M. Yves Daudigny. J’ai soulevé la question de la vigilance quant à la mise en œuvre du dispositif proposé à l’article 18, notamment pour ce qui concerne la dissociation du taux L en deux taux applicables, l’un à la ville, l’autre à l’hôpital.
Les deux amendements que nous examinons ne sont ni identiques ni de même nature. J’ai beaucoup de réserves sur l’amendement défendu par M. Cardoux. En effet, il tend à faire peser cette contribution pour une part prépondérante, de 60 %, sur la croissance. Je me demande très sincèrement si un tel dispositif n’est pas contraire à l’objectif défendu par M. Cardoux, dont les arguments ne m’ont pas convaincu.
En conséquence, mon groupe s’abstiendra sur l’amendement n° 279 rectifié bis et votera contre l’amendement n° 160 rectifié bis.
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 160 rectifié bis n’a plus d’objet.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 129, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Supprimer les mots :
minorés des remises mentionnées à l’article L. 138-13 et des contributions prévues au présent article
II. – Alinéas 36 à 44
Supprimer ces alinéas.
III. – Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La section 3 du chapitre VIII du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est abrogée ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 138-20, la référence : « L. 138-19-1, » est supprimée.
III. – Le II entre en vigueur au 1er janvier 2017.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à compléter les aménagements apportés par l’article 18 au mécanisme de régulation de la dépense de médicaments, dit « taux L », et à la contribution spécifique sur les médicaments destinés à lutter contre l’hépatite C, dit « mécanisme W ».
Il tend, en premier lieu, à supprimer la contribution W, qui a d’ores et déjà produit ses effets sur la fixation du prix des médicaments associés, et dont l’extinction était initialement programmée pour la fin de cette année.
Le Gouvernement souhaite maintenir ce mécanisme, parce qu’il entend créer un filet de sécurité budgétaire ; toutefois, d’après les hypothèses actuelles, il est vraisemblable que le taux de croissance pour 2017 du chiffre d’affaires des entreprises concernées ne sera pas supérieur à 10 % et que, par conséquent, le déclenchement n’aura pas lieu. On ne comprend donc pas vraiment pourquoi un tel maintien.
En second lieu, en complément de l’amendement gouvernemental, adopté par l’Assemblée nationale, dont le dispositif prévoit de faire porter le taux L sur l’évolution du chiffre d’affaires brut des entreprises, c’est-à-dire sans en retrancher les remises conventionnelles versées par les laboratoires dans le cadre des contrats passés avec le Comité économique des produits de santé, ou CEPS, nous demandons par le présent amendement que la remise versée au titre du taux L ne soit pas déduite du chiffre d’affaires de l’année n-1. En l’état actuel du droit, on aboutit en effet à une diminution mécanique de l’assiette prise en compte chaque année, ce qui crée une progression presque automatique et artificielle du chiffre d’affaires pris en considération l’année suivante, et donc de la contribution due.
Il s’agit, en d’autres termes, de rendre les assiettes identiques, par conséquent comparables, d’une année sur l’autre. Cette double modification devrait permettre d’améliorer la lisibilité et la prévisibilité du taux L, pour les entreprises comme pour l’administration.
Notre but est donc, non pas de réduire les redevances dues par les entreprises, mais de leur donner un peu plus de clarté. Notre objectif, monsieur Barbier, est bien toujours le même : nous voulons avoir une vision à moyen terme.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Il est défavorable.
La vision à moyen terme a été donnée, pour trois ans, en 2014. Cette vision est respectée, de même que les objectifs fixés. Le premier d’entre eux, c’est la stabilité des dépenses remboursées. C’est pourquoi nous ajustons les dispositifs, année après année, et parfois en cours d’année, pour faire en sorte que cet objectif soit atteint.
Vous avez déclaré, de manière relativement nuancée, monsieur le rapporteur général, qu’on pouvait discuter du mécanisme W. Selon vous, comme il a fonctionné, ce n’est pas la peine de le maintenir. Mais ce mécanisme est une clause de sauvegarde, qui doit faire pression sur les dépenses. En outre, j’ai annoncé cette année la décision du Gouvernement d’ouvrir plus largement la prescription des médicaments contre l’hépatite C : il y aura donc des prescriptions supplémentaires.
Notre objectif est de faire en sorte que l’augmentation des prescriptions s’accompagne d’une maîtrise des prix. Ainsi, on pourra négocier des prix plus bas lors de l’arrivée de nouveaux médicaments, en s’appuyant sur la renégociation, d’ores et déjà engagée, du médicament principal, le Sovaldi. Compte tenu de l’ensemble de ces facteurs, il ne me paraît pas judicieux de supprimer le mécanisme W. En effet, s’il devait produire complètement ses effets, avec une augmentation du nombre de personnes traitées, son efficacité serait de nouveau démontrée.
Mme la présidente. L’amendement n° 298, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 44
Remplacer le montant :
600 millions
par le montant :
500 millions
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement porte sur le fameux mécanisme W, créé voilà trois ans, dans le cadre du traitement de l’hépatite C, pour inciter les laboratoires à négocier les prix des médicaments avec le CEPS et éviter ainsi des dépenses démesurées, telles celles qui sont encourues pour le Sovaldi.
Il apparaît nécessaire de prolonger d’au moins une année ce dispositif pour répondre à un accès plus large des traitements à de nouveaux patients. C’est ce que propose Mme la ministre, proposition que nous soutenons totalement.
En revanche, nous souhaitons modifier le montant même à partir duquel ce mécanisme se déclenche. En l’occurrence, nous suggérons d’abaisser le seuil de déclenchement de 600 à 500 millions d’euros.
Même si nous avons bien remarqué la stabilisation apparente des dépenses, preuve de l’efficacité du dispositif, il nous paraît possible d’être encore plus incitatif et exigeant dans la maîtrise des coûts de la part des laboratoires. On sait par exemple que le Sovaldi n’a pas été développé par les services de recherche et développement des laboratoires : il a été acquis par achat de brevets. Abaisser le seuil pourrait donc inciter les laboratoires à privilégier cette voie et ainsi à réduire les dépenses.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Dans la mesure où la commission demande la suppression du mécanisme W, qui était supposé prendre fin cette année, son avis sur l’amendement n° 298 est défavorable.
Je voudrais revenir, madame la ministre, sur vos explications concernant ce mécanisme W. Selon vous, il a encore sa justification pleine et entière. Or il me semble – vous pourrez m’éclairer sur ce point – que le prix des médicaments à venir est fixé par référence aux médicaments existants. Je ne vois donc pas la nécessité de maintenir un dispositif ad hoc, qui avait son plein intérêt quand on négociait le prix d’une molécule tout à fait nouvelle.
Il ne me semble par conséquent pas nécessaire de maintenir ce dispositif, puisqu’il suffit, pour le Sovaldi comme pour d’autres molécules, de négocier en fonction du prix des médicaments déjà sur le marché.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Cohen, je vous remercie du soutien que vous apportez au mécanisme de régulation. Mon objectif est d’arriver à déterminer à la fois un juste prix et une enveloppe globale, qui, d’une part, soient raisonnables pour les finances publiques et, d’autre part, nous permettent de soigner tous ceux qui en ont besoin.
Pour ce qui est de l’hépatite C, nous avons engagé plusieurs processus. J’attends un avis imminent de la Haute Autorité de santé sur les recommandations de prescription de ces médicaments à de nouveaux patients. Nous allons donc soigner davantage de populations concernées, ce qui créera une pression quantitative. De ce fait, même si nous négocions les prix, nous devons être sûrs que le mécanisme fonctionne bien.
Dès lors, puisque nous voulons soigner plus de personnes, il ne me semblerait pas raisonnable d’abaisser encore, jusqu’à 500 millions d’euros, le seuil de déclenchement, qui était de 700 millions d’euros et que nous proposons d’ores et déjà de passer à 600 millions d’euros. En effet, certains pourraient alors se demander comment notre volonté d’ouverture des traitements à tous pourrait être crédible, si nous abaissions trop fortement l’enveloppe globale.
Par ailleurs, à l’évidence, les prix que nous négocierons seront plus bas que ceux qui sont pratiqués aujourd’hui. Sinon, il ne servirait à rien de négocier ! Cela dit, la négociation de différents prix doit s’inscrire dans un volume global. Aux côtés de la négociation et de la prescription, le mécanisme de sauvegarde doit jouer, en quelque sorte, le rôle d’une corde de rappel si jamais la négociation, aboutissant à un prix multiplié par le nombre de patients, ne nous permettait pas d’atteindre l’objectif fixé.
C’est pourquoi il faut maintenir ce mécanisme de sauvegarde. Et, même si je comprends bien les arguments de Mme Cohen, il me semble raisonnable de fixer le seuil à 600 millions d’euros, ce qui est déjà en diminution par rapport à l’année dernière.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Les arguments développés par Mme la ministre sont tout à fait logiques. Comme nous voulons préserver le mécanisme W et que le Gouvernement fait un effort sur ce point, nous retirons notre amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 298 est retiré.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote sur l’amendement n° 129.
M. Gilbert Barbier. Je voterai en faveur de l’amendement présenté par M. le rapporteur général. En effet, le problème en jeu, cela a été dit plusieurs fois, est celui de la parole donnée. Il avait été affirmé que le mécanisme W ne durerait que trois ans. Or on veut aujourd’hui le prolonger.
Madame la ministre, il faut tout de même prendre en compte un élément : il n’est pas si facile de soigner des milliers de patients ! Nos établissements hospitaliers ont une capacité de traitement, ce qui entraîne une régulation automatique. En outre, les 700 millions d’euros dépensés les années précédentes ont à l’évidence joué un rôle. Selon moi, supprimer le mécanisme W ne provoquera pas une inflation de dépenses autour du traitement de l’hépatite C. La raison en est un peu mécanique : on ne peut pas, malheureusement, traiter aussi facilement, je le répète, un grand nombre de patients. Voilà pourquoi je soutiens cet amendement de suppression du mécanisme W.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Sur la question du mécanisme W, nous partageons sans réserve l’argumentation présentée par Mme la ministre. Le traitement de l’hépatite C, dans notre pays, a été une réussite presque totale. La France est certainement, par rapport à des pays comparables, le pays où l’accès aux médicaments a été le plus large. En outre, madame la ministre, vous avez indiqué, au mois de mai de cette année, une ouverture progressive de ces traitements à l’ensemble des patients. Dans le même temps, on peut considérer que les laboratoires concernés ont pu faire des gains tout à fait substantiels.
Nous ne voyons donc aucun inconvénient à ce que ce mécanisme puisse continuer d’exercer sa pression pour l’année à venir, comme il a été l’un des éléments décisifs dans la réussite du traitement de l’hépatite C pendant les trois dernières années. Nous voterons par conséquent contre l’amendement n° 129.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 18, modifié.
(L’article 18 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 18
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 8 rectifié ter est présenté par MM. Daudigny, Labazée et Guillaume, Mmes Bricq, Génisson et Riocreux, MM. Godefroy, Durain et Tourenne, Mmes Schillinger, Émery-Dumas, Yonnet et Féret, MM. Vergoz et Caffet, Mmes Meunier et Campion, M. Jeansannetas et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 168 rectifié est présenté par Mmes Imbert, Deroche et Gruny, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, M. Morisset et Mme Procaccia.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 138-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant des ventes de spécialités génériques définies au a du 5° de l’article L. 5121–1 du code de la santé publique et inscrites au répertoire des groupes génériques n’est pas inclus dans l’assiette de la contribution. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié ter.
M. Yves Daudigny. Les entreprises de répartition sont devenues des acteurs incontournables du développement des médicaments génériques en France ; elles sont, en la matière, les partenaires des officines et des pouvoirs publics. Elles assurent l’approvisionnement des officines pour plus de 6 000 références ; elles leur permettent de délivrer la prescription en DCI, ou dénomination commune internationale, la moins coûteuse, comme le préconisent les dispositions réglementaires et le protocole d’accord signé entre les médecins et la Caisse nationale d’assurance maladie.
Dès lors, les bons résultats du développement des médicaments génériques en France sont, notamment, la conséquence de la qualité de l’organisation de l’approvisionnement des officines par les grossistes-répartiteurs. Ces derniers ont développé une logistique efficace, puisque 70 % de l’approvisionnement est assumé par les entreprises de la répartition.
Or ce modèle est aujourd’hui fragilisé par une fiscalité devenue, à nos yeux, inadaptée du fait, précisément, de l’augmentation de la part des médicaments génériques au sein des médicaments dispensés par les officines.
Aussi, afin de garantir la pérennité des entreprises de la répartition et, au-delà, la poursuite du développement des médicaments génériques et des économies réalisées par l’assurance maladie, cet amendement vise à aménager les règles fiscales actuellement en vigueur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l’amendement n° 168 rectifié.
Mme Corinne Imbert. Tout d’abord, je partage les propos de M. le président de la commission des affaires sociales concernant le besoin de stabilité et de visibilité de l’industrie pharmaceutique, à laquelle j’associerai les façonniers : ces entreprises familiales, installées dans de nombreux départements de France, travaillent pour l’industrie pharmaceutique et représentent des milliers d’emplois.
Cela étant, vous l’avez rappelé, madame la ministre, le présent PLFSS prévoit des économies directes, à hauteur de 1,4 milliard d’euros, sur le médicament et les produits de santé. Ces économies doivent notamment être réalisées par la promotion de la poursuite du développement des médicaments génériques.
Ce développement passe par les officines et donc, à l’évidence, par les entreprises de répartition pharmaceutique qui assurent au quotidien, de manière remarquable, la distribution des médicaments dans chaque officine sur l’ensemble du territoire national. Ces entreprises, en se montrant capables d’assurer la distribution de milliers de références, sont donc devenues des acteurs incontournables du développement des médicaments génériques.
Le présent amendement vise à aménager les règles fiscales actuellement en vigueur, afin de garantir la pérennité des entreprises de répartition qui sont, comme je viens de vous l’expliquer, une logistique efficace et indiscutable et qui contribuent au bon résultat du développement des médicaments génériques en France.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis favorable sur ces amendements identiques, avis auquel je me rallie.
Chaque année est déposé un amendement sur la contribution sur les ventes directes, dont l’objet est de taxer la phase de distribution des médicaments remboursables. Cette taxe, qui avait un rendement d’environ 350 millions d’euros en 2011, est en majeure partie acquittée par les grossistes-répartiteurs. Elle est assise sur le chiffre d’affaires hors taxe réalisé en France par les pharmacies d’officine et est composée de trois parts, correspondant chacune à des assiettes différentes, auxquelles s’appliquent des taux progressifs.
Les médicaments génériques sont déjà exonérés de la troisième tranche de la contribution qui est la plus élevée et dont l’assiette est constituée de la fraction du chiffre d’affaires correspondant au montant de la marge rétrocédée aux pharmacies. Y ajouter une exonération pour les deux premières tranches ne me paraît pas de nature à venir en aide aux grossistes les plus en difficultés.
Il me semblerait plus opportun d’engager un débat sur la rémunération des missions de service public des grossistes-répartiteurs.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette mesure. Sans m’attarder sur le sujet, car ce n’est pas l’objet principal, je précise d’emblée que l’incidence financière de cet amendement s’élève à 60 millions d’euros, mais nous ferons les comptes…
M. Gilbert Barbier. Plus tard !
Mme Marisol Touraine, ministre. … à un autre moment.
Pour ma part, je ne vois pas en quoi l’adoption de ces amendements identiques pourrait avoir un effet sur la vente des médicaments génériques.
Les grossistes-répartiteurs, qui réalisent un travail absolument majeur, livrent ce qui leur est demandé. Si nous voulons développer les médicaments génériques – ce qui est ma volonté et ma préoccupation, le Gouvernement vient d’ailleurs de lancer une grande campagne de communication sur le sujet –, il faut que les pharmaciens les vendent – ils le font de façon tout à fait remarquable par la substitution –, que les médecins les prescrivent de plus en plus et que la non-substituabilité apparaisse de moins en moins, voire n’apparaisse plus, sur les ordonnances. Le répartiteur, celui qui livre, n’a aucun effet sur les prescriptions et les ventes dans les pharmacies.
Je mesure bien l’incidence économique et financière pour les industriels – 60 millions d’euros –, mais on ne peut justifier ces amendements identiques en affirmant qu’ils visent à soutenir le développement des médicaments génériques.
Je rejoins donc l’observation du rapporteur général : oui, il faut un débat sur la rémunération des grossistes-répartiteurs et leur place dans notre système, ainsi que sur la vente directe des médicaments par rapport à la répartition.
Paradoxalement, l’adoption de ces amendements identiques favorisera la vente directe au détriment de la répartition, ce qui est le contraire de l’objectif que vous recherchez, madame Imbert. Elle coûtera de l’argent à la sécurité sociale, rapportera de l’argent à certains acteurs industriels, mais elle ne réglera en rien la vente des médicaments génériques, puisque cela ne modifiera pas les prescriptions ou la place des génériques dans le volume global des médicaments.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. Jean Desessard. Mme la ministre se défend bien ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Madame la ministre, la fiscalité n’est peut-être pas le bon canal, en effet. Vous venez d’ouvrir une porte – peut-être une fenêtre. J’appelle votre attention sur un point : le modèle économique des répartiteurs pose un problème, qui ira s’aggravant si rien n’est fait.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il y a moins de pharmacies !
Mme Nicole Bricq. J’insiste sur le fait que ces acteurs exercent une mission de service public, ce que vous venez de rappeler, madame la ministre. Par l’amendement n° 8 rectifié ter, nous souhaitons donner l’alerte, même si nous avons bien conscience que le problème n’est peut-être pas posé de la bonne manière. Je comprends tout à fait l’inquiétude des grossistes-répartiteurs, car, d’ici à quelques années, c’est la question du modèle lui-même qui se posera.
Madame la ministre, vous avez parlé d’un groupe de travail chargé de réfléchir au modèle économique des répartiteurs. Nous souhaitons savoir comme évoluera leur fonction que personne ne peut exercer à leur place. Il nous semble donc important de réfléchir au rôle des répartiteurs ; c’est ce qu’ils demandent du reste.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.
Mme Corinne Imbert. Madame la ministre, vous le savez, toutes les officines ne réalisent pas le même chiffre d’affaires et sont réparties sur l’ensemble du territoire national. Les grossistes-répartiteurs assurent, pour le compte des laboratoires génériques, la livraison des médicaments génériques au sein des officines et, en fournissant un certain nombre de services à ces dernières, notamment aux plus petites d’entre elles, ils ont permis le développement du générique. Ils apportent donc, eux aussi, leur pierre à l’édifice concernant le développement du générique à l’échelon national.
Par ailleurs, ce sont des entreprises qui sont sous tension. Aujourd’hui, elles assurent une ou deux livraisons au quotidien dans chaque pharmacie de France. Voilà une vingtaine d’années, elles passaient trois fois par jour dans les officines ; c’était sans doute trop, et les pharmaciens ont appris à gérer leurs stocks. Elles sont présentes sur l’ensemble du territoire national.
Si demain survenait par exemple un incident nucléaire dans notre pays, vous auriez besoin de ces entreprises de répartition pour livrer de l’iode en urgence dans les pharmacies.
Veillons donc à préserver ce réseau, qui est important en termes de santé publique pour le territoire national.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la sénatrice, je comprends parfaitement les observations que vous venez de formuler sur la place des grossistes-répartiteurs, place que je ne conteste pas. Le débat porte sur le modèle économique. Au fond, les grossistes-répartiteurs jouent un rôle qui est remis en cause par des évolutions commerciales – la vente directe, internet… –, dont certains appellent d’ailleurs de leurs vœux le développement, si j’en crois ce que j’entends.
Certaines professions, dans le secteur de la santé, du médicament, de la distribution, se trouvent bousculées. C'est la raison pour laquelle j’ai demandé à l’IGAS de se pencher sur le modèle économique des grossistes-répartiteurs. L’Inspection a rendu public son rapport en 2014, à la suite de quoi des travaux ont été engagés et a été décidée la mise en place d’un groupe de travail. Une inspectrice générale des affaires sociales, qui en sera la responsable, vient d’être désignée. Il me semble donc prématuré de considérer que la réponse fiscale que vous proposez est celle qui convient. Il s’agit davantage d’un problème de modèle économique et de positionnement dans le circuit que d’une question de fiscalité.
C’est pourquoi, je le répète, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements identiques.
Mme la présidente. Monsieur Daudigny, l'amendement n° 8 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Yves Daudigny. Nicole Bricq a apporté les éclaircissements nécessaires sur notre démarche, à savoir faire naître un débat et appeler l’attention sur la situation de cette profession.
Madame la ministre, vous avez fourni un certain nombre d’éléments et nous sommes très sensibles à la constitution d’un groupe de travail, dont nous suivrons avec beaucoup d’intérêt la progression. Par conséquent, madame la présidente, je retire cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 8 rectifié ter est retiré.
Madame Imbert, l'amendement n° 168 rectifié est-il maintenu ?
Mme Corinne Imbert. Oui, madame la présidente !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 18.
L'amendement n° 269 rectifié bis, présenté par MM. Barbier, Bertrand, Castelli, Mézard et Requier, est ainsi libellé :
Après l'article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la troisième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, après la référence : « L. 138-9 », sont insérés les mots : « et de celles qui sont exclues du champ d’application des obligations de service public des grossistes répartiteurs en application de l’article R. 5124-59 du code de la santé publique ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gilbert Barbier.