M. Patrick Abate. Les arguments de M. le rapporteur, très souvent avancés en la matière, sont compréhensibles. En votant cet amendement, nous prendrions peut-être le risque de pénaliser nos entreprises, en particulier quelques groupes multinationaux français qui ne seraient pas à la hauteur des exigences sociétales et éthiques auxquelles on leur demande de se conformer.
Néanmoins, sous ce prétexte, faut-il renoncer à faire avancer le droit dans le bon sens ? Cet amendement vise à traduire en droit la réalité économique moderne des groupes multinationaux, de leurs activités et de leurs impacts. Il ne nous semble pas de nature à mettre le monde économique particulièrement en danger.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Effectivement, à force d’attendre que les choses se passent, on oublie l’audace. Si nous n’en faisons pas preuve dans ce domaine, personne ne le fera pour nous.
Nous parlons beaucoup ces derniers temps de l’Europe que nous devons construire. Il s’agit en l’occurrence de respecter la Charte européenne des droits fondamentaux. En adoptant ce type de mesures, la France ferait le pas en avant permettant de tirer tout le monde vers le haut.
Nous défendons avec force ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 446 et 489.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
4
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis particulièrement heureux de saluer en votre nom la présence, dans notre tribune d’honneur, d’une délégation du Sénat du Canada, conduite par son président, M. George Furey. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre des finances et des comptes publics, se lèvent.)
Cette délégation est accompagnée par Mme Claudine Lepage, présidente du groupe d’amitié France-Canada.
La délégation a été reçue hier par le président Gérard Larcher.
Elle doit s’entretenir aujourd’hui avec nos collègues Dominique Bailly, questeur, sur la sécurité du Parlement, Michèle André, présidente de la commission des finances, sur le rôle du Sénat dans la discussion budgétaire, et Alain Richard, vice-président du comité de déontologie.
Nous souhaitons à nos homologues canadiens la plus cordiale bienvenue au Sénat de la République française et de fructueux travaux ! (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre, applaudissent.)
5
Transparence, lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique – orientation et protection des lanceurs d’alerte
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’une proposition de loi organique dans les textes de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion, dans les textes de la commission, du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, et de la proposition de loi organique, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la compétence du Défenseur des droits pour l’orientation et la protection des lanceurs d’alerte.
projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (suite)
Article 8 (suite)
M. le président. Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 8.
L'amendement n° 444, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce code de conduite est élaboré en associant les représentants du personnel de l’entreprise concernée.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Les dispositions de cet amendement vont dans le même sens que celles que nous avons présentées à l’article 6 E. Il s’agit d’associer davantage les instances représentatives du personnel en amont des processus de prévention de la corruption.
Il est ainsi proposé d’associer les représentants du personnel à la rédaction du code de conduite en matière de faits de corruption ou de trafic d’influence. Cette mesure permettrait de reconnaître le rôle propre des institutions représentatives du personnel dans la lutte contre la corruption.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Cet amendement tend à ce que les représentants du personnel soient associés à l’élaboration du code de conduite.
Il est déjà pleinement satisfait par le renvoi à l’article L. 1321-4 du code du travail pour ses conditions d’élaboration : ainsi, on lui appliquera la procédure prévue pour le règlement intérieur, auquel il sera d’ailleurs annexé. Il y aura donc bien un avis préalable du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.
La commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Favier, l’amendement n° 444 est-il maintenu ?
M. Christian Favier. Compte tenu des débats en cours sur la loi Travail, je ne sais pas ce qu’il adviendra de cet article du code du travail… (Sourires.) Je préfère donc maintenir notre amendement.
M. le président. L’amendement n° 445, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce dispositif peut être externalisé auprès de toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date de l’alerte se proposant par ses statuts d’assister les lanceurs d’alerte.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. L’article 8 du projet de loi vise à créer une obligation générale de prévention de la corruption pour les entreprises, dont l’effectif est supérieur à 500 salariés et le chiffre d’affaires à 100 millions d’euros. Il est ainsi prévu que les entreprises mettent en place toute une série de mesures internes, en vue d’identifier les risques potentiels et de prévenir la corruption.
L’alinéa 8, qui contient l’une d’entre elles, propose de mettre en place un dispositif interne destiné à permettre le recueil des signalements émanant d’employés et relatifs à l’existence de conduites ou de situations contraires au code de conduite de l’entreprise.
Or, pour faire en sorte que les langues se délient et que l’alerte en matière d’atteinte au code de conduite de l’entreprise puisse se dérouler sereinement, il pourrait être intéressant de prévoir, dans la loi, la possibilité d’externaliser ce dispositif d’alerte auprès de toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans et habilitée à agir en la matière.
Il s’agit non pas de substituer au dispositif prévu à l’alinéa 8 une externalisation intégrale, mais d’ouvrir la possibilité de cette externalisation auprès d’une association spécialisée en matière de lutte contre la corruption et de protection des lanceurs d’alerte.
Une telle disposition ne pourrait qu’améliorer la protection de ces derniers, puisqu’elle permettrait de garantir l’indépendance de la structure et d’éviter une mauvaise application du code de conduite. Elle serait également de nature à assurer une meilleure confidentialité ou agirait, à tout le moins, comme un bouclier de protection en faveur des employés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Il ne faut pas confondre les sujets. L’article 8 porte sur la lutte contre la corruption, pas sur la question des lanceurs d’alerte.
Cher collègue, vous proposez qu’une entreprise soumise à l’obligation de conformité puisse déléguer son dispositif d’alerte interne, en matière de prévention et de détection des faits de corruption, à une association régulièrement déclarée. Là encore, je souhaite vous rassurer. Aucun texte ne l’interdit. Cette possibilité existe donc déjà en l’état du projet de loi.
J’ajoute que l’adoption de cet amendement aurait plutôt tendance à restreindre les possibilités, puisque cette délégation ne serait permise qu’à des associations déclarées depuis au moins cinq ans. En tout cas, rien dans les textes n’interdit à une entreprise de confier à une association le soin de mettre en place la procédure de prévention et de détection des faits de corruption.
Par conséquent, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Le Scouarnec, l’amendement n° 445 est-il maintenu ?
M. Michel Le Scouarnec. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 445 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 317 rectifié, présenté par Mme Lamure, M. Adnot, Mme Billon, MM. Bouchet, Canevet et Danesi, Mme Deromedi, MM. Nougein, Vaspart et Kennel et Mme Primas, est ainsi libellé :
Alinéas 9 et 10
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« 3° Une cartographie des risques par secteur d’activité et par zone géographique, en fonction des principaux clients, fournisseurs et intermédiaires ;
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. S’il est souhaitable, et même nécessaire, que la France se dote d’un dispositif anticorruption, les obligations mises à la charge des entreprises visées apparaissent très lourdes, surtout compte tenu du champ large de leur application. En particulier, l’obligation d’établir une évaluation des risques fait doublon avec celle d’établir une cartographie de ces risques.
Dans les lignes directrices françaises visant à renforcer la lutte contre la corruption dans les transactions commerciales qu’il a publiées le 25 mars 2015, le Service central de prévention de la corruption recommande d’effectuer une cartographie des risques de corruption, fondée sur leur évaluation documentée et périodiquement renouvelée.
Dès lors que l’établissement d’une cartographie des risques implique une évaluation des risques, ces deux obligations peuvent être fusionnées, ce qui constituerait déjà un certain allégement. La délégation aux entreprises y est très attentive.
M. le président. L’amendement n° 554 rectifié, présenté par MM. Collombat, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier, Vall et Hue, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Personnellement, je ne pense pas que l’on soit corrupteur ou corrompu par inadvertance… (Rires sur plusieurs travées.) C’est pourquoi toutes ces précautions et procédures me paraissent complètement superfétatoires !
Si j’avais été totalement cohérent, j’aurais présenté un amendement de suppression. Mais un code de conduite, un dispositif d’alerte ou un régime disciplinaire, ça ne mange pas de pain… En revanche, les deux amendements que je propose ici visent à supprimer la cartographie des risques et leur évaluation pour les principaux clients, fournisseurs et intermédiaires.
L’amendement n° 556 rectifié, qui sera examiné ensuite, va dans le même sens et tend à supprimer les procédures de contrôle comptable, car ces trois éléments me paraissent tout à fait lourds et complètement sans intérêt.
Mon objectif est donc d’alléger les procédures, en supprimant les trois alinéas mentionnés, qui ne font que compliquer les choses sans rien améliorer.
M. le président. L'amendement n° 555 rectifié, présenté par MM. Collombat, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier, Vall et Hue, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 317 rectifié, la commission a reconnu que, tant sur la forme que sur le fond, une telle disposition constitue un progrès. Son avis est donc favorable.
Les deux amendements présentés par M. Collombat visent à supprimer des techniques et modalités de contrôle qui sont à la disposition de l’agence, dont on rognerait alors les ailes… Tel n’est pas l’objectif de la commission.
C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 554 rectifié et 555 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. L’amendement n° 317 rectifié de Mme Lamure vise à fusionner l’obligation d’établir une cartographie des risques et celle d’évaluer les partenaires. Toutefois, cette disposition présente, au fond, des problèmes de rédaction. Je considère que cette reformulation des formalités imposées aux entreprises est moins claire que la version actuelle.
Pour de pures raisons rédactionnelles, le Gouvernement ne peut donc que donner un avis défavorable.
M. Alain Vasselle. C’est donc plutôt un avis de sagesse…
M. Michel Sapin, ministre. En ce qui concerne les amendements nos 554 rectifié et 555 rectifié, mon avis est le même que celui de M. le rapporteur : j’y suis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je suis tout à fait en désaccord avec ce que vient d’indiquer notre rapporteur. Les documents en question, ce sont les intéressés qui les mettent en place… Vous pensez bien que, s’ils ont organisé un trafic d’influence ou une corruption, ils ne donneront pas des informations, par exemple des données comptables, qui permettraient à l’Agence de les identifier !
Ils ne sont pas complètement fous et vont tout de même s’organiser. Ces procédures sont donc complètement inutiles. Je persiste et je signe !
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. L’argumentation développée par notre collègue Collombat ne manque pas de pertinence, et je fais partie de ceux qui seraient prêts à aller jusqu’à la suppression de ces deux alinéas.
Cela étant, nous avons l’habitude, au Sénat, de trouver des compromis, et la proposition de notre collègue Élisabeth Lamure en constitue un, qui est acceptable. En outre, il est défendu par le rapporteur.
Qui peut le plus peut le moins ! Je préfère donc suivre la position de Mme Lamure, en sachant qu’il est peu probable qu’une majorité se dessine sur les deux autres amendements. Il serait dommage de ne pas voter le premier amendement, sans pour autant trouver une majorité sur les deux autres.
Pour autant, je constate que M. Collombat, comme à son habitude, est très pertinent dans ses analyses… (M. Pierre-Yves Collombat sourit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Pillet, rapporteur. Je souhaite réagir aux propos de M. Collombat.
Je crois qu’il existe une confusion. Cher collègue, vous semblez estimer que, en cas de volonté de corrompre, c’est toute l’entreprise qui est impliquée. Toutefois, les mesures qui sont ici mises en place sont justement à vocation interne. Elles visent à éviter, au sein de l’entreprise, l’apparition d’un corrupteur ou, à tout le moins, à permettre de le détecter.
Vous imaginez, dès le départ, que c’est toute une société qui sera corrompue. Soyez rassuré : dans un tel cas, il y aura un lanceur d’alerte… (Sourires.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 554 rectifié et 555 rectifié n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 556 rectifié, présenté par MM. Collombat, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier, Vall et Hue, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Je l’ai défendu, mais je saisis cette occasion pour dire un mot sur les arguments avancés par le rapporteur.
Finalement, j’étais naïf : je croyais que toutes ces dispositions n’étaient pas faites pour lutter contre la petite délinquance ou la menue corruption, mais contre celle qui sévit au plan international, celle qui, précisément, nous vaut les condamnations que nous connaissons.
S’agissant de ce type de corruption, celle qui apparaît par exemple à l’occasion de ventes d’armes, de sous-marins ou d’équipements de cette nature, mon argumentation vaut complètement. On ne me fera jamais croire que tout cela n’est pas savamment organisé ! Et ce n’est pas avec vos dispositifs que vous allez pallier cette situation. Toutefois, l’objectif n’est peut-être pas là…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Les observations que j’ai formulées au sujet des amendements nos 554 rectifié et 555 rectifié, qui étaient de même nature, valent encore ici.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 318 rectifié, présenté par Mme Lamure, M. Adnot, Mme Billon, MM. Bouchet, Canevet et Danesi, Mme Deromedi, MM. Nougein, Vaspart et Kennel et Mme Primas, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Parmi les obligations qu’il est prévu d’imposer aux sociétés visées par la lutte contre la corruption, figure l’élaboration d’un code de conduite, annexé au règlement intérieur de l’entreprise, et un régime disciplinaire – c’est le 7° – permettant de sanctionner les salariés en cas de manquement au code de conduite.
Or ce 7° ne se justifie pas, compte tenu de l’annexion du code de conduite au règlement intérieur, qui intègre de facto le respect dudit code dans le champ du pouvoir disciplinaire.
Cet amendement vise donc à supprimer l’obligation, inutile, d’élaborer un régime disciplinaire ad hoc pour violation du code de conduite de l’entreprise destiné à prévenir les faits de corruption.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Mme Lamure a entièrement raison : tout manquement au règlement intérieur, auquel le code de conduite sera annexé, peut donner lieu à une sanction disciplinaire.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Je suis plutôt enclin à être défavorable à cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 355 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Anziani et Guillaume, Mme Espagnac, M. Yung, Mmes Bataille et Blondin, MM. Botrel et Courteau, Mme Jourda, MM. Labazée et Lalande, Mme Lienemann, MM. F. Marc, Marie, Miquel, Montaugé, Tourenne, Vaugrenard, Vincent, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Un dispositif de contrôle et d’évaluation interne des mesures mises en œuvre.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement a pour objet de prévoir que les personnes morales et privées assujetties aux obligations de l’article 8 doivent s’assurer elles-mêmes de l’efficacité et de l’effectivité des procédures et mesures mises en place. À défaut de dispositifs internes d’évaluation, on peut raisonnablement craindre qu’un respect a minima des obligations de l’article 8 ne rende l’objectif des nouvelles dispositions totalement illusoire.
C’est pourquoi l’amendement propose de prévoir, au titre des obligations de l’article 8, l’instauration d’un dispositif de contrôle et d’évaluation interne des mesures mises en œuvre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. C’est une bonne proposition. La commission avait souhaité une rectification de nature rédactionnelle, qui a été faite.
J’émets donc un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 86 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Raynal, Vaugrenard et Lalande, Mme Claireaux, M. Botrel, Mme Lepage, M. Labazée, Mmes Guillemot et Yonnet, M. Duran, Mme Schillinger, MM. Courteau, Durain et J. Gillot, Mme Monier, M. M. Bourquin et Mme Tocqueville, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
« Il peut décider de rendre ce rapport public, ainsi que les observations formulées en réponse par la société. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. L’article 8 du projet de loi instaure une nouvelle obligation, pour les sociétés d’au moins 500 salariés et 100 millions d’euros de chiffre d’affaires, de mettre en place des procédures internes précises destinées à prévenir et détecter la commission de faits de corruption ou de trafic d’influence en France ou à l’étranger.
L’Agence française anticorruption sera chargée du contrôle. En cas de manquement décelé, le magistrat qui dirige l’Agence pourra adresser un avertissement à la société, après l’avoir mise en mesure de présenter ses observations en réponse au rapport.
L’objet du présent amendement est simple et de bon sens : préciser que le rapport, qui fait état de manquements aux obligations des sociétés en matière de corruption et de trafic d’influence, peut être rendu public.
La publicité de ce rapport doit permettre d’améliorer l’efficacité du dispositif dans la lignée du principe name and shame. Elle est laissée à la libre appréciation de l’Agence, qui doit en évaluer l’opportunité. Cette publicité doit également avoir un caractère dissuasif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Lorsque l’Agence délivre un avertissement, elle est encore dans une phase de prévention, de dialogue, d’écoute et de confiance avec l’entreprise. Dès lors, le rapport qui a précédé l’avertissement n’a pas lieu d’être rendu public. Cela n’a d’ailleurs pas beaucoup de conséquences : si l’avertissement n’est pas suivi d’effets, ce rapport sera publié au moment des sanctions qui seront prises par la suite.
En cohérence avec la position de la commission, je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 86 rectifié est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 86 rectifié est retiré.
L’amendement n° 38 rectifié bis, présenté par M. Frassa, Mmes Deromedi et Giudicelli et MM. Commeinhes, Milon, Lefèvre, Houel, Doligé, Guerriau et Mandelli, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier de la deuxième année suivant la promulgation de la présente loi.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Faute de dispositions relatives à sa date d’entrée en vigueur, cette obligation devrait être applicable dès le lendemain de la publication de la loi, de sorte que, en principe, les entreprises devraient avoir déjà, à la date de publication de la loi, un programme anticorruption correspondant à celui qui est édicté par le projet de loi.
Il serait préférable de ménager aux entreprises une période d’adaptation suffisante, à l’instar du règlement 2016/679 de l’Union européenne du 27 avril 2016 sur les données personnelles.
En conséquence, afin de laisser le temps aux sociétés concernées de prendre les mesures nécessaires pour mettre en œuvre la nouvelle obligation d’avoir un programme de conformité anticorruption, il convient de prévoir que celles-ci disposeront, pour cela, d’un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, rapporteur. Ma chère collègue, vous avez parfaitement raison de proposer une entrée en vigueur différée de l’obligation de conformité, afin que les choses soient, en pratique, réalisables. Nous avions souhaité une rectification rédactionnelle, qui a été faite.
Par conséquent, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 8, modifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 417 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 197 |
Contre | 145 |
Le Sénat a adopté.
Article additionnel après l'article 8
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 195 rectifié est présenté par Mme Lienemann.
L’amendement n° 465 rectifié est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L’amendement n° 490 rectifié est présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le livre II du code de commerce est complété par un article L. 210-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 210-10– I. – Dans le cadre de ses activités économiques et commerciales, dans lesquelles elle est directement ou indirectement impliquée, en France ou à l’étranger, toute société a l’obligation de prévenir les dommages ou les risques avérés de dommages sanitaires ou environnementaux. Cette obligation s’applique aussi aux dommages résultant d’une atteinte aux droits fondamentaux.
« II. – La responsabilité de la société, dans les conditions définies ci-dessus, est engagée, à titre personnel ou solidaire, à moins qu’elle ne prouve qu’elle n’a pu, en dépit de sa vigilance et de ses efforts, prévenir le dommage, en faisant cesser son risque ou en empêchant sa réalisation, compte tenu du pouvoir et des moyens dont elle disposait. »
L’amendement n° 195 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l’amendement n° 465 rectifié.