compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
Mme Corinne Bouchoux,
MM. Bruno Gilles, Jackie Pierre.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 27 octobre a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Décès d’un ancien sénateur
M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Lionel Cherrier, qui fut sénateur de la Nouvelle-Calédonie de 1974 à 1983.
3
Commission mixte paritaire
M. le président. J’ai reçu de M. le Premier ministre la demande de réunion d’une commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2016-462 du 14 avril 2016 portant création de l’Agence nationale de santé publique et modifiant l’article 166 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.
4
Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’un projet de loi
M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi autorisant la ratification de l’accord de passation conjointe de marché en vue de l’acquisition de contre-mesures médicales, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 8 septembre 2016.
5
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
M. le président. Mes chers collègues, j’ai le très grand plaisir de saluer, au nom du Sénat tout entier, la présence, dans notre tribune officielle, de M. Stephan Toscani, ministre des finances et des affaires européennes du Land de Sarre et membre du Bundesrat. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le secrétaire d'État chargé de la réforme de l'État et de la simplification, se lèvent.)
Nous sommes particulièrement sensibles à l’intérêt et à la sympathie qu’il porte à notre institution.
M. Toscani est accompagné par nos collègues Catherine Troendle, présidente de notre groupe d’amitié France-Allemagne, Alain Gournac, vice-président du groupe, et Claudine Lepage, vice-présidente du groupe.
Demain, je recevrai la nouvelle présidente du Bundesrat, Mme Malu Dreyer, qui est présidente de la Rhénanie-Palatinat.
Au nom du Sénat de la République, je souhaite la bienvenue à cette délégation et je forme des vœux pour que ces journées consacrées aux liens déjà très forts entre nos deux assemblées et nos pays nous permettent de les renforcer encore. (Applaudissements.)
6
Stabilisation du droit de l'urbanisme
Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public solennel sur la proposition de loi portant accélération des procédures et stabilisation du droit de l’urbanisme, de la construction et de l’aménagement (proposition n° 770 [2015-2016], texte de la commission n° 21, rapport n° 20).
Mes chers collègues, je veux souligner l’importance du sens que revêt pour nous un vote solennel sur une proposition de loi consacrée au sujet majeur de la simplification des normes – enfin !
Avant de passer au scrutin, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits pour expliquer leur vote.
Explications de vote sur l’ensemble
M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé, à raison d’un orateur par groupe, à sept minutes le temps de parole attribué à chaque groupe politique, les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.
La parole est M. Jean-Pierre Bosino, pour le groupe communiste républicain et citoyen. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Bosino. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette proposition de loi issue du groupe de travail sur la simplification du droit de l’urbanisme, de la construction et des sols est, cette fois, un vrai texte de simplification, travaillé – il faut le dire – en bonne intelligence, et nous en sommes globalement plutôt satisfaits.
Je souhaite, encore une fois, saluer le travail réalisé par les auteurs de la proposition de loi, Marc Daunis et François Calvet, et l’ensemble des membres du groupe de travail.
Nous ne sommes tombés ni dans la caricature ni dans la facilité consistant à reléguer des sujets aussi importants que l’urbanisme et le droit des sols à des contraintes normatives. Ce texte, certes très technique et très concret, n’est pas un empilement de déréglementations, ce qui est positif.
Je rappelle d’ailleurs que nous ne sommes pas opposés aux normes. Elles existent pour une bonne raison et, si la norme peut être contraignante à l’égard de certains, elle en protège d’autres. Et puis, il faut quand même le rappeler, ces normes font le plus souvent suite à des textes votés par des élus. Le groupe communiste républicain et citoyen est donc pleinement satisfait que les orientations portées par la proposition de loi ne reflètent pas ce qui avait été avancé lors de la résolution du mois de janvier dernier.
Dans mon intervention générale, j’avais émis des réserves sur l’article 2, qui porte sur le recours du justiciable et l’octroi de dommages et intérêts en cas de recours abusif. J’étais sceptique, car je craignais que cet article ne risque de produire des effets contraires à son objectif, notamment en mettant en cause le droit aux recours.
Au cours des échanges, j’ai entendu les arguments de chacun et de chacune. Il est vrai que, trop souvent, nous nous confrontons à des mouvements dans l’esprit de « pas dans mon jardin », qui n’ont d’autre objectif que de bloquer des projets en matière de construction de logements sociaux. L’exemple de Paris est frappant à cet égard : un projet de logements sociaux dans le XVIe arrondissement a été bloqué pendant plusieurs années à cause du recours de certains habitants. Au final, cela s’est traduit par 8 millions d’euros de perte et un retard de quatre ans dans la livraison de 177 logements, autant d’années d’attente pour ceux qui sont mal logés ou sans logement.
Nous avions aussi émis des réserves sur l’article 6 à propos des ZAC, les zones d’aménagement concerté. En effet, nous n’étions pas favorables au report de l’étude d’impact au moment du dossier de réalisation, lorsque l’aménageur est connu, plutôt que lors de l’approbation de la création, comme c’est le cas aujourd’hui.
Il nous paraît important que les communes gardent la maîtrise. Lorsque nous avons exprimé cette idée, nous avons eu le plaisir de constater qu’elle était plutôt partagée. La sagesse du Sénat a conduit à l’adoption de l’amendement de notre collègue Joël Labbé, qui lève ainsi nos craintes et protège les communes de l’insécurité juridique dans laquelle nous les aurions placées.
Je ferai maintenant une remarque portant sur les discussions que nous avons eues autour de l’article 8 et de l’article additionnel 8 bis. Tant sur la forme que sur le fond, la méthode nous paraît regrettable.
Sur la forme, d’abord, nous avons le sentiment, nettement partagé, qu’il y a eu des tentatives, comme cela a été dit à plusieurs reprises, de « refaire le match » de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, dite loi LCAP, promulguée en juillet 2016.
Sur le fond, le Sénat a supprimé, avec l’aval du Gouvernement, le monopole de l’Institut national des recherches archéologiques préventives, l’INRAP, sur les fouilles sous-marines au prétexte d’une coquille ou d’un vide juridique. Ce cafouillage conduit à l’ouverture à la concurrence des fouilles sous-marines. Pour nous, c’est un point de désaccord fondamental, d’autant qu’en février dernier, à l’occasion de l’examen au Sénat de la loi LCAP, la ministre de la culture déclarait à propos des fouilles sous-marines que c’était « pourquoi le recours à un opérateur unique, I’INRAP, permettrait de garantir la qualité des interventions, tant sur le plan technique que scientifique ».
Notre groupe est fortement opposé aux modifications qu’engendre l’adoption de l’article 8 bis. Nous espérons que la navette parlementaire – s’il y en a une, ce que nous souhaitons – sera l’occasion de revenir sur ces dispositions.
Comme je le disais en introduction, cette proposition de loi est très concrète et sera donc un bon outil pour les élus locaux, même si elle ne règle pas tous les problèmes des communes. Le fait que les architectes des bâtiments de France interviennent en amont dans les plans locaux d’urbanisme, ou PLU, est plutôt une bonne chose. De la même façon, le fait qu’une révision simple du plan local d’urbanisme ne déclenche pas automatiquement un plan local d’urbanisme intercommunal, ou PLUI, est une avancée.
Les communes sont mises à mal par le désengagement de l’État. Cette année encore, dans le projet de loi de finances pour 2017, les dotations seront en baisse. Entre 2015 et 2017, le bloc communal aura ainsi perdu 11 milliards d’euros de dotations, situation à laquelle s’ajoute le fait que les transferts de compétences aux collectivités sans compensations financières continuent et que la réduction de la présence de l’État n’a pas diminué le besoin d’accompagnement et de conseil des maires face à des procédures de plus en plus techniques. La question, à laquelle nous n’avons pas eu de réponse, qui est là posée est celle du retour des ATESAT, les dispositifs d’assistance technique fournie par l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire.
La proposition de loi a accéléré et facilité les procédures de construction – c’est louable –, mais nous nous inquiétons des capacités d’investissement des collectivités, qui ont diminué de 10 milliards d’euros en quatre ans. Ce mouvement est inquiétant pour l’avenir des services publics de proximité, et il a des conséquences directes sur l’emploi dans le bâtiment et les travaux publics.
Au final, nous voterons cette proposition de loi qui va, conformément à son objectif, faciliter et simplifier un certain nombre de démarches pour les communes en matière d’urbanisme.
En outre, puisque la méthode de ce groupe de travail a montré qu’il était possible d’agir sur un certain nombre de difficultés pour les communes, nous proposons la même démarche pour aborder la question des moyens des collectivités et de la fiscalité locale, ce pour quoi il va falloir un peu de volonté et du courage politique… (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste. – M. Alain Bertrand applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du RDSE.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’inflation législative est un fléau, et nous en sommes tous à la fois victimes et coupables. Or, comme Descartes, nous jugeons que « la multitude des lois fournit souvent des excuses aux vices, en sorte qu’un État est bien mieux réglé lorsque, n’en ayant que fort peu, elles y sont fort étroitement observées ».
Ce constat est aisément vérifiable en droit de l’urbanisme, tant les manœuvres dilatoires y sont habituelles. Elles retardent et renchérissent des projets de construction et d’aménagement de logements, de services publics, d’entreprises créatrices d’emplois, projets indispensables et très attendus par nos concitoyens, y compris dans nos zones rurales.
C’est la raison pour laquelle nous approuvons la démarche de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation qui consiste à appliquer deux principes à l’initiative parlementaire : la simplification du droit et la stabilité de la norme. Ce sont en effet les piliers de la sécurité juridique.
Comme je l’ai dit lors de la discussion générale en reprenant les termes du rapport du Conseil d’État de 2006, nous devons enclencher la « lutte du système juridique contre lui-même ». Cela signifie non pas qu’il faille systématiquement supprimer une norme avant d’en créer une autre, mais qu’il faut tout simplement s’interroger sur leur bien-fondé.
Sans une amélioration de la qualité de la loi dès sa conception, sans une étude d’impact complète et rigoureuse, nous offrons un terrain propice aux contournements de la loi et aux recours abusifs.
Les deux premiers articles de la présente proposition de loi renforcent la sécurité juridique et poursuivent la lutte contre ces recours abusifs en matière d’autorisations d’urbanisme.
M. Rémy Pointereau. Très bien !
M. Jean-Claude Requier. Certes, un grand travail a été réalisé lors du rapport Labetoulle, de l’ordonnance du 18 juillet 2013 et du décret du 1er octobre 2013, relatifs au contentieux de l’urbanisme.
La jurisprudence s’est emparée des nouveaux outils pour contrer ces manœuvres avec la redéfinition de l’intérêt à agir et des possibilités de régularisation des autorisations en cours d’instance.
Nous saluons la volonté des auteurs de la proposition de loi d’aller plus loin en permettant au juge de soulever d’office la cristallisation des moyens, en créant un mécanisme de caducité de l’instance, en prorogeant la suppression de l’appel dans les zones tendues ou encore en facilitant l’octroi de dommages et intérêts en cas de recours abusifs freinant les procédures.
Nous appelons cependant à une certaine prudence, en soulignant que le droit au recours et la garantie des droits fondamentaux doivent être préservés. Il ressort de la jurisprudence que, si la sanction des recours abusifs est loin d’être systématique, elle demeure plutôt rare.
L’augmentation du montant de l’amende maximale de 3 000 à 10 000 euros annoncée par le Gouvernement entraînera également une prudence accrue de la part du juge et restera assez symbolique, comme l’est finalement l’encadrement des délais de jugement prévu par la proposition de loi, dont le non-respect n’est pas sanctionné.
Nous espérons toutefois que ces mesures auront un effet dissuasif.
Si le droit doit protéger la liberté de faire, il ne doit pas entraver celle des autres. Nous devons faire preuve de vigilance pour que ces dispositions n’aboutissent à la validation d’actes dont l’illégalité n’a pu être contestée.
C’est pourquoi il conviendrait de réaliser un bilan de ces dispositions dans les prochaines années.
D’un contentieux de masse, il n’est pas souhaitable d’extraire une législation purement réactive. La justice doit disposer des moyens nécessaires à l’exercice de ses missions et à la gestion de ce contentieux pour rendre ses décisions dans les meilleurs délais.
Par ailleurs, ce texte prévoit de faciliter l’articulation entre les documents d’urbanisme. Leur mise en compatibilité avec le document de rang supérieur, dans un contexte d’évolutions législatives permanentes et de réforme territoriale, est actuellement très complexe. Comme je l’ai déjà dit, les collectivités territoriales ont besoin, plus que jamais, d’une pause, d’une stabilité normative. Et la mise en place d’un point d’étape triennal afin d’actualiser les documents d’urbanisme est bienvenue.
Enfin, le dialogue entre les porteurs de projets, les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l’État au sein de la nouvelle conférence de conciliation et d’accompagnement des projets locaux est renouvelé.
Avec l’instauration d’un référent juridique par département, ces dispositions permettront de ressusciter la médiation, d’instituer un véritable accompagnement, en lieu et place d’un simple contrôle administratif, et, peut-être, d’améliorer la motivation des décisions rendues.
L’expérimentation de l’association des architectes des bâtiments de France en amont de l’élaboration du PLU favorise également le dialogue.
Ainsi, à la suite de son examen en commission et en séance, la proposition de loi est restée cohérente et ciblée, malgré l’adoption de quelques amendements qui ont essentiellement concerné la correction d’erreurs détectées tardivement dans la loi relative à la création, à l’architecture et au patrimoine.
Au vu de l’ensemble de ces mesures, le groupe du RDSE considère que la proposition de loi apporte une réelle simplification du droit et améliore la visibilité des élus, des porteurs de projets et de nos concitoyens en matière d’urbanisme. Il constitue une réponse à des problèmes structurels dans nos territoires. C’est la raison pour laquelle nous la soutiendrons unanimement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE et de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel, pour le groupe UDI-UC.
Notre collègue présidant la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, le texte lui doit beaucoup !
M. Jean-Marie Bockel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le consensus assez large au sein de notre assemblée témoigne de la qualité de nos travaux.
Je voudrais souligner tout d’abord que la nécessité de stabiliser le droit de l’urbanisme ne fait pas débat. La délégation aux collectivités territoriales avait lancé l’idée d’une consultation des élus locaux à l’occasion du congrès des maires de 2014 – idée exprimée salle des conférences, en votre présence, monsieur le président. Au terme de cette consultation, qui s’est déroulée par voie de questionnaire, les réponses ont désigné sans ambiguïté – à hauteur de 63,8 % – le droit de l’urbanisme et le droit des sols comme des domaines largement prioritaires de la simplification normative.
C’est pourquoi notre délégation a concentré, au cours de l’année 2015, ses premiers travaux de simplification sur ce droit particulièrement touffu. Nous avons décidé d’effectuer un galop d’essai dans le domaine réglementaire. Il s’est révélé conclusif puisque, je vous le rappelle, nous avons élaboré une proposition de résolution tendant à limiter le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales et à simplifier certaines normes relatives à l’urbanisme et à la construction, proposition que nous avons présentée ici même le 25 novembre 2015 et que le Sénat a adoptée le 13 janvier 2016.
Dès le lendemain, le 14 janvier, la délégation a constitué, sous la direction de Rémy Pointereau, notre premier vice-président délégué à la simplification normative, un groupe de travail qui a reçu la mission d’élaborer la proposition de loi que nous nous préparons à adopter.
Nous avons immédiatement fait le choix d’une démarche à même de traduire l’engagement de l’ensemble du Sénat à l’égard des attentes des élus locaux.
Si la délégation a lancé le mouvement en constituant ce groupe de travail, puis en adoptant le rapport et les propositions de nos deux rapporteurs, François Calvet et Marc Daunis, je tiens à souligner qu’elle n’aurait pas pu engager la tâche de façon aussi dynamique et efficace, ni la mener à bien, sans bénéficier, au sein de notre assemblée, des appuis nécessaires. Je tiens vraiment à remercier ceux qui nous les ont apportés, car ils montrent le caractère partagé de notre initiative, devenue, dès lors, celle du Sénat tout entier.
Tout d’abord, nous avons pu travailler efficacement grâce à la commission des affaires économiques, à son président, Jean-Claude Lenoir, et à son rapporteur, Élisabeth Lamure.
Au-delà, c’est grâce à l’ensemble des commissions permanentes concernées que nous avons pu donner au groupe de travail de notre délégation la représentativité transpartisane et institutionnelle sans laquelle nous n’aurions pas pu progresser de la même façon.
Je veux, enfin et surtout, souligner combien nous a été précieux l’investissement personnel du président du Sénat, Gérard Larcher. Non seulement il nous a incités à agir, mais il nous a reçus, écoutés et vigoureusement encouragés à aller de l’avant. Tous les collègues des différentes commissions qui étaient parties prenantes de cette démarche peuvent en témoigner.
Cette méthode a été exemplaire, et le résultat est là.
L’architecture et le dispositif de la proposition de loi répondent à son objectif. Peu convaincu par toute idée de grand soir simplificateur, j’apprécie en ce qui me concerne, et c’est également la position du groupe UDI-UC, le choix d’un texte pragmatique abordant sous un angle technique des aspects divers du droit en vigueur, ce qui permet de répondre aux attentes précises et concrètes exprimées dans les 11 000 réponses des élus locaux à la consultation que j’évoquais.
Le groupe UDI-UC votera évidemment cette proposition de loi bien pensée et bienvenue.
J’espère que l’Assemblée nationale va rapidement relayer l’initiative du Sénat. D’ailleurs, comment les élus locaux comprendraient-ils que ce texte, qui répond à leurs attentes, n’entre pas en vigueur dans des délais raisonnables ?
Pour finir, je voudrais rappeler qu’à côté de la proposition de loi le groupe de travail présidé par Rémy Pointereau, au sein de notre délégation, a élaboré une liste de quarante-cinq propositions de simplification de nature non législative, qu’il s’agisse de mesures réglementaires ou de simples bonnes pratiques. Cette liste très opérante précise et complète les propositions que nous avions faites dans notre résolution du 13 janvier dernier. Elle a été transmise au Gouvernement, qui en a commencé l’instruction. M. Jean-Vincent Placé a eu l’occasion de nous recevoir à plusieurs reprises et s’est engagé dans cette démarche. Je m’en félicite parce que c’est une nouvelle preuve que la simplification normative appelle et rend possible la coopération de l’ensemble des institutions.
J’ajoute que notre délégation fera le point dans quelques mois sur l’avancée de ce processus.
Cela dit, nous savons tous qu’alléger le stock des normes en vigueur équivaut à vider le tonneau des Danaïdes si rien n’est fait simultanément pour réguler le flux de normes nouvelles ! Pour une norme supprimée, vous le savez, cinq ou six sont créées dans la foulée. Nous sommes nous-mêmes, cela a été dit à plusieurs reprises pendant le débat, producteurs de normes. Nous devons donc nous donner les moyens préventifs et curatifs d’inverser cette arithmétique.
Je ne vais pas évoquer les initiatives que notre délégation envisage de prendre à cet égard. Je me contenterai d’indiquer que nous ne sommes pas inactifs sur ce volet de la simplification. En particulier, nous développons avec le Conseil national d’évaluation des normes, que préside notre ancien collègue Alain Lambert, un partenariat opérationnel dans le cadre d’une charte que le président Larcher, Alain Lambert et moi-même avons signée en juin dernier.
J’espère que toutes ces perspectives vont se concrétiser bientôt par de nouvelles avancées.
La proposition de loi que nous allons adopter est un point de départ important, novateur, mais l’essentiel reste évidemment à faire. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, du groupe Les Républicains et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. Joël Labbé. Monsieur le président, mes chers collègues, cette proposition de loi issue des travaux du groupe de travail sur la simplification du droit de l’urbanisme émanant de notre délégation aux collectivités territoriales, vous l’avez voulue. Monsieur le président, vous avez souhaité la suivre personnellement et vous en avez surveillé l’avancement avec attention. Vous avez aussi souhaité que nous procédions à un vote solennel sur ce texte, qui a son importance même s’il n’est qu’un début.
Les pistes dégagées par le groupe de travail sont le fruit d’un dialogue nourri avec les acteurs de l’aménagement des territoires, qu’ils soient élus locaux ou professionnels de l’aménagement.
Mon nom ne figure pas parmi ceux des nombreux cosignataires, parce que j’avais au départ quelques bémols à apporter sur lesquels je reviendrai. Mais nous pouvons nous réjouir de la qualité du travail réalisé et du niveau de coconstruction atteint sur ce texte. Mme la ministre du logement et de l'habitat durable nous a également assuré, au cours de la discussion, qu’elle porterait notre texte à l’Assemblée nationale dans le même esprit. Nous pouvons ainsi espérer que l’un des derniers textes de la législature sera adopté à l’unanimité ou à la quasi-unanimité de notre Parlement. On peut encore rêver ! (Sourires.) Si vous le voulez bien, monsieur le secrétaire d'État, vous transmettrez ce souhait !
Comme j’ai pu le dire lors de la discussion générale, l’enjeu est de simplifier le droit, mais sans amoindrir la portée de la loi.
Je voudrais souligner les éléments les plus importants de ce texte.
On peut noter, en particulier, les mécanismes permettant de réduire les délais d’instruction des recours en matière d’urbanisme et d’éviter ainsi les procédures dilatoires. Tout le monde s’accorde pour reconnaître que notre justice doit être plus rapide sans pour autant sacrifier la qualité des décisions non plus que les voies de recours.
L’amélioration du dialogue entre les collectivités territoriales et l’État, à travers la désignation d’un référent unique sur les questions d’urbanisme, d’aménagement et d’environnement, constitue une avancée importante, qui répond à une demande forte de la part des services décentralisés comme des élus locaux. Ce dispositif est complété par une conférence de conciliation et d’accompagnement des projets locaux, qui doit faciliter l’accord, dans l’élaboration des schémas, entre les différents échelons territoriaux et leurs acteurs.
Les écologistes ont été entendus, comme en témoigne l’adoption de deux amendements, à nos yeux majeurs.
M. Éric Doligé. Les écologistes, eux, ne nous entendent pas !
M. Joël Labbé. Le texte initial prévoyait de reculer la réalisation de l’étude d’impact concernant les zones d’aménagement concerté et de la confondre avec l’étude d’impact sur la réalisation. Dans le cas d’une étude menée tardivement, c’est-à-dire lors de la réalisation de la zone, et non de sa création, cela aurait privé les élus des informations nécessaires pour juger de l’opportunité du projet non seulement du point de vue environnemental, mais aussi en termes économiques. Ce point a été rectifié ; nous en sommes satisfaits.
Le second problème concernait la consultation des CDPENAF, ces fameuses commissions départementales de préservation de l’environnement naturel agricole et forestier – cela sonne déjà mieux que cette abominable abréviation ! –, dont les avis techniques sur les règlements d’urbanisme sont largement reconnus pour éclairer les décisions publiques et les positionnements des représentants de l’État que sont les préfets. Là encore, retarder leur consultation pour avis aurait eu pour effet de priver les élus locaux d’éléments déterminants pour prendre leurs décisions.
J’avais quelques réserves sur ce texte au moment de son dépôt sur le bureau du Sénat. C’est pourquoi, je l’ai dit, je n’en suis pas signataire, alors même que j’avais suivi les travaux du groupe de travail avec grand intérêt et que j’avais apprécié l’esprit dans lequel ils avaient été menés.
Je voudrais à ce propos saluer les deux auteurs de la proposition de loi, MM. François Calvet et Marc Daunis, ainsi que la rapporteur, Mme Élisabeth Lamure. En effet, il faut reconnaître qu’il est non seulement agréable, mais aussi utile à l’intérêt de nos concitoyens de travailler ainsi.
Le Sénat a su montrer à cette occasion sa capacité à surmonter les clivages partisans – cela fait du bien de temps en temps ! – lorsqu’il s’agit de défendre les collectivités territoriales et de réformer intelligemment ce que la succession de différentes lois a parfois rendu inintelligible. Pour ma part, j’ai apprécié cette séquence de travail parlementaire.
Nous suivrons avec attention le sort de ce texte à l’Assemblée nationale. Nous comptons sur Mme la ministre du logement et de l’habitat durable pour faire valoir notre état d’esprit constructif et positif auprès de nos collègues députés. Nous ne doutons pas qu’ils sauront encore enrichir le texte : là est bien notre rôle de parlementaires.
Le groupe écologiste du Sénat votera donc à l’unanimité cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)