M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, en remplacement de M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1583, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.
M. Roland Courteau, en remplacement de M. Yannick Vaugrenard. Madame la ministre, mon collègue Yannick Vaugrenard souhaite attirer votre attention sur l’émission La rue des allocs, diffusée par M6 les 17 août et 17 novembre derniers.
Dans cette émission, qui était curieusement présentée comme un « documentaire-réalité », des habitants du quartier de Saint-Leu étaient filmés. Classé en zone urbaine sensible, c’est l’un des quartiers les plus pauvres d’Amiens ; le chômage y atteint 19 % de la population.
Beaucoup d’entre nous ont été choqués de la stigmatisation de populations en grande difficulté financière et sociale. Nous l’avons aussi été des clichés véhiculés par cette émission, dont l’alcoolisme ou le travail au noir.
La FNARS, la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, a appelé le Conseil supérieur de l’audiovisuel à intervenir pour suspendre la diffusion de ce documentaire qu’elle jugeait « stigmatisant et honteux face à la détresse sociale que vivent plus de huit millions de personnes pauvres en France ». Bien qu’il ait déploré le choix du titre de l’émission, le CSA n’a, étonnamment, relevé aucun manquement de M6 à ses obligations…
La divulgation de leurs adresses a jeté des habitants de Saint-Leu en pâture à des personnes qui, après les premières diffusions, les ont dérangés en tapant à leurs fenêtres, en les insultant, en les traitant de « cas sociaux » !
Cette émission stigmatisante est contraire à l’esprit de la loi du 24 juin 2016 visant à lutter contre la discrimination à raison de la précarité sociale, dont Yannick Vaugrenard est l’initiateur. Il est indispensable de ne pas autoriser la diffusion de telles émissions, particulièrement sans éclairage ni avis contradictoire émanant, notamment, des associations caritatives et humanitaires.
Nous traversons une période de crise qui n’est pas sans en rappeler d’autres, aux pires moments de notre histoire, et où d’aucuns cherchent des boucs émissaires.
Madame la ministre, être pauvre et stigmatisé est une double peine qui a assez duré ! Quelles mesures ont été engagées afin que de la diffusion de telles émissions ne se renouvellent pas ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, la diffusion de La rue des allocs sur M6 depuis l’été dernier a effectivement suscité l’émotion et l’émission a été critiquée comme étant porteuse de stigmatisation, de clichés et de préjugés à l’égard de personnes en situation de précarité.
Ce programme a entraîné de vives réactions non seulement de la part des téléspectateurs, mais aussi de celle d’associations, dont certaines ont saisi le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Au nombre des plaignants, on trouvait en effet notamment la FNARS, qui avait demandé au CSA d’intervenir auprès de la direction de la chaîne pour « suspendre la diffusion de ce programme stigmatisant et honteux face à la détresse sociale que vivent près de huit millions de personnes pauvres en France ».
L’autorité indépendante a examiné cette émission. Vous l’avez rappelé, elle en a déploré le titre, à connotation péjorative et ne reflétant d’ailleurs pas la diversité des situations et des comportements des résidents du quartier de Saint-Leu à Amiens. Elle a cependant estimé que M6 n’avait méconnu aucune des obligations que doit respecter une chaîne de télévision lorsqu’elle décide de mettre un programme à l’antenne
En procédant ainsi, le CSA a exercé une mission que le législateur lui a confiée et qui est inscrite à l’article 3-1 de la loi relative à la liberté de communication : garantir l’exercice de la liberté de communication audiovisuelle dans les conditions prévues par cette loi. Ce rôle dévolu au CSA appartient à lui seul. Vous comprendrez que ce n’est pas au ministre chargé de la communication de se substituer à une autorité indépendante qui exerce ses fonctions.
On peut, bien sûr, sur un plan personnel, ne pas se retrouver dans la représentation donnée par cette émission. La réalité de la vie dans un quartier populaire est toujours bien plus complexe que la vision, forcément partielle, que peut en donner une caméra. Les médias assument naturellement une responsabilité éditoriale.
Il appartient aussi au CSA, selon la loi, de contribuer « aux actions en faveur de la cohésion sociale et à la lutte contre les discriminations dans le domaine de la communication audiovisuelle ».
Mon souci constant, depuis un an, a été de renforcer l’action de l’instance de régulation sur ce sujet, et elle est désormais mieux armée. La loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté a précisément renforcé sa mission sur ce point, en modifiant l’article 3-1. Désormais, la loi prévoit explicitement que le CSA « veille à ce que la diversité de la société française soit représentée dans les programmes des services de communication audiovisuelle et que cette représentation soit exempte de préjugés ».
Plus que jamais dans la période que nous traversons, il nous faut lutter contre les préjugés. Il est de notre responsabilité que le débat public y concoure en tout premier lieu. C’est ce que permet la récente modification législative.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Yannick Vaugrenard et moi sommes très sensibles à toutes les stigmatisations et discriminations, en particulier à celles qui sont liées à la précarité sociale. De telles émissions sont, tout simplement, inadmissibles et indignes de la République. C’est pourquoi je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse et des initiatives que vous avez prises, qui, je l’espère, permettront d’éviter la diffusion de ce type d’émission.
évolution de la profession des infirmiers anesthésistes
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, en remplacement de Mme Valérie Létard, auteur de la question n° 1480, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Vincent Capo-Canellas, en remplacement de Mme Valérie Létard. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de bien vouloir excuser l’absence de ma collègue Valérie Létard, retenue par une obligation en région des Hauts-de-France.
La profession d’infirmière anesthésiste forme une catégorie bien distincte, dont les compétences spécifiques sont sanctionnées par une formation de niveau master 2.
Un projet de décret relatif aux infirmiers anesthésistes diplômés d’État, les IADE, a été présenté en septembre 2016 ; il a reçu un avis favorable du Haut Conseil des professions paramédicales avant d’être transmis au Conseil d’État. Une concertation a ensuite été engagée entre la direction générale de l’offre de soins et les organisations syndicales représentatives, en vue de leur apporter un certain nombre d’avancées statutaires.
Par ailleurs, au terme des réunions des 12 et 25 janvier 2017, un relevé de conclusions a acté plusieurs propositions.
Il s’agit tout d’abord de créer un corps des infirmiers anesthésistes diplômés d’État, distinct de celui des infirmiers en soins généraux et spécialisés, disposant d’une grille spécifique revalorisée et de mettre en place une nouvelle bonification indiciaire équivalente à quinze points d’indice, soit une augmentation de 60 euros bruts par mois.
Ensuite, en ce qui concerne le volet indemnitaire, il est prévu d’augmenter de 50 % une prime spéciale attribuée aux IADE, laquelle passerait de 120 à 180 euros bruts par mois.
Enfin, un travail sur les conditions de la participation des IADE aux dispositifs de permanence des soins à l’hôpital doit être réalisé, travail sont les conclusions sont attendues pour la fin du mois de février.
Si certaines de ces mesures constituent des avancées, les propositions financières restent nettement insuffisantes par rapport à la grille indiciaire de catégories ayant un niveau d’études équivalent et par rapport aux responsabilités de ces professionnels après réactualisation de leurs compétences. On pense notamment à l’exclusivité des transferts secondaires de patients intubés ventilés, qui générera des économies conséquentes pour l’assurance maladie.
Il ne reste désormais que quelques semaines pour déboucler une négociation qui aura duré la quasi-totalité du quinquennat. Avez-vous l’intention, madame la secrétaire d’État, de finaliser un accord qui prenne réellement en compte les attentes d’une profession, certes peu nombreuse, mais dont l’importance dans le fonctionnement des blocs opératoires est essentielle ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Monsieur le sénateur, je souhaite tout d’abord excuser Marisol Touraine, qui accompagne le Premier ministre en Chine.
Les infirmiers anesthésistes, qui travaillent au bloc opératoire, sont des partenaires indispensables pour les médecins anesthésistes réanimateurs.
Ils expriment des attentes légitimes.
Comme vous l’avez indiqué, le Gouvernement a engagé, dès 2012, un travail avec eux.
Dans un premier temps, leur formation a été revue et une réflexion engagée sur les évolutions qui peuvent être apportées à l’exercice de leur profession.
Fin 2015, le ministère de la santé a piloté un groupe de travail impliquant ces professionnels, les médecins anesthésistes réanimateurs et les médecins urgentistes – métiers étroitement liés –, afin de définir les domaines dans lesquels une évolution de l’exercice des infirmiers anesthésistes est justifiée.
Ce travail a permis d’actualiser les dispositions définissant leur profession. Le décret, qui est actuellement examiné par le Conseil d’État, sera publié dans les toutes prochaines semaines.
Concernant ensuite la rémunération, la grille statutaire des infirmiers anesthésistes a évolué à deux reprises, en 2012 et en 2015.
Dans la continuité du travail engagé sur l’évolution de l’exercice du métier, des négociations devant conduire à des revalorisations salariales ont été engagées. Un certain nombre de propositions ont été adressées aux organisations syndicales, d’abord dans le cadre d’un long processus de négociation avec le ministère de la santé, puis dernièrement dans une approche interministérielle, en association avec le ministère de la fonction publique.
Ces propositions constituent un effort particulièrement important de la part du Gouvernement et démontrent l’attention spécifique accordée à la profession d’infirmier anesthésiste de bloc opératoire.
Le résultat de ces négociations, qui sont toujours en cours, sera présenté au Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière, qui se réunira le 16 mars prochain. L’accord, monsieur le sénateur, sera donc bien finalisé avant la fin de la mandature.
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Je vous remercie de nous avoir apporté ces éléments de réponse, madame la secrétaire d’État. Je me réjouis que cette date du 16 mars laisse espérer une conclusion à brève échéance, tout en me permettant d’observer qu’il aura quand même fallu cinq années pour que ce dossier avance…
Aujourd’hui, les IADE positionnés sur des horaires de jour réalisent régulièrement des postes de nuit, afin de faire face aux besoins des services d’urgence et d’obstétrique, avec un retentissement évident sur leur vie personnelle et familiale, sans que cela ne donne toujours lieu à des compensations adéquates.
Actuellement, ces infirmiers anesthésistes terminent leur carrière avec un différentiel de 500 à 600 euros par rapport à d’autres catégories de la fonction publique, dont le niveau de qualification est équivalent. Je souhaite que les négociations se concluent rapidement sur cette question et j’espère, en tout cas, que vous ne la laisserez pas dans la corbeille du prochain gouvernement…
innovation en oncologie et recherche en cancérologie
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, auteur de la question n° 1495, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Alain Vasselle. Ma question porte sur l’innovation en matière d’oncologie.
Les progrès de la recherche en cancérologie se sont accélérés ces dernières années. Ainsi, sur environ 355 000 nouveaux cas recensés chaque année dans notre pays, un cancer sur deux est guéri, notamment grâce aux meilleures performances de la recherche et aux différentes innovations thérapeutiques, qui contribuent également à améliorer la vie des patients atteints de cancer.
Depuis plusieurs années, ces progrès ont abouti au développement de nouveaux médicaments, appelés thérapies ciblées, qui permettent de préserver au maximum les cellules saines environnant une tumeur.
Plus récemment, les immunothérapies, traitements consistant à administrer des substances qui vont stimuler les défenses immunitaires de l’organisme, donnent des espoirs de guérison à des patients atteints de cancer jusqu’alors sans thérapies efficaces.
Vraisemblablement, ce sont les associations de molécules, thérapies ciblées et immunothérapies, qui constitueront, dans un avenir proche, de nouvelles pistes pour combattre les tumeurs résistantes et offriront aux patients de nouvelles options thérapeutiques.
Des réflexions sont en cours à l’échelle nationale sur le coût de ces traitements du cancer et sur les enjeux éthiques, qui ont fait l’objet de très nombreuses polémiques dans les médias.
En conséquence, madame la secrétaire d’État, pouvez-vous indiquer au Sénat les actions que les pouvoirs publics, en particulier votre ministère, entendent mettre en place pour favoriser la recherche et l’innovation en oncologie ? Comment entendez-vous rendre compatibles le coût de ces traitements et le développement de la recherche et de l’innovation ? Chacun sait en effet qu’une nouvelle molécule coûte extrêmement cher. Enfin, comment faire bénéficier plus rapidement les patients des résultats des essais cliniques, la France étant sensiblement en retard en la matière ? Les associations de patients attendent vos réponses avec impatience et espoir.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Monsieur le sénateur, la recherche en oncologie fait l’objet d’un soutien actif du ministère de la santé, de l’Institut national du cancer, l’INCa, du secrétariat d’État à la recherche, dirigé par Thierry Mandon, et de l’Alliance pour les sciences de la vie et de la santé, l’AVIESAN.
Tous les ans, le ministère de la santé finance un appel à projets dédié, le programme hospitalier de recherche clinique national en cancérologie, ou PHRC-K, permettant de soutenir des équipes développant des traitements de pointe en la matière.
En 2016, l’engagement de 20 millions d’euros a permis de soutenir plus de quarante projets, dont certains consacrés à l’immunothérapie ou à la combinaison de molécules thérapeutiques.
C’est l’INCa, agence sous tutelle conjointe du ministère de la santé et du secrétariat d’État à la recherche, qui gère le PHRC-K.
Par ailleurs, l’INCa, acteur national et international de premier plan, finance une douzaine d’appels à projets dédiés à divers aspects de la recherche en cancérologie, dont le développement de traitements innovants. L’institut est également en charge du suivi du troisième plan cancer et des actions en rapport avec la recherche et l’innovation dans ce domaine.
Le ministère de la santé participe également activement au plan France médecine génomique 2025, piloté par l’AVIESAN, dont une composante importante est la mise à disposition des techniques innovantes de séquençage à très haut débit pour le parcours de soins de patients souffrant de certains types de cancers, afin de leur offrir un traitement hautement adapté. Les deux premières plateformes seront ainsi financées en 2017 par le ministère de la santé et un projet pilote concernant l’utilisation du séquençage à très haut débit dans certains types de cancer est financé via le PHRC-K.
Le rapport d’étape du troisième plan Cancer, qui a été remis la semaine dernière au Président de la République, rappelle que la France entend poursuivre son effort de recherche, notamment fondamentale, en France et à l’international. Je souligne que nous disposons d’équipes de spécialistes, médecins et chercheurs, de renommée internationale.
Vous avez raison, monsieur le sénateur : la prise en charge des patients atteints de cancer, tant lors du diagnostic que du traitement, connaît un virage et la recherche doit, bien sûr, être au rendez-vous de cette évolution pour que le plus grand nombre possible de patients bénéficient des nouveaux traitements. C’est la volonté de Marisol Touraine et celle de ce gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Madame la secrétaire d’État, je prends acte des efforts significatifs du Gouvernement en faveur de la recherche contre le cancer.
Une question reste toutefois pendante : comment réussir à favoriser la recherche tout en parvenant à mettre sur le marché des médicaments en rapport avec la capacité de l’assurance maladie à se financer ? Il nous faut éviter les polémiques qui placent au banc des accusés les laboratoires qui mettent à la disposition des patients des médicaments coûtant extrêmement cher. Notre réflexion doit nécessairement prendre en considération le lien, inévitable, entre le coût de la recherche, qui, en ce qui concerne le coût du médicament, devrait être diminué par les efforts faits, au niveau national, au bénéfice des laboratoires, et l’accès aux médicaments pour l’ensemble des patients.
Je souhaite que le Gouvernement poursuive sa réflexion dans ce domaine et que l’on puisse sortir de ces polémiques inutiles qui inquiètent de surcroît les patients.
capacité d'accueil insuffisante des instituts médico-éducatifs
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, en remplacement de M. Jérôme Bignon, auteur de la question n° 1571, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
M. Alain Vasselle, en remplacement de M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, mon collègue Jérôme Bignon m’a demandé d’interpeller le Gouvernement sur les problèmes que nous rencontrons, d’une manière récurrente en France, en ce qui concerne le nombre de places disponibles pour l’accueil des enfants et adultes handicapés.
Le cas des enfants et jeunes adultes sans solution pour un accueil et un accompagnement adaptés à leur handicap pose la question de l’égalité des chances dans une République sociale et solidaire.
Selon l’UNAPEI, l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, 47 500 personnes attendent une place en structure, 6 500 autres sont accueillies en Belgique grâce à un financement public – sécurité sociale ou département –, faute de réponses en France. Les établissements belges sont une alternative, mais ne constituent pas un recours pour tous ; ils sont principalement tournés vers les enfants atteints d’autisme, moins vers ceux qui présentent d’autres formes de handicap.
Un programme visant à éviter ces départs a bien été lancé en 2015, avec un fonds d’amorçage de 15 millions d’euros.
La première question que pose Jérôme Bignon concerne la pérennité de ce fonds et son inscription dans le temps pour la mise en œuvre d’actions prioritaires. Qu’en est-il aujourd’hui, madame la secrétaire d’État ?
Le manque de places laisse des familles dans un désarroi abyssal.
L’accès aux IME, les instituts médico-éducatifs, pour des enfants et préadolescents orientés par les MDPH, les maisons départementales des personnes handicapées, est aujourd’hui impossible, les listes d’attente étant interminables. Ces listes sont dues à la situation des jeunes adultes handicapés, contraints de prolonger leur séjour en IME, faute de places dans des établissements adaptés à leur âge et à leur évolution. L’allongement de la vie pour nos concitoyens handicapés en est une raison.
L’IME d’Abbeville est un exemple révélateur : plus de soixante enfants restent sans prise en charge adaptée et on annonce aux parents des délais d’admission pouvant aller jusqu’à cinq ans ! Le 10 décembre dernier, un collectif départemental est né pour faire entendre la voix des familles exaspérées.
La solution de l’inclusion scolaire, dont les moyens et les organisations sont d’ailleurs à revoir, s’avère inadaptée pour nombre d’enfants concernés, alors que des situations dramatiques ne peuvent être laissées sans recours.
Madame la secrétaire d’État, quelles dispositions d’urgence l’État compte-t-il mettre en œuvre pour permettre à ces enfants, adolescents et jeunes adultes d’intégrer, en temps, des établissements répondant à leur situation, les structures existantes pouvant dès maintenant les accueillir par simple extension de leur autorisation, comme le prévoit la réglementation actuelle ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur les difficultés rencontrées par les parents d’enfants et d’adolescents en liste d’attente pour un institut médico-éducatif situé à Abbeville, dans la Somme.
Ces difficultés perdurent depuis de nombreuses années sur l’ensemble du territoire. Pourtant, depuis plus de dix ans, tous les gouvernements successifs ont favorisé l’ouverture, à un rythme soutenu, de places pour les enfants et les adultes en situation de handicap, que ce soit en établissement ou en service. À titre d’exemple, entre 2012 et 2016, 19 000 places ont été ouvertes partout en France. Malgré cela, il y a toujours des situations sans solution.
Quand je suis arrivée dans ce ministère, j’ai d’abord constaté que nous ne disposions pas réellement de chiffres, tant sur le nombre de places éventuellement disponibles que sur les besoins. En effet, les systèmes d’information des maisons départementales des personnes handicapées n’étaient pas uniformes et ne permettaient ni d’avoir des chiffres agrégés au niveau national ni de suivre les enfants et les adultes une fois qu’ils étaient orientés. Concrètement, personne ne savait combien de personnes orientées, par exemple en foyer d’accueil médicalisé ou en IME, trouvaient effectivement une place adaptée à leur situation.
Nous avons donc travaillé avec la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, et l’association des MDPH pour la mise en place d’un système d’information idoine. Nous avons fait de même avec les agences régionales de santé. Un dispositif appelé ViaTrajectoire a ainsi été développé pour connaître l’état de l’offre en temps réel, dispositif qui va être généralisé.
Enfin, nous avons mis en place une nouvelle disposition permettant aux personnes qui n’ont pas de solution, alors qu’elles ont été orientées, de se retourner vers la MDPH. Grâce à la loi de modernisation de notre système de santé, promulguée en janvier 2016, celle-ci pourra, à compter du 1er janvier 2018, rassembler l’ensemble des acteurs concernés et mettre en œuvre un plan d’accompagnement global. Environ quatre-vingt-dix départements, dont la Somme, appliquent par avance cette démarche.
En ce qui concerne spécifiquement Abbeville, pour désengorger l’IME, qui est géré par l’ADAPEI, un service d’éducation spéciale et de soins à domicile de dix places a été créé pour accompagner des enfants vivant avec des troubles du spectre autistique.
En 2016, un travail spécifique sur l’ensemble des enfants en liste d’attente a été réalisé pour leur proposer des solutions individualisées. Je demande bien évidemment à l’ARS de faire le même travail pour 2017.
Pour améliorer les sorties d’IME pour les jeunes adultes, des extensions ont été faites pour des établissements adultes afin de libérer des places : quatre places dans le foyer d’accueil médicalisé de Nouvion-en-Ponthieu et six dans la maison d’accueil spécialisé de Saint-Valery-sur-Somme. Il faut aussi noter la création d’un foyer d’accueil médicalisé de quinze places de semi-internat dans l’agglomération d’Amiens.
Enfin, je veux vous rassurer : le fonds de 15 millions d’euros dédié aux places en Belgique est pérenne. En outre, l’ARS des Hauts-de-France pourra engager 3 millions d’euros dès 2017sur l’enveloppe de nouveaux crédits de 180 millions d’euros annoncée par le Président de la République en mai dernier.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Il y a peut-être eu quelques progrès en matière d’accueil d’enfants et de jeunes adultes handicapés, mais beaucoup reste à faire !
Certes, les quelques mesures d’extension dans des établissements du département de la Somme vont répondre à une partie de l’attente des parents, mais on est loin de la satisfaction de la totalité des besoins.
Madame la secrétaire d’État, je prends acte des informations que vous nous avez données et j’espère que l’absence, que vous avez dénoncée, de connaissance à la fois des besoins et de l’offre va vous amener à prendre des actions décisives.
Pour les familles concernées, il n’est pas vivable de se trouver dans l’attente d’une place dans tel ou tel établissement. J’ose espérer que la réunion de tous les acteurs au sein des MDPH permettra de faire avancer ce sujet et que nous n’aurons plus à questionner, de nouveau, le Gouvernement dans les années qui viennent.
évolution de la recherche sur la phagothérapie
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, auteur de la question n° 1577, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Mme Maryvonne Blondin. Madame la secrétaire d’État, en dépit des campagnes de prévention et de sensibilisation, les antibiotiques occupent toujours une place prépondérante dans la lutte contre les maladies infectieuses, en médecine humaine comme en médecine animale. Or, la France recense, chaque année, près de 160 000 cas d’infection due à un germe multirésistant et, selon les chiffres du Gouvernement, il y aurait 12 500 décès. Lors de sa réunion à New York en septembre dernier, l’Organisation mondiale de la santé a d’ailleurs retenu, comme thème de travail, la question de l’antibiorésistance.
Je salue l’engagement résolu du Gouvernement face à cette problématique universelle, qui nécessite bien sûr une action coordonnée entre les pays. Une feuille de route a été annoncée au mois de novembre dernier afin d’intensifier la politique de maîtrise de l’antibiorésistance ; 330 millions d’euros vont être mobilisés sur cinq ans à cet effet.
Cependant, en dépit de leur efficacité avérée au stade préclinique, l’utilisation des bactériophages, que je soutiens depuis des années, ne figure pas encore dans les mesures évoquées.
Or, la phagothérapie, qui consiste à utiliser des virus bactériophage pour traiter certaines infections d’origine bactérienne, constitue une voie très prometteuse, capable de répondre à des situations d’impasse thérapeutique. Cette solution a été délaissée après la découverte de la pénicilline et elle reste encore trop négligée par les pouvoirs publics.
Cette alternative aux antibiotiques rejoint les préoccupations de l’Union européenne. Depuis 2013, le projet européen Phagoburn a été mis en place et associe les hôpitaux militaires de Bruxelles et de Percy, ainsi que la Suisse ; ses résultats actuels s’avèrent positifs, mais là, encore, il y a des résistances.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur l’évolution du travail mené par le comité scientifique temporaire Phagothérapie et sur la recherche relative à ce sujet. Quel soutien votre ministère entend-il y apporter et quelle place cette technique pourrait-elle occuper dans la feuille de route gouvernementale dédiée à l’antibiorésistance ?