Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat. Alors que la progression de l’artificialisation des sols reste sur le territoire des communes littorales 2,7 fois supérieure à la moyenne nationale, le Gouvernement entend ne pas remettre en cause les principes fondateurs de la loi Littoral.

En tout état de cause, l’objectif visé par cet amendement est déjà satisfait. En effet, il revient au SCOT et au PLU de planifier les capacités d’accueil, en particulier dans les communes littorales où le foncier est très contraint, et d’identifier les secteurs destinés à accueillir des logements pour les saisonniers agricoles dans le respect des dispositions de la loi Littoral.

Les collectivités se sont d’ores et déjà saisies de la question à travers leurs documents de planification. À titre d’exemple, le SCOT du pays de l’Or prévoit des dispositions visant à faciliter l’accueil des travailleurs saisonniers dans le respect de la loi Littoral, à savoir une intégration prioritaire dans le tissu urbain et dans le tissu villageois local.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement, qui vise à étendre encore la portée de l’article 9.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Grand. Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous interpeller sur cette affaire extrêmement grave. Je parle sous le contrôle de Mme Bruguière, élue du secteur : il s’agit de zones situées cinq kilomètres dans les terres et non de territoires en bord de mer ! Il s’agit donc de grandes fermes, de grands espaces, avec un besoin important de main-d’œuvre. Il faut que vous veniez voir ce qui s’y passe ! Il faut que vous en parliez également au ministre de l’intérieur, chargé de l’immigration !

Ces dernières années, de nombreux saisonniers sont venus d’Amérique du Sud. Pour l’État, c’est capital. Tous les filtres de l’immigration fonctionnent, toutes les garanties pour les agriculteurs employeurs sont présentes. Cette main-d’œuvre ne se dispersera pas ensuite dans la nature, contrairement à celle issue de pays moins lointains.

Bref, cette main-d’œuvre qui vient de loin est particulièrement contrôlée aux frontières par l’État et elle ne risque pas de s’égailler dans la nature, avec toutes les interrogations que cela entraîne. Un peu de bon sens et de dignité humaine ! Il s’agit uniquement de loger décemment cette population. La condition humaine des travailleurs saisonniers doit être au moins égale à celle des travailleurs dans l’ensemble du pays.

Voilà pourquoi, madame la secrétaire d’État, je vous invite cet été à venir visiter ces endroits. Ces gens ne peuvent pas continuer à vivre comme cela, avec tous les risques de dérives que cela entraîne. Après tout, Lunel n’est pas si loin. Réfléchissez donc bien avant d’émettre un avis négatif sur cet amendement ! (M. Jean Bizet et Mme Marie-Thérèse Bruguière applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. Je rejoins, bien sûr, mes deux collègues sénateurs de l’Hérault.

Ma collègue Marie-Thérèse Bruguière a évoqué Mauguio et la culture des melons, mais il existe aussi sur ce territoire une agriculture de maraîchage, qui demande beaucoup de main-d’œuvre. Les agriculteurs sur le secteur, qui veulent loger décemment les saisonniers, ont besoin de les avoir sur place, sur l’exploitation.

Cet amendement va dans le bon sens, d’autant qu’il répond à la volonté des agriculteurs de jouer la carte du circuit court. Mauguio est en effet situé à quelques kilomètres de Montpellier. Comment promouvoir les circuits courts si la loi Littoral empêche l’hébergement des saisonniers ?

Mme la présidente. Madame Bruguière, l’amendement n° 18 rectifié quater est-il maintenu ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 18 rectifié quater.

(Lamendement est adopté.) – (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 9.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Article additionnel après l'article 9 - Amendement n° 18 rectifié quater
Dossier législatif : proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux
Article additionnel après l'article 9 - Amendement n° 24 rectifié quater

L’amendement n° 36 rectifié bis, présenté par MM. Chevrollier et Priou, Mme Lavarde, MM. J.M. Boyer, Gilles et de Legge, Mme Imbert, MM. Chaize, de Nicolaÿ, Mouiller et Pellevat, Mme Chain-Larché, MM. Babary, Bonne, D. Laurent, Piednoir et Le Gleut, Mmes Lamure et Bories et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 121-12 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après les mots : « de l’énergie mécanique du vent », sont insérés les mots : « ou de l’énergie solaire » ;

2° Le troisième alinéa est complété par les mots : « , ou à compromettre les activités agricoles lorsqu’il s’agit d’installations photovoltaïques au sol ».

La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

M. Guillaume Chevrollier. En cohérence avec l’objectif visant à en encourager le développement durable des territoires littoraux, le présent amendement a pour objet d’étendre aux installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire le dispositif applicable aux éoliennes, qui permet de déroger aux dispositions de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme lorsque l’implantation de ces installations est incompatible avec le principe général d’extension de l’urbanisation en continuité des zones urbanisées.

Bien entendu, l’implantation de ces équipements devra se faire dans le respect des conditions prévues à cet article, c’est-à-dire en dehors des espaces proches du rivage et en veillant à ne pas porter atteinte à l’environnement, aux activités agricoles, ainsi qu’aux sites et aux paysages remarquables.

Concrètement, l’objectif est de pouvoir utiliser des espaces déjà artificialisés, tels que d’anciennes décharges réhabilitées, d’anciennes carrières ou des sites militaires désaffectés, pour y implanter des installations de production d’électricité à l’aide d’énergie solaire, ce qui contribuera à atteindre les objectifs de transition énergétique.

Article additionnel après l'article 9 - Amendement n° 36 rectifié bis
Dossier législatif : proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux
Article additionnel après l'article 9 - Amendement n° 8 rectifié bis

Mme la présidente. L’amendement n° 24 rectifié quater, présenté par M. D. Laurent, Mme Imbert, M. Bazin, Mmes Deseyne et Estrosi Sassone, MM. de Nicolaÿ, Savary et Lefèvre, Mmes Lherbier et Lamure, MM. Babary et Husson, Mme Gruny et MM. Gremillet et Cuypers, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 121-12 est complété par les mots : « et les ouvrages nécessaires à la production d’électricité à partir de l’énergie radiative du soleil lorsqu’ils se situent sur des sites dégradés définis par décret » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 121-39, après le mot : « habitées », sont insérés les mots : « et des ouvrages nécessaires à la production d’électricité à partir de l’énergie radiative du soleil lorsqu’ils se situent sur des sites dégradés définis par décret  ».

La parole est à M. Daniel Laurent.

M. Daniel Laurent. La loi Littoral du 3 janvier 1986 vise dans ses principes à garantir l’équilibre entre protection, aménagement et mise en valeur du littoral.

Les dispositions d’urbanisme prévoient que l’urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et les villages. Les centrales photovoltaïques sont ainsi considérées comme de l’urbanisation par la jurisprudence et doivent être réalisées en continuité de zones urbanisées, affectées à l’habitation ou non. Des projets de centrales photovoltaïques portés par des communes littorales, visant à valoriser ou réhabiliter des sites dégradés – anciens centres d’enfouissement technique ou carrières remises en eau –, ne peuvent aboutir, car ils sont considérés comme une extension d’urbanisation en discontinuité de l’urbanisation existante.

Le cahier des charges du 11 décembre 2017 de l’appel d’offres portant sur la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir d’énergie solaire, photovoltaïque ou éolienne indique, pages 9 et 10 du document, les quatorze types de sites dégradés ou prioritaires sur lesquels l’implantation d’installations photovoltaïques peut être envisagée, sous réserve d’être en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement. Or on admettra aisément que les sites dégradés peuvent ne pas être en continuité de l’urbanisation.

Dans l’île d’Oléron, en Charente-Maritime, la communauté de communes est porteuse de trois projets, situés dans des zones dégradées. À ce jour, ils sont bloqués, alors qu’ils représentent 3 gigawatts de production électrique par an soit 10 % de l’objectif TEPOS, territoires à énergie positive, à horizon de 2030.

Au vu des enjeux liés à la transition écologique, le présent amendement vise à modifier le code de l’urbanisme pour permettre l’autorisation de centrales solaires au sol sur des sites dégradés définis par décret en zone littorale, à l’instar des dispositions applicables aux installations éoliennes issues de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 18 août 2015.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 45, présenté par M. Priou, est ainsi libellé :

Amendement n° 24 rectifié quater

I. - Alinéa 4

Après le mot :

soleil

insérer les mots :

ainsi que les installations de services publics de traitement ou de stockage des déchets

II. - Alinéa 5

Après le mot :

soleil

insérer les mots :

ainsi que des installations de services publics de traitement ou de stockage des déchets

La parole est à M. Christophe Priou.

M. Christophe Priou. L’article L. 121-8 du code de l’urbanisme prévoit le principe selon lequel « l’extension de l’urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l’environnement ».

La création d’une installation de traitement ou de stockage de déchets est considérée par la jurisprudence comme une extension de l’urbanisation soumise à ce principe de continuité, selon le tribunal de Marseille. Les communes littorales sont donc soumises à un régime plus strict que celles soumises à la loi Montagne, qui admet une rupture de continuité avec les espaces urbanisés pour les installations ou équipements publics incompatibles avec le voisinage.

L’amendement proposé vise donc à harmoniser les dispositifs de la loi Littoral et celui de la loi Montagne et tend à aligner le régime juridique des installations de services publics de traitement ou de stockage de déchets avec celui des éoliennes, sans porter atteinte aux exigences en matière de protection de l’environnement, ce qui permet ainsi de revaloriser utilement un site dégradé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur. L’amendement n° 36 rectifié bis est proche des amendements nos 31 et 38 rectifié, qui ont été retirés au profit de l’amendement n° 24 rectifié quater. Il vise à permettre l’installation de centrales solaires en discontinuité de l’urbanisation existante.

Je propose également à M. Chevrollier de le retirer, au profit de l’amendement n° 24 rectifié quater, qui vise à créer une dérogation à la règle d’urbanisation en continuité sur les territoires littoraux pour permettre l’installation de centrales solaires sur des sites dégradés en dehors des espaces proches du rivage. Actuellement, l’article L. 121-12 du code de l’urbanisme prévoit qu’une telle dérogation est possible s’agissant d’installations éoliennes, lorsque celles-ci ne peuvent être installées à proximité de zones habitées.

Il paraît cohérent, tant au regard des ambitions de transition énergétique que de l’objectif de développement durable des territoires littoraux, d’autoriser la construction de centrales solaires sur d’anciens sites d’usines ou de décharges à l’arrêt, qui pourraient ainsi être réhabilités et valorisés.

Actuellement, les appels d’offres lancés par le Gouvernement relatifs à la construction de centrales solaires prévoient explicitement, comme l’une des conditions possibles d’implantation, le fait de créer une installation solaire sur un site dégradé. Ces appels d’offres définissent d’ailleurs précisément la nature de ces sites : il peut s’agir d’un ancien site pollué, d’une ancienne installation de stockage de déchets, d’un ancien aérodrome ou d’une friche industrielle. D’autres sites sont également possibles. Or on nous a rapporté plusieurs cas de projets solaires sur des sites dégradés n’ayant pu aboutir en raison des dispositions législatives en vigueur. C’est arrivé en Charente-Maritime, à la Barre de Monts en Vendée et dans de nombreux autres endroits.

Aussi la dérogation prévue par l’amendement n° 24 rectifié quater est-elle cohérente avec la vision pragmatique de la proposition de loi, qui vise à pouvoir adapter les dispositions de la loi Littoral pour permettre un développement intelligent et durable des territoires littoraux. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement, auquel se sont déjà ralliés nos autres collègues, ce dont je les remercie.

Le sous-amendement n° 45 est un copier-coller : il tend à prévoir, comme pour les centrales solaires, la possibilité de déroger aux dispositions de loi Littoral pour permettre l’implantation d’installations de traitement ou de stockage de déchets dans des sites dégradés, en dehors des espaces proches du rivage. La loi aujourd’hui ne permet pas l’implantation de telles installations en continuité des zones urbanisées.

À l’occasion d’un déplacement en Corse avec le président de la commission il y a un an et demi, j’ai pu me rendre compte des difficultés que pouvait poser la loi Littoral. Certaines communes sont concernées à la fois par la loi Montagne et par la loi Littoral, comme du reste un grand nombre de communes en France.

La commission a donc émis un avis favorable sur ce sous-amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement ne peut être favorable à l’amendement n° 36 rectifié bis, alors que l’artificialisation des sols progresse au galop sur le littoral et que la superficie des terres naturelles et agricoles y diminue plus vite qu’ailleurs, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire. D’une part, cet amendement n’est pas cohérent avec l’objectif général de protection des terres naturelles et agricoles ; d’autre part, il n’est pas justifié s’agissant de projets photovoltaïques, qui, à la différence des projets éoliens, ne sont pas soumis à des distances d’éloignement.

De même, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 24 rectifié quater. Porter atteinte au principe d’extension de l’urbanisation en continuité, qui est un principe fondateur de la loi Littoral, est inopportun de manière générale alors que le taux d’artificialisation des sols sur les communes littorales est presque trois fois plus élevé qu’ailleurs, en tout cas 2,7 fois plus important que la moyenne métropolitaine. La progression va s’accélérant.

Les sites dégradés sont des cas particuliers. Ils peuvent potentiellement accueillir des installations solaires, mais leur cas mérite d’être analysé dès lors qu’ils sont situés en zone littorale. En outre, tel qu’il est actuellement rédigé, l’amendement ne définit pas la notion de site dégradé. Il ne définit pas non plus un équilibre clair, qui doit pourtant être trouvé, avec la loi Littoral. Ce sujet pourra être discuté dans le cadre du groupe de travail sur le solaire que va constituer mon ministère. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Monsieur Chevrollier, l’amendement n° 36 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Guillaume Chevrollier. Suivant les recommandations du rapporteur, je retire cet amendement au profit de l’amendement n° 24 rectifié quater, qui vise à atteindre les mêmes objectifs.

Mme la présidente. L’amendement n° 36 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote sur l’amendement n° 24 rectifié quater.

M. Michel Canevet. Il est important qu’une véritable transition énergétique soit possible dans les zones littorales et qu’on puisse y produire de l’énergie. Tel était le sens des amendements déposés par Joël Labbé et Jacques Le Nay. Il faut permettre l’émergence de projets dans des secteurs assez difficiles d’accès, en particulier dans les îles, dont il faut favoriser l’autonomie énergétique.

Il est dommage que les propositions présentées tout à l’heure n’aient pas été acceptées et que l’on s’oriente vers des plus mesures restrictives. On évoque maintenant la nécessité de recourir à un décret – procédure assez lourde –, pour pouvoir déployer des outils nouveaux de production énergétique sur les territoires littoraux, en particulier dans les territoires insulaires. C’est vraiment dommage.

Je voterai tout de même l’amendement n° 24 rectifié quater, mais je regrette de telles mesures restrictives, car elles empêcheront de mettre en œuvre de nombreux projets…

M. Michel Canevet. … et donc de favoriser la transition énergétique. J’avais pourtant cru comprendre, madame la secrétaire d’État, qu’il s’agissait là de l’une des priorités de votre ministère…

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Priou, pour explication de vote.

M. Christophe Priou. Permettez-moi d’évoquer un cas de figure auquel le ministère pourrait peut-être réfléchir : la création d’une décharge en continuité de l’urbanisation conduirait à consommer cinq hectares d’espaces non utilisés, alors que la réhabilitation d’une ancienne décharge sur un site dégradé n’en consommerait que trois ! Non seulement on va consommer plus d’espace, mais on va aussi créer des problèmes de voisinage. Il y a là une contradiction.

J’espère que les groupes de travail sur le solaire, l’éolien ou d’autres sujets feront preuve du bon sens nécessaire, notamment à la préservation des espaces agricoles. Dans mon département, nous avons réduit la consommation de ces espaces grâce au schéma de cohérence territoriale, grâce aussi au bon travail avec les services de l’État.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Laurent, pour explication de vote.

M. Daniel Laurent. Je remercie tout d’abord la commission d’avoir émis un avis favorable sur l’amendement que j’ai proposé.

Je tiens ensuite à rappeler à Mme la secrétaire d’État, qui a l’air d’en douter, que l’objet de l’amendement est bien de valoriser et de réhabiliter les sites dégradés.

Enfin, j’ai cru comprendre que l’État devait être « facilitateur ». Aussi, merci de nous montrer combien vous êtes « facilitatrice », madame la secrétaire d’État ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Claude Luche applaudit également.)

M. Jean Bizet. C’est tout un programme !

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Pour aller dans le même sens et pour montrer qu’on est aussi là pour avancer, je veux dire qu’il y a une vraie différence : les installations photovoltaïques se démontent. Cette notion est à mon avis essentielle. Tel était le sens de mes critiques, y compris sur les ZART, tout à l’heure.

Notre but n’est pas de geler les territoires, il est d’éviter de mettre en œuvre des choses sur lesquelles on ne pourra pas revenir. Le photovoltaïque ne pose pas cette difficulté. Dans ce cas, je pense donc qu’on pourrait ouvrir une possibilité.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 45.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 24 rectifié quater, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 9.

Article additionnel après l'article 9 - Amendement n° 24 rectifié quater
Dossier législatif : proposition de loi relative au développement durable des territoires littoraux
Article additionnel après l'article 9 - Amendement n° 14 rectifié decies

L’amendement n° 8 rectifié bis, présenté par MM. Luche, A. Bertrand, Bonnecarrère, Canevet, Cigolotti, Delcros, Laugier, Longeot, Louault, A. Marc, Médevielle et Moga, Mme Vermeillet et M. Vanlerenberghe, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 121-16 du code de l’urbanisme est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les étendues d’eau artificielles intérieures situées en zone de montagne, cette distance peut être réduite à cinquante mètres à compter des plus hautes eaux par les documents d’urbanisme de la collectivité concernée. »

La parole est à M. Jean-Claude Luche.

M. Jean-Claude Luche. J’ai souligné tout à l’heure que la loi Littoral s’appliquait à la Méditerranée et à l’Atlantique – j’ai oublié d’indiquer qu’elle s’appliquait également à la Manche et à la mer du Nord –, ainsi qu’aux lacs intérieurs. L’Aveyron possède un lac de plus de 1 000 hectares, auquel s’applique la loi Littoral, ce qui est un lourd handicap pour le développement de l’ensemble des communes riveraines et du département.

Mes chers collègues, cet amendement vise à permettre la construction de nouvelles résidences en zones de montagne, à proximité des étendues d’eau artificielles – mais non des lacs naturels –, en fonction d’un certain nombre de critères. Ces lacs sont nés de la main de l’homme, ils ne sont pas naturels.

Je le souligne, car c’est important, ces constructions se feront dans le respect des règles environnementales, lesquelles seront précisées dans les PLU. Les élus locaux, les communautés de communes, les EPCI, qui sont chargés de l’application des règles d’urbanisme, seront vigilants et veilleront à ce que les projets soient adaptés aux abords des lacs et à ce qu’il n’y soit pas fait n’importe quoi.

L’enjeu est important pour nos départements ruraux, particulièrement pour l’Aveyron et les communes situées autour du lac que je viens d’évoquer. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Alain Marc applaudit également.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur. Nous pouvons partager les objectifs de l’ensemble des élus concernés par la loi Littoral. Toutefois, la commission, l’auteur de la proposition de loi et ses cosignataires ont édicté une règle : ne pas toucher aux principes fondamentaux de la loi Littoral. Or déroger à la bande des 100 mètres, autour d’un lac, qu’il soit artificiel ou naturel, ou sur le rivage, c’est toucher à un principe fondamental de cette loi.

Cet amendement vise à permettre une réduction de la largeur de la bande littorale de 50 mètres autour des plans d’eau artificiels situés en zone de montagne, via un PLU.

Nous sommes réticents à modifier de telles règles, sans connaissance préalable des effets de ces modifications. Diviser par deux la largeur de la bande littorale, qui vise précisément à faire prévaloir un principe d’inconstructibilité sur la partie la plus sensible du rivage, n’est pas sans conséquence pour le territoire, sur les dessertes, sur les accès, les réseaux.

On peut également questionner le choix de viser les étendues d’eau artificielles. Je l’ai dit, le rivage d’un lac, qu’il soit artificiel ou naturel, a la même définition, et nos territoires ont été très largement façonnés par la main de l’homme.

Le souhait de relancer la construction nous semble contraire au principe même de la bande littorale, dont la largeur de 100 mètres reste raisonnable. La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement considère que les réflexions sur l’adaptation des territoires littoraux à l’érosion du trait de côte ne doivent pas être l’occasion de remettre en cause la loi Littoral, qui participe de la protection des espaces naturels littoraux et de la lutte contre l’artificialisation des sols depuis plus de trente ans.

Cela a été rappelé, notamment par le sénateur Dantec, un paysage est collectif. Ce principe sous-tend cette loi, à laquelle nous tenons bien évidemment, et ses mécanismes de protection des espaces fragiles, qui sont un levier de plus d’adaptation au processus d’érosion.

Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut être que défavorable à cet amendement, qui tend à revenir sur la protection des espaces naturels situés à proximité immédiate du rivage des grands lacs, au motif qu’ils seraient artificiels.

Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

M. Gérard Cornu, vice-président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. J’entends depuis tout à l’heure Mme la secrétaire d’État parler de remise en cause de la loi Littoral. Or la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ne veut pas du tout remettre en cause la loi Littoral. La preuve en est que, même si M. Luche a de bonnes raisons de défendre son territoire, la commission a émis un avis défavorable sur son amendement.

La proposition de loi que nous examinons est empreinte de pragmatisme. Michel Vaspart y travaille depuis au moins un an et demi. Il s’est beaucoup déplacé et a beaucoup consulté avant de la rédiger. Vous nous dites, madame la secrétaire d’État, qu’il faut du temps, qu’il faut réfléchir à certaines choses. Vous ne pouvez certainement pas faire autrement, car vous êtes liée, mais je pense que vous avez tort d’être dans une attitude de refus.

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, je tiens à le dire publiquement, ne veut pas remettre en cause la loi Littoral. Elle veut simplement l’aménager afin de résoudre de façon pragmatique les problèmes auxquels font face les élus locaux. C’est tout ce que nous voulons faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Alain Marc applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat. Monsieur le vice-président de la commission, loin de nous l’idée de nier la somme de travail que représente cette proposition de loi et son sérieux, bien au contraire.

Nous assistons ici à une joute d’interprétation. La proposition de loi porte sur le trait de côte, qui est un sujet fondamentalement différent de la loi Littoral, même s’il s’agit dans tous les cas du bord de mer. Le Gouvernement, qui est aussi composé d’élus locaux, est ouvert à des clarifications réglementaires de la loi Littoral. Comme je l’ai déjà dit, nous souhaitons travailler dans un esprit de dialogue, être des « facilitateurs », comme vous m’y avez invitée à plusieurs reprises.

Je le répète, cette proposition de loi porte sur le trait de côte. Ce n’est pas le moment de discuter de la loi Littoral, même si nous sommes conscients des tensions qui existent souvent entre préservation de l’environnement et protection de la biodiversité.

Il faut nous prémunir contre certains des risques liés au changement climatique, tenir compte de l’accélération des événements climatiques extrêmes et de la nécessité de se développer. Tel est l’objet du débat qui a lieu ici, qui reflète les tensions qui existent trop souvent entre développement économique et développement durable. Il nous faudra trouver une solution pour dépasser ce clivage à l’avenir. Nous y travaillerons. Il s’agit de faire en sorte que la vie des élus locaux soit la plus facile possible, mais également que nos territoires, quels qu’ils soient, mais en particulier sur les côtes, soient protégés.