienter en cours de cycle. Cette organisation permettrait également à des étudiants d’adapter leur scolarité en passant leur licence en quatre ans, pour ceux qui en ont besoin, voire en deux ans, pour ceux qui le peuvent.
Il faut par ailleurs renforcer le lien avec le marché du travail. Le premier cycle est certes la voie d’accès aux masters, mais il peut aussi être, pour certains étudiants, une voie directe d’accès au marché du travail à l’issue de la licence. Le succès des formations courtes – BTS et, surtout, IUT – montre l’attrait de formations directement professionnalisantes. L’université aussi devrait pouvoir permettre, à travers des licences adaptées, d’accéder au marché du travail au bout de trois ans d’étude.
Le présent projet de loi introduit l’idée d’un accompagnement individualisé et d’une remise à niveau pour les étudiants dont le niveau semble insuffisant pour réussir leur première année.
Cela va, à nos yeux, dans le bon sens ; néanmoins, la rédaction actuelle et les moyens mis en œuvre nous paraissent notoirement insuffisants. Si l’on veut lutter contre les taux d’échec en première année et, au-delà, en licence, l’instauration d’une année propédeutique, qui permettrait à la fois de remettre à niveau le jeune et de mieux l’orienter sans le mettre dans une situation d’échec, nous semble devoir être étudiée sérieusement. Sur ces divers points, nous défendrons des amendements.
Le troisième et dernier sujet qui nous semble être insuffisamment traité dans ce projet de loi est celui de l’accès à l’enseignement supérieur des bacheliers professionnels et technologiques.
Nous partageons la crainte de ceux qui pensent qu’un processus de sélection met sur le côté les élèves les plus fragiles. Certes, il n’est pas non plus souhaitable de les laisser s’inscrire à l’université, comme c’était le cas jusqu’à présent. En effet, nous savons qu’ils s’y retrouvent souvent en situation d’échec.
Nous avons bien pris note de la mesure prise par le Gouvernement consistant à leur réserver un minimum de places dans les IUT et les sections de techniciens supérieurs, ou STS. Si cette initiative va dans le bon sens, elle sera néanmoins insuffisante pour affecter de nombreux bacheliers professionnels et technologiques de manière pertinente et sans les mettre dans des situations d’échec. Avec Parcoursup, le risque est réel qu’ils se retrouvent affectés à l’université dans des filières qui ne sont pas en tension, mais dans lesquelles ils connaîtront probablement les mêmes difficultés pour réussir.
Les difficultés de la rentrée de 2017 ont souvent été présentées comme l’échec de l’algorithme APB. Nous savons qu’il n’en est rien : c’est d’abord l’échec des gouvernements successifs qui n’ont pas anticipé le double phénomène de l’accroissement du taux de réussite au baccalauréat et du baby-boom de l’an 2000, aboutissant de manière inéluctable à l’augmentation significative du nombre d’entrants dans l’enseignement supérieur.
La nouvelle procédure mise en place par ce projet de loi apporte des solutions pour les filières en tension. Elle ne restaure pas, en revanche, la capacité de notre système d’enseignement supérieur à faire face au pic démographique pour les prochaines années.
Le Gouvernement a annoncé une augmentation des crédits, à hauteur de 1 milliard d’euros sur l’ensemble du quinquennat. Ces crédits seront affectés à l’aménagement et à la création de locaux, mais aussi au recrutement de personnel pour la mise en place de la réforme. Nous serons évidemment attentifs à la question des moyens. Bien qu’elle ne soit pas l’alpha et l’oméga des maux de l’université, il s’agit néanmoins d’un aspect important des mesures à prendre pour faire face aux difficultés actuelles.
Madame la ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris, le groupe de l’Union Centriste est plutôt favorable au présent projet de loi. Nous considérons que ce texte constitue une première étape, qui a le mérite de débloquer une situation qui n’était plus tenable. C’est donc dans un esprit de responsabilité que nous le voterons. Mais nous restons aussi conscients que, si nous voulons mieux former et préparer nos jeunes à leur vie future, il faut aller plus loin et être plus ambitieux dans la réforme. Tel sera le sens des amendements que nous défendrons. Telle sera aussi, je l’espère, l’ambition du Gouvernement dans la réponse qu’il leur apportera. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Sylvie Robert. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, « l’objectif de toute éducation devrait être de projeter chacun dans l’aventure d’une vie à découvrir, à orienter, à construire ». Par ces mots, Albert Jacquard confère à l’éducation une finalité presque métaphysique, autour d’un triptyque qui a pour pivot « l’orientation » de l’individu ; en effet, ce qui octroie du sens à l’éducation, par-delà l’apprentissage de savoirs et de connaissances, c’est bien l’orientation que nous lui donnons. Selon nos appétences et nos aptitudes personnelles, c’est elle qui détermine, en partie, les débouchés professionnels auxquels nous pouvons aspirer ; c’est elle, aussi, qui ajuste notre rôle et notre identité sociale.
Oui, une bonne orientation est aussi gage de réussite et ces deux termes – orientation et réussite – se trouvent d’ailleurs dans l’intitulé de votre projet de loi, madame la ministre. Certes, l’orientation peut être évolutive dans le temps, ce qui fait écho à la notion de formation tout au long de la vie, mais il est évident que la période cardinale est bien celle qui fait la charnière entre le lycée et l’enseignement supérieur. C’est à ce moment précis, pour paraphraser Albert Jacquard, qu’une vie encore invisible « se découvre », que nous « l’orientons » sans parfois bien en mesurer les conséquences et que nous commençons à « construire » un futur qui paraît souvent évanescent pour l’individu lui-même.
L’orientation constitue donc la clef de voûte de l’ensemble du système éducatif et doit faire l’objet non seulement d’une attention, mais d’un investissement réel, continu et massif des pouvoirs publics. Je le répète, éduquer sans permettre à chacun de bien s’orienter n’a pas de sens. Dès lors, tout l’enjeu de ce projet de loi est de savoir s’il assure les conditions d’une meilleure orientation et réussite des étudiants, comme le Gouvernement le prétend.
Ce texte est avant tout une réponse conjoncturelle, et non structurelle, aux défaillances qui ont émaillé progressivement le fonctionnement de la plateforme APB et qui ont été dénoncées par la CNIL. Cette plateforme n’était ni mauvaise ni bonne en soi, elle est simplement devenue inadaptée au regard de la démographie étudiante.
À cet égard, je crois qu’il convient de porter un regard positif sur la massification de l’enseignement supérieur. Dans certains propos, on sent parfois une tendance à la présenter comme un problème ; certes, elle soulève des questions fonctionnelles et organisationnelles, mais n’oublions jamais qu’il s’agit d’une chance prodigieuse. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
En effet, la massification est naturellement une chance pour l’étudiant. Alors qu’à l’après-guerre peu de jeunes poursuivaient leurs études dans l’enseignement supérieur, plus de 80 % des bacheliers s’inscrivent désormais dans une formation. Il s’agit pour eux d’une opportunité manifeste d’élever leur niveau de qualification, de se spécialiser dans la filière de leur choix et de consolider leur esprit critique. (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.)
Par ailleurs, il s’agit d’une chance pour notre pays. Les étudiants d’aujourd’hui sont notre devenir commun. Ils constituent la force, la vitalité et la capacité créatrice à répondre aux défis auxquels nous devons faire face à l’avenir. Tous les travaux, qu’ils aient été menés par des économistes ou des chercheurs en sciences sociales, démontrent que plus les individus ont un haut niveau de qualification, mieux une société se porte, se développe et innove.
M. Charles Revet. C’est sûr !
Mme Sylvie Robert. Néanmoins, si nous ne pouvons que nous réjouir de cette massification de l’enseignement supérieur, qui traduit une réussite de notre politique publique éducative, force est de constater qu’elle ne s’est malheureusement nullement conjuguée à une démocratisation de la réussite. Je ne rappellerai pas les taux d’échec en licence, mais je vous fais part de statistiques éloquentes : seuls 7 % des bacheliers technologiques et 2 % des bacheliers professionnels obtiennent une licence à l’université en trois ans. C’est politiquement inacceptable, socialement injuste et très inefficace d’un point de vue éducatif.
Que signifient concrètement ces statistiques ? Qu’il n’est plus possible de garantir uniquement l’accès de tous les bacheliers aux études supérieures, sans se préoccuper une seule seconde de leur chance de réussir. Agir ainsi, c’est ouvrir un accès qui mène à une impasse. L’enseignement supérieur ne doit pas être une jungle réglementée par la loi, non pas du plus fort, mais du mieux préparé et du mieux informé. Il est donc essentiel de réfléchir aux modalités propices à la réussite de chaque étudiant, ce qui sous-entend de s’adapter à son parcours et de prendre en considération ses désirs d’études supérieures.
Je tiens à insister sur ce qui ne doit en aucun cas être remis en cause : ce sont bien les étudiants qui choisissent leur formation et non les universités qui choisissent leurs étudiants. Concevoir un tel projet ou laisser se diffuser une ambiguïté en la matière, c’est clairement renoncer à la promesse républicaine et à la visée émancipatrice inhérente à l’éducation.
Afin de favoriser la réussite de chaque étudiant, il se révèle donc vital de l’aider à s’orienter, ce qui implique de l’accompagner. En ce sens, nous ne pouvons qu’approuver les dispositifs d’accompagnement et le parcours personnalisé que mettront en place les universités. En revanche, nous proposerons des amendements pour mieux les valoriser et nous assurer que leur mise en œuvre fasse véritablement l’objet d’un dialogue entre l’étudiant et l’établissement directeur des études. C’est une condition de la réussite de ces dispositifs, mais surtout de l’étudiant.
Pour autant, madame la ministre, deux réserves majeures brident quelque peu notre enthousiasme.
D’une part, s’adapter au parcours de l’étudiant et établir des modules d’accompagnement requiert des moyens financiers et humains importants. Or, nous en avions discuté lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2018, l’effort financier du Gouvernement est insuffisant. Certes, un milliard d’euros est promis sur la durée du quinquennat et vous avez débloqué un certain nombre de ressources dès la rentrée pour certaines universités, mais la démographie étudiante va continuer à croître à moyen terme et il faudra des moyens à la hauteur de l’ambition affichée.
Se posent donc la question des moyens, mais également celle de la temporalité pour mettre en œuvre la réforme. Encore une fois, nous comprenons l’urgence de la rentrée, mais pourquoi ne pas avoir procédé par étapes ? Cela aurait permis d’éviter la précipitation qui plonge certaines universités dans la difficulté.
D’autre part, madame la ministre, nous avons l’impression – et ce sentiment est partagé sur de nombreuses travées – de naviguer à contre-courant. Récemment, un rapport sur la réforme du baccalauréat a été remis à votre collègue de l’éducation nationale. Ce dernier va au-delà de ladite réforme et propose une refonte complète du lycée, qui va dans une direction singulière, parfaitement identifiée : amener l’étudiant à penser, dès la seconde, à son projet d’études supérieures et l’accompagner dans son orientation en lui donnant toutes les cartes en mains.
Si la priorité est bien une politique d’orientation efficace, au service de l’étudiant, qui gomme notamment les déterminismes et prévient les phénomènes d’autocensure, il aurait alors fallu un projet transversal, global, établissant un continuum entre la seconde, voire la première année de l’université. Cela aurait permis d’avoir une vue d’ensemble, seule à même d’instaurer une politique d’orientation unifiée, du secondaire à l’université.
En réalité, à l’inverse de ce qui est inscrit dans l’intitulé de ce projet de loi, nous sommes davantage dans une logique d’affectation que d’orientation. Certes, Parcoursup est d’ores et déjà actif, alors que nous sommes en train de légiférer sur ce sujet – je ne reviens pas sur les débats qui ont eu lieu tout à l’heure – : il comprend des informations sur les différentes formations et explicite les attendus, mais l’information n’est pas synonyme d’orientation. Toutefois, au-delà du cadrage national – et c’est heureux – qui est mentionné dans le texte, il est indispensable de prévoir que les attendus spécifiques ne peuvent être institués que dans la stricte mesure où ils paraissent justifiés au regard des caractéristiques de la formation.
Si certains établissements contournent ce principe, non seulement la réforme sera dévoyée, mais cela accentuera la concurrence entre universités et instaurera un système à plusieurs vitesses. En l’état, la logique d’affectation que j’évoquais précédemment est particulièrement prégnante dans le cadre de la procédure du dernier recours, ce fameux « en attente ».
Madame la ministre, la politique d’orientation commande de tout faire pour trouver une formation qui convienne à l’étudiant qui n’aurait eu aucune affectation. Nous savons que les recteurs sont particulièrement attachés à ce principe. Nous ne pouvons accepter, madame la ministre, qu’un étudiant qui a eu le baccalauréat et exprimé le souhait de continuer ses études puisse se retrouver sur le bord de la route par manque de places à l’université.
La régulation des flux, intrinsèque à la logique d’affectation qui régit ce projet de loi, ne prime aucunement sur le droit à la poursuite des études supérieures. J’insiste, tout étudiant a le droit de poursuivre des études supérieures ; aucune considération, et encore moins matérielle, ne peut l’en priver. Souscrire à une telle dérive, c’est régresser.
Ce droit doit donc être accessible à tous et ne contraindre aucun étudiant à renoncer. Le recteur est et doit rester garant de l’équilibre du système ; c’est pourquoi nous en renforcerons le rôle.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris, nous sommes fondamentalement opposés à toute idée de sélection intentionnelle à l’université, qu’elle soit sauvage, en laissant des étudiants sur le bas-côté, institutionnelle ou déguisée. Ce que nous voulons, c’est une orientation et un accompagnement réussis, du lycée au supérieur, précisément au nom de l’intérêt de l’étudiant. C’est cette valeur qui doit guider toute politique publique éducative et inspirer toute réforme de l’enseignement supérieur ou du secondaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Malhuret.
M. Claude Malhuret. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en décidant de répondre au naufrage de la plateforme Admission post-bac, le Gouvernement a fait preuve de courage. La question de l’enseignement supérieur et des taux d’échec déplorable dans le premier cycle universitaire est un problème de fond. Notre assemblée l’a répété dans plusieurs rapports. Trop longtemps, les précédents gouvernements ont évité d’affronter cette situation, nourrissant un état de fait aujourd’hui préoccupant. Le taux d’étudiants sortant de l’enseignement supérieur sans diplôme s’établit à près de 20 %, un cinquième de la population étudiante.
Pendant la campagne pour l’élection présidentielle, le Président de la République s’était engagé à faire de cette réforme de l’enseignement supérieur une pierre angulaire de son quinquennat. Cette décision se confirme et je me réjouis de constater que cette démarche a déjà vu le jour à travers la mise en place d’une nouvelle plateforme d’accès à l’enseignement supérieur, accessible depuis quelques semaines. Bien entendu, des ajustements seront nécessaires pour optimiser cet outil. C’est notamment l’objet de ce projet de loi.
Pour relever le défi de la modernisation de l’enseignement supérieur, ce texte propose d’en renouveler les modalités d’accès et de renforcer les articulations entre l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur. L’efficacité de ces passerelles n’est plus à démontrer et la réussite du programme « passerelle CM2-sixième » doit inspirer nos travaux. L’accès à l’enseignement supérieur ne doit pas être synonyme d’un abandon en rase campagne, il faut accompagner les jeunes étudiants dans leur nouveau parcours.
Parcoursup propose d’ores et déjà de réaliser une « fiche avenir », pièce importante de la nouvelle plateforme. La nouvelle procédure devra, en conséquence, informer les lycéens sur les attendus de chaque formation et les possibilités d’insertion professionnelle. Il faut en finir avec les formations sans débouchés, où le système éducatif envoie trop souvent nos adolescents, sans réfléchir à leur avenir.
La contrepartie de cet engagement à la professionnalisation des parcours, c’est le renforcement de l’engagement des étudiants. Le projet de loi propose un contrat de réussite pédagogique ; nous proposerons de préciser ce dispositif pour en faire plus qu’un acte symbolique. L’étudiant et son établissement devront mutuellement s’engager dans une démarche où l’insertion sur le marché de l’emploi est la finalité, et la ponctualité et le respect des engagements pris sont la condition de la réussite.
Ces promesses d’avenir ne sauraient être réalistes sans la mise en place d’un certain nombre de garde-fous. Le projet de loi nous paraît équilibré sur ce point. Le recteur sera un garant efficace du fonctionnement de ce nouveau système et les établissements seront pleinement inscrits dans la mise en place d’un dialogue entre le lycéen et sa future formation. Pertinence du projet, soutien à la mixité sociale et à la mobilité géographique : tels doivent être les mots d’ordre.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants contribue à une refonte de l’enseignement supérieur que nous appelons tous de nos vœux. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutiendra ce projet de loi en souhaitant qu’il soit le départ d’un modèle d’avenir et de réussite pour nos étudiants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Madame la ministre, je souhaite en tout premier lieu vous féliciter d’avoir pris à bras-le-corps un problème récurrent qui, au fil des ans, est devenu insupportable et a vu, en point d’orgue, l’absurde affectation des étudiants par tirage au sort. Ce volontarisme mérite respect et soutien.
Bien sûr, ce texte n’est pas parfait et mériterait améliorations, avancées et corrections. Certaines seront apportées. Je souhaite simplement que nous soyons capables d’apprécier le fait que le texte existe, qu’il va dans le bon sens et qu’il fera bouger les lignes. Mes chers collègues, gardons présent à l’esprit que parfois le mieux est l’ennemi du bien.
Oui, il faut bouger les lignes. Je salue le fait que l’on s’attaque enfin au problème de l’orientation, élément essentiel à l’avenir de notre jeunesse. L’orientation doit être abordée de manière professionnelle à partir d’analyses du marché du travail, d’analyses prospectives sur l’évolution des métiers, de présentations sur la valorisation des différentes qualités nécessaires à la bonne réussite d’un parcours professionnel évolutif dans le temps.
Il faut bouger les lignes, car cela obligera également les établissements d’enseignement supérieur à construire leur attractivité en portant leurs résultats à la connaissance du public : réussite académique, réussite en matière d’employabilité des étudiants, mise en place d’un suivi des anciens étudiants, contrôle accru de la présence des étudiants aux différents examens, suppression de la recevabilité des copies blanches comme élément attestant que le cursus a été suivi. Je souhaite personnellement que, à l’avenir, la part du budget alloué aux universités tienne davantage compte de ces critères de performance.
Analyser la potentialité des étudiants, sans remettre en cause leur droit à évoluer, leur donner une véritable connaissance des potentialités des établissements d’enseignement supérieur et des potentialités d’évolution des métiers : tout cela doit concourir à une meilleure affectation des moyens publics.
Dans l’intérêt de notre jeunesse, dans l’intérêt de notre pays, nous devons faire bouger les lignes. Ce texte y contribue, je le soutiendrai. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, si le principe de l’université pour tous peut être considéré comme un mythe, selon les mots mêmes du Président de la République, l’accès à l’enseignement supérieur constitue un droit à l’exercice duquel nous refusons toute entrave.
À l’instar d’Edgar Faure en 1968, le groupe du RDSE a l’intime conviction que l’augmentation du nombre d’étudiants est salutaire pour notre société comme pour l’épanouissement individuel. Je suis ravie de voir que, cinquante ans après, il est toujours une référence pour bon nombre de nos collègues. Même si je pense que mon groupe a une certaine légitimité à le citer, je n’oublie pas qu’un grand homme n’appartient à personne.
Dans son discours prononcé au sein de la Haute Assemblée le 24 octobre de cette année-là, Edgar Faure mettait en garde ceux qu’il dénommait les « pessimistes », vivant dans une « sorte de délectation morose de l’époque des lettrés rares et précieux ». À ceux qui étaient favorables à l’instauration d’une sélection, il rétorquait que celle-ci ne réglerait pas le problème des universités et du déséquilibre de l’enseignement en France. Selon lui, la sélection éliminatoire était contraire à la société de promotion et à la démocratie. Il fallait donc « aider chacun, démocratiquement, à atteindre sa qualification propre, sa qualification optimale et même toute la culture générale qu’il est susceptible d’embrasser ».
Son analyse demeure d’une étonnante actualité, par le prisme de la culture polyvalente pour tous, du droit à une seconde chance et à l’éducation permanente. L’enseignement supérieur n’a pas pour seule vocation de fournir des emplois ; nos amendements vont en ce sens. Il est important de le rappeler, car nous sommes aujourd’hui dans l’incapacité d’établir une vision prospective exacte des métiers qui émergeront.
Les universités exercent une mission de service public qui dépasse les considérations économiques. Les étudiants ne sont pas des chiffres. Leur affectation, donc leur avenir, n’est pas un simple jeu d’algorithmes, par lequel on apparie des flux qui ne peuvent parfaitement correspondre.
Bien sûr, les problèmes posés par la plateforme APB, tout comme le taux d’échec en licence et la crise des affectations appellent une réponse rapide, mais il faut également mobiliser des leviers transversaux, inscrits depuis l’école maternelle jusqu’à l’encadrement des étudiants de premier cycle. À ce titre, les mesures du plan Étudiants vont dans le bon sens.
Affirmer que les étudiants de l’université ne subissent pas de sélection est erroné. Celle-ci est omniprésente, implicite, et commence dès le début de la scolarité, selon les origines sociales.
Après plusieurs années d’atermoiements, ce texte pose une base légale et transparente à l’affectation des candidats dans les établissements d’enseignement supérieur et une humanisation de la procédure, là où l’avenir du candidat reposait sur un traitement automatisé et un tirage au sort dans les filières en tension. La situation ne pouvait pas durer et la mise en demeure de la CNIL était justifiée. C’est la raison pour laquelle le groupe du RDSE partage l’économie générale du texte, qui contient d’autres avancées telles que la suppression du régime de sécurité sociale des étudiants ou la nouvelle contribution d’accompagnement social, sanitaire, culturel et sportif.
Il reste à déterminer si les modalités de cette affectation sont socialement justes. Y aura-t-il réellement une sélection dont on n’ose pas prononcer le nom ? Oui, pour les filières en tension, comme c’est le cas aujourd’hui, d’autant plus que les capacités d’accueil ne suivent pas le dynamisme démographique.
Tel que le texte est rédigé, le groupe du RDSE craint une aggravation de la sélection sociale avec l’arrivée des générations du baby-boom des années 2000. J’y reviendrai lors de la présentation de nos amendements. Il semble également contestable de prendre en compte le parcours extrascolaire du candidat, comme cela figure dans l’arrêté ministériel du 19 janvier 2018 autorisant la mise en œuvre de Parcoursup.
À la lecture des fameux « attendus », je m’inquiète des exigences demandées sur le modèle type des offres d’emploi : par exemple, en droit, la capacité d’ouverture sur le monde dont je vois mal qu’elle puisse être jugée avec les éléments transmis, ou, en STAPS, la nécessité d’un investissement associatif ou l’exercice de responsabilités collectives.
Aux origines de l’échec en licence, on trouve surtout un manque de moyens flagrant pour les filières non sélectives par rapport aux filières sélectives. Le système français de l’enseignement supérieur doit être corrigé dans ce qu’il a de plus inégalitaire, car on accorde toujours plus de moyens à ceux qui en ont le moins besoin.
Le projet de loi trouve ici ses limites, avec le risque d’accroître le taux de sélectivité dans les filières en tension, qui sont de plus en plus nombreuses. Je vois mal comment les capacités d’accueil suivront la demande : le milliard d’euros annoncé sur le quinquennat est très en deçà des besoins estimés lors de l’élaboration de la stratégie nationale de l’enseignement supérieur, la STRANES, soit 10 milliards d’euros sur dix ans. Si ce montant peut paraître élevé, il n’est en aucun cas absurde, car il s’agit d’un investissement d’avenir pour ouvrir à notre jeunesse l’accès au savoir et lui permettre de s’adapter aux évolutions complexes de notre société.
Le groupe du RDSE, s’il salue les avancées de ce texte, souhaite que nos débats en renforcent le caractère socialement équitable. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Carle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Claude Carle. Madame la ministre, le texte que vous nous présentez vise à mettre fin au système APB mis en place par le gouvernement précédent, système qui aurait eu sa place à la Française des jeux, mais reste indigne de l’éducation nationale. S’en remettre au tirage au sort pour déterminer l’avenir d’un jeune démontre à l’évidence l’impuissance d’un gouvernement à faire face au problème de l’orientation, qui constitue depuis des décennies l’échec majeur de notre système éducatif.
Certes, les causes sont multiples et complexes, mais la principale raison est, à mon sens, la volonté de nier la triple réponse que se doit d’apporter tout système de formation : une réponse sociale, une réponse économique, une réponse territoriale.
La réponse est d’abord sociale. Oui, il faut répondre au souhait et au projet du jeune. C’est une évidence. Reste que, dans le même temps, il faut avoir le courage de lui dire les difficultés qu’il peut rencontrer en termes de débouchés.
M. Charles Revet. C’est important !
M. Jean-Claude Carle. Bien sûr qu’il faut se garder d’une réponse trop « adéquationniste » en termes d’offre et de besoin. Les métiers évoluent, mais force est de constater que nous ne prenons pas suffisamment en compte la réponse en termes de besoin.
Certains considèrent d’ailleurs que ce n’est pas le rôle de l’éducation. J’en veux pour preuve l’article 2 bis, ajouté par le groupe La France insoumise de l’Assemblée nationale et supprimé à bon escient par notre rapporteur, qui insérait dans le code de l’éducation un alinéa précisant que le premier cycle universitaire devra « contribuer à l’émancipation sociale et culturelle des étudiants afin qu’ils soient en mesure de développer un libre arbitre et une pensée critique leur permettant d’exercer leur citoyenneté de façon éclairée ». Mes chers collègues, comment ne pas partager une aussi noble ambition ? Reste que je suis sceptique quant à la possibilité pour un jeune de développer son libre arbitre lorsque, pour un sur quatre, la première porte qu’il poussera sera non pas celle d’une entreprise ou d’une administration, mais celle de Pôle emploi.
Comment exercer son libre arbitre, lorsque seulement 27 % des étudiants obtiennent une licence en trois ans, lorsque 61 % abandonnent les études dans lesquelles ils s’étaient engagés ou se réorientent vers d’autres formations ? Leur pensée critique, c’est à nous qu’ils l’adressent, pour ne pas les avoir éclairés sur ces risques et nous être réfugiés derrière ce discours : le diplôme protège.
Et tout cela, à quel prix ? Au prix d’un formidable gâchis humain et financier, de jeunes déçus et de parents frustrés, dont la plupart appartiennent aux classes sociales les plus modestes. Mieux vaut alors des parcours plus itératifs, notamment pour les jeunes titulaires d’un bac technologique ou professionnel, qui leur donnent l’assurance qu’ils pourront, s’ils le souhaitent, poursuivre leurs études, voire se réorienter. Le compte épargne formation constitue un très bon outil.
Je me réjouis donc des propositions du rapporteur, Jacques Grosperrin, qui visent à ce que les capacités d’accueil dans les formations du premier cycle prennent en compte les taux de réussite et d’insertion professionnelle, afin d’offrir aux étudiants des formations disposant de réels débouchés.
Toutefois, les débouchés ne sont pas uniformes sur l’ensemble de notre territoire et les besoins ne sont pas les mêmes d’une région à l’autre. Or les régions sont des espaces pertinents en matière de cohérence et de stratégie des politiques économiques et de formation. Aussi, il me paraît souhaitable, dans un souci de plus grande efficacité du dispositif, que les acteurs régionaux soient étroitement associés à l’orientation et à la réussite des étudiants. J’y reviendrai lors de la discussion d’un amendement que j’ai déposé en ce sens, afin d’apporter une réponse territoriale.
Madame la ministre, votre proposition constitue à l’évidence une meilleure réponse que les dispositions actuelles. Elle prend, de façon encore timide, la dimension des besoins, indispensable si l’on veut donner à nos jeunes des perspectives plus réalistes en termes d’insertion professionnelle. C’est important pour chacun d’entre eux, pour leur famille, mais aussi pour garantir la cohésion sociale de la Nation, qui ne pourra longtemps encore accepter que 25 % d’une classe d’âge soit au chômage, contre 7 % en Allemagne.
Permettez-moi, avant de conclure, de saluer le travail de Jacques Grosperrin, rapporteur de ce texte, notamment son souci de simplifier ce dispositif, en certains points trop complexe, de mieux prendre en compte l’autonomie des établissements, de tenir compte des taux de réussite et d’insertion professionnelle.
Madame la ministre, ce projet de loi doit être non pas un aboutissement, mais le point de départ pour une orientation réussie des jeunes.
Aujourd’hui, dans notre pays, le déterminisme social est total, la réussite est largement réservée à ceux qui « savent » et à ceux qui « ont ». Dois-je rappeler qu’un fils d’ouvrier a dix-sept fois moins de chances de préparer une grande école qu’un fils d’enseignant ou de cadre supérieur et, dans le même temps, quatre fois plus de risque d’échec ?
C’est bien là la plus terrible, la plus inacceptable des sélections, la sélection, mot tabou que certains refusent même de prononcer, souvent par éthique, et c’est tout à fait respectable, mais aussi parce qu’ils confondent égalitarisme et égalité.
M. Charles Revet. Eh oui !
M. Jean-Claude Carle. Pourtant, chacun sait que l’avenir scolaire d’un enfant est déjà largement engagé lorsqu’il fête son septième anniversaire.
N’attendons donc pas le baccalauréat pour aborder l’orientation et la réussite des étudiants. Ce ne serait qu’un palliatif. L’orientation, au sens premier et noble du terme, commence dès le plus jeune âge.
L’honneur de l’éducation nationale et de notre République n’est pas de nier cette réalité en faisant la politique de l’autruche, mais de tout mettre en œuvre pour corriger ces maux.
Hervé Bazin a écrit : « Pour que la démocratie soit, nous devons vivre ce paradoxe : tous égaux, tous non pareils. » Une orientation réussie passe par le respect de ce paradoxe, en donnant plus à ceux qui en ont le plus besoin et pas seulement à ceux qui « savent » ou à ceux qui « ont », comme c’est trop souvent le cas aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
Mme Colette Mélot. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur l’importance de ce texte et son objectif de refonte de notre système d’enseignement supérieur, le président de notre groupe, Claude Malhuret, l’a largement exposé avant moi.
À l’heure de la globalisation des savoirs et d’une concurrence accrue entre les grandes universités françaises et étrangères, il importe de guider nos lycéens vers le bon établissement supérieur : celui où ils s’épanouiront, celui où ils perfectionneront leurs savoirs et celui, surtout, où ils pourront apprendre leur métier et s’engager, dès leurs études, dans la bonne voie professionnelle.
En commission de la culture, nous avons d’ailleurs souhaité mettre l’accent sur cette question des débouchés professionnels. C’est la raison pour laquelle nous avons, sur avis du rapporteur, conditionné l’ouverture de places supplémentaires dans une formation à deux critères : un fort taux de réussite de cette formation et une insertion professionnelle reconnue. Cette mesure de bon sens devait être inscrite dans la loi et nous avons donc adopté une position relativement unanime sur cette question.
Néanmoins, d’autres interrogations demeurent.
La question des algorithmes utilisés pour évaluer les dossiers des lycéens semble mériter que l’on s’y attarde, compte tenu de son importance pour l’avenir des jeunes. Sur la nouvelle plateforme Parcoursup, le logiciel permet en effet de hiérarchiser les élèves selon un système de points agrégeant les notes, la motivation et d’autres compétences non précisées. Notre groupe présentera une série d’amendements visant, dans le cas où il faudra départager deux élèves de niveau égal, à faire primer l’engagement bénévole au sein d’une association de vie citoyenne ou encore d’une instance de vie lycéenne.
De manière plus générale, la commission de la culture a demandé au Gouvernement la remise d’un rapport sur la mise en place de Parcoursup. Toute temporaire que soit cette plateforme, nous devons tirer les leçons de ses réussites et de ses échecs.
Quant au sujet du numérique, sur lequel nos collègues de l’Assemblée nationale sont déjà intervenus en demandant la publication du code source de cette nouvelle plateforme, il convient de saisir l’opportunité de ce projet de loi pour résoudre quelques situations pour le moins étranges, comme l’impossibilité pour un étudiant en formation à distance d’effectuer un stage. Alors que le Gouvernement promeut l’e-éducation, cette mesure nous paraît essentielle et fera, je l’espère, l’objet d’une large approbation dans cet hémicycle.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe Les Indépendants – République et Territoires salue l’initiative de ce texte de loi, essentiel pour refonder notre système d’enseignement supérieur. Il soumettra à votre examen une vingtaine d’amendements pour le parfaire, assurer une représentation équilibrée de tous les acteurs afin que l’enseignement supérieur de demain puisse s’adapter aux grandes transformations du XXIe siècle.
M. Charles Revet. Il y a du travail à faire !
Mme Colette Mélot. N’oublions pas que, d’après une étude parue voilà un an, 85 % des emplois à l’horizon de 2030 n’existent pas aujourd’hui. Des mutations s’imposent donc à nous si nous voulons donner à notre pays les moyens de rivaliser sur la scène internationale. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, très honnêtement, je ne sais pas s’il faut nous féliciter de l’examen de ce texte, ici, aujourd’hui, et je veux commencer en relayant une forme de frustration collective.
Le calendrier choisi par le Gouvernement néglige incontestablement la représentation nationale et nous prive ainsi d’un véritable débat démocratique et éclairé sur l’importante question de la formation et de l’orientation de nos jeunes.
La plateforme Parcoursup est lancée, les universités se préparent d’ores et déjà à la mise en place des parcours de formation personnalisés et certaines ont même déjà publié leurs attendus. Ce projet de loi est donc déjà, en grande partie, mis en application, avant toute consultation de notre assemblée.
Je vais vous faire une confidence, madame la ministre. J’ai croisé dans un colloque un député de la majorité présidentielle, qui a balayé d’un revers de main toute modification de ce texte, ici, au Sénat. Face à cette forme d’arrogance, j’ose croire néanmoins que certains amendements qui seront proposés tout à l’heure pourront obtenir un avis favorable du Gouvernement.
Bien sûr, nous gardons à l’esprit que le point de départ de la réforme est la crise du tirage au sort, dont le recours lors de la campagne d’affectation l’année précédente a été particulièrement injuste, contraire aux valeurs de la République, et par-dessus tout illégal.
C’est une certitude, il fallait trouver une solution pour éviter que cela ne se reproduise de nouveau cette année, et tout le monde, ici, est d’accord sur ce point.
Cependant, je regrette que ce texte ne soit pas présenté pour ce qu’il est en réalité, c’est-à-dire une solution d’urgence, un pansement pour arrêter l’hémorragie et permettre aux quelque 850 000 futurs bacheliers de cette année d’être affectés, sans tirage au sort, dans les formations du premier cycle de l’enseignement supérieur.
Il s’agit, en définitive, de pallier l’absence totale d’anticipation du gouvernement précédent sur les augmentations d’effectifs. J’ai la faiblesse de croire qu’il faut moins de dix-huit ans pour construire une politique publique. Or, vous le savez, c’est le temps que met un nouveau-né pour arriver au niveau bac.
Cette précipitation nous contraint par ailleurs à prendre, me semble-t-il, le problème à l’envers, en travaillant sur l’affectation des lycéens et leur accès à l’enseignement supérieur avant de plancher sur la réforme du baccalauréat, en cours de préparation et sur laquelle nous aurons, je l’espère, l’occasion de débattre dans cette assemblée.
De manière tout à fait paradoxale, nous voulons établir un continuum bac-3/bac+3, en introduisant une vraie cohérence dans le parcours des jeunes et dans leur processus d’orientation, mais nous manquons nous-mêmes de cohérence dans la mise en place des dispositifs légaux et réglementaires.
Ainsi, comme un certain nombre de mes collègues l’ont dit précédemment, je crains que nous ne nous apprêtions à voter des dispositions qui devront de nouveau être modifiées avant 2021, première année d’obtention du bac réformé.
Sur le fond, la réforme aborde timidement la sélection implicite permise dans les formations dites en tension, où le nombre de candidatures excède la capacité d’accueil. Mais elle aurait pu nous permettre d’en finir avec le sacro-saint droit à l’université pour tous. Sur ce point, le projet de loi manque d’ambition et de responsabilité.
Je ne le nie pas, il y a des parcours scolaires atypiques, il faut laisser la place au droit à l’erreur d’aiguillage, au travers des passerelles mises en place, mais arrêtons de nier l’évidence des inscriptions fantaisistes dans certains cursus de nos universités. Vous avez fait un premier pas en mettant en place les attendus. Le vrai courage politique aurait été d’établir des prérequis.
En l’état, le texte ne corrige pas l’inadéquation entre l’offre de formation et les demandes, ne prépare pas les étudiants aux métiers d’avenir et ne renforce pas non plus l’autonomie des universités.
En ce qui concerne l’orientation, la mise en place de deux semaines dédiées et la nomination de deux professeurs principaux en classe de terminale représentent un premier pas intéressant, mais qui ne sera pas suffisant. Plus de 13 000 offres seront recensées dans Parcoursup. Pour digérer ce flot d’informations, il n’est pas raisonnable de préparer les élèves uniquement dans le cadre de leur dernière année de lycée. Cela doit intervenir bien plus tôt, dès la seconde probablement. De la même manière, on ne peut attendre des professeurs un accompagnement efficient s’ils ne sont pas formés aux problématiques de l’orientation. Cette question reste en suspens.
Une autre mesure ne me paraît pas satisfaisante et ne va pas, à mon sens, dans l’intérêt des lycéens : la non-hiérarchisation des vœux, et j’aurai l’occasion d’y revenir au travers d’un amendement d’appel.
Madame la ministre, vous comprendrez que, de notre point de vue, ce projet de loi n’est pas à la hauteur des enjeux, mais nous serons extrêmement vigilants et attentifs à la considération qui sera portée à nos propositions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le rapporteur applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, c’est la seconde fois que j’ai le plaisir de monter à cette tribune après qu’une proposition de loi que j’ai déposée et qui a été votée au Sénat se trouve concrétisée dans un projet de loi.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Tout à fait !
Mme Catherine Procaccia. Après le contrôle des comptes des comités d’entreprise, aujourd’hui, c’est la mise en place d’un système simple d’accès aux soins pour les étudiants qui va mettre fin aux incohérences et au système kafkaïen ayant prévalu jusqu’à présent.
J’avoue qu’il y a trois ans, en novembre 2014, j’avais seulement l’espoir que le Gouvernement impose des mesures pour que le régime social étudiant fonctionne un peu mieux. J’avais, hélas ! pu mesurer l’efficacité du lobbying de la LMDE et des mutuelles régionales pour enterrer mon projet, efficacité telle que les ministres répondaient à mes questions en utilisant mot pour mot les argumentaires que les mutuelles nous envoyaient pour défendre leur existence.
M. François Bonhomme. On n’ose le croire !
Mme Catherine Procaccia. Si seulement elles s’étaient autant impliquées pour apporter des réponses aux étudiants dont le dossier était perdu, qui avaient besoin d’un appareillage ou qui n’avaient pas reçu après quatre mois leur carte vitale !
La sécurité sociale étudiante est une vieille dame de soixante-dix ans, qui n’a pas su s’adapter à la massification du nombre d’étudiants et qui, coûte que coûte, n’a cherché qu’à survivre. Depuis des décennies, étudiants, parents, parlementaires, associations de consommateurs, Cour des comptes dénonçaient la mauvaise qualité du service rendu. La transformation de la MNEF en LMDE, l’ouverture à la concurrence avec la création des mutuelles régionales ont été inefficaces. Les cadres d’un des partis dominant la politique en France ont su se montrer très reconnaissants envers la LMDE de les avoir formés et financés.
Pourtant, le rapport que mon ex-collègue socialiste Ronan Kerdraon et moi-même avions rendu à la demande de la commission des affaires sociales et qui avait eu un important écho médiatique, s’il analysait les dysfonctionnements, proposait surtout des améliorations qui auraient pu sauver le système.
Faute d’une quelconque avancée, j’ai donc déposé une proposition de loi pour mettre fin à ce système d’assurance si spécifique qu’il n’existe nulle part ailleurs en Europe, qui ne s’appliquait qu’aux étudiants et non aux autres jeunes ; comme si leurs besoins étaient si différents de ceux des apprentis, des étudiants salariés ou des jeunes déscolarisés ! Je n’ai jamais eu qu’un seul but : permettre aux étudiants d’être enfin correctement couverts.
Il a tout de même fallu l’intervention de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et le refus par la Mutuelle générale de l’éducation nationale d’un nouvel adossement de la LMDE pour que la gestion de cette dernière soit assurée par l’assurance maladie, qui, en 2014, m’avait assuré qu’elle était bien prête à le faire.
Frédérique Gerbaud a été très claire et je la remercie de son intervention. Je ne reviendrai pas sur ses propos et me permettrai de rappeler une seule des aberrations constatées : la couverture maladie des étudiants débutait au 1er octobre, alors que l’année universitaire commençait, elle, en septembre. Il a fallu se battre pendant des années – n’est-ce pas, madame la ministre ? –, et ce n’est que depuis peu que les deux périodes coïncident. (Mme la ministre opine.)
En revanche, je demeure convaincue de l’inefficacité des actions de prévention menées par les mutuelles. Si la lutte contre le binge drinking, l’alcoolisme et les autres addictions était efficace, cela se saurait : ces méthodes auraient été généralisées à tous les jeunes ; or tel n’est pas le cas. Il faut bien que les mutuelles demeurent de simples façades, qu’elles reçoivent encore des subventions pour que nous puissions faire avancer le dossier et pour que les étudiants puissent, enfin, être bien assurés.
Je vous avais écrit, madame la ministre, pour vous indiquer que vous pouviez compter sur mon soutien pour cette réforme et je vous remercie de m’avoir citée. Je me réjouis que les étudiants soient correctement pris en charge, sans tous ces allers et retours inter-régimes, sources de complexité. Je ne regrette qu’une chose : la gratuité. La santé a un prix, et ne pas l’expliquer aux jeunes en leur faisant payer une cotisation, même faible, c’est mal les préparer au choc de leur future feuille de paie ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme la présidente de la commission de la culture applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Madame la présidente, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie beaucoup de ces échanges et de ces premières réactions, qui vont me permettre, en quelques mots, de replacer en perspective un certain nombre de messages portés par ce projet politique.
Vous avez longuement abordé la question, essentielle, de l’orientation, qui, à l’évidence, ne démarre pas uniquement à l’année de terminale. C’est bien dans cet esprit que Jean-Michel Blanquer et moi-même comptons la construire depuis la troisième, de manière à faire de ce que l’on appelle depuis des années le « bac-3/bac+3 » une réalité et non plus seulement une façon de parler. Il faut, bien sûr, que l’orientation puisse se poursuivre après l’entrée dans l’enseignement supérieur.
C’est pourquoi, effectivement, nous avons opté pour un droit d’inscription à l’unité d’enseignement, avec une capitalisation possible, ce qui permet d’assurer une modularité bien plus grande, d’inclure les périodes de stages, donc de garantir une meilleure professionnalisation.
Cette professionnalisation, comprenons-le bien, va jusqu’à bac+8. Être enseignant-chercheur, c’est aussi un métier. Dans la mesure où les différents niveaux forment en la matière une pyramide extrêmement pointue, nous avons à nous occuper à la fois d’une insertion professionnelle précoce, pour ceux qui le souhaitent, au bout de trois ans ; d’une insertion professionnelle médiane, pour les niveaux ingénieur et master ; et d’une insertion professionnelle académique, pour le niveau bac+8, ou, d’ailleurs, dirais-je, d’une insertion professionnelle au sein du monde socio-économique, celui de l’entreprise, puisque nous souhaitons que le doctorat y soit beaucoup mieux reconnu.
C’est donc bien de toutes ces formes d’insertion professionnelle qu’il nous faut parler. En fonction de celle qui sera visée en première intention, il convient de proposer des chemins différents. D’où l’idée de cette modularité et de ces unités d’enseignement auxquelles il sera possible de s’inscrire en fonction de ce que l’on souhaite.
Nous entendons faire en sorte que les chemins ne s’interrompent pas de manière définitive à la sortie de l’enseignement supérieur. Je suis en train de travailler avec Muriel Pénicaud, notamment, pour permettre, après l’obtention d’un premier diplôme suivie d’une expérience dans la vie active, de revenir acquérir des compétences et des connaissances nouvelles. L’accès à l’enseignement supérieur doit pouvoir être facilité tout au long de la vie et ne pas rester, comme aujourd’hui, d’une grande complexité pour ceux qui souhaitent reprendre des études ou obtenir des compétences et des qualifications complémentaires.
C’est pourquoi il importe vraiment d’appréhender l’insertion professionnelle dans toutes ses dimensions. J’ai entendu tout à l’heure parler d’« adéquationnisme ». Voilà une voie qu’il nous faut éviter d’emprunter, car ce serait une véritable erreur de ne tabler que sur les métiers déjà connus, déjà existants, quand on sait qu’il va y en avoir de nouveaux. (Mme Françoise Laborde acquiesce.)
Néanmoins, mesdames, messieurs les sénateurs, il s’agit d’un véritable sujet, qui ne relève probablement pas de la loi, mais dont j’aurai plaisir à parler avec vous. Les acteurs du monde socio-économique nous le disent, ils ont besoin de recruter des bac+2, des bac+3, mais ils n’en trouvent plus. Il y a une raison à cela : les BTS et les DUT obtenus dans les IUT mènent de plus en plus à des poursuites d’études jusqu’à bac+5. Au lieu d’accueillir principalement les publics pour lesquels ils ont été initialement pensés, d’où des formations beaucoup plus axées sur le concret, la pratique, le lien et la prise directe avec le monde professionnel, avec un encadrement resserré, car destiné à des étudiants ayant besoin d’être mieux accompagnés, les BTS et les DUT accueillent désormais des bacheliers généraux, souvent avec mention. Le système a donc été complètement dévoyé. (M. Robert del Picchia approuve.)
Il est donc très important de retravailler la question, y compris au niveau des programmes. Ces derniers, en effet, notamment en DUT, dont 85 % des titulaires continuent leurs études – cela pose d’ailleurs un autre problème –, doivent être accessibles. Or ils ont été élaborés avec l’idée, finalement, de faire des DUT des sortes de classes préparatoires parallèles.
Si j’insiste sur la nécessité d’appréhender le dispositif dans toute sa complétude, dirais-je, c’est que nous avons aussi besoin d’ingénieurs. Il ne s’agit donc pas de « tarir » la population de jeunes susceptible d’aller jusqu’à bac+5. C’est dire l’importance de la modularité et des passerelles envisagées. Quelle que soit la façon dont un jeune est entré dans l’enseignement supérieur, il doit pouvoir être réorienté, au sein des différents établissements, vers le cursus qui va le mieux lui convenir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne reviendrai que brièvement sur la question des places et des moyens.
Certes, il est toujours possible d’en vouloir davantage, et j’entends cette demande. Je rappellerai tout de même que nous allons avoir 28 000 bacheliers supplémentaires en 2018 par rapport à 2017. Nous avons débloqué des moyens pour ouvrir, dans les BTS, les DUT et les filières en tension, 22 000 places. Sachant que 80 % des bacheliers continuent leurs études dans l’enseignement supérieur, un rapide calcul permet de vous rendre compte qu’avec ces 22 000 places nous sommes globalement en phase avec la réalité. Non seulement nous sommes d’ores et déjà en train de travailler avec l’ensemble des établissements pour savoir où ouvrir ces places et comment, mais nous avons aussi conservé, si je puis dire, une réserve de secours pour qu’il soit possible, si, par hasard, les vœux de cette année ne sont pas ceux de l’an dernier, de réorienter correctement les étudiants concernés.
L’année dernière, les bacheliers qui se sont retrouvés sur le carreau étaient des bacheliers professionnels et technologiques. Pourtant, il restait plus de 3 500 places dans les BTS. Autrement dit, il convient de travailler de manière beaucoup plus fine, pour avoir, bien plus tôt, une visibilité sur les places réellement disponibles. Je ne vous parle pas des places libres, dans les BTS comme dans les IUT, à la rentrée de janvier. Nous devons aussi réfléchir à la possibilité de rentrées décalées, à l’issue de semestres d’orientation, pour que les étudiants retrouvent des places qui leur conviennent.
L’organisation du premier cycle sera profondément repensée. Si je fais le tour de l’ensemble des universités et que je vais voir tous ceux qui étaient encore mes collègues il y a peu, c’est parce que je sais pertinemment que, partout, des dispositifs sont déjà mis en place pour accompagner, en termes de méthodologie, la réussite des étudiants.
Le problème, c’est que nous devons changer d’échelle. Là aussi se pose la question des moyens. Non seulement je vais à la rencontre des présidents d’université, mais je fais en sorte qu’ils puissent partager leurs expériences, parce que ce n’est pas non plus la peine de réinventer, chacun de son côté, un système, qui, par ailleurs, a fait ses preuves et est évalué depuis plusieurs années pour accompagner la réussite des étudiants, notamment celle des bacheliers professionnels et technologiques désireux d’intégrer un cycle licence. Certaines régions, d’ailleurs, apportent à ces derniers une aide substantielle pour ce faire, car elles souhaitent mettre à profit ces nouvelles compétences pour répondre justement au besoin du monde socio-économique de recruter des techniciens spécialisés, c’est-à-dire des bac+2, des bac+3.
Il ne reste que six académies à n’être pas entrées cette année dans le processus permettant aux bacheliers professionnels d’être prioritaires dans l’accueil en BTS au lycée. Nous allons procéder à une première évaluation de ce processus, ce qui aboutira sans doute à le faire progresser.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’évoquerai maintenant la prévention et la santé des étudiants.
C’est un sujet effectivement très particulier : ces derniers étant nombreux à estimer qu’il ne va jamais rien leur arriver, ils en viennent à négliger un certain nombre de données de fond, si je puis dire. Nous voyons ainsi remonter à la surface la problématique des maladies sexuellement transmissibles et une très faible prise en charge des problèmes dentaires ou de vue. Beaucoup d’entre eux abîment leur capital santé alors qu’ils sont jeunes.
Sur ce sujet, qui doit effectivement être pris en main par des professionnels de santé, nous allons soutenir l’ouverture de centres de soins et de santé, dans lesquels ceux-ci pourront venir à la rencontre des étudiants, une après-midi par semaine, avec un système de prise en charge complète par le régime général de sécurité sociale. Il ne sera donc pas nécessaire de faire l’avance des frais.
Un certain nombre de villes, dont une que je connais extrêmement bien, ont justement travaillé avec leur université pour être capable de porter de tels projets, au bénéfice de l’ensemble des étudiants, pas seulement ceux des universités, même si, évidemment, le centre de santé est mis en place au sein de l’université, en liaison avec le CHU.
L’importance de l’accompagnement par les pairs est essentielle. Bien que leur rôle ne soit pas d’être prescriptifs, ceux-ci peuvent nous aider pour savoir par quel chemin, par quel moyen d’information et de communication atteindre véritablement les étudiants.
Puisque Condorcet a été cité, je terminerai par lui. Je connais parfaitement l’ambition qu’il a énoncée : elle a été rappelée, c’est l’égalité des faits, c’est ce que j’avais moi-même la faiblesse d’appeler l’équité. Il s’agit de faire en sorte non pas simplement que les jeunes aient une carte d’étudiant, ce qui n’est pas très compliqué, mais aussi qu’ils entrent dans l’enseignement supérieur pour y obtenir des diplômes, des compétences, des connaissances, qu’ils puissent s’insérer professionnellement, quel que soit le niveau auquel ils aspirent, quel que soit le moment de leur vie. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La discussion générale est close.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Madame la présidente, je sollicite une courte suspension de séance, le temps de permettre à la commission d’examiner les amendements déposés par le Gouvernement.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures quinze.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants
Article 1er
I. – L’article L. 612-3 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° Les trois premiers alinéas sont remplacés par des I à VII ter ainsi rédigés :
« I. – Le premier cycle est ouvert à tous les titulaires du baccalauréat et à ceux qui ont obtenu l’équivalence ou la dispense de ce grade en justifiant d’une qualification ou d’une expérience jugées suffisantes conformément au premier alinéa de l’article L. 613-5. Afin de favoriser la réussite de tous les étudiants, des dispositifs d’accompagnement pédagogique et des parcours de formation personnalisés tenant compte de la diversité et des spécificités des publics étudiants accueillis sont mis en place au cours du premier cycle par les établissements dispensant une formation d’enseignement supérieur.
« L’inscription dans une formation du premier cycle dispensée par un établissement public est précédée d’une procédure nationale de préinscription qui permet aux candidats de bénéficier d’un dispositif d’information et d’orientation qui, dans le prolongement de celui proposé au cours de la scolarité du second degré, est mis en place par les établissements d’enseignement supérieur. Au cours de cette procédure, les caractéristiques de chaque formation sont portées à la connaissance des candidats ; elles font l’objet d’un cadrage national fixé par arrêté du ministre chargé de l’enseignement supérieur. L’inscription est prononcée par le président ou le directeur de l’établissement ou, dans le cas prévu au VII du présent article, par l’autorité académique.
« L’inscription peut, compte tenu, d’une part, des caractéristiques de la formation et, d’autre part, de l’appréciation portée sur les acquis de la formation antérieure du candidat ainsi que sur ses compétences, être subordonnée à l’acceptation, par ce dernier, du bénéfice des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé proposés par l’établissement pour favoriser sa réussite.
« Le silence gardé par un établissement sur une candidature présentée dans le cadre de la procédure nationale de préinscription prévue au deuxième alinéa du présent I ne fait naître aucune décision implicite avant le terme de cette procédure.
« I bis. – La communication, en application des dispositions du code des relations entre le public et l’administration, du code source des traitements automatisés utilisés pour le fonctionnement de la plateforme mise en place dans le cadre de la procédure nationale de préinscription prévue au I s’accompagne de la communication du cahier des charges présenté de manière synthétique et de l’algorithme du traitement.
« II. – Les capacités d’accueil des formations du premier cycle de l’enseignement supérieur des établissements relevant des ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur sont arrêtées chaque année par l’autorité académique après dialogue avec chaque établissement. La modification des capacités d’accueil prend en compte les taux de réussite et d’insertion professionnelle observés pour chacune des formations.
« III. – Pour l’accès aux formations autres que celles prévues au V, lorsque le nombre de candidatures excède les capacités d’accueil d’une formation, les inscriptions sont prononcées par le président ou le directeur de l’établissement dans la limite des capacités d’accueil, au regard de la cohérence entre, d’une part, le projet de formation du candidat, les acquis de sa formation antérieure et ses compétences et, d’autre part, les caractéristiques de la formation.
« IV. – Pour l’accès aux formations autres que celles mentionnées au V, lorsque le nombre de candidatures excède les capacités d’accueil d’une formation, l’autorité académique fixe un pourcentage minimal de bacheliers retenus bénéficiaires d’une bourse nationale de lycée, en fonction du rapport entre le nombre de ces bacheliers boursiers candidats à l’accès à cette formation et le nombre total de demandes d’inscription dans cette formation enregistrées dans le cadre de la procédure de préinscription prévue au deuxième alinéa du I.
« Pour l’accès à ces mêmes formations et compte tenu du nombre de candidats à ces formations résidant dans l’académie, l’autorité académique fixe également, afin de faciliter l’accès des bacheliers qui le souhaitent aux formations d’enseignement supérieur situées dans l’académie où ils résident, un pourcentage maximal de bacheliers retenus résidant dans une académie autre que celle dans laquelle est situé l’établissement. Pour l’application du présent alinéa, les candidats ressortissants français ou ressortissants d’un État membre de l’Union européenne qui sont établis hors de France, les candidats préparant ou ayant obtenu le baccalauréat français dans un centre d’examen à l’étranger et les candidats qui souhaitent accéder à une formation ou à une première année commune aux études de santé qui n’est pas dispensée dans leur académie de résidence sont assimilés à des candidats résidant dans l’académie où se situe la formation à laquelle ils présentent leur candidature.
« Les pourcentages prévus aux premier et deuxième alinéas du présent IV sont fixés en concertation avec les présidents d’université concernés. Seule l’obligation de respecter le pourcentage minimal de bacheliers boursiers retenus peut conduire à déroger au pourcentage maximal de bacheliers retenus résidant dans une autre académie.
« Pour les formations dont le bassin de recrutement diffère de l’académie, le ministre chargé de l’enseignement supérieur détermine par arrêté la zone géographique de résidence des candidats prise en compte en lieu et place de l’académie pour la mise en œuvre des dispositions du deuxième alinéa du présent IV.
« V. – Une sélection peut être opérée, selon des modalités fixées par le ministre chargé de l’enseignement supérieur, pour l’accès aux sections de techniciens supérieurs, instituts, écoles et préparations à celles-ci, grands établissements au sens du titre Ier du livre VII et tous établissements où l’admission est subordonnée à un concours national ou à un concours de recrutement de la fonction publique, ainsi que pour l’accès aux formations de l’enseignement supérieur dispensées dans les lycées, aux formations préparant au diplôme de comptabilité et de gestion ou aux diplômes d’études universitaires scientifiques et techniques et aux formations de l’enseignement supérieur conduisant à la délivrance d’un double diplôme.
« Pour l’accès aux formations mentionnées au présent V, l’autorité académique fixe un pourcentage minimal de bacheliers retenus bénéficiaires d’une bourse nationale de lycée.
« VI. – En tenant compte de la spécialité du diplôme préparé et des demandes enregistrées dans le cadre de la procédure de préinscription prévue au deuxième alinéa du I, l’autorité académique prévoit, pour l’accès aux sections de techniciens supérieurs et aux instituts universitaires de technologie, respectivement un pourcentage minimal de bacheliers professionnels retenus et un pourcentage minimal de bacheliers technologiques retenus ainsi que les modalités permettant de garantir la cohérence entre les acquis de la formation antérieure du candidat et les caractéristiques de la formation demandée. Ces pourcentages et ces modalités sont fixés en concertation avec les présidents d’université, les directeurs des instituts universitaires de technologie, les directeurs des centres de formation d’apprentis et les proviseurs des lycées ayant des sections de techniciens supérieurs, chacun pour ce qui le concerne.
« VII. – L’autorité académique propose aux candidats domiciliés dans la région académique auxquels aucune proposition d’admission n’a été faite dans le cadre de la procédure nationale de préinscription une inscription dans une formation en tenant compte, d’une part, des caractéristiques de cette dernière et, d’autre part, des acquis de leur formation antérieure et de leurs compétences. Cette proposition fait l’objet d’un dialogue préalable avec le candidat et le président ou le directeur de l’établissement concerné. Avec l’accord de ces derniers, l’autorité académique prononce son inscription dans la formation proposée.
« VII bis. – Lorsque la situation d’un candidat justifie, eu égard à des circonstances exceptionnelles tenant à son état de santé, à son handicap ou à ses charges de famille, son inscription dans un établissement situé dans une zone géographique déterminée, l’autorité académique, saisie par ce candidat, peut procéder au réexamen de sa candidature. En tenant compte de la situation particulière que l’intéressé fait valoir, des acquis de sa formation antérieure et de ses compétences ainsi que des caractéristiques des formations, l’autorité académique prononce, avec son accord et celui du président ou du directeur de l’établissement concerné, son inscription dans une formation du premier cycle.
« VII ter. – Au mois de décembre de chaque année, le ministre chargé de l’enseignement supérieur rend public un bilan détaillé par académie de la procédure nationale de préinscription dans le premier cycle de l’enseignement supérieur. » ;
2° bis Au début du quatrième alinéa, est ajoutée la mention : « VIII. – » ;
3° Le dernier alinéa est supprimé.
I bis A. – (Non modifié) Le I bis de l’article L. 612-3 du code de l’éducation entre en vigueur au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi.
I bis. – (Non modifié) Après l’article L. 612-3-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 612-3-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 612-3-2. – L’inscription dans une formation du premier cycle de l’enseignement supérieur dispensée par un établissement privé sous contrat d’association ou par un établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général ou l’inscription dans toute formation conduisant à la délivrance d’un diplôme national de l’enseignement supérieur ou d’un titre ou diplôme de l’enseignement supérieur délivré au nom de l’État dans les conditions prévues à l’article L. 335-6 est précédée de la procédure nationale de préinscription prévue au deuxième alinéa du I de l’article L. 612-3. L’établissement définit, dans le respect du cadrage national arrêté par le ministre chargé de l’enseignement supérieur, les caractéristiques de chaque formation, qui sont portées à la connaissance des candidats au cours de cette procédure.
« Lorsqu’un contrat conclu entre l’État et un établissement d’enseignement privé dispensant des formations initiales d’enseignement supérieur prévoit l’application, à ces formations, de certaines des dispositions du même article L. 612-3, le chef d’établissement est associé, le cas échéant, aux dispositifs de concertation que ces dispositions prévoient. »
I ter. – Les établissements mentionnés au I de l’article L. 612-3 et à l’article L. 612-3-2 du code de l’éducation dont les formations du premier cycle de l’enseignement supérieur n’étaient pas répertoriées dans la procédure de préinscription en première année d’une formation postbaccalauréat à la date de promulgation de la présente loi inscrivent ces formations dans la procédure nationale de préinscription prévue au deuxième alinéa du I de l’article L. 612-3 du même code au plus tard le 1er janvier 2019.
II. – (Non modifié) À la première phrase de l’article L. 621-3 et du premier alinéa de l’article L. 650-1 du code de l’éducation, la référence : « troisième alinéa » est remplacée par la référence : « V ».
III. – (nouveau) Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 31 octobre 2020, un rapport présentant le bilan de l’application du présent article.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, sur l’article.
M. Pierre Ouzoulias. Je trouve que nos débats sont éclairants. Vous le voyez, madame la ministre, la Haute Assemblée mérite de l’attention : il s’y passe des choses qui font que les projets de loi deviennent plus intelligibles.
Je voudrais revenir sur le débat sémantique entre orientation et sélection, qui me semble un peu abscons.
Nous ne discutons pas ex nihilo du meilleur système d’affectation. Le système d’orientation des étudiants que vous nous proposez est contraint. Je vous rappelle, madame la ministre, que notre groupe est le seul à ne pas avoir voté votre budget, car nous estimions qu’aucun moyen supplémentaire n’était alloué à l’enseignement supérieur en 2018. Or il faut, d’une part, remettre à niveau les établissements, qui sont dans un état catastrophique sur le plan matériel et, d’autre part, mieux accueillir les nouveaux entrants. La profession s’accorde unanimement sur la nécessité d’injecter environ 1 milliard d’euros par an, quand vous nous proposez seulement quelque 500 millions d’euros sur la durée du quinquennat. C’est largement insuffisant !
Je ne mets pas en doute votre sincérité. Je sais que vous agissez dans un domaine politiquement contraint, le Gouvernement assumant sa volonté de diminuer la dépense publique. Il vient par ailleurs d’annoncer un plan de licenciement massif de 120 000 fonctionnaires… Dans ce contexte, je ne vois pas comment vous allez réussir à trouver des moyens supplémentaires.
En commission, pour répondre à mes interrogations, vous aviez employé une formule miracle : il suffit de dégeler des postes. Mes collègues de l’université Paris I m’ont précisé que, sur les trente-cinq postes gelés, vos moyens avaient permis d’en dégeler quatre… Croyez-vous vraiment que ces quatre personnes supplémentaires vont pouvoir trier 50 000 dossiers ?
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, sur l’article.
M. Pierre Laurent. L’ambiance catastrophiste pour évoquer la situation universitaire de notre pays, en particulier le taux d’échec, sert à justifier, nous semble-t-il, une politique de restriction et un manque d’ambition en matière de formation des étudiants.
Avec un taux de diplomation autour de 80 %, la licence à la française fait plutôt figure de bon élève au sein de l’OCDE. On est donc loin des chiffres claironnés partout et qui se contredisent d’ailleurs d’une présentation à l’autre.
Comme l’avançait en son temps Edgar Faure – toutes les études postérieures l’ont confirmé –, c’est en augmentant progressivement le nombre de titulaires du certificat d’études, puis du baccalauréat et, enfin, d’un diplôme du supérieur que l’on forme les travailleuses et les travailleurs de demain. C’est encore plus vrai aujourd’hui. On parle, à poste égal, d’un rapport de productivité de 1 à 2 entre un salarié qualifié et un salarié non qualifié. Le besoin de travailleurs de plus en plus qualifiés ne cesse aujourd’hui d’augmenter, a fortiori avec la révolution numérique.
Nous le savons tous, les carrières sont de plus en plus évolutives, exigeant des capacités auxquelles le supérieur prépare, les travailleuses et travailleurs polyvalents étant les plus à même de changer de profession et d’entreprise.
Il est essentiel de rappeler que la détention d’un diplôme du supérieur est un formidable rempart contre le chômage, toujours perfectible, certes, mais bien réel. Même si le chômage des jeunes diplômés reste un problème et qu’il tend à se développer, le taux de chômage à trois ans est de 50 % pour les non-diplômés, alors qu’il n’est « que » de 13 % pour les diplômés du supérieur et de 26 % pour les diplômés du secondaire.
Quand on entend dire qu’il faut mettre un terme au « mythe du supérieur pour toutes et tous », nous comprenons qu’il faudrait en finir avec la possibilité pour toutes et tous de se construire un avenir. Nous le déplorons et restons attachés à une ambition de formation pour les étudiants du supérieur. Elle manque singulièrement dans le débat qui nous occupe aujourd’hui.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Je veux insister sur le fait que les jeunes femmes seront les premières victimes de votre réforme, madame la ministre, bien qu’elles soient plus nombreuses dans les séries générales et qu’elles réussissent mieux au baccalauréat. En effet, les attendus, dont on arrive déjà à appréhender le cadre par les premières délibérations des établissements et le document de cadrage du ministère, laissent craindre la création de tunnels du secondaire vers le supérieur. De fait, l’officialisation de ces tunnels pose la question de la perpétuation à l’échelon du supérieur de l’orientation sexuée.
Officialiser des barrières, notamment concernant les séries au baccalauréat, c’est empêcher celles et ceux qui veulent poursuivre leurs études dans une autre direction que celle ouverte par la série choisie de s’orienter vers leur projet d’études. Pour les jeunes femmes, cette orientation biaisée dans le supérieur représente un obstacle supplémentaire, dans la mesure où le choix de série, dès la fin de la troisième, est déjà genré.
Ainsi, comme le montrait Françoise Vouillot, les stéréotypes sexistes influencent les orientations, a fortiori dans l’âge de construction de soi. C’est comme cela qu’on se retrouve avec une filière littéraire composée à 81 % de lycéennes, contre à peine 45 % en filière scientifique. Sur ce point, il est d’ailleurs intéressant de noter que, dans le cas de la filière S, à note égale, un vœu de lycéen est plus souvent respecté qu’un vœu de lycéenne… On retrouve aussi cette différentiation sexuée en filières technologiques et professionnelles, où la distinction se fait entre filières de production pour les jeunes hommes et filières de services pour les jeunes femmes. On peut faire ce constat dans tous les pays, notamment occidentaux, comme le pointait un rapport de l’UNESCO…
De fait, en créant des barrières à l’entrée en L1 en fonction des séries et enseignements, comme l’ont déjà décidé certaines universités et comme l’impliquent les attendus nationaux, vous rassurez certains élèves, certes, mais vous maintenez les jeunes femmes dans une orientation genrée. Je vous l’accorde, madame la ministre, le travail d’émancipation des jeunes femmes ne débute pas à la fin du lycée, mais il aurait été de bon ton que votre réforme n’ajoute pas une pierre à cet édifice d’orientation subie.
En autorisant certaines universités à filtrer les candidatures en licence en fonction de la série du baccalauréat obtenue et en mentionnant dans les attendus nationaux des critères orientant les jeunes en fonction de leur série, vous transférez vers l’enseignement supérieur l’orientation sexuée subie au lycée. Cela est d’autant plus regrettable que cette orientation genrée a évidemment des répercussions à long terme, dans le milieu professionnel, avec des métiers qui sont très majoritairement masculins et d’autres qui sont au contraire quasi exclusivement occupés par des femmes.
Cette non-mixité de certains métiers et certaines filières est pour le moins archaïque, source d’inégalités professionnelles et salariales. On s’éloigne encore de la volonté exprimée par le Président de la République de faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une grande cause du quinquennat. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, sur l’article.
Mme Marie-Pierre Monier. Nous sommes d’accord sur un point essentiel : nous ne pouvions continuer à accepter une admission post-bac conditionnée à un tirage au sort. Il fallait changer ce processus de décision totalement injuste. Cependant, Parcoursup ne répond ni aux exigences d’aujourd’hui ni à celles de demain, car la problématique première est le manque de moyens humains et financiers. Le besoin est estimé à 1 milliard d’euros par an pour faire face à la démographie étudiante, comme l’a rappelé Gilles Roussel, le président de la CPU.
Je souhaite aborder plus spécifiquement la question de l’orientation. Le texte reste assez flou à ce sujet, et le dispositif d’information et d’orientation dont il est question devra nécessairement faire l’objet de mesures réglementaires pour le préciser.
Pour avoir été professeur principal en collège pendant de très nombreuses années, je peux vous dire que l’orientation ne commence pas en terminale. Cette classe ne marque pas le début, mais, au contraire, la fin du processus d’orientation, entamé au moins sept ans auparavant. En terminale, le bac est déjà choisi ! Or, ne nous le cachons pas, selon le type de bac réussi, les prérequis attendus et les compétences indispensables pour affronter et réussir la période post-bac ne seront pas les mêmes.
Dès le collège, avant même l’orientation en lycée, quel qu’il soit, il faut travailler de façon régulière, accompagner l’élève dans son cheminement et sa réflexion sur son avenir, mais aussi dans sa connaissance des filières et sa découverte du monde du travail.
Il faut aussi accompagner l’élève dans sa réflexion sur l’estime de soi, l’image qu’il a de lui-même et la confiance qu’il a en lui.
Il faut arriver à casser les stéréotypes existant sur la sexualisation des métiers, comme l’a souligné Laurence Cohen.
Il faut ouvrir les jeunes bacheliers ruraux à la perspective d’études supérieures plus longues et effectuées plus loin du domicile que ce qui est généralement constaté – je vous renvoie, mes chers collègues, au rapport du CESE de janvier 2017.
Aujourd’hui, comme le révèlent de nombreux témoignages sur le processus de préinscription ouvert il y maintenant plusieurs semaines, beaucoup d’élèves arrivés en terminale ont du mal à se projeter et se retrouvent démunis pour répondre à certaines demandes, comme une lettre de motivation. La plupart n’ont jamais rédigé de telles lettres et ne savent pas toujours quoi répondre, ni sur eux ni sur leurs motivations profondes.
Oui, l’orientation s’apprend ! C’est un « processus long qui ne dépend pas seulement d’une décision à un moment T », comme le souligne Mme Bérengère Benoit, conseillère d’orientation au CIO de Rennes. J’espère que ces éléments seront pris en compte dans le cadre des mesures réglementaires qui accompagneront ce texte, afin que l’objectif d’une meilleure réussite des étudiants dès le premier cycle ne se réduise pas à une mécanique plus ou moins déguisée de sélection de l’accès au premier cycle de l’enseignement supérieur, mais passe par une orientation réussie, c’est-à-dire une orientation choisie par l’élève, qui remettrait l’élève au cœur du choix. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, sur l’article.
M. Patrice Joly. Nous voulons tous ici remédier à l’échec trop important des étudiants dans leur parcours pour accéder à la licence. Toutefois, le dispositif que vous proposez, madame la ministre, notamment pour les filières en tension, n’est pas à la hauteur des enjeux. La possibilité d’un « oui, si » ou d’un « non » introduit un tri des lycéens à travers un certain nombre de filtres. Il s’agit d’une sélection déguisée, qui renforcera les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur au détriment des bacheliers issus des classes modestes et défavorisées, notamment ceux qui sont issus des territoires ruraux.
La question centrale qui doit être posée, et qui est malheureusement insuffisamment traitée par ce texte, est celle de l’égalité des étudiants face aux études supérieures. Si l’on prend l’exemple de la Nièvre, que je connais bien, et celui de la Bourgogne-Franche-Comté, on s’aperçoit que le taux d’accès à l’enseignement supérieur reste inférieur à la moyenne nationale. Cet écart est encore plus manifeste pour les titulaires d’un bac professionnel. En effet, seul un sur deux poursuit une formation post-bac.
La région Bourgogne-Franche-Comté souffre d’un déficit réel en matière de diplômés de l’enseignement supérieur : on observe un écart négatif de plus de 5 % entre la proportion d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur au niveau national et au niveau régional, alors même que le taux de réussite au bac est supérieur à la moyenne nationale. Le principal frein à l’accès à l’enseignement supérieur auquel sont confrontés les jeunes nivernais est d’ordre économique. Le revenu moyen des ménages étant inférieur à la moyenne nationale, la poursuite d’études supérieures d’un ou de plusieurs enfants à l’extérieur de la Nièvre devient vite un poids non négligeable pour les familles, ce qui génère de l’autocensure.
Le territoire doit également faire face à un engagement insuffisant de l’État. À titre d’exemple, l’antenne universitaire de Nevers subit de plein fouet une sous-cotation de la part de l’État, ce qui participe à la désertification de nos territoires, rompant les liens possibles avec les entreprises locales. Parallèlement à cela, les collectivités locales – ville de Nevers, Nevers Agglomération et conseil départemental – contribuent fortement au maintien des sites d’enseignement supérieur, en fonctionnement et en investissement, dans un contexte de fortes contraintes budgétaires. À cela s’ajoute leur participation au financement de la recherche universitaire et au soutien de la vie étudiante et des services aux étudiants.
Il est donc important, dans nos territoires ruraux, de développer une offre de proximité permettant d’améliorer le taux d’accès aux études supérieures, en proposant à la fois une variété de cursus pour les bacheliers et des formations originales attractives en lien avec les potentiels de développement de nos territoires.
Alors que nous avons actuellement tendance à renforcer les grands pôles universitaires dans les métropoles, il est nécessaire de préserver et de renforcer les sites universitaires délocalisés dans les villes moyennes. Ces antennes permettent aux étudiants de suivre leur cursus au plus près de leur lieu de résidence.
Enfin, nous devons absolument travailler sur la question de l’orientation des étudiants et sur les relations entre les universités, les lycées et le monde des entreprises.
C’est un ensemble de mesures que nous devons adopter si nous voulons que nos jeunes soient armés à égalité, quel que soit leur lieu de résidence, pour être en mesure, dès demain, de construire leur parcours, leur vie, leur histoire. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, sur l’article.
M. Richard Yung. Mon intervention portera sur l’alinéa 12 de l’article 1er, qui concerne les jeunes Français résidant à l’étranger. Il contient une proposition très utile et très intéressante.
Sur les 450 000 élèves à l’étranger, on compte chaque année plusieurs milliers de bacheliers, souvent de bon niveau. Le problème est de savoir où ils vont aller à l’université à la fin de leur scolarité au lycée français. C’est un vrai débat politique, car nous avons financé toute cette scolarité. Ils peuvent rejoindre une université ou une école du pays où ils résident, rentrer en France ou aller dans un pays tiers – nous savons tous que nos amis canadiens, par exemple, ont une politique extrêmement active pour attirer les étudiants francophones.
Ouvrir la possibilité à ces jeunes – il peut s’agir de Français, mais aussi d’étrangers ayant accompli leur scolarité dans un lycée français ou ayant passé le bac dans un centre d’examen français – de postuler dans une université ou une école de l’académie de leur choix, c’est, me semble-t-il, un plus considérable pour les attirer vers la France. C’est une bonne politique selon moi. (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, sur l’article.
M. David Assouline. Si je prends la parole, c’est à la suite de l’intervention de M. Grosperrin, qui s’est permis de convoquer l’histoire. Il a estimé qu’on avait perdu trente ans, puisqu’on accepte seulement maintenant de réfléchir à la sélection, déjà voulue par la réforme Devaquet… Il se livre là au pire de ce qu’on peut faire en histoire, la décontextualisation et l’anachronisme !
L’enjeu, qui reste toujours d’actualité, était alors la démocratisation et la massification. Il s’agissait de permettre au plus grand nombre d’accéder à l’université et d’obtenir l’égalité des droits, face à ceux qui voulaient la remettre en question en empêchant ceux qui avaient obtenu le diplôme du baccalauréat d’avoir, par principe, le droit d’entrer à l’université.
La bataille de la massification a été gagnée. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à un autre enjeu, rappelé d’ailleurs par le Président de la République pour d’autres sujets : nous devons passer de l’égalité des droits – c’est, le plus souvent, une réalité dans notre pays – à l’égalité dans les faits. Concrètement, cela consiste à mettre en œuvre tous les moyens pour assurer la réussite du plus grand nombre. En négligeant cet aspect pendant trente ans – c’est le cas de tous les gouvernements, à des degrés divers, il faut le reconnaître –, cette sélection, qu’on a refusé d’institutionnaliser, et qu’il faut toujours et encore refuser d’institutionnaliser, est devenue une sélection sauvage.
Ceux qui peuvent s’en sortir sont toujours les mêmes, et la sélection sociale a perduré. Les enfants d’ouvriers ou d’employés qui parviennent à l’université sont déjà très minoritaires, car on les a écrémés pendant toute la scolarité. Mais la sélection continue ensuite de s’opérer pour qu’il n’en reste plus aucun à la fin…
Le débat sur les moyens ne peut pas être dissocié du débat que nous avons actuellement. (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Charles Revet. Eh oui !
M. David Assouline. Tous les gouvernements, y compris le gouvernement précédent, ont manqué d’ambition en la matière ; j’y reviendrai.
Mme la présidente. La parole est à M. Robert del Picchia, sur l’article.
M. Robert del Picchia. Je suis d’accord avec Richard Yung. Je me félicite moi aussi de l’amendement adopté par les députés, aux termes duquel les étudiants français de l’étranger sont réputés résider dans l’académie dans laquelle ils ont exprimé leur souhait d’étudier. Cela facilitera les demandes des bacheliers de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.
Cela étant, il est important d’alerter le Gouvernement sur le décrochage des bacheliers français de l’étranger diplômés d’un baccalauréat technologique ou professionnel.
La loi prévoit depuis 2013 des quotas pour garantir aux élèves ayant obtenu un bac professionnel ou technologique une place dans les filières IUT ou BTS. Ce quota est réservé à ceux qui ont obtenu les meilleures notes ou une mention au baccalauréat, les autres places étant préemptées par les étudiants issus du bac général. Les moins bons élèves des bacs technologiques ou professionnels sont ainsi redirigés vers les études générales, où ils ne sont pas encadrés et où ils échouent massivement – je ne fais que reprendre des extraits du travail remarquable de notre rapporteur. On aboutit au paradoxe suivant : ceux qui ont le moins de chances de réussir dans les filières générales s’y retrouvent inscrits par défaut. C’est un problème national, comme vous l’avez souligné, madame la ministre, mais il prend un accent particulier pour les élèves du réseau de l’AEFE. Je me dois de souligner la vulnérabilité particulière des élèves français de l’étranger, qui sont souvent installés seuls en France, sans l’appui de leur entourage familial.
En outre, s’agissant des élèves qui ont obtenu une bourse sur critère social, une mauvaise orientation est fatale à leur avenir : après deux échecs, ils perdent leurs droits. La question écrite que j’avais posée au Gouvernement pour connaître le nombre d’élèves boursiers issus de l’AEFE ayant décroché n’a pour l’instant pas reçu de réponse.
J’appelle votre attention, madame la ministre, sur l’orientation de ces jeunes Français de l’étranger qui, n’ayant pas obtenu de mention, se voient refuser l’accès aux filières qui favoriseraient au mieux leur insertion professionnelle. C’est exactement l’inverse de l’objectif de ce projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, sur l’article.
M. Guillaume Chevrollier. Abandons de poste, échecs à répétition… En France, aujourd’hui, 60 % des étudiants ne terminent pas leur première année de fac et seuls 27 % d’entre eux parviennent à obtenir leur licence en trois ans.
Cet échec de l’orientation est d’autant plus désolant que nos entreprises ont besoin de compétences, non seulement dans les métropoles, mais aussi dans les départements ruraux comme la Mayenne, où 2 000 collaborateurs sont recherchés. On recherche des jeunes qualifiés, responsables, désireux de travailler.
L’échec de cette première année de cycle est double.
C’est tout d’abord l’échec de la pratique du tirage au sort imposé par la plateforme Admission post-bac, ou APB, qui ne prenait en compte ni les parcours individuels, ni les vocations, ni les motivations des lycéens.
C’est ensuite l’échec de l’accompagnement de ces derniers, qui n’ont pas été aidés dans la définition de leur projet professionnel, pas plus qu’ils n’ont été correctement orientés vers la bonne filière ou informés des débouchés du cursus emprunté.
Voici la perspective que la France offre aujourd’hui à plus de la moitié de ses jeunes citoyens : une année d’errance et de nomadisme. À quel prix ? Un coût psychologique et humain pour l’étudiant, qui perd confiance en lui, confiance en ses talents ; un coût financier aussi, notamment pour sa famille. Le coût des échecs à l’université est estimé à 500 millions d’euros par an, selon une enquête de France Stratégie.
Bref, c’est un gâchis personnel, social et financier.
Nous partageons ce constat. Toutefois, la précipitation avec laquelle le Gouvernement soumet ce projet de loi me laisse perplexe. Pourquoi mettre en place une réforme de l’accès à la première année de l’enseignement supérieur et créer de nouveaux dispositifs comme la plateforme Parcoursup, dont les dysfonctionnements ont été relevés par M. le rapporteur, avant d’engager une réforme globale du lycée et du baccalauréat ? Pourquoi déléguer l’accompagnement et l’orientation de l’élève au système universitaire, plutôt que de l’engager dès le début du lycée ?
Cette réforme a été préparée de manière précipitée, dans l’urgence. Dans l’intérêt des étudiants et du pays, c’est une réflexion beaucoup plus globale que nous devons engager. Ce texte manque d’ambition. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. L’avantage d’examiner une loi qui s’applique déjà est que l’on a sous les yeux un certain nombre d’exemples extrêmement instructifs ; je vais en citer rapidement quelques-uns.
Auparavant, j’aimerais vous dire – je mets entre parenthèses vos pudeurs sémantiques – que votre sélection ne portera pas sur le bac, qui est un diplôme national anonyme, mais sur les résultats du lycée, qui sont essentiellement déterminés par la position sociale des lycéens. Elle portera aussi sur la capacité des parents à payer des organismes privés extérieurs pour monter les dossiers Parcoursup. Sur internet, par exemple, vous trouvez d’ores et déjà un site qui, pour 560 euros, vous propose la formule « Sérénité », dans laquelle on vous assure la rédaction de votre projet motivé, de votre CV et de votre lettre de motivation…
Quand on en arrive à de telles extrémités, madame la ministre, on sélectionne surtout les familles qui pourront débourser une telle somme. Loin de votre ambition de faire réussir les élèves, on s’attelle plutôt à la réussite d’entreprises privées qui développent des niches commerciales et financières sur le recul du service public.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Je respecte la logique du groupe communiste. Cependant, comme me le faisait remarquer le directeur d’une fac de sciences, on n’imagine pas un élève de première en bac pro entrer en terminale S. C’est un peu la même chose pour l’entrée à l’université.
Si l’on supprimait l’article 1er, on reviendrait sur la sélection – je sais que le mot vous gêne, madame la ministre, vous préférez parler d’appariement ou de discrimination, mais, de facto, une sélection se mettra en place. À titre personnel, ce terme ne me dérange pas. On maintiendrait ainsi les trois critères qui s’appliquaient auparavant : le domicile, les préférences et la situation familiale. Ce serait donc un retour au tirage au sort. Or tout le monde a dit que le tirage au sort était absurde, inique, illégitime et irrespectueux de l’avenir de nos jeunes.
Il faut savoir que 850 000 lycéens et étudiants redoublants attendent. L’adoption d’un tel amendement augmenterait leur anxiété.
Si APB constituait une fin en soi, Parcoursup est plutôt un moyen d’appariement entre les compétences et les attendus, pour pouvoir ensuite réussir des études. Ce dispositif me semble donc plus intéressant. En conséquence, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Je rappelle que les formations non sélectives à l’université ne pourront pas refuser de candidatures si elles disposent de capacités d’accueil suffisantes.
Je rappelle également que, dans le budget pour 2018, 234 millions d’euros supplémentaires ont été prévus pour les universités, en plus du maintien de 100 millions d’euros qui avaient été accordés au titre de la démographie, soit un total de 334 millions d’euros. À ces crédits viennent s’ajouter les 130 millions d’euros débloqués dans le cadre du programme d’investissements d’avenir pour les nouveaux cursus à l’université, ainsi que les 25 millions d’euros ajoutés en tiers d’année, soit 75 millions en année pleine, afin de créer des places supplémentaires.
Par ailleurs, je tiens à dire que la position sociale ne préjuge en rien l’intelligence ou la créativité des jeunes. Je m’étonne que vous ne fassiez pas cette même analyse, monsieur le sénateur.
Enfin, je ne peux évidemment que condamner les sites payants qui proposent la rédaction de projets motivés, mais je me demande aussi quelle image vous avez de vos collègues des universités pour imaginer qu’ils pourraient se laisser berner par de tels procédés.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Je ne comprends pas votre argumentaire, madame la ministre.
M. Pierre Ouzoulias. Au moins sommes-nous d’accord sur un point…
Vous nous expliquez depuis le début de ce débat que vous avez octroyé des moyens supplémentaires afin de créer les places pour accueillir tous les étudiants désireux d’entrer à l’université. Mais alors, pourquoi ce projet de loi ? Pourquoi changer la loi alors qu’elle prévoit déjà que tous les étudiants doivent accéder à l’université ? Si vous voulez changer la loi, c’est que vous avez un autre dessein. Assumez-le dès à présent s’il vous plaît, nous gagnerons du temps !
M. Pierre Ouzoulias. En principe, au Sénat, on n’interrompt pas les orateurs, madame la ministre !
Par ailleurs, comme je l’ai déjà dit, et de façon très claire, des notices sur le parcours extrascolaire seront demandées dans Parcoursup, ce qui n’était pas le cas dans APB. Pourquoi demander à un gamin de dix-sept ans de présenter un CV, si ce n’est pour valoriser les stages qu’il aura effectués à l’étranger ou l’été dans le cabinet d’avocat de ses parents ? C’est ce que nous appelons la sélection sociale ! Et tel est l’objet de votre projet de loi !
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je vais pouvoir poursuivre et étayer mon intervention de tout à l’heure…
Selon les statistiques de l’INSEE de 2014, la France compte 2,4 millions d’étudiants, contre 400 000 en 1968 – je le précise pour ceux qui commémorent cette date. Parmi ces 2,4 millions d’étudiants, il n’y a que 10 % d’enfants d’ouvriers, la grande majorité des étudiants étant des enfants de cadres, de cadres supérieurs ou de professions libérales.
Le problème est que, oui, la sélection est sauvage. Nous n’avons pas tenu notre engagement, notre promesse républicaine, faute de moyens. Certes, il y a de plus en plus d’étudiants, ce qui est bien, mais il y a également de moins en moins de suivi personnalisé. Les amphis sont de plus en plus bondés et les facultés sont en état de décrépitude. Il faudrait beaucoup d’argent, et donc de l’ambition.
Dans le même temps, certains nous ont expliqué qu’il y avait trop de professeurs, et ils en ont réduit le nombre. Ils ont accrédité l’idée que l’on dépensait trop d’argent pour le service public de l’éducation. Nous savons pourtant aujourd’hui que l’éducation, et donc les moyens que l’on octroie à l’université et à la recherche, est une chance et un atout en termes de compétitivité pour un pays comme le nôtre. Ce sont les pays au top dans ces domaines qui gagneront et qui resteront de grandes nations.
Je veux bien qu’on nous dise que, le problème, c’est APB, que c’est l’affectation, et non l’orientation. Je suis pour l’orientation, mais je vois dans ce projet de loi trop d’affectation,…
M. Pierre Ouzoulias. Sociale !
M. David Assouline. … sans loi de programmation, sans collectif budgétaire. Il n’y a donc pas d’ambition derrière.
On tente de nous faire croire qu’on réduira les inégalités grâce à une meilleure technique d’affectation. Certes, cette technique devait probablement être améliorée, compte tenu de ce qu’a dit la CNIL, mais vous n’avez pas les moyens de votre ambition, madame la ministre. Votre projet de loi n’est pas au rendez-vous à cet égard. C’est la bataille qu’il nous faudra engager, tous, et avec détermination. (M. Jacques-Bernard Magner applaudit.)
Mme la présidente. L’amendement n° 173, présenté par MM. Paccaud, Allizard, Babary et Bas, Mme Berthet, MM. Bonne et Bouchet, Mmes Boulay-Espéronnier et Bruguière, MM. Calvet, Cardoux et Carle, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chatillon et Chevrollier, Mme de Cidrac, MM. Cornu, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Deseyne, Dumas, Duranton, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, M. Forissier, Mmes Garriaud-Maylam et F. Gerbaud, M. Ginesta, Mme Giudicelli, M. Gremillet, Mme Gruny, M. Hugonet, Mme M. Jourda, M. Kennel, Mmes Lamure, Lassarade et Lavarde, MM. de Legge, Le Gleut, Leleux, Leroux et H. Leroy, Mmes Lherbier et Lopez, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mme Micouleau, MM. Milon et de Montgolfier, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Panunzi, Perrin, Pierre et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Puissat et Raimond-Pavero et MM. Rapin, Reichardt, Retailleau, Revet, Savary, Schmitz, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Remplacer les mots :
à tous les
par le mot :
aux
La parole est à M. Olivier Paccaud.
M. Olivier Paccaud. Je suis d’accord avec M. Assouline : ce texte est un projet de loi d’affectation, comme l’a très bien démontré notre vénérable collègue Guy-Dominique Kennel. Il comporte néanmoins de nombreuses avancées et il peut être amélioré.
Ainsi, très concrètement, je propose, au nom du groupe Les Républicains, de remplacer, au début de l’article 1er, les mots « à tous les » par le mot « aux ». Ce n’est ni une nuance sémantique ni une coquetterie. Cette nuance vise non pas à restreindre l’accès à l’enseignement supérieur, mais à permettre une meilleure orientation et, surtout, une prise de conscience.
Actuellement, l’accès direct à l’enseignement supérieur conduit de nombreux jeunes dans une impasse. Je ne rappellerai pas les chiffres, Guillaume Chevrollier, Jacques Grosperrin et Jean-Claude Carle les ayant déjà cités, mais ils doivent nous interpeller, car la sélection existe aujourd’hui, qu’on le veuille ou non. Et elle est la plus cruelle, la plus injuste qui soit : c’est la sélection par l’échec, par l’illusion aussi !
On donne en effet l’illusion que l’université pour tous permettrait la réussite de tous. En fait, le véritable dogme est celui non pas de l’université pour tous, mais de l’université obligatoire pour tous, lequel provoque de nombreuses déceptions. Or on peut réussir son orientation, s’épanouir, s’insérer socialement, professionnellement, sans forcément suivre les chemins de l’université. Bien d’autres parcours sont possibles.
Soyons lucides : pour être réussie, une orientation doit être beaucoup plus choisie que subie ; elle doit surtout être réaliste. Voilà ce à quoi nous devons tous travailler dans ce projet de loi. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Cet amendement est intéressant, car il peut peut-être mettre fin au mythe de l’université ou de l’enseignement supérieur pour tous. Tout le monde n’est pas obligé de faire des études supérieures. Certains peuvent décider d’arrêter leurs études, d’autres de prendre une année de césure. Vous avez donc raison de poser le problème.
Par conséquent, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Avec cet amendement, monsieur le sénateur, vous soulignez que l’enseignement supérieur est multiple. Je ne peux être que d’accord avec vous. Plusieurs voies sont possibles au sein de l’enseignement supérieur : il y a bien sûr les universités, mais aussi les classes préparatoires ou les BTS, qui relèvent des établissements scolaires.
Le Gouvernement souhaite, car c’est extrêmement important, que l’on puisse considérer toutes les formes d’apprentissage comme des filières d’excellence. C’est pour cela que nous voulons revaloriser l’apprentissage dès avant le baccalauréat. Nous devons donc effectuer un véritable travail de fond, car les gens considèrent bien souvent que l’apprentissage est non pas un autre type de pédagogie convenant aux jeunes pour se former, mais une voie dans laquelle on s’engage quand on ne peut pas aller ailleurs. Selon moi, c’est une erreur. Muriel Pénicaud et moi travaillons donc sur cette question.
Jean-Michel Blanquer proposera le 14 février prochain un projet de réforme de l’organisation non seulement des années lycée, mais aussi du baccalauréat. Certes, il n’est pas illogique de penser que l’on aurait dû commencer par le lycée et le baccalauréat pour préparer le supérieur, mais, pour notre part, nous avons considéré que, pour une fois – j’insiste sur les mots « pour une fois » –, nous pouvions définir les attentes de l’enseignement supérieur avant d’organiser le cycle du lycée. Cette autre façon de voir les choses permettra peut-être de mieux rendre compte de la réalité et, je l’espère, de faire en sorte que, dans les années à venir, les jeunes choisiront l’université non plus par défaut, mais pour ce qu’elle est en mesure de leur apporter en termes de formation.
Enfin, je rappelle que le baccalauréat est le premier diplôme de l’enseignement supérieur. Il est très important, dans cette vision globale, de garantir aux jeunes que l’obtention du baccalauréat ouvre la possibilité à ceux d’entre eux qui le souhaitent de poursuivre des études supérieures.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. (M. Martin Lévrier applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. En réponse à notre collègue Paccaud, je souligne que nous ne raisonnons que sur 50 % des filières. Les autres étant sélectives, nous n’en dirons rien ce soir. Je rappelle toutefois que ces dernières ne sont pas celles qui coûtent le moins cher à l’État…
Par ailleurs, comme Mme la ministre l’a dit très justement, les échecs en licence s’expliquent en grande partie par des orientations par défaut, tout simplement parce que seules 50 % des filières sont libres. Les gamins ont parfaitement compris que, dans un pays qui compte aujourd’hui 5 millions de chômeurs, la promotion sociale par le diplôme et par l’université était la seule façon de s’en sortir. Ils tentent donc leur chance à l’université, même lorsqu’ils ont un bac pro ou un bac technique, car ils savent que, sans cela, ce sera Pôle emploi. Ils atterrissent donc dans les filières histoire ou philosophie pour lesquelles ils ne sont pas faits. Ils font un choix par défaut, parce qu’ils n’ont pas d’autre solution. Les IUT, notamment, qui devraient les accueillir, ne le peuvent plus, car ils sont pris par les élèves des filières générales.
En tant qu’enseignant, j’ai fait face à des salles accueillant 50 étudiants pour 25 places. Ce n’est drôle pour personne. Quand on discute avec ces jeunes, ils nous disent qu’ils ont conscience que la filière dans laquelle ils se sont inscrits ne correspond pas tout à fait à leur formation, mais ils veulent tenter leur chance jusqu’au bout, l’université étant la petite lucarne qu’il leur reste pour espérer une promotion sociale. Ce soir, nous allons fermer cette lucarne. Je trouve cela terrible pour notre jeunesse.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Mme la ministre a dit quelque chose de très important à la fin de son intervention, qui n’avait pas encore été dit aussi clairement : le bac est le premier diplôme de l’enseignement supérieur et il doit permettre à ceux qui le souhaitent d’accéder à l’enseignement supérieur, sans autre barrage qu’une orientation.
Cela étant, dans ce débat, j’entends des énormités. Tout le monde ne doit pas être « obligé » d’aller à l’université ! Franchement, notre combat est-il celui-là ? Va-t-on organiser des manifs pour que tout le monde ne soit pas obligé d’y aller ? Est-ce vraiment ça le sujet ? Le véritable problème, c’est qu’il n’y a que 2,4 millions d’étudiants et que de nombreux jeunes n’accèdent pas à l’enseignement supérieur, car la sélection s’est faite bien avant.
La question est de savoir si vous considérez que le vice du système français est qu’il donne aux jeunes l’illusion que la majorité d’entre eux pourront obtenir un diplôme de l’enseignement supérieur alors que ce n’est pas possible, car il existe une inégalité naturelle qui devrait les conduire à suivre un autre parcours. Là se situe, depuis très longtemps, la différence entre la gauche et la droite.
Nous, nous pensons qu’il faut permettre au plus grand nombre de jeunes d’accéder à l’enseignement supérieur et que toutes les couches sociales doivent se voir offrir les mêmes possibilités. Or ce n’est pas le cas aujourd’hui. Je le répète, seuls 10 % des enfants d’ouvriers vont à l’université. C’est donc que l’écrémage s’est fait avant. Comment corriger cette situation ?
On peut réformer le collège et le lycée, qui forment un tout. Or on discute toujours de ces questions par morceaux. Oui, une révolution pédagogique globale est peut-être nécessaire ! Les autres systèmes universitaires, aux États-Unis ou ailleurs, ne sont pas du tout les mêmes. Certaines choses sont mieux, d’autres moins bien.
En tout cas, l’enjeu de ce débat est clair : veut-on réellement faire en sorte que chacun puisse être orienté ou doit-on acter le fait qu’il n’y a pas de place pour tout le monde dans l’enseignement supérieur, que seules les élites y ont droit et que les autres – c’est très social – doivent faire autre chose ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Je trouve très intéressant qu’on commence l’examen de ce texte par un amendement qui pourrait paraître anodin, puisqu’il ne vise qu’à remplacer « à tous les » par « aux ». Or ce n’est pas rien ! Un tel changement modifierait considérablement la valeur et la nature même du baccalauréat.
À cet égard, je suis très heureuse que la ministre ait rappelé que l’obtention du baccalauréat donnait accès, si le jeune le souhaite, à la poursuite d’études supérieures. Plus que cela, il ouvre droit à une orientation et à un accompagnement pour accéder à l’enseignement supérieur.
Or cet amendement vise à franchir ce qui pour nous est une ligne rouge. Il tend à prévoir une sélection plus forte dès le départ, quand nous voulons commencer par ouvrir, c’est-à-dire par mettre en place des dispositifs afin d’offrir une orientation et un accompagnement à tous les bacheliers. Il s’agit de réunir toutes les conditions permettant de garantir leur réussite.
Il est très symptomatique que cet amendement ouvre le débat. Notre groupe votera contre, bien sûr. Il y a véritablement une différence de valeur entre nous.
Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Karam, pour explication de vote.
M. Antoine Karam. Avec cet amendement, nous ne faisons pas que jouer sur les mots. Disant cela, je m’adresse à mon collègue qui veut remplacer les mots « à tous les » par le mot « aux ». En fait, il va plus loin que cela. Il indique en effet dans l’objet de son amendement : « Il y a quelques mois, le Président de la République déclarait vouloir mettre un terme au mythe de “l’université pour tous” ». Moi qui suis curieux, j’ai cherché la citation exacte du Président de la République, que je vous livre : « Nous ferons en sorte que l’on arrête par exemple de faire croire à tout le monde que l’université est la solution pour tout le monde ». Nous n’en faisons pas la même traduction, mais le français est une langue très subtile…
Je pense, comme ma collègue, que nous devons faire très attention, car ce simple changement de mots pourrait remettre en cause toute la philosophie du projet de loi. Il faut mieux orienter les bacheliers, mieux accompagner les étudiants, afin qu’ils trouvent une voie adaptée à leurs envies, à leur parcours, à leurs compétences, et leur offrir collectivement une chance.
Si cet amendement était adopté, je serais très inquiet pour les étudiants qui se retrouveraient dans une impasse. En ce qui nous concerne, nous voterons contre. (MM. Abdallah Hassani et Martin Lévrier applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.
M. Laurent Lafon. Cet amendement vise à répondre à des préoccupations que nous partageons sur l’échec à l’université, sur les problématiques d’orientation. Néanmoins, comme vous l’avez dit, monsieur Paccaud, il n’est pas qu’une simple coquetterie. Il vise à modifier assez fondamentalement l’accès non pas à l’université, mais à l’enseignement supérieur. En faisant du bac une condition nécessaire, mais plus suffisante, pour accéder à l’enseignement supérieur, vous posez une question fondamentale : qu’allons-nous proposer aux jeunes qui auront leur bac, mais qui ne seront pas forcément acceptés dans l’enseignement supérieur ?
On ne peut pas aborder cette question comme cela, par voie d’amendement, sauf si le but est simplement d’engager une réflexion. En tout cas, on ne peut pas modifier l’accès à l’enseignement supérieur dans ce projet de loi, qui, on le sent bien, est assez sensible, pour ne pas dire anxiogène, car il concerne l’avenir de nos jeunes.
Gardons également à l’esprit ce qu’a déjà indiqué le rapporteur lors de la discussion générale : ce texte est attendu par 850 000 jeunes qui préparent actuellement leur baccalauréat. Ils ne comprendraient pas, j’en suis sûr, que, dans le cadre d’une discussion parlementaire, nous modifiions assez substantiellement les conditions d’accès à l’enseignement supérieur au cours de leurs années de lycée.
Nous comprenons les préoccupations qui sont les vôtres, mais nous ne pouvons pas voter cet amendement sous cette forme. Telle est la position du groupe Union centriste. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je répéterai ce que vient de dire M. Lafon : cet amendement est intéressant, car il ouvre un vrai débat, mais il serait tout de même gênant que l’un des fondements de notre République, à savoir le baccalauréat, grade universitaire, disparaisse par simple voie d’amendement.
À mon tour, je pose la question : que peut-on faire lorsque l’on est bachelier ? Dans le projet de loi, il est question non pas d’université, mais bien d’enseignement supérieur. Mme la ministre a évoqué tout à l’heure les différentes voies possibles après le bac, dont l’apprentissage. Pour ma part, j’aurai quelques difficultés à dire à un bachelier que les portes du post-bac lui sont fermées, parce que je me demande quelle autre porte il pourra ouvrir !
J’entends tout ce qui a été dit par Olivier Paccaud et par certains collègues sur le taux d’échec insupportable à l’université et sur les erreurs en matière d’orientation, mais je ne peux pas non plus vous suivre totalement, madame la ministre, tant le fait de discuter de votre projet de loi avant d’avoir travaillé sur le segment lycée-licence, autrement appelé le segment –3/+3 par les spécialistes, sur la bascule entre le lycée et l’université qu’est le baccalauréat, me paraît être un contresens, comme cela a été dit tout à l’heure. Le fait que ce projet de loi soit examiné avant la réforme du lycée et du baccalauréat que devrait annoncer M. Blanquer est un dysfonctionnement. On voit très bien en effet que la question posée par Olivier Paccaud est celle de l’orientation au lycée.
Je suis d’ailleurs persuadé, madame la ministre, que le texte dont nous débattons ce soir nécessitera un toilettage, voire une transformation, pour être adapté à la rénovation du baccalauréat et du lycée, une fois que celle-ci aura été faite. Voilà pourquoi je ne pourrai ni vous suivre, madame la ministre, ni suivre Olivier Paccaud.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de la Provôté. Les mots sont souvent aussi têtus que les chiffres, et la sémantique est en effet tout sauf une coquetterie. Les mots « à tous les » signifient non pas que l’université est obligatoire, mais qu’elle est possible pour tous. Là est la différence. Il s’agit d’ouvrir, non pas d’obliger. À titre personnel, je tiens à ce « on n’oblige pas ».
La question posée est celle du libre choix. Or le choix n’est libre que s’il est éclairé. Il s’agit surtout de permettre aux jeunes de faire leur choix en conscience et de pouvoir intégrer la meilleure filière, celle dans laquelle ils réussiront le mieux.
Le mot « aux » pose la question de l’exclusion. Qui exclut-on ? Comment exclut-on ? Comment aide-t-on à ne pas choisir ? On ne répond pas à ces questions.
Je pense que cet amendement est prématuré. Il vaut mieux offrir aux jeunes les moyens positifs de choisir plutôt que de leur donner l’impression, à travers cet amendement, que d’autres décideront à leur place. (M. Martin Lévrier et Mme Denise Saint-Pé applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Que mon amendement soit prématuré, c’est évident, car, malheureusement, avec ce projet de loi, on met la charrue devant les bœufs. Pour véritablement traiter la problématique de l’orientation, il aurait d’abord fallu faire la réforme du lycée et du bac. Étant mis devant le fait accompli, il nous faut nous positionner.
Je ne peux pas laisser dire que « aux » exclut. Peut-être est-ce le cas dans votre esprit, mais, je suis désolé de le dire, quand on parle français, on sait que cela n’exclut personne.
Madame le ministre, j’ai particulièrement apprécié votre intervention, mais j’ai toutefois été surpris par votre conclusion. Vous avez notamment évoqué l’apprentissage. Il y a effectivement beaucoup à faire dans ce domaine. Je sais que le gouvernement auquel vous appartenez désire avancer et mettre en valeur cette voie d’excellence.
Si j’ai pu donner à penser par l’amendement que je porte que ma famille politique a la volonté d’exclure de l’accès à l’enseignement supérieur une partie des jeunes bacheliers, j’en suis profondément navré, car tel n’est pas le cas.
Il faut toutefois bien se rendre compte de la situation aujourd’hui. Je vous invite ainsi à vous rendre dans une UFR de STAPS – je ne prends pas cet exemple au hasard –, même si nous ne sommes encore qu’au mois de février. Pour ma part, je me suis rendu à celle d’Amiens il y a quelques semaines. Alors que cette UFR comptait 1 500 étudiants à la rentrée, elle en a perdu 750 en l’espace de quatre mois. Ceux qui ont arrêté pensaient s’orienter vers les métiers du sport, mais ils n’en avaient pas les capacités. Ils n’avaient pas les qualités requises par l’UFR pour suivre cette formation. On les a bercés d’illusions. Je trouve que c’est très injuste pour ces jeunes. Le système est profondément responsable de cette situation. Il faut donc le corriger. C’était l’un des objectifs de mon amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 173.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je rappelle que la commission s’en remet à la sagesse du Sénat et que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 58 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 326 |
Pour l’adoption | 147 |
Contre | 179 |
Le Sénat n’a pas adopté. (M. David Assouline applaudit.)
L’amendement n° 143 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 4, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Tout candidat est libre de s’inscrire dans l’établissement de son choix dans les conditions prévues par le présent article.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. L’article L. 612-3 du code de l’éducation dispose que « tout candidat est libre de s’inscrire dans l’établissement de son choix ».
Le groupe du RDSE est profondément attaché à ce principe, permettant au candidat de choisir son orientation et d’envisager une éventuelle mobilité géographique, qui peut être justifiée par diverses raisons, telles que l’absence d’une formation dans son académie de résidence ou encore des charges de famille. Nous considérons que le droit en vigueur doit être maintenu sur ce point et que ce principe ne doit connaître d’exception que lorsque les capacités d’accueil ont été dépassées.
Si l’avis du Conseil d’État du 16 novembre 2017 constate l’abrogation de cette disposition, il souligne que le projet de loi « réaffirme le principe de liberté d’inscription du candidat dans l’une des formations de son choix ».
Madame la ministre, comme vous l’avez indiqué à plusieurs reprises, le Gouvernement n’a pas pour intention d’instaurer la sélection à l’entrée de l’université. C’est la raison pour laquelle, je l’espère, vous ne verrez aucun inconvénient à ce que l’on préserve explicitement dans la loi le libre choix du candidat. Tel est l’objet du présent amendement, que nous déposons dans le but de garantir l’exigence constitutionnelle d’égal accès de tous à l’instruction, tout en reconnaissant qu’il puisse y avoir des exceptions, conformément aux dispositions prévues par le présent article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. J’ai évoqué au cours de la discussion générale un article du Monde disant : le niveau en licence, un débat sensible ; des enseignants alertent sur les lacunes des étudiants.
Certains de mes collègues présents en séance, qui ont enseigné à l’université, se rappellent peut-être que les enseignants n’aiment pas enseigner en première année, parce qu’ils ont conscience des difficultés auxquelles ils vont être confrontés et de l’écrémage qui interviendra en fin d’année. Ainsi, les enseignants-chercheurs commencent souvent à enseigner en deuxième, troisième ou quatrième année.
C’est tout l’intérêt des attendus. Le fait que des filières deviennent sélectives – je ne sais pas si cela sera le cas de toutes les filières –, qu’il y ait au moins concordance entre le choix du candidat et celui de l’établissement me paraît fondamental. C’est la garantie d’un contrat gagnant-gagnant, parce que, mes chers collègues, je peux vous assurer que l’échec subi par certains étudiants au sein des filières a un effet beaucoup plus durable sur la suite de leur avenir professionnel.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. L’avis est également défavorable.
L’essentiel pour le Gouvernement est non pas de permettre aux jeunes d’obtenir une carte d’étudiant, mais d’offrir aux universités la possibilité de construire des parcours adaptés au profil et à la diversité des étudiants, pour pouvoir accompagner ceux-ci vers la réussite.
Je ne vois pas en quoi on découragerait les étudiants en les prévenant qu’ils pourront réussir dans la filière de leur choix, mais qu’ils devront, pour cela, travailler plus et autrement. Les enseignants-chercheurs et les enseignants des universités seront là pour les accompagner.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je soutiens cet amendement, qui clarifie encore le débat précédent.
Cette fois-ci, votre réponse m’inquiète, madame la ministre. Il n’est pas vrai que le nouveau système, qui est d’ailleurs déjà en place, encourage le bachelier à suivre le parcours correspondant le plus à ses motivations. Je peux citer un cas concret, que je ne détaillerai pas, car il s’agit d’un exemple personnel.
Un jeune est intéressé par une filière enregistrant 1 000, voire 2 000 demandes pour seulement 30 places. En soi, cette filière n’est pas sélective ; il est simplement question d’un choix de parcours. Et que dit-on à ce jeune, qui doit formuler ses dix vœux ? « Ne demande pas cette filière ; tu ne l’auras jamais ! Choisis plutôt celle-là – sans lien avec la motivation du jeune –, et même dix fois ; c’est sûr que tu auras une place ! »
En somme, on met la charrue devant les bœufs ! Dans cette licence, avec seulement 30 places pour 2 000 demandes, il faudrait ouvrir des capacités d’accueil, et ce d’autant que, sans donner plus de détail sur cette filière, elle offre des débouchés. Et que fait-on ? On continue à conseiller à l’étudiant de choisir la filière où il est sûr d’avoir une place, parce que personne ne veut y aller, et à démultiplier des offres de formation absolument pas demandées.
L’objet de ce projet de loi n’est pas une meilleure orientation des étudiants, pour de meilleurs débouchés. Pour rendre ce droit effectif, il faudrait complètement rénover les offres de formation et les adapter aux besoins d’une société en mutation comme aux envies des jeunes, qui ont changé depuis trente ans. Les offres, elles, sont relativement pérennes à travers le temps…
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. S’agissant de l’échec de certains étudiants, l’indignation de Jacques Grosperrin me semble toute sélective.
Comme vous le savez, mes chers collègues, le taux d’échec enregistré en première année d’étude de médecine atteint 80 %. Ainsi donc, 80 % des meilleurs élèves des filières scientifiques – nous ne parlons pas de titulaires d’un bac techno ou d’un bac pro – échouent en première année de médecine. Or, manifestement, cet échec-là ne scandalise personne, l’existence d’un numerus clausus étant parfaitement acceptée par tous.
Le problème de la réforme dont nous discutons aujourd’hui, c’est que ce numerus clausus va être étendu à d’autres filières et, de la même manière, nous allons rejeter des gamins qui pourraient réaliser un très bon parcours universitaire.
Mme la présidente. L’amendement n° 85 rectifié, présenté par Mme Mélot, M. Malhuret et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 4, seconde phrase
Après le mot :
personnalisés
insérer les mots :
propres aux exigences des formations proposées et
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement tend à préciser que les dispositifs d’accompagnement pédagogique doivent être « propres aux exigences des formations proposées ». Ces dispositifs doivent effectivement permettre de rendre les élèves aptes à répondre aux exigences de la formation. Il semble logique de le rappeler dans l’article 1er du projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement, qui me semble satisfait par le dispositif proposé.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cet amendement m’apparaît effectivement satisfait, étant précisé que nous ne modifions pas les exigences des formations proposées, mais accompagnons les étudiants pour qu’ils puissent les remplir. Je suggère donc également un retrait. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Madame Mélot, l’amendement n° 85 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 85 rectifié est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 141 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces dispositifs d’accompagnement pédagogique peuvent comporter un module visant à améliorer la maîtrise de la langue française.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Les enseignants-chercheurs des universités s’inquiètent du niveau de maîtrise de la langue française en licence. Or la compréhension même des cours et des questions posées lors des examens en dépend. De surcroît, les lacunes constatées dans ce domaine constituent, outre un frein à l’embauche, la fin de toute communication possible dans toutes les circonstances de la vie, peu importe la voie choisie. Certains universitaires évoquent même une souffrance à la correction des copies.
Il est compliqué, je le comprends, de demander à l’enseignement supérieur de combler les lacunes accumulées par les étudiants tout au long de leur scolarité. Mais il me semble pertinent, pour les établissements qui le peuvent, de proposer des modules de langue française.
Le présent amendement tend à préciser, à l’article 1er du projet de loi, que les dispositifs d’accompagnement pédagogique peuvent comporter un tel module.
À titre personnel, il m’est arrivé de renoncer à embaucher des stagiaires que j’étais prête à employer, car devoir relire systématiquement tout ce qu’elles écrivaient me posait beaucoup de problèmes et aurait constitué une charge supplémentaire.
Mme la présidente. L’amendement n° 84, présenté par Mme Mélot, M. Malhuret et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les dispositifs d’accompagnement pédagogique, la maîtrise de la langue française fait l’objet d’une attention particulière.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement, très proche du précédent, vise à accorder une attention particulière à la maîtrise de la langue française dans les dispositifs d’accompagnement pédagogique. Cette mesure s’inscrit dans le plan d’action global sur la maîtrise de la langue française de la rentrée 2015.
Une étude du ministère de l’éducation nationale de juillet 2016 jugeait que 60 % des élèves de troisième avaient un niveau correct, « même si la moitié d’entre eux doivent encore progresser ». À l’autre extrême, 15 % des élèves n’ont « pratiquement aucune maîtrise ou une maîtrise réduite de ces compétences et sont en difficulté devant un texte complexe ou comprenant un vocabulaire peu courant ». Parmi eux, 3 % des élèves sont même en grande difficulté, ne maîtrisant quasiment aucune des compétences évaluées. Le problème est donc réel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Je demande le retrait de ces deux amendements au profit de l’amendement n° 198 de la commission, qui sera présenté ultérieurement.
Nous avons bien entendu que cette question devait être une priorité. La maîtrise de la langue française est effectivement essentielle. Nous proposerons donc que le perfectionnement de la maîtrise de la langue française figure parmi les finalités du premier cycle de l’enseignement supérieur. Cette disposition avait été proposée, à l’Assemblée nationale, par Annie Genevard.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Le Gouvernement demande également le retrait de ces deux amendements, au profit de l’amendement que présentera ultérieurement le rapporteur.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. J’en reviens aux études de médecine. En première année, la sélection se fait par des QCM. On demande simplement aux étudiants de faire des croix ! Et sur la seule épreuve écrite, on leur a demandé, cette année, de ne surtout pas rédiger ! Sincèrement, comment peut-on former des médecins en les éloignant autant de la pratique de la langue française ?
J’aimerais vous lire un passage de L’Étrange Défaite, de Marc Bloch : « “Bachotage.” Autrement dit : hantise de l’examen et du classement. Pis encore : ce qui devrait être simplement un réactif, destiné à éprouver la valeur de l’éducation, devient une fin en soi, vers laquelle s’oriente, dorénavant, l’éducation tout entière. On n’invite plus les enfants ou les étudiants à acquérir les connaissances dont l’examen permettra, tant bien que mal, d’apprécier la solidité. C’est à se préparer à l’examen qu’on les convie. Ainsi un chien savant n’est pas un chien qui sait beaucoup de choses, mais qui a été dressé à donner, par quelques exercices choisis d’avance, l’illusion du savoir. »
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. Je souhaite simplement demander une précision à Mme la ministre ou à M. le rapporteur. Puisque tous deux ont demandé le retrait de ces amendements portant sur la maîtrise de la langue française au profit de l’amendement n° 198, peut-on en savoir plus sur l’objet de ce dernier ? Est-il identique ou a-t-on opté pour une formule alambiquée qui pourrait avoir différentes interprétations ?
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. L’amendement n° 198 est beaucoup plus large, plus englobant. Il inscrit la maîtrise de la langue française, non pas simplement dans le dispositif d’accompagnement pédagogique ou dans Parcoursup, mais dans la totalité du premier cycle de l’enseignement supérieur.
Mme la présidente. Madame Laborde, l’amendement n° 141 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire au profit de l’amendement du rapporteur, en espérant ne pas être déçue.
Mme la présidente. L’amendement n° 141 rectifié bis est retiré.
Madame Mélot, l’amendement n° 84 est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Je le retire également au profit de l’amendement n° 198, en espérant que ce dernier mette bien l’accent sur la maîtrise de la langue française.
Mme la présidente. L’amendement n° 84 est retiré.
L’amendement n° 101 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les établissements communiquent chaque année, au ministre chargé de l’enseignement supérieur, des statistiques sur le suivi et la validation de ces parcours et de ces dispositifs qui sont rendues publiques.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement vise à reprendre un dispositif figurant déjà dans le code de l’éducation, qui donne la possibilité aux étudiants de bénéficier au cours de leur premier cycle universitaire de dispositifs d’accompagnement pédagogique et de parcours de formation personnalisés.
Il semble que cette possibilité, de l’aveu même de certains présidents d’université, soit quelque peu restée lettre morte. Afin d’inciter à l’application de ce dispositif, il est proposé la transmission annuelle, par les établissements, des données relatives à son application.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 102 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, pour chacune de leurs filières, avec la participation des enseignants, enseignants-chercheurs et personnels d’orientation
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement a un double objet.
D’une part, il tend à préciser que les établissements d’enseignement supérieur exercent leur mission d’information et d’orientation avec l’aide de leurs personnels enseignants et d’orientation. Nous rétablissons ainsi un dispositif qui avait été adopté à l’Assemblée nationale. Cette précision n’est pas inutile : elle permet de garantir une orientation conduite par des personnes compétentes, au regard tant des problématiques générales de l’orientation – nous en avons beaucoup parlé – que du fond des disciplines appréhendées.
D’autre part, l’amendement vise à prévoir que cette mission s’effectuera pour chaque établissement, filière par filière, car il ne faudrait surtout pas que l’information et l’orientation soient bâclées ou effectuées de façon globale.
Ces deux précisions me semblent importantes. Nous souhaitons vraiment qu’aux termes de la loi le dispositif d’information et d’orientation soit complet et, surtout, réalisé par des personnes compétentes dans tous les secteurs concernés.
Mme la présidente. L’amendement n° 131 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 5, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
avec la participation des enseignants, enseignants-chercheurs et personnels d’orientation
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Le plan Étudiants contient des mesures intéressantes relatives à l’orientation des jeunes dès le lycée : deux professeurs principaux, deux semaines d’orientation en terminale, l’examen du projet d’orientation de l’élève en conseil de classe ou encore l’organisation de rencontres entre élèves et étudiants.
Nous pourrions aller plus loin, en proposant un enseignement spécifique avant l’arrivée en terminale, mais cela n’entre pas dans l’objet du présent projet de loi. En revanche, le renforcement du dispositif d’information et d’orientation constitue une avancée. Mais c’est à la condition que son contenu s’améliore, ce qui implique l’intervention de toutes les parties prenantes des établissements d’enseignement supérieur.
Nous rejoignons donc la proposition de Sylvie Robert avec cet amendement, qui tend à rétablir le texte de l’Assemblée nationale s’agissant de la participation des enseignants, des enseignants-chercheurs et, surtout, des personnels d’orientation à l’élaboration de ce dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. En préalable, je tiens à indiquer que nous n’avons rien contre les enseignants-chercheurs ou les personnels d’orientation. Si cette disposition a été supprimée en commission, c’est parce qu’il nous a semblé qu’elle relevait essentiellement de l’autonomie des universités.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cette mesure n’était pas prévue dans le projet initial, car l’implication des enseignants-chercheurs et des personnels chargés de l’orientation nous a semblé aller de soi. Je propose donc de suivre l’avis du rapporteur.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 131 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 103 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les décisions et avis produits par le conseil de classe et les professeurs de classe de terminale, relatifs aux acquis, aux compétences du candidat, établis pour la procédure de préinscription, lui sont communiqués.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Cet amendement tend à donner aux candidats à l’entrée dans l’enseignement supérieur un accès à leur dossier d’orientation et aux différents avis et précisions émanant tant du conseil de classe que des professeurs de terminale. Ces documents, qui évalueront les acquis et compétences du candidat, sont primordiaux pour fonder une acceptation, une décision de « oui, mais » – avec remise à niveau conditionnant l’inscription –, voire un rejet de ses demandes.
Dans de nombreux secteurs des services, la communication des dossiers est devenue la règle. En droit public, il s’agit même d’un droit. Le livre III du code des relations entre le public et l’administration reconnaît à toute personne le droit d’obtenir communication des documents détenus dans le cadre de sa mission de service public par une administration.
Il n’y a aucune raison pour que le service public de l’enseignement soit en reste et que les futurs usagers ne puissent pas prendre connaissance de documents qui fonderont la décision des établissements et décideront de leur avenir. Quant aux candidats issus d’établissements privés, il convient, par souci d’égalité, de leur appliquer le même traitement.
Cette transmission de documents constitue, en outre, la première garantie du droit à la défense en cas d’éventuel contentieux.
Mme la présidente. L’amendement n° 4, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les documents et avis produits par le conseil de classe et les professeurs principaux de terminale relatifs aux acquis, aux compétences et à la capacité du candidat à intégrer les différentes formations sélectionnées lors de sa préinscription sont préalablement communiqués au candidat avant d’être transmis aux établissements d’enseignement supérieur pour lesquels il a candidaté. Avant toute transmission de l’avis du conseil de classe et des professeurs principaux aux établissements d’enseignement supérieur, un entretien individuel est organisé avec un ou plusieurs membres de l’équipe pédagogique afin que le candidat puisse faire part de ses remarques et, si besoin, préciser son projet de formation.
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise également à garantir aux lycéens l’accès à leur dossier individuel et à leur proposer un entretien préalable à sa transmission.
Dans l’absolu, on ne peut que souscrire à une orientation à dimension humaine, qui ne prenne pas uniquement les lycéennes et les lycéens sous l’angle des enseignements suivis et des notes obtenues, mais comme des jeunes femmes et hommes en formation, ayant un projet et des envies. Rendre la procédure d’orientation plus humaine est effectivement une nécessité, même si cela ne pourra passer que par un réinvestissement réel dans les services d’orientation du lycée. Combien de jeunes peuvent aujourd’hui témoigner avoir bénéficié d’un réel suivi d’orientation, avec des entretiens réguliers et une personne à leur écoute, n’ayant pas à jongler entre une multitude de tâches ? Probablement très peu !
De fait, si le processus d’orientation doit faire l’objet d’un engagement financier important de la part de l’État, il est essentiel de remettre l’élève au centre de toute la démarche. Dans ce cadre, et au vu de l’importance que le dossier scolaire aura prise dans l’orientation post-bac à l’issue de la réforme, il est essentiel d’offrir au lycéen ou à la lycéenne un accès complet à son dossier et aux avis des conseils de classe, ainsi que de lui permettre de bénéficier d’un entretien individuel. Ainsi le jeune pourra-t-il préciser son projet et son souhait d’information et, au besoin, corriger ou préciser les données issues de son dossier personnel.
Pour rappel, le droit d’accès et de rectification des informations personnelles est un droit prévu par la CNIL et a déjà fait l’objet de recours le confirmant.
Tout aussi important : cette démarche participative doit également permettre au jeune d’appréhender les faiblesses de son dossier en vue de l’améliorer. Seuls l’accès aux fichiers et la création d’instances de dialogue adéquates rendront effective cette faculté.
Enfin, et pour reprendre – une fois n’est pas coutume – un des éléments de langage du Gouvernement, il faut remettre de l’humain dans le processus d’orientation et, donc, graver dans le marbre de la loi le double principe d’un droit d’accès, de rectification et d’opposition, et d’un entretien individuel.
Mme la présidente. L’amendement n° 81 rectifié, présenté par Mme Mélot, M. Malhuret et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les documents et avis produits par le conseil de classe et les professeurs principaux de terminale relatifs aux acquis, aux compétences et à la capacité du candidat à intégrer les différentes formations sélectionnées lors de sa préinscription sont préalablement communiqués au candidat avant d’être transmis aux établissements d’enseignement supérieur pour lesquels il a candidaté. Avant toute transmission de l’avis du conseil de classe et des professeurs principaux aux établissements d’enseignement supérieur, un entretien individuel est organisé, à la demande de l’élève, avec un ou plusieurs membres de l’équipe pédagogique afin que le candidat puisse faire part de ses remarques et si besoin, préciser son projet de formation.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à garantir l’accès des lycéens de terminale à leur dossier d’orientation et aux avis communiqués aux établissements d’enseignement supérieur. Il s’agit de garantir la totale transparence du processus.
Il est ainsi proposé que le lycéen puisse avoir accès aux documents et avis produits par le conseil de classe et les professeurs principaux, afin qu’un dialogue s’installe entre les deux parties, et qu’il puisse demander un entretien individuel avec les membres de l’équipe pédagogique pour faire des remarques sur son dossier ou préciser son projet de formation.
Considérant l’importance de ces avis de conseil de classe dans l’orientation des bacheliers, il importe qu’une communication complète s’établisse entre le lycéen et son équipe pédagogique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Ces trois amendements présentent un intérêt sous l’angle de la transparence, mais plusieurs questions se posent.
Tout d’abord, et c’est une remarque importante, des rencontres sont prévues avec les lycéens avant les conseils de classe.
Ensuite, permettre à un élève d’accéder au compte rendu du conseil de classe peut créer des complications.
Rappelez-vous, mes chers collègues, ce qu’il se passait avec le permis de conduire voilà quelques années. Le parallèle est peut-être osé, mais, lorsque l’examinateur indiquait directement qui était lauréat et qui ne l’était pas, il est arrivé qu’il ait quelques soucis en sortant de la voiture… Désormais, les résultats sont envoyés chez les candidats, qu’ils aient eu ou pas leur permis.
Dans une période où la situation se tend dans certains établissements scolaires, avec, parfois, un peu plus de violence, on pourrait mettre en difficulté un enseignant, qui se verrait interpellé par un élève : « Vous avez fait tel ou tel commentaire sur mon avis. Moi, je ne suis pas d’accord avec vous ! » Vous savez comment une telle situation peut dégénérer.
Il est donc sage d’être prudent et de ne pas prévoir de communication. L’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cela a été rappelé, le livre III du code des relations entre le public et l’administration reconnaît à toute personne le droit d’obtenir communication des documents détenus. C’est pourquoi un projet de décret relatif au rôle du conseil de classe en classe terminale des lycées est déjà en cours d’élaboration.
Cette question relevant du domaine réglementaire – le décret sera publié lorsque la loi aura été votée –, je demande le retrait des trois amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Madame Blondin, l’amendement n° 103 rectifié est-il maintenu ?
Mme Maryvonne Blondin. Mme la ministre nous a apporté un début de réponse en indiquant que le sujet est d’ordre réglementaire et que le décret est en cours. Nous lui faisons confiance, mais, avec mes collègues du groupe, que j’ai consultés, nous choisissons de maintenir l’amendement.
Mme la présidente. Monsieur Ouzoulias, l’amendement n° 4 est-il maintenu ?
M. Pierre Ouzoulias. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Madame Mélot, l’amendement n° 81 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 81 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 103 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 86 rectifié bis, présenté par Mmes Estrosi Sassone, Primas, Troendlé et Lamure, MM. Carle, Milon et Cambon, Mmes Deroche et de Cidrac, M. Brisson, Mme Lassarade, MM. Chevrollier et Poniatowski, Mme Morhet-Richaud, MM. J.M. Boyer et Danesi, Mme Duranton, M. Sol, Mmes Eustache-Brinio et Chauvin, MM. Grand, Daubresse, Savary, Houpert, Grosdidier et Joyandet, Mmes A.M. Bertrand et Bruguière, M. Gilles, Mme Dumas, MM. Gremillet et Priou, Mmes Chain-Larché et Canayer, MM. Reichardt, Hugonet et Le Gleut, Mme Imbert, MM. Leleux, D. Laurent et Chaize, Mme Lavarde, MM. Bonhomme, Mandelli, B. Fournier et Cuypers, Mme Deseyne, MM. Bizet et Paccaud, Mmes Bonfanti-Dossat, Di Folco, Delmont-Koropoulis, Puissat et Gruny, MM. Raison, Perrin, Bazin et Revet, Mme Thomas, MM. Rapin et Vogel, Mmes Berthet, Garriaud-Maylam, Deromedi, Lopez, Micouleau et Bories, MM. Pellevat, Paul, Schmitz et Bonne, Mme M. Mercier et MM. Mayet, Lefèvre, Savin, H. Leroy, Bouchet, Panunzi, Vaspart, Piednoir, Huré, Longuet, Laménie et Husson, est ainsi libellé :
Alinéa 5, deuxième phrase
Après les mots :
les caractéristiques de chaque formation
insérer les mots :
, y compris les formations professionnelles et les formations en apprentissage,
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Cet amendement vise à préciser dans la loi que le dispositif d’orientation et d’information, qui présente chaque formation, doit également présenter les formations en apprentissage ainsi que les formations professionnelles. Certes, le site parcoursup.fr présente l’ensemble des orientations. Néanmoins, afin de faire évoluer très profondément les pratiques et les mentalités en diffusant la culture de l’orientation au lycée et, surtout, afin de changer la perception autour de ces filières, qui sont un moyen d’entrer rapidement dans la vie active, il convient, me semble-t-il, de les mentionner dans la loi.
L’apprentissage est une voie d’orientation importante, ouverte à tous les jeunes de seize à vingt-cinq ans, ainsi qu’à certains bacheliers, qui peuvent émettre le souhait de se réorienter dès l’issue du lycée. C’est également le cas pour les formations professionnelles, les BTS par exemple, qui ouvrent à de très nombreux emplois, en particulier dans le secteur tertiaire, après des études courtes de deux ans après le bac. Vous avez rappelé, madame la ministre, que ce sont souvent ces étudiants disposant d’une formation bac+2 qui manquent cruellement.
Si ces orientations sont déjà proposées aux élèves à la fin du collège ou au début du lycée, il est important de rappeler à l’ensemble des étudiants qui sont en âge de s’y inscrire cette possibilité qui leur est offerte de suivre ainsi une voie alternative, notamment à ceux qui peuvent douter de s’engager dans un cycle d’études long.
L’apprentissage a connu une croissance de 4,2 % d’inscrits entre l’automne 2016 et 2017. Il faut continuer à mettre en valeur cette orientation compte tenu des résultats positifs sur le taux d’emploi des jeunes.
Enfin, cet amendement a pour objet de remettre sur un pied d’égalité l’ensemble des formations et faire ainsi en sorte que les orientations soient choisies par les élèves et non pas subies.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Cet amendement est très intéressant, parce que, comme Mme Estrosi Sassone l’explique fort bien, tant la formation en apprentissage que la formation professionnelle font partie des formations qui doivent être portées à la connaissance des futurs étudiants. D’ailleurs, sur le site terminales2017-2018.fr, dans la catégorie « trouver ma formation », les formations en apprentissage apparaissent en premier.
Vous avez raison de vouloir développer ces formations dans l’enseignement supérieur, parce qu’elles peuvent permettre une insertion professionnelle efficace. Nous serons d’ailleurs attentifs à la prochaine réforme de l’apprentissage.
L’avis est donc favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Tout ce qui permettra de mettre en valeur l’apprentissage et la professionnalisation, y compris dans l’enseignement supérieur, doit être favorisé. L’avis du Gouvernement est donc favorable.
M. Charles Revet. Très bon amendement !
Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L’amendement n° 54 rectifié bis, présenté par MM. Lafon, Laugier et Bonnecarrère, Mme Billon, MM. Kern et Canevet, Mmes Dindar, Goy-Chavent et Vullien, MM. Longeot et Poadja, Mmes Vermeillet et de la Provôté, MM. Capo-Canellas, Cigolotti, Médevielle, Détraigne, Delcros et Cazabonne, Mmes Sollogoub et Gatel et MM. Janssens et Henno, est ainsi libellé :
Alinéa 5, deuxième phrase
Après le mot :
formation
insérer les mots :
définies en concertation avec les représentants des équipes pédagogiques dans le respect de l’autonomie universitaire,
La parole est à M. Laurent Lafon.
M. Laurent Lafon. Cet amendement porte sur les attendus pour accéder aux formations.
Le projet de loi dispose que ces attendus « font l’objet d’un cadrage national fixé par un arrêté du ministre chargé de l’enseignement supérieur ». Il nous semble qu’il y a là une forme de flou ou d’ambiguïté qui mériterait d’être dissipée : le cadrage est certes national, mais ce sont les établissements qui vont mettre en œuvre la réforme et choisir ou, je ne sais comment dire, sélectionner les bacheliers pour les différentes formations.
Il nous paraîtrait donc nécessaire de préciser que ces attendus sont définis en concertation avec les représentants des équipes pédagogiques dans le respect, bien sûr, de l’autonomie universitaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. La commission demande le retrait de cet amendement. Il ne semble pas nécessaire de le préciser dans la loi. Surtout, il faut respecter l’autonomie des universités.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. C’est aussi une demande de retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Il est normal qu’il y ait des attendus nationaux pour des diplômes nationaux. En outre, les modalités de formation, les étapes d’orientation, l’accompagnement, les partenariats avec d’autres établissements, notamment, relèvent des instances de l’établissement : CFVU, conseil académique et, in fine, conseil d’administration.
Mme la présidente. Monsieur Lafon, l’amendement n° 54 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Laurent Lafon. Je pense que cette précision serait utile, car j’ai peur que ce flou ne laisse une place trop importante aux algorithmes locaux. Ce qui n’est pas écrit dans la loi sera écrit ailleurs. Néanmoins, je retire l’amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 54 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 64 rectifié, présenté par MM. Grand et Milon, Mme Eustache-Brinio, MM. Karoutchi et Daubresse, Mmes Garriaud-Maylam, Delmont-Koropoulis et Deromedi, MM. Pellevat, Paul et Bizet, Mme Lherbier, MM. H. Leroy et B. Fournier, Mme Lamure et M. Pierre, est ainsi libellé :
Alinéa 5, deuxième phrase
Après le mot :
formation
insérer les mots :
et les statistiques prévues au troisième alinéa de l’article L. 612-1
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. La procédure nationale de préinscription prévoit que les caractéristiques de chaque formation soient portées à la connaissance des candidats.
Par ailleurs, l’article L. 612-1 précise que les établissements dispensant des formations sanctionnées par un diplôme d’études supérieures rendent publiques des statistiques comportant des indicateurs d’inscription des étudiants dans toutes les formations dispensées, de réussite aux examens et aux diplômes, de poursuite d’études et d’insertion professionnelle des étudiants. Il précise également que chaque étudiant en dispose avant son orientation dans une formation supérieure.
Il est donc proposé que ces statistiques soient également portées à la connaissance des candidats au cours de la procédure nationale de préinscription, afin de les informer au mieux.
Madame la ministre, comme j’ai de très bonnes lectures – j’ai lu le programme d’En Marche –, je n’ai donc aucun doute sur le jugement que vous allez porter sur cet amendement. Je cite : « Pour éclairer nos étudiants sur le choix d’orientation, nous exigerons » – exigerons ! – « que chaque établissement de l’enseignement supérieur publie en toute transparence les taux de réussite et les débouchés professionnels par formation de ses anciens étudiants. »
Si trop d’information peut nuire à l’information, ces statistiques existent et constituent des éléments simples. Il convient donc de les diffuser dans le cadre de Parcoursup.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Pour ma part, je n’ai pas lu le programme d’En Marche. Reste que tout ce qui contribue à la connaissance, à la lisibilité, à la transparence de ce dispositif est intéressant. L’avis est donc favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je constate que cet amendement a, lui aussi, été adopté à l’unanimité des présents.
L’amendement n° 104 rectifié, présenté par M. Assouline, Mme S. Robert, M. Kanner, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5, après la deuxième phrase :
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Au cours de cette procédure, le bureau d’aide à l’insertion professionnelle des étudiants porte à la connaissance des candidats, les statistiques mentionnées au troisième alinéa de l’article L. 611-5.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. J’ai tenu à déposer cet amendement à cet endroit précis du texte, parce que le sujet me tient à cœur.
Lors de l’examen de la dernière loi importante sur l’université, qu’avait défendue Mme Pécresse, j’avais déposé un amendement visant à créer, ce qui n’existait pas à l’université, les bureaux d’aide à l’insertion professionnelle. J’avais fait le constat que, dans les grandes écoles, le bureau des anciens élèves était d’une très grande aide pour les étudiants – je ne parle pas de « piston » –, les guidant et les accompagnant dans le choix de leur parcours professionnel. Ces structures étaient absentes de la plupart des universités. C’est donc par cet amendement que j’avais défendu au nom du groupe socialiste qu’ont été créés ces bureaux d’aide à l’insertion professionnelle.
Pour aller dans le même sens que notre collègue qui vient de s’exprimer, si un étudiant, avant de s’inscrire dans une filière, cherche quels en sont les débouchés professionnels, il peut obtenir des éléments d’information sur internet ou en achetant des journaux privés, comme L’Étudiant. Mais aucun élément officiel ni aucune statistique officielle ne lui est fourni. Or les bureaux d’aide à l’insertion professionnelle des universités disposent de ces statistiques, qui devraient donc pouvoir être communiquées à ceux qui choisissent telle ou telle filière pour qu’ils puissent le faire en toute connaissance de cause. Non pas parce que l’université doit s’adapter à l’entreprise et au marché de l’emploi, mais tout simplement pour qu’ils soient informés.
Si l’université ne se réduit pas à cette fonction d’information, elle sert aussi à cela. Beaucoup d’étudiants ont besoin de ces informations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement – à défaut, l’avis sera défavorable –, car il est en partie satisfait par celui de M. Grand qui vient d’être adopté. Je peux comprendre qu’il est peut-être un peu compliqué pour vous de le retirer, mais sachez que l’amendement de M. Brisson, qui vise à substituer aux bureaux d’aide à l’insertion professionnelle des observatoires de l’insertion professionnelle, permettra également de répondre à votre souhait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Il me semble effectivement que cet amendement est satisfait par celui qui vient d’être adopté.
Par ailleurs, je tiens à préciser que toutes ces données doivent figurer dans les schémas d’insertion professionnelle des universités, qu’elles sont tenues de mettre en place dans le cadre de leur accréditation, et être accessibles sur leur site internet. À ce jour, presque toutes les universités sont accréditées.
Je demande donc également le retrait de l’amendement, sinon l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Assouline, l’amendement n° 104 rectifié est-il maintenu ?
M. David Assouline. Je suis surpris de la position du rapporteur. En commission, au nom de laquelle vous vous exprimez, vous aviez émis un avis de sagesse. Alors que vous représentez la commission, là, à titre personnel, vous dites que vous êtes contre mon amendement, parce qu’il est satisfait. Qui plus est, ce que j’ai rarement vu dans nos débats, vous dites qu’il est hors de propos, parce que vous allez soutenir un amendement que nous n’avons pas encore examiné… Laissez la discussion suivre son cours !
Je ne demande pas de droits d’auteur, mais ces bureaux d’aide à l’insertion professionnelle, créés par notre amendement à la loi Pécresse, commencent à être connus. Pour qu’un dispositif nouveau soit connu dans une université, pour que les étudiants le connaissent, il faut qu’il soit généralisé. Et maintenant, vous voulez changer l’appellation de ces bureaux d’aide, peut-être pour marquer de votre sceau cette loi. Pour ma part, je n’entre pas dans ces considérations, j’essaie d’être utile.
Mme la ministre a dit que ces données seront disponibles sur les sites internet des universités. Par mon amendement, je voulais aller encore plus loin, faire en sorte que le candidat reçoive, au moment où il dépose sa candidature, les statistiques de ce bureau d’aide à l’insertion professionnelle, sans qu’il ait à aller les chercher sur le site internet, de manière à éclairer son choix. Cette démarche volontariste permettrait de rendre plus performante l’orientation personnalisée.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. En commission, j’ai demandé le retrait de votre amendement au profit de l’amendement n° 64 de M. Grand, par lequel il est satisfait.
Mme la présidente. Je suis saisie de quarante amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 206, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5, dernière phrase
Remplacer les mots :
dans le cas prévu au VII
par les mots :
dans les cas prévus aux VII et VII bis
II. – Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il est tenu compte, à cette fin, des aménagements et des adaptations dont bénéficient les candidats en situation de handicap
III. – Alinéa 19, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
dans des conditions fixées par décret
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Le présent amendement a pour objet de favoriser la prise en compte de la situation particulière des candidats en situation de handicap.
Nous prévoyons un décret spécifique pour l’accueil des étudiants handicapés. L’idée est que, lorsque ces derniers demandent une formation qui leur est proposée, y compris avec une adaptation pour méthodologie ou remise à niveau, ils deviennent prioritaires de manière à leur faciliter l’entrée dans l’enseignement supérieur en prenant en compte leur situation particulière.
Mme la présidente. L’amendement n° 8, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. J’ai posé une question à la ministre à laquelle je n’ai pas obtenu de réponse : pourquoi on demande un CV à un gamin de dix-sept ans dans la fiche avenir Parcoursup. Je ne vois pas à quoi ça sert, si ce n’est à intégrer des éléments extrascolaires, ce qui revient à faire, je le répète, une sélection sociale. J’aimerais que la ministre nous explique concrètement comment les universités vont traiter les informations spécifiques que les candidats mentionneront dans leur CV.
J’en viens à notre amendement.
Nous ne comprenons pas comment fonctionne la procédure du « oui, si ». Nous avons questionné nos collègues universitaires : aujourd’hui, ils n’ont pas les moyens de mettre en œuvre ce dispositif. Il faut donc que la ministre nous explique comment ça fonctionne.
Par ailleurs, je ne comprends pas la logique qui consiste à ajouter une année d’enseignement à un cursus en licence, alors qu’on vient de nous expliquer qu’il fallait absolument qu’elle s’obtienne en trois ans.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de ce dispositif.
Mme la présidente. L’amendement n° 9, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L’inscription peut, compte tenu des caractéristiques de la formation d’une part et des caractéristiques de la formation antérieure du candidat d’autre part, s’accompagner, à la demande du candidat, du dispositif d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé mis en place par l’établissement pour favoriser sa réussite.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Je retire cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 9 est retiré.
L’amendement n° 106 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Lors de l’inscription, il peut être proposé au candidat par l’établissement, pour favoriser sa réussite, compte tenu d’une part des caractéristiques de la formation et, d’autre part, de l’appréciation portée sur l’acquis de sa formation antérieure ainsi que sur ses compétences, le bénéfice des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé. Les modalités de mise en œuvre des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé qui lui sont proposés font l’objet d’un dialogue entre l’établissement et le candidat. Le candidat qui accepte le bénéfice de ces dispositifs ou du parcours de formation personnalisé bénéficie de la validation de ces modules, dans les conditions prévues à l’article L. 613-5.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement tend à prévoir la validation des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé proposés au candidat qui ne satisferait pas aux exigences pour entrer dans la formation choisie, en tant qu’enseignement modulaire capitalisable, comme prévu au nouvel article 2 ter du projet de loi.
L’idée est de valoriser ces dispositifs pour qu’ils ne soient pas considérés comme punitifs, mais, au contraire, pour qu’ils puissent aider le jeune dans ses remises à niveau.
Mme la présidente. L’amendement n° 57 rectifié bis, présenté par MM. Lafon, Laugier, Delcros et Bonnecarrère, Mme Billon, MM. Henno, Kern et Canevet, Mmes Dindar, Goy-Chavent et Vullien, MM. Longeot et Poadja, Mmes Vermeillet et de la Provôté, MM. Capo-Canellas, Cigolotti, Médevielle, Détraigne et Cazabonne, Mmes Sollogoub et Gatel et M. Janssens, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer le mot :
peut
par le mot :
doit
La parole est à M. Laurent Lafon.
M. Laurent Lafon. Cet amendement vise à apporter une précision importante.
L’idée est que l’inscription d’un candidat dans le cadre de la procédure de « oui, si » soit bien soumise à l’acceptation de l’accompagnement qui est proposé dans le projet de loi. C’était du reste une demande du Conseil d’État, qui précisait que cette formation personnalisée ne devait pas être facultative et qu’elle s’avérait indispensable à la réussite des études.
Pour matérialiser ce caractère obligatoire, il nous semble que le verbe « devoir » est plus adapté que le verbe « pouvoir ».
Mme la présidente. L’amendement n° 82 rectifié, présenté par M. Malhuret et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
compétences
insérer les mots :
et sur les stages effectués
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à reconnaître les stages effectués par un lycéen comme un élément des critères d’accès à une filière d’accès tendu.
Lorsque deux étudiants ont un niveau égal, celui qui a fait des stages et qui, par là même, connaît le monde du travail, a une expérience de l’autonomie, peut être considéré comme plus apte à être admis dans une filière tendue.
Mme la présidente. L’amendement n° 144 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre et MM. Gabouty, Gold, Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer les mots :
ou du parcours de formation personnalisé
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Dans le cadre des « oui, si », le projet de loi permet aux établissements d’enseignement supérieur d’imposer des dispositifs d’accompagnement pédagogique, ce qui est bienvenu, mais aussi des parcours de formation personnalisés, auxquels nous sommes opposés. En effet, imposer notamment un allongement du cursus sur le seul fondement de faiblesses constatées dans le parcours antérieur n’est pas pertinent, car cela décourage un étudiant avant même de lui laisser la possibilité de se mettre à niveau. Comment l’université pourrait-elle préjuger avant l’inscription dans la formation de la capacité d’un étudiant à obtenir sa licence en trois ou quatre ans ?
Il convient de rappeler qu’il y a un fossé entre le lycée et l’université. Certains étudiants améliorent leurs performances en premier cycle, poussés par l’intérêt qu’ils portent à la formation, loin des matières qui sont enseignées au lycée. D’autres, excellents au lycée, où l’encadrement est plus fort, ne parviennent pas à gérer leur travail de manière autonome.
Par exemple, comment évaluer qu’un candidat sera apte à faire sa licence de droit en trois ans alors qu’il n’a jamais pu acquérir de compétences juridiques dans sa formation antérieure ?
Le présent amendement tend donc à supprimer le parcours de formation personnalisé, qui consiste en réalité à allonger arbitrairement le cursus du candidat avant même qu’il n’ait pu faire ses preuves.
Mme la présidente. L’amendement n° 145 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre et MM. Gabouty, Gold, Guérini, Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
accompagnement pédagogique
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
proposés par l’établissement pour favoriser sa réussite. Un parcours de formation personnalisé peut être proposé au candidat.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement de repli tend à rendre facultatif le parcours de formation personnalisé. Ainsi, l’inscription dans une formation ne sera pas subordonnée à l’acceptation de ce parcours.
Il est évident qu’on ne peut pas dire à un étudiant ou à une étudiante « bonjour monsieur » ou « bonjour madame, vous allez faire votre parcours en quatre ans », alors qu’on ne l’a testé.
Bien sûr, nous sommes d’accord pour qu’il existe des formations destinées à aider et à accompagner ces étudiants, mais que la décision ne soit pas prise dès l’entrée à l’université ! Il peut se produire un sursaut, positif ou – car un brillant élève peut se « planter » la première année – négatif.
Mme la présidente. L’amendement n° 10, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces dispositifs sont prévus comme éléments de parcours optionnels dans les maquettes de première année de licence et ne peuvent entraîner une année de formation supplémentaire pour obtenir la licence.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Mme la présidente. Ces amendements sont en discussion commune.
M. Pierre Ouzoulias. Je veux dire à nos collègues que le temps qu’on passe pour obtenir un diplôme a une valeur non négligeable. Il faudrait qu’ils comprennent qu’une licence en trois ans n’a pas la même valeur qu’une licence en quatre ans. Pareillement, s’agissant de la thèse, les débouchés sont tellement minces que, si vous ne l’avez pas obtenue dans un délai de trois ans avec une mention très bien et avec les félicitations du jury, elle sera considérée comme inférieure.
Modifier ce système de licence en trois ans aura pour conséquence de délivrer des diplômes nationaux qui auront des valeurs différentes. C’est pourquoi nous tenons absolument à réaffirmer l’importance du diplôme national égal pour tout le monde.
Mme la présidente. L’amendement n° 11, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces dispositifs font l’objet d’un parcours d’enseignement validé par le ministère dont relève l’établissement d’enseignement supérieur.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Comme mon collègue Pierre Ouzoulias – et nous ne sommes pas les seuls –, j’ai du mal à comprendre que soient examinés en discussion commune quarante amendements qui n’ont rien à voir les uns avec les autres. Je ne sais pas comment vous allez pouvoir nous répondre, madame la ministre, même si je vois que vous avez déjà votre feuille…
M. Fabien Gay. Je le répète, j’ai du mal à comprendre cette façon de procéder.
Mme la présidente. Nous appliquons le règlement, mon cher collègue.
M. Fabien Gay. J’en viens à mon amendement.
La généralisation, à partir de 2009, des dispositifs de tutorat et de méthodologie était, à n’en pas douter, une avancée majeure pour la réussite des étudiants et des étudiantes. En théorie, toutefois, car le manque de contrôle par le ministère et, surtout, l’absence de bilan par les autorités de l’État ont conduit, d’une part, à une certaine inefficacité de ces enseignements et, d’autre part, à une fragilisation de ces derniers, maintenus dans une situation de variable d’ajustement.
Que les établissements aient des moyens humains, financiers, logistiques pour en faire des moteurs de réussite, et alors nous pourrons développer ces processus ! Mais, en parallèle, ils se sont souvent retrouvés à être les derniers abondés et les premiers prélevés de leurs moyens de fonctionnement.
Classes surchargées, au même niveau, voire plus, que les autres enseignements, recours à des étudiants et étudiantes de niveau supérieur, qui, certes peuvent apporter un autre regard, mais ne sont pas des gens formés à la pédagogie et au suivi, mise à disposition des salles que personne ne voulait : les exemples sont nombreux de dispositifs n’ayant aucun moyen d’assurer leur mission dans de bonnes conditions. Cela est d’autant plus dommageable qu’une nouvelle fois ces enseignements auraient pu être une bonne solution à un vrai problème, d’autant plus qu’appréhender la méthodologie universitaire exige un accompagnement certain que les TD disciplinaires n’ont pas toujours le temps d’assurer.
Il est donc essentiel, pour que la remédiation soit efficace et ne constitue pas uniquement une mesure discriminatoire, que le ministère donne son approbation aux parcours proposés par les établissements. Cela permettra, d’une part, de confronter l’ambition portée par le Gouvernement dans ses interventions depuis quatre mois et les moyens mis en œuvre budgétairement pour atteindre ces objectifs et, d’autre part, d’intégrer encore plus ce dispositif dans les maquettes universitaires, favorisant, de fait, le financement de ces enseignements, considérés comme parties prenantes des universités et non plus comme un complément heureux.
Mme la présidente. Mes chers collègues, la décision d’examiner en discussion commune ces quarante amendements procède d’une philosophie simple : s’assurer que tous les amendements seront bien présentés. Il s’avère que, par un jeu de poupées russes, l’adoption d’un amendement peut en faire tomber d’autres…
Cette procédure, prévue par le règlement du Sénat, qui rend nos débats parfois complexes, permet à chacun de défendre son amendement et de préserver le rôle des parlementaires.
L’amendement n° 65 rectifié, présenté par MM. Grand et Milon, Mme Eustache-Brinio, MM. Karoutchi et Daubresse, Mmes Garriaud-Maylam, Delmont-Koropoulis et Deromedi, MM. Pellevat, Paul et Bizet, Mme Lherbier et MM. H. Leroy et Pierre, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le refus du candidat justifie légalement la décision de refus d’inscription dans la formation concernée prononcée par le président ou le directeur de l’établissement.
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Dans son avis du 16 novembre 2017, le Conseil d’État relève que le fait de subordonner une inscription à une formation à l’acceptation d’un accompagnement pédagogique ou d’un parcours personnalisé n’a pas pour objet d’en interdire l’accès. Il constate, sans que cela soulève de difficultés de sa part, que la rédaction retenue par le projet de loi implique nécessairement que le refus de l’étudiant d’accepter le dispositif d’accompagnement personnalisé qui lui est proposé justifie légalement le refus par l’université ou l’établissement de l’inscrire dans la formation concernée.
Il est donc proposé de sécuriser les décisions de refus d’inscription dans une formation.
Madame la ministre, j’aimerais avoir l’assurance que la rédaction issue de nos travaux est toujours compatible avec l’avis du Conseil d’État, qui est très récent. Si tel est le cas, je retirerai mon amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 83, présenté par Mme Mélot, M. Malhuret et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le refus de l’étudiant d’accepter le dispositif d’accompagnement personnalisé qui lui est proposé justifie légalement le refus par l’université ou l’établissement de l’inscrire dans la formation concernée.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. L’argumentaire est le même que pour l’amendement précédent.
Mme la présidente. L’amendement n° 36, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. En plus, madame la présidente, je constate que l’ordre de présentation des amendements a été modifié… Sincèrement, je ne comprends pas pourquoi on aborde désormais ce sujet, qui n’a pas grand-chose à voir avec tout ce que l’on a dit avant. Or il s’agit d’un point essentiel : à travers cet amendement, nous demandons la suppression des capacités d’accueil.
On ne peut pas considérer que nous allons prévoir, maintenant, les formations qui permettront d’obtenir les meilleurs débouchés dans cinq ou dix ans. Comme on l’a dit, 80 % des métiers qui existeront alors sont encore inconnus aujourd’hui.
De plus, je m’interroge : que signifie un « taux d’insertion professionnelle » quand il s’agit de disciplines rares, comme les langues anciennes ? Le ministre de l’éducation nationale est incapable de nous dire combien il y aura de postes à l’agrégation et au CAPES, ce qui est quand même fondamental pour engager des études universitaires.
En outre, chers collègues, quand il s’agit du latin, expliquez-moi ce que sont les taux de réussite professionnelle. Je mets à part tout ce qui concerne l’Église et radio Vatican. (Sourires.) On y parle, on y pratique le latin, et c’est une très bonne chose. Mais, dans la vie de tous les jours, à qui sert le latin, si ce n’est à des enseignants ?
J’estime que cette volonté utilitariste, consistant à mettre systématiquement, en face des formations, des filières professionnelles et des métiers, rompt avec une tradition de l’université française, que l’on doit maintenir : enseigner tous les savoirs disponibles.
Il est fort possible que des disciplines aujourd’hui un peu oubliées, pour lesquelles on ne compte que trois ou quatre profs en France, nous révèlent, demain, des connaissances qui seront indispensables.
Aussi, je tiens vraiment à maintenir l’universalité de l’enseignement et de l’université.
Mme la présidente. L’amendement n° 160 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Garriaud-Maylam, M. Leroux, Mme Bruguière, M. Revet, Mmes Puissat et Micouleau, MM. Kennel, Bonhomme, Poniatowski et Chevrollier, Mme Deroche, MM. Priou, Gremillet, Vaspart et Babary, Mmes Imbert, Malet et Gruny, M. Mandelli, Mme Berthet, M. Brisson, Mme Estrosi Sassone, M. Paccaud, Mmes Bonfanti-Dossat, Delmont-Koropoulis et Duranton, MM. Rapin, Vogel, Savary et Pierre, Mme Deromedi, MM. Carle, Paul, Mayet, Bascher, Lefèvre, Savin, H. Leroy et Bonne, Mmes L. Darcos et Lamure et M. Grand, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 9, première phrase
Remplacer les mots :
relevant des ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur
par les mots :
publics d’enseignement supérieur
II. – Alinéa 18, première phrase
Après la première occurrence du mot :
formation
insérer les mots :
, parmi celles dispensées dans les établissements publics d’enseignement supérieur ou dans un des établissements relevant du chapitre II du titre III du livre VII de la troisième partie du présent code,
La parole est à M. Stéphane Piednoir.
M. Stéphane Piednoir. J’éprouve la même perplexité que mes collègues communistes. Comme c’est la seconde fois au cours de cette séance que je partage leur avis,…
M. Pierre Ouzoulias. Et ce n’est qu’un début ! (Sourires.)
M. Stéphane Piednoir. … je commence à m’interroger. Mais, je tiens à rassurer mes collègues du groupe Les Républicains, je vais m’arrêter là. (Nouveaux sourires.)
Le présent amendement vise à assurer la prise en compte de la totalité de l’offre de formation dispensée au sein des établissements publics d’enseignement supérieur et des établissements d’enseignement supérieur privés d’intérêt général, quel que soit le ministère dont ils relèvent.
Mes chers collègues, vous le savez, dans le cadre de ce projet de loi, l’ensemble des établissements seront concernés par la procédure de préinscription en formation de premier cycle, qu’il s’agisse des établissements publics, des établissements privés sous contrat d’association ou des établissements d’enseignement supérieur privés d’intérêt général. Dans ce contexte, il n’est pas cohérent de ne pas étendre les dispositions figurant à l’alinéa 9 de l’article 1er à tous les établissements concernés par Parcoursup, au-delà des seuls établissements relevant des ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, comme le prévoit le texte initial.
Mme la présidente. Chers collègues, permettez-moi de vous éclairer avec un exemple précis.
L’amendement que M. Piednoir vient de présenter vise les alinéas 9 et 18. Supposons qu’il soit adopté : un élément de l’alinéa 19 deviendrait sans objet. Or cet alinéa est également concerné par l’amendement que le Gouvernement a déposé au titre de l’article 1er.
Sans discussion commune, on arriverait donc, par un jeu de taquet, à une situation où un certain nombre de points des amendements ne seraient pas traités, ou sembleraient l’être sans avoir été discutés : plusieurs collègues ayant déposé des amendements ne pourraient pas défendre leur point de vue.
La complexité de nos travaux provient donc de la complexité des rédactions des amendements. Elles associent souvent un ensemble d’alinéas qui, en apparence, peuvent sembler séparer, mais qui, à y regarder de plus près, sont en fait mêlés.
J’espère vous avoir éclairés quant aux intentions et aux choix du Bureau, qui applique le règlement scrupuleusement.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 13 est présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 155 rectifié est présenté par Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Kern.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 9, première phrase
Remplacer les mots :
relevant des ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur
par les mots :
publics d’enseignement supérieur
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 13.
M. Fabien Gay. J’entends bien ce que vous dites, madame la présidente : cette organisation des débats résulte de l’application de notre règlement. Mais, je vous l’avoue, j’ai du mal à suivre la discussion politique que nous avons. Car ici, au Sénat, c’est bien de la politique que nous faisons !
Beaucoup de choses sont en train de se jouer, y compris par des amendements déposés par mes collègues appartenant à d’autres groupes. On peut ne pas être d’accord, mais j’ai envie de débattre avec eux. Or je ne me rappelle même plus ce dont on traitait avec le premier amendement. C’est impossible à suivre !
Mme Samia Ghali. Il a raison !
M. Fabien Gay. J’entends bien que les alinéas sont mêlés les uns aux autres ; mais ce que vient de présenter Pierre Ouzoulias n’a rien à voir avec ce que je vais présenter maintenant.
Madame la ministre, j’y insiste, je ne sais pas comment vous pourrez répondre à toutes celles et tous ceux qui prendront la parole dans cette discussion commune.
M. Fabien Gay. En tout cas, je vous souhaite bon courage…
J’en viens à cet amendement, qui a pour objet d’élargir le dispositif au-delà du MESRI, le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Je vais le présenter dans la minute trente qu’il me reste, et on va continuer à faire de la politique, je vous le dis !
Le passage d’Admission post-bac à Parcoursup doit permettre d’avancer vers l’unification de l’enseignement supérieur.
S’il ne s’agit pas de remettre en cause le principe des cotutelles, développées depuis plusieurs décennies, il convient de s’assurer, par souci de transparence, que la plateforme de préinscription prend en compte l’ensemble de l’offre de formation disponible. C’est à cette fin qu’a été rédigé l’alinéa 27 de ce texte.
Toutefois, reste un domaine dans lequel l’inégalité de fait s’applique : le pouvoir de décision et de contrôle dont dispose l’État pour la détermination des capacités d’accueil. Aussi, le présent amendement vise à assurer un renforcement de la tutelle pour les établissements placés sous tutelle des ministères autres que l’éducation nationale ou l’enseignement supérieur. Je pense tout particulièrement au ministère de la culture, avec ses 32 500 étudiants, au ministère de la santé, avec près de 88 000 étudiants, et au ministère de l’agriculture, avec 16 000 étudiants.
De fait, afin d’assurer un plus grand choix d’orientation pour les jeunes, il convient, d’une part, de les informer le plus largement possible quant à l’offre de formation du supérieur et, d’autre part, d’ouvrir un maximum de places pour permettre une orientation choisie et non subie.
Ainsi, nous proposons, avec le présent amendement, de graver cet engagement dans le marbre législatif : que tous les établissements d’enseignement supérieur concourent à la réussite des étudiants et s’inscrivent dans le cadre de l’article L. 612-3 du code de l’éducation.
Mme la présidente. Monsieur Gay, je ne crois pas que l’on puisse dire que le règlement du Sénat ne permet pas le débat politique.
Je rappelle que la commission peut refuser la discussion commune. Mais je reconnais que, dans le cas présent, la commission a sans doute été prise de court par le dépôt tardif de cet amendement du Gouvernement. Traitant de plusieurs alinéas, il a imposé de regrouper des amendements qui n’étaient pas en discussion commune à l’origine.
Mme Françoise Laborde. C’est vrai !
Mme la présidente. Je ne considère pas que cette situation soit dramatique. Je me rappelle avoir pris part au débat consacré au projet de loi Travail, dit « El Khomri ». Au total, 250 amendements avaient alors été examinés en discussion commune. Or on ne peut pas prétendre qu’il n’y a pas eu de discussion politique sur ce texte de loi au Sénat.
Aussi, je vous propose d’en finir avec l’idée selon laquelle on chercherait à éviter le débat. Avec cette procédure, c’est précisément la protection du débat qui est recherchée. Peut-être faudrait-il surtout qu’à l’avenir la commission dispose le plus tôt possible de l’ensemble des amendements, afin de pouvoir organiser la discussion au mieux.
Mme Jocelyne Guidez. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 155 rectifié.
Mme Colette Mélot. Force est de le reconnaître, se limiter aux ministères chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur est assez réducteur. Je peux vous donner des cas précis.
En 2016, 87 892 étudiants étaient inscrits dans des instituts de formation en soins infirmiers relevant du ministère de la santé. En 2017, 32 544 étudiants étaient inscrits dans des établissements relevant du ministère chargé de la culture. D’autres exemples pourraient encore être apportés.
Il est donc nécessaire d’élargir le domaine considéré aux établissements publics d’enseignement supérieur.
Mme la présidente. L’amendement n° 109 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Remplacer les mots :
dialogue avec
par les mots :
proposition de
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Je tiens à dire en préalable qu’il n’est pas du tout dans notre esprit de mettre en cause le règlement du Sénat. Je veux simplement souligner que tous les amendements que nous examinons ici sont très importants. Non seulement les dispositions dont il s’agit ne correspondent pas aux mêmes enjeux de ce projet de loi, mais elles pourraient exiger, de notre part, une réaction en explication de vote. À ce titre, je rejoins M. Gay : on a un peu de mal à s’y retrouver parmi les différents positionnements politiques.
Je le répète, je ne remets pas en cause l’application du règlement. Mais cette discussion commune est difficile à suivre pour nous : de vrais débats sont nécessaires, car, en la matière, ce sont des lignes très importantes qui se dégagent.
Le présent amendement vise à revenir sur une disposition introduite dans le projet de loi sur proposition de notre rapporteur, en commission, au Sénat.
Le texte initial prévoyait que le recteur arrêtait les capacités d’accueil des formations sur proposition des chefs d’établissement. À nos yeux, il s’agissait là d’une position équilibrée.
Les chefs d’établissement, qui, par leur formation, ne maîtrisent pas nécessairement des réalités comme le rapport de l’offre et de la demande ou le taux de réussite, peuvent suggérer aux recteurs de maintenir ou de modifier les capacités d’accueil dont ils disposent.
Nous considérons que le recteur, qui est le représentant de l’État dans l’académie, décide ensuite en connaissance de cause et en tenant compte des paramètres nationaux. C’est en prévoyant un dialogue entre le recteur et les chefs d’établissement pour fixer les capacités d’accueil que le processus peut s’engager.
Dans la rédaction votée en commission, le dispositif est beaucoup moins encadré. Or, comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, nous souhaitons revenir à la formulation précédente : le recteur fixe la capacité d’accueil sur proposition du directeur ou du président de l’établissement. En effet, celui-ci doit être le garant de l’équilibre du système. Je le répète, car il s’agit là d’un enjeu très important et d’un point de divergence entre beaucoup d’entre nous dans cet hémicycle. J’aurais aimé que nous puissions développer ce point.
Mme la présidente. Chère collègue, je tiens à vous rassurer : les amendements seront mis aux voix séparément. À ce moment-là, chacun sera libre de prendre la parole pour expliquer son vote.
Comme tous le savent ici, les explications de vote permettent aux représentants de chaque groupe de répondre aux arguments avancés par les représentants des autres groupes. Vous aurez donc tout loisir d’approfondir le débat si vous le jugez nécessaire.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 32 est présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 111 rectifié est présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 133 rectifié est présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 9, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 32.
M. Pierre Ouzoulias. Avec cet amendement, nous formulons une nouvelle réserve compte tenu de ce que pourraient être les métiers de demain.
Je tiens à rappeler une statistique datant des années cinquante et soixante : 80 % des comptables exerçant à cette époque n’avaient pas fait d’études de comptabilité. Simplement, grâce au parcours qu’elles avaient suivi, ces personnes disposaient d’une culture générale suffisante pour s’orienter ensuite vers les postes que leur offrait le marché de l’emploi.
Vous imaginez bien que, aujourd’hui, compte tenu de la vitesse vertigineuse à laquelle les métiers évoluent, la nécessité de disposer d’un socle de formation commun est d’autant plus impérative. Je ne conçois pas que l’on puisse réduire ce socle : ce n’est vraiment pas dans l’intérêt des étudiants.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour présenter l’amendement n° 111 rectifié.
Mme Sylvie Robert. Il s’agit là aussi d’un point très important : le fameux « adéquationnisme », en vertu duquel on mesurerait les capacités d’accueil d’un établissement en fonction de la réalité du bassin socio-économique local.
Je tiens à dire une chose : les universités connaissent le tissu économique local. Mais, faire de l’« adéquationnisme », c’est nier la nature même de l’université. L’université n’est pas là pour répondre aux besoins exprimés, par exemple, par les entreprises. Elle est là pour élever le niveau. Elle est là pour garantir des niveaux de qualification permettant aux jeunes de disposer des outils nécessaires pour construire leur parcours professionnel.
En outre, il est extrêmement important de dire qu’on ne peut pas coller à la réalité d’un bassin socio-économique local. Bien sûr, nous ne sommes pas naïfs, nous savons bien qu’un certain nombre d’emplois, dans différents métiers, ne sont pas pourvus et que les entreprises recherchent divers profils qui, aujourd’hui, ne sont pas en nombre suffisant. Mais faisons attention à ne pas nier la nature et la valeur même de l’université tout entière.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 133 rectifié.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement étant identique aux deux précédents, je vous ferai grâce de sa présentation. Je prendrai la parole en explication de vote, si je le juge nécessaire.
Mme la présidente. L’amendement n° 134 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Remplacer les mots :
les taux de réussite et d’insertion professionnelle observés pour chacune des formations
par les mots :
le nombre de vœux formulés de l’année n-1 dans chaque filière
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Dans la suite logique de mes précédents propos, je vous propose, avec le présent amendement, que la modification des capacités d’accueil évolue en fonction du nombre de vœux formulés l’année précédente.
Il est fondamental d’accroître les moyens dont disposent les formations en tension pour permettre un renforcement de leurs capacités d’accueil conformément aux besoins, c’est-à-dire aux vœux des candidats. En effet, pour un parcours réussi, mieux vaut une orientation choisie qu’une orientation subie.
L’objectif de la nouvelle procédure d’affectation est d’assurer une gestion des flux en vue de réorienter les candidats sans affectation vers les formations où des places sont disponibles.
Il est intéressant de le souligner : si les filières scientifiques et économiques sont moins demandées, c’est parce que la concurrence avec les filières sélectives est rude. Or les formations les plus demandées sont celles que l’on ne retrouve pas dans les filières sélectives : STAPS, droit, psychologie et médecine.
Tel est l’objet du présent amendement, qui tend à renforcer les capacités d’accueil là où c’est nécessaire.
Mme la présidente. L’amendement n° 135 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Remplacer les mots :
les taux de réussite et d’insertion professionnelle observés pour chacune des formations
par les mots :
l’évolution du nombre de bacheliers
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Le volet financier du plan Étudiants demeure insuffisant par rapport au dynamisme démographique auquel devront faire face les universités, avec l’arrivée des étudiants nés au début des années 2000. En tout, 22 000 places supplémentaires ont été promises pour les filières en tension, dont 3 000 en BTS, alors que 30 000 étudiants supplémentaires par an sont attendus. Or, si les moyens ne suivent pas le dynamisme démographique, la sélection consacrée par le présent projet de loi sera fortement aggravée. Elle deviendra, dès lors, éliminatoire.
La ventilation d’étudiants de plus en plus nombreux dans les formations non demandées contribuera à briser les vocations des candidats, qui subiront les effets d’un sous-investissement de l’État dans l’enseignement supérieur. Je ne pense pas qu’une telle politique puisse améliorer la réussite en licence.
Aussi, le présent amendement tend à déterminer la modification des capacités d’accueil en fonction de l’évolution du nombre de bacheliers.
Mme la présidente. L’amendement n° 53 rectifié quater, présenté par MM. Lafon, Delcros, Laugier et Bonnecarrère, Mme Billon, MM. Henno, Kern et Canevet, Mmes Dindar, Goy-Chavent et Vullien, MM. Longeot et Poadja, Mmes Vermeillet et de la Provôté, MM. Capo-Canellas, Cigolotti, Médevielle, Détraigne et Cazabonne, Mmes Sollogoub et Gatel et MM. Janssens et Mizzon, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Remplacer les mots :
les taux de réussite et d’insertion professionnelle observés
par les mots :
l’évolution des débouchés professionnels observée
La parole est à M. Laurent Lafon.
M. Laurent Lafon. Pour notre part, nous sommes très favorables à ce que les capacités d’accueil tiennent compte des débouchés professionnels à l’issue des formations suivies. Cependant, la rédaction actuelle nous paraît très ambiguë.
Je ne suis pas sûr que les différentes filières soient à même d’établir « les taux de réussite et d’insertion professionnelle ». Et, même si c’était le cas, il resterait un problème de définition. Selon quels critères estime-t-on qu’un étudiant est inséré professionnellement ? Parce qu’il obtient un travail au bout de six mois, ou parce qu’il a toujours le même travail au bout de trois ou de cinq ans ? Tout cela me paraît assez complexe à quantifier. Aussi, nous préférons une rédaction mentionnant « l’évolution des débouchés professionnels ».
M. Claude Kern. Tout à fait !
Mme la présidente. L’amendement n° 14, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’autorité académique veille d’une part à ce que les capacités d’accueil proposées par les établissements soient supérieures au nombre d’élèves inscrits en terminale dans l’académie et d’autre part à ce que les capacités d’accueil proposées par formation soient supérieures aux étudiants inscrits en licence 1 sur l’année N.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Ce que nous demandons, par cet amendement, c’est que les capacités d’accueil soient supérieures au nombre d’élèves de terminale.
La commission des finances a déclaré irrecevables cinq ou six de nos amendements au titre de l’article 40, mais celui-là a subsisté…
M. David Assouline. L’article 40, c’est une vraie loterie !
M. Pierre Ouzoulias. J’en conclus que la commission des finances, qui a une très bonne vision du budget de l’État, approuve notre démarche et considère que, sur les crédits de l’enseignement supérieur, il est possible de budgéter la mesure que nous préconisons.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Pierre Ouzoulias. Aussi, je ne doute pas que Mme la ministre acceptera d’augmenter les capacités d’accueil à l’université.
Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
« VII. – L’autorité académique propose au candidat domicilié dans la région académique auquel aucune proposition d’admission n’a été faite dans le cadre de la procédure nationale de préinscription une inscription dans une formation en tenant compte de son domicile et de la situation de sa famille. Cette proposition fait l’objet d’un dialogue préalable avec le candidat. Avec l’accord de ce dernier, l’autorité académique prononce son inscription dans la formation proposée.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Nous l’avons déjà dit, il nous semble pour le moins ardu de présupposer de la compétence de jeunes lycéens et lycéennes, alors même que les cursus du secondaire et du supérieur sont différents dans leurs contenus et leur pédagogie.
Dans les faits, la réforme proposée par le Gouvernement exige, avant l’entrée à l’université, de posséder des compétences qui sont enseignées en première année de licence.
Pascal Maillard, enseignant depuis vingt-cinq ans, l’a pointé dans la presse : les attendus édictés par le ministère en décembre dernier excluraient, en cas d’application stricte, les deux tiers des étudiants de première année de lettres qu’il côtoie au quotidien, justement parce que ces attendus sont, pour une partie non négligeable, des compétences demandées en fin de L1, voire en fin de L3.
Dans ce cadre, exiger du rectorat qu’il analyse plus finement que les universitaires les compétences des candidats et candidates recalés pose problème.
Pis, le présent texte ne laisse aucune place à ce que souhaiteraient ces jeunes. Avouez qu’il est un peu cocasse de faire toute la promotion sur les jeunes, acteurs de leur orientation, sans leur laisser leur mot à dire face aux propositions que le rectorat leur fera en cas de refus de tous leurs vœux ! Dès lors, le choix final revenant aux jeunes est d’un cynisme sans nom. Pensez-vous vraiment que les jeunes iront refuser une filière même s’ils n’ont aucune appétence pour celle-ci et qu’ils préféreront le chômage ?
Tel qu’il est prévu aujourd’hui, le dispositif souffre d’un autre manque important : l’absence totale de prise en compte des territoires de vie de ces candidats et candidates. De fait, une question se pose ici clairement, celle de la mobilité des jeunes. Cette dernière ne peut être que volontaire, et non subie, d’autant plus dans le contexte fortement précarisé que connaissent les dix-huit–vingt-cinq ans.
L’aide à la mobilité mise en place dans le cadre de la sélection à l’entrée en master a montré toutes ses limites. Elle est clairement insuffisante : elle est chiffrable à hauteur de 1 000 euros pour les non-boursiers et une revalorisation du point d’éloignement pour les boursiers. Elle ne permet même pas de couvrir un déménagement et la prise en charge d’un appartement dans une autre ville. Enfin, elle est inefficace, car peu promue et régulièrement demandée dans un délai très serré, la mobilité étant souvent le dernier recours des étudiants en cas d’impossibilité d’inscription dans leur académie d’origine.
Mme la présidente. L’amendement n° 116 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le candidat auquel aucune proposition d’admission n’a été faite dans le cadre de la procédure nationale de préinscription se voit proposer une inscription dans au moins deux formations tenant compte, d’une part, des caractéristiques des formations dans lesquelles il n’a pas été admis et, d’autre part, des acquis de sa formation et de ses compétences. À l’issue d’un dialogue entre le candidat et les autorités académiques compétentes, l’autorité académique compétente prononce l’inscription du candidat dans la formation pour laquelle il a opté. Des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou un parcours de formation personnalisé peuvent être proposés au candidat.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement vise à repenser la procédure de second tour en cas de non-affectation d’un candidat à l’une des dix formations demandées à l’issue de la procédure d’orientation, d’information et d’inscription. Il s’agit du fameux « en attente » : quand le jeune n’a pas obtenu ce qu’il souhaitait, il est déclaré « en attente ».
Tout d’abord, nous souhaitons placer cette procédure de second tour dans un cadre national, comme celle du premier tour. Dans le cadre de cette réforme, qui va renforcer le rôle du recteur, nous voulons faire en sorte que le jeune ait, in fine, une place dans l’enseignement supérieur. Je pense, par exemple, au cas d’un jeune qui n’aurait pas trouvé ce qu’il souhaite dans son académie : il faudrait alors que le recteur du ressort puisse s’entretenir avec ses collègues des académies voisines pour trouver une place à ce jeune.
Ensuite, nous voulons aller au-delà d’une seule proposition de formation pour les jeunes. Le recteur doit proposer au moins deux formations, il pourrait même en proposer trois ou quatre. En fait, au terme d’un dialogue avec le recteur, le jeune doit se voir proposer une place dans l’enseignement supérieur. Il s’agit, là aussi, d’un sujet auquel nous tenons.
À mon sens, les conditions ne sont pas réunies dans le présent texte pour que la procédure aille à son terme. Nous, nous faisons confiance aux recteurs. Nous, nous faisons confiance au dialogue entre le recteur et le jeune. C’est pourquoi il faut aller plus loin que les conditions aujourd’hui fixées dans le présent texte, en donnant au recteur une possibilité d’action supérieure et en faisant en sorte que, même s’il faut solliciter les recteurs d’autres académies, le jeune puisse obtenir une formation qu’il aura souhaitée.
Vous le savez, dans le cadre de Parcoursup, il faut formuler dix vœux non hiérarchisés. Peut-être un jeune aura-t-il demandé, dans telle ou telle filière, une formation qu’il n’aura pas eue, mais qui sera disponible dans une autre académie. Le jeune doit avoir le dernier mot, et le recteur doit lui proposer quelque chose. Je le répète, il s’agit là pour nous d’un enjeu très important. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. L’amendement n° 188, présenté par M. Lafon, est ainsi libellé :
Alinéa 18, première phrase
Supprimer les mots :
domiciliés dans la région académique
La parole est à M. Laurent Lafon.
M. Laurent Lafon. Avec le présent amendement, nous défendons une vision un peu différente de cette procédure, qui est nécessairement spécifique : il s’agit en quelque sorte de faire du sur-mesure, de trouver une solution pour les bacheliers qui ne seraient pas encore affectés dans une filière d’enseignement supérieur.
Nous ne voyons pas très bien ce qu’apporte, dans la rédaction du présent article, la notion de « région académique » : elle pourrait justement induire que l’affectation ne dépend pas de la proximité du lieu d’habitation du jeune. Ainsi, cette affectation pourrait être relativement éloignée.
Selon nous, ôter la notion de « région académique » apporterait peut-être un peu plus de sérénité dans la mise en œuvre de cette procédure.
Mme la présidente. L’amendement n° 138 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 18, première phrase
Après le mot :
inscription
insérer les mots :
, au plus près de leurs choix initiaux,
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Les candidats de la plateforme Parcoursup doivent pouvoir obtenir l’assurance que leurs vœux d’orientation sont réellement pris en considération et qu’ils ne se verront pas proposer, en dernier recours, des formations qui ne les intéressent pas. D’ailleurs, je ne pense pas que ce soit là l’intention du Gouvernement.
Le présent amendement vise à retranscrire, dans ce projet de loi, une précision qui figure sur le site internet du ministère de l’éducation nationale : les propositions d’inscription à destination des candidats sans affectation sont faites au plus près de leurs choix initiaux. Cette mention garantit que l’esprit du présent texte ne sera pas contourné à l’avenir.
Mme la présidente. L’amendement n° 154 rectifié, présenté par Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Guerriau, Fouché, Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Kern, est ainsi libellé :
Alinéa 18, première phrase
Après la première occurrence du mot :
formation
insérer les mots :
, parmi celles dispensées dans les établissements publics d’enseignement supérieur ou dans un des établissements relevant du chapitre II du titre III du livre VII du présent code,
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à étendre l’accès aux formations dispensées par d’autres ministères que les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.
J’ai déjà argumenté en ce sens en proposant de modifier l’alinéa 9. Je réitère ma demande au titre de l’alinéa 18. Cette disposition permettra l’accès des étudiants aux formations du ministère de la culture ou du ministère de la santé.
Mme la présidente. L’amendement n° 137 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 18, première phrase
Après les mots :
d’autre part,
Insérer les mots :
de leur projet de formation,
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Le projet de loi définit une procédure réservée aux candidats sans affectation. L’autorité académique proposera à ces derniers une inscription dans une formation en cohérence avec leurs acquis et leurs compétences. Le fait que le candidat n’ait pas été retenu dans la formation de son choix ne signifie pas qu’il doive accepter tout et n’importe quoi !
Le projet de formation doit être au cœur de la proposition qui est faite au candidat. Les futurs étudiants craignent d’ores et déjà de relever de cette partie de la procédure qui intervient très tard, en septembre, soit au moment de la rentrée. Il est donc indispensable de ne pas leur proposer une orientation à l’opposé de leurs vœux initiaux.
Dans le respect, non seulement du parallélisme des formes, mais surtout de l’orientation choisie par le candidat, le présent amendement vise également à introduire un critère fondé sur son projet de formation. Ce dernier figure parmi les éléments à prendre en compte lors du classement des candidats dans les filières en tension.
Mme la présidente. L’amendement n° 139 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 18, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le candidat dispose d’un délai de sept jours à compter de la notification de la proposition d’inscription pour communiquer sa réponse.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Les lycéens craignent dès à présent de faire partie des candidats sans affectation, ceux qui ne disposeront pas d’un véritable choix, ceux qui ne bénéficieront que d’un délai extrêmement court et anxiogène : un seul jour pour décider s’ils acceptent ou s’ils refusent la formation proposée par l’autorité académique.
Les candidats qui ne disposent pas d’un accès permanent à leur boîte mail risquent d’être pénalisés. Je pense en particulier à ceux qui résident dans nos territoires ruraux, où la couverture numérique est souvent défaillante.
Avec le présent amendement, nous proposons donc d’accorder aux candidats un délai de sept jours à compter de la notification de la proposition d’inscription. Ce laps de temps n’est pas excessif au regard de l’importance de la décision.
Mme Françoise Laborde. Tout à fait !
Mme la présidente. L’amendement n° 166, présenté par M. Lafon, Mmes Billon et de la Provôté, MM. Kern et Laugier, Mme Vérien et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18, dernière phrase
1° Remplacer les mots :
de ces derniers
par les mots :
du candidat
2° Compléter cette phrase par les mots :
, laquelle peut être subordonnée, par le président ou le directeur de l’établissement concerné, à l’acceptation, par le candidat, du bénéfice des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé nécessaires à sa réussite.
II. – Alinéa 19
1° Dernière phrase
Supprimer les mots :
et celui du président ou du directeur de l’établissement concerné
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette inscription peut être subordonnée, par le président ou le directeur de l’établissement concerné, à l’acceptation, par le candidat, du bénéfice des dispositifs d’accompagnement pédagogique ou du parcours de formation personnalisé nécessaires à sa réussite.
La parole est à M. Laurent Lafon.
M. Laurent Lafon. On le voit bien, ce dialogue à trois entre le président ou le directeur de l’établissement, le recteur et l’étudiant n’est pas si évident que cela, en tout cas tel qu’on le lit actuellement.
À travers cet amendement, nous proposons donc d’établir un consensus : cette procédure, peut-être un peu complexe, parce que novatrice, doit se passer de la meilleure façon possible. Plutôt que de donner un pouvoir de blocage au président ou au directeur de l’établissement, mieux vaut, selon nous, l’associer davantage en amont et restaurer en faveur du recteur le pouvoir de proposition à l’étudiant. In fine, c’est ce dernier qui décidera d’accepter ou non la proposition qui lui sera faite.
Mme la présidente. L’amendement n° 203, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18, dernière phrase
Remplacer les mots :
de ces derniers
par les mots :
du candidat
II. – Alinéa 19, seconde phrase
Supprimer les mots :
et celui du président ou du directeur de l’établissement concerné
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Avec cet amendement, le Gouvernement entend trouver une solution de compromis.
Nous sommes très attachés à ce que les recteurs conservent la capacité d’inscrire les étudiants, dans les établissements, au stade du premier cycle. Cette capacité figure d’ores et déjà dans la loi. Reste que nous avons entendu, à travers un certain nombre d’amendements, qu’en vertu de l’autonomie des établissements il semblait anormal de ne pas faire mention d’une consultation des chefs d’établissement.
L’amendement vise donc à conserver une phase de dialogue préalable entre le recteur et le président ou le directeur de l’établissement. In fine, toutefois, le recteur est bien celui qui inscrira le candidat. Ce point est essentiel pour permettre au rôle régulateur de l’État de s’exercer sur des établissements qui, s’ils sont autonomes, relèvent néanmoins de la tutelle du ministère.
Mme la présidente. L’amendement n° 33, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 18, dernière phrase
Remplacer les mots :
de ces derniers
par les mots :
du candidat ou de la candidate
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. La discussion ayant retrouvé de la cohérence, je vais pouvoir répondre directement à Mme la ministre. Notre amendement arrive donc à point nommé.
Quand un dialogue est fondé sur la raison partagée, on ne peut pas imaginer qu’il ne débouche pas sur un accord réciproque. Cet amendement vise donc à préciser que l’accord « de ces derniers » englobe à la fois le candidat, le recteur et le chef d’établissement. Je ne peux concevoir un seul instant qu’un dialogue à un niveau aussi élevé n’emporte pas l’adhésion des candidats.
Mme la présidente. L’amendement n° 136 rectifié ter, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 18, dernière phrase
Remplacer les mots :
de ces derniers
par les mots :
du candidat
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Le projet de loi définit les contours d’une procédure réservée aux candidats sans affectation. L’autorité académique leur proposera une inscription dans une formation cohérente avec leur parcours.
La commission de la culture, de l’éducation et de la communication a ajouté la notion de « dialogue avec l’établissement d’enseignement supérieur ». Ce dernier est en effet à même de savoir si le candidat peut réussir dans la formation proposée. Toutefois, la prise de décision doit revenir, à notre sens, à l’autorité académique, garante du principe de l’accès de tous à l’enseignement supérieur.
Cet amendement ne va pas à l’encontre de la logique d’autonomie des universités, laquelle, comme le rappelle le Conseil d’État dans son avis du 16 novembre 2017 relatif au présent projet de loi, n’est pas un principe à valeur constitutionnelle. Cette logique est d’ailleurs parfaitement respectée au stade de la définition des prérequis, de la détermination des capacités d’accueil et du choix des candidats dans les filières en tension.
Mme la présidente. L’amendement n° 80, présenté par M. Malhuret, Mme Mélot et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 18, dernière phrase
Remplacer les mots :
ces derniers
par les mots :
ces deux parties
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement rédactionnel vise à formaliser le principe d’autonomie des universités, consacré par la loi du 10 août 2007, tout en prenant en considération les deux parties, à savoir le candidat et le président ou le directeur de l’établissement concerné.
Mme la présidente. L’amendement n° 18, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Rédiger ainsi cet alinéa :
« VII bis. – Lorsque la situation d’un candidat justifie, eu égard à des circonstances exceptionnelles tenant à son état de santé, à son handicap, à un contrat de travail ou à ses charges de famille, son inscription dans un établissement situé dans une zone géographique déterminée, l’autorité académique, saisie par ce candidat, procède au réexamen de sa candidature. En tenant compte de la situation particulière que l’intéressé fait valoir, des acquis de sa formation antérieure et de ses compétences ainsi que des caractéristiques des formations, l’autorité académique prononce, avec son accord, son inscription dans une formation du premier cycle.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Cet amendement vise à élargir un peu les cas de situation exceptionnelle, qui comprennent, aujourd’hui, l’état de santé, le handicap et les charges de famille, en y ajoutant le contrat de travail. La moitié des étudiants sont malheureusement concernés. Or nous souhaitons qu’un étudiant ayant un contrat de travail ne puisse pas en être dépossédé en étant inscrit dans une autre académie.
Mme la présidente. L’amendement n° 91 rectifié ter, présenté par M. Savin, Mmes Lavarde, Puissat et A.M. Bertrand, MM. Grosdidier, Laugier, Todeschini, Grand, Bonhomme et Chaize, Mmes Eustache-Brinio et Morhet-Richaud, MM. Revet et D. Laurent, Mme Duranton, M. Poniatowski, Mmes de Cidrac, Estrosi Sassone et Deroche, M. Gremillet, Mmes Chain-Larché et Imbert, MM. Leleux et Le Gleut, Mme Malet, MM. Daubresse, Piednoir, Hugonet, Mandelli et B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Raison, Perrin et Brisson, Mme Berthet, MM. Cuypers et Paccaud, Mmes Bonfanti-Dossat, Delmont-Koropoulis et Di Folco, MM. Rapin, Vogel et Bazin, Mmes Gruny, Thomas et Deromedi, M. Carle, Mme Jouve, M. Paul, Mme Micouleau, MM. Schmitz, Dufaut et Lefèvre, Mme Bories, MM. Cazabonne, H. Leroy, Buffet et Panunzi, Mmes L. Darcos, Lamure et Billon, M. Kern, Mme Guillotin et MM. Gold, Longuet, Devinaz et Husson, est ainsi libellé :
Alinéa 19, première phrase
Après les mots :
à son handicap
insérer les mots :
, à son inscription en tant que sportif de haut niveau sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 221-2 du code du sport
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Le Sénat a adopté hier à l’unanimité le projet de loi relatif à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Mon amendement a pour objet de soutenir ces jeunes sportifs de haut niveau, qui vont, dans les prochaines années, porter les couleurs de notre pays dans les différentes compétitions, en leur garantissant la possibilité de suivre un cursus universitaire et un parcours professionnel. Nous proposons ainsi de conférer, dans le cadre du processus de recours, un pouvoir d’appréciation au recteur pour prendre en compte les situations particulières, notamment celle des sportifs de haut niveau inscrits sur la liste ministérielle et qui souhaitent se rapprocher de leur lieu d’entraînement.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 34 est présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 187 rectifié bis est présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 19, seconde phrase
Supprimer les mots :
et celui du président ou du directeur de l’établissement concerné
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 34.
M. Pierre Ouzoulias. Si j’ai bien compris, notre amendement est satisfait par celui de Mme la ministre tendant à confier en dernier recours la décision au recteur, c’est-à-dire à l’État. Il aurait sans doute été plus simple, ce qui aurait évité toutes ces discussions, que le Gouvernement se rallie à notre amendement… (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 187 rectifié bis.
Mme Françoise Laborde. Comme j’ai la chance de clôturer cette longue série d’amendements en discussion commune, je vais me permettre, à mon tour, une petite remarque sur le ton humoristique : dans la mesure où mon 136 plus mon 187 égalent votre 203, madame la ministre, nous aurions pu nous éviter tous ces amendements…
7
Candidatures à deux éventuelles commissions mixtes paritaires
Mme la présidente. J’informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein, d’une part, de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte commun sur le projet de loi relatif à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et, d’autre part, de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte commun sur le projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants, en cours d’examen.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. David Assouline.)
PRÉSIDENCE DE M. David Assouline
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
8
Orientation et réussite des étudiants
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. le président. Je vous rappelle que nous avons achevé la présentation des amendements nos 206 à 187 rectifié bis, faisant l’objet d’une discussion commune.
Nous en sommes parvenus aux avis de la commission et du Gouvernement sur ces différents amendements.
Quel est donc l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. L’amendement n° 206 du Gouvernement tend à permettre une meilleure prise en compte de la situation particulière des candidats en situation de handicap ; la commission y est favorable.
L’amendement n° 8, présenté par M. Ouzoulias, vise à supprimer le « oui, si ». Ce dispositif me semble pourtant offrir un gage de réussite. Des modules de remédiation existent déjà et sont proposés aux étudiants, mais ceux qui rencontrent le plus de difficultés, bien souvent, ne les utilisent pas. La mise en place de modules adaptés sur une année complète nous semble, dès lors, intéressante. L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement, de même que sur l’amendement n° 9, qui vise à rendre ces dispositifs d’accompagnement facultatifs et à supprimer, pour la détermination des accompagnements proposés, la prise en compte du profil du candidat – ses acquis, ses compétences – au profit des caractéristiques de la formation dont il sort.
L’amendement n° 106 rectifié, présenté par Sylvie Robert, qui concerne également la procédure du « oui, si », vise à supprimer le caractère prescriptif des dispositifs d’accompagnement personnalisé. Il pose également la question de l’éventuelle validation des modules supplémentaires. Cette question est intéressante, et Mme la ministre pourra peut-être y répondre. En attendant, l’avis de la commission est défavorable.
L’amendement n° 57 rectifié bis, présenté par M. Lafon, qui est relatif au caractère obligatoire des dispositifs d’accompagnement, me paraît intéressant. En effet, ces derniers peuvent être prescrits par l’établissement et, dans ce cas, devront être acceptés par l’étudiant pour que son inscription soit validée. Le remplacement de « peut » par « doit » me semble toutefois poser une difficulté, car il pourrait laisser penser que des dispositifs d’accompagnement pédagogique sont obligatoirement prescrits, ce qui n’est pas le cas. Une telle rédaction conduirait ainsi à inverser la logique en faisant du « oui, si » la règle et du « oui » l’exception. Nous sollicitons donc le retrait de cet amendement.
L’amendement n° 82 rectifié, présenté par Colette Mélot, tend à prendre en compte les stages effectués. Or cette disposition est déjà prévue. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 144 rectifié bis de Françoise Laborde vise à supprimer le « oui, si », lequel, nous en sommes persuadés, est le gage de réussite des étudiants. De plus, les dispositifs de remédiation seront discutés entre l’étudiant et le directeur d’études. L’avis est donc défavorable sur cet amendement, de même que sur l’amendement n° 145 rectifié bis, qui tend à rendre facultatif le parcours de formation personnalisé. Son caractère obligatoire nous semble être, au contraire, un gage de succès.
L’amendement n° 10, présenté par M. Ouzoulias, concerne la nature des dispositifs d’accompagnement. Certains étudiants ont besoin de ces quatre années d’études ; ce n’est pas leur faire offense que de leur permettre de suivre leur licence en quatre ans. Par conséquent, l’avis est défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 11, l’avis est défavorable. C’est au HCERES qu’il reviendra d’évaluer ces dispositifs d’accompagnement.
L’amendement n° 65 rectifié, présenté par M. Grand, s’attache aux conséquences du refus d’un « oui, si ». J’en sollicite le retrait, parce qu’il ne me semble pas nécessaire de surcharger la loi de mentions inutiles. Le texte du projet de loi me semble suffisamment clair. En outre, l’avis du Conseil d’État, qui figure dans les travaux préparatoires, contient déjà cette précision.
Concernant l’amendement n° 83, présenté par Mme Mélot, qui porte sur le même sujet, j’en sollicite le retrait pour les mêmes raisons.
L’amendement n° 36, présenté par M. Ouzoulias, vise à supprimer la règle de fixation des capacités d’accueil. Cette proposition revient sur l’un des apports de notre commission : la prise en compte des débouchés professionnels dans la définition des capacités d’accueil. L’avis est donc défavorable.
La commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 160 rectifié, présenté par Stéphane Piednoir, qui est relatif aux capacités d’accueil et à la procédure rectorale concernant les EESPIG, et sur les amendements identiques nos 13 et 155 rectifié, qui ont trait à la définition des capacités d’accueil par le recteur pour tous les établissements.
S’agissant de l’amendement n° 109 rectifié de Sylvie Robert, il me semble que les établissements doivent pouvoir faire valoir leurs arguments auprès du recteur dans un véritable « dialogue » et pas seulement en émettant une « proposition ». Cela n’empêchera pas le recteur de s’écarter de leur demande pour faire prévaloir l’intérêt général. L’avis est donc défavorable.
L’adoption des amendements identiques nos 32, présenté par Pierre Ouzoulias, 111 rectifié, présenté par Sylvie Robert, et 133 rectifié, présenté par Françoise Laborde, qui visent à supprimer la règle de détermination des capacités d’accueil, reviendrait sur l’un des apports majeurs de notre travail en commission. Monsieur Ouzoulias, vous avez évoqué les comptables des années soixante. Or il ne s’agit pas de fermer systématiquement des places – 30 000 candidats supplémentaires se pressent chaque année devant les portes de l’enseignement supérieur –, mais, au contraire, d’en ouvrir en privilégiant les filières pour lesquelles il existe des débouchés, afin d’éviter d’envoyer toujours plus d’étudiants dans des voies sans issue. L’avis est donc défavorable.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 134 rectifié, présenté par Mme Laborde, qui vise à faire évoluer les capacités d’accueil en fonction de la demande des étudiants. De mon point de vue, cette proposition est dangereuse en ce qu’elle conduirait à envoyer des milliers d’étudiants vers des voies dépourvues de débouchés professionnels.
S’agissant de l’amendement n° 135 rectifié, présenté par Mme Laborde, je suis d’accord pour que les capacités d’accueil tiennent compte de l’évolution du nombre de bacheliers. En revanche, je ne partage pas le souhait de ses auteurs de supprimer le lien entre capacités d’accueil et débouchés professionnels.
L’amendement n° 53 rectifié quater, présenté par M. Lafon, me semble très intéressant, mais son objet est identique aux dispositions déjà adoptées par la commission s’agissant des modifications de capacités d’accueil. Mon cher collègue, je tiens à vous féliciter pour cet amendement… mais je vous demande de le retirer ! (Rires.) Vous en conviendrez, c’est toujours mieux que de subir un de-ashi-baraï ! (Sourires.)
L’amendement n° 14, présenté par M. Ouzoulias, concerne toujours les capacités d’accueil. La commission y est défavorable. En effet, tous les élèves de terminale n’ont pas vocation à poursuivre des études supérieures ; il serait dangereux, de surcroît, d’ouvrir encore plus de places dans des formations qui, même si elles sont plébiscitées par les inscriptions, n’offrent pas de débouchés professionnels.
L’avis est également défavorable sur l’amendement n° 17 rectifié, parce que l’établissement n’aurait plus son mot à dire. Le recteur ne devrait plus tenir compte, dans le choix de la formation qu’il va lui proposer, du profil du candidat, mais de son domicile et de sa situation de famille. Cela me semble intenable.
L’amendement n° 116 rectifié, présenté par Mme Robert, est porteur de plusieurs innovations dans la procédure de proposition d’une formation au candidat malheureux. Toutefois, il me semble important que l’établissement ait son mot à dire. L’avis est donc défavorable.
Je suis favorable, à titre personnel, à l’amendement n° 188, présenté par M. Lafon, mais la commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
L’amendement n° 138 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, tend à ce que le recteur fasse une proposition « au plus près des choix initiaux » du candidat. La commission lui a préféré l’amendement n° 137 rectifié bis, que vous avez également présenté, ma chère collègue, et qui intègre le projet de formation. Par conséquent, j’émets un avis défavorable.
Sur l’amendement n° 154 rectifié, présenté par Mme Mélot, la commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 137 rectifié bis.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Il semble en effet intéressant que le recteur prenne en compte, en plus des compétences et des acquis de la formation antérieure du candidat, son projet de formation.
La commission est, en revanche, défavorable à l’amendement n° 139 rectifié bis, qui vise à octroyer sept jours au candidat pour répondre à la proposition qui lui est faite lors de la procédure rectorale. Un tel délai ne semble pas adapté à un dispositif qui doit rester très souple et aborder les situations au cas par cas, dans le dialogue entre le candidat et le recteur.
L’amendement n° 166, présenté par M. Lafon, vise à supprimer le « droit de veto » de l’établissement, dont l’accord me semble pourtant indispensable pour garantir la réussite de l’étudiant. J’en demande donc le retrait.
L’amendement n° 203 du Gouvernement a pour objet de rétablir la compétence d’affectation du recteur. Nous sommes attachés au droit de veto de l’établissement. Dans le cadre de la LRU, il nous semble nécessaire que celui-ci ait la possibilité de donner son accord. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 33, présenté par M. Ouzoulias, vise également à supprimer l’accord de l’établissement. Ce serait revenir sur l’un des apports majeurs de notre travail en commission la semaine dernière. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 136 rectifié ter, présenté par Mme Laborde, tend à supprimer l’un des apports de la commission relatif au rôle de l’établissement dans la procédure rectorale. L’avis est donc défavorable.
Je demande le retrait de l’amendement n° 80, présenté par Mme Mélot. Le texte adopté par la commission semble suffisamment précis, alors que la rédaction qui est proposée par cet amendement pourrait semer le doute en visant deux parties. Le recteur et le candidat ?
L’amendement n° 18, présenté par M. Ouzoulias, a pour objet le réexamen de la candidature d’un étudiant titulaire d’un contrat de travail. Cette dimension de l’amendement est intéressante et pourrait recueillir une attention favorable de ma part, mais l’amendement tend également à supprimer l’apport de la commission, qui a réintroduit la nécessité de l’accord de l’établissement. L’avis est donc défavorable. J’en suis désolé, mon cher collègue.
L’amendement 91 rectifié ter, présenté par M. Savin, vise à étendre aux candidats sportifs de haut niveau figurant sur la liste ministérielle, ce qui est donc véritablement officiel, la possibilité d’être inscrits dans un établissement proche de leur lieu d’entraînement. L’avis est favorable.
Les amendements identiques nos 34 et 187 rectifié bis visent à supprimer l’accord de l’établissement, qui est l’un des apports majeurs issu des travaux de la commission. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. L’amendement n° 8 visant à supprimer la procédure de « oui, si », l’avis est défavorable. Le « oui, si » est ce qui va permettre d’accompagner les étudiants en fonction de leur diversité.
Sur l’amendement n° 106 rectifié, l’avis est défavorable. Aujourd’hui, des choses sont proposées aux étudiants. Malheureusement, ils se rendent compte trop tard que ces dispositifs sont nécessaires. C’est pour cela qu’il est très important de leur conserver un caractère prescriptif.
L’amendement n° 57 rectifié bis vise à expliciter le refus. Le Gouvernement en sollicite le retrait : l’avis du Conseil d’État a conclu sans ambiguïté que la formulation actuelle indiquait déjà que le refus du parcours personnalisé entraînait le refus d’inscription.
L’amendement n° 82 rectifié, qui vise à prendre en compte les stages effectués, est, pour moi, satisfait, puisque cette possibilité existe déjà. Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
L’amendement n° 144 rectifié bis vise à supprimer la possibilité d’imposer à l’étudiant un parcours de formation personnalisé. L’avis est défavorable sur cet amendement, tout comme sur l’amendement n° 145 rectifié bis, qui vise également à rendre facultatif l’accompagnement personnalisé.
Les dispositions que tend à introduire l’amendement n° 10 relèvent de la décision pédagogique des universités. L’avis est défavorable.
L’amendement n° 11 a pour objet de confier au ministère tuteur des établissements le contrôle de l’effectivité et de l’efficacité des dispositifs, ce qui est incompatible avec les dispositions de la loi de 2013 qui donnent aux établissements la possibilité d’accréditer leur parcours. L’avis est donc défavorable.
Les amendements nos 65 rectifié et 83 visent à sécuriser les décisions de refus. Le Conseil d’État ayant conclu sans ambiguïté sur ce point, je demande le retrait de ces amendements. À défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 36, les capacités d’accueil sont notamment déterminées en fonction des normes de sécurité fixées par les établissements. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 160 rectifié, il n’y a pas de tutelle des recteurs sur les établissements privés, même ceux d’intérêt général. Nous ne pouvons donc pas étendre la réforme sur les conditions d’admission dans le premier cycle de l’enseignement supérieur à l’ensemble des établissements. Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
S’agissant des amendements identiques nos 13 et 155 rectifié, le recteur n’a pas non plus d’autorité hiérarchique sur les établissements qui sont sous tutelle unique du ministère de l’agriculture ou de la culture. La très grande majorité des formations d’enseignement supérieur sont toutefois sous la double tutelle du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et du ministère de l’agriculture ou de la culture. On ne peut donc généraliser le dispositif pour quelques établissements qui ne dépendent pas des recteurs, tels que les conservatoires municipaux ou régionaux, mais on pourra bien sûr veiller à ce que tout le monde participe, si je puis dire, à l’affectation des étudiants. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Concernant l’amendement n° 109 rectifié, la notion de dialogue est importante, mais elle est déjà présente dans le texte en l’état. L’avis est donc défavorable.
Les auteurs de l’amendement n° 32 plaident pour une « augmentation du nombre d’enseignants, permettant un meilleur encadrement pédagogique ». Nous n’avons, dans l’absolu, ni problème d’enseignant ni problème de places, puisqu’il reste 130 000 places dans l’enseignement supérieur, dont plus de 110 000 dans les universités. Le problème est qu’elles ne sont pas là où les étudiants le souhaitent. C’est pourquoi nous avons été obligés d’en rajouter cette année. Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements identiques nos 32, 111 rectifié et 133 rectifié.
L’avis est défavorable sur l’amendement 134 rectifié, parce qu’on ne peut pas se fier au nombre de vœux formulés l’année n-1. Je vous rappelle que, dans trois ans, la démographie des établissements repartira à la baisse. Pour les mêmes raisons, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 135 rectifié. Les capacités d’accueil des établissements de l’enseignement supérieur ne peuvent dépendre du nombre de bacheliers, car celui-ci évolue. En termes de démographie, on est au sommet de la cloche, si je puis dire, et l’on va redescendre.
La rédaction que l’amendement n° 53 rectifié quater vise à introduire – l’évolution des débouchés professionnels – convient au Gouvernement, car elle est moins « adéquationniste » que la rédaction actuelle. Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
L’amendement n° 14 vise à calquer les capacités d’accueil sur le nombre d’étudiants inscrits. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, il reste des places disponibles dans l’enseignement supérieur. Cette rédaction entraînerait une diminution et non une augmentation des capacités d’accueil. L’avis est donc défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 17 rectifié, l’avis est défavorable. Le dialogue préalable est déjà prévu dans le projet de loi. Par ailleurs, cette rédaction ne permettrait pas d’obtenir la meilleure adéquation entre le projet, le profil de l’étudiant et les attentes de la formation.
Les auteurs de l’amendement 116 rectifié ont évoqué la situation des étudiants en attente entre le premier et le deuxième tour. Or le système ne fonctionne plus du tout comme cela : un étudiant en attente un jour peut ne plus être en attente le lendemain. Il est évidemment informé si les capacités d’accueil de l’établissement qu’il vise sont atteintes, mais, tant que ce n’est pas le cas, il y a potentiellement une place pour cet étudiant dans la formation qu’il souhaite.
Le nouveau système ne comporte plus trois tours, comme précédemment, il fonctionne au fil de l’eau. Chaque fois qu’un étudiant a deux réponses positives, il choisit l’une de ces deux réponses et il peut rester en attente sur la réponse suivante. L’avis est donc défavorable.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 188. Si la région académique peut être un périmètre pertinent, les frontières administratives ne correspondent pas toujours à la réalité du terrain. Il va de soi qu’un recteur d’académie est prié de se prononcer a minima à l’échelle de sa région académique, mais il peut également dialoguer avec les recteurs d’autres régions académiques. Dans certains cas, un étudiant pourra être inscrit dans une formation plus proche de son domicile mais située dans une autre région académique.
L’amendement n° 138 rectifié bis vise à préciser que les propositions d’inscription du recteur doivent être faites « au plus près des choix initiaux » de l’étudiant. Le recteur ne fera ces propositions qu’après un dialogue avec l’étudiant, mais il ne faut pas l’empêcher de proposer à un étudiant une formation à laquelle il n’aurait pas pensé de prime abord. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement n° 154 rectifié vise à étendre les possibilités d’accès à des formations qui ne dépendent pas des recteurs. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L’amendement n° 137 rectifié bis vise à introduire une précision qui nous semble inutile. L’avis est donc défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 139 rectifié bis, l’avis est défavorable. Ce n’est qu’à partir de la fin du mois d’août, c’est-à-dire quand il est véritablement urgent que les candidats se prononcent sur les propositions d’inscription qui leur sont faites, que le délai de réponse est réduit à un jour.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 166. L’idée est d’avoir une régulation de l’État par l’intermédiaire du recteur.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 33…
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas cohérent !
Mme Frédérique Vidal, ministre. … ainsi que sur l’amendement n° 136 rectifié ter et défavorable sur l’amendement n° 80.
S’agissant de l’amendement n° 18, l’avis est favorable.
M. Pierre Ouzoulias. L’amendement n° 18 a été déposé par notre groupe !
Mme Éliane Assassi. Un peu de cohérence !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Vous avez raison, monsieur Ouzoulias. Heureusement que vous êtes là ! (Sourires.) L’amendement n° 18 a pour objet le réexamen de la candidature d’un étudiant titulaire d’un contrat de travail. Toutefois, il tend également à supprimer une disposition qui est au cœur du projet de loi. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 91 rectifié ter et sur les amendements identiques nos 34 et 187 rectifié bis.
M. le président. Mes chers collègues, je vous remercie d’avoir été attentifs, parfois à votre détriment, lors de cet exercice compliqué et frustrant du point de vue du travail parlementaire, qui fait suite à un amendement arrivé un peu à la dernière minute et qui a provoqué cette cascade.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote sur l’amendement n° 206.
M. Pierre Ouzoulias. Il n’est pas possible que mon intervention ne porte que sur l’amendement n° 206. Au point où nous en sommes de la discussion, nous avons besoin d’un débat politique qui reprenne la totalité de ce qui vient d’être dit. Donner une explication de vote sur chacun des amendements n’aurait aucun sens.
M. le président. Monsieur Ouzoulias, c’est la procédure.
Sur ces amendements, qui font l’objet d’une discussion commune, vous avez demandé à avoir des débats plus approfondis. Tous les sénateurs ont désormais la possibilité de s’exprimer sur chaque amendement. Utilisez cette faculté, mais n’allons pas plus loin.
M. Pierre Ouzoulias. J’ai compris, monsieur le président.
Je vais essayer de faire la synthèse de nos débats. Quatre points me semblent importants.
Premièrement, l’enseignement supérieur aura-t-il encore un caractère national ? Est-ce que le recteur, représentant de l’État, aura le dernier mot ?
Deuxièmement, doit-on imposer par la loi une adéquation entre la formation et les métiers susceptibles d’être exercés par les étudiants ?
Troisièmement, Mme la ministre nous a dit que le refus de suivi du module supplémentaire, qui doit être un élément coercitif, entraînait le rejet de l’étudiant. Cela s’appelle de la sélection, il faut l’assumer !
Quatrièmement, je viens enfin de comprendre le raisonnement de Mme la ministre. Son argumentaire a en fait été fourni par M. Darmanin. Je vous le livre tel que je le décrypte : nous sommes au sommet de la cloche ; ensuite, il va y avoir une baisse démographique. Darmanin dit donc très logiquement : je ne vais pas embaucher des fonctionnaires dont je n’aurai plus l’usage demain. Le haut de la cloche est donc sacrifié sur l’autel des objectifs austéritaires de ce gouvernement. Nous sommes là au cœur du débat politique !
M. le président. Mes chers collègues, afin d’éviter toute frustration, je tiens à appeler votre attention sur le fait que, si l’amendement n° 206 était adopté, les amendements nos 8, 106 rectifié, 145 rectifié bis et 18 deviendraient sans objet. Dès lors, vous ne pourriez plus prendre la parole sur ces amendements pour explication de vote.
La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Je vous remercie, monsieur le président, de nous apporter tous ces détails au sujet du règlement. Nous devons en effet être très rigoureux dans les questions que nous devons nous poser et, surtout, dans les réponses que nous devons y apporter.
L’amendement n° 106 rectifié que nous avons déposé ne vise pas à supprimer le dispositif du « oui, si », mais, au contraire, à le valoriser.
Madame la ministre, une validation des modules d’accompagnement est-elle envisageable ? Ils seraient ainsi perçus par l’étudiant comme un élément non pas pénalisant, mais stimulant, comme un soutien susceptible d’être capitalisé. Le rapporteur vous a également demandé si la valorisation de ces modules pouvait être envisagée.
Ce n’est pas le caractère prescriptif de ces modules qui est en jeu, mais leur éventuelle valorisation, leur intégration dans le parcours du jeune. C’est à cette question que nous attendons une réponse.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 8, 106 rectifié, 145 rectifié bis et 18 n’ont plus d’objet.
Monsieur Lafon, l’amendement n° 57 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Laurent Lafon. Oui, monsieur le président.
M. le président. Madame Mélot, l’amendement n° 82 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 82 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 144 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Grand, l’amendement n° 65 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Grand. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 65 rectifié est retiré.
Madame Mélot, l’amendement n° 83 est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 83 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 36.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Nous en venons à l’amendement n° 160 rectifié.
Mes chers collègues, j’appelle de nouveau votre attention : si cet amendement était adopté, les amendements identiques nos 13 et 155 rectifié, ainsi que les amendements nos 17 rectifié, 116 rectifié et 154 rectifié deviendraient sans objet.
Si l’un de vous souhaite s’exprimer sur l’un de ces amendements, c’est maintenant ou jamais…
Monsieur le rapporteur, la commission avait sollicité, sur l’amendement n° 160 rectifié, l’avis du Gouvernement, lequel a émis un avis défavorable. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 13 et 155 rectifié ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13 et 155 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote sur l’amendement n° 109 rectifié.
Mme Sylvie Robert. Je n’ai pas bien compris votre position, madame la ministre. Nous souhaitons que les recteurs, après proposition des établissements, puissent avoir le dernier mot. Le rapporteur a introduit la notion de dialogue, mais nous pensons préférable de revenir à la rédaction initiale.
Par ailleurs, j’ai bien compris que c’était le dernier recours en attente dans le cadre du dispositif Parcoursup, que nous découvrons, mais dont j’ai bien saisi qu’il différait d’APB.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 32, 111 rectifié et 133 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur Lafon, l’amendement n° 53 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Laurent Lafon. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 53 rectifié quater est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 14.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission sur l’amendement n° 188 ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l’amendement n° 138 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 154 rectifié.
Mme Colette Mélot. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 154 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote sur l’amendement n° 137 rectifié bis.
Mme Françoise Laborde. Je n’ai pas vraiment compris l’avis défavorable du Gouvernement. J’aimerais bien avoir une petite explication, madame la ministre.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Nous souhaitons que les recteurs puissent proposer des orientations au lycéen, même si celles-ci n’ont pas été initialement demandées.
En inscrivant la disposition que vous proposez dans la loi, je ne voudrais pas que les recteurs ne considèrent que les vœux formulés et fassent des propositions qui s’articulent autour, sans prendre le temps de dialoguer avec l’élève pour savoir s’il n’est pas intéressé par d’autres choses. Tout cela peut se faire dans le cadre d’un dialogue. C’est tout à fait…
Mme Françoise Laborde. Acceptable !
Mme Frédérique Vidal, ministre. … acceptable, en effet. Je le répète, je ne veux pas que l’on bloque la possibilité de faire d’autres propositions au lycéen.
M. le président. Vous le voyez, mes chers collègues, dans le cadre des explications de vote, il est encore possible de questionner le Gouvernement, qui peut répondre.
Je mets aux voix l’amendement n° 137 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 139 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 166. Je vous informe que, s’il était adopté, les amendements nos 203, 33, 136 rectifié ter et 80 ainsi que les amendements identiques nos 34 et 187 rectifié bis deviendraient sans objet. Si l’un des auteurs de ces amendements souhaite s’exprimer, c’est maintenant qu’il doit le faire…
M. Laurent Lafon. Je retire mon amendement, monsieur le président !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Je veux rappeler que l’amendement n° 203 du Gouvernement est un compromis : il permet une discussion – c’est important ! – avec les chefs d’établissement, tout en garantissant la régulation de l’État par l’intermédiaire des recteurs.
De manière très pragmatique, je vous demande de garder à l’esprit que les universités sont en général fermées à partir de la troisième semaine de juillet, ce qui peut évidemment poser problème avec la formulation retenue dans le texte de la commission, à savoir recueillir l’avis formel du chef d’établissement ou du président d’université. C’est une situation que l’on a malheureusement connue et qui a été très compliquée à gérer l’été dernier dans le cadre de la loi sur les masters.
Je veux vraiment attirer votre attention sur l’importance de ce compromis.
M. le président. Là encore, mes chers collègues, pour votre bonne information, je vous indique que, si l’amendement n° 203 était adopté, les amendements nos 33, 136 rectifié ter, 80, ainsi que les amendements identiques nos 34 et 187 rectifié bis deviendraient sans objet.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Je veux rappeler que l’amendement n° 203, c’est notre amendement ! (Rires.)
M. Pierre Ouzoulias. Il aurait quand même été beaucoup plus simple que le Gouvernement soutienne le nôtre, d’autant qu’il mentionne « du candidat ou de la candidate ». Il n’aurait pas été scandaleux de la part d’une ministre de dire que le mot candidat a un féminin.
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. Jacques-Bernard Magner. La loi du genre !
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Le groupe socialiste et républicain votera cet amendement, qui va dans le bon sens, celui que nous souhaitons depuis le début des débats. Nous aurions pu aller plus loin encore. Toutefois, nous prenons acte que le Gouvernement ait compris, au travers de cet amendement, les exigences quant à la non-sélection des étudiants.
En outre, il prend aussi en considération que le recteur, pouvoir d’État, peut réguler les décisions, celles des chefs d’établissement.
Il s’agit donc d’un amendement utile, que nous soutiendrons et qui répond aussi à notre exigence principale.
M. le président. Permettez-moi de continuer à être didactique, mes chers collègues.
Monsieur Ouzoulias, vous pouvez sous-amender l’amendement du Gouvernement, si vous le souhaitez.
M. Pierre Ouzoulias. Tout à fait !
M. le président. Mais faites vite pour que nous puissions avancer !
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. Comme je l’ai fait remarquer avant la suspension de séance, mon amendement n° 136 rectifié ter plus mon amendement n° 187 rectifié bis égalent l’amendement n° 203. Mais, je l’avoue, cher collègue Ouzoulias, introduire le terme « candidate » me plaît bien. On pourrait donc sous-amender l’amendement n° 203.
M. Pierre Ouzoulias. Je dépose un sous-amendement en ce sens, monsieur le président, pour ajouter les termes « ou de la candidate » !
M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 207, présenté par M. Ouzoulias et ainsi libellé :
Amendement n° 203
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
ou de la candidate
Je le mets aux voix.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.) – (Exclamations sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
Mme Éliane Assassi. Vous ne pouvez pas être contre le terme « candidate » !
M. Patrick Kanner. J’ai un doute sur le résultat du vote !
M. le président. Si j’avais eu un quelconque doute sur le vote, j’aurais procédé, je puis vous l’assurer, par assis et levé.
Je mets aux voix l’amendement n° 203.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 136 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Madame Mélot, l’amendement n° 80 est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 80 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 91 rectifié ter.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 34 et 187 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 146 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Gold, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En aucun cas le parcours extrascolaire du candidat ne peut être pris en compte dans la procédure nationale de préinscription.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Nous le savons, c’est l’application qui sera faite de ce projet de loi et la répartition des moyens qui seront accordés au soutien des formations en tension qui nous diront si la sélection à l’entrée des universités s’est aggravée.
S’il est juste qu’un classement soit réalisé dans les filières en tension de manière très marginale, fondé sur des critères objectifs tels que le projet de formation, les acquis, les compétences et les caractéristiques de la formation, il n’est pas souhaitable d’accroître la sélection sociale.
Comme je l’ai exprimé lors de la discussion générale, il est très contestable de prendre en compte le parcours extrascolaire du candidat, qui reflète certains marqueurs de son origine sociale. Ce critère est totalement discriminatoire, et nous atteignons un niveau de détail qui va être difficile à gérer par les universités lors du classement des candidats.
Ainsi, l’arrêté du 19 janvier 2018 autorisant la mise en œuvre d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Parcoursup » permet de recueillir des données relatives au niveau de pratique, discipline, résultat, performance, prix… En revanche, je comprends mal la place du projet de formation motivé au sein de la rubrique « Données relatives au parcours extrascolaire du candidat » ; il vaut mieux que cela !
Un tel niveau de précision ne se justifie pas pour trancher entre plusieurs candidats aux profils équivalents. À acquis et compétences semblables, le critère légal fondé sur le projet de formation demeure suffisant.
Le groupe du RDSE est plutôt favorable à un système qui se référerait à un critère plus méritocratique, qui donne les mêmes chances à tous les jeunes, quelles que soient leurs origines sociales.
Pour illustrer mes propos, je me référerai au système retenu par l’université d’Oxford, dont l’excellence n’est pas à prouver. C’est une vision plus large du candidat qui est retenue, recentrée sur son potentiel, reposant sur une estimation des capacités intellectuelles, en mesurant sa performance au regard des handicaps sociaux qu’il a dû franchir.
La sélection, telle qu’elle sera appliquée par la plateforme Parcoursup, sera fondée par les résultats scolaires et le parcours extrascolaire, des critères directement corrélés aux origines sociales.
Mes chers collègues, comme le disait très justement Edgar Faure : « Nous sommes justement fiers des élites que nous avons produites. Mais qui sait le prix de celles que nous avons rejetées ? »
Le présent amendement prévoit donc d’exclure le parcours extrascolaire des données recueillies par Parcoursup.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Mme Laborde fait référence à l’université d’Oxford, où les frais d’inscription sont de l’ordre de 10 000 euros… Permettez-moi de m’interroger !
Pour ma part, j’ai plutôt le sentiment que les enfants de parents de catégorie socioprofessionnelle moins élevée ont autant d’atouts et de capacités que les autres. On le voit dans leur engagement associatif et sportif. Ils ont aussi des expériences dans ces domaines. C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. L’avis du Gouvernement est également défavorable.
Dans le parcours extrascolaire, nous avons voulu mettre en avant la capacité des jeunes à avoir démontré de l’autonomie, de l’endurance, un certain nombre d’éléments dont leurs notes ne sont pas forcément toujours le reflet.
À nos yeux, ce parcours vise à mettre en valeur les talents qu’auraient ces jeunes. Ce sera évidemment un processus progressif. Pour le moment, on ne regarde pas particulièrement ces éléments, mais si ceux-ci deviennent importants, en figurant notamment dans la fiche à venir, les professeurs du secondaire seront beaucoup plus encouragés à tenir compte des capacités d’engagement et d’autonomie des lycéens.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. J’ai l’impression que cet amendement peut être interprété de façon différente.
Notre collègue a, me semble-t-il, considéré que l’ajout de cette dimension pouvait peut-être s’avérer plus discriminatoire pour certains jeunes. L’ensemble des jeunes ne serait pas alors sur un pied d’égalité. Au contraire, vous y voyez plutôt, madame la ministre, une dimension favorable, donc positive. Il faut vraiment trancher, parce qu’il ne faudrait pas que ces éléments qui vont, on le voit bien, au-delà des compétences scolaires soient interprétés de façon différente dans la fiche de l’élève. Cela ne doit pas être de nature à provoquer une hésitation, et donc à pénaliser le jeune.
Je vous avoue mon embarras sur cet amendement. Voilà deux visions quelque peu différentes, mais qui peuvent se rejoindre. Aussi, j’aimerais bien que Mme la ministre nous dise comment cette dimension pourrait être interprétée dans la fiche de l’élève.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Lors de nos échanges, nous avons demandé aux professeurs principaux et aux proviseurs de ne mettre évidemment en avant que des points positifs. Nous considérons qu’ils connaissent tout particulièrement les élèves et ont donc la capacité de mettre en valeur un certain nombre d’éléments, même s’ils ne s’en sont peut-être pas suffisamment préoccupés jusqu’à maintenant.
Cela doit avoir un effet positif : les enseignants du secondaire vont devoir se demander quels points particuliers ils peuvent valoriser. Nous partons du principe que les enseignants tant du secondaire que du supérieur ont à cœur la réussite des élèves.
Mme Sylvie Robert. Bien sûr !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Il n’y a donc aucun intérêt à pointer les défauts des élèves, si je puis dire. De même, dans l’enseignement supérieur, il n’y a aucun intérêt à conduire les étudiants vers l’échec en ne les accompagnant pas.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. C’est un point essentiel.
Pour ma part, j’ai, à plusieurs reprises, posé la question à Mme la ministre, qui ne m’a pas répondu, de savoir pourquoi on demandait un CV dans le cadre du Parcoursup. Que va-t-on chercher dans le CV du jeune pour le sélectionner ? C’est quelque chose que je ne comprends toujours pas, et Mme la ministre ne nous a pas apporté de réponse précise sur ce point, qui est fondamental.
Je le répète, nous tenions au baccalauréat, qui est un concours anonyme national.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Tout à fait !
M. Pierre Ouzoulias. Or on passe à un système où le contexte social du lycéen sera fondamental dans la prise en compte des éléments de sélection des universités. C’est un point déterminant. C’est pourquoi nous soutiendrons totalement l’amendement de notre collègue Laborde.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Monsieur le sénateur, je pensais avoir répondu.
Lorsque nous sommes enseignants dans le supérieur, nous cherchons à savoir comment on peut repérer des lycéens qui, même si leurs notes ne sont pas extraordinaires, ont démontré qu’ils avaient la capacité de travailler par eux-mêmes.
Pour vous donner un exemple simple, on peut décider de mettre dans son CV qu’on est passionné de guitare et qu’on a appris à jouer tout seul de cet instrument ou que l’on maîtrise une langue, même si on ne l’a pas apprise à l’école, une langue pratiquée dans sa famille. Voilà des capacités supplémentaires de nature à mieux cerner le profil des élèves pour mieux leur prescrire des formations.
Si des jeunes ont appris seuls la guitare pendant plusieurs heures, cela révèle effectivement un aspect de leur profil que nous allons pouvoir valoriser pour les accompagner vers la réussite. C’est vraiment cette idée-là que nous voulons développer.
Il faut bien comprendre que la très grande majorité des enseignants du supérieur et des enseignants-chercheurs du supérieur souffre énormément de ne pas avoir les moyens d’accompagner les étudiants vers la réussite en leur prescrivant des formations qui vont les aider. Tel est véritablement notre objectif.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.
Mme Annick Billon. J’abonde dans ce sens. La sélection est obligatoire.
Pour prendre un exemple personnel, ma fille, qui est en terminale, se pose aujourd’hui des questions pour remplir sa fiche. Elle est en train d’établir un diagnostic, elle se demande ce qu’elle souhaite pour son avenir et comment elle l’envisage. Elle est en train de faire un bilan de ses compétences. En réalité, c’est un plus. L’enfant se pose ces questions, il fait son autoanalyse, qu’il n’a peut-être pas faite jusqu’alors, et fait une sélection. Aussi, je vais tout à fait dans le même sens.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Pour ma part, je ne suis pas sûre que tous les élèves de terminale soient capables de remplir cette fiche. Je pense aux jeunes qui ont déjà parfois du mal à être présents à l’école : dans les milieux défavorisés, être présent à l’école, c’est déjà quelque chose. Mais s’il faut en plus faire partie d’associations, faire des activités…
En outre, je ne pense pas qu’ils soient tous armés pour analyser vraiment leurs compétences, comme vous venez de le dire, ma chère collègue.
M. Jacques-Bernard Magner. C’est de l’élitisme total !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Je souscris à l’argumentation de Mme la ministre, ainsi qu’à celle du rapporteur et de quelques collègues. Je considère que ces données seront un plus, et non pas un moins. Somme toute, nous voulons accompagner au mieux les jeunes.
Au-delà de l’aspect extrêmement normé de l’enseignement, nous cherchons à repérer des compétences particulières, qui nous permettent, en tant qu’enseignant, de les guider encore plus utilement, en vue de les faire cheminer vers la réussite. La réussite est individuelle et particulière, on le sait bien. Cela nous permettra de comprendre un peu mieux nos jeunes qu’une stricte grille de notes. Cet aspect est humain, il ne faut pas l’oublier.
Nous avons aussi affaire à des jeunes qui vivent des choses particulières qui peuvent les faire mûrir, grandir et, au final, leur permettre de développer des compétences. Mais cela ne signifie pas que ce sera au détriment de ceux qui n’auraient pas appris à jouer seuls de la guitare ou pratiquent une autre langue dans leur famille.
Il faut, à mon sens, tout simplement le voir comme un plus, et non pas un moins.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Nous sommes sortis du long tunnel des amendements en discussion commune, et le débat s’anime. Tant mieux !
Je vous remercie, madame la ministre, de nous avoir éclairés sur ce que vous entendiez par CV. C’est clair, au moins ! On sait maintenant ce que vous attendez sur les CV.
À dix-sept ans – on a tous eu cet âge –, quand j’étais, il n’y a pas si longtemps – voilà une quinzaine d’années –, en terminale ou en première, je ne savais pas trop quelles étaient mes compétences. À cet âge, on a fait peu de choses dans sa vie : on va à l’école, on fait un peu de sport, peut-être un peu de musique. Mais c’est surtout l’origine sociale qui va ressortir ici : pouvoir aller au musée, voyager, comme je l’ai entendu tout à l’heure, dire si l’on a appris une, deux, trois ou quatre langues… Tout cela n’est pas empreint de bon sens.
Par ailleurs, je m’interroge. Une université moyenne aura à traiter plusieurs milliers de dossiers. Qui va trier ? Comment ? Quels moyens leur donnera-t-on pour trier les dossiers, les regarder et piocher celui qui a un bon profil ?
Enfin, au moment où s’engage dans la société une bataille sur la question de l’anonymat du CV – beaucoup de personnes sont discriminées à l’embauche (Exclamations sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme la ministre s’agace.) –,…
Mme Éliane Assassi. Exactement ! Ça existe !
M. Fabien Gay. Vous pouvez me répondre ; on a un débat !
Donc, au moment où s’engage une bataille sur l’anonymat du CV, vous allez marquer au fer rouge certains jeunes qui n’auront pas eu la chance, ou moins de chances que d’autres, de faire beaucoup de choses. Aussi, je pense que tout cela ne va pas dans le bon sens.
On a eu raison de vous interroger, madame la ministre, car, on le voit bien, ce mot, vous le refusez. Mais, durant les deux jours de débat, nous continuerons à vous le dire : c’est finalement bien de la sélection et de la sélection sociale que vous allez imposer avec ce projet de loi ! (Exclamations sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. C’est une caricature !
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Je crois qu’il faut être positif. Certains veulent en rester aux schémas anciens (Mme Éliane Assassi s’exclame.), mais il faut accepter ce changement.
Les professeurs des lycées seront là pour donner une impulsion aux élèves, leur expliquer ce qu’ils doivent faire ou dire et leur donner des conseils pour leur orientation. De cette façon, on fera évoluer les jeunes. On leur dira, quelle que soit leur origine, qu’ils doivent inscrire plus d’éléments sur cette fiche que sur un questionnaire traditionnel. Comme l’a dit notre collègue Annick Billon, il faudra qu’ils essaient de faire une autoanalyse de leurs compétences. On va vers une nouvelle université, une nouvelle orientation ; il faut l’accepter. C’est dans l’intérêt de tous les jeunes de ce pays.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de la Provôté. À ce sujet, la difficulté est peut-être de trouver un enseignant. Deux professeurs principaux accompagnent et encadrent le jeune : ils devront l’aider à accoucher – pardonnez-moi du terme – de son CV pour mettre en avant ses compétences.
Dans le CV, on n’attend pas du jeune qu’il inscrive qu’il est premier prix de violoncelle ; là n’est pas le sujet. Il convient de montrer le sens de l’engagement, le courage, la capacité à être hors cadre et à faire des choses différentes pour mettre en avant sa personnalité. Un jeune ne se résume pas à un carnet de notes.
Comme l’a souligné la présidente de la commission, l’éducation scolaire est assez normative. C’est donc justement le côté hors norme qu’il faut savoir mettre en évidence. Or c’est précisément ce que l’on ne trouve pas dans les appréciations scolaires, dans les notes.
Par conséquent, c’est une opportunité pour les jeunes que de valoriser ce qu’ils sont réellement. Il faut simplement avoir la garantie qu’ils seront accompagnés pour le faire.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 146 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 89 rectifié ter, présenté par Mmes Dindar et Malet, MM. Marseille, Milon, Magras et Patient, Mme Joissains, MM. Laugier, Longeot, Guerriau et Kern, Mmes Deromedi et Guidez, MM. Delcros et Lefèvre, Mme Lopez, MM. Moga, Bonnecarrère, Janssens et Daubresse, Mme Gruny et MM. Chasseing, Pellevat, Paul, Chaize, Poadja et Lafon, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Dans les départements d’outre-mer, ce dispositif d’information et d’orientation prend en compte les particularités du marché local de l’emploi et les formations disponibles sur place. Il informe les publics auxquels il s’adresse des opportunités existantes hors du territoire régional et notamment en France métropolitaine et dans l’Union européenne, ainsi que des caractéristiques et prérequis nécessaires afin de réaliser un parcours en mobilité.
La parole est à M. Jean-Pierre Moga.
M. Jean-Pierre Moga. Éloignées et insulaires pour la plupart, dotées d’un petit marché local de l’emploi, les régions d’outre-mer ont un besoin vital de promouvoir la mobilité de leur jeunesse, que ce soit pour la formation ou la recherche d’emploi.
Le nouveau parcours d’orientation proposé par le projet de loi doit prendre en compte ces opportunités en métropole ou en Europe notamment, afin que les élèves soient mieux armés lors de leur choix et possèdent tous les atouts nécessaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable : il va de soi que la mobilité est indispensable ; il n’est pas nécessaire de l’inscrire dans la loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Antoine Karam, pour explication de vote.
M. Antoine Karam. Je suis très sensible à la proposition de notre collègue. Les élus d’outre-mer savent de quoi ils parlent : nos territoires sont isolés, pour la plupart insulaires. Il faut absolument donner à nos jeunes davantage de possibilités de quitter leur environnement habituel, de voir autre chose, de découvrir un autre modèle de développement, afin qu’ils ne se croient pas condamnés à vivre du RSA. À cet égard, le présent amendement va dans le bon sens.
Je rappelle que le taux de chômage s’élève à 23 % outre-mer, contre 10 % en France hexagonale, et qu’il touche la moitié de nos jeunes ! Donnons-leur une chance par la mobilité et la formation. Il faut savoir que, le plus souvent, ceux qui partent se former reviennent ensuite dans leur territoire d’origine.
M. Claude Kern. Exactement !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 89 rectifié ter.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. L’amendement n° 5, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les dossiers et candidatures adressés aux établissements en vue d’une inscription dans les formations mentionnées au présent article ne peuvent faire l’objet d’un examen par traitement automatisé.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. La non-hiérarchisation des vœux et la masse des demandes qui seront formulées via Parcoursup – environ 8 millions – obligeront les établissements à traiter d’énormes quantités de dossiers – entre 40 000 et 50 000 pour une université de taille moyenne. Il est naturellement impossible de le faire de façon manuelle et il faudra donc recourir à des algorithmes. Or il se pourrait que cela aboutisse à ouvrir aux universités une possibilité légale de procéder à un tirage au sort, alors même que la loi est censée l’interdire !
C’est pourquoi nous demandons avec la plus grande fermeté que les algorithmes utilisés par les universités soient rendus publics, afin d’écarter toute suspicion.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Cet amendement vise en fait à interdire tout traitement automatisé pour l’examen des candidatures.
Avec la suppression de la hiérarchisation des vœux, dans certaines filières en tension, les UFR devront traiter 15 000 dossiers. Il serait irréaliste de leur demander de le faire sans recourir à un traitement automatisé, à un algorithme local. L’algorithme suffira pour traiter les dossiers appelant clairement une décision d’acceptation ou de rejet, une intervention humaine sera nécessaire pour les autres. Les responsables d’UFR que j’ai rencontrés m’ont nettement signifié qu’il ne leur serait pas possible de trier les dossiers sans un traitement automatisé. L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cet amendement a pour objet d’interdire l’utilisation des algorithmes pour affecter ou inscrire les étudiants. Je souligne que la CNIL n’a aucunement interdit l’usage des algorithmes ; elle s’est opposée à ce que des décisions d’affectation soient prises sur le seul fondement d’un algorithme, ce qui n’est pas la même chose. L’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Je ne comprends pas comment pourraient coexister le recours à un algorithme pour sélectionner ou rejeter les dossiers et une intervention humaine dans le traitement de ceux-ci. Il y a là une contradiction : si l’on utilise un algorithme, c’est précisément pour éviter une intervention humaine, au rebours de l’avis de la CNIL !
M. le président. L’amendement n° 7, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toute décision de refus d’inscription dans une formation demandée, formulée par le président ou le directeur d’un établissement s’accompagne d’une notification motivée.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement s’inscrit dans la lignée de ceux que nous avons précédemment défendus. Vous l’aurez compris, nous sommes cohérents !
Le projet du Gouvernement vise à ce que les candidatures à l’entrée dans l’enseignement supérieur se fassent au cas par cas. Nous sommes lucides sur l’augmentation à prévoir des candidatures par filière et sur l’inadéquation des moyens humains mis à la disposition des établissements pour traiter les demandes, mais nous prenons en compte les divers engagements gouvernementaux, ainsi que les mesures législatives existantes.
Cet amendement prévoit que tout refus d’inscription s’accompagne d’une notification motivée. Il s’agit là d’un nouveau moyen de contrôle, pour éviter que les établissements procèdent à la va-vite. L’objectif est de faire en sorte que le Gouvernement et les établissements respectent les engagements qu’ils ont pris et réitérés, depuis octobre et la présentation du plan Étudiants, en matière d’humanité du dispositif.
Il s’agit aussi de permettre aux bacheliers recalés d’avoir des informations sur les points faibles de leur candidature, afin qu’ils puissent travailler sur ceux-ci. Réunir les conditions de la réussite des bacheliers, immédiatement ou pour plus tard, tel est en effet l’enjeu qui sous-tend cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Les décisions administratives de refus seront motivées selon le principe général qui s’applique en la matière. Il n’est donc pas nécessaire de l’inscrire dans la loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. L’avis est défavorable. Je ne sais pas précisément de quoi on est en train de parler…
Effectivement, la règle générale s’applique en la matière dans les filières sélectives, où sont notifiées des décisions de refus d’inscription.
Dans les licences non sélectives, par définition, il n’y aura pas de refus d’inscription. En revanche, les candidats pourront être informés des raisons pour lesquelles, lorsqu’il n’y a pas suffisamment de places, une autre solution leur est proposée.
M. le président. L’amendement n° 105 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au cadrage national mentionné au deuxième alinéa du I, un décret en Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles une formation de premier cycle dispensée par un établissement d’enseignement supérieur peut soumettre l’inscription à des compétences supplémentaires qui ne peuvent être justifiées que par leur adéquation avec la spécificité de la formation. Ces compétences particulières sont précisées pour chaque type de formation.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement concerne les attendus. En la matière, il convient d’éviter que les établissements soumettent les candidats à des exigences qui soient sans rapport avec la formation, aux seules fins d’opérer une sélection. Des attendus spécifiques ne doivent pouvoir être requis par un établissement que dans la stricte mesure où ils apparaissent justifiés au regard des caractéristiques de la formation.
Il importe de ne pas accentuer la sélection ni la hiérarchie entre établissements : ce ne serait guère opportun en termes de justice !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. L’avis est défavorable. Dans certaines disciplines, comme les STAPS, un cadrage des attendus sera établi au niveau national. Dans d’autres, les attendus seront fixés localement. J’estime qu’il faut faire confiance aux établissements universitaires : ils sont le mieux à même de définir les attendus et les compétences requises.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. L’avis du Gouvernement est également défavorable.
Il y a des attendus nationaux parce que les diplômes sont nationaux. Il est bien précisé que les attendus spécifiques d’un établissement doivent refléter la spécificité des parcours proposés par cet établissement. Par exemple, des notions de biologie peuvent être requises pour être admis à préparer une licence en droit de l’environnement ou de la mer. Si nécessaire, elles pourront être acquises via le suivi d’un module particulier.
C’est dans cet esprit que les établissements ont défini leurs attendus spécifiques. Vous aurez noté que certains n’ont pas jugé nécessaire de définir des attendus autres que ceux qui ont été établis à l’échelon national. Faisons là aussi confiance aux universités et aux établissements.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Nous avons le « bonheur » de discuter d’une loi qui est déjà entrée en application avant même d’avoir été adoptée : cela nous permet de disposer d’exemples concrets qui ne vont nullement dans le sens des propos de Mme la ministre…
Dans le cas d’espèce, madame la ministre, vous étiez d’accord avec nous, lors de nos débats en commission, pour dire qu’il était absolument anormal qu’une université fasse un attendu de la détention du BAFA, le brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur. Or le conseil d’administration de l’université de Montpellier, par exemple, a fait un tel choix, et il ne me semble pas que vous ayez recouru au contrôle de légalité pour faire annuler cette décision !
Nous soutenons cet amendement, qui va dans le bon sens.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Il est bien précisé que les attendus ne peuvent en aucun cas correspondre à des formations payantes, notamment, comme l’est le BAFA. Si un conseil d’administration d’université fixe un attendu qui contrevient à la loi, celui-ci ne sera pas pris en compte en l’état sur la plateforme Parcoursup. Nous attendons que la loi soit votée pour jouer ce rôle de régulation. Contrairement à ce que vous dites, monsieur Ouzoulias, les attendus figurant actuellement sur Parcoursup constituent de simples informations mises par les établissements à la disposition des lycéens pour éclairer leurs vœux. Ils ne répondent en aucun cas aux caractéristiques définies par le texte, qui ne vaudront évidemment qu’après la promulgation de la loi. Ce n’est qu’alors que nous pourrons procéder au contrôle de légalité. Pour l’heure, la loi n’ayant pas encore été votée, je n’ai pas ce pouvoir.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 31 est présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 107 rectifié est présenté par Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 132 rectifié bis est présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 31.
M. Pierre Ouzoulias. En ce moment, des candidats émettent des vœux sur Parcoursup en tenant compte d’attendus dont vous venez de nous dire, madame la ministre, qu’ils pourraient être provisoires et remplacés par d’autres une fois que la loi aura été votée… Vous rendez-vous compte que des recours contentieux pourront être introduits par des candidats refusés sur la base d’un système d’attendus qui aura ensuite changé ? Vous rendez-vous compte de la situation dans laquelle vous mettez le législateur, les lycéens et leurs familles en prenant un arrêté avant le vote de la loi ? Je ne comprends vraiment pas cette manière de procéder !
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour présenter l’amendement n° 107 rectifié.
Mme Maryvonne Blondin. Il ne nous paraît pas opportun de prévoir que le silence de l’administration sur une candidature ne vaudra acceptation, conformément au droit commun, qu’à l’issue de la procédure d’affectation.
Nous avons bien compris le souci du rapporteur, sur l’initiative duquel a été introduit ce dispositif, de s’inscrire dans le cadre du droit commun, mais appliquer cette disposition aux inscriptions dans l’enseignement supérieur, dont la procédure s’apparente déjà à un parcours du combattant, risquerait de se révéler lourd de conséquences pour les candidats à qui elle serait opposable.
Du fait d’une omission de l’administration, un candidat pourrait se retrouver soumis à la procédure d’appel au niveau académique et à des choix d’affectation par défaut dans des formations peu demandées, et donc sans doute peu porteuses, alors que ses résultats scolaires et son dossier lui permettaient d’espérer accéder à la filière de son choix – sélective, en tension ou pas.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 132 rectifié bis.
Mme Maryse Carrère. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. L’avis est défavorable. L’alinéa 7 de l’article 1er vise non pas les refus des établissements, qui pourront être contestés devant le juge administratif, mais les silences, c’est-à-dire les messages de « mise en attente » que les étudiants recevront lorsqu’ils seront placés sur liste d’attente. Il s’agit d’éviter que, deux mois après l’édiction d’un tel message sur Parcoursup – c’est-à-dire le 22 juillet cette année –, les candidats concernés puissent se prévaloir d’une acceptation tacite. C’est du bon sens !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 31, 107 rectifié et 132 rectifié bis.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le Bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas les amendements.)
M. le président. L’amendement n° 204, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Afin de garantir la nécessaire protection du secret des délibérations des équipes pédagogiques chargées de l’examen des candidatures présentées dans le cadre de la procédure nationale de préinscription prévue au I, les obligations résultant des articles L. 311-3-1 et L. 312-1-3 du code des relations entre le public et l’administration sont réputées satisfaites dès lors que les candidats sont informés de la possibilité d’obtenir, s’ils en font la demande, la communication des informations relatives aux critères et modalités d’examen de leurs candidatures ainsi que des motifs pédagogiques qui justifient la décision prise.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cet amendement a pour objet de garantir la protection du secret des délibérations des équipes pédagogiques, conformément au principe posé par le Conseil d’État, tout en permettant la communication aux étudiants qui le demanderont des raisons pour lesquelles on leur propose de suivre une formation ne correspondant pas à leur souhait initial, ce qui pourra se produire s’ils n’ont demandé que des filières sélectives ou sous tension.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Nous avons eu un débat sur les algorithmes en commission, qui avait abouti à un avis plutôt défavorable. Nous souhaiterions pouvoir échanger avec vous sur ce sujet, madame la ministre.
Cet amendement prévoit que les obligations sont réputées satisfaites dès lors que « les candidats sont informés de la possibilité d’obtenir, s’ils en font la demande, la communication des informations relatives aux critères et modalités d’examen de leurs candidatures ainsi que des motifs pédagogiques qui justifient la décision prise ».
De quoi s’agit-il exactement ? Pouvez-vous nous donner des informations complémentaires, en particulier sur la publication des algorithmes et la question de la transparence ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. La publication des algorithmes est inscrite dans la loi : ce n’est pas le sujet ici. Cet amendement vise simplement à permettre à un candidat d’obtenir communication, dans le cadre d’une démarche individuelle, des raisons de la décision le concernant, tout en préservant le secret des délibérations des équipes pédagogiques, que le Conseil d’État a consacré il y a deux ans.
M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Je suis en partie rassuré et donne un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 6, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après les mots :
prévue au I
insérer les mots :
et pour l’examen des dossiers de candidatures par les établissements d’enseignement supérieur
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Il me semble que Mme la ministre vient de donner par avance un avis favorable à cet amendement, en indiquant que les algorithmes de manière générale, notamment ceux utilisés par les universités, seront rendus publics. C’est en tout cas ce que j’ai compris !
Il s’agit pour nous d’un amendement de repli, car nous ne sommes pas très favorables à l’utilisation d’algorithmes. Dès lors qu’il y est recouru, la moindre des choses est qu’ils soient rendus publics, à l’instar de l’algorithme national.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. La commission émet un avis de sagesse. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme Éliane Assassi. Pourquoi ?
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Non, madame la ministre, ce n’est pas possible ! Vous venez de nous dire que les algorithmes – au pluriel, donc pas seulement l’algorithme national – seront publiés : comment pouvez-vous maintenant donner un avis défavorable sur cet amendement ? Je ne comprends pas votre position ! Même à cette heure un peu tardive, notre discussion doit reposer sur des bases rationnelles.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Madame la ministre, pourriez-vous nous apporter quelques précisions sur ce que vous entendez par publication des algorithmes ? Ces outils d’aide à la décision, auxquels recourent de plus en plus d’institutions et de procédures, apparaissent souvent comme des boîtes noires. À l’évidence, davantage de transparence est nécessaire pour que les intéressés puissent avoir confiance en ces procédures informatiques. Selon moi, il importe en particulier de pouvoir accéder au code source, pour qu’il puisse être examiné par des experts indépendants. Il est également important de pouvoir disposer de la documentation complète de l’application, afin d’avoir connaissance des critères pris en compte. Madame la ministre, nous avons besoin d’être rassurés à ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.
M. Laurent Lafon. Cette question des algorithmes utilisés par les établissements ou les filières est en effet importante.
L’alinéa 8 de l’article 1er du projet de loi prévoit clairement la publication des algorithmes nationaux de traitement. En matière de transparence, il devrait y avoir un parallélisme des formes, me semble-t-il, entre le niveau national et celui des filières et des établissements. Si l’on peut comprendre que les établissements soient amenés à utiliser des algorithmes spécifiques, on est en droit de s’interroger sur les modalités de leur mise en œuvre et de se préoccuper de la bonne information des bacheliers en vue de la formulation de leurs vœux.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Ce sujet ne relève pas de mon principal domaine de compétence, mais je vais m’efforcer d’être la plus claire possible.
Tout d’abord, un algorithme ne fait jamais que ce qui lui est demandé, en l’espèce mettre en relation la demande d’un étudiant avec un établissement, afin que celui-ci puisse analyser son dossier. Le projet de loi prévoit explicitement que les codes sources de tous les algorithmes de Parcoursup seront communiqués. La plateforme comporte en effet différents algorithmes ; par exemple, il y en a un qui gère les quotas de boursiers. On le voit, le système est relativement complexe.
Parmi ces algorithmes, on trouve aussi ce qu’on appelle des outils d’aide à la décision, qui vont permettre aux établissements d’appliquer des critères plus ou moins spécifiques. Ces outils d’aide à la décision existaient déjà dans APB ; ils étaient notamment utilisés pour les admissions en classes préparatoires, en STS ou en IUT. Je signale au passage que les équipes pédagogiques de ces établissements reçoivent environ 30 000 dossiers en moyenne et savent parfaitement les gérer, en particulier grâce à ces outils d’aide à la décision.
Par ailleurs, il pourra effectivement exister d’autres outils d’aide à la décision spécifiques à un établissement ou à une formation, définis à l’échelon local. Les critères utilisés devront être connus, y compris pour les outils de type fichier Excel.
Enfin, l’analyse individuelle des dossiers sera conduite par groupes et par sous-groupes, sans recourir à un traitement automatisé. Les responsables concernés me disent que cela pourra être fait sans difficulté. Les bacheliers devront pouvoir obtenir communication de l’appréciation portée sur leur dossier.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Je ne demande qu’à faire confiance à Mme la ministre, mais des directeurs des études que j’ai rencontrés m’ont indiqué ne pas connaître, à ce jour, les outils d’aide à la décision.
Dans ces conditions, je propose à M. Ouzoulias de retirer son amendement au profit de l’amendement n° 194 de la commission, qui prévoit la publication des algorithmes « sous une forme intelligible », sous réserve bien sûr de ne pas porter atteinte à des secrets protégés par la loi.
M. le président. Monsieur Ouzoulias, l’amendement n° 6 est-il maintenu ?
M. Pierre Ouzoulias. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 108 rectifié, présenté par M. Raynal, Mme S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mmes Blondin et Lepage, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer les mots :
présenté de manière synthétique
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. La disposition que nous souhaitons amender est issue de l’adoption d’un amendement par l’Assemblée nationale sur l’initiative de Cédric Villani. Elle tend à instaurer, dans un délai de six mois après l’entrée en vigueur de la loi, une publicité et une transparence accrues du processus de préinscription via la plateforme Parcoursup, par la communication des codes sources des algorithmes, de la synthèse du cahier des charges et de l’algorithme de traitement.
Ce dispositif tire les conséquences des errements du système APB et de son caractère aléatoire et arbitraire : les décisions d’affectation reposaient exclusivement sur un algorithme et sur un tirage au sort pour départager les candidats dans les filières sous tension.
On connaît les réticences de la CNIL à ce que des données soient traitées par algorithme sans intervention humaine lorsque cela débouche sur une décision produisant des effets juridiques à l’égard d’une personne. Tel ne devrait plus être le cas. La CNIL a déjà validé les modalités de saisine de données sur Parcoursup, mais doit encore se réunir pour valider les modalités de traitement des données saisies.
Renforcer la transparence ne peut que nous satisfaire. À cet égard, la présentation des codes sources, du cahier des charges et de l’algorithme de Parcoursup constitue une avancée. Néanmoins, pour que l’impératif de transparence soit effectif, il nous a semblé que la transmission d’une simple synthèse du cahier des charges n’était pas suffisante. C’est pourquoi nous demandons, au travers de cet amendement, la transmission de l’intégralité du cahier des charges.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. L’avis est défavorable. Les codes sources, les algorithmes utilisés sont très complexes. La commission estime qu’un équilibre intéressant a été trouvé entre transparence et intelligibilité pour le grand public grâce à l’adoption de l’amendement de M. Villani.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les traitements automatisés mentionnés dans cet alinéa ne peuvent en aucun cas conduire à un classement, une sélection ou un tirage au sort des dossiers et candidatures déposés sur la plateforme mise en place dans le cadre de la procédure nationale de préinscription.
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement, qui s’inscrit dans le droit fil des précédents, a pour objet d’interdire le tri ou le classement des candidatures via un algorithme, au-delà de la sélection par la seule voie algorithmique, par ailleurs prohibée par la CNIL et la loi Informatique et libertés.
Cet amendement vise à éviter que les établissements, d’une part, ou Parcoursup directement, d’autre part, ne procèdent à une sélection détournée en organisant une remontée de dossiers pré-évalués sur la base d’un algorithme. De fait, on se doute bien que si la plateforme ou les établissements se mettent à classer les candidatures avant leur examen, cela va clairement influencer la phase de sélection postérieure.
Imaginons qu’une filière exige, pour l’admission, une note minimale dans trois matières au lycée. Si le secrétariat de la filière reçoit de 400 à 500 candidatures, il pourra être tentant de mettre en place un système de classement des candidatures en trois groupes : celles répondant au critère des trois notes minimales, celles n’y répondant que partiellement et, enfin, celles totalement « hors des clous ». Ce simple classement, tout aussi inhumain qu’un tirage au sort et qui réduit un ou une jeune à une simple donnée statistique, aura ainsi permis de faire l’impasse sur l’étude de dizaines de dossiers.
Je conçois qu’il sera très compliqué, pour les filières, d’étudier tous les dossiers un par un et de prendre le temps de les analyser, surtout au vu des moyens limités dont elles disposent, mais c’est uniquement à ce prix que votre réforme aura un semblant d’humanité, madame la ministre, bien que nous y restions profondément opposés.
Il appartient au Gouvernement de se donner les moyens de son ambition. Les jeunes dont l’avenir est entre les mains des universités n’ont pas à assumer un manque de cohérence entre les ambitions et les moyens mis en œuvre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Monsieur Gontard, je vous invite à rencontrer les directeurs de composante dans les universités. Vous vous rendrez alors compte par vous-même des difficultés. Avec cinq vœux possibles, il y avait déjà 1 000 dossiers à traiter ; avec jusqu’à vingt-huit choix possibles, il pourra y en avoir 15 000, notamment dans les filières en tension. Il me semble donc nécessaire de recourir à un classement automatisé, sachant qu’il y aura intervention humaine pour les dossiers tangents. Je tiens à vous rassurer sur ce point, mais soyons pragmatiques !
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Il est également défavorable. N’oublions pas que le dispositif s’applique aussi aux filières sélectives, qui représentent plus de 50 % des filières, et notamment aux classes préparatoires, dont les responsables reçoivent des centaines de milliers de dossiers pour un très faible nombre de places.
M. le président. L’amendement n° 194, présenté par M. Grosperrin, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’une décision individuelle est prise dans le cadre de la procédure nationale de préinscription prévue au même I sur le fondement d’un traitement algorithmique, les règles définissant ce traitement ainsi que les principales caractéristiques de sa mise en œuvre sont publiées sous une forme intelligible et sous réserve de ne pas porter atteinte à des secrets protégés par la loi.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Il s’agit de prévoir que les algorithmes qui seront utilisés par les établissements pour classer les candidatures seront publiés sous une forme intelligible, dans la mesure où n’est pas remis en cause le pouvoir souverain d’appréciation du juge.
M. Michel Savin. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Il me semble que l’amendement n° 204, que j’ai exposé au nom du Gouvernement, satisfait le présent amendement, dont je sollicite donc le retrait.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 194 est-il maintenu ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 194 est retiré.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 15, présenté par MM. Ouzoulias, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Nous sommes ici au cœur du sujet et des incohérences de ce texte. Aux termes de l’alinéa 10, les universités compareront leurs attendus avec le projet de formation du candidat, les acquis de sa formation antérieure et ses compétences. Or le dictionnaire définit la compétence comme capacité dans une matière. C’est pourtant sous ce terme que vous rangez le parcours extrascolaire. L’arrêté que vous avez pris avant même la promulgation de la loi n’est donc pas conforme à celle-ci… Pour éviter des contentieux ultérieurs, nous souhaiterions vivement que lumière soit faite sur ce que vous entendez par « compétences ». Manifestement, vous n’employez pas ce mot au sens du dictionnaire.
M. le président. L’amendement n° 175, présenté par MM. Piednoir, Allizard, Babary, Bas, Bascher et Bazin, Mmes Berthet, A.M. Bertrand et Bonfanti-Dossat, M. Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet et Brisson, Mme Bruguière, M. Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chatillon et Chevrollier, Mme de Cidrac, MM. Cornu, Cuypers, Dallier, Danesi et Daubresse, Mme Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche et Deromedi, MM. P. Dominati et Duplomb, Mmes Duranton, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, M. Forissier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme F. Gerbaud, M. Ginesta, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet, Hugonet, Huré et Husson, Mmes Imbert et M. Jourda, M. Kennel, Mmes Lamure et Lanfranchi Dorgal, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, Le Gleut, Leleux, Leroux et H. Leroy, Mmes Lherbier et Lopez, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon et de Montgolfier, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Paccaud, Panunzi, Pellevat, Perrin, Pierre, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia, Puissat et Raimond-Pavero et MM. Raison, Rapin, Reichardt, Retailleau, Revet, Saury, Savary, Savin, Schmitz, Sol, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après les mots :
le projet de formation du candidat,
insérer les mots :
le classement de ses vœux,
La parole est à M. Stéphane Piednoir.
M. Stéphane Piednoir. Il s’agit, là aussi, d’un amendement d’appel.
Le Gouvernement explique que la suppression de la hiérarchisation des vœux permettra de laisser aux candidats la possibilité d’affiner leurs choix tout au long de la procédure, entre janvier et mars. En réalité, ils avaient déjà largement le temps de le faire avec APB.
Conjuguée aux vœux groupés, cette non-hiérarchisation aura pour conséquence de rendre sélectives quasiment toutes les filières. En effet, avec jusqu’à vingt-huit vœux possibles, le nombre de candidatures augmentera pour toutes les filières par rapport aux années précédentes.
Enfin, la hausse très significative du nombre de candidatures à étudier conduira les établissements à mettre en place des algorithmes de traitement locaux, dont on ne connaîtra ni le fonctionnement ni les critères de tri. Autrement dit, on remplace un algorithme critiqué, mais qui avait la vertu d’être national, par des algorithmes locaux quelque peu opaques. Ce manque de transparence nous paraît dangereux.
Quant à l’affectation au fil de l’eau, sans hiérarchie des vœux, elle entraînera une impossibilité d’anticiper les effectifs dans les filières sélectives, par exemple les classes préparatoires. Elle sera en outre anxiogène pour les candidats : les meilleurs recevront sans doute très rapidement des réponses positives à l’ensemble de leurs vœux, ce qui laissera les autres en situation d’attente.
Globalement, cette non-hiérarchisation n’évitera pas la mise en place de stratégies d’inscription des vœux par certains lycéens, s’agissant par exemple de la possibilité de choisir des formations hors de son académie.
M. le président. L’amendement n° 49 rectifié ter, présenté par Mme Mélot et MM. Bignon, Capus, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, A. Marc et Wattebled, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Afin d’encourager l’engagement citoyen au lycée, il est fait préférence à niveau égal aux candidats pouvant justifier d’un engagement bénévole au sein d’une association.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement a pour objet de préciser la notion de compétences. Nous proposons que, à niveau égal, deux candidats puissent être départagés au regard de leur engagement ou non au sein d’une association. Il s’agit d’encourager les pratiques bénévoles, préliminaires à l’engagement citoyen des lycéens et futurs étudiants, ainsi que le don bénévole de son temps à des associations.
M. le président. L’amendement n° 94 rectifié bis, présenté par M. Malhuret, Mme Mélot et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Afin d’encourager l’engagement citoyen au lycée, il est fait préférence à niveau égal aux candidats pouvant justifier d’un engagement bénévole au sein des services de l’établissement et des instances de vie lycéenne.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement, très proche du précédent, vise à encourager l’engagement des lycéens au sein des instances d’organisation de la vie de leur établissement, comme le conseil d’établissement ou le conseil lycéen, et des lieux de vie de l’établissement, tels que la bibliothèque, l’infirmerie ou le service des sports.
M. le président. L’amendement n° 174, présenté par MM. Paccaud, Allizard, Babary, Bas, Bascher et Bazin, Mmes Berthet, A.M. Bertrand et Bonfanti-Dossat, M. Bonne, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Boulay-Espéronnier, M. Brisson, Mme Bruguière, M. Calvet, Mme Canayer, MM. Cardoux et Carle, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chatillon, Chevrollier, Cornu, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mme Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. P. Dominati, Mme Dumas, M. Duplomb, Mmes Duranton, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, M. Forissier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, MM. Grand et Gremillet, Mme Gruny, MM. Hugonet, Huré et Husson, Mmes Imbert et M. Jourda, MM. Karoutchi et Kennel, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, Le Gleut, Leleux, Leroux et H. Leroy, Mmes Lherbier et Lopez, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mme Micouleau, MM. Milon et de Montgolfier, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Panunzi, Pellevat, Perrin, Pierre, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia, Puissat et Raimond-Pavero et MM. Raison, Rapin, Reichardt, Retailleau, Revet, Savary, Savin, Schmitz, Sol, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il peut, le cas échéant, proposer au candidat une place dans une autre formation dispensée par son établissement, dont il considère qu’elle est plus adaptée à son profil.
La parole est à M. Olivier Paccaud.
M. Olivier Paccaud. Cet amendement a pour objet de donner au président ou au directeur de l’établissement d’enseignement la possibilité de proposer à un candidat une formation qu’il n’a pas choisie et qui est dispensée dans son établissement, s’il considère qu’elle correspond mieux à son profil.
Le but est d’éviter que se renouvelle la situation que nous avons connue cette année : des milliers de jeunes se sont retrouvés sans affectation alors que certaines formations auraient pu leur être proposées. Il serait navrant de se priver des compétences, de l’expérience, des talents, des connaissances des directeurs d’établissement, qui peuvent être particulièrement précieux pour proposer à certains bacheliers des options auxquelles ils n’auraient peut-être pas pensé d’eux-mêmes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 15, j’y suis défavorable, étant favorable à la sélection à l’entrée à l’université. On ne peut plus accepter un taux d’échec aussi important. C’est rendre service aux étudiants que de mettre en place, dans un esprit de responsabilité, une correspondance entre les attendus et les compétences.
Monsieur Piednoir, je suis entièrement d’accord avec l’analyse que vous avez faite en présentant l’amendement n° 175, mais des stratégies peuvent aussi se mettre en place lorsqu’il y a hiérarchisation des vœux. Le nouveau dispositif incitera les candidats à prendre leurs responsabilités : ils seront véritablement obligés de choisir quand ils se trouveront placés en situation d’attente. L’appariement entre les compétences et les attendus se fera de manière plutôt paisible et objective. N’oublions que 850 000 lycéens, y compris les redoublants, sont concernés par ce processus. Peut-être pourrait-on envisager une hiérarchisation des vœux en fin de procédure pour l’année prochaine, mais en tout cas il est trop tard pour la rentrée de 2018. Je sollicite donc le retrait de cet amendement.
Je suis défavorable aux amendements nos 49 rectifié ter et 94 rectifié bis présentés par Mme Mélot, car ils sont contraires au principe de l’autonomie des universités posé par la loi LRU.
Enfin, l’idée qui sous-tend l’amendement n° 174 est très intéressante, mais elle peut être techniquement difficile à mettre en œuvre. Je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 15.
L’amendement n° 175 est un amendement d’appel, comme vous l’avez précisé, monsieur Piednoir. Le sujet du classement des vœux doit être appréhendé dans sa globalité. Il est très compliqué de demander à un lycéen de hiérarchiser ses vœux avant de savoir si la réponse à tel ou tel vœu sera « oui » ou « oui, si ». Avec un maximum de vingt-huit choix possibles, entre les vœux et les sous-vœux, nous avons malgré tout « réduit la voilure », si je puis dire, par rapport à l’an dernier, où certains lycéens ont pu faire jusqu’à 144 vœux, ce qui laisse rêveur quant à l’accompagnement dont ils ont pu bénéficier pour leur orientation…
Nous avons aussi souhaité rendre le lycéen et sa famille responsables tout au long du processus. En effet, cet été, outre les appels sur les numéros verts de lycéens qui n’avaient pas eu de propositions, de nombreux candidats nous ont expliqué qu’ils avaient obtenu une réponse positive pour leur dixième vœu, mais qu’après réflexion ils préféreraient finalement voir satisfait leur douzième ou quatorzième vœu.
Nous avons donc décidé de prévoir que, chaque fois qu’un lycéen aura obtenu deux réponses positives, il devra choisir l’une d’elles, en conservant le droit d’en attendre d’autres ou de renoncer à certains de ses vœux. C’est aussi une façon d’apprendre à faire des choix en responsabilité. L’an dernier, il s’écoulait un mois entre la première réponse et la seconde. Les lycéens restaient donc dans l’incertitude pendant quatre semaines. Avec le nouveau système, dès qu’un lycéen aura fait un choix entre les réponses positives obtenues, cela libérera des places pour les autres. Ainsi, la période d’attente sans recevoir aucune nouvelle sera beaucoup moins longue.
Enfin, la plateforme pourra adresser des informations non seulement aux lycéens, mais aussi à leurs familles et aux professeurs principaux, de manière que ceux-ci puissent savoir où en sont les lycéens, les accompagner et, éventuellement, les conseiller dans leur choix entre les réponses positives reçues.
En conclusion, je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
Je sollicite également le retrait des amendements nos 49 rectifié ter et 94 rectifié bis, dont le dispositif descend à un trop grand niveau de précision. Il revient aux établissements de déterminer, selon les filières, quels critères sont à prendre en considération.
Enfin, le dispositif de l’amendement n° 174 correspond tout à fait au rôle que nous avons souhaité confier à la commission d’accès au supérieur. Je crains néanmoins que, tel qu’il est rédigé, il ne donne un peu trop de place aux arrangements de gré à gré. Il nous semble préférable qu’il revienne à la commission d’accès au supérieur, qui réunira les chefs d’établissement, les présidents d’université, le recteur, etc., de proposer le cas échéant au candidat une place dans une autre formation. Il ne faudrait pas que des lycéens se satisfassent d’être acceptés dans une autre formation dispensée par l’établissement qu’ils visaient sans savoir que, peut-être, une solution qui leur conviendrait encore mieux existe dans un établissement voisin, comme nous avons pu l’observer l’an dernier. Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote sur l’amendement n° 175.
M. Stéphane Piednoir. Je reste un peu sceptique sur les délais, notamment parce que les très bons élèves recevront sans doute rapidement plusieurs réponses positives : tant qu’ils n’auront pas fait leur choix, les autres devront attendre et le système se trouvera bloqué. Même si les délais sont un peu raccourcis par rapport à APB, le dispositif n’est donc pas totalement satisfaisant. Néanmoins, ayant bien conscience que la hiérarchisation des vœux ne figure pas dans le texte, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 175 est retiré.
Madame Mélot, les amendements nos 49 rectifié ter et 94 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Mme Colette Mélot. Non, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 49 rectifié ter et 94 rectifié bis sont retirés.
Monsieur le rapporteur, vous souhaitiez entendre l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 174 : quel est maintenant celui de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. J’ai entendu les observations de Mme la ministre quant aux risques présentés par les arrangements de gré à gré. Je sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Paccaud, l’amendement n° 174 est-il maintenu ?
M. Olivier Paccaud. J’entends bien, moi aussi, les arguments de Mme la ministre relatifs aux arrangements de gré à gré et au rôle de la commission d’accès au supérieur. Si tel est réellement le fonctionnement de celle-ci, cela me convient tout à fait. Je retire donc l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 174 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 180 rectifié, présenté par MM. Paccaud, Babary et Bazin, Mme A.M. Bertrand, MM. Chaize, Daubresse et Dufaut, Mmes Gruny, Lamure, Lavarde et Lassarade et MM. H. Leroy, Pierre, Rapin, Retailleau et Schmitz, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 12
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« IV. – Pour l’accès aux formations autres que celles mentionnées au V, et compte tenu du nombre de candidats à ces formations résidant dans l’académie, l’autorité académique fixe, afin de faciliter l’accès des bacheliers… (le reste sans changement)
III. – Alinéa 16
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Olivier Paccaud.
M. Olivier Paccaud. Le projet de loi prévoit un dispositif de discrimination positive à l’entrée dans l’enseignement supérieur. Il sera ainsi possible, pour les filières en tension où le nombre de demandes excède les capacités d’accueil, ainsi que pour les filières sélectives, de fixer un pourcentage minimal de candidats boursiers devant être admis.
Tout procédé de discrimination positive a ses vertus, mais il engendre inévitablement des discriminations négatives. Très concrètement, outre sa complexité, le système prévu par le projet de loi donne la priorité à certains candidats selon des critères autres que le parcours ou le mérite. Cette inégalité ne peut qu’engendrer un sentiment d’injustice chez les autres candidats.
Le présent amendement vise donc à supprimer la priorité donnée aux boursiers pour l’accès à certaines filières de l’enseignement supérieur.
Madame le ministre, lors de votre intervention dans la discussion générale, vous avez utilisé à deux reprises l’expression « méritocratie républicaine », qui me convient parfaitement. Il est évident qu’il faut aider les élèves boursiers de toutes les façons possibles, mais il ne faut pas que cela se fasse au détriment d’élèves méritants, issus parfois de familles modestes, mais non boursiers.
M. le président. L’amendement n° 184 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 12, première phrase
Au début de cette phrase,
Insérer les mots :
En dehors de l’académie de Paris,
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. L’accès aux universités parisiennes, considérées comme les plus prestigieuses, demeure très compliqué pour les bacheliers n’ayant pas fait leur scolarité à Paris, y compris pour ceux en provenance de l’académie de Créteil ou de celle de Versailles.
Le projet de loi, tel qu’il est rédigé, aggrave les inégalités qui existent d’ores et déjà en matière d’accès aux universités parisiennes. En effet, la fixation d’un pourcentage maximal de bacheliers en provenance d’autres académies freinera l’accès de ces derniers aux établissements situés dans l’académie de Paris. Il me semble pourtant essentiel de permettre aux universités parisiennes d’accueillir des étudiants d’horizons divers. Le présent amendement vise donc à exclure l’académie de Paris du champ d’application du pourcentage maximal de bacheliers « hors académie ».
M. le président. L’amendement n° 185 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par les mots :
et, pour les établissements situés en Île-de-France, un pourcentage minimal de bacheliers ne résidant pas dans cette région
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Le présent amendement vise à corriger les inégalités d’accès aux filières sélectives. En effet, le système actuel favorise en permanence les étudiants qui ont fait leur scolarité à Paris. Or les grandes écoles les plus cotées recrutent de plus en plus dans les classes préparatoires parisiennes.
Notre groupe considère que l’accès aux meilleures filières sélectives doit être fondé sur le seul mérite de l’étudiant, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, car les bacheliers parisiens sont privilégiés. Le milieu parisien est impénétrable par des étudiants d’horizons autres. Cette endogamie est dommageable pour la capacité d’ouverture des jeunes.
Il convient donc de fixer un pourcentage minimal de bacheliers résidant en dehors de la région francilienne pour l’accès aux filières sélectives franciliennes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. M. Paccaud soulève une vraie question au travers de l’amendement n° 180 rectifié. Il est vrai que les seuils fondés sur les catégories socioprofessionnelles d’origine des candidats suscitent un très fort sentiment d’injustice chez ceux qu’ils excluent : certains ne sont pas assez pauvres pour être aidés, mais pas assez riches pour réussir sans aide… L’École normale supérieure de Lyon propose même des formations réservées aux boursiers ! Cela étant, on ne peut pas supprimer les dispositifs en faveur des jeunes issus de milieux modestes. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.
Quant à l’amendement n° 184 rectifié bis, j’estime que la meilleure solution serait, non pas de supprimer le quota de bacheliers hors académie, mais de fixer, pour l’académie de Paris, un quota supérieur à celui qui s’appliquera dans les autres académies. Cela réglerait bien des problèmes. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
En ce qui concerne l’amendement n° 185 rectifié bis, je crains que l’adoption de règles supplémentaires ne soit contre-productive et ne transforme le dispositif en une véritable « usine à gaz ». On verrait alors nécessairement fleurir des stratégies de contournement. L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. En ce qui concerne l’amendement n° 180 rectifié, je crois très important d’adresser aux boursiers le signal qu’ils ont évidemment eux aussi accès à l’ensemble des filières de l’enseignement supérieur. L’avis du Gouvernement est défavorable.
Quant à l’amendement n° 184 rectifié bis, l’académie de Paris, de façon générale, est traitée de manière spécifique. En effet, grâce à un travail mené avec les universités, nous sommes déjà en mesure d’offrir aux candidats, dans un certain nombre de cas, la possibilité de faire des vœux groupés, qui sont traités à l’échelle non de l’académie, mais de la région d’Île-de-France. Dans d’autres cas, en fonction des filières, les vœux restent traités à l’échelon de l’académie.
J’entends tout à fait qu’il est très important que des bacheliers franciliens, ne résidant pas à Paris intra-muros, puissent venir étudier à Paris. Cependant, je ne souhaite pas que les universités périphériques se voient vidées de leurs meilleurs étudiants. C’est pourquoi nous avons travaillé avec l’ensemble des universités sur la définition du périmètre pour le traitement des vœux en fonction du niveau de tension des diverses filières : selon les cas, il s’effectuera à l’échelon de l’académie ou à l’échelon régional. Je vous demande donc, madame Carrère, de bien vouloir retirer cet amendement ; sinon, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
J’adresserai la même demande à Mme Laborde à propos de l’amendement n° 185 rectifié bis. En effet, les filières sélectives ne sont pas soumises à un principe de territorialité. C’est d’ailleurs un sujet de préoccupation puisque, aujourd’hui, il n’y a quasiment plus d’étudiants issus des classes préparatoires des lycées de province parmi les candidats admis dans les cinq à dix grandes écoles les plus prestigieuses de France. À l’inverse de ce que vous dites, madame la sénatrice, les classes préparatoires des lycées parisiens accueillent déjà largement les meilleurs bacheliers des lycées de province. Il conviendrait plutôt d’inverser cette tendance.
M. le président. Madame Carrère, l’amendement n° 184 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Maryse Carrère. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 184 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote sur l’amendement n° 185 rectifié bis.
Mme Françoise Laborde. Je ne suis pas sûre de vous avoir tout à fait bien comprise, madame la ministre. Je demande que l’on fixe un pourcentage minimal de bacheliers résidant en dehors de la région francilienne pour l’accès aux filières sélectives franciliennes. Or vous me dites que l’on trouve dans ces dernières de nombreux étudiants étant passés par les classes préparatoires des lycées parisiens… J’aimerais obtenir des explications supplémentaires.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Il n’y a pas de principe de territorialité qui s’applique pour les inscriptions en classes préparatoires aux grandes écoles, ce qui fait qu’actuellement les classes préparatoires franciliennes comptent un très fort pourcentage de bacheliers non franciliens. Or votre amendement vise à garantir un pourcentage minimal de bacheliers ne résidant pas dans la région… Je réitère ma demande de retrait.
M. le président. Madame Laborde, l’amendement n° 185 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 185 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 113 rectifié, présenté par Mmes Lepage et S. Robert, MM. Kanner et Assouline, Mme Blondin, M. Magner, Mme Monier, MM. Roux, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 12, seconde phrase
Remplacer cette phrase par une phrase et trois alinéas ainsi rédigés :
Pour l’application du présent alinéa, sont assimilés à des candidats résidant dans l’académie où se situe la formation à laquelle ils présentent leur candidature :
« 1° Les candidats ressortissants français ou ressortissants d’un État membre de l’Union européenne qui sont établis hors de France ;
« 2° Les candidats préparant ou ayant obtenu le baccalauréat français dans un centre d’examen à l’étranger ;
« 3° Les candidats qui souhaitent accéder à une formation ou à une première année commune aux études de santé qui n’est pas dispensée dans leur académie de résidence.
La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Cet amendement vise simplement à clarifier la rédaction du texte, s’agissant de la présentation des catégories dérogatoires au dispositif de priorité d’accès académique aux filières non sélectives sous tension. La rédaction actuelle aboutit à mêler les candidats français résidant à l’étranger à ceux de la filière PACES, la première année commune aux études de santé, pour lesquels les motifs de dérogation répondent à des situations différentes. Notre amendement tend seulement à modifier l’ordonnancement de la phrase.
M. le président. L’amendement n° 186 rectifié bis, présenté par Mmes Laborde et Costes, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 12, seconde phrase
Après les mots :
hors de France
insérer le mot :
métropolitaine
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Dans le même esprit que les amendements nos 184 rectifié bis et 185 rectifié bis, le présent amendement vise à favoriser l’accès des bacheliers d’outre-mer aux formations dispensées en France métropolitaine. Cela est d’autant plus fondamental que les bacheliers résidant en outre-mer ne disposent pas de la même offre de formations que ceux de métropole. Le dispositif du projet de loi risquant de les écarter des formations qu’ils ont choisies en raison de l’application d’un pourcentage maximal de bacheliers résidant hors académie, nous proposons que les candidats ayant obtenu leur baccalauréat en outre-mer soient considérés comme résidant dans l’académie où se situe l’établissement de leur choix.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Grosperrin, rapporteur. Je tiens à saluer la rédaction proposée au travers de l’amendement n° 113 rectifié. Elle est en effet beaucoup plus claire. L’avis de la commission est donc favorable.
En ce qui concerne l’amendement n° 186 rectifié bis, l’outre-mer n’est pas l’étranger ; c’est la France. Pourquoi un bachelier ultramarin devrait-il avoir la priorité sur un bachelier corse ou breton pour faire des études à Bordeaux ? L’égalité républicaine doit être respectée. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.) L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’adoption de l’amendement n° 113 rectifié, qui améliorera en effet largement la lisibilité du texte.
Quant à l’amendement n° 186 rectifié bis, il est déjà prévu que les candidats ultramarins soient considérés comme résidant dans l’académie où est dispensée la formation demandée lorsque celle-ci n’existe pas à proximité de leur territoire d’origine. Il me semble en effet important de pouvoir, dans ce cas, leur garantir la poursuite de leurs études. En revanche, lorsque la formation demandée existe près de chez eux, ils doivent évidemment être traités comme tous les autres bacheliers français. Je vous demande donc, madame Laborde, de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi l’avis du Gouvernement sera défavorable.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 186 rectifié bis n’a plus d’objet.
Mes chers collègues, nous avons examiné 78 amendements au cours de la journée ; il en reste 106.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 8 février 2018, à dix-heures trente, quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :
Dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes par M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes.
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants (n° 193, 2017-2018) ;
Rapport de M. Jacques Grosperrin, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 241, 2017-2018) ;
Avis de Mme Frédérique Gerbaud, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 233, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 242, 2017-2018).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
nomination d’un membre de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne
Le groupe socialiste et républicain a présenté une candidature pour la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne.
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : M. Claude Bérit-Débat est membre de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne, en remplacement de M. Patrick Kanner, démissionnaire.
nomination des membres d’une commission d’enquête
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 8 du règlement, la liste des candidatures préalablement publiée est ratifiée :
Commission d’enquête sur l’organisation et les moyens des services de l’État pour faire face à l’évolution de la menace terroriste après la chute de l’État Islamique (21 membres)
Mmes Esther Benbassa, Martine Berthet, MM. Philippe Bonnecarrère, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Mme Hélène Conway-Mouret, M. Marc-Philippe Daubresse, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Alain Fouché, Jacques Genest, Mmes Marie-Pierre de la Gontrie, Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Noël Guérini, Laurent Lafon, Jean-Yves Leconte, Antoine Lefèvre, Rachel Mazuir, Ladislas Poniatowski, André Reichardt, Hugues Saury et Rachid Temal.
nomination de membres de deux éventuelles commissions mixtes paritaires
Projet de loi relatif à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024
La liste des candidats établie par la commission des lois a été publiée conformément à l’article 12 du règlement. Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 9 du règlement, cette liste est ratifiée.
Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte commun sur le projet de loi relatif à l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 sont :
Titulaires : M. Philippe Bas, Mmes Muriel Jourda, Sophie Primas, M. Claude Kern, Mme Marie-Pierre de la Gontrie, MM. Jean-Jacques Lozach et Dominique Théophile ;
Suppléants : Mme Maryse Carrère, M. Marc Daunis, Mme Catherine Di Folco, MM. Pierre Laurent, Hervé Marseille, Philippe Pemezec et Michel Savin.
Projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants
La liste des candidats établie par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a été publiée conformément à l’article 12 du règlement. Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai prévu par l’article 9 du règlement, cette liste est ratifiée.
Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte commun sur le projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants sont :
Titulaires : Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jacques Grosperrin, Mme Frédérique Gerbaud, M. Stéphane Piednoir, Mme Sylvie Robert, MM. David Assouline et Antoine Karam ;
Suppléants : M. Jean-Claude Carle, Mmes Laure Darcos, Nadine Grelet-Certenais, Mireille Jouve, MM. Laurent Lafon, Pierre Ouzoulias et Olivier Paccaud.
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD