Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Bailly, rapporteur. Cet amendement concerne le numéro d’affiliation et l’allongement de la durée de la convention, qui est comprise, dans le code du sport, entre un et cinq ans. J’avais proposé une durée comprise entre six et douze ans, mais après audition, nous nous sommes rendu compte que, pour être sécurisés, les futurs investisseurs ont aussi besoin de temps. Cet article est au cœur du dispositif législatif.
La commission est donc défavorable à sa suppression.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également défavorable à la suppression de ce dispositif.
J’entends le raisonnement de Mme Prunaud, mais à mon sens il faut l’inverser. Le texte tend au contraire à sécuriser la relation entre l’association, qui reste propriétaire du numéro d’affiliation, et la société, qui va l’exploiter. Même si le mot « propriété » a disparu dans la rédaction de la commission, contre l’avis du Gouvernement, cette sécurisation des associations est extrêmement importante pour dissuader tout investisseur qui aurait des ambitions non sportives.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 6 bis (nouveau)
Aux 1° et 3° de l’article L. 122-7 du code du sport, la référence : « L. 233-16 » est remplacée par la référence : « L. 233-17-2 ». – (Adopté.)
Article 7
I. – Le livre Ier de la septième partie du code du travail est complété par un titre III ainsi rédigé :
« TITRE III
« SPORTIFS PROFESSIONNELS ET PROFESSIONS DU SPORT
« CHAPITRE IER
« Sportifs professionnels
« Section 1
« Rémunération
« Art. L. 7131–1. – La rémunération due au sportif professionnel à l’occasion de la vente ou de l’exploitation des attributs de sa personnalité par l’employeur n’est pas considérée comme salaire dès que la présence physique du sportif professionnel n’est plus requise pour cette exploitation et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu pour sa performance sportive, mais est fonction du produit de la vente ou de l’exploitation des attributs de sa personnalité.
« Cette rémunération, qui ne peut constituer la part déterminante de la rémunération totale du sportif, est plafonnée à un niveau fixé par décret.
« La mise en œuvre du présent article est conditionnée à l’adoption d’un accord collectif par discipline. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme la présidente. L'amendement n° 3, présenté par Mme Prunaud, M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. La question de la fiscalisation des rémunérations des sportifs professionnels est essentielle. Cet article 7 a pour objet de défiscaliser une partie de la rémunération des sportifs. Vous comprendrez aisément que le groupe CRC soit réticent à accepter en l’état ce type de dispositif, s’inspirant librement du droit à l’image collectif, ou DIC, supprimé en 2010 et qui permettait aux clubs d’économiser de fortes sommes : à titre d’exemple, 800 000 euros par an pour le Stade français, 30 millions d’euros pour l’ensemble de la Ligue 1. Ces sommes pourraient être réinvesties dans les clubs de formation des équipes jeunes ou dans d’autres actions avec les ligues départementales.
Comme vous tous, nous serions heureux que plus de clubs français brillent sur le terrain européen. Néanmoins, la qualité sportive d’une équipe ne peut se résumer à la seule question fiscale. Preuve en est, dans mon département, l’équipe de foot de l’En Avant de Guingamp.
En rabattre sur les recettes fiscales de l’État ne nous semble donc pas être une solution en soi. Par ailleurs, la transformation en redevance des rémunérations dues à l’exploitation des attributs des sportifs et des entraîneurs pose quand même une question : quel est le rapport coût/profit de cette exploitation ?
Est évoqué à l’alinéa 9 de cet article 7 un plafond fixé par décret pour lequel nous n’avons pas plus d’informations. C’est sur ce dernier point, monsieur le secrétaire d’État, que nous souhaiterions avoir des précisions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Bailly, rapporteur. Nous sommes au cœur du dispositif législatif : M. le secrétaire d’État a évoqué une révolution culturelle. Évitons les faux procès entre nous : nous ne sommes pas là pour défiscaliser.
Cet article va permettre de sacraliser le salaire, en rémunération de l’activité sportive du joueur professionnel, de son talent, et d’aller chercher un potentiel économique qui aujourd’hui n’est pas exploité et ne peut pas profiter au budget de l’État à travers la fiscalisation. Cette redevance sera fiscalisée – BNC, bénéfices non commerciaux, ou BIC, bénéfices industriels et commerciaux. Elle sera également soumise à l’impôt sur le revenu quand le joueur en aura le bénéfice. En outre, des cotisations sociales seront prélevées sur cette redevance.
Aujourd’hui, il n’existe rien : ni recette fiscale ni recette sociale. Par ce « plus », par cette redevance, par ce nouveau contrat, nous allons, je le répète, chercher un potentiel économique qui aujourd’hui n’est pas exploité. Il ne s’agit pas du tout du retour du DIC, contrairement à ce que certains commentaires laissent entendre. Il ne s’agit pas non plus de défiscaliser. Nous sommes juste en train d’essayer de trouver des outils supplémentaires pour permettre à des joueurs de rester dans les championnats français. En effet, si tel n’est pas le cas, la part salariale ou les cotisations sociales n’entreront pas dans le budget de l’État, car les joueurs iront jouer dans d’autres pays, notamment en Grande-Bretagne et en Espagne.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Je proposerai par la suite, à travers un nouvel amendement, une troisième réécriture, dans l’état d’esprit qui nous anime aujourd’hui. J’ai commencé avec un outil qui s’appelle la fiducie, j’ai ensuite réécrit la rédaction en commission en m’appuyant sur les propositions Glavany ; je vous proposerai de nouveau une amélioration du dispositif pour le sécuriser encore plus fortement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis de sagesse.
Madame Prunaud, il ne s’agit pas d’une niche fiscale, comme a pu être perçu le DIC qui avait été abandonné après avoir été mis en place. Là, il s’agit d’un droit individuel. Aujourd’hui, l’image des sportifs est souvent utilisée par leurs clubs sur des panneaux 4x3 ou dans des revues, en dehors de leur activité première qui est de marquer un panier ou un but. La réalité est que cette fonction n’est pas prise en compte actuellement.
Cela pose une difficulté de droit social. Si un joueur venait à user de son image négativement, il ne pourrait pas être sanctionné, car s’il était licencié pour faute grave, le club perdrait sa valeur, car chaque joueur a une valeur. Une telle mesure, permettrait d’exercer un contrôle plus précis sur le comportement des joueurs et sur leur exemplarité par rapport à l’image qu’ils donnent d’eux-mêmes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de vos précisions. Pourriez-vous nous donner dès à présent un chiffre approximatif sur cette fameuse taxe additionnelle qui figure à l’alinéa 9 ?
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État. À ce stade, je ne dispose d’aucun chiffre précis, madame la sénatrice.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Cet amendement vise à donner la possibilité aux clubs français de garder des joueurs français et d'attirer des joueurs étrangers. Comme l’a rappelé M. le rapporteur, l’objectif est très clair : à côté du salaire, qui est fixe et dépend d’un contrat de travail, il s’agit d’améliorer les revenus des sportifs grâce à cette redevance sur l’exploitation commerciale de leur image.
Lors des discussions que nous avons eues avec M. le rapporteur, le plafonnement a été fixé au départ à 20 %. Nous y étions favorables, car cela nous paraissait un signe fort à l’égard des clubs et des sportifs. Je comprends néanmoins que cela puisse faire peur à certaines administrations. À cet égard, nous avons bien entendu les arguments de M. le rapporteur pour ramener ce plafond de 20 % à 10 %, mais c’est une première avancée. Nous devrons tirer un bilan de cette décision dans quelque temps, pour voir s’il est possible de rendre encore plus attractifs les clubs professionnels français.
Nous ne voterons pas le présent amendement ; nous nous rallierons à la position de la commission, même si nous estimons que nous pouvons encore aller plus loin.
Mme la présidente. La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote.
M. Gaëtan Gorce. Mes chers collègues, la rémunération des joueurs professionnels est toujours un sujet difficile à aborder, et pour cause : dans un certain nombre de cas, ces rétributions atteignent des niveaux indécents, ou qui sont du moins perçus comme tels.
On peut aimer le football. C’est mon cas, et nous sommes nombreux dans cet hémicycle à aimer le sport : peut-être certains parmi nous continuent même à le pratiquer. Cela étant, bien des disciplines sportives ont fini par perdre leur exemplarité, face à des pratiques qui sont d’abord influencées par des logiques commerciales, par des rapports de force impliquant des formes de violence.
Pour notre part, nous nous efforçons de réguler ces pratiques autant que nous le pouvons. Mais si, pour développer les institutions sportives existant au niveau local, nous courons derrière les modèles adoptés par les grands clubs européens, nous nous essoufflerons sans jamais atteindre notre but.
À mon sens – nous y reviendrons sans doute lors d’autres débats consacrés à ces sujets –, il faut avant tout consolider l’armature des clubs amateurs, des centres de formation et de toutes les structures permettant de développer les pratiques sportives autour des valeurs qu’elles incarnent.
Je le répète, à travers cet amendement, nous évoquons des pratiques commerciales le plus souvent indécentes : par ce biais, des êtres humains sont transformés en objets de vente. D’une certaine manière, ils y trouvent leur avantage. Mais, en la matière, rien ne ressemble au sport que nous aimons !
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.
M. Claude Kern. Mes chers collègues, disons-le clairement : cet article occupe une place fondamentale au sein de cette proposition de loi. Il lui donne corps et cohérence.
Dans notre démarche de compétitivité du sport professionnel français et compte tenu des pratiques en vigueur à l’échelle européenne, il est urgent de faire évoluer la législation applicable à la rémunération des sportifs de haut niveau.
Le dispositif retenu par la commission m’apparaît, à ce jour, comme le plus équilibré et le plus pertinent pour traiter cette question. Il ne faut donc pas supprimer cet article, mais, au contraire, le faire évoluer dans le temps. Je fais miens les termes du rapport établi par la commission : nous exprimons notre complète détermination à améliorer la compétitivité des clubs professionnels français. Il ne serait pas concevable d’adopter le présent texte s’il était amputé de cet article.
Mme la présidente. L'amendement n° 24 rectifié, présenté par M. D. Bailly, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 222-2-3 du code du sport est complété par neuf alinéas ainsi rédigés :
« Une association ou une société sportive mentionnée aux articles L. 122-1 et L. 122-2 peut conclure avec un sportif ou un entraîneur professionnel un contrat relatif à l’utilisation et à l’exploitation commerciale de son image, de son nom ou de sa voix.
« Les sportifs et entraîneurs professionnels ne peuvent être regardés, dans l’exécution du contrat mentionné au premier alinéa, comme liés à l’association ou à la société sportive par un lien de subordination juridique caractéristique du contrat de travail au sens des articles L. 1221-1 et L. 1221-3 du code du travail, et la redevance qui leur est versée au titre de ce contrat ne constitue ni un salaire ni une rémunération versée en contrepartie ou à l’occasion du travail au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale dès lors que :
« – la présence physique des sportifs ou des entraîneurs professionnels n’est pas requise pour utiliser et exploiter commercialement leur image, leur nom ou leur voix ;
« – la redevance des sportifs ou des entraîneurs professionnels n’est pas fonction du salaire reçu dans le cadre du contrat de travail mais fonction des recettes générées par cette utilisation et cette exploitation commerciale de leur image, de leur nom ou de leur voix.
« Le contrat mentionné au deuxième alinéa précise, à peine de nullité :
« – l’étendue de l’utilisation et de l’exploitation commerciale de l’image, du nom et de la voix du sportif ou de l’entraîneur professionnel, notamment la durée, l’objet, le contexte, les supports et la zone géographique de cette utilisation et de cette exploitation commerciale ;
« – les modalités de calcul du montant de la redevance versée à ce titre, notamment en fonction des recettes générées par cette utilisation et cette exploitation commerciale.
« Un décret fixe les modalités d’application du présent article, et notamment le plafond des redevances, par discipline, qui peuvent être versées à ce titre par une association ou une société sportive à l’ensemble de ses sportifs ou entraîneurs professionnels qui ne peut excéder 10 % des recettes générées par cette utilisation et cette exploitation commerciale.
« Une convention ou un accord collectif national, conclu par discipline, précise les modalités d’application des deuxième à neuvième alinéas du présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Bailly, rapporteur. Mes chers collègues, le présent article et, plus généralement, cette proposition de loi n’ont pas vocation à répondre à la situation d’un sport particulier, notamment le football.
J’ai encore en tête plusieurs des auditions que nous avons menées. Je pense, en particulier, à nos échanges avec les représentants de la ligue de basket. Ces derniers soutiennent fortement le dispositif de l’article 7, qui leur permettra de conserver divers joueurs dans le championnat de basket professionnel.
M. Dominique Bailly, rapporteur. À l’heure actuelle, ces joueurs se déterminent selon les niveaux de rémunération qu’on leur propose. Ils partent ainsi en Allemagne, en Espagne ou en Italie.
Au demeurant, je fais miens les propos de Daniel Percheron : en la matière, nous nous trouvons à un moment stratégique. Auparavant, les clubs s’appuyaient sur des compagnies industrielles.
Mme Éliane Assassi. De toute manière, il n’y a plus d’industrie…
M. Dominique Bailly, rapporteur. Aujourd’hui, que voulons-nous ? Que, dans les championnats professionnels, demeurent les seuls clubs dépourvus d’une logique économique propre, ne tenant budgétairement que grâce au soutien d’un mécène ? Non !
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas pareil !
M. Dominique Bailly, rapporteur. Avec ces dispositions, nous nous efforçons d’atteindre un point d’équilibre.
Au demeurant, au-delà des rémunérations, il faut tenir compte des enjeux existant en termes d’aménagement du territoire et d’emploi. Gardons à l’esprit qu’un club de football professionnel, c’est entre 150 et 200 emplois.
Ce rappel étant formulé, j’en viens à l’objet du présent amendement.
Comme je l’indiquais le 12 octobre dernier, lors des débats en commission, j’ai souhaité poursuivre la réflexion relative à la rédaction de cet article, qui ouvre la possibilité de rétribuer l’image des sportifs au moyen d’une redevance.
M. Daniel Percheron. Très bien !
M. Dominique Bailly, rapporteur. Le présent amendement tend à consolider le dispositif en précisant que le contrat commercial sera bien distinct du contrat de travail. Ainsi, on évitera tout risque de requalification, éventualité que Daniel Percheron a évoquée lors de son intervention à la tribune.
À rebours de l’ancien droit à l’image collectif, auquel certains font encore référence, ce nouveau dispositif permet de tenir compte de la réalité de l’utilisation, par les clubs, de l’image individuelle des sportifs, laquelle varie en fonction des situations des uns et des autres. Il offre en outre un cadre juridique adapté à la réalité du métier de sportif professionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Daniel Percheron. Très bien !
Mme la présidente. En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 7
Mme la présidente. L'amendement n° 12, présenté par MM. Savin et Kern, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre III du titre Ier du livre Ier du code du sport est complété par un article L. 113-… ainsi rédigé :
« Art. L. 113-… – Les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent financer plus de 50 % des dépenses de construction d’une nouvelle enceinte sportive lorsque cette enceinte sportive est destinée à être utilisée majoritairement par une association sportive ayant créé une société sportive. »
II. – Le présent article s’applique à compter du 1er juin 2017.
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Le présent amendement est complémentaire du dispositif de garantie d’emprunt que le Gouvernement, via l’amendement n° 27, présentera dans quelques instants.
Il s’agit, à travers notre amendement n° 12, d’encourager les clubs professionnels à devenir, s’ils le souhaitent, propriétaires de leur infrastructure.
À cette fin, cet amendement tend à introduire dans le code du sport un nouvel article en vertu duquel, à compter du 1er juin 2017, les collectivités territoriales et leurs groupements ne pourront financer plus de 50 % du montant total des dépenses de construction d’une nouvelle enceinte sportive lorsque cette enceinte sportive sera destinée à être utilisée majoritairement par un club professionnel.
Cela signifie, en particulier, que les collectivités territoriales ne pourront plus financer seules, avec des fonds publics, des stades dont elles n’ont pas l’utilité elle-même, mais qu’elles mettent à la disposition d’un club professionnel en échange d’une redevance.
Une telle réglementation semble nécessaire pour limiter l’implication financière des collectivités territoriales. M. le secrétaire d’État a précédemment rappelé l’exemple de collectivités qui, pour avoir voulu construire seules un équipement sportif mis à la disposition d’une société professionnelle, sont aujourd’hui lourdement endettées.
Concrètement, cette mesure reviendrait à interdire, à l’avenir, un financement public local intégral des grandes enceintes sportives réservées en priorité au sport professionnel. Ces règles ne concerneraient donc que les équipements comme les stades et les Arenas, dédiés aux clubs professionnels. C’est en ce sens que ce dispositif complétera la garantie d’emprunt.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Bailly, rapporteur. Monsieur Savin, la commission a émis un avis favorable sur votre amendement.
Toutefois, je vous le dis à titre personnel : la garantie d’emprunt, que M. le secrétaire d’État va présenter dans quelques instants, me paraît plus judicieuse.
Il me semble prématuré de voter cette limitation de 50 %. Bien sûr, je suis favorable au principe général de cette disposition, qui va dans le sens de l’histoire, à savoir le désengagement, en la matière, des collectivités territoriales. Toutefois mes réserves se fondent sur des considérations de timing.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Thierry Braillard, secrétaire d'État. Je l’ai déjà dit au cours de mon intervention liminaire : sur le front des infrastructures sportives, le présent texte ouvre la voie à une révolution culturelle. « Le stade du maire » et « la salle de sports du maire », comme on les connaît depuis cinquante ans, vont devenir « le stade du club » et « la salle du club ».
Cette révolution s’appliquera aux clubs eux-mêmes, qui, dès qu’il faut changer un éclairage, restaurer une pelouse ou passer un coup de peinture, ont pris le réflexe d’aller frapper à la porte de la mairie pour demander au maire de s’exécuter.
Toutefois, monsieur Savin, limiter les investissements publics locaux à 50 %, c’est faire comme si ce changement culturel avait déjà eu lieu ; c’est raisonner comme s’il fallait viser uniquement les projets les plus coûteux.
À mon sens, la garantie d’emprunt, qu’il me sera donné de présenter dans un instant, est moins destinée au football qu’à des sports professionnels comme le basketball, le handball ou le volleyball. Souvent, les clubs concernés souffrent de graves difficultés.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne peux qu’abonder dans le sens de M. le rapporteur : on ne peut pas réduire le sport professionnel français aux trois plus grands clubs de football, dont les budgets respectifs s’élèvent à 120 millions, 150 millions et 250 millions d’euros. Le sport professionnel, ce n’est pas cela, et vous le savez très bien. La commission a par exemple auditionné les délégués de clubs de sport professionnel féminin qui ne parviennent pas à financer tous les salaires de leurs joueuses, si modestes soient-ils. Voilà la réalité !
Dire à ces clubs que, s’ils souhaitent mener à bien un investissement, ils doivent respecter une telle limitation, ce ne serait pas leur rendre service.
À mon sens, il est encore beaucoup trop tôt pour adopter ce dispositif. Même si je comprends le principe de ces dispositions, j’émets donc, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Lozach. Dans le droit fil de la position exprimée, à titre personnel, par M. le rapporteur, je tiens à manifester mon hostilité à cet amendement.
Au titre des relations entre les clubs professionnels – il est bien sûr question des sports collectifs en général – et les collectivités territoriales, deux avancées nous sont aujourd’hui proposées : d’une part, la garantie d’emprunt, qui sera examinée dans un instant, et, d’autre part, les présentes dispositions relatives à l’investissement direct.
Je constate que le dispositif de la garantie d’emprunt n’est assorti d’aucun plafonnement. Cet aspect aurait pu être évoqué. Mais ce plafonnement n’est, pour l’heure, abordé qu’au titre de l’aide directe apportée par telle ou telle collectivité, ou par tel ou tel établissement public de coopération intercommunale.
Au total, dans la pratique, seul un faible nombre de situations seront concernées : celles dans lesquelles des clubs professionnels, participant en particulier à des compétitions européennes, seront conduits à dialoguer avec des élus locaux. Or ces derniers relèveront essentiellement de structures communautaires, plus précisément de métropoles, voire de communautés d’agglomération.
M. Jean-Jacques Lozach. Ce sont ces élus qui définiront le règlement d’intervention et la nature de la compétence optionnelle qu’ils exerceront demain. Nous n’avons pas à nous substituer à eux. En effet, nous devons respecter le principe de libre administration des collectivités. Nous devons suivre le sens de la décentralisation.
En outre, pourquoi fixer arbitrairement le plafond de financement à 50 % ? Si, demain, un club demande aux acteurs publics locaux de financer un projet à 55 %, que faudra-t-il faire ? Laisser échouer le projet présenté ?
À mon sens, il faut laisser aux élus concernés, qui relèveront essentiellement des EPCI, la possibilité d’intervenir, lorsqu’un club souhaitera devenir propriétaire de son stade ou de son Arena. Ne bridons pas l’intervention de ces structures publiques !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Je tiens à répondre brièvement aux arguments avancés par M. le rapporteur et par M. le secrétaire d’État. Il a été question d’une « révolution culturelle ». Mais allons au bout du raisonnement ! Jusqu’à présent, nous restons au milieu du gué, et les exemples cités ne s’appliquent pas à l’amendement que M. Kern et moi-même avons déposé. Ils ne concernent ni le sport professionnel pratiqué par les femmes ni des disciplines comme le basket-ball, le handball ou le volley-ball. Ils ne visent que les sociétés sportives.
Certes – Jean-Jacques Lozach a tout à fait raison de le souligner –, aujourd’hui, seul un très petit nombre de clubs sont concernés. Mais ces derniers ont subi de graves dégâts financiers. Il est donc bien nécessaire de protéger les collectivités à cet égard.
J’entends qu’il faut respecter le principe de libre administration des collectivités territoriales. Mais ne soyons pas innocents ou naïfs : nous connaissons les pressions que subissent les élus locaux de la part des dirigeants de clubs sportifs et des représentants des clubs de supporters, ou encore de la part des partenaires. On leur demande de consacrer toujours plus d’argent public à la construction d’infrastructures, qui – M. le secrétaire d’État et M. le rapporteur l’ont rappelé – devraient être gérées selon le nouveau modèle économique que nous appelons de nos vœux.
On ne peut pas continuer avec des clubs de sport professionnel de haut niveau qui ne sont pas en mesure de créer ce nouveau modèle économique en vertu duquel ils ne dépendraient pas des seules collectivités !
Aujourd’hui, les collectivités territoriales n’ont plus les moyens d’assumer seules des financements de cette nature. En conséquence, nous proposons, non d’interdire purement et simplement le versement de ces crédits, mais de plafonner la participation des collectivités à 50 %. À charge pour les clubs professionnels, notamment les sociétés sportives professionnelles, d’aller chercher des financements complémentaires pour mener à bien la réalisation des équipements auxquels ils aspirent.
Le Parc Olympique Lyonnais a été construit sans qu’aucun financement public ait été apporté au titre de l’équipement : le financement a été à 100 % d’origine privée. Mais, je le répète, nous ne proposons pas d’aller systématiquement aussi loin.
À mes yeux, ces dispositions sont un signal fort adressé aux collectivités territoriales. Ces dernières pourront continuer à agir, et, dans le même temps, la limitation apportée permettra de rassurer les élus. Il y va de la bonne gestion de l’argent public.