Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, cette proposition apparaissant satisfaite par le droit en vigueur. En effet, l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000 qui prévoit que « le schéma départemental définit les conditions dans lesquelles l’État intervient pour assurer le bon déroulement des rassemblements traditionnels ou occasionnels et des grands passages » confie déjà la police des rassemblements et des grands passages des gens du voyage à l’État, et ce quel que soit le régime de police dont relève la commune.
C’est pourquoi le Gouvernement considère que le droit permet déjà ce que vous proposez.
Mme la présidente. Monsieur Carle, l’amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Carle. J’ai bien entendu les réponses de Mme la rapporteur concernant les questions que soulève mon amendement, ainsi que la demande de retrait de Mme la ministre. Je préfère toutefois maintenir cet amendement et profiter de la navette pour essayer de l’améliorer et, si nécessaire, le retirer.
Il me semble que nous devons envoyer un signal en ce sens.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
Mme la présidente. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par Mmes Primas et Estrosi Sassone, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1013 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le IV est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le montant : « 150 » est remplacé par le montant : « 200 » ;
b) À la seconde phrase, le montant : « 100 » est remplacé par le montant : « 150 » ;
2° Le VI est ainsi rédigé :
« VI. – Le récépissé mentionné au V est délivré sous une forme permettant au redevable de l’apposer de manière visible sur son véhicule servant de résidence mobile terrestre. Cette apposition est obligatoire. » ;
3° Au VIII, le mot : « de présentation » est remplacé par le mot : « d’apposition ».
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Cet amendement vise à rendre plus efficiente la taxe sur les résidences mobiles à usage d’habitat principal prévue à l’article 1013 du code général des impôts.
Il tend, premièrement, à augmenter ladite taxe de 50 euros, afin de renforcer la couverture des dépenses engagées par les collectivités et les EPCI dans le cadre de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, dite « loi Besson ».
Il vise, deuxièmement, à transformer le récépissé délivré lors du paiement de la taxe en une vignette, que le redevable devra apposer de manière visible sur son véhicule.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La quatrième loi de finances rectificative pour 2010 a instauré une taxe sur les résidences mobiles terrestres occupées à titre d’habitat principal. Cette taxe revêt la forme d’un droit de timbre, inspiré de l’ancienne vignette automobile, que les propriétaires doivent acquitter chaque année.
Cette taxe relève de la procédure de paiement sur déclaration : le propriétaire d’une résidence mobile occupée à titre d’habitat principal doit en faire la déclaration auprès du centre des finances publiques et s’acquitter immédiatement de la taxe due. Un récépissé lui est délivré.
Le produit annuel de la taxe est réparti entre les collectivités territoriales et les EPCI au prorata de leurs dépenses engagées pour la création, l’aménagement, l’entretien et la gestion d’aires et de terrains d’accueil destinés aux gens du voyage.
Le présent amendement tend à augmenter le montant de la taxe, en le portant de 150 à 200 euros par an, ou de 100 à 150 euros pour les résidences mobiles vieilles de plus de dix ans.
Il prévoit aussi que le récépissé est délivré par l’administration fiscale sous forme d’une vignette, celle-ci devant obligatoirement être apposée sur le véhicule.
Je ne suis pas certaine que cette dernière disposition – la « vignette » – soit de nature à faciliter le recouvrement de la taxe ou la sanction de son non-paiement. On peut d’ailleurs s’interroger sur les modalités de contrôle de cette taxe : lors d’un contrôle routier, si le conducteur du véhicule n’est pas en mesure de produire le récépissé délivré par l’administration, comment l’agent de police ou de gendarmerie peut-il s’assurer que le véhicule est bien utilisé en tant qu’habitation principale ? Le Gouvernement nous éclairera peut-être sur ce point.
Il n’en demeure pas moins que l’augmentation du produit de la taxe fournirait aux communes et EPCI des moyens précieux pour construire les aires et terrains d’accueil prévus par les schémas départementaux, alors que, je le redis encore une fois, l’État ne subventionne plus ces projets.
En conséquence, la commission est favorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’avis est défavorable, car cet amendement complexifie les choses, et je ne suis pas sûre de son efficacité.
Par ailleurs, je transmettrai vos questions au ministère des finances, madame le rapporteur.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. L’objectif est de rendre la législation effective. Tout ce qui va trop loin, tout ce qui est inutilement répressif, va dans le mauvais sens. Cette augmentation, que va-t-elle rapporter de plus ?
On voit bien l’intention, mais cet amendement va plutôt à l’encontre de ce que l’on veut. Qu’on applique la législation telle qu’elle est !
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cela n’empêche pas de l’appliquer !
M. Jean-Yves Leconte. C’est juste le témoignage d’un état d’esprit !
M. Pierre-Yves Collombat. Et que l’on n’essaie pas de dissuader les gens !
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour explication de vote.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Vous dites que c’est excessif, mais l’objet de cet amendement n’est pas du tout excessif.
Madame le rapporteur l’a justement rappelé, aujourd'hui, avec la raréfaction des financements publics, les communes sont de plus en plus mises à contribution pour ce qui concerne la création, la gestion, l’entretien, la surveillance des aires d’accueil des gens du voyage. Cette mesure, qui est de nature à apporter une obole supplémentaire pour mieux gérer ces aides, n’est pas du tout excessive. (M. Guy-Dominique Kennel opine.) Au contraire, elle permettra aux communes d’être encore plus performantes dans la gestion de ces aires.
M. Guy-Dominique Kennel. Très bien !
M. Pierre-Yves Collombat. Les gens ne paieront pas !
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 3.
Chapitre II
Moderniser les procédures d’évacuation des stationnements illicites
Section 1
(Division et intitulé supprimés)
Article 4
L’article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi rédigé :
« I. – Le maire d’une commune membre d’un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de création, d’aménagement, d’entretien et de gestion des aires d’accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs définis aux 1° à 3° du II de l’article 1er peut, par arrêté, interdire en dehors de ces aires et terrains le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées au même article, dès lors que l’une des conditions suivantes est remplie :
« 1° L’établissement public de coopération intercommunale a satisfait aux obligations qui lui incombent en application de l’article 2 ;
« 2° L’établissement public de coopération intercommunale bénéficie du délai supplémentaire prévu au III du même article 2 ;
« 3° L’établissement public de coopération intercommunale dispose d’un emplacement provisoire agréé par le préfet ;
« 4° L’établissement public de coopération intercommunale est doté d’une aire permanente d’accueil, de terrains familiaux locatifs ou d’une aire de grand passage, sans qu’aucune des communes qui en sont membres soit inscrite au schéma départemental prévu à l’article 1er ;
« 5° L’établissement public de coopération intercommunale a décidé, sans y être tenu, de contribuer au financement d’une telle aire ou de tels terrains sur le territoire d’un autre établissement public de coopération intercommunale ;
« 6° La commune est dotée d’une aire permanente d’accueil, de terrains familiaux locatifs ou d’une aire de grand passage conformes aux prescriptions du schéma départemental, bien que l’établissement public de coopération intercommunale auquel elle appartient n’ait pas satisfait à l’ensemble de ses obligations.
« L’agrément prévu au 3° est délivré pour une durée ne pouvant excéder six mois, en fonction de la localisation, de la capacité et de l’équipement de l’emplacement concerné, dans des conditions définies par décret.
« L’agrément d’un emplacement provisoire n’exonère pas l’établissement public de coopération intercommunale des obligations qui lui incombent dans les délais prévus à l’article 2. »
2° (nouveau) Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Le maire d’une commune qui n’est pas membre d’un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de création, d’aménagement, d’entretien et de gestion des aires d’accueil des gens du voyage et des terrains familiaux locatifs définis aux 1° à 3° du II de l’article 1er peut, par arrêté, interdire en dehors de ces aires et terrains le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées au même article, dès lors que l’une des conditions suivantes est remplie :
« 1° La commune a satisfait aux obligations qui lui incombent en application de l’article 2 ;
« 2° La commune bénéficie du délai supplémentaire prévu au III du même article 2 ;
« 3° La commune dispose d’un emplacement provisoire agréé par le préfet, dans les conditions prévues aux avant-dernier et dernier alinéas du I du présent article ;
« 4° La commune, sans être inscrite au schéma départemental prévu à l’article 1er, est dotée d’une aire permanente d’accueil, de terrains familiaux locatifs ou d’une aire de grand passage ;
« 5° La commune a décidé, sans y être tenue, de contribuer au financement d’une telle aire ou de tels terrains sur le territoire d’une autre commune. »
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, sur l’article.
M. Jean-Pierre Grand. Madame la ministre, je me félicite de cet article, qui reprend la philosophie sous-tendue par l’amendement que j’avais déposé avec notre collègue Jean-Claude Carle, comme il l’a rappelé précédemment, et que le Sénat avait adopté l’an dernier lors de l’examen du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté.
Aujourd’hui, il est anormal de pénaliser une commune qui fait des efforts en réalisant une aire sur son territoire du seul fait du transfert de compétences à un EPCI qui, lui, ne respecte pas, à son échelle, l’ensemble de ses obligations. Je souhaite argumenter, madame la ministre, pour donner quelques idées à nos collègues de l'Assemblée nationale lors de la navette…
J’observe que l’on a aujourd’hui tout intérêt à reconnaître l’existence d’une aire d’accueil des gens du voyage. Pour prendre l’exemple de la métropole de Montpellier, il faudrait que nous réalisions un certain nombre d’aires d’accueil. Mais personne n’en a envie parce qu’elles ne vont pas se construire tout à coup. Financièrement, ce n’est pas possible. Si l’on veut que la troisième aire soit réalisée cette année, la quatrième l’année prochaine et la cinquième ultérieurement, on a intérêt, chaque fois qu’une aire est créée, à donner les pouvoirs de police. Pourquoi ?
L’implantation d’une aire est complexe. Montpellier n’a rien à voir avec Paris, qui pourrait faire des aires d’accueil autant qu’elle le veut sur les voies de berge libérées, avec des métros et des écoles à proximité. Ce n’est pas du tout similaire en province. Il faut que nous les implantions à des endroits qui ne soient pas en contradiction avec la loi. Nous le savons, chaque fois que nous voulons faire une aire d’accueil des gens du voyage, ce n’est pas si facile que cela. Une telle réalisation entraîne une levée de boucliers des riverains, et pas seulement.
Aussi, le Gouvernement serait bien inspiré de proposer que les grandes collectivités, les EPCI, déposent un plan, étale la réalisation dans le temps. Et chaque fois qu’une aire d’accueil est implantée, on devrait bénéficier de facilités pour faire partir ceux qui contreviennent à la loi. Sinon, personne n’a intérêt à en réaliser une. Personne ! Peut-être même ira-t-on, madame la ministre, jusqu’à fermer nos aires d’accueil : cela nous coûte aujourd'hui très cher et on n’est pas réellement reconnu par l’État. Même si l’on a bénéficié de quelques financements à un certain moment, on sait ce que cela coûte dans la durée. Il suffirait que la Cour des comptes se penche un peu sur cette question…
Mme la présidente. L'amendement n° 20, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. J’ai simplement fait apparaître dans l’objet de cet amendement qu’il s’agit d’un amendement de cohérence. Je comprends bien la finalité de l’article 4 : ne pas supprimer des pouvoirs administratifs aux communes qui n’ont pas d’obligations ou respectent leurs engagements, même si l’EPCI ne respecte pas ses obligations.
Toutefois, j’attire votre attention sur un point : si cet article est adopté, la responsabilité de l’EPCI sera totalement dissoute. On en reviendra alors à une responsabilité par commune.
M. Michel Canevet. Non !
M. Jean-Yves Leconte. Telle est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement, même si, je le répète, je comprends la philosophie de cet article. C’est la notion même de responsabilité en la matière et la compétence de l’EPCI qui sont ici indirectement remises en cause.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer la disposition selon laquelle le maire d’une commune dotée d’une aire permanente d’accueil, de terrains familiaux locatifs ou d’une aire de grand passage conformes aux prescriptions du schéma départemental dispose du pouvoir d’interdire le stationnement des résidences mobiles sur le territoire de sa commune, hors des aires et terrains prévus à cet effet, même si l’EPCI auquel appartient la commune n’a pas rempli l’ensemble de ses obligations en la matière.
Il s’agit vraiment pour nous de réparer une injustice, qui suscite l’incompréhension des élus locaux, ainsi que M. Grand l’a bien expliqué. Pourquoi construire une aire si l’on ne peut pas avoir ce droit de police parce que l’ensemble de l’EPCI ne satisfait pas à ses obligations ? C’est une double peine. La proposition de loi répare cette injustice.
En conséquence, la commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je l’ai déjà indiqué dans mon propos liminaire, le Gouvernement demeure bien sûr attaché à ce que la solidarité au sein de l’EPCI soit le moteur permettant la réalisation de l’ensemble des aires d’accueil prévues au schéma départemental.
Pour autant, je suis sensible à la situation un peu délicate des communes qui disposent d’une aire d’accueil, mais qui sont situées dans un EPCI ne remplissant ses obligations. Je peux entendre l’incompréhension des élus de terrain ; c’est absolument évident. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.
M. Jean-Yves Leconte. Je le retire, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° 20 est retiré.
Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
La loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est ainsi modifiée :
1° L’article 9 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi modifié :
– au premier alinéa, après les mots : « le maire », sont insérés les mots : « , le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre » et les mots : « les lieux » sont remplacés par les mots : « le territoire de la commune ou, le cas échéant, de l’établissement public de coopération intercommunale, à l’exception des aires et terrains mentionnés aux 1° à 3° du II de l’article 1er » ;
– le deuxième alinéa est complété par les mots : « , ou s’il est de nature à porter une atteinte d’une exceptionnelle gravité au droit de propriété, à la liberté d’aller et venir, à la liberté du commerce et de l’industrie ou à la continuité du service public » ;
– après la première phrase du troisième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Si un stationnement illicite par les mêmes occupants, sur le territoire de la commune ou, le cas échéant, de l’établissement public de coopération intercommunale, a déjà été constaté au cours de l’année écoulée, la mise en demeure est assortie d’un délai d’exécution de vingt-quatre heures. » ;
– au quatrième alinéa, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « quinze » ;
b) À la première phrase du II bis, après les mots : « fixé par celle-ci », sont insérés les mots : « et qui ne peut être supérieur à quarante-huit heures à compter de sa notification » ;
c) Le IV est abrogé ;
2° Le premier alinéa de l’article 9-1 est complété par les mots : « , ou à porter une atteinte d’une exceptionnelle gravité au droit de propriété, à la liberté d’aller et venir, à la liberté du commerce et de l’industrie ou à la continuité du service public » ;
3° (nouveau) Après l’article 9-1, sont insérés des articles 9-1-1 et 9-1-2 ainsi rédigés :
« Art. 9-1-1. – Sous réserve des compétences dévolues à la juridiction administrative, en cas d’occupation, en violation de l’arrêté prévu au I de l’article 9, d’un terrain public ou privé, le propriétaire ou le titulaire d’un droit réel d’usage sur le terrain peut saisir le président du tribunal de grande instance aux fins d’ordonner, sur requête ou en référé, l’évacuation forcée des résidences mobiles. La condition d’urgence prévue aux articles 808 et 812 du code de procédure civile est présumée remplie.
« Les mêmes dispositions sont applicables, dans les communes mentionnées à l’article 9-1, en cas d’occupation sans titre d’un terrain public ou privé au moyen de résidences mobiles mentionnées à l’article 1er.
« Art. 9-1-2. – La condition d’urgence prévue à l’article L. 521-3 du code de justice administrative n’est pas requise en cas de requête relative à l’occupation d’une dépendance du domaine public non routier d’une personne publique en violation de l’arrêté prévu au I de l’article 9 de la présente loi. Elle n’est pas non plus requise en cas de requête relative à l’occupation sans titre, au moyen de résidences mobiles mentionnées à l’article 1er, d’une dépendance du domaine public non routier d’une personne publique sur le territoire des communes mentionnées à l’article 9-1. »
Mme la présidente. L'amendement n° 30, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Cet article permettrait au préfet de mettre en demeure les gens du voyage de quitter non pas seulement le terrain occupé illicitement, mais aussi le territoire de la commune ou même de l’EPCI, sauf les aires permanentes d’accueil, les aires de grand passage et les terrains familiaux situés sur le territoire de la collectivité.
Cette mesure apparaît disproportionnée, au regard de la notion de liberté d’aller et venir. Le trouble à l’ordre public justifiant l’évacuation s’apprécie au niveau du terrain et non à l’échelle du territoire de la commune ou de l’EPCI.
Par ailleurs, cet article modifie l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 pour considérer le trouble à l’ordre public comme une condition possible mais non nécessaire à l’intervention du préfet dans le cadre de la procédure de mise en demeure et d’évacuation. Une telle disposition ne peut être acceptée. En effet, ce n’est que pour garantir l’ordre public que le préfet peut faire usage de ses pouvoirs de police en la matière, comme l’a rappelé récemment le Conseil constitutionnel.
De plus, l’article 5 prévoit que le délai d’exécution de la mise en demeure est de vingt-quatre heures systématiquement si les occupants ont déjà occupé précédemment de façon illicite un terrain sur le territoire de la commune ou de l’EPCI concerné. Or la mise en demeure étant une mesure de police administrative et non une sanction, il n’est pas possible de corréler le délai d’exécution de l’évacuation au comportement passé des occupants du terrain.
La différence de traitement opérée entre « récidivistes » ou non méconnaîtrait le principe d’égalité. Qui plus est, les conditions pratiques de mise en œuvre d’un dispositif – base de données – permettant de constater la réitération et la présence des mêmes personnes semblent complexes.
Enfin, l’article vise à établir dans la loi que la condition d’urgence n’est pas requise ou est présumée remplie, en cas d’occupation illégale d’un terrain par des gens du voyage, dans le cadre des procédures d’expulsion pouvant être diligentées devant le juge administratif ou devant le juge judiciaire. Une telle présomption d’urgence, appliquée aux seuls gens du voyage occupant illicitement un terrain, encourrait le double grief d’atteinte au principe d’égalité et de discrimination.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. La multiplication des installations « sauvages » justifie de renforcer les procédures existantes, qu’il s’agisse de procédures de police administrative ou de procédures judiciaires.
Les arguments avancés par le Gouvernement – veuillez m’en excuser, madame la ministre ! – ne sont pas convaincants.
Premièrement, étendre le périmètre de la mise en demeure d’évacuer à l’ensemble de la commune ou de l’EPCI serait « manifestement disproportionné au regard de la liberté d’aller et venir », le trouble à l’ordre public s’appréciant à l’échelle de chaque terrain.
Pourtant, le droit en vigueur prévoit d’ores et déjà que la mise en demeure du préfet reste applicable…
M. Loïc Hervé. Absolument !
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. … si la même résidence mobile se retrouve de nouveau, dans un délai de sept jours, en stationnement illicite sur le territoire de la commune ou de l’EPCI. Le texte de la commission, sur ce point, ne change rien au droit positif : il ne fait que préciser la rédaction de la loi.
Deuxièmement, au motif que la mise en demeure est une mesure de police administrative et non une sanction, il ne serait pas possible de différencier son délai d’exécution en fonction du comportement passé des occupants, et de le limiter à vingt-quatre heures en cas de réitération au cours de la même année.
La commission des lois est sensible à la nécessité de maintenir une frontière nette entre police administrative et répression pénale. Toutefois, il arrive d’ores et déjà que des mesures de police administrative soient motivées par le comportement passé des personnes. Il en va ainsi de l’arrêté d’expulsion pris à l’encontre d’un étranger, qui prend acte de son comportement passé pour en déduire un risque de trouble à l’ordre public qu’il est nécessaire de prévenir.
Troisièmement, l’augmentation de sept à quinze jours de la durée d’applicabilité de la mise en demeure serait « excessive ». En réalité, la durée actuelle de sept jours est nettement insuffisante. Compte tenu des délais incompressibles dans lesquels est enfermée la procédure, il peut s’écouler près d’une semaine entre la mise en demeure du préfet et l’évacuation effective des terrains. Si l’on veut empêcher que des campements illicites ne se reconstituent immédiatement à proximité, il est nécessaire de porter à quinze jours le délai d’applicabilité de la mise en demeure.
Quatrièmement, contrairement à ce que l’on peut lire dans l’objet de l’amendement du Gouvernement, le texte de la commission ne limite nullement à quarante-huit heures le délai d’exécution de la mise en demeure. Le préfet reste libre de fixer un délai d’exécution plus long s’il l’estime opportun. C’est seulement le délai de recours qui est limité à quarante-huit heures.
Cinquièmement, les dispositions introduites par la commission selon lesquelles la condition d’urgence est écartée ou présumée remplie en cas de référé administratif, de référé civil ou de requête civile portant sur l’occupation sans titre d’un terrain par des résidences mobiles seraient attentatoires au principe d’égalité et discriminatoires. Permettez-moi seulement de rappeler au Gouvernement que la loi du 5 juillet 2000 prévoit déjà des procédures exorbitantes du droit commun en cas de stationnement illicite de résidences mobiles – la procédure d’évacuation d’office et la procédure civile spéciale en cas d’occupation d’un terrain affecté à une activité économique. Ces procédures sont la contrepartie des droits reconnus aux gens du voyage par cette même loi et des obligations d’accueil faites aux communes et à leurs groupements. Or, à moins que je ne me trompe, le Gouvernement ne propose pas de les supprimer …
Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.