Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Question préalable
Mme la présidente. Je suis saisie, par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission, d’une motion n° 1.
Cette motion est ainsi rédigée :
Considérant que si un accord est intervenu entre les deux assemblées sur deux nombreux articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale, des points de désaccord subsistent sur des aspects aussi décisifs que le financement de la protection sociale ou les publics concernés par la politique familiale ;
Considérant que la compensation de l’augmentation de la CSG applicable aux pensions de retraite et d’invalidité par l’exonération de la taxe d’habitation est à la fois : incomplète puisqu’elle représentera 3 milliards d’euros en 2018 pour l’ensemble de la population alors que le prélèvement supplémentaire sur les retraités sera de 4,5 milliards d’euros, différée, puisqu’elle s’étalera sur trois ans et aléatoire puisque la taxe d’habitation diffère selon le lieu d’habitation ;
Considérant que la politique familiale traduit une solidarité envers les familles pour les soutenir dans l’éducation de leurs enfants et non une redistribution selon leurs revenus ;
Considérant que l’information du Parlement doit être renforcée lors de la modification des tableaux d’équilibre en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale ;
Le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 121).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
Avant de donner la parole à M. le président de la commission des affaires sociales, pour la motion, je la donne à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je veux seulement dire quelques mots en réponse aux orateurs qui pensaient qu’un dialogue était encore possible sur ce texte. On peut, bien sûr, toujours discuter. Je suis un partisan, vous le savez, mes chers collègues, d’une démarche concertée et si possible consensuelle.
Mais j’ai écouté le rapporteur général de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale ; j’ai entendu le Premier ministre ; j’ai discuté avec la ministre des solidarités et de la santé et avec le ministre de l’action et des comptes publics ; je me suis rendu compte qu’il n’y aurait pas, hélas, d’évolution possible sur un point essentiel : l’article 7.
Tout était ouvert pour le reste, de notre côté. Néanmoins, des portes se sont fermées sur certaines de nos propositions. Nous sommes plusieurs à le regretter.
J’avais également fait quelques propositions pour faire évoluer l’article 7, à propos duquel plusieurs d’entre vous, mes chers collègues, avaient également émis des réserves. Des amendements ont été déposés tendant à instaurer plus de progressivité dans la mesure, par exemple. Des voies de sortie existaient : rapprocher le taux normal de CSG acquitté par les retraités de celui des actifs, notamment. C’était une solution, peut-être moyenne, mais elle n’a pas été retenue.
Il faut bien en tirer les conséquences. Il ne servirait à rien, à mon sens, de continuer cette discussion, si c’est pour faire le constat que le blocage, côté Gouvernement, reste total sur l’article 7. Tel est le sens de cette motion tendant à opposer la question préalable.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission, pour la motion.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, au terme de la discussion de ce projet de loi, le bilan qu’en tire la commission des affaires sociales peut se résumer à trois séries d’observations, qui recoupent en réalité trois grands groupes de dispositions, sur lesquelles nous nous trouvons, par rapport au Gouvernement et à l’Assemblée nationale, dans des positions bien différentes.
Tout d’abord, cela a été dit, une grande majorité des articles du texte ne suscitent aucun désaccord de fond entre les deux assemblées, même si, pour des raisons techniques, certains demeurent encore en navette lors de cette nouvelle lecture. Parmi les mesures concernées, je citerai la transformation du CICE en allégement de charges, l’année blanche de cotisations pour les créateurs d’entreprise, le relèvement de la fiscalité du tabac, l’aménagement de la taxation des boissons sucrées, la vaccination, les consultations de prévention pour les jeunes femmes, la suppression de l’obligation générale du tiers payant, ou encore les expérimentations visant à promouvoir un véritable parcours de soins et une meilleure efficience des prises en charge.
Je ferai une mention particulière sur l’affiliation des travailleurs indépendants au régime général et sur la suppression du RSI. J’avais fait part, en première lecture, de mes réserves sur l’inclusion d’une telle réforme dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale. Mais en dépit de ses interrogations sur la capacité d’une telle réforme à réellement régler les difficultés identifiées ces dernières années, la commission des affaires sociales a choisi de compléter le texte et tenté de l’améliorer. Je constate que, pour une très large part, l’Assemblée nationale a conservé les amendements que le Sénat avait adoptés.
Face à ces points d’accord, les points de désaccord, cela a été dit également, se limitent finalement à deux dispositions principales.
Si le Sénat a supprimé l’augmentation de 1,7 point du taux de CSG applicable aux pensions de retraite et d’invalidité, c’est d’abord parce que cette disposition nous a paru injuste dès lors que, pour toutes les autres catégories, le Gouvernement a prévu des mesures de compensation. Cette hausse de CSG représente, monsieur Lévrier, 4,5 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires sur les retraités. L’exonération de taxe d’habitation, qui ne représente que 3 milliards d’euros pour l’ensemble de la population, ne peut valablement apparaître comme une véritable compensation.
Mais au-delà de ce point peu justifiable à nos yeux, cette hausse de CSG nous paraît introduire des éléments de brouillage dans le financement de la protection sociale. Elle affecte, pour la première fois en projet de loi de financement de la sécurité sociale, le financement de l’assurance chômage, avant même que les contours de la future réforme de celle-ci ne soient définis. Elle transfère vers l’impôt le financement de risques à caractère assurantiel. Elle augmente la part des prélèvements sur les revenus d’activité dans le financement la sécurité sociale et diminue celle des prélèvements sur la consommation.
Il y a donc là un point sur lequel nos deux assemblées ne pouvaient s’accorder.
L’autre divergence porte sur les règles d’attribution de la prestation d’accueil du jeune enfant, la PAJE. Cette mesure, peu justifiée au regard de la situation financière de la branche famille, restreint un peu plus le périmètre des bénéficiaires de la politique familiale et a été largement rejetée par notre assemblée.
Enfin, une dernière série de dispositions témoigne de désaccords, qui, à mon sens, auraient pu être surmontés, car ils ne résultent en rien de divergences philosophiques ou de fond.
Sans doute les délais d’examen extrêmement contraints du projet de loi de financement de la sécurité sociale ne facilitent-ils pas le dialogue avec le Gouvernement et l’Assemblée nationale. Je regrette toutefois que certains amendements adoptés par le Sénat, parfois depuis plusieurs années et avec un soutien dépassant les clivages politiques, n’aient pas reçu meilleur accueil de la part de l’exécutif et des députés.
C’est notamment le cas pour ce qui concerne le volet « assurance maladie », sur lequel nous partageons assez largement les orientations mises en œuvre par Mme la ministre. Nous avons parfois le sentiment que certaines de nos propositions n’ont pas été réellement étudiées et qu’elles ont été écartées sans que soient véritablement recherchés les moyens d’apporter une réponse au problème posé.
C’est pourquoi nous considérons, après la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, être parvenus au terme du dialogue utile sur ce projet de loi, comme l’a dit M. le rapporteur général.
C’est donc en raison de désaccords fondamentaux sur la hausse de CSG et la politique familiale, mais aussi parce que les propositions que nous pourrions formuler à ce stade ne nous semblent pas pouvoir être prises en compte, que la commission des affaires sociales juge inutile de procéder à l’examen des dispositions restant en discussion et qu’elle demande au Sénat d’adopter la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, contre la motion.
M. Martin Lévrier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, à une époque où le citoyen se pose la question du rôle des élus, en particulier du Sénat, je regrette de devoir discuter de cette motion tendant à opposer la question préalable. Pourquoi discuter de la possibilité de ne pas discuter ?
Seulement, je ne crois pas en la politique de la chaise vide, encore moins dans notre assemblée.
Regardons ce qu’a été la première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 au Sénat, et rappelons que, lorsque la discussion a lieu, nous pouvons arriver à un accord.
En première lecture, plus de 100 amendements ont été retirés. Souvent, après avoir écouté les arguments des uns et des autres, nous avons trouvé un consensus.
Consensus en matière de prévention, tout d’abord, avec la hausse du prix du tabac, la taxe sur les boissons sucrées, l’extension de l’obligation vaccinale.
Consensus en matière de simplification, ensuite, avec la fin du RSI et son transfert vers le régime général, ainsi qu’avec la transformation du CICE en baisse pérenne de cotisations pour les employeurs.
Consensus, en matière d’innovation, enfin, avec le développement de la télémédecine et l’amélioration du parcours de soins du patient.
Malgré cela, aujourd’hui, le rapporteur général a décidé de déposer une motion tendant à opposer la question préalable.
Je vais vous donner mon point de vue de nouveau sénateur, qui va peut-être vous paraître un peu naïf, mais j’espère que celui-ci sera partagé par un nombre important d’entre vous, mes chers collègues, au-delà des travées de mon groupe.
Pour moi, choisir de ne pas examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale, même en nouvelle lecture, c’est nier notre rôle dans la procédure parlementaire. C’est nier notre travail d’analyse et d’approfondissement. C’est nier, enfin, l’importance des débats dans notre démocratie.
On peut être en désaccord avec la politique du Gouvernement ; on peut critiquer la hausse de la CSG ou l’alignement des plafonds de la PAJE sur ceux du complément familial. Mais on ne peut pas dénigrer ainsi le débat parlementaire et s’en exonérer.
Certes, l’Assemblée nationale a retoqué un certain nombre de dispositions introduites par le Sénat. Vous considérez, mes chers collègues, que le désaccord est si profond qu’il vaut mieux ne pas s’y pencher de nouveau.
Il est vrai que, malheureusement, dès le premier soir de débat au Sénat, nous étions à 6 milliards d’euros supplémentaires en matière de dépenses. À la fin de l’examen, nous étions à près de 7 milliards d’euros. Cette déstructuration totale de l’équilibre budgétaire du texte ne pouvait être acceptée par le Gouvernement et la majorité présidentielle.
Il n’est donc pas étonnant que l’Assemblée nationale ait pris en compte uniquement les propositions que je qualifierais de raisonnables qui ont émané de notre hémicycle.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Oh, ce n’est pas gentil ! (Sourires.)
M. Martin Lévrier. Je pense notamment à l’exonération de la hausse de la CSG pour les bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap, attestant d’une véritable et nécessaire prise de conscience de la spécificité du handicap.
Je pense aussi à toutes les modifications apportées par le rapporteur général à l’article 11 et au RSI.
Je pense enfin à l’exonération pour les véhicules de société roulant au superéthanol.
Autant de modifications sérieuses et constructives qui ont pu, lors de l’examen du texte en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, être discutées, comprises et adoptées, l’Assemblée nationale reconnaissant, au-delà des clivages politiques, l’apport du Sénat.
Pour ma part, je suis fier, avec le groupe La République En Marche, de soutenir ce projet de loi de financement de la sécurité sociale tel qu’il a été rédigé par le Gouvernement et amendé par l’Assemblée nationale, avec les apports du Sénat.
Il ne s’agit pas simplement d’une succession de mesures d’économies budgétaires. Il s’agit d’une véritable réforme structurelle, d’une réforme en profondeur. Je tiens à le dire : c’est un bon projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui œuvre au maintien d’un système de solidarité ambitieux, juste et équitable.
C’est aussi un projet de loi de financement de transition, en attente des grandes réformes sur la retraite, l’autonomie et le vieillissement en général, ainsi que sur la politique familiale.
Je dois revenir encore une fois sur la remise en cause du mécanisme de la CSG pour les retraités et rappeler que l’effort que nous demandons est équilibré, à l’inverse d’un certain nombre d’autres décisions votées ici même, et qui continuent aujourd’hui encore d’affecter les plus fragiles de cette tranche de la population.
Permettez-moi cette petite piqûre de rappel, mes chers collègues. En 2008, la majorité parlementaire avait voté la fin de la demi-part fiscale pour les veuves, avec une réduction progressive jusqu’à sa disparition totale en 2014. À cette suppression s’est ajoutée la fiscalisation de la majoration de 10 % des pensions des retraités ayant eu au moins trois enfants, jusqu’alors non taxée, décidée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014. Ces deux mesures ont attaqué directement les retraités les plus fragiles, comme le ferait une augmentation de la TVA.
Vous l’aurez compris, le groupe La République En Marche votera contre cette motion tendant à opposer la question préalable. Je vous demande, mes chers collègues, de faire de même.
Nous nous devons d’aborder ce texte avec sérieux, en adoptant une vision à long terme. Il ne mérite pas d’être examiné par le biais de réflexions électorales ou de postures politiciennes. C’est la seule possibilité pour notre pays d’avancer ; la seule possibilité pour notre système de protection sociale de subsister ; la seule possibilité de conserver un aspect protecteur et bénéfique pour les générations à venir. C’est le rôle de notre assemblée, et cela correspond, finalement, aux différentes propositions énoncées lors de la discussion générale précédente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Vous devinez, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement est défavorable à la motion tendant à opposer la question préalable.
Il aurait évidemment souhaité que le débat puisse continuer et que des points de consensus plus nombreux apparaissent, jusqu’à l’adoption par les deux assemblées du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Les appels à voter pour ou contre cette motion laissent présager son adoption par votre assemblée. Le Gouvernement le regrettera évidemment.
Il tient néanmoins à souligner que l’ensemble des propositions faites aujourd’hui, l’ensemble des points de vigilance sur lesquels vous nous avez alertés, qu’il s’agisse de la mise en œuvre de certaines dispositions ou de votre volonté de poursuivre les travaux sur les points qui n’ont pas encore fait l’objet d’un accord entre les deux assemblées, ont été pris en compte. Je suis convaincu que le Gouvernement mettra tout en œuvre pour que, dans les semaines et mois qui viennent, ces sujets puissent faire l’objet de la plus grande concorde. (M. Martin Lévrier applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. La justification fournie par M. le rapporteur général à l’appui du dépôt de la motion tendant à opposer la question préalable sur ce texte nous a quelque peu amusés. Non pas que ses propos n’étaient pas sérieux ; ils ont seulement fait écho au débat que nous avons eu dans cet hémicycle lors de l’examen de ce texte en première lecture, alors que nous avions déposé, nous aussi, une même motion de procédure.
M. le rapporteur général nous avait alors opposé, avec brio, comme à son habitude, qu’il était important de pousser le dialogue jusqu’au bout et de lever les désaccords éventuels.
Or, il y a un instant, il s’est interrogé : jusqu’où continuer un débat concernant des valeurs essentielles lorsqu’on sent que les positions ne peuvent bouger ? Ce faisant, il a touché du doigt ce que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a vécu lors de la première lecture.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est tellement à l’opposé des valeurs que nous portons – solidarité, universalité de la protection sociale – que déposer une motion tendant à opposer la question préalable était pour nous le seul recours.
Cette motion relève en tout cas de la procédure législative normale, même si elle pose quelques problèmes. Il était important d’éclaircir ce point dans l’hémicycle, pour que les membres de cette assemblée entendent les raisons qui poussent parfois des groupes minoritaires comme le nôtre à déposer ce genre de motion.
J’en viens aux propos tenus par M. le président de la commission, au cours desquels il a expliqué les raisons profondes du dépôt de la motion. Il l’a fait, comme à son habitude, avec beaucoup de pédagogie. Les choses sont très claires.
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste partage le désaccord exprimé par M. le président de la commission sur deux éléments du texte : la CSG et la politique familiale.
Pour toutes les autres dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en revanche, un accord profond est perceptible : il n’y a pas l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarettes entre le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale et la position de la commission des affaires sociales du Sénat.
Nous ne pouvons donc pas approuver le texte de cette motion. Par conséquent, nous allons nous abstenir.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Malhuret, pour explication de vote.
M. Claude Malhuret. Ne sommes-nous pas en train de prendre l’habitude des motions tendant à opposer la question préalable ? Si tel était le cas, ce serait une mauvaise direction que nous prendrions.
Il y a déjà eu une motion de ce type sur le projet de loi de finances rectificative pour 2017. Nous en examinons une autre aujourd’hui sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Y en aura-t-il une lors de l’examen en nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2018 ?
Bien sûr, la commission mixte paritaire n’a pas été conclusive sur tous les points. Mais cela a été dit, elle l’a tout de même été sur certains. Le dialogue existe et continue à exister. Si le Sénat arrête là les discussions, cette position serait préjudiciable à notre institution.
J’ajoute que l’état de la France est tel, aujourd’hui, qu’il me paraît mériter que le débat aille jusqu’au bout et que le Sénat s’exprime pleinement.
J’ai lu avec attention les considérants de la motion. Aucun ne me paraît justifier que nous arrêtions ici nos débats. Certes, l’article 7 est important. Certes, la CSG et la politique familiale sont des sujets essentiels. Cela signifie-t-il que les autres sujets sont insignifiants ? Cela n’est pas le cas, à mon avis.
Par conséquent, nous devrions continuer de discuter. Même si le débat n’aboutit pas, il est essentiel de nous exprimer et de faire valoir nos opinions jusqu’au bout.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera contre la motion. (M. Martin Lévrier applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Quelques mots de réponse à l’intervention de Martin Lévrier. Cette motion s’inscrit dans le jeu normal des institutions ; il ne s’agit pas du tout d’une remise en cause du Sénat.
Nous avons eu en première lecture une discussion très approfondie. Nous avons véritablement joué notre rôle, adopté des positions différentes, ce qui est tout à fait normal. C’est même la base d’une saine démocratie, me semble-t-il.
M. le rapporteur général et M. le président de la commission ont rapporté de manière fidèle – je les en remercie – le travail que nous avons mené lors de la réunion de la commission mixte paritaire. Il y avait bien une volonté, de la part du rapporteur général de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, Olivier Véran, d’avancer sur certains points.
Quand nous sommes sortis de la commission mixte paritaire, même non conclusive – les discussions ont achoppé sur un point, notamment, ce qui peut se comprendre –, nous pensions que le texte allait pouvoir connaître quelques progrès significatifs. Nous avions l’impression qu’une coconstruction était encore possible avec l’Assemblée nationale.
Cela n’a pas pu se faire. Dont acte.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale revient aujourd’hui au Sénat. Continuer nos débats n’aboutirait qu’à très peu de choses. Pourquoi ce qui n’a pas été repris par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture le serait-il en lecture définitive ?
Comme l’a dit M. le président de la commission, le temps du dialogue utile est écoulé. Tout dialogue supplémentaire serait désormais inutile.
Je voterai donc cette motion, au-delà de la frustration qu’elle peut faire naître.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen aime le débat, le dialogue, la confrontation et le compromis, quand il est possible.
Nous sommes par principe hostiles à toute motion de ce genre. Nous ne sommes pas partisans du : « Circulez, y a rien à voir ! ». En l’espèce, il y a à voir. Il y a des points dont on peut discuter.
J’ai bien compris les arguments mobilisés par les uns et les autres. Même si nous les respectons tous, nous voterons contre la motion, et pour que les discussions se poursuivent.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai rappelé il y a quelques instants l’opposition totale et résolue des membres du groupe socialiste et républicain aux deux points qui sont au centre de nos débats : la hausse de la CSG pour les personnes retraitées et la politique familiale, en particulier la baisse de la PAJE.
Nous faisons, comme beaucoup dans cette enceinte, le constat du caractère figé des lignes défendues par le Gouvernement et la majorité à l’Assemblée nationale sur ces deux points.
Il appartient à la majorité du Sénat d’assumer ses responsabilités quant à la poursuite ou non du débat. En tout état de cause, mon groupe s’abstiendra sur cette motion.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, cela a été dit par Nassimah Dindar, le groupe Union Centriste votera pour la motion.
La discussion a eu lieu de façon approfondie en première lecture. Le Sénat a clairement exprimé un certain nombre de positions. Des avancées ont été obtenues, mais des questions fondamentales demeurent. Je pense notamment à celle de l’égalité devant les charges imposées par le présent texte. Or, manifestement, M. le rapporteur général l’a dit, une partie de notre population, les retraités, n’est pas traitée de manière équitable.
Nous aurions souhaité que la hausse de la CSG soit compensée par d’autres mesures de recettes, en particulier par le recours à la TVA. C’est un moyen de parvenir à l’égalité de traitement entre tous, à laquelle nous sommes particulièrement attachés.
Mon groupe est également, depuis toujours, attentif à une politique familiale équilibrée. Alors que la branche famille est excédentaire, proposer la réduction de certaines prestations ne nous semble pas aller dans le bon sens. Il faut bien sûr arriver à l’équilibre des différentes branches ; c’est un impératif urgent. Mais la structure de la sécurité sociale ne peut pas faire coexister branches déficitaires et branches excédentaires.
Le groupe Union Centriste votera donc pour la motion, afin d’affirmer de façon extrêmement claire les positions prises par le Sénat.
Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Je rappelle également que l’avis du Gouvernement est défavorable.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 250 |
Pour l’adoption | 197 |
Contre | 53 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 est rejeté.