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Mise au point au sujet d’un vote

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Malhuret.

M. Claude Malhuret. Madame la présidente, hier, jeudi 30 novembre 2017, lors du scrutin n° 34 sur les deux amendements identiques nos II-171 et II-216 rectifié, à l’article 29 du projet de loi de finances pour 2018, les sénateurs Jérôme Bignon, Daniel Chasseing, Colette Mélot, Emmanuel Capus et moi-même souhaitions nous abstenir.

Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)

PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Article 52 octies (nouveau) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Deuxième partie

Loi de finances pour 2018

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Ecologie, développement et mobilité durables

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 107, rapport général n° 108, avis nos 109 à 114).

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE (SUITE)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Écologie, développement et mobilité durables

Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens

Compte d’affectation spéciale : Aides à l’acquisition de véhicules propres

Compte d’affectation spéciale : Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

Compte d’affectation spéciale : Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

Compte d’affectation spéciale : Transition énergétique

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
État B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (et articles 53, 54, 54 bis, 54 ter et 54 quater), du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et des comptes d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » et « Transition énergétique ».

Je rappelle aux différents orateurs qu’ils doivent respecter leur temps de parole.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi de finances pour 2018 constitue une traduction du plan Climat, même s’il manque de cohérence sur certains aspects et paraît en deçà des ambitions politiques affichées par le Gouvernement.

S’agissant des moyens budgétaires, je relève plusieurs points de satisfaction : les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » vont augmenter de 6,6 % à périmètre courant – ce n’est pas habituel dans ce projet de loi de finances –, et le budget triennal s’inscrit dans une trajectoire de progression des crédits de la mission.

Mais « en même temps », en matière de fiscalité énergétique, je l’ai rappelé lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, c’est un véritable « coup de massue fiscal » de 46 milliards d’euros qui attend les Français ces cinq prochaines années.

Madame la ministre, je n’adhère pas à cette nouvelle version de la vision punitive de la fiscalité énergétique portée votre gouvernement qui se traduit par l’accélération de la trajectoire carbone et la convergence par le haut des fiscalités de l’essence et du gazole.

D’abord, je regrette profondément que les évolutions du financement des opérateurs proposées dans le projet de budget aient pour trait commun de constituer de vrais trompe-l’œil, laissant croire à une augmentation des moyens des opérateurs, alors qu’il n’en est rien.

Votre gouvernement affirme que l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, voit ses moyens renforcés de 36 %, grâce à la rebudgétisation de son financement. Or l’augmentation de son budget sera presque totalement absorbée par le règlement des restes à payer issus des engagements passés ! J’ai eu l’occasion de dire que vous n’en étiez pas responsable ; vous en êtes cependant comptable.

Comment pouvez-vous, dans ce contexte, affirmer soutenir le développement de la chaleur renouvelable et de la politique de prévention et de valorisation des déchets ?

De même, la suppression des subventions aux opérateurs de la biodiversité permet à l’État de faire des économies sur le dos des agences de l’eau, qui financeraient, dès 2018, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage et l’Agence française pour la biodiversité.

Votre gouvernement, madame la ministre, propose de doubler la contribution des agences de l’eau en 2018, ce qui va totalement à l’encontre du principe de la redevance, selon lequel l’eau paye l’eau.

L’Agence française pour la biodiversité n’est même pas gagnante, puisqu’elle va devoir reverser une partie de la contribution acquittée par les agences de l’eau aux parcs nationaux. Circuit court, ou court-circuit ? Vous nous donnerez certainement la réponse…

Comme si cela n’était pas suffisant, votre gouvernement prévoyait initialement de diminuer le plafond des recettes affectées aux agences de l’eau. L’Assemblée nationale a repoussé cette diminution à 2019, mais le Sénat l’a tout simplement supprimée.

J’en viens aux charges liées au service public de l’énergie, qui représenteront près de 8 milliards d’euros en 2018, soit une hausse de 10 % par rapport à 2017, principalement due à l’augmentation du coût du soutien aux énergies renouvelables électriques en raison du très fort dynamisme de la filière photovoltaïque.

Les projections réalisées par la Commission de régulation de l’énergie, la CRE, montrent que ces charges s’élèveront à plus de 10 milliards d’euros en 2022, soit 2,2 milliards de plus qu’en 2018, et que le total cumulé atteindra 44,9 milliards d’euros sur la période 2018-2022.

Il devient urgent que le Parlement joue un rôle beaucoup plus actif dans la détermination de ces charges, en votant une loi de programmation pluriannuelle de l’énergie, qui fixerait notamment le plafond par filière des nouvelles capacités de production d’électricité issues de sources d’énergie renouvelable.

Le 1er janvier 2018, le chèque énergie sera généralisé, en remplacement des tarifs sociaux de l’électricité et du gaz. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoyait que le Parlement disposerait du rapport d’évaluation de l’expérimentation de ce nouveau dispositif dans quatre départements. Je serai ravi d’en prendre connaissance, et ce d’autant que vous nous avez laissé entendre, madame la ministre, que ce dispositif coûterait 581,1 millions d’euros en 2018, soit 80 millions de plus que les tarifs sociaux de l’énergie.

En ce qui concerne le compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », dit aussi FACE, le montant des aides versées aux autorités organisatrices de la distribution d’électricité pour le financement des travaux d’électrification en zone rurale diminuera de 4,5 % en 2018.

Tous les postes de dépenses de ce compte d’affectation spéciale seront touchés, le Gouvernement ayant décidé de jouer du rabot, cet instrument qui permet de repousser, uniformément et aveuglément, les choix.

Ce non-choix aura des conséquences pour les territoires ruraux, puisqu’ils seront moins en mesure d’accompagner leur développement démographique et économique en matière de réseaux électriques.

Le compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres » va voir ses crédits augmenter de 11,8 % en 2018, ce qui est une bonne nouvelle.

Les bonus automobiles seront recentrés sur les véhicules électriques. Le Gouvernement voulait mettre fin à l’aide à l’achat d’un vélo à assistance électrique, qui devrait coûter 50 millions d’euros en 2017, mais l’Assemblée nationale a souhaité prolonger le dispositif. Nous vous proposerons de le supprimer, car il est inapproprié. En effet, le marché fait son travail. En outre, nous ne disposons pas de rapport sur ce point.

Alors que seules 21 000 primes à la conversion des véhicules ont été versées depuis avril 2015, le Gouvernement se fixe l’objectif très ambitieux de 100 000 primes versées en 2018, notamment un doublement au bénéfice des ménages à faibles revenus. C’est aujourd’hui la seule dépense significative prévue dans votre projet de budget, puisque ces crédits sont en augmentation de 100 millions d’euros.

La commission des finances a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat sur le vote des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », et lui propose d’adopter les crédits des comptes d’affectation spéciale « Transition énergétique », « Aides à l’acquisition de véhicules propres » et « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur spécial.

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la ministre, comme vous l’avez dit devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable de la Haute Assemblée, l’année 2018 constituera pour les infrastructures et services de transport « un budget de transition », dans l’attente des résultats des assises de la mobilité, que vous avez lancées et dont les conclusions serviront de base au futur projet de loi d’orientation des mobilités que vous présenterez au Parlement au premier semestre 2018.

À ce projet sera annexée une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transport que le groupe de travail, présidé par Marie-Hélène des Esgaulx, de notre commission des finances, sur le financement des infrastructures de transport avait réclamée l’année dernière.

Le programme 203, « Infrastructures et services de transports » ne présente qu’une partie des dépenses consacrées aux transports en raison du rôle majeur joué par l’Agence de financement des infrastructures de transports de France, l’AFITF, dans le financement des grandes infrastructures. Malheureusement, nous ne disposons pas de l’ensemble des informations budgétaires relatives à ce programme. Nous souhaiterions, madame la ministre, que vous vous engagiez à nous les transmettre l’année prochaine.

L’AFITF fait face actuellement à une impasse financière liée aux trop nombreux engagements pris par l’État par le passé, comme vous le rappelez régulièrement, madame la ministre. Ce constat a conduit le Président de la République à annoncer une « pause » en matière d’infrastructures de transport, ce qui s’est notamment traduit par une révision à la baisse de quelque 800 millions d’euros des dépenses initialement prévues pour l’AFITF en 2018, les engagements concernés ayant été repoussés à une date ultérieure.

Les dépenses de cet opérateur augmenteront toutefois de 200 millions d’euros en 2018 pour atteindre 2,4 milliards d’euros, avec un effort particulier consenti en direction des deux priorités affichées par le Gouvernement, à savoir la régénération des réseaux existants, notamment routier et ferré, et les transports du quotidien. Ces deux priorités, auxquelles nous souscrivons, sont exactement celles qu’avait mises en avant le groupe de travail de la commission des finances que j’ai déjà cité, lequel avait conclu à ces impérieuses nécessités.

L’équilibre financier de l’AFITF demeurera néanmoins précaire avec des restes à payer en augmentation, s’établissant à 12,3 milliards d’euros, ce qui devra nous conduire à nous poser la question d’une ressource spécifique à affecter à cet établissement public, question jamais véritablement résolue depuis l’abandon par le gouvernement précédent de l’écotaxe poids lourds, qui eût été très précieuse et utile.

La taxation des poids lourds étrangers en transit, qui endommagent notre réseau routier sans participer à son financement, demeure une piste que nous devons creuser. Pourrez-vous nous donner, madame la ministre, des informations complémentaires sur l’avancement de ce dossier, dont vous avez annoncé qu’il serait étudié conjointement par le Gouvernement, les régions et le Parlement ?

Les crédits du programme 203, pour leur part, n’évolueront qu’à la marge en 2018. La subvention à SNCF Réseau diminuera très légèrement, celle de Voies navigables de France, VNF, restera stable, à l’exception des crédits en faveur du dragage des ports.

Quelques mots sur les trois opérateurs qui relèvent du programme 203 : SNCF Réseau, la Société du Grand Paris et Voies navigables de France.

Comme l’a montré l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, l’ARAFER, les hypothèses prévues par le contrat de performance décennal signé l’an dernier par SNCF Réseau avec l’État ne sont guère crédibles, et celui-ci devra rapidement être mis à jour sur la base des conclusions de la mission sur le modèle ferroviaire français que vous avez confiée, madame la ministre, à Jean-Cyril Spinetta.

SNCF Réseau devra poursuivre le grand plan de modernisation du réseau ferroviaire qui impliquera un effort annuel de 3 milliards d’euros, alors que sa dette constitue toujours un fardeau difficilement supportable : elle s’élève à 45,7 milliards d’euros et les projections la situent à 60 milliards d’euros d’ici à une vingtaine d’années. La question de la reprise, au moins partielle, de cette dette par l’État devra faire l’objet de décisions.

Les coûts du Grand Paris Express sont désormais évalués à 35 milliards d’euros, contre 25 milliards d’euros antérieurement. Les sénateurs franciliens, en particulier, attendent les arbitrages du Gouvernement sur ce dossier.

Pour ma part, je suis attachée au projet initial du Grand Paris Express, soit une double boucle. Renoncer à telle ou telle partie pourrait avoir pour conséquence la remise en cause de l’efficacité du projet dans sa totalité. Même les provinciaux s’y intéressent : lorsque la région parisienne ne fonctionne pas, c’est toute la France qui rencontre des difficultés.

Lors de l’audition du président de la Société du Grand Paris, j’ai eu la surprise d’apprendre que le plafond d’emploi de cet opérateur n’était que de 240 équivalents temps plein pour 2018. Ce chiffre est dérisoire, alors que les risques financiers, mais également techniques et en termes de sécurité sur les chantiers du Grand Paris Express vont se multiplier dans les années à venir.

Je souhaite donc vous inviter, madame la ministre, à envisager rapidement un renforcement des effectifs de la Société du Grand Paris, ainsi que de l’ARAFER, qui se voit dotée de missions supplémentaires. Vous seule pouvez déposer un amendement en ce sens.

Concernant Voies navigables de France, deux enjeux me paraissent particulièrement importants : la taxe hydraulique et les investissements. Mon collègue Michel Vaspart reviendra plus précisément sur ces questions.

Sur le programme « Affaires maritimes », nous sommes tous très heureux de la suppression de l’article 53 et de la réinstauration de l’exonération des charges salariales à l’égard du métier de marin, qui relève trop peu fréquemment du droit français. Compte tenu de la concurrence internationale, cette exonération est indispensable.

Je souhaite souligner les engagements pris par le Gouvernement lors des assises de l’économie de la mer, qui se sont tenues au Havre les 21 et 22 novembre dernier, notamment l’exonération précitée.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Je confirme les propos de Jean-François Husson : la commission des finances a choisi de s’en remettre à la sagesse du Sénat pour l’ensemble des crédits de cette mission.

Il me reste à vous présenter les crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ».

La réforme des lignes de trains d’équilibre du territoire, les TET, a conduit à la fermeture de six lignes de nuit sur huit, et au transfert de nombreuses lignes de jour devenues infrarégionales aux régions. Je vous invite à consulter notre rapport pour prendre connaissance de l’ensemble des montants en investissements et en subventions d’exploitation, ligne par ligne, qui ont fait l’objet des accords de reprise.

Mes chers collègues, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de ce compte d’affectation spéciale.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais vous présenter le programme 159, « Expertise, information géographique et météorologie », ainsi que le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Concernant Météo France, la subvention pour charges de service public portée par le programme 159 connaîtra, pour la sixième année de suite, une diminution en 2018, pour s’établir à 188,8 millions d’euros. Dans le même temps, ses effectifs diminueront de 95 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, mouvement qui devrait se poursuivre dans les cinq ans à venir.

Si ces suppressions de postes obéissent à une véritable logique et visent à tirer parti des multiples applications du numérique dans le domaine de la météorologie et de la réorganisation du réseau territorial de Météo France qui s’est achevée à la fin de l’année 2016, il convient toutefois de rester très vigilant pour ne pas affaiblir un opérateur qui joue un rôle essentiel pour la sécurité des personnes et des biens face à la multiplication des événements climatiques extrêmes.

Pour rester un opérateur météorologique de rang mondial, Météo France devra rapidement se procurer un nouveau supercalculateur susceptible de multiplier par cinq sa capacité de calcul. Si les bénéfices socio-économiques de cet outil sont estimés au minimum à douze fois la valeur de cet investissement, l’établissement n’a pas encore obtenu de l’État les crédits nécessaires à son financement, crédits évalués à 100 millions d’euros, dont 55 millions d’euros dans les cinq ans à venir. C’est un sujet qu’il faudrait rapidement régler.

L’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN, verra lui aussi sa subvention pour charges de service public diminuer en 2018, à 91,7 millions d’euros, et ses effectifs perdre 35 ETPT. Mais alors que Météo France semble en mesure de voir ses recettes commerciales rebondir à compter de 2017, celles de l’IGN sont sévèrement fragilisées par l’avènement de l’open data et pourraient se réduire comme peau de chagrin dans les années à venir. Il est indispensable que soit menée une véritable réflexion, dans le cadre des discussions relatives au nouveau contrat d’objectifs et de performance de l’établissement, sur les relais de croissance dont celui-ci pourrait bénéficier.

Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, vit, pour sa part, une véritable crise d’identité, au point que sa survie paraît incertaine, alors même que ce regroupement de onze entités préexistantes est âgé d’à peine trois ans dans sa forme actuelle. Le Gouvernement prévoit de lui appliquer tout au long de la législature des réductions de subvention pour charges de service public – cette réduction atteindra 206 millions d’euros en 2018 – et d’effectifs – 103 ETPT en moins en 2018 –, sans lui offrir pour le moment la moindre perspective, ce qui a conduit, du reste, le président de son conseil d’administration à démissionner.

S’il est clair que l’avenir de cet opérateur passe par une collaboration beaucoup plus intense avec les collectivités territoriales, le Gouvernement devra rapidement exprimer ce qu’il attend de lui et cesser de le percevoir uniquement comme une variable d’ajustement, ce qui a été le cas durant de longues années.

J’en viens à présent au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dit BACEA, qui porte les 2,2 milliards d’euros de crédits de la Direction générale de l’aviation civile, la DGAC. Il est exclusivement financé par le secteur du transport aérien. Dès lors, l’évolution du trafic et la bonne santé des compagnies françaises ont une influence décisive sur son équilibre financier.

Le trafic aérien bénéficiera d’une croissance comprise entre 5,4 % et 5,9 % en 2017 – du jamais vu depuis 2011 – et entre 3 % et 4 % en 2018, certains grands aéroports régionaux connaissant des augmentations de trafic à deux chiffres, comme Toulouse en hausse de 16 %, Nantes de 13,7 % ou bien encore quasiment Bordeaux, dont le trafic enregistre une augmentation de 9 %.

Les compagnies aériennes françaises profitent de cette croissance, mais de façon insuffisante, puisqu’elles poursuivent leur déclin en termes relatifs avec une part du pavillon français qui est passée de 54,3 % en 2003 à 40,3 % en 2017.

Si la santé financière d’Air France s’est améliorée depuis deux ans et si le lancement de la nouvelle compagnie Joon paraît constituer un beau succès pour sa nouvelle direction, qui a su démêler l’écheveau des relations sociales et réarmer industriellement le projet de la compagnie, la compétitivité des compagnies aériennes françaises devra faire l’objet d’un examen attentif. Je salue, à cet égard, l’initiative de Mme la ministre de réunir des assises du transport aérien au premier semestre 2018. Je souhaite que nous puissions progresser à cette occasion sur les thèmes de la compétitivité du transport aérien français.

Dans cette conjoncture très favorable, la DGAC bénéficiera de recettes quasiment identiques à celles de 2017, soit un montant légèrement supérieur à 2 milliards d’euros.

Cette relative stabilité s’explique notamment par la baisse de 26 millions d’euros des recettes de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne métropole, la RSTCA-M, accordée aux compagnies au départ et à l’arrivée des plateformes de Paris–Charles-de-Gaulle et de Paris-Orly, en contrepartie de l’affectation au BACEA de l’intégralité des recettes de la taxe de l’aviation civile. Je suis heureux de voir que cette mesure favorable au secteur aérien français, que j’avais défendue au Sénat, est à présent entrée en vigueur : il a fallu suivre le dossier de près pour qu’il en soit ainsi !

À l’instar de celles de la redevance de route, les recettes de la taxe de l’aviation civile seront dynamiques en 2018. L’exonération à 100 % de cette taxe pour les passagers en correspondance, que nous avions là aussi adoptée pour aider les compagnies aériennes, a représenté 77,4 millions d’euros d’économies en 2016 pour les compagnies assujetties à la taxe, dont 57 millions d’euros pour Air France.

Comme en 2017, le schéma d’emplois pour 2018 de la DGAC ne prévoit pas de suppression d’emplois. Sa masse salariale augmentera de 1,3 % pour atteindre 923,5 millions d’euros. Sur cette somme, 17,7 millions d’euros correspondent aux mesures catégorielles prévues pour 2018 par le protocole social 2016-2019 de la DGAC, dont le coût global représente 55 millions d’euros sur la période, contre 27,4 millions d’euros pour le protocole social 2013-2015

La DGAC maintiendra en 2018 son effort d’investissement porté à 250 millions d’euros par an, auxquels s’ajoutent 50 millions d’euros de fonds de concours européens, depuis 2014. Sur cette somme, 135 millions d’euros sont consacrés à de grands programmes de modernisation du contrôle de la navigation aérienne, dont le coût total représente quelque 1 660 millions d’euros et auxquels je consacre actuellement un contrôle budgétaire.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Après une année 2017 difficile, le nouveau gouvernement a décidé de rebudgétiser les crédits consacrés par les deux premiers programmes d’investissement d’avenir à la recherche et développement en matière aéronautique civile pour un montant de 135 millions d’euros de crédits de paiement, ce qui me satisfait.

L’assainissement financier du BACEA va se poursuivre en 2018 avec une diminution de sa dette.

Je propose au Sénat d’adopter les crédits du budget annexe de l’aviation civile.

Compte tenu du fait que les trois subventions des opérateurs du programme 159 sont en baisse – je peux le comprendre, mais je déplore l’absence de véritables perspectives stratégiques –, j’ai proposé à la commission des finances de s’en remettre à la sagesse du Sénat sur les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». (Applaudissements au banc des commissions. - M. Hervé Maurey applaudit également. )

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le programme « Énergie, climat et après-mines ». Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en matière d’énergie, les sujets d’inquiétude ne manquent pas.

C’est d’abord l’explosion de la fiscalité énergétique, une tendance de fond des dernières années que ce projet de budget accentue encore, en accélérant la trajectoire de la taxe carbone et en faisant converger, uniquement à la hausse, les tarifs de l’essence et du gazole.

La commission des affaires économiques est bien entendu favorable à une tarification forte du CO2 qui oriente les investissements vers les énergies bas carbone. Mais nous exigeons, dans le même temps, que cette fiscalité soit non pas punitive, mais véritablement incitative : en clair, que ces hausses soient compensées, comme le prévoit la loi, par une baisse équivalente d’autres taxes. Or nous en sommes très loin !

Face aux 3,7 milliards d’euros de recettes supplémentaires qu’encaissera l’État, les contreparties annoncées, via la prime de conversion des véhicules et le chèque énergie, ne permettront au mieux de restituer que 180 millions d’euros. Sur les deux prochaines années, la pression fiscale, qui pèsera tout particulièrement sur les ménages modestes et ruraux, augmentera de 3,5 milliards d’euros en 2018, et de 6,1 milliards en 2019 ! Sous couvert de sortir de notre dépendance aux énergies fossiles, le Gouvernement ne poursuit, en réalité, qu’un unique objectif de rendement budgétaire.

Deuxième sujet de préoccupation : le devenir des territoires à énergie positive, dont le financement n’est aujourd’hui pas assuré au-delà de 2018. Compte tenu des 75 millions d’euros supplémentaires annoncés en loi de finances rectificative, l’impasse financière pourrait encore atteindre un maximum de 275 millions d’euros. Même si la responsabilité du trou incombe au précédent gouvernement, il est essentiel que la parole de l’État soit tenue !

Troisième sujet d’inquiétude : la réforme du crédit d’impôt pour la transition énergétique, le CITE, reste trop brutale malgré les aménagements prévus par l’Assemblée nationale. Si l’exclusion des portes est justifiée, la commission des affaires économiques a jugé qu’il serait préférable, pour les chaudières au fioul à haute performance, ainsi que pour les fenêtres en cas de remplacement d’un simple vitrage, de pérenniser un taux réduit à 15 %.

Les fenêtres sont en effet un point d’entrée dans un parcours de rénovation, tandis que l’exclusion des chaudières au fioul mettrait fin au renouvellement d’un parc vieillissant et émetteur de gaz à effet de serre, à l’opposé de l’objectif poursuivi. Sur ces sujets, ne soyons pas dogmatiques et tenons compte de la réalité ! Si, comme nous le proposons, sont retenus des taux réduits de moitié, la dépense publique sera par ailleurs optimisée, comme le souhaite le Gouvernement.

Plus globalement, la façon dont nous devons examiner les dépenses de soutien aux énergies renouvelables reste très insatisfaisante. Alors que les contrats engagent la collectivité sur des dizaines d’années, le Parlement n’en ratifie que la « tranche annuelle », sans pouvoir débattre des engagements de long terme, et encore moins exercer un véritable contrôle.

Les sommes en jeu sont pourtant considérables puisque les appels d’offres lancés depuis 2011 représenteront 65 milliards d’euros de soutien public sur la période 2018-2046. Il est donc urgent de revoir nos procédures d’autorisation budgétaire et d’aller vers la discussion d’une loi de programmation pluriannuelle de l’énergie, pour redonner toute sa place au Parlement.

Tous ces sujets ont conduit la commission des affaires économiques à donner un avis défavorable sur les crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)