Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Sueur, l'amendement n° 33 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Sueur. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 3
Mme la présidente. L'amendement n° 44, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 11° du III de l’article LO 135-1 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° La nature, la valeur, l’origine et le motif de tout avantage gratuit d’une valeur de plus de 1 500 euros, exception faite de cadeaux reçus par des parents proches. »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Des élus sont régulièrement sollicités par des concitoyens, des associations et aussi des groupes d’intérêts. Ces sollicitations peuvent s’accompagner d’un cadeau, d’une invitation, voire d’une ristourne au montant parfois élevé. Certains groupes d’intérêts espèrent obtenir compensation de ces cadeaux.
Dans l’esprit de ce qui nous a animés lors des dernières années où plusieurs réformes ont vu le jour, comme la déclaration de patrimoine et le registre des représentants d’intérêts, il s’agit aujourd’hui pour nous d’aller plus avant dans la prévention des conflits d’intérêts et de lever les soupçons réguliers de corruption.
Les récentes échéances électorales ont marqué l’attention particulière des Français au sujet des cadeaux faits aux élus. Cette exigence de transparence traduit la perte de confiance des citoyens envers leurs élus, qu’il nous convient de restaurer, en inscrivant dans le projet de loi organique dont nous débattons un principe de prudence.
Ainsi, nous proposons d’ajouter l’obligation de déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique la nature, la valeur, l’origine et le motif de tout avantage gratuit excédant une valeur de 1 500 euros.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Cet amendement est tout à fait inutile. L’organisation de la déontologie relève exclusivement du bureau. On ne va pas commencer à faire figurer cette question dans la loi. Le bureau a pris les devants : je vous rappelle, ma chère collègue – mais vous le savez et le pratiquez – que tout cadeau d’une valeur supérieure non pas à 1 500 euros mais à seulement 150 euros doit être déclaré.
Nous avons adopté des règles depuis mai 2015. Cette obligation est assortie de sanctions disciplinaires. Ce dispositif est bien plus exigeant que la seule déclaration à une autorité extérieure, qui n’a d’ailleurs pas vocation à se prononcer sur ce type de question.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 46, présenté par M. Zocchetto, n'est pas soutenu.
Article 4
Après le 7° de l’article LO 146 du code électoral, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les sociétés, entreprises ou organismes dont l’activité consiste principalement à fournir des prestations de conseil aux sociétés, entreprises, établissements ou organismes mentionnés aux 1° à 7°. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 4
Mme la présidente. L'amendement n° 85 rectifié, présenté par Mme Laborde, M. Collin et Mmes Costes, Jouve et Malherbe, est ainsi libellé :
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 7° de l’article LO 146 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les sociétés, entreprises ou organismes de plus de 5 000 salariés ou dont le chiffre d'affaires excède 1,5 milliard d'euros et le total de bilan 2 milliards d'euros. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement a pour objet de créer une nouvelle incompatibilité entre le mandat parlementaire et plusieurs fonctions de direction au sein des très grandes entreprises.
Il ne s’agit évidemment pas d’empêcher les personnes assurant ces fonctions de devenir parlementaires : leur expérience dans l’entreprise peut utilement éclairer le débat public.
Il est cependant nécessaire de les contraindre de choisir entre la faculté d’exercer ponctuellement un mandat de représentant de la Nation et des engagements professionnels potentiellement très lourds.
Le mandat parlementaire exige une très grande disponibilité, on l’a régulièrement entendu dans le débat sur le non-cumul des mandats. La direction d’entreprises de plus de 5 000 salariés ou générant un chiffre d’affaires supérieur à 2 milliards d’euros, avec toutes les sujétions qui lui incombent, paraît incompatible avec celles qui sont dévolues aux parlementaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Ma chère collègue, la nature du problème est exactement la même, que la société soit petite ou grosse. Les incompatibilités sont faites pour éviter que les liens d’intérêts d’un parlementaire mettent en cause son indépendance.
Vous savez que les incompatibilités sont, heureusement, déjà très larges puisqu’elles comprennent le fait de travailler pour des sociétés cotées, des sociétés d’économie mixte, des sociétés subventionnées par la puissance publique. Mais que la société soit petite ou grosse, j’y insiste, ne change rien du point de vue de la protection de l’indépendance du parlementaire.
C'est la raison pour laquelle je vous serais très reconnaissant si vous acceptiez de retirer votre amendement au bénéfice des explications que je vous ai apportées. Dans le cas contraire, la commission émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Madame la sénatrice, je partage l’avis du rapporteur. L’objet de la loi est la prévention des conflits d’intérêts, qui sont liés à la nature de l’activité de l’entreprise. La taille de l’entreprise ne constitue, par elle-même, ni un facteur de risque ni un critère pertinent à cette fin.
Je souhaiterais que vous retiriez votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Madame Laborde, l'amendement n° 85 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Je le retire, madame la présidente, au vu des explications satisfaisantes qui m’ont été apportées.
Je me faisais juste un petit plaisir à l’endroit des grosses entreprises, que nous remarquons plus facilement que les petites…
Mme la présidente. L'amendement n° 85 rectifié est retiré.
Article 5
L’article LO 146-1 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. LO 146-1. – Il est interdit à tout député de :
« 1° Commencer à exercer une fonction de conseil qui n’était pas la sienne avant le début de son mandat ;
« 2° Poursuivre une telle activité lorsque celle-ci a été initiée dans les douze mois précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction ;
« 3° Fournir des prestations de conseil aux sociétés, entreprises, établissements ou organismes mentionnés aux 1° à 7° de l’article LO 146. »
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 4 rectifié, présenté par Mme Lienemann et MM. Montaugé et Daudigny, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après le mot :
député
insérer les mots :
et à tout sénateur
II. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 2° Poursuivre une telle activité dès le premier jour du mois de son entrée en fonction ;
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. L’amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 59, présenté par M. Assouline, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 34, présenté par MM. Botrel, Sueur, Leconte, Mazuir et Lozach, Mme Cartron et MM. Roux, Duran et Vandierendonck, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
douze mois
par les mots :
trois ans
La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Le projet de loi organique prévoit que les parlementaires qui exercent une activité de conseil sont autorisés à poursuivre une telle activité si celle-ci a été initiée dans les douze mois précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction.
Notre volonté est de faire que cette loi soit efficace et qu’elle garantisse une confiance totale de nos concitoyens dans l’action publique, sans pour autant sombrer, comme cela a été rappelé plusieurs fois, notamment lors de la discussion générale, dans une chasse aux sorcières qui serait néfaste.
Le présent amendement prévoit que le parlementaire est autorisé à poursuivre une activité de conseil si celle-ci a été initiée dans les trois ans précédant le premier jour du mois de son entrée en fonction.
Cet amendement vise à lever tout soupçon à l’encontre des parlementaires concernés. En effet, le délai de douze mois, initialement prévu, ne nous semble pas suffisant pour garantir la plus grande transparence vis-à-vis de nos concitoyens. Vous le savez, douze mois avant l’élection, dans de nombreux cas de figure, nous connaissons déjà les candidats qui se présenteront. Il s’agit de prévenir les situations dans lesquelles certains d’entre eux tenteraient de développer une activité de conseil en vue de devenir parlementaire. C’est pourquoi le délai proposé nous semble insuffisant.
Sans sombrer dans une suspicion systématique, nous ne devons pas laisser de place aux doutes pour nos concitoyens et nous devons faire preuve de la plus totale transparence.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Mon cher collègue, votre amendement touche non pas à la liberté d’entreprendre du parlementaire, mais à la liberté pour les Français qui exercent une profession d’être candidats. Avec votre amendement, un jeune de 26 ans, qui a terminé ses études et qui se lance dans une activité de consultant, n’aurait pas le droit d’être candidat à un mandat législatif ou sénatorial pendant les trois années qui suivent le début de sa carrière professionnelle.
Cette mesure est gravement frustratoire d’un droit fondamental : celui de tout Français d’être candidat à une élection.
Je pense même que, en ayant prévu un délai d’un an avant de pouvoir être candidat à une élection tout en gardant son métier, la mesure que nous avons prise est déjà extrêmement sévère.
Ainsi, on ne peut pas adopter cet amendement, car la privation du droit fondamental d’exercer sa profession qui en résulterait serait trop grande pour les citoyens français qui voudraient être candidats à des élections législatives ou sénatoriales.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je ferai la même observation et j’émettrai aussi un avis défavorable sur ces amendements.
Il me semble que ne retenir aucune limite à l’antériorité ou, au contraire, prévoir un délai de trois ans, comme cela est proposé, si je ne me trompe pas, au travers de l’amendement de M. Botrel, serait totalement disproportionné. En effet, cela conduirait à interdire toute candidature à une élection aux personnes exerçant une activité professionnelle de cette nature. Le risque constitutionnel serait excessif ou disproportionné.
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons pas admettre cet amendement.
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 29, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’article LO 146-1 du code électoral, il est inséré un article LO 146-… ainsi rédigé :
« Art. LO 146-… – Les revenus qu’un parlementaire tire d’activités de conseil sont plafonnés à 15 % de l’indemnité parlementaire. La liste des clients du cabinet de conseil auquel appartient le parlementaire dans ce cadre est rendue publique. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. À défaut d’interdire l’activité de conseil aux parlementaires en cours de mandat, nous souhaitons, au travers de cet amendement, limiter les revenus annexes tirés de ces activités.
Nous préconisons ainsi l’établissement d’un seuil de 15 % des revenus et nous recommandons également que soit publiée la liste des clients du cabinet de conseil auquel appartient le parlementaire. Il s’agit, même si l’activité de conseil du parlementaire est en sommeil, de permettre une traçabilité des possibles conflits d’intérêts.
Au travers d’une contribution du groupe CRC à une mission d’information sur les conflits d’intérêts, menée par l’ancien sénateur Jean-Jacques Hyest, nous étions même allés plus loin en promouvant non seulement une conception du conflit d’intérêts quand celui-ci est avéré, mais encore de manière préventive. C’est ce qui sous-tend cet amendement, qui vise à instaurer la publicité sur les clients du cabinet de conseil d’un parlementaire, qu’il exerce ou non son activité.
Par ailleurs, nous préconisons d’aller beaucoup plus loin dans le régime des incompatibilités, en interdisant notamment tout travail pendant l’exercice d’un mandat. Le caractère général de cette interdiction aurait au moins le mérite de la clarté. Bien sûr, on aurait pu envisager des autorisations accordées par une autorité unique et indépendante de déontologie de la vie politique ; c’est en ces termes que nous intervenions déjà en 2011, anticipant ainsi la création de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, cet amendement tend simplement, à défaut de l’interdire, à limiter la proportion des revenus issus des activités de conseil. Il s’agit donc d’un amendement de repli et, me semble-t-il, de bon sens.
Mme la présidente. L’amendement n° 19, présenté par M. Kaltenbach n’est pas soutenu.
L’amendement n° 35 rectifié ter, présenté par Mme Yonnet, M. Sueur, Mmes Blondin, Cartron et Lepage, MM. Lozach, Marie et Mazuir, Mme Conway-Mouret, M. Madec, Mme Féret et M. Leconte, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’article LO 146-1 du code électoral, il est inséré un article LO 146-… ainsi rédigé :
« Art. LO 146-… – Les revenus qu’un député tire d’activités de conseils sont plafonnés à 50 % de l’indemnité parlementaire. »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Richard et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le III de l’article LO 135-1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le député retirant de son activité de conseil une recette brute supérieure à 150 000 € au cours de la dernière année fait figurer au titre du 11°, dans le mois suivant la clôture de l’exercice, la liste des cinq entités dont il a obtenu les recettes les plus importantes. »
La parole est à M. Alain Richard.
M. Alain Richard. Sur ce thème des conflits d’intérêts liés aux activités de conseil, nous devons essayer de trouver la bonne règle, celle qui instaure un équilibre entre deux principes : d’une part, le fait que les parlementaires, sur le fondement de la Constitution, ont la liberté d’entreprendre et peuvent donc, en droit, exercer une activité professionnelle intégrale en même temps que leur mandat parlementaire – c’est quelque chose d’un peu surprenant pour la grande majorité de nos concitoyens, mais c’est le droit – et, d’autre part, l’exigence d’indépendance ainsi que celle de disponibilité.
Or, conformément au texte organique en vigueur, il existe déjà une obligation de déclaration de toute une série de données ; je souligne à ce sujet que, au 11° du III de l’article LO 135-1 du code électoral, ce sont toutes les activités professionnelles que l’on doit déclarer, qu’elles soient ou non potentiellement génératrices de conflits d’intérêts.
Dès lors, notre raisonnement consiste à dire que, quand l’activité professionnelle de conseil prend un caractère prédominant par rapport à l’exercice du mandat parlementaire, si l’on ne peut constitutionnellement s’y opposer – c’est d’ailleurs pour cela que les amendements consistant à plafonner légalement les ressources du parlementaire ne peuvent prospérer –, il nous paraît en revanche évident que, pour prévenir les conflits d’intérêts, il doit y avoir un signalement.
Notre amendement se fonde donc sur ce principe. Il vise à ce que, lorsque la recette issue de l’activité de conseil dépasse le double de l’indemnité parlementaire, ce qui semble indiquer que la personne est très fortement investie dans cette activité et qu’elle jouit d’une reconnaissance du marché très au-dessus de la moyenne, même si cette activité est licite – il n’est pas ici question de l’empêcher –, il paraît tout de même cohérent avec les déclarations d’intérêts telles que nous les avons définies, incluant par exemple les déjeuners, que l’intéressé, qui perçoit donc plus de 150 000 euros par an de son activité de conseil, indique dans sa déclaration d’intérêts qui sont les cinq premiers contributeurs.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Ceux de ces amendements qui visent à limiter la rémunération qu’un parlementaire peut tirer d’une activité compatible avec son mandat – compatible, j’y insiste – méconnaissent le fait que les activités professionnelles ne sont pas toutes rémunérées à la même hauteur. Aussi surprenant que cela puisse paraître, il y a des activités qui, avec trois ou quatre heures de travail, peuvent apporter une rémunération très supérieure à l’indemnité parlementaire mensuelle elle-même ; c’est ainsi.
Dès lors, soit on décide que ces activités sont incompatibles avec le mandat parlementaire, mais ce n’est pas le cas ici – puisque l’on propose de limiter le montant du revenu, c’est qu’elles sont tout à fait compatibles –, soit on limite le revenu qu’elles procurent, mais alors on ne peut pour ainsi dire plus les exercer qu’à titre quasi bénévole par rapport au revenu normal que l’on tire de ce type d’activité.
Il y a en effet des activités d’avocat ou de conseil qui, pour un professionnel qui a pignon sur rue, peuvent rapporter 700, 800, voire 900 euros par heure ! Ainsi, derrière ces amendements qui limitent la rémunération susceptible d’être perçue, il y a dès le départ, me semble-t-il, une erreur dans le choix de l’instrument. On pourrait éventuellement dire que l’on ne peut consacrer plus de deux, trois ou quatre jours par semaine à ces activités, parce qu’il faut se consacrer principalement à son travail de parlementaire, mais, à ce moment-là, on rentrerait dans des considérations très délicates parce que personne ne peut nous interdire de travailler de nuit, ou le samedi, voire le dimanche.
Au fond, notre critère de décision doit uniquement être : « cette activité est-elle compatible ou non ? ». Les incompatibilités ont déjà été élargies et nous les élargissons encore en prévoyant que l’on ne peut conserver une activité de conseil qui n’aurait pas été commencée au moins un an avant le début du mandat parlementaire – nous avons rejeté le délai de trois ans, mais nous avons adopté ce délai d’un an.
L’avis de la commission est donc défavorable sur l’amendement n° 29, ainsi que sur l’amendement n° 35 rectifié ter.
L’amendement n° 25 rectifié de M. Richard, qui vise à rendre publique la liste des cinq principaux clients d’un parlementaire qui exercerait une activité de conseil, a également reçu un avis défavorable de la commission, au motif que cette liste de clients est normalement couverte par le secret professionnel.
Cela dit, je dois dire que l’entorse à nos principes que constituerait cette disposition me paraît infiniment moins grave que celle dont sont porteurs les précédents amendements. Aussi, à titre personnel, je ne serais pas éloigné, sur cet amendement, de m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. L’amendement n° 29, qui tend à plafonner les revenus tirés d’activités de conseil à 15 % de l’indemnité parlementaire, n’établit pas une interdiction absolue, mais, malgré cela, le fait de limiter les revenus tirés d’une activité, quelle qu’elle soit, est susceptible de porter atteinte à la liberté d’entreprendre.
En outre, l’objectif visé, tout à fait digne d’intérêt puisqu’il s’agit d’inciter fortement les parlementaires à se consacrer à l’exercice de leur mission et à leur mandat, devrait logiquement conduire à appliquer ce plafond de 15 % à l’ensemble des activités exercées par les parlementaires, et non seulement l’activité de conseil.
Enfin, dernière observation, le conflit d’intérêts dépend davantage de la nature des activités exercées, comme le faisait valoir M. le rapporteur, que du montant des sommes perçues au titre de ces activités.
Pour toutes ces raisons, tant constitutionnelles que de logique interne, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Richard, a pour objectif de rendre plus visibles un certain nombre de situations dans lesquelles le risque de conflit d’intérêts pourrait paraître élevé pour les raisons que vous avez évoquées. Vous souhaitez pour cela, monsieur le sénateur, que les parlementaires qui tirent d’une activité de conseil des revenus substantiels déclarent leurs principaux clients, les cinq plus importants, disiez-vous.
Je comprends, monsieur le sénateur, l’intérêt de votre amendement, qui va dans le sens d’un meilleur contrôle des activités de conseil. Pour autant, l’efficacité de la mesure que vous proposez ne me semble pas suffisamment établie, pour deux raisons. Tout d’abord, le seuil de 150 000 euros peut sembler arbitraire – ne voyez aucune connotation péjorative dans ce terme –, car, au fond, pourquoi 150 000 euros ? En outre, il me semble que cet amendement pose la question du secret professionnel, lorsqu’il s’agit d’une activité réglementée, mais vous avez peut-être un autre regard là-dessus.
Enfin, il me semble qu’en se concentrant sur la situation de parlementaires qui tirent des revenus importants de leur activité de conseil, cette mesure, M. le rapporteur l’a également expliqué, risque de rendre moins visibles d’autres situations qui pourraient être tout aussi problématiques. Je le répète, l’existence d’un conflit d’intérêts n’est pas liée uniquement au revenu que l’activité génère.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement, de même que sur l’amendement n° 35 rectifié ter.
Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote sur l’amendement n° 29.
M. André Reichardt. Je voterai naturellement contre ces trois amendements, mais mon intervention portera sur l’amendement n° 29, sur lequel je souhaite particulièrement m’étendre parce que j’ai un peu de mal à le comprendre ; il me gêne même singulièrement.
Lorsque l’on propose que les revenus qu’un parlementaire tire d’activités de conseil soient plafonnés à 15 % de l’indemnité parlementaire, eu égard aux coûts des prestations de conseil, cela laisse entendre que les revenus d’un parlementaire sont énormes.
Madame Assassi, mes chers collègues, 15 % de notre indemnité, vu la tarification habituelle des prestations de conseil, je pense que cela ne couvre même pas le coût que le consultant paiera pour la cotisation forfaitaire la plus basse ! De vous à moi, si l’on devait suivre cet amendement, cela signifierait simplement qu’il n’y a aucun intérêt pour le consultant de s’installer.
C’est pourquoi j’aurais tendance à vous proposer de rectifier votre amendement en interdisant purement et simplement, puisque c’est bien cela que cela veut dire, l’activité de conseil exercée en plus d’un mandat parlementaire.
Je ne comprends donc vraiment pas du tout cet amendement ; je le répète, ce qui me gêne vraiment, c’est qu’il donne le sentiment que nous, parlementaires, sommes énormément payés. Or le moins que l’on puisse dire c’est que ce n’est pas franchement le cas. (M. Alain Gournac sourit.)
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas risible, monsieur Gournac, il y a des personnes qui gagnent 1 200 euros par mois !
M. André Reichardt. Très franchement, je ne comprends pas beaucoup plus l’amendement n° 35 rectifié ter, mais, lui, au moins, vise à instaurer un plafond de 50 %
Mme la présidente. Les explications de vote portent sur l’amendement n° 29, mon cher collègue.
M. André Reichardt. Je voterai donc contre ces trois dispositions et, en tout état de cause, je ne comprends certainement pas les amendements nos 29 et 35 rectifié ter.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 29.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 118 :
Nombre de votants | 334 |
Nombre de suffrages exprimés | 232 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 212 |
Le Sénat n’a pas adopté.
La parole est à Mme Évelyne Yonnet, pour explication de vote sur l’amendement n° 35 rectifié ter.