M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
De plus, je crains que cette mesure ne permette pas de lutter contre l’abstention, puisque les jeunes votent encore moins que les vieux. Le taux d’abstention serait donc supérieur.
Quant aux vertus de l’éducation, si c’était une façon efficace de procéder, ça se saurait depuis un certain temps…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable, même s’il comprend complètement la logique de votre argumentation, madame la sénatrice. Je crois d’ailleurs pouvoir dire sans trop m’avancer que votre point de vue est de plus en plus partagé dans la société française. En tout cas, l’idée commence à se développer ici et là.
Pour autant, l’article 3 de la Constitution définit les conditions du droit de vote. Par conséquent, si vous souhaitez déconnecter l’âge du droit de vote de la majorité civile, il faut modifier la Constitution. Dans ces conditions, vous comprendrez que nous ne puissions pas donner un avis favorable à votre amendement.
J’ai bien compris qu’il s’agissait d’un amendement appelant à ouvrir le débat et à poursuivre la discussion dans le débat public, sans doute à l’occasion de prochaines échéances.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le rapporteur, madame la secrétaire d’État, je vous ai bien entendus ; les jeunes qui regardent notre séance nous ont également compris. Je vous remercie d’avoir pris en compte la question. Nous y reviendrons ultérieurement, à travers d’autres véhicules, pour que le débat soit posé. En attendant, je retire l’amendement.
M. le président. L'amendement n° 17 est retiré.
L'amendement n° 12 rectifié bis, présenté par M. Grand, Mmes Garriaud-Maylam, Lamure et Giudicelli, MM. Houel, Joyandet, Charon, Perrin, Raison et Laufoaulu, Mme Micouleau, M. Chaize, Mme M. Mercier et M. Panunzi, est ainsi libellé :
Avant le titre Ier (dispositions relatives au répertoire électoral unique et aux listes électorales)
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’avant-dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 65 du code électoral est ainsi modifiée :
1° Les mots : « n’entrent pas » sont remplacés par le mot : « entrent » ;
2° Les mots : « , mais il en est fait spécialement mention dans les résultats des scrutins » sont remplacés par les mots : « et leur nombre est mentionné lors de la proclamation des résultats ».
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Cet amendement tend à reconnaître le vote blanc comme suffrage exprimé. La loi du 21 février 2014 visant à reconnaître le vote blanc aux élections présentée par votre majorité, madame la secrétaire d'État, ne permet pas de comptabiliser celui-ci en tant que suffrage exprimé.
Je suis très attaché à cet amendement – j’avais déposé une proposition de loi allant en ce sens en tant que député, j’y reviens comme sénateur –, car je pense qu’une partie du vote refuge aujourd'hui est l’extrémisme. Si, demain, des citoyens constatent qu’en votant blanc ils ne permettent pas à M. Dupont ou à Mme Durand d’être élus au premier tour, qu’il faut un second tour et que leur vote est identifié, ils n’iront pas s’égayer à l’extrême droite ou à l’extrême gauche et resteront dans les rails. Voilà pourquoi je demande à notre assemblée de réfléchir à l’impact politique de la prise en compte du vote blanc comme suffrage exprimé.
Parmi les électeurs qui votent pour les extrêmes que j’ai interrogés, nombreux sont ceux qui m’ont dit ne pas savoir que faire d’autre. Ils constatent au dépouillement que le vote blanc n’est pas comptabilisé. Si, demain, ils savent qu’ils feront partie des 17,4 % de gens qui n’auront pas voulu élire M. Dupont ou Mme Durand, ils se reconnaîtront dans le suffrage universel. Sinon, ils resteront chez eux ou iront voter le plus souvent pour les extrêmes, parce que leur seul moyen de marquer leur différence est le vote violent.
Mes chers collègues, j’en appelle à votre sagesse sur cet amendement, qui me semble nécessaire par les temps qui courent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. Outre les raisons que j’ai déjà exposées pour motiver l’avis défavorable de la commission, je ferai observer que nous aurions besoin au minimum d’une étude d’impact sur les effets de cette disposition. La comptabilisation du vote blanc permettrait peut-être d’éviter que des gens ne soient élus au premier tour, encore qu’il existe des conditions de participation… Quoi qu’il en soit, que se passera-t-il au deuxième tour si l’on constate que l’élu l’a été avec 3 % des voix ? On recommence l’élection ?
Vous dites que le vote blanc permet de montrer son désaccord sans peut-être voter pour les extrêmes. Ce n’est pas si sûr, car, souvent, et je n’engage que moi en disant ça, les gens ne votent pas parce qu’ils ont l’impression que le résultat final sera le même qu’ils votent pour Pierre, Jacques ou Antoine. Le problème est celui des candidatures et des politiques qui sont suivies.
En tout cas, le sujet mérite une véritable étude de fond. À ce stade, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement a émis un avis défavorable pour deux raisons.
D’une part, ce sujet n’a pas de lien direct avec le texte que nous examinons.
D’autre part, une avancée importante a été réalisée avec la loi du 21 février 2014. Le vote blanc est un sujet récurrent dans le débat public, mais il est maintenant comptabilisé séparément ; il apparaît, il est mis en valeur. Nous pensons qu’il n’est pas utile d’aller plus loin à ce stade.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Madame la secrétaire d’État, le fait de comptabiliser 594 votes blancs dans une commune n’a aucun effet pour l’électeur. Une personne vote blanc, parce qu’elle n’a pas envie de voter pour vous ou pour moi. Si nous ne sommes que deux candidats, l’un de nous deux sera forcément élu au premier tour. En revanche, si l’on tient compte des 30 % de votes blancs au premier tour, nous nous retrouverons au second tour, et les électeurs ayant voté blanc auront le sentiment d’avoir un rôle dans la démocratie. La loi de 2014 comptabilise simplement le vote blanc, ce n’est pas ce qu’attendent les gens. C’est une loi sympathique, mais qui ne va pas assez loin.
Aujourd'hui, il faut franchir un pas. Le vote blanc concourt à la vraie démocratie puisque toutes les sensibilités, y compris le fait de ne pas voter pour des candidats qui ne conviennent pas aux citoyens, sont prises en compte.
Imaginez l’élection présidentielle : je ne citerai pas de nom, mais cela ferait plaisir aux gens de pouvoir voter blanc et qu’un beau chiffre s’inscrive sur leur téléviseur au journal de 20 heures ! Moi, cela me plairait beaucoup.
M. Jean-Claude Carle. Excellent amendement !
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Cet amendement soulève un réel problème. En effet, la loi de février 2014 permet de comptabiliser le vote blanc, mais elle ne va pas plus loin.
L’amendement proposé par notre collègue a du sens. Son dispositif peut donner davantage envie de voter, alors que nous regrettons souvent l’importance de l’abstention, qui est un vrai problème dans notre démocratie, aux élections locales comme aux élections nationales.
Si je peux comprendre l’avis qu’a émis le rapporteur, au nom de la commission des lois, j’estime qu’il faut prendre le recul nécessaire, raison pour laquelle je soutiendrai cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Votre amendement, mon cher collègue, est assez cohérent avec l’amendement tendant à rendre le vote obligatoire que vous avez présenté, puis retiré tout à l'heure, même s’il peut aussi être discuté indépendamment de celui-ci.
Nous avons déjà beaucoup débattu du vote blanc.
Si je souscris largement à ce qu’a dit notre collègue Esther Benbassa, qui a élargi le débat au-delà de la seule question des listes électorales, sur la crise du politique, il est vrai qu’il faut se demander comment faire en sorte que les choix opérés au moment des élections puissent réellement changer la vie. Les électeurs doivent avoir le sentiment qu’ils peuvent peser sur leur environnement par leur vote. Ce n’est pas le cas actuellement, et c’est ce qui explique la crise de crédibilité de la vie politique.
Cependant, je ne pense pas que nous pourrons changer vraiment les choses en rendant le vote obligatoire ou en reconnaissant le vote blanc. J’estime, au contraire, que, en leur laissant le choix entre une solution A, une solution B et le vote blanc, on demande surtout aux électeurs d’exprimer leurs états d’âme. Or s’ils ont préféré le vote blanc à l’expression d’un choix, l’une des deux solutions proposées s’imposera finalement à eux !
Par conséquent, je crois qu’il vaut mieux demander aux électeurs de choisir entre une solution A et une solution B. S’ils ne choisissent pas, ce sont les autres qui choisiront pour eux. Il importe vraiment de ne pas confondre une élection et l’expression d’états d’âme.
Cela dit, toute la réflexion sur la manière de faire évoluer les institutions de façon à mieux répondre aux attentes des citoyens est légitime. Il y aurait beaucoup à dire à ce sujet…
Quoi qu’il en soit, je ne crois vraiment pas que votre système constitue une solution. Il permettra simplement de cacher le malaise.
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je soutiendrai l’amendement de mon collègue Jean-Pierre Grand, qui met le doigt sur un problème essentiel : l’adhésion à notre système démocratique.
Nous devons soutenir la participation, en particulier des jeunes générations, en l’encourageant. À cet égard, la reconnaissance du vote blanc est un élément déterminant.
Bien évidemment, l’amendement n’est pas parfait : on ne peut pas institutionnaliser la reconnaissance du vote blanc sans travailler davantage sur la question, sans mesurer effectivement ses effets. Que faire, par exemple, s’il y a plus de 50 % de votes blancs ? Dans un article, j’avais suggéré une réponse à cette question voilà quelques mois – je n’en parlerai pas aujourd'hui, car cela impliquerait que nous discutions de beaucoup d’éléments.
En tout état de cause, je crois vraiment que la question de la reconnaissance du vote blanc est un sujet essentiel. Dès lors, j’appelle mes collègues à voter pour cet amendement.
M. Gérard Bailly. Nous le ferons !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. Chers collègues, je voudrais vraiment appeler votre attention sur les effets qu’aurait l’adoption de cet amendement.
D’abord, sur le plan technique : il faudrait reconsidérer la plupart des seuils.
Ensuite, alors que notre objectif est d’améliorer l’image de la démocratie représentative, imaginez les réactions que pourrait susciter l’élection d’une personne n’ayant recueilli que 12 %, voire 3 % des voix…
Pour reprendre ce qu’a dit Jean-Yves Leconte, il s'agit de désigner des élus. Il ne s'agit pas de se faire plaisir. Réfléchissez bien à ce que ça veut dire !
Cher collègue Jean-Pierre Grand, ce n’est pas moi qui dirai que le fonctionnement de notre démocratie ne pose pas de problèmes, mais je considère que ce n’est pas avec de telles mesures techniques qu’on les réglera.
Franchement, il ne faudrait pas, pour une manifestation affective, même très légitime, amoindrir encore le caractère représentatif et la valeur de ceux qui seront élus.
Au demeurant, que chacun vote en son âme et conscience !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Je souhaite ajouter un élément au débat.
Aller plus loin que ce que prévoit la loi du 21 février 2014, comme vous le souhaitez, monsieur Grand, en comptabilisant les votes blancs parmi les suffrages exprimés, aurait pour conséquence de rendre plus difficile à atteindre le seuil de 5 % dans les scrutins à la proportionnelle. Par conséquent, les formations politiques minoritaires, celles qui recueillent le moins de voix, auraient un accès moins aisé à l’élection qu’actuellement – peut-être même n’y auraient-elles plus accès du tout.
Cette hypothèse est-elle souhaitable quand on sait que la proportionnelle vise justement à permettre à un plus grand nombre de sensibilités politiques d’être représentées ? Certaines seraient de fait éliminées par la reconnaissance du vote blanc, qui, par définition, n’a pas de candidat pour le représenter.
Cela porterait atteinte à la représentation de la diversité politique qui s’exprime dans notre pays à l’occasion des suffrages pour lesquels la proportionnelle est en vigueur ainsi qu’à la représentation de la diversité des points de vue. Cette limite me semblait devoir être citée.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. La différenciation entre votes blancs et votes nuls qui existe depuis quelques années n’a, semble-t-il, rien changé : on constate que la somme des votes blancs et nuls n’est pas plus élevée qu’auparavant. Ce décompte séparé n’a donc rien apporté.
En revanche, je crains que l’adoption de la proposition de notre collègue ne produise l’effet que vient d’expliquer Mme la secrétaire d'État : des candidats pourraient être déclarés élus alors qu’ils sont arrivés en deuxième position, derrière « M. Blanc ».
M. Jean-Pierre Grand. Et alors ?
M. Jean-Claude Carle. Où est le problème ?
M. Yves Détraigne. Les électeurs ont tendance à moins voter qu’il y a une vingtaine d’années. Nous entendons déjà parfois dire que tel ou tel élu n’est pas très légitime, parce qu’il n'a finalement recueilli que 30 % ou 40 % des votes. Si l’on prend en compte les bulletins blancs pour la détermination des suffrages exprimés, on affaiblira encore la légitimité de celui qui est élu. Je ne suis pas sûr que l’on rendrait alors service à notre démocratie.
Il ne faut toucher aux règles existant en la matière qu’avec une grande prudence. En l’état actuel des choses, comme M. le rapporteur et Mme la secrétaire d'État, je m’oppose à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié bis.
9
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de modernisation du droit du travail n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
M. Robert del Picchia. C’est étonnant…
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.)
PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
10
Modalités d'inscription sur les listes électorales
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi et de deux propositions de loi organique dans les textes de la commission modifiés
proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales (suite)
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales.
Nous poursuivons l’examen du texte de la commission.
Article 1er
La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code électoral est ainsi modifiée :
1° A Le second alinéa de l’article L. 9 est supprimé ;
1° L’article L. 11 est ainsi modifié :
aa) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
a) Au premier alinéa, après le mot : « électorale », sont insérés les mots : « de la commune » ;
a bis) Le 1° est complété par les mots : « et leurs enfants de moins de 26 ans » ;
b) (Supprimé)
b bis) Après le même 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Ceux qui, sans figurer au rôle d’une des contributions directes communales, ont, pour la cinquième fois sans interruption l’année de la demande d’inscription, la qualité d’indivisaire, de gérant ou d’associé majoritaire ou unique d’une société figurant au rôle, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État ; »
c) À la fin du 3°, le mot : « publics » est supprimé ;
d) Les deux derniers alinéas sont supprimés ;
e) Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Sous réserve qu’elles répondent aux autres conditions exigées par la loi, sont inscrites d’office sur la liste électorale de la commune de leur domicile réel, en vue de participer à un scrutin :
« 1° Sans préjudice du 3° de l’article L. 30, les personnes qui ont atteint l’âge prévu par la loi pour être électeur à la date de ce scrutin ou, lorsque le mode de scrutin permet un second tour, à la date à laquelle ce second tour a vocation à être organisé ;
« 2° Sans préjudice du 4° de l’article L. 30, les personnes qui viennent d’acquérir la nationalité française. » ;
2° Les articles L. 11-1 et L. 11-2 sont abrogés.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 15 est présenté par M. P. Dominati.
L'amendement n° 22 rectifié sexies est présenté par MM. Maurey, Détraigne, Longeot et Médevielle, Mme Morin-Desailly, MM. Gabouty et Cigolotti, Mme Férat, MM. Marseille et Tandonnet, Mme Gourault, M. Guerriau, Mme Billon, M. Savin, Mme Jouanno et M. L. Hervé.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 7
Rétablir le b dans la rédaction suivante :
b) À la première phrase du 2°, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter l’amendement n° 15.
M. Philippe Dominati. Cet amendement tend à réduire la durée d’inscription nécessaire au rôle d’une des contributions directes communales pour être électeur dans une commune. La commission a rejeté cette demande au principe que l’électeur vote à l’endroit où il vit.
Nous avons rarement l’occasion de débattre des modalités d’inscription sur les listes électorales. Or, au moment où l’on veut inciter nos concitoyens à retrouver le chemin des urnes, il me semble important que les élus fassent preuve d’exemplarité.
À ma connaissance – j’ai longtemps été élu du VIIIe arrondissement de Paris –, les Présidents de la République, quels qu’ils soient, n’ont jamais voté là où ils vivaient. Ils ont voté à Colombey-les-Deux-Églises, à Cajarc, à Chamalières… Le Président Mitterrand, peut-être en raison de la taxe de séjour, a même voté à l’hôtel du Vieux Morvan ! (Sourires.)
Aucun n’a eu ce souci d’exemplarité. Il ne faudrait pas que le code électoral ne s’applique qu’aux quidams, c’est-à-dire à tout un chacun, et pas aux puissants. Je ne songe pas qu’aux Présidents de la République, mais aussi à grand nombre de ministres et de parlementaires.
Beaucoup des électeurs d’une grande ville comme Paris ont des attaches en province, soit que leur famille y réside, soit qu’ils participent à un projet local, par exemple.
Je voulais évoquer cette question devant le rapporteur et le président de la commission des lois. Nous avons l’occasion de modifier un principe essentiel de notre droit qui n’est pas respecté au plus haut niveau de l’État. Le simple citoyen doit pouvoir profiter des mêmes avantages.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l'amendement n° 22 rectifié sexies.
M. Henri Tandonnet. Lors de la discussion générale commune, tous les orateurs se sont félicités des dispositions de ce texte, qui permettent de simplifier et de faciliter les inscriptions sur les listes électorales. Dès lors, la commission et le Gouvernement ne sauraient être défavorables à cet amendement, qui s’inscrit dans le droit fil de cette proposition de loi.
Nous soulignons une anomalie : il est plus facile de se présenter aux élections municipales – il suffit d’avoir été inscrit au rôle d’une des contributions directes communales au 1er janvier de l’année en cours – que d’être électeur. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons réduire de cinq à deux ans la durée d’inscription nécessaire à ce rôle pour qu’un citoyen soit reconnu comme contribuable local d’une commune et donc électeur.
Il existe un lien fort entre les contributions et la commune, puisque la commune vit de ces contributions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. La commission est défavorable à ces deux amendements.
La situation actuelle n’est pas exactement celle qui a été présentée. Il existe aujourd’hui deux façons d’être électeur d’une commune : y résider ou en être contribuable. Ce dernier cas permet d’être électeur de sa « commune de cœur », pour reprendre l’expression qu’Alain Vasselle a utilisée en commission. Je pense qu’il s’agit d’une bonne disposition – cinq ans pour montrer son attachement, ça ne me semble pas excessif.
Par ailleurs, en décidant qu’il suffit de payer des impôts dans une commune depuis deux ans pour pouvoir voter au bon moment nous encouragerions ce que notre collègue Christophe-André Frassa a appelé le « tourisme électoral ». Je ne crois pas que ce soit une bonne idée.
Le droit en vigueur remplit d’autant plus sa fonction que la loi favorise l’inscription au titre de la résidence beaucoup plus rapidement. Quand on est attaché à ce qu’est une commune, je crois que ce petit effort a du sens.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage. Le Gouvernement est favorable à ces deux amendements, qui s’inscrivent dans le droit fil de ce texte. Il s’agit en effet de simplifier et de faciliter l’inscription sur les listes électorales.
Pour être inscrit sur la liste électorale d’une commune, il faut soit y résider, soit y verser des contributions. Or si l’on verse des contributions directes locales, c’est soit à raison d’un investissement, soit à raison d’une activité économique sur un territoire donné. Dès lors, le critère du lien d’attachement me semble tout à fait fondé.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 15 et 22 rectifié sexies.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. L'amendement n° 23 rectifié sexies, présenté par MM. Maurey, Longeot et Médevielle, Mme Morin-Desailly, MM. Détraigne, Gabouty, Cigolotti et Tandonnet, Mme Férat, MM. Marseille et Guerriau, Mme Billon, M. Savin, Mme Jouanno et M. L. Hervé, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer le mot :
cinquième
par le mot :
deuxième
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Cet amendement, très proche de celui que je viens de présenter, vise à permettre aux porteurs de parts sociales – je pense par exemple aux parts de SCI – de bénéficier de la même réduction de délai. En effet, il existe également un lien direct entre les impositions locales et la commune.
Cet amendement, qui procède du même esprit que le précédent, devrait donc être adopté.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 23 rectifié sexies.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 16 rectifié, présenté par MM. Genest, Darnaud, G. Bailly, Magras, Legendre, Pellevat, Bouchet, Carle, Lemoyne et Pierre, Mme Morhet-Richaud, M. Huré, Mme Gruny et MM. Kennel, Laménie, D. Laurent et Raison, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer les mots :
d'indivisaire,
La parole est à M. Jacques Genest.
M. Jacques Genest. Par cet amendement, je propose de supprimer la référence aux indivisaires et d’en rester aux actionnaires majoritaires ou uniques.
Si une commune de cent à deux cents électeurs – il y en a beaucoup en France – compte trois indivisions, en bâti ou en non bâti, cela fait, à raison de cinq indivisaires par indivision, quinze électeurs. Si l’on ajoute les conjoints, qui peuvent voter, nous arrivons à trente électeurs.
Pareille situation peut complètement désorganiser le corps électoral d’une commune rurale, et ce d’autant plus que nous venons de réduire la durée d’inscription sur le rôle des contributions directes locales pour devenir électeur de la commune. Le pouvoir risque donc d’échapper complètement aux habitants des communes rurales comptant beaucoup de résidences secondaires et d’indivisions.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Yves Collombat, rapporteur. Il est favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 37, présenté par MM. Leconte et Sueur, Mmes Conway-Mouret et Lepage, M. Yung et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« … Ceux qui détiennent la nue-propriété d’un bien immobilier depuis cinq ans au moins, l’année de la demande d’inscription, et s’ils ne résident pas dans la commune, ont déclaré vouloir y exercer leurs droits électoraux ; »
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement vise à prendre en compte un état de fait.
Nous nous sommes rendu compte, lors de nos travaux en commission, que beaucoup des personnes inscrites sur les listes électorales sont non pas contribuables de la commune, mais nus-propriétaires. En adoptant le texte en l’état, ces personnes risquent d’être rayées de ces listes. Or nous souhaitons laisser les choses en l’état.