M. le président. La parole est à M. Michel Canevet. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Michel Canevet. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, malgré l’heure tardive, il s’agit de l’examen de missions particulièrement importantes en termes de volume financier et aussi parce que, à la fois, elles traitent du passé de la gestion de nos finances publiques et préparent l’avenir. Il est donc essentiel que nous nous attardions quelques instants sur ces crédits.
Le groupe Union Centriste est particulièrement attaché à ce que nous ayons la gestion la plus rigoureuse possible de nos finances publiques. La manière dont ont été gérées nos finances publiques au cours de ces dernières années trouve sa traduction dans l’état de la dette. Tout le monde connaît parfaitement la situation : une dette de plus de 2 200 milliards d’euros, dont près de 1 800 milliards à la charge directe de l’État, un seuil proche de 100 % du PIB. Il importe donc que nous agissions très rapidement pour la réduire. En tout cas, madame la secrétaire d’État, il faudra, dès 2018 et dans les budgets à venir, s’attacher à réduire le déficit public, car c’est la seule façon de réduire la dette.
Or, on le sait bien, le déficit public pour 2018 sera largement supérieur à celui qui est prévu en 2017 : d’un montant de 70 milliards d’euros dans la loi de finances initiale, il passera à 76 milliards, pour atteindre 83 milliards l’année prochaine. C’est dire les efforts qu’il convient de réaliser. Les recettes supplémentaires qui peuvent découler du retour de la croissance ne suffiront pas pour atténuer ce déficit. Aussi, il faut faire des efforts pour réduire la dépense publique qui est, je le rappelle, la plus élevée ou parmi les plus élevées, au sein de l’Union européenne. Le chemin sera long !
Quelques pistes ont déjà été esquissées dans le budget pour 2018 pour ce qui concerne le logement et les contrats aidés dans la mission « Travail et emploi » notamment, mais elles ne seront pas suffisantes.
Parmi nos sujets d’inquiétude figure la dette. Les intérêts de la dette, je le rappelle, représenteront un peu plus de 40 milliards d’euros l’année prochaine. Paradoxalement, quand on regarde leur évolution depuis 2014, ils ont diminué malgré l’augmentation de l’encours de la dette. Nous avons pu profiter de taux d’intérêt extrêmement bas, mais, chacun le sait bien, la situation risque de ne pas durer. Aussi, il nous faut agir en la matière.
À cet égard, je souligne que, en 2018, la France sera, après l’Italie, le plus gros emprunteur de l’Union européenne sur les marchés. C’est pourquoi nous devons nous assurer de trouver les moyens de financer l’ensemble de notre dette, si l’on veut que notre note financière ne soit pas dégradée. C’est dire là encore le chemin qu’il nous reste à parcourir.
Un autre volet des missions que nous examinons ce soir porte sur la question de l’État actionnaire, un point extrêmement important. On le sait bien, au cours de ces dernières années, l’implication de l’État a permis de maintenir dans notre pays un certain nombre de fleurons.
Le groupe Union Centriste ne plaide pas en faveur d’une intervention forcenée de l’État dans l’économie, mais il importe d’y recourir parfois ou de se séparer de nos participations le moment venu. En effet, l’État n’a pas vocation à conserver des participations. À cet égard, nous souhaitons, madame la secrétaire d’État, connaître la véritable stratégie de l’État en la matière. Essayer de se procurer des revenus supplémentaires au travers des dividendes ? Ou avoir simplement des participations stratégiques pour maintenir des fleurons économiques dans notre pays ?
Un autre point sur la question de l’État actionnaire taraude le groupe Union Centriste : la cohérence de l’intervention publique en matière d’actionnariat.
Aujourd’hui, l’actionnariat des entreprises est partagé entre l’État, la Caisse des dépôts et consignations et l’Agence des participations de l’État. Selon nous, il est extrêmement important que la participation soit réalisée de façon cohérente, avec une vraie stratégie, une unité définie. Travaillons pour nous assurer que l’ensemble des outils mis à la disposition de l’État répondent à une démarche parfaitement cohérente. Il importe de définir la stratégie.
Un autre point a été évoqué précédemment par Mme la rapporteur spécial Christine Lavarde, je veux parler de la mission « Investissements d’avenir ».
Nous nous sommes réjouis de constater que le Président de la République avait, dans son programme, des intentions fortes concernant les investissements et le soutien aux investissements dans notre pays. Encore faudrait-il, madame la secrétaire d’État, en trouver la traduction dans les projets de budget qui nous sont présentés. En l’espèce, nous déplorons que les crédits de paiement soient extrêmement limités au regard des engagements du PIA 3. Cela signifie qu’il faudra consentir des efforts extrêmement importants dans le cadre des exercices à venir. Or, on le sait, en termes de recherche, nous avons encore beaucoup d’efforts à faire, puisque nous sommes loin de l’objectif défini par la stratégie de Lisbonne en 2000.
Enfin, concernant la question de dégrèvements, qui est aussi importante, je veux rappeler l’attachement du groupe Union Centriste à la notion de crédit d’impôt recherche. Nous considérons qu’il s’agit là d’un outil absolument essentiel…
M. le président. Il faut conclure, cher collègue !
M. Michel Canevet. … pour encourager les entreprises. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » s’illustre par l’incertitude et la confidentialité qui l’entourent. Cette incertitude et cette confidentialité conduisent progressivement à dessaisir le Parlement de son pouvoir de contrôle sur la stratégie de l’État.
Le chiffre annoncé de 5 milliards d’euros au titre des recettes de ce compte d’affectation spéciale, à l’instar de ces dernières années, est plus qu’hypothétique. Cependant, nous pouvons constater un infléchissement qui nous paraît extrêmement préoccupant.
Cet infléchissement est doublement perceptible : à la fois dans les déclarations du ministre de l’économie et des finances, mais surtout, dans ses dernières décisions. Ainsi, Bruno Le Maire déclarait au mois de juillet dernier : « À partir du mois de septembre, nous allons céder des participations non stratégiques de l’État dans un certain nombre d’entreprises publiques. » Encore faut-il, madame la secrétaire d’État, avoir la même définition du terme « stratégique » et permettre un véritable débat démocratique au sein du Parlement ! En effet, le recentrage du portefeuille des participations de l’État implique que le Gouvernement précise sa conception de l’État stratège. Or toute redéfinition du périmètre de l’État actionnaire ne saurait intervenir sans un véritable débat au Parlement, sauf à ce que le pouvoir de contrôle du Parlement soit complètement mis sous tutelle.
Ces cessions, selon le ministre, devraient atteindre 10 milliards d’euros pour permettre le financement de l’innovation et, plus précisément, de l’innovation de rupture.
À cet égard, permettez-moi, madame la secrétaire d’État, de souligner ici un premier aspect de cette stratégie. Cela reviendrait en effet à céder 10 % du portefeuille de l’État pour abonder un dispositif qui représenterait 2 % des montants consacrés chaque année à l’innovation. De même, ce serait ignorer que ces cessions consistent pour l’État français à se priver de dividendes qui, entre 2012 et 2016, s’élevaient à 3,26 milliards d’euros, versés au budget général. À titre de comparaison, les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2018 pour la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s’élèvent à 3,66 milliards d’euros.
Le ministre a récemment décidé de céder le 5 septembre dernier 4,5 % du capital d’Engie, puis le 2 novembre dernier 4,73 % du capital de Renault. Ces cessions ont été présentées comme les premières étapes du plan de cession d’actifs.
Une première question peut se poser : si 1,5 milliard d’euros provient de ses deux récentes cessions, il reste à savoir où trouver les 8,4 milliards pour alimenter ce fonds pour l’innovation. Ce sont des entreprises publiques qui risquent d’être directement visées. Aussi, nous voudrions en savoir plus avant de voter ce chapitre important du budget de la nation.
Outre ce fonds, l’un des autres objectifs est le désendettement de l’État. Le rapporteur pour avis Alain Chatillon a indiqué que cela représentait une charge annuelle de 2,5 %. Or les participations ont une rentabilité courante de 3,5 %. Cela reviendrait à une absurdité financière. On perdrait de l’argent ! Avec cette stratégie, l’État perdrait de l’argent ! Alors que cette décision pourrait paraître d’une logique financière extrêmement douteuse, elle correspond surtout à une menace – et là est l’essentiel – sur la capacité de réaction de l’État face aux difficultés sectorielles, en la soumettant aux contingences budgétaires annuelles à rebours d’une vision à long terme. L’industrie ne peut pas reposer que du court terme ! Elle doit aussi se fonder sur du moyen et du long terme.
Permettez-moi de revenir sur un épisode de notre histoire industrielle. En 2012, PSA enregistrait une perte historique de 5 milliards d’euros. Son action en bourse passa alors de 80 euros à 5 euros. L’État a agi, en investissant dans le capital de PSA aux côtés de Dongfeng. Aujourd’hui, la société est redressée.
Qu’a fait Barack Obama lorsque l’entreprise automobile américaine General Motors était en difficulté ? Il a nationalisé en partie le secteur, qui s’est relevé.
C’est en ce sens que notre interrogation est entière. Quelle place aujourd’hui réservez-vous à l’État stratège dans la politique du Gouvernement ?
Concernant la fusion Alstom-Siemens, le refus du Gouvernement d’entrer au capital empêche l’État de jouer un rôle stratège, le privant d’exercer tout contrôle direct sur le nouveau groupe qui va se constituer. Il aurait certainement mieux valu que Siemens ait moins de 51 % des parts et que l’État français ait un droit de regard pour pouvoir agir sur cette fusion, en vue d’en faire un EADS du ferroviaire.
Telles sont nos interrogations. Quand le ministre Bruno Le Maire a été interrogé sur ces questions, il nous a répondu que la politique de l’État consistait avant tout à prévoir des baisses de charges. Il nous a très peu parlé de cette vision de l’État stratège, une vision qui, de la Libération à Charles de Gaulle jusqu’à aujourd’hui, implique que l’État français entend jouer un rôle dans l’économie : l’État doit pouvoir jouer tout son rôle pour aider une entreprise lorsque celle-ci rencontre des difficultés ou pour mettre en œuvre sa volonté de doper un secteur industriel. J’ai l’impression que cette vision purement financière à court terme risque de se traduire par une conception de l’État stratège rabougri. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Michèle Vullien applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je commencerai tout d’abord par vous assurer de mon plein respect pour vos débats et nos discussions dans cet hémicycle. J’aurais bien aimé, moi aussi, examiner ces missions dans de meilleures conditions, à une heure moins tardive, mais ce n’est pas de mon fait. Soyez assurés, je le répète, de mon plein respect pour nos débats.
Je commenterai successivement les différentes missions, les programmes et les comptes spéciaux qui sont à l’ordre du jour de vos travaux ce soir.
La mission « Engagements financiers de l’État », qui fait l’objet d’un rapport spécial de Mme le sénateur Nathalie Goulet, au nom de la commission des finances, recouvre les crédits nécessaires à l’État pour assurer son financement en toutes circonstances. L’essentiel des crédits de la mission concerne le programme 117, « Charge de la dette et trésorerie de l’État », pour 41,2 milliards d’euros.
Avec Mme le rapporteur spécial, plusieurs d’entre vous se sont exprimés sur l’évolution de la dette publique, et je vous remercie de votre appel à la vigilance collective quant au niveau de la dette et à l’évolution des taux d’intérêt.
La période de taux d’intérêt très bas, voire négatifs, dont notre pays bénéficie depuis plusieurs années, sous l’effet d’une politique monétaire accommodante de la Banque centrale européenne ne durera pas éternellement. La BCE s’est engagée au cours des derniers mois dans un resserrement monétaire progressif, même si le rythme de ce resserrement reste tributaire de l’affermissement de la croissance en Europe et du retour graduel de l’inflation. Dans ce contexte, notre estimation de la charge des intérêts de la dette intègre, de façon prudente et raisonnable, cette remontée des taux à moyen terme.
Conformément aux orientations fixées par le Président de la République, le projet de loi de finances pour 2018 constitue une première étape dans l’affermissement de la crédibilité budgétaire et financière de la France.
Ce renforcement de notre crédibilité passe, en premier lieu, par la mise en œuvre des réformes structurelles indispensables à notre économie et permettant une modernisation de nos services publics. Il passe, en second lieu, par la réduction du poids de la dépense publique et la baisse des prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises et les ménages. À cet égard, la progression ininterrompue de la dette publique depuis la crise de 2008 connaîtra un coup d’arrêt l’an prochain, avant une inversion de tendance nette prévue sur l’ensemble du quinquennat. Sur cinq ans, la dette publique serait ainsi ramenée à 91,4 % du PIB en 2022, contre 96,8 % prévus pour la fin de l’exercice de 2017.
Pour répondre aux questions posées sur la dette publique par Mme le rapporteur spécial, j’apporterai les compléments d’information suivants.
S’agissant de la mutualisation des dettes européennes, elle n’est pas politiquement acceptable, comme l’a affirmé le Président de la République, ni pour la France ni pour les autres États membres, car elle correspond à des engagements pris séparément.
S’agissant du traitement prudentiel des titres souverains, nous sommes opposés à toute évolution de nature à renforcer les exigences en capital associé aux détentions de dettes souveraines.
Quant à notre position à l’égard des agences de notation, je veux, sur ce point, vous rassurer : au second semestre de 2017, les trois principales agences de notation que sont Standard & Poor’s, Fitch et Moody’s ont confirmé la notation AA ou Aa2 de la France. Ces notations témoignent de la qualité de la signature française et, depuis l’automne 2016, elles sont associées à une perspective stable.
J’en viens aux quatre autres programmes de la mission « Engagements financiers de l’État ».
Tout d’abord, j’aborderai le programme 114, « Appels en garantie de l’État ».
Mme le rapporteur spécial a évoqué le sujet des engagements hors bilan. J’observe que le travail mené depuis la mise en œuvre de la LOLF de 2006 en matière de recensement des engagements hors bilan a significativement contribué à la sincérité des comptes de l’État.
Aujourd’hui, la France dispose en matière d’engagements hors bilan d’une information riche et fiable. Pour autant, les enjeux et montants mis en valeur par la comptabilité générale incitent à adopter une logique de surveillance active, ainsi que le recours systématique aux règles de l’actuariat.
Grâce à la gestion active des engagements, les crédits du programme 114 sont en réduction continue. Pour 2018, ils augmentent sous l’effet de l’inscription de 63 millions d’euros au titre des procédures de soutien financier au commerce extérieur, qui n’avaient pas fait l’objet d’une inscription de crédits en 2017 dans le cadre du transfert à Bpifrance Assurance Export de la mission précédemment assurée par la Coface. Cette réforme, qui fait de la BPI l’interlocuteur public privilégié des entreprises pour leur financement, va dans le sens d’une meilleure efficacité et d’un moindre coût, tant pour les entreprises que pour les finances publiques.
Le programme 145, « Épargne », retrace les primes d’épargne logement versées par l’État lors de la mobilisation de comptes épargne logement ou de la clôture de plans d’épargne logement. Le Gouvernement parachève cette année la réforme de ce dispositif.
Le programme 168, « Majoration de rentes », retrace les crédits destinés au remboursement partiel des majorations de rentes légales de rentes viagères pour 141,8 millions d’euros. Après soixante-cinq ans de remboursement des majorations de rentes par l’État aux débirentiers, les objectifs de politique publique ayant justifié initialement cette dépense sont atteints, et il est proposé de mettre un terme au dispositif, proposition de bonne gestion qui a reçu le soutien de votre commission des finances, laquelle a proposé un amendement tendant à améliorer le dispositif.
Enfin, le programme 344, « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque », est destiné au financement du Fonds de soutien en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements ayant souscrit des emprunts structurés et instruments financiers sensibles. Le Gouvernement n’est pas favorable, madame la rapporteur spécial, à la réouverture de ce guichet.
S’agissant maintenant des comptes spéciaux, j’évoquerai brièvement le compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce ». L’engagement de ces crédits se fera dans un cadre européen, en fonction de l’issue du troisième programme grec, qui court jusqu’à l’été 2018.
Le compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics » enregistre ce qu’il est convenu d’appeler les avances du Trésor. Pour l’essentiel, il s’agit du préfinancement des aides communautaires de la PAC avant leur remboursement par l’Union européenne. Celles-ci sont neutres pour le déficit.
J’en viens maintenant au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », qui a fait l’objet de nombreuses remarques et d’un rapport spécial du ministre Victorin Lurel, au nom de la commission des finances, et d’un rapport pour avis du sénateur Alain Chatillon, au nom de la commission des affaires économiques. Je les remercie ainsi que l’ensemble des intervenants pour leurs observations.
Depuis 2015, l’État actionnaire a fortement fait respirer son portefeuille, en menant une politique particulièrement dynamique en matière de cessions et d’investissements. Cette politique était orientée vers la protection des intérêts essentiels de notre économie. Il s’agit, par exemple, de la restructuration de secteurs stratégiques avec les recapitalisations récentes d’EDF ou d’Areva ; de peser dans les négociations permettant de préserver le savoir-faire et l’emploi en France, avec l’entreprise STX, ou encore d’avoir une action stratégique dans le domaine ferroviaire, avec un rapprochement européen de premier plan entre Alstom et Siemens.
S’agissant de l’aéroport de Toulouse, qui a été évoqué, je veux préciser qu’aucune décision n’a été prise à ce jour concernant l’exercice par l’État de son option de vente. L’État prendra sa décision au cours des prochains mois en recherchant le meilleur intérêt de l’ensemble des parties prenantes à ce dossier.
Je sais que la représentation nationale exprime de fortes attentes sur les orientations du Gouvernement en matière d’actionnariat public et de stratégie de l’État actionnaire.
Dans une période où il faut gérer avec parcimonie les deniers publics et relever les défis des transitions économiques, industrielles, technologiques et écologiques, il est sans doute nécessaire d’être plus sélectif en matière d’actionnariat public.
Aussi le Gouvernement souhaite-t-il que le portefeuille de l’État soit désormais recentré sur trois axes prioritaires : les entreprises stratégiques contribuant à la souveraineté de notre pays, en particulier dans les domaines de la défense et du nucléaire ; les entreprises participant à des missions de service public ou d’intérêt général au sein desquelles l’État ne détient pas de leviers non actionnariaux suffisants pour préserver les intérêts publics ; les interventions dans des entreprises en cas de risque systémique.
Une respiration du portefeuille de l’Agence des participations de l’État est ainsi envisagée, afin de répondre aux mutations qui viennent bousculer le monde économique et notre tissu industriel. Nous aurons l’occasion de préciser ces grandes orientations en temps utile, et la représentation nationale sera bien entendu associée à cette réflexion.
Les cessions d’actifs serviront à doter un fonds pour l’innovation à hauteur de 10 milliards d’euros, conformément à l’engagement du Président de la République. Ce fonds préparera l’avenir de notre économie en investissant sur des innovations où l’État est à même, en partenariat avec des investisseurs privés, d’assumer une partie des risques technologiques de long terme qu’il convient de prendre pour réussir. Nous travaillons aux mécanismes et dispositifs qui permettront, d’un point de vue technique et juridique, d’en faire un instrument utile.
Ce fonds doit être opérationnel au début de l’année prochaine. Pour commencer, il sera alimenté en numéraire, par une part du produit des récentes cessions de participations dans ENGIE et Renault. Le solde sera constitué de participations publiques n’ayant pas vocation à être cédées, mais procurant des dividendes réguliers ; ces participations seront retirées du fonds à mesure que l’abondement en numéraire tiré des cessions montera en puissance.
Le rendement annuel de ce fonds, de l’ordre de 200 à 300 millions d’euros par an, sera sanctuarisé pour garantir notre effort annuel en matière d’innovation. En effet, il nous faut retrouver le temps long nécessaire, notamment, pour les innovations dites de rupture.
Pour flécher ces ressources vers les projets les plus prometteurs, le Gouvernement a sollicité trois personnalités issues d’univers très différents : Stéphane Distinguin, président-directeur général de l’agence d’innovation Fabernovel, Jacques Lewiner, directeur scientifique honoraire de l’École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris, et Ronan Stephan, directeur scientifique de Plastic Omnium. Ils doivent rendre leurs conclusions en janvier.
D’investissement dans l’innovation, dans l’économie de la compétence et dans la transition écologique il est également question avec la mission « Investissements d’avenir », qui a fait l’objet d’un rapport spécial de votre commission des finances. À cet égard, je rappelle que le troisième programme d’investissements d’avenir a été lancé avec l’ouverture de 10 milliards d’euros d’autorisations d’engagement en loi de finances pour 2017. Le projet de loi de finances pour 2018 ouvre les premiers crédits de paiement, à hauteur d’un peu plus de 1 milliard d’euros.
M. le président. Madame la secrétaire d’État, il serait bon de conclure rapidement, car nous devons examiner plusieurs amendements.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. Ce troisième programme d’investissements d’avenir est une composante essentielle du Grand plan d’investissement, dont il finance le volet « compétitivité par l’innovation ».
Pour terminer, j’aborderai la mission « Remboursements et dégrèvements ». L’enveloppe de crédits globale des deux programmes est très importante : environ 100 milliards d’euros pour le programme 200, environ 15 milliards d’euros pour le programme 201. Ces programmes connaissent des hausses de crédits importantes, de l’ordre de 4,5 et 22 % respectivement, du fait du dégrèvement de taxe d’habitation décidé par le Président de la République.
Plusieurs d’entre vous ont évoqué la réforme de cette taxe (Mouvements divers.), mais, M. le président m’ayant priée de conclure, et comme j’ai traité l’essentiel des sujets qui ont été abordés par les orateurs, j’achève ici mon discours…
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. C’est maintenant que la demi-heure d’interruption du milieu de soirée va peser un peu lourd sur nos travaux. En effet, nous devrons impérativement nous séparer à une heure trente, compte tenu de la règle des neuf heures d’interruption. Il nous reste donc une dizaine de minutes pour examiner plusieurs articles rattachés avec leurs amendements, quatre comptes spéciaux et deux missions…
C’est donc un peu mission impossible, madame la secrétaire d’État, ce qui explique l’état d’esprit de nombre d’entre nous ce soir. Je crains qu’il ne nous faille terminer l’examen de ces crédits lors d’une prochaine séance, sans doute vendredi. En tout cas, mes chers collègues, je vous invite à une très grande concision dans vos propos, pour que nous puissions avancer le plus possible.
M. le président. Monsieur le président de la commission, nous pouvons nous permettre de prolonger la séance d’un quart d’heure, jusqu’à une heure quarante-cinq, afin de terminer cette nuit.
engagements financiers de l’état
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Engagements financiers de l’État |
41 592 883 752 |
41 776 800 514 |
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
41 197 000 000 |
41 197 000 000 |
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
104 090 000 |
104 090 000 |
Épargne |
149 993 752 |
149 993 752 |
Majoration de rentes |
141 800 000 |
141 800 000 |
Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité |
0 |
0 |
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement |
0 |
0 |
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
0 |
183 916 762 |
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion les articles 55 et 55 bis, ainsi que les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 55 bis, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Engagements financiers de l’État ».
Engagements financiers de l’État
Article 55
I. – Le VIII de l’article 41 de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983 de finances pour 1984 est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « la réserve » sont remplacés par les mots : « les réserves » ;
2° Le deuxième alinéa est supprimé ;
3° Le dernier alinéa est complété par les mots : « ni aux majorations mentionnées à l’article 3 de la loi n° 51-695 du 24 mai 1951 portant majoration de certaines rentes viagères et pensions et au second alinéa de l’article 2 de la loi n° 74-1118 du 27 décembre 1974 relative à la revalorisation de certaines rentes allouées en réparation du préjudice causé par un véhicule terrestre à moteur ».
II. – L’article 6 de la loi n° 49-1098 du 2 août 1949 portant révision de certaines rentes viagères constituées par les compagnies d’assurances, par la caisse nationale des retraites pour la vieillesse ou par des particuliers moyennant l’aliénation de capitaux en espèces est ainsi modifié :
1° Après le mot : « rentes », la fin du premier alinéa est supprimée ;
2° Le second alinéa est supprimé.
III. – Les I et II entrent en vigueur le 1er janvier 2018. Toutefois, les versements de l’État correspondant aux rentes versées en 2017 par les organismes débirentiers sont effectués le 30 juin 2018.