Sommaire
Présidence de M. Claude Bérit-Débat
Secrétaires :
MM. Jean Desessard, Jackie Pierre.
2. Demandes d’avis sur des projets de nomination
3. Liberté de création, patrimoine et architecture. – Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 433 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Rejet.
Amendement n° 494 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 225 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l'article 2 bis
Amendement n° 226 de M. Patrick Abate. – Rejet.
PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron
Amendement n° 227 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Amendement n° 80 rectifié de M. David Assouline. – Devenu sans objet.
Amendement n° 231 de M. Patrick Abate. – Devenu sans objet.
Amendement n° 81 rectifié bis de M. David Assouline. – Devenu sans objet.
Amendement n° 230 de M. Patrick Abate. – Devenu sans objet.
Amendement n° 82 rectifié de M. David Assouline. – Devenu sans objet.
Amendement n° 232 de M. Patrick Abate. – Devenu sans objet.
Amendement n° 381 de Mme Marie-Christine Blandin. – Devenu sans objet.
Amendement n° 229 de M. Patrick Abate. – Devenu sans objet.
Amendement n° 233 de M. Patrick Abate. – Devenu sans objet.
Amendement n° 228 de M. Patrick Abate. – Devenu sans objet.
Amendement n° 83 rectifié de M. David Assouline. – Devenu sans objet.
Amendement n° 84 rectifié de M. David Assouline. – Devenu sans objet.
Article additionnel après l’article 3
Amendement n° 234 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 86 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur de la commission de la culture
Amendement n° 181 rectifié de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 436 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Retrait.
Amendement n° 235 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 91 rectifié bis de M. David Assouline. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l'article 5
Amendement n° 87 rectifié bis de M. Claude Raynal. – Rejet.
Amendement n° 182 rectifié de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Adoption de l’article.
PRÉSIDENCE DE M. Claude Bérit-Débat
Articles additionnels après l'article 6
Amendement n° 88 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 89 rectifié de M. David Assouline. – Retrait.
Amendement n° 383 du Gouvernement. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
L’article demeure supprimé.
Article additionnel après l'article 6 bis
Amendement n° 292 rectifié ter de Mme Marie-Annick Duchêne. – Retrait.
Amendement n° 183 rectifié de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 184 rectifié de Mme Colette Mélot. – Retrait.
Amendement n° 496 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 186 rectifié bis de Mme Colette Mélot. – Adoption.
Amendement n° 238 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Amendement n° 205 rectifié de M. Philippe Bonnecarrère. – Non soutenu.
Amendement n° 493 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication
Amendement n° 31 de M. Robert Navarro. – Non soutenu.
Amendement n° 333 rectifié de Mme Colette Mélot. – Adoption.
PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron
Adoption de l’article modifié.
Demande d’examen séparé d’amendements. – Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture ; Mme la présidente. – Adoption.
4. Communication relative à des commissions mixtes paritaires
5. Communications du Conseil constitutionnel
Suspension et reprise de la séance
7. Liberté de création, architecture et patrimoine. – Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 312 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 324 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 298 rectifié ter de Mme Marie-Annick Duchêne. – Retrait.
Amendement n° 208 rectifié de M. Philippe Bonnecarrère
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 208 rectifié de M. Philippe Bonnecarrère (suite). – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 325 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 498 de la commission. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 434 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Adoption.
Amendement n° 327 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 499 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 435 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Retrait.
Amendement n° 239 de M. Patrick Abate. – Adoption.
Amendement n° 500 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l'article 9
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur
Amendement n° 92 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 99 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 93 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 94 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 95 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 97 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 98 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 96 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 317 de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 100 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 9 bis
Amendement n° 242 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Article 9 ter (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 101 rectifié de M. David Assouline. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles 10, 10 bis et 10 ter – Adoption.
Amendement n° 414 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 497 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 10 quinquies (nouveau)
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur
Amendement n° 102 rectifié de M. David Assouline. – Rejet par scrutin public.
Adoption de l’article.
Amendement n° 330 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 331 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 103 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 104 rectifié de M. David Assouline. – Rejet.
Amendement n° 209 rectifié de M. Philippe Bonnecarrère. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 495 de la commission. – Retrait.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l'article 10 nonies
Amendement n° 373 de Mme Marie-Christine Blandin. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 375 de Mme Marie-Christine Blandin. – Rejet.
Amendement n° 374 de Mme Marie-Christine Blandin. – Rejet.
Amendement n° 491 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur
Amendement n° 106 rectifié de M. David Assouline. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 492 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 244 de M. Patrick Abate. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 245 de M. Patrick Abate. – Retrait.
Amendement n° 246 de M. Patrick Abate. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
8. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Claude Bérit-Débat
vice-président
Secrétaires :
M. Jean Desessard,
M. Jackie Pierre.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Demandes d’avis sur des projets de nomination
M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date du 10 février 2016, M. le Premier ministre a porté à la connaissance de M. le président du Sénat que M. le Président de la République envisage de nommer aux fonctions de membre du Conseil constitutionnel M. Laurent Fabius, en remplacement de M. Jean-Louis Debré.
Conformément à l’article 56 de la Constitution, la procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13 de la Constitution est applicable à cette nomination.
En conséquence, le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée.
La demande d’avis a été transmise à la commission des lois qui procédera à l’audition publique de M. Laurent Fabius.
Conformément aux mêmes dispositions, M. le président du Sénat a saisi la commission des lois pour qu’elle procède à l’audition et émette un avis sur la nomination de M. Michel Pinault, que M. le président du Sénat envisage de nommer aux fonctions de membre du Conseil constitutionnel, en remplacement de M. Renaud Denoix de Saint-Marc.
Acte est donné de cette communication.
3
Liberté de création, architecture et patrimoine
Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (projet n° 15, texte de la commission n° 341, rapport n° 340, tomes I et II).
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
TITRE Ier (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES À LA LIBERTÉ DE CRÉATION ET À LA CRÉATION ARTISTIQUE
Chapitre Ier (suite)
Dispositions relatives à la liberté de création artistique
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre Ier, à l’article 2 bis.
Article 2 bis
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° (nouveau) Le deuxième alinéa du III de l’article L. 1111-9 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Chaque conférence territoriale de l’action publique comprend au moins une commission thématique dédiée à la culture. » ;
2° Après la première phrase du troisième alinéa du III de l’article L. 1111-9-1, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Au moins une fois par an, il inscrit à l’ordre du jour un débat sur la politique en faveur de la culture. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 433 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, prévoit que les conférences territoriales de l’action publique – les CTAP – s’organisent librement, ce qui n’est pas compatible avec l’obligation de création d’une commission de la culture en leur sein.
La création de commissions dédiées auprès des CTAP – lesquelles sont présidées par le président du conseil régional – comporte un risque de mise sous tutelle de la région, alors même que la culture demeure une compétence partagée entre les différentes collectivités.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer l’obligation de création d’une commission de la culture au sein des conférences territoriales de l’action publique.
Toutefois, la politique en faveur de la culture reste inscrite, au moins une fois par an, à l’ordre du jour des CTAP.
Par ailleurs, les CTAP peuvent librement décider de leur organisation en créant, si elles le souhaitent, une commission dédiée à la culture.
M. le président. L'amendement n° 494, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer la référence :
L. 1111-9
par la référence :
L. 1111-9-1
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Il s’agit de la correction d’une erreur matérielle, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 225, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette commission comprend des représentants de l’État, des collectivités territoriales, des organisations culturelles et professionnelles et des usagers du service public de la création artistique.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous souhaitons, par cet amendement, renforcer encore davantage une disposition introduite lors de l’examen du projet de loi en commission du Sénat.
Cette disposition, que nous avons saluée et soutenue, et dont nous avions nous-mêmes sollicité l’intégration dans le texte, vise à créer au moins une commission permanente dédiée à la culture dans les conseils régionaux, plus précisément, dans les conférences territoriales de l’action publique.
Il ne fait aucun doute que la région, chef de file des politiques en matière culturelle et artistique, ne peut piloter efficacement ces dernières par le biais d’un seul débat annuel. Dès lors que le projet de loi prévoit la création d’une commission thématique dédiée à la culture, il faut donner corps à cette instance.
Notre vision est celle d’une politique culturelle et artistique coconstruite par l’État, les collectivités territoriales, les structures culturelles et professionnelles et les usagers. De ce point de vue, et dans la perspective d’une mise en place rapide de ces commissions permanentes, nous proposons que la loi en fixe la composition.
N’en déplaise à certains, et contrairement à ce qu’a pu soutenir Mme Laborde, notre ambition n’est pas de porter atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales. Nous ne souhaitons pas non plus donner un cadre strict, inadapté et rigide à l’application d’une mesure qui, de toute façon, ne saurait se décliner uniformément dans toutes les régions.
Ce que nous revendiquons, c’est la possibilité, pour le législateur, garant de la bonne application de la loi, de fixer un cadre global, sur lequel chaque conseil régional pourra s’appuyer en y apportant ses modifications. Telle est l’ambition réelle de notre amendement, qui vise à préciser que les commissions thématiques dédiées à la culture se composent à la fois de représentants de l’État – en l’occurrence, des directions régionales des affaires culturelles –, des collectivités territoriales, des organisations culturelles et professionnelles, et des usagers du service public de la création artistique.
Cette mesure doit permettre à chaque acteur concerné par la politique de la culture et des arts, laquelle est mise en œuvre au sein des régions, d’avoir voix au chapitre et de participer pleinement à la conception de ladite politique – gage, pensons-nous, de son efficacité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 433 rectifié et 225 ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le sujet des conférences territoriales de l’action publique a été largement et à de nombreuses reprises évoqué, notamment lors de l’examen de la loi NOTRe. Dans chaque région va être installée une telle conférence territoriale.
Nous avons souhaité non seulement qu’un débat sur la politique culturelle soit inscrit à l’ordre du jour de la CTAP au moins une fois par an, mais aussi qu’une commission de la culture soit créée dans chaque conférence, afin d’obliger celle-ci à des débats réguliers, s’agissant d’une compétence dont nous avons voulu – je le rappelle – qu’elle soit partagée, tout comme le sport et le tourisme. À l’occasion de l’examen d’autres textes sera d’ailleurs probablement proposée la création de commissions dédiées au tourisme, voire au sport.
Quoi qu’il en soit, nous défendons le maintien, dans les conférences territoriales, d’une commission de la culture. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 433 rectifié présenté par Mme Laborde, qui souhaite supprimer cette disposition.
Quant à l’amendement n° 225, il tend à préciser la composition de la commission de la culture de la conférence territoriale.
Cette mesure relève du futur règlement intérieur des conférences territoriales. Il leur reviendra d’établir cette composition, de concert avec les personnalités représentantes du territoire et avec les élus locaux.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 433 rectifié : je partage la position défendue par ses auteurs.
La loi NOTRe prévoit en effet que les CTAP s’organisent librement. Par ailleurs, l’article 2 bis du présent projet de loi dispose que la politique culturelle fait l’objet, au moins une fois par an, d’un débat au sein des CTAP. Cela me paraît de nature à mobiliser l’ensemble des élus – et pas seulement ceux qui sont chargés de ce thème – autour des enjeux culturels dans les territoires.
En revanche, je ne souscris pas à l’intention de créer une commission spécifique. Nous avons eu, sur cette question, de longs débats à l’Assemblée nationale. J’émets par conséquent, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur l’amendement n° 494.
Il en est de même sur l’amendement n° 225.
Je partage certes la volonté – je l’ai dit tout à l’heure – d’organiser régulièrement des débats nourris réunissant l’ensemble des partenaires concernés, publics et privés, afin de permettre une réelle coconstruction des politiques culturelles territoriales. Mais, je le répète, les CTAP s’organisent librement : ce principe a été posé par la loi NOTRe. Je pense donc qu’il faut laisser les CTAP organiser elles-mêmes le débat, en lien avec l’ensemble des acteurs cités dans cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Il est extrêmement important que les conférences territoriales de l’action publique comprennent une commission dédiée à la culture. Je rejoins en cela l’avis de M. le rapporteur – nous nous y sommes d’ailleurs ralliés lors de l’examen du texte en commission.
Pourquoi ? Songez, mes chers collègues, que les conférences territoriales de l’action publique seront appelées à traiter de l’ensemble des politiques publiques mises en œuvre sur un territoire donné – en l’occurrence, la région –, problème encore aggravé par l’augmentation de la taille des régions et par l’importance des transferts de compétences.
Ma région, la Bretagne, a déjà mis en place, à titre expérimental, une forme de « CTAP culture ». Je peux vous dire que celle-ci s’avère très précieuse pour l’organisation de l’action publique en matière culturelle.
N’avons-nous pas précisément, à l’occasion de la discussion de l’’article 2 du présent projet de loi, défendu le principe de la coopération entre les différents acteurs publics ?
Une telle structure permet à ces derniers de s’organiser, de discuter, de dresser des constats, afin, ensuite – c’est notre souhait à tous –, que les politiques publiques soient articulées sur le territoire de la région.
Le principe de libre administration des collectivités territoriales n’est pas remis en cause par la création d’une commission de la culture. Celle-ci devrait plutôt, me semble-t-il, contribuer à renforcer la coopération entre les différents acteurs de la culture.
L’objet de l’amendement n° 225 présenté par Mme Gonthier-Maurin est intéressant, mais la composition d’une commission dédiée à la culture relève vraiment du règlement intérieur des futures conférences territoriales de l’action publique, qui auront à charge d’organiser l’action publique.
Que puissent y être associés, dans un second temps, les professionnels concernés, dans le cadre de groupes de travail, c’est heureux ! Cela se fera naturellement : telle est précisément l’ambition des « CTAP culture ».
Nous n’avons pas souhaité, par ailleurs, supprimer la disposition qui prévoit l’inscription à l’ordre du jour de la conférence territoriale, au moins une fois par an, d’un débat sur les enjeux culturels.
Mon groupe rejoint donc, sur les amendements nos 433 rectifié, 494 et 225, les avis émis par M. le rapporteur.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Je rappelle à Mme la ministre que, à deux reprises, en première et en deuxième lectures de la loi NOTRe, le Sénat avait voté en faveur de la création de cette commission dédiée à la culture au sein de la CTAP.
Cette disposition avait été supprimée à l’occasion des travaux de la commission mixte paritaire, mais tant la commission de la culture que la commission des lois du Sénat l’avaient adoptée, pour les raisons simples qu’ont énoncées successivement M. le rapporteur et Mme Robert.
À l’heure de l’installation des nouvelles grandes régions, mais également de l’arrivée des nouvelles équipes dans les départements, nous éprouvons, plus que jamais, le besoin de disposer d’un lieu de rencontre, de partage des analyses et de répartition des compétences – d’autant que si la loi NOTRe prévoit strictement, dans certains domaines, la répartition des compétences entre les différents acteurs publics, elle fait de la culture, du sport et du tourisme des compétences partagées entre les régions et les départements.
Tout le monde ne pourra peut-être pas continuer à tout faire, mais il faut au moins garantir la continuité des politiques culturelles ! Les élus d’un territoire donné doivent donc pouvoir se rencontrer, afin d’organiser la poursuite d’un certain nombre de missions tout à fait essentielles.
Je le redis avec force, madame la ministre : lors de l’examen de la loi NOTRe, le Sénat avait déjà souhaité la création de cette commission de la culture au sein de la CTAP.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’esprit de notre amendement s’inscrit en réalité dans la même veine que les idées qui viennent d’être défendues par Mme Morin-Desailly ou par Mme Robert.
Notre logique consiste non pas à rigidifier le texte, mais, tout simplement, à reconnaître que si l’État n’est pas le seul responsable de l’organisation de la politique publique du pays – il travaille en coopération, notamment, avec les collectivités territoriales –, il lui incombe malgré tout de fixer un cap, et de veiller au respect d’une certaine unicité de traitement.
C’était le sens de notre amendement ; notre débat a au moins eu le mérite de le clarifier.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Pour éviter les malentendus, je tiens à préciser que je partage sur le fond l’opinion émise par divers orateurs : je juge indispensable que tous les acteurs impliqués dans les politiques culturelles dans nos territoires puissent, à certaines occasions, se réunir, échanger leurs points de vue et définir ensemble les objectifs et les modalités de leur action.
Cependant, le Gouvernement a tranché quant aux modalités de telles réunions – ce débat a eu lieu lors de la discussion de la loi NOTRe ; c’est la raison pour laquelle, par cohérence avec la position alors adoptée par le Gouvernement, j’ai émis un avis favorable sur l’amendement n° 433 rectifié et défavorable sur les amendements nos 494 et 225.
M. le président. Je mets aux voix l’article 2 bis, modifié.
(L’article 2 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 bis
M. le président. L’amendement n° 226, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de mettre en place un fonds de soutien de la musique financé par une taxe affectée sur l’ensemble de l’activité musicale du spectacle vivant et enregistré.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à demander au Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la future loi, la remise au Parlement d’un rapport sur l’opportunité de mettre en place un fonds de soutien de la musique financé par une taxe affectée sur l’ensemble de l’activité musicale du spectacle vivant et enregistré.
Beaucoup de bouleversements sont en cours dans le secteur de la musique. Des mesures sont prises, en matière de streaming notamment, mais elles demeurent à nos yeux insuffisantes, alors que nous ne sommes qu’aux prémices de la révolution numérique et de ses conséquences dans le domaine de la musique.
Nous souhaiterions qu’un travail plus approfondi soit mené sur ces questions, afin de réfléchir non seulement aux dispositions qui devraient être prises, mais également au financement de celles-ci.
Un fonds de soutien à l’emploi est certes prévu par les accords Schwartz. Cela dit, ces mesures ne permettent pas à notre avis de traiter dans la durée l’ensemble des enjeux. Nous souhaitons donc que soit engagé ce travail, qui pourrait aboutir à la remise au Parlement d’un rapport portant sur la nécessité d’un fonds de soutien pour la musique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Mon cher collègue, votre amendement est loin de manquer d’intérêt. Effectivement, l’évolution technologique mérite qu’on aille plus loin et qu’on soutienne la création musicale.
J’ai pourtant deux objections à formuler. Tout d’abord, une fois encore, il s’agit ici d’une demande de rapport. Or, comme vous le savez, nous entendons limiter ces demandes et nous les avons même toutes supprimées du présent texte.
Ma seconde objection repose sur l’existence, que vous avez rappelée, d’un fonds de soutien à l’emploi dans ce secteur. Quoique son montant soit encore modeste – 2 millions d’euros –, il permettra peut-être d’engager une dynamique.
En tout état de cause, puisque cet amendement a pour objet une demande de rapport, la commission émet à son sujet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. La filière musicale a effectivement vu ses modèles économiques profondément bouleversés par la transition numérique : vous l’avez souligné, monsieur Laurent. Cette transition numérique, en révolutionnant les usages, entraîne la convergence de nombreux métiers, notamment, le développement des stratégies dites « 360 degrés ». C’est dans ce contexte particulier que j’ai souhaité engager la structuration d’un ensemble cohérent de mesures pour essayer de maintenir, voire d’accroître, les investissements des acteurs de cette filière, c’est-à-dire leur prise de risque artistique.
Cette année – cela vient d’être rappelé –, un fonds de soutien à la transition numérique a été créé au sein de mon administration. J’ai également défendu au Parlement, afin de soutenir les nouveaux talents qui sont indispensables au dynamisme du secteur, un crédit d’impôt portant sur le spectacle vivant musical et de variétés, et ce après avoir renforcé pour la même raison, en 2015, le crédit d’impôt en faveur de la production d’œuvres phonographiques. Les crédits consacrés au soutien à l’export de la musique ont par ailleurs été quasiment doublés.
C’est dans cette même logique d’accompagnement des mutations que le ministère de la culture et de la communication a engagé une concertation avec les professionnels pour rationaliser et mutualiser les organismes d’intérêt général qui sont au service de la filière musicale. J’ai inscrit cet objectif de nécessaire transversalité dans la lettre de mission du directeur du Centre national de la chanson, des variétés et du jazz.
Par cet amendement, vous proposez que le Gouvernement consacre un rapport à la pertinence de la création d’un fonds de soutien à la filière musicale. Dans le contexte que je viens de rappeler, il me semblerait regrettable de restreindre la réflexion à un instrument particulier – en l’occurrence un fonds de soutien – et à un mode de financement spécifique : une taxe affectée prélevée sur l’ensemble des activités de la filière.
Vous connaissez mon engagement dans le combat visant à faire reconnaître le transfert de valeurs qu’a provoqué la transition numérique au profit des intermédiaires techniques. Ces derniers, que l’on nomme les « géants du Net », ne participent de fait pas du tout au financement de la filière ; en tout cas, ils ne sont pas pris en compte parmi les acteurs sur lesquels cette taxe affectée serait prélevée.
Mon combat, en France comme à l’échelon européen, vise, d’une part, à responsabiliser ces acteurs et, d’autre part, à trouver les moyens d’une juste taxation de ces nouvelles activités qui ne contribuent aujourd’hui en rien à nos politiques publiques.
Pour l’ensemble de ces raisons, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement y sera défavorable.
M. le président. Monsieur Laurent, l’amendement n° 226 est-il maintenu ?
M. Pierre Laurent. Oui, monsieur le président. Je ne mésestime pas les efforts engagés ; il s’agit, dans notre esprit, non pas de les restreindre, mais plutôt de nous aider à avoir une vision collective cohérente de ce que pourrait être notre politique de soutien à long terme à la filière musicale. En effet, à l’heure actuelle, on traite tel ou tel sujet, on réfléchit dans tel ou tel domaine, mais on manque d’une vision cohérente. Nous entendons, par cet amendement, contribuer à porter une ambition à long terme.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 226.
(L’amendement n’est pas adopté.)
(Mme Françoise Cartron remplace M. Claude Bérit-Débat au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron
vice-présidente
Mme la présidente. L’amendement n° 227, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 2 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les secteurs conjuguant la création, la production culturelle et la commercialisation de biens et de services au profit culturel protégés par le droit d’auteur et le droit voisin constituent les secteurs de la culture exclus de toute négociation commerciale européenne et internationale.
Les entreprises de ces secteurs sont reconnues comme des services d’intérêt général au sens communautaire.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à introduire dans cet important projet de loi un article additionnel qui disposerait de manière extrêmement claire que les secteurs conjuguant la création, la production culturelle et la commercialisation de biens et de services au profit culturel protégés par le droit d’auteur et le droit voisin constituent des secteurs exclus de toute négociation commerciale européenne et internationale.
Cela nous paraît essentiel ; la France mène ce combat grâce, certes, à la mobilisation de l’État, mais – il faut le reconnaître –, sous la pression continue des professionnels, qui ont pris l’initiative, depuis maintenant plus d’une décennie, de mobilisations très suivies, afin que notre pays soit à la pointe du combat pour la protection de l’exception culturelle.
Ce combat est évidemment d’une extrême actualité : les négociations sont engagées sur plusieurs traités de libre-échange, en particulier le traité transatlantique. Des annonces ont été faites sur la protection de l’exception culturelle, mais l’opacité de ces négociations nous empêche d’en connaître à coup sûr le résultat. Par ailleurs, au-delà de ces discours, les moyens de détourner les règles en la matière sont très nombreux dans le secteur audiovisuel comme dans beaucoup d’autres.
Il nous semble donc essentiel, au moment où nous discutons d’un important projet de loi sur la protection et la liberté de la création, de réaffirmer en toutes lettres, dans un article explicite, la volonté de la France d’exclure de ces négociations commerciales le secteur culturel.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à introduire dans le texte un article additionnel interdisant de négocier des conventions internationales de nature commerciale concernant le secteur de la création culturelle.
Il n’a pas paru opportun à la commission de limiter le domaine des négociations internationales dans ce projet de loi ordinaire ; cela relève de la Constitution. Par ailleurs, les conventions internationales font l’objet d’une procédure de ratification à laquelle le Parlement est déjà associé.
Dès lors, même si je comprends bien votre intention, mon cher collègue, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Monsieur le sénateur, vous proposez d’exclure du champ des négociations commerciales européennes et internationales les secteurs de la création, de la production et de la commercialisation des biens et services culturels protégés par le droit d’auteur et le droit voisin.
Vous connaissez, je l’espère, mon attachement à la défense de l’exception culturelle et notre énergie commune à en défendre les principes, que ce soit à l’échelon européen ou au plan international.
Néanmoins, comme vous le savez, la loi nationale ne peut pas, à elle seule, restreindre le champ du droit international. Il me semblerait de surcroît dommageable, paradoxalement, d’exclure le sujet culturel de tout débat avec nos partenaires : un tel débat permettrait justement d’inscrire l’exception culturelle dans ces négociations.
Par ailleurs, vous proposez de faire reconnaître les entreprises du secteur culturel comme services d’intérêt général au sens du droit communautaire. Or si le droit de l’Union européenne renvoie au droit national le soin de définir ce type de services, les critères qui ont été fixés par le « paquet Almunia » et rappelés par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne limitent les marges d’appréciation des autorités nationales en la matière.
Ainsi, pour qu’une activité puisse être qualifiée de « service d’intérêt économique général », elle doit avoir un caractère économique, être confiée à une entreprise par un acte exprès de la puissance publique et pouvoir être qualifiée d’« intérêt général ». Certes, de nombreuses entreprises du secteur culturel peuvent répondre à ces critères communautaires ; on ne peut néanmoins en généraliser l’application à l’ensemble des acteurs du secteur.
Il me semble donc préférable, pour éviter toute contradiction avec le droit de l’Union européenne, que cet amendement ne soit pas adopté. Nous avons eu à l’Assemblée nationale un débat extrêmement intéressant sur ce point, notamment avec Mme Buffet, qui a bien voulu retirer l’amendement qu’elle avait défendu à ce propos. Je vous incite donc, monsieur le sénateur, à bien vouloir en faire de même ; à défaut, le Gouvernement sera défavorable à votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Ce sujet, nous le savons, est extrêmement important. L’exception culturelle française est défendue, tant pour le spectacle vivant que pour le domaine du numérique, par de nombreuses politiques publiques.
L’importance de ce sujet est telle qu’on ne peut, à mon sens, le réduire à la discussion de cet amendement qui, comme l’a expliqué Mme la ministre, nous met forcément en porte-à-faux vis-à-vis de l’Union européenne.
Pour autant, mes chers collègues, je suis persuadée que ce point pourrait faire l’objet d’une résolution. Les enjeux européens de la question culturelle et l’exception culturelle française mériteraient un tel texte politique. Nous serons peut-être amenés à en débattre ; quoi qu’il en soit, bien que nous suivions les avis défavorables de M. le rapporteur et de Mme la ministre sur cet amendement, nous estimons que ce sujet mérite un débat beaucoup plus large et une prise de position politique plus forte.
Mme la présidente. Monsieur Laurent, l’amendement n° 227 est-il maintenu ?
M. Pierre Laurent. Je vais le retirer, madame la présidente, mais je n’en pense pas moins que, comme Mme Robert vient de l’exprimer, ce débat est extrêmement important ; j’espère que nous aurons l’occasion de le poursuivre.
Je voudrais vous répondre sur un point, monsieur le rapporteur. Vous avez déclaré que le Parlement serait amené à ratifier les négociations en cours. Cela ne me rassure pas : en effet, la nature du traité transatlantique et, par conséquent, sa ratification même par les parlements nationaux font à l’heure actuelle l’objet d’un débat entre les parties. Aujourd’hui, les négociations sont extrêmement opaques et le mandat sur lequel négocie l’Union européenne l’est tout autant. Dans de nombreux domaines, la représentation parlementaire est mal associée à ces discussions et nous ne savons toujours pas avec certitude si l’ensemble des parlements nationaux seront amenés à ratifier le texte auquel auront abouti ces négociations.
Ce sujet continuera de nous mobiliser. Nous avons de bonnes raisons d’être inquiets : à notre connaissance, les intérêts à l’œuvre sont extrêmement puissants et organisés. Ce n’est ni la première ni la dernière fois que l’exception culturelle que nous défendons est mise cause et attaquée. Notre vigilance est totale sur cette question.
Nous n’irons pas jusqu’à soumettre le présent amendement au vote, car je pense que nous pouvons aller ensemble plus loin qu’un simple rejet.
J’espère que nous aurons d’autres occasions de nous exprimer sur le sujet. En effet, compte tenu des débats et des menaces qui nous attendent, le problème est de savoir si la France saura s’exprimer en mobilisant l’ensemble des acteurs autour d’une position de fermeté, qui est nécessaire si nous voulons aboutir.
Une unique position défensive consistant à concilier la position française avec celle de l’Union européenne, dont nous ne sommes pas certains qu’elle permettra de défendre jusqu’au bout notre exigence d’exception culturelle, ne suffit pas.
Je retire donc l’amendement n° 227, tout en espérant pouvoir revenir le plus vite possible sur cette question. Nous avions déjà déposé une proposition de résolution européenne voilà quelques mois, mais le sujet mérite que l’on en débatte de nouveau, sous cette forme ou sous une autre, dans cette enceinte parlementaire.
Mme la présidente. L’amendement n° 227 est retiré.
Article 3
(Non modifié)
Le ministre chargé de la culture peut attribuer des labels aux structures, personnes morales de droit public ou de droit privé ou services en régie d’une collectivité territoriale, qui en font la demande et dont le projet artistique et culturel présente un intérêt général pour la création artistique dans les domaines du spectacle vivant ou des arts plastiques. Cet intérêt s’apprécie au regard d’un cahier des missions et des charges, qui fixe des objectifs de développement et de renouvellement artistique, de diversité et de démocratisation culturelles, de traitement équitable des territoires, d’éducation artistique et culturelle ainsi que de professionnalisation des artistes et des auteurs des secteurs du spectacle vivant et des arts plastiques.
Le dirigeant d’une structure labellisée est choisi à l’issue d’un appel à candidatures associant les collectivités territoriales et leurs groupements partenaires et l’État. Sa nomination fait l’objet d’un agrément du ministre chargé de la culture. Les nominations des dirigeants des structures labellisées concourent à une représentation paritaire des femmes et des hommes.
Un décret en Conseil d’État fixe la liste des labels et définit les modalités de mise en œuvre du présent article, notamment les conditions d’attribution du label et la procédure de sélection du projet artistique et culturel et du dirigeant de la structure labellisée, qui doivent respecter les principes de transparence, d’égalité d’accès des femmes et des hommes aux responsabilités, de renouvellement des générations et de mixité sociale.
Mme la présidente. L’amendement n° 369 rectifié, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le ministre chargé de la culture peut conventionner dans la durée avec des structures du spectacle vivant ou des arts plastiques, personnes morales de droit public ou de droit privé ou services en régie d'une collectivité territoriale, auxquelles il garantit la liberté de création artistique. Ce conventionnement concerne les structures qui en font la demande et dont le projet artistique et culturel présente un intérêt général pour la création artistique et le développement de la participation à la vie culturelle.
Cet intérêt s'apprécie au regard d'un cahier des missions et des charges, qui fixe des objectifs de développement et de renouvellement artistique, de coopération entre établissements, d’engagement au service de la diversité artistique, professionnelle et culturelle, de démocratisation culturelle par des actions de médiation, dont celles concernant l’éducation artistique et culturelle, de traitement équitable des territoires ainsi que de professionnalisation des artistes et des auteurs des secteurs du spectacle vivant et des arts plastiques.
Un label peut être attribué conjointement par le ministre chargé de la culture et les collectivités territoriales et leurs groupements.
Le dirigeant d'une structure labellisée est choisi à l'issue d'un appel à candidatures, lancé par le conseil d'administration, associant les collectivités territoriales et leurs groupements partenaires et l'État. Les tutelles veillent à ce que les nominations des dirigeants des structures labellisées concourent à une représentation paritaire des femmes et des hommes. La nomination du dirigeant est validée par le conseil d'administration.
Un décret en Conseil d'État fixe et définit les modalités de mise en œuvre du présent article, notamment les conditions d'attribution du label associé au conventionnement, et la procédure de sélection du projet artistique et culturel, qui doivent respecter les principes de transparence, d’égalité d’accès des femmes et des hommes. Il définit également les modalités d’instruction des demandes de conventions et les conditions de suspension et de retrait.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement, qui concerne les labels, est une sorte de dentelle conçue point par point pour ne froisser personne, mais qui a la solidité de certains tissus élaborés avec patience.
Nous avons besoin de l’État, du ministère, de ses représentations déconcentrées, les DRAC – les directions régionales des affaires culturelles – pour leur expertise, leur compétence, la connaissance globale du tissu des talents sur notre territoire, et aussi pour la grande vigilance qu’ils portent au respect de l’équité territoriale et aux lieux où se passent des choses infamantes pour la culture : suppression brutale de subventions, licenciement d’un directeur, etc.
Si je prends l’exemple du spectacle vivant, le financement par les collectivités et leurs connaissances acquises en la matière sont devenus tellement importants que le dialogue mérite d’être davantage décentralisé en matière de labels.
Cet amendement tend donc d’abord à poser le principe d’un conventionnement par le ministère chargé de la culture, qui décline un cahier des missions et des charges, dans le cadre de la garantie de la liberté de création et de l’intérêt général. Il ne s’agit pas d’un arbitrage arbitraire : nous parlons de démocratisation culturelle, d’actions de médiation, d’éducation artistique et culturelle, de professionnalisation des artistes, entre autres.
Une fois cela fait, on pourra définir un label, qui sera attribué, à la fois, par l’État et les collectivités.
Nous avons également toiletté la procédure de nomination du dirigeant d’une structure labellisée, en réintroduisant dans le paysage le conseil d’administration, lequel disparaît souvent aux dépens de la vie démocratique de l’association. Or le Premier ministre, le 29 septembre 2015, redéfinissant les relations entre les pouvoirs publics et les associations, précisait : « je souhaite que vous favorisiez dans la durée le soutien public aux associations concourant à l’intérêt général. Il faut leur permettre de conduire au mieux leur projet associatif, en privilégiant le recours aux conventions pluriannuelles et en développant une politique d’attribution de subventions dont les modalités respectent l’initiative associative et sont concertées avec les acteurs. »
Besoin d’État, respect des collectivités et du conseil d’administration : nous avons là une proposition démocratique qui correspond bien aux spécificités de la culture.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Ce sujet a été largement débattu en commission. Au terme de ce débat, nous avions constaté que nous n’étions pas tout à fait au point. Nous avions donc reporté la décision ultime au débat en séance publique.
Le problème était de savoir si on allait donner au Gouvernement la possibilité de nommer de façon quasi unilatérale les dirigeants de telles structures, possibilité qui pouvait même se transformer en droit de veto. Nous étions par conséquent quelque peu gênés, d’autant qu’un grand nombre de structures ne sont pas, et de loin, majoritairement financées par l’État. La nomination de leurs dirigeants représentait donc un dépassement de pouvoir.
Avec cet amendement, Mme Blandin nous présente une dentelle dans laquelle, au fond – cela peut paraître paradoxal ! –, je me retrouve tout à fait.
L’amendement tend en effet à une nouvelle rédaction de l’article 3 qui distingue bien le conventionnement de l’État de l’attribution du label, laquelle serait effectuée conjointement par l’État et la collectivité territoriale. Il vise également à ce que la nomination du dirigeant, qui intervient à l’issue d’un appel à candidatures, soit validée par le conseil d’administration de la structure.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Les institutions culturelles qui sont bénéficiaires d’un label – centres dramatiques nationaux, scènes nationales – sont des structures qui incarnent l’action de décentralisation culturelle menée par le ministère de la culture en partenariat avec les collectivités territoriales depuis plus de cinquante ans.
Cette politique nationale repose en grande majorité sur des structures de droit privé qui ont été à l’origine d’un projet de création et de diffusion artistiques reconnu avec le temps d’intérêt général.
C’est précisément parce que ces structures étaient des références nationales et portaient des projets d’intérêt national que l’État a soutenu ces initiatives. Ces labels sont donc une marque de la reconnaissance par l’État du travail exceptionnel qu’elles effectuent.
Le soutien financier de l’État ne s’est jamais démenti puisque, entre 2012 et 2015, les crédits consacrés aux structures labellisées en région ont toujours été sanctuarisés. Ils ont même été augmentés en 2015 pour les scènes nationales.
L’article 3 tel qu’il a été rédigé fixe donc le cadre juridique de cette politique publique de reconnaissance des institutions de référence nationale dans le domaine du spectacle vivant et des arts plastiques, en créant une procédure de labellisation pour ces structures. C’est un élément d’équité nationale et d’égalité des territoires, grâce aux outils dont ceux-ci sont dotés. C’est aussi l’aboutissement d’une construction partenariale avec les collectivités territoriales concernées et avec la structure de gestion, qu’elle soit associative ou autre – il peut s’agir d’un établissement public de coopération culturelle, un EPCC –, que ce soit à l’occasion du choix de son dirigeant, du projet qu’il incarne, ou lors du partage des objectifs et des moyens qui font l’objet d’une convention pluriannuelle.
Cette reconnaissance, c’est aussi un gage de sécurisation pour le projet mené dans la durée.
C’est enfin l’assurance que ce processus respecte les principes fixés par le législateur. À ce titre, je regrette que l’amendement tende à supprimer la référence au renouvellement des générations et au principe de mixité sociale, à l’heure où nous devons promouvoir les talents dans leur jeunesse et leur diversité.
Pour ces raisons, je suis défavorable à cet amendement, dont l’adoption remettrait en cause la construction de notre solide maillage d’institutions culturelles, lequel, en dépit des aléas budgétaires, poursuit ses missions au profit de tous les publics et sur tous les territoires de la République.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous étions interrogatifs sur cet amendement tendant à mettre en place une procédure de conventionnement qui pourrait, si j’ai bien suivi le raisonnement de notre collègue, être assortie, à terme, d’un label cogéré entre l’État et les collectivités.
Comment pourrions-nous faire en sorte que l’État contrôle les associations concernées ? Comment l’État pourrait-il garantir que les structures conventionnées respecteront les conditions prévues dans les cahiers des charges ?
Par ailleurs, la rédaction actuelle de l’amendement maintient les difficultés présentes dans l’article 3 : obligation de moyens, et non de résultat, en matière d’égalité entre les sexes, et non-intégration dans les missions de service public. Il nous semble que l’adoption de cet amendement irait à l’encontre de l’égalité sur le plan national et n’améliorerait donc pas la situation existante.
Pour ces raisons, nous voterons contre.
Mme la présidente. La parole est Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Nous voterons également contre cet amendement, car il vise, en fait, à remettre complètement en question l’article 3 que nous n’avons pas, in fine, modifié, monsieur le rapporteur. Nous avons, en effet, eu des débats en commission sur la question très précise de l’agrément du ministère de la culture concernant la nomination des directeurs des structures labellisées.
Nous avons globalement accepté de ne pas modifier cet article et donc de conserver la disposition spécifique qui y est inscrite, à savoir l’agrément du ministère de la culture que nous ne retrouvons pas dans l’amendement de Mme Blandin.
Cet amendement, qui fait de la dentelle, pour reprendre le propre terme de notre collègue, est néanmoins très intéressant, car il montre comment est mis en œuvre le processus de choix du dirigeant d’une institution labellisée.
En tant qu’élue locale, comme nombre d’entre vous dans cet hémicycle, mes chers collègues, il m’est arrivé de présider de tels jurys. Y siègent des représentants de l’administration centrale, des DRAC, des collectivités territoriales – notamment celles qui sont les supports principaux, c’est-à-dire les villes –, mais aussi les présidents des conseils d’administration lorsque ceux-ci ont une base associative, ce qui est souvent le cas pour les centres chorégraphiques nationaux, les CCN, les centres dramatiques nationaux, les CDN, et les scènes nationales.
Je ne souhaite pas que l’on adopte cet amendement, dont la rédaction, comme l’a dit très justement Mme Gonthier-Maurin, ne nous permet pas d’être garants d’une certaine forme d’équité nationale en termes de renouvellement des générations ou d’égalité entre les femmes et les hommes. Elle ne favorise pas plus l’intelligence que nous souhaitons introduire à l’occasion de la nomination des directeurs des structures labellisées par l’État et les collectivités territoriales, intelligence qui, in fine, nous fait avancer ensemble et nommer les personnes idoines pour diriger ces structures.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. On peut comprendre la légitimité de cet amendement.
On parle beaucoup de labels de qualité, que nous privilégions, de conventions d’objectifs. Nous sommes toutes et tous responsables de l’argent public, au niveau que ce soit de l’État, des collectivités territoriales ou des partenariats. Il est vrai que les associations fonctionnent souvent avec peu de salariés et de nombreux bénévoles. Il faut naturellement prendre en compte l’objectif financier. Mais des conventionnements sont tout de même mis en place.
Nous respectons les services de l’État et les DRAC, tout en observant que certains services comptent de moins en moins de personnels. La situation est par conséquent de plus en plus difficile, à tous les niveaux.
Quant à moi, je resterai prudent et suivrai l’avis de la commission.
En matière de conventionnements, nous sommes favorables à la qualité. Ainsi, dans mon département, les Ardennes, se déroule le Festival mondial de marionnettes de Charleville-Mézières. Ce secteur du spectacle, dans lequel les compagnies comptent très peu de salariés, repose donc sur les bénévoles, y compris pour la promotion du festival dans la ville qui l’accueille, dans le département et bien au-delà. L’engagement de tous pour promouvoir les spectacles et la culture est un combat très important !
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Nous avons débattu de ces sujets assez longuement en commission. Je tiens cependant à préciser, pour que l’on comprenne bien de quoi l’on parle, qu’il est ici question de structures labellisées, dont la plupart sont aujourd’hui cofinancées par un ensemble de collectivités territoriales. Je fais d’ailleurs remarquer que les collectivités territoriales deviennent peu à peu les principaux financeurs de ces projets, même si la présence de l’État – et il faut souhaiter que cela le demeure – reste importante.
L’aspect positif de l’article 3 de ce projet de loi est qu’il permet de finaliser la manière dont doivent être recrutés les directeurs ou directrices de ces structures. En effet, il y a eu dans le passé des abus, ce qu’on appelle le « fait du prince », aussi bien de la part de l’État que de certaines collectivités à l’occasion de ces nominations. Il me semble donc essentiel de préciser le cadre du recrutement auquel participent l’ensemble des collectivités et l’État.
Aujourd’hui, que se passe-t-il ? La présélection est généralement faite avec les services de l’État, présent dans le jury par l’intermédiaire d’un représentant du ministère qui vient assister la DRAC. Finalement, on peut dire qu’il y a consensus autour d’un candidat. On attend ensuite que le ministère formalise sa nomination, ce qui revient à une forme d’agrément de fait.
Faut-il inscrire cela dans la loi ? C’est la véritable question. Un certain nombre de collègues de la commission ont estimé que, puisque les collectivités territoriales prennent aujourd'hui toute leur part dans l’organisation et le financement de ces structures, il était superfétatoire de prévoir une telle disposition : les collectivités territoriales doivent être associées à la même hauteur que l’État dans la finalisation du choix du candidat.
Voilà pourquoi M. le rapporteur a souscrit à l’amendement de Mme Blandin, qui précise bien les différentes étapes du mode de nomination de ces directeurs.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. À ce stade du débat, ce que je vais dire va peut-être « fissurer » l’ambiance de notre débat. Je voudrais rappeler que, même si je reconnais la qualité de son administration, l’État n’a pas le monopole de la culture…
M. Gérard Longuet. Exactement !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. … et ne détient pas la vérité culturelle. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Or l’État intervient toujours comme s’il détenait la vérité. Je ne nie pas, bien entendu, l’importance d’un ministère qui impulse des actions, mais il y a d’autres acteurs qui, eux aussi, sont allés à l’école, qui ont quelque chose dans leur tête et qui ont envie de promouvoir la diversité. Je rappelle que l’intitulé de ce projet de loi comporte le mot « liberté » !
M. Gérard Longuet. Vous avez raison !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Si l’État finançait 60 % ou 70 % de ces structures…
M. Gérard Longuet. Même pas !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Mais ce sont souvent les collectivités territoriales qui payent ! Nous sommes dans le domaine culturel. Je rejoins ceux qui disent : ce n’est pas parce qu’il y a de l’argent qu’il faut financer n’importe quoi.
Il faut toutefois respecter ce financement collectif. La vérité appartient aussi aux collectivités et à certains opérateurs privés ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Claude Luche applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Madame la ministre, vous avez appuyé là où cela fait mal en disant que je ne parle pas de mixité sociale et de renouvellement des générations. Vous avez été très bien informée, puisque c’est à la demande de la commission que j’ai retiré ces références figurant dans mon amendement initial. Mieux vaut la version qui vous est soumise que rien du tout !
Par ailleurs, je l’indique à ceux de mes collègues qui préfèrent que l’on garantisse la parité plutôt que d’y concourir, je suis tout à fait d’accord avec eux. Nous examinerons des amendements en ce sens dans la suite de la discussion.
Madame la ministre, vous avez évoqué le rôle de l’État, par exemple en matière de labels. J’estime, pour ma part, que l’État ne veille pas assez bien à ses labels avec la même exigence. Si je prends l’exemple des Zénith, certains d’entre eux sont tombés dans une dérive marchande et n’ont plus rien à envier à des sociétés comme Disney en matière de mise en concurrence.
Cela étant, le texte peut sans doute encore être amélioré sur certains points. Nous en sommes à sa première lecture au Sénat. Je souhaite qu’il soit voté pour qu’il continue sa route, car cette réflexion sur le rôle de l’État prenant en compte la décentralisation me semble fondamentale pour le monde de demain.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Je voudrais préciser les choses, parce que j’ai l’impression que certains se trompent de débat. Il n’est pas question, avec l’article 3, d’adopter une mesure technique ou d’inscrire dans la loi le fait que l’État est le seul garant de la qualité culturelle ou qu’il en a le monopole. Ce n’est pas du tout le sujet ! Bien au contraire, cet article vise essentiellement à consolider la politique de labellisation qui est au cœur de nos politiques partenariales depuis plusieurs dizaines d’années à présent.
La procédure d’agrément vient couronner une décision commune, partenariale, de nomination, dont je fais l’expérience quasi quotidiennement depuis maintenant plus d’un an. Elle ne fait qu’incarner la reconnaissance par l’État du projet artistique et culturel de la structure labellisée.
Cet agrément est l’aboutissement logique du processus de désignation à la tête de ces lieux labellisés. Il ne signifie pas du tout que l’État choisisse seul le dirigeant sans concertation avec les collectivités territoriales. Au contraire, et vous en avez tous l’expérience, les collectivités territoriales et l’État s’accordent systématiquement sur une présélection puis sur le choix final d’un candidat qui est retenu par le dispositif de gouvernance, par exemple le conseil d’administration de la structure.
L’agrément sanctionne par ailleurs le bon déroulement de cette procédure, dans le respect du cahier des charges. J’ajoute qu’il constitue une protection pour la directrice ou le directeur nommé sur la base d’un projet. En cela, il est une déclinaison du principe de la liberté de programmation que vous avez souhaité consacrer. Je précise, par ailleurs, que les Zénith sont une délégation de service public, et non un label.
Objectivement, les dirigeants de ces structures sont aujourd’hui dans l’attente de l’adoption de l’article 3, qui consacre de manière législative leur existence dans le paysage des institutions culturelles françaises. L’agrément prévu par cet article est une mesure centrale, qui définit véritablement le processus de labellisation. Il ne faut pas le voir comme une marque d’opposition entre l’État et les collectivités territoriales. C'est au contraire la reconnaissance, la matérialisation du partenariat entre ces acteurs.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Nous avions un débat sur un point précis et nous voilà partis dans de grandes envolées pendant lesquelles on veut rejouer le match entre ceux qui seraient étatistes et ceux qui seraient libéraux à mauvais escient… (M. Gérard Longuet s’exclame.) Ce n'est pas la peine de s’échauffer, monsieur Longuet ! À chaque fois qu’on évoque l’État, vous vous réveillez, même si vous ne savez pas de quoi on parle ! (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Très concrètement, il s’agit d’un article qui porte sur la labellisation. Nous sommes là dans la poursuite d’une politique qui n’a jamais souffert de remise en cause malgré les alternances. Le consensus qui s’est créé depuis André Malraux donne à l’État une place particulière avec la création d’un ministère de la culture chargé d’impulser les politiques culturelles dans notre pays.
Sur ce point, il n’y a jamais eu de tangage, car c'est ce qui fait notre spécificité. C'est la raison pour laquelle l’exception culturelle a toujours été défendue, quelles qu’aient été les majorités politiques.
En l’espèce, de quoi s’agit-il ? D’un agrément du ministère de la culture, qui sera forcément double : lorsque l’on demande cet agrément, c’est bien parce qu’on le souhaite, y compris localement et la structure. C'est en effet une garantie de qualité, un label national qui dépasse telle ou telle collectivité, et c'est ce qui est recherché. Ce n’est pas l’État qui cherche à labelliser partout ; c'est voulu et demandé, car le fait que cela vienne de l’État est un gage de qualité. Il n’y a pas de lutte entre l’État et l’intérêt d’une collectivité.
Il est tout à fait normal de vouloir fixer un objectif au plan national, comme l’a dit Sylvie Robert. Par exemple, si on veut nommer davantage de femmes, si on veut renouveler les générations, cela ne peut pas se faire au cas par cas ! Cela doit être effectué au plan national. (C'est fini ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je termine en faisant remarquer que, quels que soient les ministres de la culture, personne n’a jamais remis en cause cette façon de voir.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je voudrais d’abord répondre très cordialement à mon excellent collègue David Assouline que je n’ai pas de phobie de l’État ! J’ai une particularité que je partage avec nombre de mes collègues dans cette enceinte : je l’ai servi sous l’uniforme comme sous-lieutenant, modestement, puis toujours sous l’uniforme comme sous-préfet. Je n’ai jamais été ni lieutenant ni préfet parce que j’ai fait le choix de la liberté, en confiant ma carrière aux électeurs, qui m’ont confirmé dans mon mandat.
Mais il se trouve que j’ai administré, sans revendiquer aucune compétence culturelle, la maison des jeunes et de la culture d’Amiens lorsque j’étais sous-préfet. Comme président de région, j’ai également présidé – cela va faire sourire ! – aux destinées du Ballet de Lorraine, pour lequel je n’avais pas de compétences particulières.
J’ai néanmoins vécu en complicité avec tous ceux qui sur le terrain, au titre des collectivités locales – communes, départements, régions –, et même si la loi ne leur en faisait pas obligation ou devoir, soutenaient des politiques de développement culturel local.
Cela étant, l’article 3 me pose un problème. Vous avez eu raison, mon cher collègue, de rappeler le formidable travail d’André Malraux, qui a créé les premières maisons de la culture dans notre pays pour chasser « le mot hideux de province » – je le cite, lui qui d’ailleurs était parisien et qui n’a jamais vécu en province. Mais quand l’État agissait, il le faisait en assurant le financement.
Ce qui me gêne dans cet article, et Jean-Pierre Leleux vient de le dire, c’est que l’État se propose de labelliser, c’est-à-dire qu’il revendique une autorité de compétence, une autorité morale, une autorité intellectuelle pour distinguer le bien du mal, sans prendre aucun engagement financier. Or si vous n’obtenez pas la labellisation, vous risquez d’être considéré par vos partenaires locaux ou par vos partenaires privés locaux comme étant une institution de deuxième zone, non reconnue, et donc non méritante.
Comme, par ailleurs, les institutions culturelles ont du mal à trouver des mécénats privés dans les circonstances économiques que nous connaissons, j’ai peur que le fait de ne pas obtenir de labellisation – une décision de l’État – ne conduise à ce que des initiatives locales soient en quelque sorte sanctionnées et privées de soutiens locaux auxquels elles auraient pu prétendre, mais qui leur seront inaccessibles faute de label.
Madame le ministre, je déclare solennellement que la labellisation est, comme l’enfer, pavée de bonnes intentions. Je ne vois pas comment elle fonctionnera, mais, en revanche, j’en vois certains dangers.
Comme je n’ai pas participé, mes chers collègues, aux travaux de la commission, je me contenterai de m’abstenir sur cet amendement, mais je tenais à attirer votre attention sur les dangers de cette labellisation sans contrepartie et sans engagement de l’État, si ce n’est un jugement moral sur l’action du terrain. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 3 est ainsi rédigé et les amendements nos 80 rectifié, 231, 81 rectifié bis, 230, 82 rectifié, 232, 381, 229, 233, 228, 83 rectifié et 84 rectifié n'ont plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces amendements.
L'amendement n° 80 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Le ministre chargé de la culture peut attribuer des labels aux structures du spectacle vivant ou des arts plastiques, personnes morales de droit public ou de droit privé ou services en régie d’une collectivité territoriale, qui en font la demande et dont le projet artistique et culturel présente un caractère d’intérêt général.
L'amendement n° 231, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
Après le mot :
regard
insérer les mots :
du projet visant à mettre en œuvre la politique culturelle de l’État et des collectivités territoriales et
L'amendement n° 81 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
Remplacer les mots :
de diversité et de démocratisation culturelles
par les mots :
de coopération entre les établissements, d’engagement au service de la diversité artistique, professionnelle et culturelle, de démocratisation culturelle par des actions de médiation,
L'amendement n° 230, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
Après le mot :
culturelles
insérer les mots :
d’égal accès entre les femmes et les hommes aux domaines culturel et artistique,
L'amendement n° 82 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
Après les mots :
de traitement équitable des territoires,
insérer les mots :
d’égal accès des femmes et des hommes à la programmation artistique,
L'amendement n° 232, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
Remplacer les mots :
artistes et auteurs du spectacle vivant et des arts plastiques
par les mots :
artistes, auteurs et techniciens de la création artistique
L'amendement n° 381, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
La rédaction du projet artistique et culturel comporte un paragraphe spécifique démontrant son caractère non lucratif et d'intérêt général. Les tutelles sont garantes, si besoin en est, auprès de la Commission européenne, dans le cadre de l'exception culturelle, du caractère non concurrentiel des projets culturels et des activités de la structure.
L'amendement n° 229, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
La politique de soutien public en faveur de l'expression et de la création artistique privilégie une politique de subventions dont les modalités respectent l’initiative associative et sont concertées avec les acteurs.
L'amendement n° 233, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2, dernière phrase
Remplacer les mots :
concourent à
par le mot :
assurent
L'amendement n° 228, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les activités des structures labellisées sont reconnues comme des services non économiques d’intérêt général. De fait, elles échappent aux règles de la concurrence et sont fondées sur une logique de solidarité et de redistribution.
L'amendement n° 83 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer le mot :
qui
par les mots :
ainsi que celles de renouvellement des labels et de création de nouveaux labels, en élargissant leurs champs disciplinaires. Ils
L'amendement n° 84 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
des générations
insérer les mots :
, de diversité
Article additionnel après l’article 3
Mme la présidente. L’amendement n° 234, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’état de l’application du dispositif de décoration des constructions publiques et étudie l’opportunité de rendre ce dispositif contraignant et de permettre à l’État, la collectivité territoriale ou l’établissement public à l’origine de l’opération immobilière de répartir le montant dévolu à la décoration des constructions publiques entre plusieurs artistes, lorsque le coût de la construction dépasse deux millions d’euros.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Le projet de loi issu des travaux de l’Assemblée nationale comportait un article 3 bis prévoyant la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur l’opportunité d’élargir l’assiette du dispositif de décoration des constructions publiques et l’assiette de ses bénéficiaires.
En commission, nous avons voté pour la suppression de cet article pour plusieurs raisons.
Premièrement, il ne nous a pas paru opportun d’élargir les bénéficiaires de ce dispositif communément appelé « 1 % artistique », car son ouverture à des prestations issues du spectacle vivant serait, selon nous, un profond recul. Tout d’abord, cela ouvrirait la porte – c’est même déjà le cas – au financement par le 1 % artistique de cérémonies d’inauguration de toute façon inscrites dans les usages des collectivités, ce qui conduirait mathématiquement à un recul de l’efficacité de ce dispositif. Ensuite, cette ouverture précariserait encore un peu plus les artistes plastiques, trop souvent laissés au bord de la route de la création artistique. Enfin, par définition, une prestation de spectacle vivant est éphémère, tandis que la commande d’une œuvre est pérenne. Il nous semble préférable que les collectivités commandent des œuvres qui pourront être vues par l’ensemble des citoyens.
Deuxièmement, nous sommes opposés à l’élargissement de l’assiette, c’est-à-dire à l’ouverture du 1 % artistique aux travaux publics – le fameux « 1 % goudron » – car, au nom du principe de réalité, nous ne pensons pas que les collectivités puissent dédier une somme suffisante à chaque fois qu’elles font de l’aménagement de fonctionnement sur leur territoire.
Toutefois, si nous avons voté pour la suppression de cet article, nous ne délaissons pas pour autant le dispositif du 1 % artistique, essentiel à la diffusion de l’art auprès d’un large public sur notre territoire. C’est pourquoi cet amendement vise à insérer, après l’article 3, un article disposant que le Gouvernement remet au Parlement dans un délai de six mois un rapport sur l’application réelle du 1 % et sur l’opportunité de rendre ce dispositif contraignant. La baisse des dotations aux collectivités territoriales qui grève dangereusement leur budget a conduit bon nombre d’entre elles à délaisser leurs missions culturelles et artistiques.
Le dispositif de décoration des constructions publiques, si utile et essentiel qu’il soit, n’est aujourd’hui appliqué qu’à la marge. Il est de notre rôle d’assurer l’application pleine et entière d’un mécanisme visant à faire accéder les arts et la culture au plus grand nombre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, et ce pour deux raisons.
Sur la forme, il s’agit encore une fois d’un rapport demandé au Gouvernement ; or, vous le savez, nous essayons d’éviter au maximum les rapports.
Sur le fond, cela mérite réflexion. Nous adhérons, bien sûr, à l’idée du 1 % artistique pour ce qui concerne la construction des bâtiments. Il s’agit d’un dispositif certes assez compliqué à mettre en œuvre, mais nous accompagnons les acteurs, et il laisse une trace dans les territoires, sur le plan tant de l’esthétique que de l’avenir, puisque c’est de l’investissement. Le 1 % artistique sur lequel vous demandez un rapport risque d’être un peu éphémère, même s’il est vrai qu’il apporterait effectivement quelque chose à l’espace public.
Toutefois, il a l’inconvénient d’alourdir la charge des collectivités territoriales. Aussi le 1 % artistique que nous prélèverions sur les travaux publics – les routes, les murs, les tranchées, les réseaux – représenterait une charge pour la collectivité territoriale.
La commission préfère donc émettre un avis défavorable, tant sur la forme que sur le fond.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Vous proposez, madame la sénatrice, la remise par le Gouvernement au Parlement d’un rapport sur l’état d’application du dispositif de décoration des constructions publiques, le 1 % artistique. Ce dispositif, créé en 1951 sur une idée de Jean Zay exprimée dès le Front populaire, fonctionne aujourd’hui très bien. Il a permis d’engager plus de 12 300 projets et de faire travailler plus de 4 000 artistes très divers ; il mobilise de 3 millions à 10 millions d’euros par an.
L’engagement des collectivités territoriales, maîtres d’ouvrage dans 70 % des cas, est exemplaire. On constate d’ailleurs qu’un tiers des œuvres réalisées grâce au 1 % artistique est volontaire, c’est-à-dire concerne des constructions non visées par le cadre réglementaire. Je souhaite que le ministère de la culture et de la communication continue de favoriser la rencontre du plus grand nombre avec l’art de notre temps et encourage l’intervention des artistes dans la cité.
C’est avec cette volonté que le ministère de la culture a lancé en 2014 la mission nationale pour l’art et la culture dans l’espace public, dont le rapport, que j’évoquais hier, me sera remis dans les jours prochains.
Je précise par ailleurs que cet engagement se rencontre de plus en plus chez les acteurs privés. J’en veux pour preuve le programme « Un immeuble, une œuvre » que j’ai lancé le 16 décembre dernier, par lequel plusieurs promoteurs, constructeurs et sociétés foncières s’engagent à soutenir la création et les artistes en plaçant des œuvres au cœur des lieux d’habitation et de travail. Ce n’est pas un vœu pieux, puisque la première réalisation a été lancée hier dans le 13e arrondissement de Paris.
Le renforcement du dispositif réglementaire ne paraît pas indispensable – cela entraînerait un surcroît de contraintes sans modifier fondamentalement le résultat –, mais son évaluation avec tous les acteurs potentiellement concernés et son éventuelle évolution me semblent utiles.
J’émets donc un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Mon groupe est bien évidemment très attaché au 1 % artistique. J’espère que les maîtres d’ouvrage que nous pouvons être dans les collectivités l’appliquent dans leur budget d’investissement. (Exclamations sur quelques travées du groupe Les Républicains.) Je dis cela parce qu’il existe une tradition dans notre pays et que ce dispositif a été extrêmement intéressant par la valeur ajoutée qu’il a apportée à certains de nos bâtiments publics, voire à des bâtiments non publics dont les collectivités sont maîtres d’ouvrage.
Nous parlons aujourd’hui de dotations, car il s’agit d’enveloppes d’investissement. Même si le montant ne correspond pas obligatoirement à 1 %, il est très important, chers collègues, que des artistes puissent bénéficier de cet investissement pour inscrire, en quelque sorte, leur acte de création dans un bâtiment ; il s’agit presque d’une commande publique !
C’est vrai, il s’agit d’un rapport, mais qui permet de remettre en valeur le 1 % artistique. Nous suivrons donc l’avis du Gouvernement. J’espère que ce mécanisme pourra toujours être appliqué dans un certain nombre des bâtiments qui maillent notre territoire.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Vous avez affirmé, madame la ministre, que le 1 % artistique fonctionne très bien. Non, ce n’est pas le cas ! Il ne faut pas être trop angélique à ce sujet.
Quand on y regarde de près, on constate que c’est d’une complexité insupportable à l’échelon local. On ne fait pas confiance aux collectivités lorsqu’elles passent des marchés et qu’elles montent des projets. Pour avoir mis en œuvre, dans le cadre de certaines opérations, le dispositif du 1 %, j’ai pu en apprécier la complexité. Les services de l’État sont toujours là pour nous donner des conseils parce que nous ne comprenons pas ce qu’est la culture, notamment locale, ni ce que sont les artistes locaux, et ils nous imposent certaines choses.
Ensuite, quand on doit démolir, pour des raisons diverses, un bâtiment ancien dans lequel se trouvent des œuvres financées par le 1 %, c’est un véritable casse-tête. On est obligé de récupérer des œuvres en décrépitude parce que leurs matériaux sont largement défraîchis. Parfois, l’artiste est décédé entre-temps et il faut demander son avis à sa famille sur quelque chose qui ne correspond plus au style du bâtiment à reconstruire.
Bref, c’est un système trop compliqué. Si le présent texte devait servir à quelque chose, ce serait à redéfinir le fonctionnement du 1 % artistique pour y mettre un peu plus de simplicité.
Mme Colette Mélot. Oui !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Je ne comprends pas très bien le sens de cet amendement.
Premièrement, Mme la ministre vient d’indiquer que les choses se passent plutôt bien pour ce qui concerne les collectivités territoriales. Je ne vois donc pas pourquoi on les montrerait du doigt.
Deuxièmement, il faut laisser, me semble-t-il, un certain nombre d’initiatives aux collectivités territoriales sur le fondement du principe de libre administration, consistant à les laisser gérer elles-mêmes les budgets locaux.
Troisièmement, si le Gouvernement estime que ce rapport est indispensable, il peut très bien le rédiger sans que cela soit pour autant indiqué dans la loi. Il est temps que l’on comprenne qu’il faut faire figurer dans la loi uniquement ce qui est important et revenir à des choses extrêmement simples !
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je veux juste en rajouter une couche, s’il était nécessaire, car, quand on est de l’autre côté de la barrière, sur le terrain, on s’aperçoit de la complexité de l’affaire. Ce fut le cas pour ma part lorsque j’ai réalisé des archives départementales – une priorité pour nos concitoyens, compte tenu des difficultés qu’ils rencontrent –, qui ont été en partie subventionnées par l’État. Nous étions soumis aussi au 1 % et cela a posé problème, car quand on augmente la fiscalité pour assurer les compétences obligatoires transférées par l’État sans l’argent pour le faire, on est confronté à une difficulté morale. On reçoit l’injonction d’appliquer le 1 % alors qu’on n’arrive même pas à boucler son budget pour assurer les services minimaux obligatoires que réclament nos concitoyens.
Quand l’État se montrera généreux à l’égard des collectivités territoriales, en versant au moins l’argent qu’il exige que les collectivités dépensent, il sera alors possible d’imposer certaines choses à celles-ci. Mais nous n’en sommes pas là !
M. David Assouline. Quand la droite sera au pouvoir, elle sera généreuse !
M. René-Paul Savary. Nous connaissons une conjoncture particulièrement difficile et il peut devenir un peu compliqué d’appliquer des décisions prises à une époque éloignée. En outre, parallèlement, d’autres mesures ont été adoptées, concernant, par exemple, des obligations de mise aux normes, les économies d’énergie ou l’isolation.
Bref, on n’en peut plus des contraintes et des normes supplémentaires, à un moment où l’argent est rare ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste.) Alors, soyons attentifs ; laissons la liberté aux élus locaux pour régler l’ensemble des problèmes, car ils sont élus pour ça !
Nous sommes tous attachés au développement culturel de nos territoires. Si nous en avons les moyens, nous en ferons plus ; à défaut, nous nous concentrons sur les priorités. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)
Mme Françoise Férat, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. On pare au plus pressé !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Le débat qui vient de se dérouler est la justification pleine et entière de la nécessité d’adopter notre amendement, puisque, manifestement, le dispositif en cause mérite plus de clarté et l’établissement d’un diagnostic élaboré sérieusement et discuté. Le rapport demandé doit ainsi porter sur l’état de ce dispositif et sur la nécessité de le protéger, car certains orateurs, après avoir commencé leur intervention en louant celui-ci, expliquent ensuite qu’il ne serait pas plus mal de s’en débarrasser au plus vite…
C’est justement le moment – et la loi peut lancer le mouvement – de procéder à un diagnostic, en collaboration avec les collectivités territoriales, confortant le dispositif et rendant, si nécessaire, son application plus pertinente. Je ne comprends donc pas pourquoi ceux qui affirment que le mécanisme pose tant de problèmes sont opposés à cet amendement.
Enfin, je vous entends, chers collègues siégeant sur les travées de la majorité sénatoriale, invoquer le manque de moyens des collectivités territoriales. J’espère que vous y penserez toujours quand vous établirez votre prochain programme électoral national… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Ronan Dantec applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il faut recadrer le débat. Il y a deux sujets.
Le premier est le dispositif du 1 % artistique, qui existe depuis les années cinquante. Beaucoup de collectivités, même si c’est avec certaines difficultés de procédure, j’en conviens, l’utilisent avec plaisir.
M. David Assouline. Avec plaisir…
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous avons en effet tous intérêt à ce qu’émerge, en même temps qu’un équipement, une œuvre d’art. Je crois que dans leur ensemble les élus locaux sont assez favorables à ce dispositif d’investissement dans une œuvre culturelle, qui peut d’ailleurs être de plusieurs natures, puisqu’elle peut être visuelle, sculpturale ou même de lumière.
Mais nous parlons là du 1 % artistique nouveau, qui est en cours de gestation et qui porterait, non pas sur les investissements d’équipement en bâtiment, mais sur les travaux publics. Nous sommes donc sur deux sujets différents.
M. David Assouline. On ne parle pas encore du 1 % nouveau !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Monsieur Assouline, l’amendement déposé notamment par M. Abate évoque un rapport sur un 1 % artistique lié aux travaux publics. Or le débat a dérapé sur le 1 % artistique lié aux bâtiments.
On verra lors de l’examen de l’amendement suivant, mais, s’agissant de l’amendement n° 234, je confirme l’avis défavorable de la commission, d’abord sur la demande d’un rapport, ensuite sur un rapport portant sur un hypothétique dispositif.
M. Patrick Abate. Non !
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Il faut en effet recadrer le débat et savoir ce sur quoi nous délibérons. Chacun des nombreux amendements qui ont été déposés ne doit pas être examiné en fonction de ceux qui viendront après.
L’amendement dont nous discutons prévoit un rapport pour évaluer le dispositif existant. M. le rapporteur dit que c’est un dispositif dont on est fier et que les élus locaux aiment, même s’il y a quelques difficultés. Mais l’on a compris au cours du débat que, au nom d’un certain nombre de principes politiques qui se mélangent à la liberté des collectivités locales, un élu pourra aller jusqu’à décider qu’il ne fait rien parce qu’il a d’autres urgences. Ça devient donc un dispositif conjoncturel.
Plusieurs débats se mélangent.
Comme M. Leleux sur cette question précise, j’estime que, avant de demander un nouveau rapport, il faudrait déjà que les rapports prévus par diverses lois et votés par nous chaque fois qu’une question n’est pas réglée nous aient été remis. Quand on fait l’évaluation de ces rapports, ce qu’il m’est arrivé de faire comme président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, on se rend en effet compte que pas la moitié si ce n’est le tiers d’entre eux ont été effectivement produits. Pourquoi ? Parce que, sauf à embaucher un nombre invraisemblable d’experts et de rapporteurs, c’est impossible !
Au début, je me demandais : pourquoi prévoir un rapport ? Mais, après ce débat où je vois que le dispositif est contesté et que des élus d’importantes collectivités locales dénoncent un problème de fonctionnement, moi qui veux que l’on conforte cette politique qui existe depuis longtemps et qui n’avait jamais été remise en cause, j’estime qu’une clarification est nécessaire. Je suis donc favorable à un rapport, car il me paraît utile qu’il y ait une évaluation et que chacun puisse juger sur pièces.
Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Prunaud, pour explication de vote.
Mme Christine Prunaud. Je crois nécessaire de rappeler les propos que j’ai tenus au sujet du 1 % travaux publics.
J’ai dit mot à mot que nous étions opposés à l’élargissement de l’assiette, c’est-à-dire à l’ouverture du 1 % artistique aux travaux publics – le fameux « 1 % goudron » –, car, au nom du principe de réalité, nous ne pensons pas que les collectivités puissent dédier une somme suffisante chaque fois qu’elles font de l’aménagement de fonctionnement sur leur territoire.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Je veux préciser que la position que j’ai exprimée porte sur un amendement visant à établir un rapport pour analyser le fonctionnement du 1 % artistique.
Je rappelle que ce dispositif n’a pas été remis en cause, quelle qu’ait d’ailleurs été la majorité, depuis sa création. Il permet de mettre de l’art dans l’espace public, notamment dans les écoles. J’ai visité beaucoup d’établissements qui en avaient bénéficié : ni les élus qui avaient commandé les œuvres ni les élèves, par exemple des collèges, qui avaient parfois pu participer à la conception ou à la construction de l’œuvre, n’ont manifesté d’opposition à une politique qu’ils trouvent au contraire très bénéfique.
Ce dispositif permet de rendre l’art plus proche de nos concitoyens, de donner accès à l’art aux publics qui en sont les plus éloignés. C’est donc avec étonnement que je note que la plupart des intervenants qui se sont exprimés sur les travées de la majorité sénatoriale semblent le remettre aussi fondamentalement en cause alors qu’il fait beaucoup pour la démocratisation de l’art et pour l’accès à la culture. Je le regrette.
M. Éric Doligé. Il ne faut pas en rajouter !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 234.
(L'amendement n’est pas adopté.)
Article 3 bis
(Supprimé)
Mme la présidente. L'amendement n° 86 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'opportunité de mettre en place un dispositif permettant à l'État, aux collectivités territoriales et à leurs groupements de consacrer 1 % du coût des opérations de travaux publics au soutien de projets artistiques et culturels dans l'espace public.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Avec cet amendement, qui vise l’autre 1 % – le 1 % goudron –, il s’agit de revenir au texte issu des travaux de l’Assemblée nationale et de prévoir que le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité d’expérimenter un dispositif qui permettrait de consacrer 1 % du coût des travaux publics menés par l’État et les collectivités territoriales à tout ce qui est art public.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous êtes apparemment très attachés au développement culturel de vos territoires. Aujourd'hui se déroulent sur l’espace public de très nombreuses manifestations organisées par la Fédération nationale des arts de la rue, arts de la rue qui donnent lieu en France à de grands festivals.
L’idée est que, justement parce que ces manifestations se déroulent sur l’espace public, leur financement à titre expérimental sur une part du coût des travaux d’aménagement de cet espace grâce à ce second volet du 1 % pourrait faire l’objet d’un rapport.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Avis défavorable, pour les raisons explicitées tout à l’heure.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cette proposition me semble utile pour mesurer les possibilités de mettre à profit l’expérience du 1 % sur les constructions publiques et d’identifier les moyens de proposer, non seulement des œuvres, mais également des performances artistiques et tous projets artistiques et culturels dans l’espace public. L’avis est favorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Je souhaite venir à l’appui des arguments de M. le rapporteur.
Le 1 % artistique a une cohérence. Lorsqu’un maître d’ouvrage public construit un bâtiment, il est intéressant de réserver 1 % du coût de la construction pour l’acquisition d’une œuvre d’art spécialement conçue pour ce bâtiment, nous en sommes tous convaincus, car ce dispositif concourt au développement des arts plastiques.
À l’inverse, le raisonnement qui sous-tendait l’article 3 bis et qui consistait à faire un lien entre espace public et arts de la rue me paraît acrobatique…
Sur le fond, si le 1 % artistique a fait ses preuves pour le soutien de la création dans le domaine des arts plastiques, il me semble hasardeux de vouloir l’étendre à des formes de création éphémères.
De plus, il est difficile de prévoir les effets d’une concurrence entre le 1 % artistique et ce 1 % travaux publics, ce qui représente tout de même un problème important.
La question d’un nouveau 1 % se pose-t-elle d’ailleurs réellement, au regard de l’état actuel des finances locales ? Ce serait une charge financière supplémentaire pour nos collectivités.
Sur la forme, l’auteur de l’article 3 bis, Patrick Bloche, n’a pas fait mystère de sa volonté de contourner la règle de l’article 40, qui aurait empêché le dépôt d’un amendement créant purement et simplement le dispositif.
Nous nous trouvons donc devant un probable rapport fictif, qui ne verra certainement jamais le jour une fois ce débat clos, même si le Gouvernement semble soutenir cette démarche. C’est l’expérience qui parle !
Évitons par conséquent d’inscrire dans la loi la création d’un énième rapport, dont la commission rejette traditionnellement le principe. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. S’agissant des rapports, un avis négatif devrait donc indifféremment tomber ! Or nous devrions avoir ensemble l’intelligence de faire en sorte qu’aucune règle ne s’applique, quelle que soit la situation au motif qu’il y aurait eu des abus, et, je le dis, il y a des abus. Je partage l’idée que les demandes de rapport ne doivent pas servir de moyen détourné pour discuter de dispositions qui tomberaient sous le couperet l’article 40 de la Constitution ou pour avoir un débat sur des questions qui ne relèvent pas de l’ordre législatif.
Je suis aussi absolument contre la dévalorisation de la loi, dont le caractère souvent trop bavard est encore aggravé quand elle annonce des choses qui ne se font jamais ensuite. Ces rapports qui ne viennent pas la discréditent !
Mais nous venons d’aborder deux sujets où ce sont justement des rapports qui pourront éclairer notre travail législatif.
À l’instant, il s’est agi d’un sujet qui, sans que l’on s’en soit rendu compte – pour ma part, c’est en tout cas le débat qui m’a permis de le faire –, pose manifestement plus de questions qu’on ne le croit. Madame Mélot, vous venez de dire que le dispositif du 1 % était génial, mais plusieurs de vos collègues ont dit exactement l’inverse avant vous.
Mme Colette Mélot. Non !
M. David Assouline. En tout cas, ils n’ont pas montré, comme vous et comme M. Leleux, une grande joie… Je ne critique pas ce fait-là : il peut y avoir des appréciations différentes,…
Mme Christiane Hummel. Absolument !
M. David Assouline. … mais, quand des acteurs locaux tout à fait responsables, et qui ont la même légitimité, voient les choses de façon aussi différente, un rapport pour éclairer et faire un état des lieux partagé est nécessaire !
Maintenant, il s’agit d’un dispositif qui, de votre point de vue, n’est pas bon. Mais on l’expérimente à Paris et dans d’autres endroits. Certains vont peut-être être convaincus par l’expérience, d’autres considérer qu’elle est négative. C’est pourquoi, avant d’éventuellement légiférer, il convient justement de disposer d’un rapport qui évalue les résultats effectifs du dispositif là où il y a des expérimentations et l’impact qu’il aurait ailleurs.
Dans ces deux cas particuliers, parce que nous sommes intelligents, nous pouvons considérer que des rapports sont justifiés. Je le répète, quand des rapports sont injustifiés, faisons tomber le couperet, et refusons les demandes tous azimuts ! Mais, monsieur le rapporteur, jugeons la nécessité de chaque rapport au cas par cas et n’adoptons pas une doctrine contre tout rapport.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.
M. Alain Marc. Pour ma part, monsieur Assouline, je m’étonne que l’on veuille un rapport sur ce sujet, et je vais vous dire pourquoi.
Je m’occupe, sous la présidence de Jean-Claude Luche, des travaux routiers dans le département de l’Aveyron. Nous investissons chaque année environ 40 millions d’euros sur les routes, ce qui signifierait, si nous adoptions l’idée du 1 % travaux publics, 400 000 euros consacrés à la culture.
La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, la loi NOTRe, nous offre des possibilités d’action en matière culturelle.
Mais, comme les dotations de l’État sont en nette baisse, les départements ruraux vont être obligés de consacrer 400 000 euros en moins à la culture !
M. David Assouline. Quel est le rapport ?
M. Alain Marc. Il faut cesser de faire preuve d’angélisme et de naïveté ! Dans les départements ruraux, nous faisons avec ce que nous avons. Nous ne voulons pas de contrainte supplémentaire.
Nous agissons déjà beaucoup en faveur de la culture. Nous ne voulons pas que cela nous soit imposé au travers du 1 % goudron. Une telle mesure serait totalement stupide et démagogique ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées de l'UDI-UC.)
M. David Assouline. C’est pas démago, ça ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Personnellement, je crois au bien-fondé du 1 % culturel. J’ai eu l’occasion de l’appliquer avantageusement quand j’étais adjointe à la culture dans ma commune.
Cependant, il me semble que nous parlons un peu dans le vide. En effet, madame la ministre, il n'est pas nécessaire d’attendre une disposition législative sur la possibilité ou l’obligation d’un rapport sur le 1 % culturel pour que vos services établissent un tel rapport ! Ils peuvent engager ce travail dès maintenant, si vous le jugez opportun, et vous suggérer d’éventuelles améliorations.
Ne nous trompons pas de débat. Il ne s’agit pas ici de discuter de l’opportunité du 1 % culturel obligatoire. D’après ce que j’ai compris, vous souhaitez plutôt dresser un état des lieux. Nul besoin de loi pour cela !
Par ailleurs, à l’instar de Mme Mélot, je suis un peu dubitative sur les rapports. Je le rappelle, une disposition insérée sur notre initiative dans le projet de loi relatif au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre prévoit la remise au Parlement d’un rapport « sur l’éligibilité à l’aide à l’équipement des foyers dégrevés de la contribution à l’audiovisuel public et ne recevant les services de télévision en clair que par la voie satellitaire sans abonnement ». Nous souhaitions apporter cette mesure d’équité à nos concitoyens. Or, à ma connaissance, nous n’avons toujours pas reçu ce rapport, qui aurait dû nous être remis au début du mois de janvier !
Plus généralement, nous devons souvent attendre des mois, voire des années avant que les rapports soient réalisés. Laissons donc le soin de les rédiger aux services concernés des ministères ou du Parlement, qui, lui aussi, est compétent. Inutile de passer par la loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je voterai cet amendement, comme j’avais voté l’amendement précédent. Je lirai le rapport avec jubilation, parce qu’il est toujours heureux de pouvoir s’appuyer sur une réflexion préalable.
Je veux simplement dire un mot du terme « décoration », qui figurait dans le texte de l’amendement précédent.
Je trouve ce terme un peu étrange. Il présuppose l’existence d’une œuvre – il peut s’agir d’une route, d’un pont, d’une école, d’un hôpital, d’un théâtre… – qui ne relève pas de la culture et à laquelle on vient ajouter quelque chose, afin qu’il y ait un « plus » culturel.
Cela me fait un peu penser à ces guirlandes qui servent à enjoliver le réel ou à ces gâteaux auxquels on ajoute quelques ronds de confiture ou quelques fleurs pour faire saliver. (Sourires.)
M. René-Paul Savary. À crédit sur nos enfants !
M. Jean-Pierre Sueur. Mes chers collègues, je voudrais que l’on réfléchisse également – il pourrait justement y avoir quelques pages en ce sens dans le rapport – à la pertinence de la démarche consistant à distinguer la substance première de sa décoration par l’ajout d’un élément artistique.
Pour ma part, je considère que le pont est en lui-même une œuvre d’art. J’aimerais que les artistes sollicités ensuite pour le décorer fussent associés au projet dès l’origine.
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous devons concevoir la culture comme un tout et considérer que l’art est présent du début à la fin. Cela permettrait qu’il y ait cette beauté dont le futur rapport nous entretiendra.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Je partage la position pragmatique de David Assouline sur les rapports. Il ne faut évidemment pas aboutir à une inflation de rapports, mais, lorsqu’un rapport paraît utile, nous pouvons soutenir la démarche. Ne dessaisissons pas le Parlement de son pouvoir d’initiative en la matière !
Sur le fond, cette discussion me permet de lever une ambiguïté qui a persisté lors de l’examen de l’amendement précédent. Nous avions déposé l’amendement n° 234 parce que nous ne voulions pas que le débat de l’amendement n° 86 rectifié soit le prétexte à une remise en cause du 1 % artistique ; cela poserait beaucoup de problèmes à nos yeux. Le dispositif existe depuis longtemps, et il mérite d’être évalué, conforté et encouragé.
L’élargissement du 1 % artistique sur les travaux publics soulève de nombreux problèmes et fait naître de nombreuses incertitudes, compte tenu à la fois du volume qui serait concerné et du caractère éphémère des travaux, donc des projets artistiques qui pourraient les accompagner. Nous nous abstiendrons donc sur cet amendement.
En tout état de cause, au vu de la confusion que ce débat est susceptible d’entretenir, j’estime que nous avons eu raison de déposer l’amendement précédent, afin de consolider le dispositif du 1 % artistique, qui, encore une fois, existe, fonctionne et doit plus que jamais être conforté.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Par définition, le Parlement est le lieu où l’on parle. D’aucuns se plaignent parfois que nous parlions trop. Fort heureusement, on n’a plus besoin de lois pour dire que la parole est libre au Sénat ! Que tout le monde s’exprime !
Je fais amende honorable pour avoir confondu deux amendements tout à l'heure. Dont acte.
Je maintiens mon avis défavorable sur cet amendement. Madame la ministre, j’ai un peu le sentiment d’être dans « Ubu au Sénat » ! (Sourires.) Vous venez de vous prononcer en faveur de deux amendements visant à la remise de rapports au Parlement. Qu’est-ce qui vous empêche aujourd'hui de prendre l’engagement de satisfaire ces demandes, qui ne relèvent pas du domaine de la loi ? Tout le monde sera satisfait, et les deux amendements pourront être retirés ! (M. Jackie Pierre applaudit.)
M. Gérard Longuet. Élémentaire, mon cher Watson !
M. René-Paul Savary. C’est le bon sens !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. J’entends tout à fait les propos de M. le rapporteur. Je pourrais effectivement commander ces rapports à mon administration.
Simplement, lorsque j’ai eu à me prononcer sur les amendements, j’ai souhaité exprimer mon accord de principe sur la remise de tels rapports.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 3 bis demeure supprimé.
Chapitre II
Le partage et la transparence des rémunérations dans les secteurs de la création artistique
Article 4 A
(Non modifié)
Après le premier alinéa de l’article L. 131-2 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les contrats par lesquels sont transmis des droits d’auteur doivent être constatés par écrit. » – (Adopté.)
Article 4 B
(Supprimé)
Article 4
(Non modifié)
Le chapitre II du titre unique du livre II de la première partie du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Les articles L. 212-10 et L. 212-11 deviennent, respectivement, les articles L. 212-3-5 et L. 212-3-6 ;
2° Est insérée une section 1 intitulée : « Dispositions communes » et comprenant les articles L. 212-1 à L. 212-3-6 ;
3° Est insérée une section 2 intitulée : « Contrats conclus entre un artiste-interprète et un producteur de vidéogrammes » et comprenant les articles L. 212-4 à L. 212-9. – (Adopté.)
Article 5
Le même chapitre II est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Contrats conclus entre un artiste-interprète et un producteur de phonogrammes
« Art. L. 212-10. – (Non modifié) L’existence ou la conclusion d’un contrat de louage d’ouvrage ou de service avec un producteur de phonogrammes n’emporte pas dérogation à la jouissance des droits reconnus à l’artiste-interprète par les articles L. 212-2 et L. 212-3, sous réserve des exceptions prévues au présent code.
« Art. L. 212-11. – La cession des droits de l’artiste-interprète mentionnés au présent code est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans le contrat conclu avec le producteur de phonogrammes et que le domaine d’exploitation de ces droits soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.
« Toute clause qui tend à conférer le droit d’exploiter la prestation de l’artiste-interprète sous une forme non prévisible ou non prévue à la date de signature est expresse et stipule, au bénéfice des artistes-interprètes dont les contrats prévoient le paiement direct par le producteur d’une rémunération proportionnelle aux recettes de l’exploitation, une participation corrélative auxdites recettes.
« La cession au producteur de phonogrammes de droits de l’artiste-interprète autres que ceux mentionnés au présent code est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention expresse distincte dans le contrat.
« Art. L. 212-12. – (Non modifié) En cas d’abus notoire dans le non-usage par un producteur de phonogrammes des droits d’exploitation qui lui ont été cédés, la juridiction civile compétente peut ordonner toute mesure appropriée.
« Art. L. 212-13. – Le contrat conclu entre l’artiste-interprète et le producteur de phonogrammes fixe une rémunération minimale garantie en contrepartie de l’autorisation de fixation, rémunérée sous forme de salaire, de la prestation de l’artiste-interprète.
« Chaque mode d’exploitation du phonogramme incorporant la prestation de l’artiste-interprète prévu au contrat fait l’objet d’une rémunération distincte.
« Sont regardées comme des modes d’exploitation distincts la mise à disposition du phonogramme sous une forme physique et sa mise à disposition par voie électronique.
« Art. L. 212-13-1 – (Non modifié) I. – La mise à la disposition d’un phonogramme de manière que chacun puisse y avoir accès de sa propre initiative, dans le cadre des diffusions en flux, fait l’objet d’une garantie de rémunération minimale.
« II. – Les modalités de la garantie de rémunération minimale prévue au I et son niveau sont établis par un accord collectif conclu entre les organisations représentatives des artistes-interprètes et les organisations représentatives des producteurs de phonogrammes.
« Cet accord peut être rendu obligatoire par arrêté du ministre chargé de la culture.
« III. – À défaut d’accord collectif dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, la garantie de rémunération minimale versée par le producteur aux artistes-interprètes prévue au I est fixée de manière à associer justement les artistes-interprètes à l’exploitation des phonogrammes, par une commission présidée par un représentant de l’État et composée, en outre, pour moitié, de personnes désignées par les organisations représentant les artistes-interprètes et, pour moitié, de personnes désignées par les organisations représentant les producteurs de phonogrammes.
« Art. L. 212-14. – Lorsque le contrat conclu entre un artiste-interprète et un producteur de phonogrammes prévoit le paiement direct par le producteur d’une rémunération qui est fonction des recettes de l’exploitation, le producteur de phonogrammes rend compte semestriellement à l’artiste-interprète du calcul de sa rémunération, de façon explicite et transparente.
« À la demande de l’artiste-interprète, le producteur de phonogrammes fournit à un expert-comptable mandaté par l’artiste-interprète toutes justifications propres à établir l’exactitude de ses comptes. »
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. L’article 5 ouvre une série de dispositions relatives au secteur de la musique.
Nous le savons, les tensions en la matière entre producteurs, artistes et plateformes numériques sont fréquentes, en raison d’un contexte économique déprimé et, surtout, des bouleversements technologiques, qui modifient en profondeur les équilibres de rémunération entre les différents éléments de la filière. Nous vivons effectivement une vraie révolution. Les modèles sont en train de changer.
Madame la ministre, la médiation que vous avez confiée à M. Marc Schwartz l’été dernier a permis de louables avancées en faveur d’un plus juste partage de la valeur et de relations contractuelles mieux encadrées. Le présent projet de loi s’en fait l’écho dans cet article.
Notre commission a soutenu la démarche de sécurisation des contrats et des rémunérations que vous avez engagée. Toutefois, elle a rétabli la distinction entre artistes-interprètes principaux et artistes dits « de complément ». Elle a supprimé l’extension de la licence légale aux webradios – nous y reviendrons – en l’absence d’informations chiffrées fiables et d’étude d’impact satisfaisante. Elle a également renforcé l’articulation entre le médiateur de la musique, l’Autorité de la concurrence et les instances de conciliation prévues par la convention collective.
Ainsi modifiées, les dispositions du présent texte relatives au secteur de la musique présentent un équilibre satisfaisant entre la nécessaire reconnaissance des artistes, par une amélioration de leur rémunération, les intérêts économiques des producteurs et les enjeux liés à l’émergence de nouveaux modes de diffusion.
Il conviendra de veiller à ne pas trop bouleverser les équilibres ainsi obtenus.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, sur l'article.
M. Pierre Laurent. Comme vient de le souligner notre rapporteur, avec l’article 5, nous abordons un aspect essentiel du projet de loi, celui qui vise à mieux consacrer la liberté de création et la protection des artistes.
Nous le savons, en ces temps de bouleversement numérique des usages, les rapports de force entre artistes et producteurs-diffuseurs, qui sont déjà difficiles, pourraient se déstabiliser de manière problématique.
Or un très grand nombre de professionnels vivent déjà difficilement de leur art. Les chiffres montrent même que plus de la moitié des catégories professionnelles des arts et de la culture vivent sous le seuil de pauvreté. Ces professions connaissent donc une énorme précarité. Nous devons, me semble-t-il, faire preuve de vigilance sur la protection de la rémunération si nous voulons que les affirmations sur la liberté artistique correspondent à la réalité.
Nous nous réjouissons de l’existence de l’article 5, qui permet des avancées importantes. Nous ferons plusieurs propositions pour l’enrichir.
Parmi les avancées, nous notons l’assurance d’une rémunération minimale, dont le montant sera fixé par accord professionnel, la transparence du contrat, la distinction des modes d’exploitation… Toutes ces mesures vont dans le bon sens.
Malgré tout, nous relevons des manques, comme sur l’obligation d’instaurer une rémunération proportionnelle aux recettes d’exploitation, notamment sur internet. Pourquoi ne pas aussi inclure de prime spécifique dans le cas d’une cession exclusive des droits ?
Nous regrettons également la modification apportée à l’alinéa 6 pour exclure les artistes-musiciens exécutants d’une œuvre de la possibilité de recourir à des rémunérations proportionnelles, au motif que c’est l’usage. Nous pensons que cela introduit une injustice. Nous avons déposé des amendements pour y remédier.
En tout état de cause, notre objectif est bien d’enrichir encore cet article, auquel nous tenons beaucoup.
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, sur l'article.
Mme Colette Mélot. La convention collective nationale de l’édition phonographique demeure l’une des plus avantageuses au monde en matière de rémunération des artistes. Longuement négociée avec toutes les parties, elle avait été adoptée par une très large majorité des partenaires sociaux en 2008.
En l’état, l’article 5 du projet de loi ne distingue pas convenablement, à tort, la situation des artistes-interprètes, dont la rémunération est proportionnelle aux ventes, de celle des musiciens, payés au forfait, c’est-à-dire au cachet.
Au moment même où les partenaires sociaux sont sur le point de rouvrir la convention collective nationale de l’édition phonographique pour faire suite à certains engagements du protocole d’accord Schwartz, il ne serait pas opportun que le législateur empiète sur leurs prérogatives. Cela n’irait pas dans le sens d’une application sereine des accords collectifs et serait en contradiction avec l’attachement du Gouvernement au dialogue social.
C’est dans cette optique que j’ai déposé les amendements nos 180 rectifié et 181 rectifié. Je les défendrai dans quelques instants.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 236 est présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 370 est présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Remplacer les mots :
, au bénéfice des artistes-interprètes dont les contrats prévoient le paiement direct par le producteur d’une rémunération proportionnelle aux recettes de l’exploitation, une participation corrélative auxdites recettes
par les mots :
une participation corrélative aux profits d’exploitation
La parole est à M. Éric Bocquet, pour présenter l’amendement n° 236.
M. Éric Bocquet. Dans la droite ligne de ce que notre collègue Pierre Laurent a indiqué en intervenant sur l’article, nous proposons de revenir sur la rédaction de l’alinéa 6, dont la commission de la culture du Sénat a limité la portée aux seuls artistes principaux, ce qui nous pose problème.
Partant du principe qu’il s’agit d’un usage, il a été décidé d’empêcher les musiciens qui participent à une œuvre d’accéder au système des rémunérations proportionnelles à ses recettes d’exploitation. Voilà qui marque un recul important et qui s’inscrit dans une globalisation inquiétante !
En effet, « usage » ne signifie pas « totalité ». Or, si la rédaction initiale de cet alinéa risquait de ne profiter qu’à peu de monde, la rédaction actuelle concerne l’ensemble des artistes musiciens participants.
Par ailleurs, une telle disposition consacre une pratique discutable sur le fond, au seul motif que tel serait l’usage ! Cette consécration législative empêche de facto toute évolution d’une pratique déjà injuste, en la légitimant.
Il ne s’agit évidemment pas pour nous de considérer que la contribution du musicien participant et celle de l’artiste-interprète ont la même importance au sein d’une œuvre.
Toutefois, de la même manière que les deux catégories de travailleurs ont deux cachets différents, rien n’empêcherait d’instaurer deux taux distincts de rémunération proportionnelle aux recettes d’exploitation.
Par ailleurs, si nous reconnaissons une différence de degré d’implication, fermer ainsi la porte, d’un point de vue législatif, aux musiciens participants revient à nier leur rôle capital dans la création artistique et culturelle. Or, bien souvent, la prestation d’un artiste participant est tout aussi importante, capitale, à l’œuvre finale que la prestation principale, la première enrichissant fortement la seconde.
Cet amendement vise à réintégrer la possibilité pour les artistes musiciens participants de recourir, dans leur contrat, à des rémunérations proportionnelles aux recettes d’exploitation.
Cette mesure ne concerne que peu de personnes, mais elle permet d’anticiper les mutations des usages en cours.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour présenter l'amendement n° 370.
Mme Corinne Bouchoux. Comme cela a été souligné, le partage des rémunérations et le poids accordé aux producteurs, aux artistes-interprètes, aux musiciens et aux auteurs ont heureusement évolué depuis un siècle. Subsistent néanmoins des bizarreries, des traditions inégalitaires. Il est opportun de les lever.
Nous faisons bien évidemment confiance au dialogue social pour surmonter un tel état de fait. Toutefois, nous aimerions revenir à la rédaction proposée par l’Assemblée nationale, afin que les musiciens accompagnants puissent être rémunérés pour des exploitations non prévisibles.
En effet, le texte tel qu’il est rédigé établit une hiérarchie qui n’a absolument plus de sens, au motif suivant : « Selon les usages en vigueur dans l’édition phonographique, les artistes musiciens ne bénéficient pas, à la différence des artistes principaux, de rémunérations proportionnelles aux recettes d’exploitation. »
Mes chers collègues, je n’ai rien contre le fait d’invoquer les usages. Mais il fut une époque où les enfants travaillaient et où tout le monde trouvait cela normal, car c’était l’usage ! Il fut une époque où les femmes ne pouvaient pas voter, et tout le monde trouvait cela très bien – surtout ici ! –, car c’était l’usage ! (Sourires sur les travées du groupe CRC.)
En l’espèce, je comprends qu’il soit confortable d’invoquer les usages pour pérenniser une situation et ne rien changer. Néanmoins, compte tenu de la faiblesse du nombre de personnes concernées et du caractère extrêmement égalitaire d’une telle mesure, nous souhaitons en revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale.
De quel droit allons-nous dire depuis notre fenêtre qu’untel, par exemple le violoniste de l’orchestre, peut bénéficier du dispositif quand tel autre, par exemple le joueur de triangle, n’y aurait pas droit ? L’argument de l’usage ne nous semble pas pertinent. Il nous paraît légitime que les artistes-interprètes ne soient pas exclus du bénéfice de la rémunération des droits de propriété intellectuelle.
On nous a enfin opposé des difficultés pratiques de calcul. Or, à l’heure d’Excel, des ordinateurs et de la modernité, l’obstacle nous semble facile à lever. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je ne partage pas l’analyse des auteurs de ces deux amendements.
Premièrement, l’alinéa 6 est relatif aux formes non prévisibles et non prévues d’exploitation. C’est dans ce cas précis qu’il était prévu à l’article 5 de faire bénéficier tous les artistes d’une rémunération proportionnelle. Dans tous les autres cas, cette rémunération doit être prévue dans le contrat.
Deuxièmement, chère Corinne Bouchoux, vous parlez de « l’usage ». Mais le contexte est complètement différent.
Personnellement, j’aime les variétés et la musique ; ne m’accusez pas de ne pas être un accompagnateur des artistes, qu’il s’agisse de music-hall ou de musique classique. Mais il existe une véritable différence entre l’artiste-interprète, celui dont le portrait figure sur la pochette du disque, et le musicien qui l’accompagne. Certes, ce dernier ne manque pas de talent ; il lui arrive d’ailleurs souvent de faire trois ou quatre galas dans la même soirée, par exemple dans des boîtes de la rive gauche.
M. Gérard Longuet. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Mais ce n’est pas le même métier. L’un incarne une image, celle qu’il a créée au cours de sa carrière ; l’autre se met au service des artistes-interprètes. Il est donc normal qu’il soit payé au cachet. Il arrive parfois que des musiciens, par exemple des guitaristes ou des batteurs, émergent et deviennent des têtes d’affiche alors qu’ils n’étaient au début que des accompagnateurs. Mais, encore une fois, nous parlons de deux métiers différents.
C'est la raison pour laquelle nous avons voulu que le statut soit différent. L’accompagnant bénéficie du cachet de base, ce qui est le cas de tout le monde, pour la prestation et la fixation de l’œuvre et, éventuellement, le complément. Seul l’artiste-interprète bénéficie d’une rémunération proportionnelle, a fortiori en cas d’exploitation non prévisible.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le Gouvernement est favorable à ces deux amendements identiques, qui visent à donner certaines garanties à tous les artistes-interprètes, qu’ils soient principaux ou secondaires, sur les nouvelles formes d’exploitation des œuvres qui pourraient apparaître après la conclusion des contrats.
Cette rémunération est la contrepartie de la possibilité donnée au producteur de s’assurer qu’il disposera de l’ensemble des droits nécessaires à l’exploitation du phonogramme à l’avenir, malgré l’imprécision du contrat au moment de sa conclusion sur les modes d’exploitation couverts par la cession des droits.
Il ne s’agit donc pas seulement de rétablir une forme d’égalité entre les différents types d’artistes ; il faut également sécuriser les producteurs.
Cette rémunération doit pouvoir être calculée et assurée pour l’ensemble des artistes-interprètes sans opérer de distinction entre artistes-interprètes, qu’ils soient principaux ou secondaires.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 236 et 370.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 180 rectifié est présenté par Mme Mélot, MM. Commeinhes et Kennel et Mme Duchêne.
L'amendement n° 204 rectifié est présenté par MM. Bonnecarrère, Capo-Canellas, Laurey, Cadic et Cigolotti, Mme Goy-Chavent, MM. Marseille et Guerriau, Mmes Billon et Gatel et M. Gabouty.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 9 et 10
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 212-13. - Lorsque le contrat conclu entre un artiste-interprète et un producteur de phonogrammes est un contrat de travail, il fixe une rémunération en contrepartie de la prestation et de l’autorisation de fixation de la prestation de l’artiste-interprète, versée sous forme de salaire. Lorsque ce contrat ne prévoit pas le paiement direct par le producteur d’une rémunération fonction des recettes de l’exploitation et qu’une convention collective est applicable, le contrat précise les rémunérations dues à l’artiste-interprète pour chacun des modes d’exploitation déterminés par la convention collective.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 180 rectifié.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à prévoir des rémunérations distinctes selon que l’artiste-interprète est lié ou non par un contrat de travail.
Je propose de remplacer les alinéas 9 et 10 de l’article par un alinéa ainsi rédigé : « Lorsque le contrat conclu entre un artiste-interprète et un producteur de phonogrammes est un contrat de travail, il fixe une rémunération en contrepartie de la prestation et de l’autorisation de fixation de la prestation de l’artiste-interprète, versée sous forme de salaire. Lorsque ce contrat ne prévoit pas le paiement direct par le producteur d’une rémunération fonction des recettes de l’exploitation et qu’une convention collective est applicable, le contrat précise les rémunérations dues à l’artiste-interprète pour chacun des modes d’exploitation déterminés par la convention collective. »
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour présenter l'amendement n° 204 rectifié.
M. Philippe Bonnecarrère. Je partage la position de Mme Mélot. Je vais simplement essayer d’anticiper la possible réponse de M. le rapporteur.
En commission, il avait fait référence aux accords Schwartz. N’érigeons pas ces derniers en totem ! Nous le savons, ils sont moins consensuels que ce que d’aucuns prétendent.
Par ailleurs, nos deux amendements identiques ont pu être accusés de porter atteinte à l’esprit de la disposition visant à permettre une rémunération pour chacun des modes d’exploitation.
Un tel argument m’avait surpris. En effet, il est expressément indiqué dans le texte de nos amendements identiques que le contrat « précise les rémunérations dues à l’artiste-interprète pour chacun des modes d’exploitation » – c’est bien là le débat ! – « déterminés par la convention collective. »
La seule exception, je vous l’accorde, c’est quand le contrat de travail prévoit une rémunération en fonction des recettes d’exploitation. Une telle exception ne me paraît pas scandaleuse dans la mesure où elle prend en compte les différents modes d’exploitation à travers les recettes d’exploitation. C’est une longue tradition dans le métier. En outre, comme les artistes passent des conventions sur le plan international, il me paraîtrait difficile de ne pas permettre que leurs relations soient définies sur des bases également connues dans les autres pays.
Je permets donc de souhaiter que la position sur le sujet de M. le rapporteur puisse évoluer.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Ces amendements tendent à supprimer la mention dans les contrats des différents types d’exploitation.
La rédaction que nous avons retenue est dans la lignée des accords Schwartz. L’adoption de ces amendements constituerait un recul en matière de transparence. Or cette notion est au cœur de l’article.
Vous le savez, dans cette profession, les interactions économiques entre les divers éléments de la filière sont complexes, notamment lorsque les différences de moyens de diffusion et d’exploitation explosent.
Il nous a paru légitime de satisfaire la demande des artistes, dans la lignée des accords Schwartz. Il faut que chacun des modes d’exploitation, même ceux qui sont encore imprévisibles à l’heure actuelle et qui le seront forcément à l’avenir, soit mentionné dans les contrats, par souci de clarté.
Je souhaite donc le maintien de la rédaction actuelle de l’article 5, et sollicite le retrait de ces deux amendements identiques, faute de quoi l’avis serait défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements identiques, pour les raisons qui viennent d’être exposées par M. le rapporteur.
En effet, l’article 5 du projet de loi a pour objet d’établir les conditions d’une réelle transparence dans les pratiques contractuelles entre les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes. Le texte vise à permettre aux artistes et aux producteurs de distinguer les modes de rémunération liés aux différents modes d’exploitation.
L’exploitation en ligne des phonogrammes constitue incontestablement un support distinct de l’exploitation physique. Il est donc légitime que les artistes puissent se voir reconnaître des rémunérations distinctes, selon le support en question. Les partenaires sociaux devront désormais prendre en compte cette distinction dans le cadre de la convention collective.
L’adoption de ces amendements affaiblirait très considérablement la portée de l’article 5, donc la protection des artistes, ce qui ne me semble pas être l’intention de leurs auteurs.
Mme la présidente. Madame Mélot, l'amendement n° 180 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, madame la présidente ; je le retire, en espérant que Mme la ministre aura entendu l’appel que j’ai lancé en présentant cet amendement. (Mme la ministre le confirme.)
Mme la présidente. L'amendement n° 180 rectifié est retiré.
Qu’en est-il de l'amendement n° 204 rectifié, monsieur Bonnecarrère ?
M. Philippe Bonnecarrère. Devant une telle convergence, je ne puis que le retirer, madame la présidente ! (Sourires.)
Mme la présidente. L'amendement n° 204 rectifié est retiré.
L'amendement n° 181 rectifié, présenté par Mme Mélot, MM. Commeinhes et Kennel et Mme Duchêne, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. La distinction artificielle entre exploitation physique et exploitation numérique des titres musicaux a pour effet, au lieu d’améliorer la rémunération de l’artiste, de priver les musiciens d’une part de la rémunération qu’ils perçoivent actuellement dans le cadre de la convention collective lorsqu’il n’y a pas d’exploitation sous forme physique. De plus en plus de phonogrammes ne sortent déjà plus qu’en version numérique.
Par ailleurs, la rédaction actuelle de l’alinéa 11 est contraire à l’analyse des partenaires sociaux. Ces derniers n’ont en effet pas souhaité établir de différence entre l’exploitation physique et exploitation numérique d’un album. Ils ont au contraire prévu des rémunérations assimilant le streaming et le téléchargement des œuvres aux ventes physiques.
Il convient d’améliorer la rémunération des artistes en prenant en compte les nouveaux modes d’édition.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Dans le prolongement de ce que j’ai indiqué précédemment, il me semble désormais légitime d’établir une distinction entre exploitations physiques et exploitations numériques ; nous ne sommes plus à l’époque du microsillon !
Certes, la convention collective, qui date, me semble-t-il, de 2008, ne le prévoit pas pour l’instant. Mais le sujet devrait certainement être remis au goût du jour, car la convention doit être bientôt renouvelée.
Pour autant, cela ne change absolument rien à la rémunération de l’artiste. Il s’agit simplement d’apporter plus de clarté dans le contrat.
Par conséquent, je souhaiterais le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. M. le rapporteur a très bien expliqué pourquoi la distinction entre les différents types d’exploitation des œuvres était aujourd’hui nécessaire pour assurer la protection des artistes.
La rémunération liée à l’exploitation physique d’une œuvre et celle qui est liée à son exploitation numérique doivent rester distinctes. Il ne faut pas que la première absorbe la seconde, compte tenu des pouvoirs de négociation respectifs dont disposent producteurs et artistes.
Mme la présidente. Madame Mélot, l'amendement n° 181 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, je le retire, madame la présidente.
J’ai bien entendu les arguments de M. le rapporteur et de Mme la ministre, que je remercie d’avoir répondu à mes interrogations.
Mme la présidente. L'amendement n° 181 rectifié est retiré.
L'amendement n° 436 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 13 et 14
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« II. – La garantie de rémunération minimale versée par le producteur aux artistes-interprètes prévue au I est fixée de manière à associer justement les artistes-interprètes à l'exploitation des phonogrammes, par une commission présidée par un représentant de l'État et composée en outre, pour moitié de personnes désignées par les organisations représentant les artistes-interprètes et pour moitié de personnes désignées par les représentants de producteurs de phonogrammes.
II. – Alinéa 15
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement vise à créer une commission chargée de fixer la garantie de rémunération minimale versée par le producteur aux artistes-interprètes lors de l’exploitation de leurs enregistrements en streaming.
Les artistes-interprètes pourraient ainsi bénéficier d’un dispositif de rémunération équitable lors de l’exploitation de leurs enregistrements auprès des plateformes de streaming.
Ces dernières années, plusieurs rapports successifs contenaient des propositions relatives à la mise en œuvre d’une gestion collective obligatoire des droits de la musique en ligne, afin de garantir une juste rémunération des artistes-interprètes.
Nous souhaitons donc fixer les conditions d’une négociation juste et équitable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement a pour objet la création d’une commission ad hoc – cela en ferait une de plus dans un secteur qui en connaît déjà beaucoup ! – pour fixer la garantie d’une rémunération équitable.
Cette garantie de rémunération équitable représente l’une des avancées majeures du protocole d’accord de Marc Schwartz. Comme cela est prévu, le montant sera fixé par les parties au terme d’une négociation actée par tous les signataires de l’accord ; elle sera lancée à l’issue du délai prévu dans le texte.
À mon sens, il n’est donc pas nécessaire à ce jour de prévoir la création d’une commission supplémentaire pour traiter de cette question, alors que les organisations professionnelles ont déjà pris un tel engagement. De surcroît, vous souhaitez confier la présidence de cette commission à un représentant de l’État ; cela risque de déranger les partenaires sociaux, qui seront en train de négocier.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Certes, nous partageons évidemment la préoccupation qui vient d’être exprimée : permettre aux artistes-interprètes de bénéficier d’une juste rémunération au titre des exploitations numériques des enregistrements auxquels ils ont contribué.
C’est d’ailleurs à ce titre que j’ai confié une mission à Marc Schwartz. Elle a débouché sur la consécration, à l’article 5, d’une négociation, dans le cadre d’un accord collectif, sur la garantie de rémunération minimale. La négociation est toutefois enserrée dans un délai très bref. En cas d’échec, une commission administrative paritaire serait appelée à déterminer la rémunération minimale des artistes.
L’adoption de cet amendement conduirait à supprimer la phase de négociation. J'estime que la rédaction actuelle de l’article 5 apporte des garanties réelles aux artistes, en leur permettant d’être associés à l’exploitation des phonogrammes.
Par conséquent, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, madame la sénatrice. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Mme la présidente. Madame Laborde, l'amendement n° 436 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, madame la présidente.
Je note simplement qu’il y a eu plusieurs rapports sur le sujet. Nous avons beaucoup glosé sur les rapports. Je constate avec intérêt que certains ont une utilité !
Mme la présidente. L'amendement n° 436 rectifié est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 235, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° L'article L. 122-7 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute cession de droit d'auteur à titre gratuit doit faire l'objet d'une mention distincte justifiant l'intention libérale. La promotion de l'auteur ou de ses œuvres ne saurait constituer une intention libérale au sens du présent article. » ;
2° L’article L. 132-12 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’abus notoire dans le non-usage par un éditeur des droits d’exploitation qui lui ont été cédés, la juridiction civile compétente peut ordonner toute mesure appropriée. » ;
3° Au deuxième alinéa de l’article L. 132-13, les mots : « une fois l’an » sont remplacés par le mot : « semestriellement » ;
4° Le septième alinéa de l’article L. 132-17-3 est ainsi rédigé :
« La reddition des comptes est effectuée au moins semestriellement, à la date prévue au contrat ou, en l'absence de date, au plus tard deux mois après chaque semestre de l’année civile. » ;
5° Au premier alinéa de l’article L. 132-28, les mots : « une fois par an » sont remplacés par le mot : « semestriellement ».
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Cet amendement vise à aligner les droits des auteurs sur celui des artistes-interprètes en matière à la fois de protection contre les non-usages abusifs de droits, de protection contre les cessions à titre gratuit imposées et de reddition des comptes.
C’est en ce sens que nous proposons la modification des articles L. 122-7, L. 132-12, L. 132-13, L. 132-17-3 et L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle. Ces diverses adaptations doivent contribuer à l’alignement des droits des auteurs sur ceux des artistes-interprètes.
L’amendement vise tout d’abord à insérer « une mention distincte justifiant l’intention libérale » dans les contrats de cession de droits. Aujourd’hui, les auteurs se trouvent trop souvent contraints de céder l’ensemble de leurs droits – et ce, à titre gratuit ! – au motif qu’un mandataire pourrait organiser la promotion de l’œuvre. Cette pratique particulièrement dangereuse ne peut conduire qu’à une précarisation des auteurs.
En effet, même si la cession de droit à titre gratuit est en principe une faculté, et non une obligation, le rapport de force inégal entre diffuseurs et auteurs peut conduire à des cessions gratuites contraintes. Il convient donc de se prémunir contre de telles situations en imposant une justification par écrit.
Ensuite, l’amendement tend à exclure la promotion des raisons justifiant la cession des droits à titre gratuit. À défaut, il faudrait considérer que la mise à disposition du public d’une œuvre constitue une rémunération suffisante, ce qui entrerait incontestablement en contradiction avec le principe même de droit d’auteur.
En outre, l’amendement a pour objet de transposer aux auteurs les dispositions prévues pour les artistes-interprètes à l’article 5 du projet de loi en matière « d’abus notoire dans le non-usage […] des droits d’exploitation ».
Enfin, l’amendement vise à revoir la périodicité de la remise des comptes aux auteurs ; elle avait un sens en 1957, mais elle n’en a plus aujourd’hui. En effet, aucun fournisseur n’étant payé à l’issue d’un délai aussi long, il apparaît inutile de maintenir une périodicité annuelle. Une périodicité semestrielle constituerait une sécurité plus importante.
Mme la présidente. L'amendement n° 91 rectifié bis, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…- L’article L. 132-12 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’abus notoire dans le non-usage par un éditeur des droits d’exploitation qui lui ont été cédés, la juridiction civile compétente peut ordonner toute mesure appropriée. »
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Cet amendement a pour objet de transposer le dispositif prévu à l’article 5 aux auteurs d’œuvres écrites – ceux-ci peuvent subir les mêmes abus de la part des éditeurs –, en prévoyant l’intervention du juge « en cas d’abus notoire dans le non-usage » des droits d’exploitation par un éditeur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. J’ignore pourquoi nous examinons des amendements portants sur l’édition alors que nous débattons des artistes-interprètes et de la musique ! J’imagine que les spécialistes de l’ordonnancement législatif, eux, doivent le savoir ! (Sourires.)
Sur le fond, les contrats prévoient déjà les différents cas de cession des droits, y compris à titre gratuit. La précision que proposent les auteurs des amendements nos 235 et 91 rectifié bis me paraît donc inutile.
En outre, aux termes de l’article L. 132-12 du code de la propriété intellectuelle, l’éditeur est tenu d’assurer à l’auteur une exploitation permanente et suivie, ainsi qu’une diffusion commerciale de son œuvre. Le non-respect de cette obligation est donc déjà passible d’une sanction par le juge, sous la forme de la résiliation du contrat d’édition aux torts de l’éditeur, assortie du paiement de dommages-intérêts.
Enfin, pour des raisons économiques et pratiques évidentes, et pour des raisons de fonctionnement, il semble peu opportun de contraindre les éditeurs, qui, pour beaucoup d’entre eux, disposent de moyens matériels et humains limités – il n’y a pas que de grands éditeurs ! –, à rendre compte tous les six mois à chacun de leurs auteurs et pour chaque ouvrage du nombre d’exemplaires fabriqués et vendus, ainsi que du calcul de la rémunération associée.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Il est proposé à l’amendement n° 235 de limiter les risques d’abus en encadrant les conditions dans lesquelles les auteurs peuvent céder leurs droits de manière gratuite. Sur ce point, je tiens à rappeler que les cessions gratuites sont d’ores et déjà sanctionnées par les tribunaux, dès lors qu’elles sont jugées abusives. En effet, les juges exigent que les cessions gratuites soient dépourvues de toute ambiguïté et consenties par les auteurs en toute connaissance de cause. La préoccupation exprimée dans cet amendement est donc déjà satisfaite en droit.
Cet amendement vise également à donner la possibilité aux auteurs de saisir le juge, lorsque leurs droits ne sont pas exploités. Or, comme vient de l’indiquer M. le rapporteur, cette faculté de saisir les tribunaux existe déjà en droit français. Le code de la propriété intellectuelle prévoit en effet pour les éditeurs l’obligation d’exploiter à leur charge les droits des auteurs. Ces derniers sont donc protégés, puisqu’ils peuvent saisir les juges en cas de non-respect de cette obligation.
Enfin, l’amendement vise à obliger les éditeurs à rendre compte « semestriellement » de l’exploitation des œuvres. Certes, la loi n’impose actuellement qu’une base annuelle. Mais rien n’empêche les parties de prévoir contractuellement une communication plus régulière des comptes. De plus, il ne me paraît pas souhaitable de limiter la liberté des parties sur ce point ou la possibilité pour celles-ci de prendre en compte les particularités de chaque situation.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 235.
L’avis est également défavorable sur l’amendement n° 91 rectifié bis, qui concerne les auteurs et leur capacité à saisir le juge en cas d’inexploitation des droits cédés aux éditeurs.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 91 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5.
(L'article 5 est adopté.)
Article additionnel après l'article 5
Mme la présidente. L'amendement n° 87 rectifié bis, présenté par M. Raynal est ainsi libellé :
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 212-3 du code de la propriété intellectuelle est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« En ce qui concerne le droit de mise à la disposition du public, par fil ou sans fil, de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement, les artistes-interprètes bénéficient, même après le transfert de leur droit exclusif, d’un droit à rémunération équitable payée par les personnes mettant à disposition des phonogrammes.
« Ce droit à rémunération équitable, auquel il ne peut être renoncé, ne peut être exercé que par une société de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes, agréée à cet effet par le ministre chargé de la culture.
« L’agrément est délivré en considération de la qualification professionnelle des dirigeants des sociétés ; des moyens humains et matériels que ces sociétés proposent de mettre en œuvre pour assurer la perception et la répartition de cette rémunération, tant auprès de leurs membres qu’auprès des artistes-interprètes qui ne sont pas leurs membres ; de la représentation des artistes-interprètes bénéficiaires de cette rémunération ; de leur respect des obligations prévues au titre II du livre III. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de délivrance et de retrait de cet agrément.
« Les barèmes et les modalités de versement de la rémunération sont établis par des accords entre la société de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes agréée et les personnes mettant à disposition des phonogrammes dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article.
« À défaut d’accord dans les six mois à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, les barèmes et les modalités de versement de la rémunération sont arrêtés par une commission présidée par un représentant de l’État et composée, en nombre égal, d’une part de membres désignés par la société de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes agréée, d’autre part de membres désignés par des organisations représentant les personnes qui utilisent les phonogrammes dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article. »
La parole est à M. Claude Raynal.
M. Claude Raynal. Aujourd’hui, il n’est plus possible de promouvoir les services « légaux » sur internet et d’appeler à la répression des utilisations « illicites » ou « pirates », alors que ces mêmes services légaux laissent la quasi-totalité des artistes-interprètes sans rémunération.
En effet, à l’exception des artistes principaux, qui peuvent, lorsqu’ils disposent d’une certaine notoriété, percevoir des royalties des producteurs pour l’utilisation de leurs enregistrements par des plateformes de service à la demande, la quasi-totalité des artistes-interprètes ne perçoit aucune rémunération à ce titre.
Les artistes qui ne sont pas des vedettes ou des artistes dits « principaux » ne bénéficient pas de royalties, cédant les droits correspondants aux producteurs en contrepartie du seul paiement du salaire, le cachet, forfaitaire d’enregistrement, cachet rémunérant le travail d’enregistrement, ainsi que l’exploitation de celui-ci sur tous supports et par tous services à la demande, pour le monde entier et toute la durée de protection des droits, soit soixante-dix ans.
L’urgence est donc de garantir aux artistes-interprètes une rémunération pour ces utilisations sur internet de leurs enregistrements sur le modèle de la rémunération équitable mise en place pour la diffusion de musique par les radios ou les télévisions. En effet, une rémunération équitable et indépendante de l’exercice du droit exclusif qui est cédé aux producteurs doit être garantie aux artistes. Cette rémunération doit être négociée et perçue par une société de gestion collective d’artistes-interprètes, avec laquelle j’ai d’ailleurs préparé cet amendement, auprès des services de téléchargement et de streaming.
Dans cette perspective, les modalités de fixation de la rémunération laissent la priorité à la négociation, mais évitent tout blocage en prévoyant un mécanisme subsidiaire reposant sur une commission administrative composée de représentants des ayants droit et des utilisateurs et présidée par un représentant de l’État.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à accompagner des accords qui sont consécutifs – notre collègue Laborde l’a indiqué tout à l’heure – à une série d’analyses et de rapports. Tout est parti des treize engagements de l’ensemble de la profession : le rapport Phéline, l’intervention Toubon, puis la tentative de Marc Schwartz, qui a débouché sur l’accord ; mais rappelons que cela fut difficile…
L’accord me paraît justifié, car il est parvenu à trouver une voie médiane entre les intérêts des uns et des autres, avec une réelle avancée en matière de transparence.
Je le sais, le dispositif que vous proposez est demandé par plusieurs représentants des artistes-interprètes qui, assez arc-boutés sur la défense d’un certain nombre de leurs intérêts, n’ont pas cosigné l’accord Schwartz.
Pour autant, la situation évolue vers une plus grande transparence, et l’accord a été signé par la grande majorité des partenaires. Je préférerais donc lui donner la priorité dans le cadre de ce texte, qui est le résultat de plusieurs années de débats extrêmement difficiles dans la filière.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. L’avis est également défavorable, pour les raisons que j’ai exposées tout à l’heure en expliquant la genèse de la mission Schwartz.
Encore une fois, le Gouvernement partage l’objectif constant d’assurer une rémunération équitable des revenus issus des exploitations numériques de la musique enregistrée. En tant que ministre de la culture, je suis évidemment tout particulièrement soucieuse d’assurer une juste rémunération des artistes-interprètes au titre de ces exploitations.
C’est tout l’objet de la mission confiée à Marc Schwartz, qui a débouché sur la consécration, à l’article 5 du projet de loi, de la garantie de rémunération minimale négociée dans le cadre d’un accord collectif.
Je le souligne, cette solution résulte d’une très large concertation et respecte le cadre contractuel des relations entre les artistes-interprètes et les producteurs, tout en satisfaisant à l’objectif d’une meilleure rémunération des artistes.
Pour s’assurer que cette garantie de rémunération minimale sera bien mise en place, l’article 5 du projet de loi prévoit un délai de douze mois au cours duquel l’accord collectif devra intervenir. Je le rappelle, faute d’accord, il appartiendrait à une commission administrative de statuer.
À ce stade, la garantie de rémunération minimale inscrite dans le projet de loi apparaît comme une solution plus adaptée, plus souple et plus consensuelle que l’instauration d’un droit à rémunération équitable, comme le proposent les auteurs de cet amendement.
Le gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Je soutiens cet amendement, qui est important.
Contrairement à ce que je viens d’entendre, il est indispensable que les artistes-interprètes puissent obtenir une juste rémunération de leur travail. Il n’est pas logique qu’un grand nombre d’artistes-interprètes – il y en a pratiquement autant que de communes en France ! – ne trouvent pas les dispositions de répartition des recettes satisfaisantes, alors même que l’on essaie de promouvoir à travers ce projet de loi la création artistique et l’interprétation.
Il faut écouter ce que nous disent les artistes-interprètes. Ils sont nombreux, et je les soutiens.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 87 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 6
(Non modifié)
Le chapitre III du titre unique du livre II de la première partie du même code est complété par un article L. 213-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 213-2. – Le contrat conclu par le producteur d’un phonogramme avec un éditeur de services de communication au public par voie électronique mettant à disposition des œuvres musicales fixe les conditions de l’exploitation des phonogrammes de manière objective et équitable. Ces conditions ne peuvent comporter de clauses discriminatoires non justifiées par des contreparties réelles. »
Mme la présidente. L'amendement n° 182 rectifié, présenté par Mme Mélot, MM. Commeinhes et Kennel et Mme Duchêne, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. L’article 6 tend à compléter le code de la protection intellectuelle par un article qui fait référence aux contrats entre producteurs de phonogrammes et éditeurs de services de communication par voie électronique.
Il s’agit d’un l’encadrement excessif. Cela va au-delà des règles qu’imposent de manière classique le droit commercial, le droit des obligations et le droit de la concurrence. Ce n'est pas justifié.
Le streaming est un nouveau mode d'exploitation prometteur. Il devrait permettre, à court ou moyen termes, de relancer le marché de la production musicale, qui a perdu 70 % de sa valeur en dix ans. Sur les sept premiers mois de 2015, neuf milliards de streams ont été écoutés. Trois millions de Français sont déjà abonnés à un service de streaming, ce qui permet une amélioration significative des revenus des artistes grâce à ce nouveau mode d'exploitation. Le streaming par abonnement représente déjà 22 % des revenus totaux du marché de la musique enregistrée.
Ainsi, établir des obligations spécifiques entre producteurs et plateformes alourdirait le formalisme et introduirait de l'incertitude dans les contrats existants. Or la priorité est d'encourager le dynamisme retrouvé grâce au nouveau mode d'exploitation offert par le streaming.
Je propose donc de supprimer cet article, qui ne me paraît pas adapté.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le streaming semble insuffler aujourd'hui un nouvel élan à l’industrie musicale. Heureusement ! Celle-ci a traversé une période extrêmement difficile, avec la chute des ventes de produits physiques. Le streaming est en train de faire renaître l’espérance !
C’est un début. Il se peut que nous assistions à l’émergence d’autres systèmes. Dans ce contexte extrêmement mutant, où les modèles économiques sont en train de changer, la commission a considéré que certains partenaires pourraient profiter de ces métamorphoses tandis que d’autres en seraient peut-être les victimes.
La solution retenue dans l’accord Schwartz, dont nous partageons l’esprit, consiste à privilégier la transparence. Au moins, les principes seront clairs. Dans une telle situation de mutation, cela nous paraît sain.
Or, ma chère collègue, vous proposez de supprimer cette forme de précision dans la contractualisation entre un partenaire un peu ancien, le producteur, et un nouveau, la plateforme. La transparence nous paraît utile, au moins pour un temps à venir. Elle clarifie la situation, et permet que la régulation des rémunérations entre chacun des partenaires de la filière, très interactifs sur le plan économique, se passe le mieux possible. Vous le savez, quand on y voit clair, la régulation se passe mieux !
Je suis donc opposé à la restriction que vous souhaitez introduire dans le texte.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le Gouvernement est également opposé à une telle restriction.
L’article 6 du projet de loi a pour objet de faciliter l’accès des petites plateformes aux catalogues des différents producteurs, en particulier des gros majors. De plus, il vise à protéger les petits labels et producteurs indépendants dans leurs rapports avec les grandes plateformes.
Il ne s’agit pas d’alourdir démesurément le formalisme des relations contractuelles entre producteurs et plateformes de musique en ligne. Il ne s’agit pas plus d’introduire de l’incertitude dans les contrats existants. Au contraire ! Il s’agit d’assurer un développement équitable de la musique en ligne, au bénéfice de tous.
Ce sont les offres variées et segmentées proposées par les plateformes qui, nous le savons bien, peuvent être le relais de la diffusion d’une création diverse et d’une amélioration de l’offre légale, celle-ci étant propice à l’élargissement du public.
La tendance à la concentration des usages et des écoutes sur les plateformes de streaming les plus utilisées par le grand public montre combien il est indispensable de favoriser l’accès au marché à d’autres offres.
Dans ce contexte, il est absolument nécessaire d’assurer une meilleure transparence et de garantir des conditions équilibrées d’accès au marché. Pour cela, il est nécessaire de leur assurer un cadre contractuel et commercial lui aussi équilibré.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Madame Mélot, l'amendement n° 182 rectifié est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Non, madame la présidente. Je le retire, car je suis satisfaite que l’on tienne compte des évolutions ; je pense qu’il y aura de nouvelles formes de contrats dans peu de temps.
Mme la présidente. L'amendement n° 182 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
(M. Claude Bérit-Débat remplace Mme Françoise Cartron au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Claude Bérit-Débat
vice-président
Articles additionnels après l'article 6
M. le président. L'amendement n° 88 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Raynal, Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 212-3-4 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 212-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 212-3-… – Les sociétés de perception et de répartition des droits répartissent les rémunérations qu’elles perçoivent pour le compte des artistes-interprètes, à ceux-ci ou à leurs ayants-droit, à l’exclusion de toute autre personne. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Nous souhaitons apporter une réponse sur un sujet qui n’a pas été traité par les accords Schwartz.
Cet amendement vise à mettre un terme à la pratique, actuellement contractuelle entre artistes-interprètes et producteurs en contrepartie du système d’avances des producteurs, des cessions de créances notifiées aux sociétés de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes. Cette pratique fait actuellement l’objet de clauses contractuelles entre artistes-interprètes et producteurs en contrepartie du système d’avances des producteurs, qui avait son côté vertueux.
Jusqu’à une date récente, les avances consenties par les producteurs aux artistes-interprètes étaient ensuite récupérées sur les ventes d’albums. Désormais, avec la crise du disque, les producteurs demandent à récupérer ces avances non seulement sur les albums, mais également sur les droits des artistes-interprètes eux-mêmes.
Quand les avances étaient remboursées sur les ventes d’albums, cela incitait les producteurs à faire leur métier : essayer de vendre le plus possible d’albums ! Mais les producteurs, à commencer par les majors, ont changé la règle. C’est une tentative de mise en place d’un droit de préemption arbitraire, contraire aux dispositions de la loi de 1985, qui est en vigueur pour les droits voisins.
Un producteur qui ne ferait rien pour vendre l’album d’un artiste peut se payer sur les droits produits par le succès des albums antérieurs de l’artiste. Il s’agit d’une hypothèque sur le patrimoine des artistes et sur son exploitation.
Nous proposons donc de créer un droit à rémunération spécifique au profit de l’artiste qui ne pourrait être cédé à un tiers.
Le dispositif s’inspire du mécanisme qui existe actuellement au profit des auteurs d’œuvres graphiques et plastiques. Ceux-ci bénéficient d’un « droit de suite » inaliénable de percevoir un pourcentage sur le produit de toute vente d’une œuvre après la cession opérée par l’auteur ou par ses ayants droit, comme le prévoit l’article L. 123-7 du code de la propriété intellectuelle.
Nous vivons des mutations. Essayons de faire en sorte que, les artistes, ceux qui sont les plus oubliés, mais les plus nécessaires, ne soient pas perdus à cause des nouvelles contraintes. Ils doivent pouvoir retrouver les régulations qui existaient avec d’autres modes d’exploitation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le sujet est complexe et technique.
Une telle proposition ne prend pas en compte la nature des sommes perçues par les sociétés de perception et de répartition des droits, ou SPRD ; je pense par exemple à la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, la SACEM, ou à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, la SACD. Il s’agit soit des rémunérations, lorsque mandat leur a été donné de gérer certains des droits des artistes pour le compte de ceux-ci, soit d’une indemnisation, lorsque cette rémunération a pour objet de compenser un préjudice, par exemple la rémunération équitable ou de la copie privée.
Or les artistes étrangers ne sont généralement pas directement membres des sociétés de gestion collective françaises. Ils sont généralement membres d’organismes de gestion collective ou représentés par des entités de gestion indépendante, conformément aux dispositions de la directive européenne 2014/26/UE. Ces organismes dont, selon la directive, « le but principal consiste à gérer […] les droits voisins » ne sont pas des ayants droit, mais ils agissent sur le fondement de mandats ou de cessions de créances. Une disposition qui interdit aux SPRD de verser à ces organismes les rémunérations perçues pour le compte d’artistes-interprètes ayant fait le choix de ne pas être membres d’une SPRD française est donc directement contraire à la directive.
Par ailleurs, comme vous l’avez souligné, les modes de production sont en cours d’évolution. De nombreux artistes financent directement la production de leurs phonogrammes, mode qui se redéveloppe. Ils peuvent être amenés à consentir une cession de créances pour garantir le financement qui leur est accordé. Les SPRD d’artistes, à la différence des SPRD d’auteurs, ne consentent pas d’avances à leurs membres, malgré leur importante trésorerie. C’est notamment l’une des raisons du développement des entités de gestion indépendante, qui assurent pour les artistes et les producteurs la collecte des rémunérations obtenues dans chaque pays, en consentant des avances.
Enfin, l’adoption de cette disposition aurait pour effet d’interdire aux créanciers, publics ou privés, de saisir les rémunérations des artistes gérées collectivement. Cela constituerait donc un encouragement à la délocalisation et à l’insolvabilité.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement vise à rendre inopérante la pratique des producteurs consistant à recouper auprès des sociétés de gestion collective d’artistes les avances qu’ils leur ont consenties. Il est proposé d’interdire aux sociétés de perception et de répartition des droits de reverser les droits voisins des artistes-interprètes à d’autres personnes qu’à ces derniers ou à leurs ayants droit, même en cas de cession de créances.
Je comprends l’objectif de cet amendement au regard de la protection des intérêts des artistes. Mais, à ce stade des débats, je ne crois pas que la réponse la plus appropriée passe par une intervention aussi radicale. Les cessions de créances sont une pratique contractuelle assez courante en contrepartie du système d’avances des producteurs aux artistes. Une telle modification pourrait finalement porter préjudice à certains artistes, contrairement à l’intention affichée par les auteurs de l’amendement.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je comprends que l’on puisse être en désaccord, que l’on n’ait pas encore apprécié à sa juste mesure le danger des évolutions actuelles ; on peut le considérer comme mineur et penser qu’il n’est pas encore temps de réagir.
Pourtant, le système qui reposait sur la vente des albums physiques ne permet clairement plus aujourd'hui aux artistes-interprètes de vivre.
Je suis un peu étonné de l’argumentation qui m’est opposée. Elle est probablement étayée, mais j’ai du mal à l’entendre. Les artistes-interprètes seraient les victimes de la mesure que je propose, alors même que ce sont eux qui l’ont demandée ? Selon Mme la ministre, cette disposition, qui se voudrait vertueuse, aurait un effet pervers. Je n’ai pas les moyens d’analyser cela.
Je maintiens cet amendement. La navette parlementaire nous laissera le temps de retravailler sur le sujet.
J’appelle l’attention sur le fait que nous n’avons pas souvent l’occasion de légiférer sur les affaires culturelles et audiovisuelles. Les technologies vont très vite et détruisent les régulations que nous avions mises en place. Si nous ne saisissons pas les occasions de légiférer pour remettre quelques digues ici ou là, certains secteurs se retrouveront le bec dans l’eau. Or ce sont très souvent ceux qui ont peu de moyens de se défendre autrement que par la législation et le droit !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 89 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article 30 de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il est chargé d’observer l’économie du secteur musical, y compris celle de la musique enregistrée. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Dans le secteur de la musique, la question de l’observation se pose de manière spécifique, en raison du phénomène de convergence des métiers, allant du spectacle vivant à la musique enregistrée, qui conduit à prendre en compte l’ensemble de la filière.
Dans cet esprit, la récente mission de Marc Schwartz sur le partage de la valeur dans la musique en ligne a souligné l’importance de créer une instance commune permettant le dialogue entre les professionnels. Parmi les projets définis figure en priorité la création d’un observatoire de l’économie de la musique.
Cet amendement a donc pour objet de permettre la constitution, au sein du Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, le CNV, d’un observatoire de l’économie de la musique compétent sur l’ensemble du champ de la filière musicale.
Il conviendrait de modifier le périmètre d’action du CNV pour y intégrer, dans le cadre de cette fonction d’observation, une action sur le terrain de la musique enregistrée, la législation actuelle limitant son action au seul périmètre du spectacle vivant ; notre rapporteur l’a indiqué en commission.
Rien n’empêchera le Gouvernement de modifier le décret statutaire du CNV pour prévoir les modalités de fonctionnement de l’observatoire de l’économie de la musique, la présence de professionnels de la musique enregistrée et des changements dans la composition de cette structure.
Je me demande également si l’observatoire de la musique, qui est aujourd’hui installé au sein de la Cité de musique-Philharmonie de Paris et qui suit notamment la production phonographique et sa diffusion audiovisuelle, ne pourrait pas être transféré au CNV, afin de contribuer à constituer ce nouvel observatoire de l’économie de la musique.
Lors de nos débats en commission, le rapporteur a objecté qu’il était impossible de créer un observatoire dont le périmètre serait étendu à la musique enregistrée au sein du CNV, cette structure ne comptant pas la musique enregistrée au rang de ses missions. Mais inscrivons cela dans la loi, et le Gouvernement pourra modifier par décret le champ du CNV. Ce serait une incitation bénéfique : aujourd’hui, la conception du spectacle vivant n’est plus indépendante de toute exploitation de la musique, y compris la musique enregistrée.
Voilà l’argument supplémentaire que je porte à votre connaissance pour faire prévaloir notre proposition, monsieur le rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 383, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le cinquième alinéa de l’article 30 de la loi n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’observatoire de l’économie de la musique, placé auprès du directeur de l’établissement public, est chargé de l’observation de l’économie de la musique enregistrée et des spectacles de variétés. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement vise à créer un observatoire de l’économie de la musique auprès du CNV.
Comme l’a souligné David Assouline, le secteur musical souffre d’un déficit de données économiques, préjudiciable tant aux pouvoirs publics qu’aux professionnels du secteur. L’ensemble des parties prenantes, dans la musique enregistrée comme dans le spectacle vivant, réclame cet observatoire. La création en est d’ailleurs prévue par le protocole d’accord du 2 octobre 2015 pour un développement équitable de la musique en ligne, signé tant par les acteurs de la musique enregistrée que par les acteurs du spectacle vivant.
Le rattachement de cet observatoire au CNV, qui est un établissement public, permettra d’en garantir la parfaite neutralité. J’ai entendu les réserves d’un certain nombre d’entre vous, ainsi que les attentes des professionnels ; ils souhaitent un observatoire qui soit doté de sa propre gouvernance et de son propre financement. Je suis extrêmement sensible à la préservation des équilibres de la filière, tels qu’ils s’expriment notamment au sein du CNV.
C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement, qui vise à placer l’observatoire auprès du directeur du CNV. Cela permettra de définir, en lien avec l’ensemble des professionnels, des modalités de gouvernance et de financement adaptées aux rôles et aux missions de cet observatoire.
Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 89 rectifié. Je partage l’ambition que ses auteurs ont exprimée. Simplement, la rédaction de notre amendement me semble plus conforme aux objectifs que nous nous sommes collectivement fixés. Je suggère donc à M. Assouline de retirer son amendement au profit de celui du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le sujet revient régulièrement. L’observatoire de l’économie de la musique est une structure demandée et souhaitée par l’ensemble de la filière depuis de nombreuses années. On se rappelle les débats sur le centre national de la musique, qui a finalement été abandonné : il avait aussi une mission d’observation, en plus d’un système de financement intégré.
La commission est bien évidemment favorable au principe d’un observatoire ; un tel outil manque cruellement. Certes, les formes de cet observatoire méritent d’être précisées.
Au fond, les deux amendements ont le même objectif : créer cet observatoire. L’amendement de M. Assouline vise à modifier la structure du CNV, qui fonctionne bien, tandis que celui du Gouvernement vise à rattacher cet observatoire à la direction du CNV.
La commission privilégie plutôt la méthode progressive du Gouvernement, même s’il faudra ensuite trouver une gouvernance appropriée à la musique et aux industries musicales. C’est pourquoi elle demande le retrait de l’amendement n° 89 rectifié au profit de l’amendement n° 383, sur lequel elle émet un avis favorable.
M. le président. Monsieur Assouline, l'amendement n° 89 rectifié est-il maintenu ?
M. David Assouline. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Mon amendement et celui du Gouvernement ont bien le même objet, même si leur rédaction diffère. Pour une fois que le rapporteur se déclarait favorable à un amendement du groupe socialiste… (Sourires.)
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je vous ai fait plus de cadeaux que vous, mon cher collègue ! (Nouveaux sourires.)
M. David Assouline. C’est le premier de la journée, en tout cas. (Mêmes mouvements.) Je suis heureux que nous soyons enfin parvenus à vous convaincre.
Mais je retire mon amendement au profit de celui du Gouvernement, qui a dû examiner les conséquences pratiques de l’exécution de la mesure pour proposer cette rédaction.
M. Dominique Bailly. Bravo !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Quelle élégance !
M. le président. L'amendement n° 89 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 383.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.
Article 6 bis
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 90 rectifié est présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 237 est présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 311 est présenté par le Gouvernement.
L'amendement n° 371 est présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le chapitre IV du titre unique du livre II de la première partie du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° L’article L. 214-1 est ainsi modifié :
a) Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :
« 3° À sa communication au public par un service de radio, au sens de l’article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. » ;
b) Au sixième alinéa, la référence : « et 2° » est remplacée par les références : « , 2° et 3° » ;
2° Au premier alinéa des articles L. 214-3 et L. 214-4, la référence : « et 2° » est remplacée par les références : « , 2° et 3° ».
La parole est à M. David Assouline, pour présenter l’amendement n° 90 rectifié.
M. David Assouline. Cet amendement important vise à réintroduire l’article 6 bis, dans lequel il était prévu d’étendre le système actuel de licence légale applicable aux radios hertziennes aux webradios, qui sont aujourd'hui en plein essor. Cet article, qui avait suscité des débats importants à l’Assemblée nationale, a été supprimé en commission après un débat très réduit. J’aimerais que l’on aille au fond du sujet.
À l’heure actuelle, les artistes-interprètes et les producteurs bénéficient d’une rémunération équitable pour l’exploitation de leurs œuvres et phonogrammes par les radios, y compris les radios numériques.
L’article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit que les utilisations des phonogrammes publiés à des fins de commerce, quel que soit le lieu de fixation de ces phonogrammes, ouvrent droit à rémunération au profit des artistes-interprètes et des producteurs.
Le webcasting n’est plus anecdotique aujourd’hui ; le phénomène se développe. Tout le monde télécharge des playlists sur Spotify ou Deezer. Ce point n’a été traité que très partiellement dans les accords Schwartz, dans laquelle la question du moyen d’obtenir un partage équitable de la rémunération entre artistes et producteurs pour l’exploitation des œuvres en ligne n’a pas été abordée. Seul a été énoncé le principe du partage de rémunération entre ces deux titulaires de droits voisins, pour l’exploitation en ligne des œuvres.
Il me semble donc opportun de régler le problème sans délai. L’apport de l’Assemblée nationale doit être maintenu. Même si la solution trouvée n’est pas parfaite aux dires de certains, elle a au moins le mérite d’apporter des réponses face à un nouvel usage.
Le législateur doit être au rendez-vous et rendre applicable à l’ensemble des nouveaux usages résultant des innovations technologiques l’édifice législatif qu’il a construit patiemment si l’on ne veut pas assister à un dérèglement général, dans ce secteur comme dans d’autres.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, pour présenter l'amendement n° 237.
M. Jean-Pierre Bosino. Cet amendement vise à rétablir l’article 6 bis.
D’abord, grâce à l’extension de la licence légale pour les webradios, les artistes-interprètes pourront obtenir une rémunération pour l’exploitation de leur œuvre ; la rémunération du travail est, me semble-t-il, un principe de base.
Ensuite, si les radios en ligne ne représentent aujourd’hui que quelques centaines de milliers d’euros par an de chiffre d’affaires, loin derrière les radios hertziennes, à leur intégration dans le champ de la licence légale doit leur permettra d’accéder de manière plus aisée aux catalogues des producteurs, et ce en toute sécurité juridique. Une véritable chance de développement leur est donc offerte, grâce à la révolution numérique et au soutien du secteur musical.
En outre, le mécanisme de la licence, certes plus contraignant, pourrait se révéler bien plus pérenne que la voie contractuelle, habituellement utilisée.
Par ailleurs, et toujours pour les radios en ligne, cette ouverture ne serait qu’une reconnaissance de leur activité. Elle serait placée sous le coup de la neutralité technologique entre les radios hertziennes et elles.
Enfin, la mesure ne concerne que les radios en ligne, c’est-à-dire celles qui diffusent de la musique sans que l’utilisateur choisisse ce qui est diffusé. Ce critère est essentiel pour distinguer les webradios des services de musique à la demande.
Justice, reconnaissance, aide au développement : l’extension du mécanisme de licence légale aux webradios est aujourd’hui une mesure à la hauteur des enjeux en matière de diffusion de la création.
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 311.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement est identique à ceux qui viennent d’être présentés. Il vise à rétablir l’extension, votée par l’Assemblée nationale, de la licence légale aux services de radio diffusant leurs programmes uniquement sur internet.
Il paraît effectivement justifié, au titre de la neutralité technologique, de garantir qu’un même régime juridique s’applique à l’ensemble des services de radio, quel que soit leur mode de diffusion.
Le périmètre de la licence légale n’est étendu qu’aux radios diffusées sur internet en flux continu. Elle n’a donc pas vocation à s’appliquer aux webradios qui offrent aux internautes la possibilité d’accéder au moment de leur choix à un phonogramme donné. De même, les services radio qui sont diffusés par internet et qui sont excessivement thématisés – cela pourrait constituer une forme de contournement de l’exercice du droit exclusif ; je pense par exemple à une webradio qui serait consacrée à un seul artiste ou album – seraient également exclus de l’extension.
Cela étant dit, cet amendement étant identique à celui que vient de présenter M. Assouline, je le retire au profit du sien, lui-même ayant précédemment retiré l’un de ses amendements au profit d’un amendement du Gouvernement.
J’espère que M. le rapporteur sera sensible à cet argument de justice pour les artistes concernés et à celui de la neutralité technologique. Ce principe doit aujourd'hui s’appliquer à l’ensemble des secteurs concernés par la révolution numérique.
M. le président. L'amendement n° 311 est retiré.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 371.
Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement vise à instaurer la neutralité technologique et à prendre en compte l’essor, même si le phénomène est pour l’instant éparpillé, des radios numériques. Cette forme de radios étant appelée à devenir plus dominante qu’aujourd’hui par rapport au hertzien, le Parlement se doit d’anticiper une telle mutation en posant tout de suite des règles, afin que les créateurs, les artistes et les interprètes soient justement rémunérés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Madame la ministre, je suis très sensible non pas à vos arguments, mais au sujet.
Permettez-moi de commencer par un rappel juridique : la licence légale est une exception au droit exclusif. D’une manière générale, un producteur précise dans le contrat qu’il signe avec un artiste les pourcentages et les moyens. La licence légale interdit à l’artiste-interprète de s’opposer à la diffusion de son œuvre, moyennant une rétribution équilibrée, équitablement partagée entre le producteur et l’artiste-interprète. C’est très bien. C’est ainsi que cela se passe pour les radios hertziennes.
Je souhaite maintenant que l’on s’attarde sur l’argument, cher à la commission de la culture, de la neutralité technologique, car il est régulièrement invoqué.
Il y a une véritable différence entre une radio hertzienne et une webradio. Une radio hertzienne est limitée en capacités. Elle dispose d’un espace public, l’espace hertzien, qu’elle a obtenu, ce qui lui confère d’ailleurs des devoirs. Une webradio est beaucoup moins chère : en termes de matériel et de technique, cela coûte moins d’émettre sur le web que d’émettre en hertzien. On peut créer à moindre coût une, deux, dix, quinze, cent, mille, deux mille, un million de webradios ! On n’est donc pas tout à fait dans la neutralité technologique.
Dans une voiture, en province, on capte à peu près correctement une dizaine de radios au maximum. Par rapport au monde économique du web, on est dans une forme de rareté.
L’argument de la neutralité technologique est légitime quand il y a égalité. C’est d’ailleurs le cas lorsqu’une webradio diffuse en simultané exactement le même programme que sa radio hertzienne. Dans ce cas, on peut effectivement parler de neutralité technologique. Mais ce n’est pas le cas de toutes les webradios.
Le problème, c’est que nous ne connaissons pas les conséquences d’un tel dispositif, en particulier sur la rémunération des artistes et des producteurs. Il n’y a eu aucune étude d’impact, puisque l’article 6 bis a été ajouté à l’Assemblée nationale. Or nous aurions besoin d’une telle étude.
Les chiffres dont nous disposons à cet égard ne sont favorables ni aux artistes ni aux producteurs, car il y a une mutation. Comme vous le savez, la licence légale va « aplatir » les choses. Selon nos indications, la rémunération des artistes serait moindre.
Madame la ministre, apportez-nous une étude chiffrée et sérieuse sur cette question, et nous verrons si nous pouvons évoluer. Pour l’heure, même si je suis sensible à ce sujet, je ne dispose pas des informations me permettant de me prononcer en faveur du rétablissement de l’article 6 bis dans le projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Je souhaite formuler quelques remarques sur ces amendements identiques visant à rétablir l’article 6 bis.
Cet article, introduit à l’Assemblée nationale par le Gouvernement, prévoyait l’extension aux webradios du régime de la licence légale, comme c’est le cas aujourd’hui pour les radios hertziennes.
Il s’agit, selon le Gouvernement et les auteurs des autres amendements, de permettre aux webradios de se développer plus rapidement, en appliquant le principe de neutralité technologique.
J’estime pour ma part que ce développement ne doit pas se faire au détriment des artistes-interprètes et de leurs producteurs ! Ceux-ci nous ont alertés ; pour eux, la mesure n’est pas neutre.
Le régime de droit exclusif en vigueur leur permet, contrairement à ce que les auteurs de ces amendements prévoient, de négocier des rémunérations largement supérieures à celles qui s’appliquent à la licence légale. Remettre en cause le système existant aboutirait à un nivellement par le bas des rémunérations de l’ensemble des ayants droit. (M. David Assouline s’exclame.)
Nous souhaiterions que vos dénégations s’appuient sur des chiffres, comme vient de le dire M. le rapporteur. Or tel n’est pas le cas. En l’espèce, votre empressement à inclure une telle mesure, sans avoir réalisé d’étude d’impact au préalable, alors qu’elle aurait pu figurer dans le projet de loi initial, vous dessert.
À mon sens, il nous appartient – je ne parle pas seulement en tant que membre de la commission de la culture – d’assurer le maintien du dispositif actuel de rémunération des artistes, qui, jusqu’à preuve du contraire, reste le plus protecteur ! L’étude d’impact nous dira s’il faut le modifier.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Monsieur le rapporteur, vos craintes sur la neutralité technologique peuvent concerner tous les secteurs.
Lorsque nous avons voté ici la neutralité technologique pour la presse, y compris d’un point de vue fiscal, certains ont argué que la presse papier était plus chère à fabriquer que la presse numérique ; ils nous ont demandé pourquoi nous voulions appliquer le principe de neutralité technologique à ce secteur. Or ce principe s’applique aux titres de presse, qu’il s’agisse de la presse papier ou de la presse numérique. En adoptant cette loi, nous nous sommes dit qu’il y avait deux options : soit nous mettions des freins à la révolution technologique pour conserver les protections anciennes, auquel cas le pays mourrait, car il n’était plus tourné vers l’avenir ; soit nous conservions ces protections en regardant vers l’avant, en ne laissant personne au bord du chemin, pour faire accepter les révolutions technologiques !
L’argument que vous avez avancé – on peut créer mille webradios, mais pas autant de radios hertziennes – s’applique également à la presse papier ou à la musique : écouter un disque et télécharger de la musique, ce n’est pas la même chose ! Des intermédiaires disparaissent, et de nouveaux métiers se créent. Mais ne perdons pas de vue qu’il n’y a pas de musique sans artistes !
Je reconnais qu’une étude d’impact aurait été nécessaire. Mais, comme l’article a été introduit par amendement à l'Assemblée nationale, il n’y en a pas eu. Cela étant, rien ne nous empêche d’en demander une maintenant, voire de la réaliser nous-mêmes et d’en analyser ses résultats.
Mais, en tout état de cause, ayons à l’esprit que les « petits » artistes-interprètes sont sûrs de gagner plus avec la licence. Les artistes déjà puissants pensent que l’institution de ce régime aura pour eux l’effet inverse, en influant sur ce qu’ils peuvent négocier au cas par cas.
Je fais mon choix. Je ne pense pas que les plus puissants soient aujourd’hui ceux qui ont le plus de difficultés à percevoir des rémunérations et à vivre correctement de leur métier. En revanche, ceux qui sont aujourd’hui en extrême difficulté et qu’il faut protéger, ce sont les « petits » artistes-interprètes. S’ils nous demandent cette licence, ce n’est pas pour se faire du mal à eux-mêmes ; c’est parce qu’ils ont déjà évalué qu’elle leur permettrait de gagner plus !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. J’invoquerai le même argument, la neutralité technologique.
Le gouvernement français a d'ailleurs invoqué ce principe de la neutralité technologique auprès de la Commission européenne en matière fiscale s’agissant du livre et de la presse en ligne, deux sujets sur lesquels le principe s’applique. Il est évident, pour la presse comme pour le livre, que la réalité n’est pas totalement identique dans l’univers numérique et dans l’univers physique. Les coûts de production et de diffusion ne sont pas les mêmes. Néanmoins, même si ces univers ne sont pas totalement comparables, il a été décidé que le principe de neutralité technologique devait s’appliquer s’agissant de la réglementation, de la fiscalité ou de la taxation. On ne peut pas considérer que les univers doivent être totalement homothétiques ou comparables.
L’article 6 bis, qui a effectivement été introduit à l’Assemblée nationale, n’a été précédé d’aucune étude d’impact. J’attire toutefois votre attention sur le fait que c’est une commission paritaire, la commission de la rémunération équitable, qui détermine le taux de rémunération équitable. La rémunération qui pourrait être versée aux artistes dépend du taux qui serait fixé par cette commission. En toute logique, il faut donc d’abord légiférer pour rendre cette commission compétente, afin qu’elle puisse se prononcer sur le taux de rémunération qui sera effectivement appliqué aux artistes. Il est difficile de réaliser une étude d’impact avant que la commission ait pu délibérer sur le taux de rémunération applicable.
Je suggère par conséquent à la Haute Assemblée d’adopter ces amendements identiques – la commission de la rémunération équitable peut très bien produire les chiffres très rapidement – pour rassurer les artistes. Les craintes ne sont pas fondées, puisque la commission détermine le taux de rémunération. Nous aurions aussi un ordre de grandeur de ce que cela pourrait représenter en termes de revenus supplémentaires pour les artistes.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 90 rectifié, 237 et 371.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 6 bis demeure supprimé.
Article additionnel après l'article 6 bis
M. le président. L'amendement n° 292 rectifié ter, présenté par Mme Duchêne, M. Cardoux, Mme Di Folco, MM. Vogel, Milon, Laufoaulu, Mandelli, Laménie, Mayet et Kennel, Mmes Deromedi et Hummel, MM. Pellevat, G. Bailly et Chasseing, Mme Morhet-Richaud, MM. Chaize et Gournac, Mme Primas et M. Husson, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aux premier et second alinéas de l’article L. 311-1, aux articles L. 311-2 et L. 311-3, aux premier et deuxième alinéas, aux deux occurrences du quatrième alinéa, aux première et seconde phrases du dernier alinéa de l’article L. 311-4, aux première, deuxième et dernière phrases du premier alinéa de l'article L. 311-4-1, aux deux occurrences du premier alinéa de l’article L. 311-5, aux premier, deuxième et dernier alinéas de l’article L. 311-7, au premier alinéa du I, au II, au second alinéa du III de l’article L. 311-8 et au 1° de l’article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle, le mot : « rémunération » est remplacé par les mots : « compensation équitable ».
La parole est à Mme Marie-Annick Duchêne.
Mme Marie-Annick Duchêne. Dans ses articles concernant la copie privée, le code de la propriété intellectuelle emploie une expression inappropriée, que cet amendement vise à corriger, en remplaçant le mot : « rémunération » par les mots : « compensation équitable ». Cela mettrait également en adéquation le droit français avec la jurisprudence européenne.
En outre, dans son rapport sur le bilan et les perspectives de trente ans de copie privée, la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale souligne que le complément obligatoire pour copie privée « n’a pas pour vocation de contribuer à un partage de la valeur entre ayants droit, fabricants et importateurs de supports et consommateurs, mais de compenser un préjudice subi par les ayants droit du fait de la reconnaissance de l’exception pour copie privée ». C’est donc un problème de sémantique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le problème n’est pas que sémantique ; sa portée va au-delà.
Certes, je partage complètement l’idée que la copie privée est non pas une rémunération, mais une compensation. Il est donc vrai qu’il y a là une dimension sémantique.
Toutefois, je vais solliciter le retrait de cet amendement, à ce stade en tout cas, quitte à travailler davantage sur le sujet. En effet, le quart de la redevance pour copie privée est consacré au soutien à des actions culturelles. Ce n’est plus une compensation de risques.
Par conséquent, comme cet aspect n’est pas parfaitement approfondi, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, je serais au regret d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. La rémunération pour copie privée doit effectivement correspondre à la rémunération qu’auraient dû percevoir les titulaires de droits dans le cadre de l’exercice de leurs droits exclusifs.
Comme l’a précisé le Conseil d’État dans ses arrêts des 11 juillet 2008 et 17 juin 2011, elle est « une modalité particulière d’exploitation des droits d’auteur fondée sur une rémunération directe et forfaitaire qui doit être fixée à un niveau permettant de produire un revenu globalement analogue à celui que procurerait la somme des paiements d’un droit par chaque auteur d’une copie privée s’il était possible de l’établir et de la percevoir ». Il s’agit donc d’une rémunération et non, comme le soutiennent les auteurs de cet amendement, d’une compensation versée au titre d’un préjudice civil.
Je relève enfin que la notion de rémunération pour copie privée est également présente en droit communautaire, au considérant 28 de la directive 2001-29 du 22 mai 2001.
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Madame Duchêne, l'amendement n° 292 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Marie-Annick Duchêne. Non, monsieur le président ; compte tenu de ce rassemblement d’oppositions, je le retire ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 292 rectifié ter est retiré.
Article 7
Le même chapitre IV est complété par un article L. 214-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 214-6. – I. – Sans préjudice du droit des parties de saisir le juge, le médiateur de la musique est chargé d’une mission de conciliation pour tout litige relatif à l’interprétation ou à l’exécution :
« 1° De tout accord entre les artistes-interprètes dont l’interprétation est fixée dans un phonogramme, les producteurs de phonogrammes et les éditeurs de services de communication au public par voie électronique mettant à disposition des œuvres musicales ;
« 2° D’un engagement contractuel entre un artiste-interprète et un producteur de phonogrammes ;
« 3° D’un engagement contractuel entre un producteur de phonogrammes et un éditeur de services de communication au public par voie électronique mettant à disposition des œuvres musicales ;
« 4° D’un engagement contractuel entre un producteur de phonogrammes et un producteur de spectacles.
« Dans le cadre de sa mission, le médiateur peut être saisi par tout artiste-interprète, par tout producteur de phonogrammes, par tout producteur de spectacles ou par tout éditeur de services de communication au public par voie électronique mettant à disposition des œuvres musicales. Il peut également être saisi par leurs mandataires ou par toute organisation professionnelle ou syndicale intéressée, ainsi que par le ministre chargé de la culture.
« Pour l’exercice de sa mission, il invite les parties à lui fournir toutes les informations qu’il estime nécessaires, sans que puisse lui être opposé le secret des affaires, et peut entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile.
« Le médiateur de la musique exerce sa mission dans le respect des compétences de l’Autorité de la concurrence. Lorsque les faits relevés par le médiateur apparaissent constitutifs de pratiques anticoncurrentielles mentionnées aux articles L. 420-1 et suivants du code de commerce, le médiateur saisit l’Autorité de la concurrence. Cette saisine peut être introduite dans le cadre d’une procédure d’urgence, conformément à l’article L. 464-1 du même code. Le médiateur peut également saisir, pour avis, l’Autorité de la concurrence de toute question de concurrence dans le cadre de l’article L. 462-1 dudit code de commerce. L’Autorité de la concurrence peut consulter le médiateur sur toute question relevant de sa compétence et lui communiquer, à cette fin, toute saisine entrant dans le champ de cette compétence.
« Lorsque le litige dont il est saisi relève du champ de compétence d’une autre instance de conciliation créée par convention ou accord collectif de travail, le médiateur peut saisir cette instance pour avis. Il se déclare incompétent si cette instance lui en fait la demande.
« Le médiateur de la musique favorise ou suscite toute solution de conciliation aux litiges qui lui sont soumis. Lorsqu’il constate un accord entre les parties, il rédige un procès-verbal de conciliation précisant les mesures à prendre pour le mettre en œuvre. À défaut d’accord entre les parties, le médiateur peut émettre une recommandation proposant des mesures tendant à mettre fin au litige. Il peut rendre publique la décision de conciliation ou la recommandation, sous réserve des informations couvertes par le secret des affaires.
« II. – Le médiateur de la musique peut faire au ministre chargé de la culture toute proposition que lui paraît appeler l’accomplissement de ses missions. Il met en œuvre toute mesure de nature à favoriser l’adoption de codes des usages entre les organismes professionnels et les sociétés de perception et de répartition des droits représentant les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes, entre les producteurs de phonogrammes et les producteurs de spectacles ou entre les producteurs de phonogrammes et les éditeurs de services de communication au public par voie électronique mettant à disposition des œuvres musicales.
« Le médiateur de la musique adresse chaque année un rapport sur son activité au ministre chargé de la culture. Ce rapport est public. Une copie en est adressée aux présidents des commissions permanentes parlementaires chargées de la culture.
« III. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article, notamment les conditions de désignation du médiateur de la musique. »
M. le président. L'amendement n° 183 rectifié, présenté par Mme Mélot, MM. Commeinhes et Kennel et Mme Duchêne, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
L'amendement n° 184 rectifié, présenté par Mme Mélot, MM. Commeinhes et Kennel et Mme Duchêne, est ainsi libellé :
Alinéa 7, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter ces deux amendements.
Mme Colette Mélot. Ces amendements visent à mettre en cohérence le médiateur de la musique avec ses deux homologues, le médiateur du livre et le médiateur du cinéma. Mais il se trouve que le médiateur de la musique dispose d’un pouvoir beaucoup plus contraignant que les deux autres médiateurs. Par ailleurs, le pouvoir de saisine prévu pour ce médiateur est plus large.
C’est pourquoi, afin d’éviter des recours abusifs de nature à déstabiliser le secteur, il est proposé de confier le pouvoir de saisine aux parties concernées et de prendre pour modèles les médiateurs du cinéma et du livre, qui ont fait leurs preuves.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Ces amendements concernent le médiateur de la musique, sujet qui a suscité un large débat. Certains souhaitaient sa suppression complète, au motif que cette création était inutile ; d’autres étaient partisans de le mettre en œuvre. La comparaison avec les médiateurs du livre et du cinéma a souvent été faite pour essayer de rapprocher leur type de prérogatives, en dépit du fait que les secteurs, les relations interprofessionnelles et les règles qui les régissent ne sont pas les mêmes.
Nous avons essayé de trouver un équilibre. Nous avons d’abord dit que, dans ce type de secteur, où les interactions économiques et les possibilités de litiges sont extrêmement importantes alors que s’opère une transformation numérique, un médiateur n’est pas inutile. Un médiateur, qui pourrait permettre des conciliations, trouver des accords, bien entendu sans préjudice d’une action devant les tribunaux, qui reste évidemment possible, nous est apparu utile, comme c’est le cas dans le secteur du livre et du cinéma.
Nous avons ensuite réfléchi au champ de ses missions et à la manière d’encadrer ses possibilités de saisine. Nous avons proposé un équilibre à la commission :’il y a des sujets sur lesquels le médiateur ne doit pas intervenir ou, en tout cas, il doit avoir sa place au milieu des autres structures qui existent d’ores et déjà et qui sont prioritaires dans la médiation, voire dans le jugement. Il s’agit évidemment des organes émanant de la convention collective, la commission paritaire, pour lesquelles les conflits sont probablement du ressort non pas du médiateur, mais de la convention collective. Il a donc été prévu que la convention collective soit prioritaire.
Une autre structure qui pourrait être prioritaire est l’Autorité de la concurrence. Si un conflit est né d’un problème de concurrence, le sujet est renvoyé vers l’Autorité de la concurrence, et non pas vers le médiateur, à charge pour l’un de prévenir l’autre.
C’est l’équilibre que nous avons trouvé. Dans la mesure où la commission a prévu que le médiateur ne peut pas empiéter, sans son accord, sur le champ de l’action d’une autre instance de conciliation existante, il n’est plus utile d’en limiter les compétences.
Je demande donc le retrait de ces amendements, qui sont en contradiction avec l’article 7. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.
C’est la volonté d’accompagner et de pacifier les relations entre les acteurs de la musique qui a présidé à la décision de créer un médiateur de la musique, objet de l’article 7 du présent projet de loi.
Je le rappelle, dans les industries créatives, chaque secteur a un médiateur, mais il n’a pas forcément les mêmes missions et les mêmes manières de fonctionner que ses homologues ; les relations entre les acteurs ne sont pas sous-tendues par les mêmes enjeux.
Le régime des contrats qui lie les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes repose sur une imbrication complexe du droit du travail et de la propriété littéraire et artistique. C’est là une des particularités du marché de la musique. De ce point de vue, le parallèle avec les médiateurs du cinéma et du livre atteint, en quelque sorte, ses limites, puisque ce sont les spécificités de chaque marché qui appellent une définition distincte du champ des missions des différents médiateurs.
À mon sens, priver le médiateur de la musique de sa mission de conciliation relative à tout accord entre les artistes-interprètes, les producteurs de phonogrammes et les plateformes de musique en ligne, ce que prévoit l’alinéa 3, constituerait une limitation excessive. Cela risquerait en réalité d’obérer sa capacité à accompagner la résolution des litiges dans une filière où le recours contentieux est envisagé avec une très grande prudence par les professionnels.
Je suis également défavorable à l’amendement n° 184 rectifié. Vous le savez, les procédures judiciaires peuvent être extrêmement complexes, en particulier pour des artistes-interprètes. Ceux-ci peuvent redouter la judiciarisation de leur conflit avec les producteurs, qui restent avant tout des partenaires de travail.
C'est la raison pour laquelle j’ai pensé utile d’ouvrir la faculté de saisir le médiateur de la musique à leurs mandataires, notamment aux managers et aux organisations professionnelles ou syndicales qui les défendent.
Compte tenu des actuels rapports de force au sein de la filière, il me semble particulièrement inopportun de restreindre le champ des structures et des institutions qui peuvent saisir le médiateur de la musique. Une telle restriction traduirait aussi une certaine forme de défiance à l’encontre des mandataires et des organisations professionnelles. Selon moi, cela ne se justifie pas.
De même, il me paraît souhaitable que le ministre de la culture puisse lui aussi saisir le médiateur, notamment en cas de litige de nature collective ayant trait à l’application de la loi et de la réglementation.
Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer ces amendements, madame la sénatrice. À défaut, j’y serais défavorable.
M. le président. Madame Mélot, les amendements nos°183 rectifié et 184 rectifié sont-ils maintenus ?
Mme Colette Mélot. Non, je les retire, monsieur le président.
Les usages démontreront le bien-fondé des décisions prises par le législateur. J’espère que ce nouveau médiateur pourra faire preuve de la même efficacité que certains de ses homologues.
M. le président. Les amendements nos 183 rectifié et 184 rectifié sont retirés.
L’amendement n° 496, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 9, deuxième phrase
Remplacer les mots :
et suivants
par la référence :
à L. 420-7
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 186 rectifié bis, présenté par Mme Mélot, MM. Commeinhes et Kennel et Mme Duchêne, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Remplacer les mots :
peut saisir
par le mot :
saisit
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Il est nécessaire de mettre les instances de conciliation existantes en mesure de connaître des litiges dont est saisi le médiateur et, le cas échéant, de demander à ce dernier de se dessaisir à leur profit. La saisine pour avis des instances de conciliation existantes doit donc être obligatoire, et non facultative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Avis favorable. Mme Mélot souhaite apporter une modification à la proposition faite en commission par notre collègue David Assouline.
Cet amendement vise à faire en sorte que les autres instances de conciliation puissent être saisies pour avis par le médiateur lorsqu’un litige entre dans leur champ de compétences. Il s’agit ici de rendre leur saisine préalable obligatoire, ce qui me semble en effet plus efficace.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Avis défavorable.
La création du médiateur de la musique n’a pas pour objectif de le substituer aux partenaires sociaux ou aux instances chargées de l’interprétation des accords collectifs applicables à la filière. Nous voulons réguler de manière souple les relations entre les différentes parties prenantes du secteur et les aider à surmonter les difficultés liées aux spécificités de la filière.
Ainsi que je le rappelais tout à l’heure, le marché de la musique est complexe. Il est fait d’une imbrication entre le droit du travail, la propriété intellectuelle et les contrats.
Or l’amendement adopté par la commission de la culture du Sénat avait permis de clarifier l’articulation entre le médiateur de la musique et la commission paritaire d’interprétation, de conciliation et de validation créée par le titre II de la convention collective nationale de l’édition phonographique, en donnant au médiateur la possibilité de saisir la commission paritaire et à celle-ci la possibilité de lui demander de se dessaisir si elle s’estime compétente. Vous avez répondu à la crainte de voir le médiateur de la musique empiéter sur les prérogatives de la commission paritaire.
En revanche, il serait d’une lourdeur inutile d’obliger le médiateur à saisir systématiquement la commission paritaire. De surcroît, ce serait inadapté à la complexité des relations contractuelles au sein de cette filière, que j’ai déjà soulignée tout à l’heure.
M. le président. L’amendement n° 238, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 11, dernière phrase
Remplacer les mots :
la décision
par les mots :
le procès-verbal
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Pour notre groupe, l’instauration du médiateur de la musique est très importante.
Cette proposition de médiation, pour intéressante qu’elle soit, mérite d’être perfectionnée.
Certains éléments ont été oubliés. D’autres ont été modifiés, mais dans un sens qui nous paraît plutôt contraire au bon sens et à la justice.
C’est le cas notamment de la limitation de la publicisation de la conciliation exercée par le médiateur. Alors que le procès-verbal devait être rendu public dans son intégralité, la commission a décidé de réduire cette publicité à la décision, et à elle seule. Cette mesure, prise au nom du secret des affaires, nous semble particulièrement malvenue, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, elle méconnaît le fait que le principe du respect du secret des affaires est déjà reconnu à l’article 7 du projet de loi.
Ensuite, la question même du secret des affaires pose un problème certain. Si le médiateur de la musique intervient, c’est que le besoin s’en est fait sentir. Ainsi, renvoyer la nécessaire conciliation et la gestion des conflits au secret des affaires revient à laisser une pleine impunité aux donneurs d’ordre, qui pourront bénéficier de l’opacité totale entourant la conciliation.
Enfin, la publicisation du procès-verbal pourrait permettre l’enrichissement de la jurisprudence, donc, à terme, une meilleure protection des artistes-interprètes, mais aussi des producteurs.
Pour ces raisons, nous proposons d’amender l’alinéa 11 de l’article, afin de revenir à une publicité totale de la procédure de conciliation des litiges.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui a limité la publication d’actes par le médiateur de la musique aux seules décisions, et non pas à l’entier procès-verbal, celui-ci pouvant revêtir des aspects confidentiels, notamment sur le secret des affaires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement a pour objet de revenir à la rédaction initiale du texte, qui donnait au médiateur de la musique la possibilité de rendre publics les procès-verbaux de conciliation.
Je le rappelle, le médiateur de la musique n’aura pas de pouvoir d’injonction, contrairement à ce qui est le cas en matière de cinéma, et son pouvoir d’influence résidera donc avant tout dans la possibilité qui lui sera offerte de rendre publiques ses décisions et ses recommandations. C’est bien là l’essentiel.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement avait exprimé un avis de sagesse sur l’amendement, adopté en commission, qui a restreint la faculté de publication aux décisions de conciliation et aux recommandations du médiateur, et non plus à ces procès-verbaux.
Cet amendement, qui vise de revenir à l’ambition initiale du texte, s’inscrit toutefois bien dans mon objectif de renforcer la portée des avis du médiateur et leurs vertus pédagogiques pour l’ensemble de la filière.
Je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. L’amendement n° 205 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère, Capo-Canellas, Laurey, Cadic, Cigolotti et Tandonnet, Mme Goy-Chavent, MM. Marseille et Guerriau, Mmes Billon et Gatel et M. Gabouty, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 493, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Après les mots :
du présent article
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 7 bis AA (nouveau)
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
1° Le 2° de l’article L. 122-5 est ainsi rédigé :
« 2° Les copies ou reproductions réalisées à partir d’une source licite, strictement réservées à l’usage privé d’une personne physique et non destinées à une utilisation collective :
« a) Lorsque ces copies ou reproductions sont réalisées par cette personne physique au moyen d’un matériel de reproduction dont elle a la garde ;
« b) Lorsque ces copies ou reproductions sont réalisées par le biais d’un service de communication au public en ligne fournissant à cette personne physique, par voie d’accès à distance ou sur ses terminaux personnels, la reproduction d’une œuvre à partir de la diffusion d’un programme d’un service linéaire de radio ou de télévision édité ou distribué par ce service, sous réserve que cette reproduction soit demandée par cette personne physique avant la diffusion de ce programme ou au cours de celle-ci pour la partie restante.
« Le présent 2° ne s’applique pas aux copies des œuvres d’art destinées à être utilisées pour des fins identiques à celles pour lesquelles l’œuvre originale a été créée, ni aux copies d’un logiciel autres que la copie de sauvegarde établie dans les conditions prévues au II de l’article L. 122-6-1, ni aux copies ou reproductions d’une base de données électronique ; »
2° Le 2° de l’article L. 211-3 est ainsi rédigé :
« 2° Les reproductions réalisées à partir d’une source licite, strictement réservées à l’usage privé d’une personne physique et non destinées à une utilisation collective :
« a) Lorsque ces reproductions sont réalisées par cette personne physique au moyen d’un matériel de reproduction dont elle a la garde ;
« b) Lorsque ces reproductions sont réalisées par le biais d’un service de communication au public en ligne fournissant à cette personne physique, par voie d’accès à distance ou sur ses terminaux personnels, la reproduction d’un objet protégé à partir de la diffusion d’un programme d’un service linéaire de radio ou de télévision édité ou distribué par ce service, sous réserve que cette reproduction soit demandée par cette personne physique avant la diffusion de ce programme ou au cours de celle-ci pour la partie restante ; »
3° L’article L. 311-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après les mots : « de ces supports », sont insérés les mots : « et, dans le cas de stockage à distance mentionné au troisième alinéa du 2° des articles L. 122-5 et L. 211-3, par le service de communication au public en ligne concerné » ;
b) Au deuxième alinéa, après les mots : « qu’il permet », sont insérés les mots : « ou, dans le cas de stockage à distance mentionné au troisième alinéa du 2° des articles L. 122-5 et L. 211-3, du nombre d’utilisateurs du service de communication au public en ligne et des capacités de stockage mises à disposition par ce service de communication au public en ligne » ;
c) Au troisième alinéa, après les mots : « type de support », sont insérés les mots : « ou des capacités de stockage mises à disposition par le service de communication au public en ligne » ;
d) Au quatrième alinéa, après les mots : « qu’un support », sont insérés les mots : « ou une capacité de stockage mise à disposition par un service de communication au public en ligne ».
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous abordons un sujet à la fois complexe, sensible et passionnant.
Les articles 7 bis AA à 7 quater constituent un volet, inexistant dans le projet de loi initial, consacré à la copie privée, sujet sur lequel notre commission a considérablement enrichi ce qui était envisagé au départ.
Les enjeux sont multiples : ouvrir, prudemment, le champ de la rémunération de la copie privée aux nouvelles pratiques de copie, notamment dans « le nuage », ou cloud ; améliorer la gouvernance de la commission de la copie privée ; en assurer la transparence et permettre l’établissement de barèmes plus justes en confiant, sur la base de cahiers des charges déterminés par ladite commission, à la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, la HADOPI, la réalisation des enquêtes d’usage préalables à leur définition.
Les dispositions introduites par l’Assemblée nationale et les apports de notre commission devraient garantir la pérennité du mécanisme de rémunération pour copie privée, compensation indispensable du préjudice subi par les auteurs, dans un contexte où l’évolution technologique incessante conduit à de profondes mutations des modes de consommation des œuvres et, partant, à de réelles pertes de revenus pour les créateurs. L’appréhension des nouveaux usages, pour logique qu’elle soit, ne doit cependant pas conduire à bouleverser les équilibres économiques et industriels ou à pénaliser par trop nos entreprises au regard de la concurrence étrangère.
Il nous faut donc veiller à maintenir une délicate justice entre artistes, consommateurs et industriels, tout en modernisation le dispositif actuel.
Tel est l’enjeu majeur de ces articles, qui ne manqueront pas de susciter des débats.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, sur l’article.
M. David Assouline. Il s’agit d'un sujet particulier qui ne provoquait pas de remous… jusqu’à l’adoption en commission de l’un de mes amendements.
Cela rejoint ce que nous avons pu dire tout à l’heure sur la musique. Auparavant, les diffuseurs ou les distributeurs proposaient des offres avec une box sur laquelle on pouvait stocker quelque 150 œuvres. Le problème qui se posait dès lors était celui de la rémunération des auteurs. Un système de « licence légale » a été établi, au profit de toute la chaîne.
Mais une innovation technologique est apparue : le « nuage », ou cloud. Les capacités de stockage sont beaucoup plus importantes ; il n’existe pas de règles. Le législateur est aujourd’hui interpellé pour transposer ce qui existait avant cette innovation.
Notre proposition est partie d’une préoccupation de bon sens. Nous ne voulons pas freiner les innovations technologiques. Nous souhaitons au contraire les accompagner en les encadrant par les règles justes que nous avons édictées. Nous sommes d’accord sur ce point, monsieur le rapporteur.
Et voilà que des rumeurs ont subitement commencé à se propager ; nous savons tous qu’elles vont vite de nos jours. Il a été écrit dans un grand journal du soir que nous voulions taxer les e-mails personnels ! Cette information, inexacte, a ensuite été relayée…
Les industriels n’offrant pas un tel service se sont dit que les autres allaient prendre l’avantage. Ils nous ont donc écrit, pour nous demander de ne pas bouger. Sauf que, pour l’instant, ils ne proposent pas ce service. S’ils le proposent demain, nous aviserons.
Notre proposition ne leur cause pas de difficultés économiques. En revanche, en faisant machine arrière, nous nuirions à ceux qui réclament l’application des règles adoptées avant l’apparition de cette innovation technologique.
M. le président. Votre temps de parole est écoulé, mon cher collègue.
M. David Assouline. J’y reviendrai ultérieurement !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Je n’ignore pas que la question de l’assujettissement des pratiques de copie dans le nuage à la rémunération pour copie privée a soulevé, soulève et soulèvera probablement encore, à l’avenir, d’importants débats parmi les acteurs concernés. Il convient donc de légiférer avec prudence.
La rémunération pour copie privée, qui est un dispositif vertueux, a toujours permis d’assurer un équilibre entre l’aspiration de tous à accéder aux œuvres culturelles et artistiques et la juste et nécessaire préservation de la rémunération des ayants droit.
Ce dispositif ne pouvait pas ignorer les évolutions technologiques. Il a su s’adapter aux nouveaux modes de copie : disque dur interne ou externe, mémoire flash ou intégrée dans des téléphones portables, smartphones ou tablettes…
Il en est de même aujourd’hui avec le développement de l’informatique en nuage. Le dispositif de copie privée doit s’adapter à cette évolution technologique, tout en conservant, bien évidemment, son caractère d’exception.
En l’espèce, l’article 7 bis AA me semble particulièrement mesuré, puisqu’il vise à assujettir non pas l’ensemble des services dans le nuage – David Assouline a bien fait de le rappeler à l’instant, car des choses fausses ont été écrites sur ce point –, mais seulement ceux qui sont offerts par les services de télévision et de radio linéaires. Cela concerne donc les procédés de copie qui sont voués à se substituer aux modalités actuelles de copie auxquelles les consommateurs ont recours sur leur box.
Ces précisions étant apportées, il me semble que la discussion pourra s’engager sur des bases clarifiées.
M. le président. L’amendement n° 31, présenté par M. Navarro, n'est pas soutenu.
L’amendement n° 333 rectifié, présenté par Mme Mélot, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 9
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. L’adoption en commission de la culture de l’amendement visant à étendre les principes de la copie privée aux possibilités qu’offrent les magnétoscopes numériques a conduit à récrire les articles définissant la copie privée elle-même.
Or, l’amendement adopté en commission et son exposé des motifs vont plus loin et il convient de corriger une rédaction un peu trop large. En effet, elle prévoit clairement que la copie privée recouvre les copies effectuées par une « personne physique au moyen d’un matériel de reproduction dont elle a la garde ».
Si le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, le CSPLA, a examiné en 2012 le statut juridique des actes de reproduction permis par ces services d’informatique « nuagique », il a considéré que certaines pratiques effectuées dans le nuage, et certaines d’entre elles seulement, correspondaient à une forme de copie privée et devraient donc être assujetties à la rémunération correspondante.
Le CSPLA rappelle aussi le principe selon lequel la rémunération à laquelle chacun des ayants droit peut prétendre lorsqu’une œuvre est divulguée doit avant tout être établie sur la base du droit exclusif.
Ainsi, la qualification juridique des actes ne doit être envisagée sous l’angle de la copie privée que dans l’unique mesure où ils n’auraient pas été autorisés ou interdits, et donc du test en trois étapes transposé en droit français dans le code de la propriété intellectuelle. Ce test subordonne l’instauration d’une exception à une triple condition : tout d’abord, cette exception ne doit être applicable que dans certains cas spéciaux ; ensuite, elle ne doit pas porter atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ; enfin, elle ne doit pas causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit d’auteur.
Or, justement, l’application du régime de la copie privée suppose une identité de personnes entre celui qui réalise la copie et le bénéficiaire de cette copie. En introduisant le concept de « garde », on étend le périmètre de l’exception de copie privée bien au-delà des seuls services d’enregistrement, tel que souhaité initialement. Cela pourrait porter préjudice à l’exploitation normale de l’œuvre et causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit d’auteur, en privilégiant son droit à compensation par rapport à son droit d’exploitation exclusif.
Enfin, l’ajout de ce concept de « garde », qui permettrait l’extension de la copie privée et de sa redevance à tous types de services du cloud, n’a pas été prévu au b) du paragraphe 2 de l’article 5 de la directive européenne sur le droit d’auteur et les droits voisins. L’adoption de ce nouveau concept en droit français pourrait intensifier les contestations judiciaires devant la Cour de justice de l’Union européenne, à un moment où chacun souhaite l’apaisement des conflits relatifs à cette rémunération.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Historiquement, dans notre droit, celui qui fait la copie en est également le bénéficiaire. Or, dans le nuage, un tiers intervient.
Le CSPLA a rappelé le principe selon lequel la rémunération à laquelle chacun des ayants droit peut prétendre, lorsqu’une œuvre est divulguée, doit avant tout être établie sur la base du droit exclusif. Ainsi, la qualification juridique des actes ne doit être envisagée sous l’angle de la copie privée que dans l’unique mesure où ils n’auraient pas été autorisés ou interdits, et donc du test en trois étapes transposé en droit français dans le code de la propriété intellectuelle. Ce test subordonne l’instauration d’une exception à la triple condition évoquée par l’auteur de l’amendement.
L’application du régime de la copie privée suppose une identité de personnes entre celui qui réalise la copie et le bénéficiaire de celle-ci. En introduisant le concept de « garde », on étend le périmètre de l’exception de copie privée bien au-delà des seuls services d’enregistrement, tel que souhaité initialement. Cela pourrait porter préjudice à l’exploitation normale de l’œuvre et causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit d’auteur, en privilégiant son droit à compensation par rapport à son droit d’exploitation exclusif.
Enfin, l’ajout de ce concept de « garde », qui permettrait l’extension de la copie privée et de sa redevance à tous types de services du cloud, n’a pas été prévu par la directive du 22 mai 2001. L’intégration en droit français de ce nouveau concept pourrait intensifier les contestations devant la Cour de justice de l’Union européenne, à un moment où chacun souhaite l’apaisement des conflits relatifs à cette rémunération.
En conséquence, je donne un avis favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. L’avis est défavorable.
En effet, en prévoyant que le bénéficiaire de la copie privée ait également la garde des outils de reproduction, l’article 7 bis AA consacre, dans la loi, la jurisprudence de la Cour de cassation, qui impose une identité de personnes entre celui qui réalise la copie et le bénéficiaire de celle-ci, afin de circonscrire le champ de l’exception pour copie privée.
Cette consécration interdit, en principe, d’assujettir les services de copie dans le nuage, pour lesquels les moyens techniques de reproduction sont sous la garde d’un prestataire, et non directement du consommateur. De la sorte, les seules dérogations envisageables ne peuvent être qu’expresses, et par conséquent réservées à certains services précisément désignés, comme c’est le cas des services de magnétoscope numérique fournis via l’informatique dans le nuage. Ces services font l’objet d’une mention au b) du 1° de l’article 7 bis AA.
Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient Mme Mélot, le dispositif de l’article 7 bis AA ne permet pas d’assujettir à la rémunération pour copie privée tout type de service de l’informatique dans le nuage. Le critère de la garde vise précisément à prévenir une telle extension. Il est donc absolument impératif de maintenir l’économie de cet article. Je le répète, il ne permet pas d’assujettir l’ensemble des services dans le nuage, mais seulement ceux qui sont offerts par les services de télévision et de radio linéaires.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 333 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
(Mme Françoise Cartron remplace M. Claude Bérit-Débat au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Françoise Cartron
vice-présidente
Mme la présidente. L’amendement n° 506, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« b) Lorsque ces copies ou reproductions sont réalisées par cette personne physique, lors de la diffusion d'un programme d'un service de radio ou de télévision, au moyen d’équipements fournis par l’éditeur de ce service de radio ou de télévision, et sont stockées sur un serveur distant contrôlé par l’éditeur concerné, sous réserve que ces copies ou reproductions soient déclenchées par cette personne physique avant la diffusion de ce programme ou au cours de celle-ci pour la partie restante ;
II. – Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Lorsque ces copies ou reproductions sont réalisées par cette personne physique, lors de la diffusion d'un programme d'un service de radio ou de télévision, au moyen d’équipements fournis par un distributeur autorisé par l’éditeur dudit service de radio ou de télévision, et sont stockées sur un serveur distant contrôlé par le distributeur concerné, sous réserve que ces copies ou reproductions soient déclenchées par cette personne physique avant la diffusion de ce programme ou au cours de celle-ci pour la partie restante.
III. – Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« b) Lorsque ces copies ou reproductions sont réalisées par cette personne physique, lors de la diffusion d'un programme d'un service de radio ou de télévision, au moyen d’équipements fournis par l’éditeur de ce service de radio ou de télévision, et sont stockées sur un serveur distant contrôlé par l’éditeur concerné, sous réserve que ces copies ou reproductions soient déclenchées par cette personne physique avant la diffusion de ce programme ou au cours de celle-ci pour la partie restante ; »
IV. – Après l’alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé
« …) Lorsque ces copies ou reproductions sont réalisées par cette personne physique, lors de la diffusion d'un programme d'un service de radio ou de télévision, au moyen d’équipements fournis par un distributeur autorisé par l’éditeur dudit service de radio ou de télévision, et sont stockées sur un serveur distant contrôlé par le distributeur concerné, sous réserve que ces copies ou reproductions soient déclenchées par cette personne physique avant la diffusion de ce programme ou au cours de celle-ci pour la partie restante ; »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Pour dire simplement les choses, le cloud permet de disposer d’un magnétoscope virtuel. Il est possible, moyennant une rétribution, d’y louer un espace de stockage et d’y enregistrer des films ou de la musique, mais aussi des documents de travail, qui peuvent être partagés et consultés, comme avec Dropbox.
Il ne serait évidemment pas normal de devoir payer une redevance au titre de documents de travail. En revanche, dès lors que l’on enregistre des œuvres dans le nuage – c’est ce que l’on appelle, pour l’instant, les services de Network Personal Video Recorder, ou NPVR –, comme on le faisait sur les anciens magnétoscopes, il est logique d’appliquer l’exception de la copie privée.
Pour autant, il faut éviter de possibles effets négatifs. Il ne faudrait pas que les œuvres des chaînes, qui sont financées par les diffuseurs sans bénéficier d’autres recettes que celles de publicité, puissent être enregistrées sur le nuage en franchise de droits.
La question est sensible, et elle n’est pas encore totalement réglée. C’est pourquoi je présente cet amendement au dispositif prudent, qui ouvre la porte à la rémunération pour copie privée sur le NPVR. Il doit permettre d’adapter les dispositions légales relatives à l’exception de copie privée aux évolutions technologiques, qui rendent en particulier possible la dématérialisation des magnétoscopes dans le cloud, mais ne doivent pas avoir pour conséquence de priver les diffuseurs de leurs droits concernant leurs programmes. Le syndicat de l’édition vidéo numérique considère que la rédaction actuelle de l’article risque de causer à ceux-ci un préjudice injustifié.
C’est pourquoi cet amendement prévoit que les services de NPVR proposés par les éditeurs de chaînes de télévision et de radio ou par les distributeurs – avec l’accord des diffuseurs concernés – soient couverts par l’exception de copie privée, garantissant ainsi au public le bénéfice d’un mode de copie numérique dans le cloud.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 524, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier, S. Robert et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 506
I. – Alinéa 3
1° Après les mots :
fournis par l’éditeur
insérer les mots :
ou le distributeur
2° Remplacer les mots :
par l’éditeur concerné
par les mots :
par l’éditeur ou le distributeur concerné ou sur les terminaux personnels de la personne physique
II. – Alinéas 4 à 6
Supprimer ces alinéas.
III. – Alinéa 9
1° Après les mots :
fournis par l’éditeur
insérer les mots :
ou le distributeur
2° Remplacer les mots :
par l’éditeur concerné
par les mots :
par l’éditeur ou le distributeur concerné ou sur les terminaux personnels de la personne physique
IV. – Alinéas 10 à 13
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Je suis d’accord sur le fond avec M. Leleux, puisque nous avions voté le même texte en commission. Ensuite, certains acteurs – ceux qui n’offrent pas ces services de NPVR – se sont inquiétés, mais la crainte que le diffuseur soit privé de ses droits est sans fondement puisque l’article 7 bis AA dispose explicitement qu’il faudra un accord.
Je comprends cependant ce que nous dit M. le rapporteur : il faut faire baisser la tension. Même si les craintes exprimées me paraissent injustifiées – toutes les innovations suscitent des craintes qui se révèlent par la suite infondées –, je suis d’accord pour aller dans le sens de l’amendement n° 506. Cependant, il ne faut pas introduire dans la loi des dispositions qui viendraient créer le trouble, alors que le droit existant est très clair.
Le sous-amendement n° 524 prévoit d’assujettir à la rémunération pour copie privée les copies stockées sur le serveur en ligne, mais pas les copies réalisées par le prestataire du cloud sur les terminaux personnels de l’internaute. L’article 7 bis AA vise les deux types de copies : réalisées par un internaute par voie d’accès à distance ou sur ses terminaux personnels. Il faudrait réintroduire cette distinction dans le dispositif de l’amendement n° 506, monsieur le rapporteur.
En outre, l’amendement n° 506 établit une distinction entre éditeurs et distributeurs de services de radio et de télévision. Cette distinction semble se justifier par l’ajout de la mention selon laquelle le distributeur doit être autorisé par l’éditeur du service de radio ou de télévision. Or cet ajout n’est pas nécessaire, monsieur le rapporteur, dans la mesure où l’article 2-1 de la loi de 1986 définit justement le distributeur comme « toute personne qui établit avec des éditeurs de services des relations contractuelles en vue de constituer une offre de services de communication audiovisuelle mise à disposition auprès du public par un réseau de communications électroniques ». Quitte à reprendre les critères de la loi de 1986 relatifs au distributeur, ne faudrait-il pas préciser que celui-ci a effectué une demande auprès du CSA ? Il convient de ne pas remettre en cause la définition de l’éditeur et du distributeur posée par la loi de 1986.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 524 ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous sommes au début d’une évolution technologique, et je crois donc nécessaire de prendre des précautions.
Jusqu’à présent, les diffuseurs n’ont pas été associés aux négociations qui ont eu lieu entre les partenaires. Je pense qu’il serait normal qu’ils le soient. Dans cette perspective, je propose donc, sous réserve de l’accord de Mme la présidente de la commission, que nous mettions à profit la navette pour organiser des auditions et des tables rondes sur ce sujet, afin d’approfondir la réflexion et de clarifier les choses d’ici à la deuxième lecture. (Mme la président de la commission approuve.)
Des interrogations ont émergé, et je les entends. Elles sont peut-être injustifiées, mais il me paraît utile de prendre des précautions pour se prémunir contre des risques potentiels liés aux détenteurs de droits sur les programmes.
Dans cet esprit, l’amendement n° 506 vise à prévoir explicitement un accord des diffuseurs pour l’utilisation de leurs programmes. Cette précaution n’est peut-être pas indispensable, mais il convient de la prendre en l’état.
Je propose donc au Sénat d’adopter cet amendement en attendant la deuxième lecture. Entre-temps, nous aurons pu mieux mesurer le risque que les droits des diffuseurs soient affaiblis ou menacés.
Pour l’ensemble de ces raisons, j’émets un avis défavorable sur le sous-amendement n° 524.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 506 et le sous-amendement n° 524 ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. L’avis sur l’amendement n° 506 sera défavorable s’il n’est pas sous-amendé.
Cet amendement clarifie la rédaction de l’article 7 bis AA de manière conforme à l’intention du Gouvernement, puisqu’il permet de mieux identifier les services visés, qui sont uniquement les services d’enregistrement à distance offerts par les éditeurs ou distributeurs de services de télévision et de radio linéaires. Le sous-amendement n° 524 vise quant à lui à éviter tout problème d’articulation avec la loi du 30 septembre 1986.
En effet, la rédaction de votre amendement, monsieur le rapporteur, semble créer une nouvelle catégorie de distributeurs et brouille le cadre de la loi de 1986, dont l’article 2-1 définit et distingue très précisément les éditeurs et les distributeurs de services de télévision et de radio.
En l’état, je ne suis donc pas favorable à l’adoption de l’amendement n° 506 non sous-amendé. J’ajoute que l’adoption de l’amendement n° 333 rectifié me semble de nature à fragiliser considérablement le dispositif de la copie privée, non pas pour les services de NPVR, mais pour les services classiques. Il faudra donc que nous revenions sur ce sujet au cours de la navette, la copie privée représentant une source très importante de revenus pour l’ensemble des artistes. Il me paraît très dangereux, et même léger, de remettre en cause de manière aussi fondamentale l’équilibre de ce régime.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Le sujet est extrêmement complexe. La mutation numérique nous oblige à faire évoluer la législation. Pour ma part, je souscris à la proposition du rapporteur d’adopter en l’état l’amendement n° 506, sur lequel la commission a émis un avis favorable. Toutefois, je mesure bien le chemin qu’il nous reste à parcourir. Afin de pouvoir légiférer utilement, nous devons absolument approfondir notre réflexion d’ici à la deuxième lecture, en procédant notamment à certaines auditions. Nous n’avons pas eu le temps, jusqu’à présent, d’entrer dans le détail de ces sujets.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je suis d’accord pour que nous approfondissions la réflexion, mais la commission, sur ma proposition, avait adopté collectivement le texte dont nous discutons. Par la suite, des pressions se sont exercées, qui ont amené M. le rapporteur à déposer dans la précipitation un amendement dont la commission, appelée à examiner quelque 500 amendements hier en quelques heures, n’a pas eu le temps de discuter. En revanche, lors de l’élaboration du texte de la commission, nous avions pu débattre.
C’est donc vous, monsieur le rapporteur, qui proposez d’introduire des dispositions dont la précision juridique nous paraît douteuse. On est venu troubler nos délibérations avec des arguments fous, dont vous avez pourtant retenu certains pour élaborer un amendement. J’ai alors déposé un sous-amendement visant à préciser la rédaction de celui-ci, afin qu’elle ne remette pas en cause l’équilibre de la loi de 1986.
Si vous voulez renvoyer ce débat à la deuxième lecture, monsieur le rapporteur, retirez votre amendement, afin que nous en restions pour l’heure au texte qui faisait consensus au sein de la commission. Nous aurons ainsi le temps de débattre de ce sujet dans la sérénité, sans précipitation : c’est ainsi qu’il convient de légiférer. Moi aussi, j’ai reçu des courriers et des mails ! Il nous arrive très souvent, quand nous traitons d’audiovisuel, de recevoir des appels et de subir des pressions au dernier moment. Cela ne doit pas nous amener à changer nos méthodes de travail.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Monsieur Assouline, je n’ai pas encore votre expérience du débat parlementaire, mais je voudrais rétablir un certain nombre de faits.
Lorsque nous avons terminé nos auditions, à la fin du mois de décembre, le texte ne comportait aucune disposition concernant ce sujet. Certaines personnes auditionnées m’avaient dit, à l’époque, que quelque chose se tramait au ministère de la culture (Exclamations amusées.) et qu’un amendement y était en préparation. Or cet amendement, c’est vous qui l’avez déposé, mon cher collègue ! Ne nous racontons pas d’histoires… Je ne critique pas le procédé, qui a toujours eu cours.
Vous me reprochez de travailler dans la précipitation, mais cet amendement nous a été communiqué en janvier (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.),…
M. David Assouline. Ce n’était pas la veille du débat !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. … après la tenue des auditions et des tables rondes.
J’ai ensuite proposé à la commission d’adopter votre amendement, car, en l’état des informations dont je disposais, son dispositif me semblait pertinent. Comme vous l’avez dit, ce texte a suscité des rumeurs et des objections. J’ai considéré que certaines craintes, relatives par exemple à une taxation des mails, ne méritaient pas d’être prises en compte. En revanche, d’autres interrogations, émanant de divers opérateurs, m’ont paru davantage recevables. C’est pourquoi, bien qu’ayant émis un avis favorable sur le texte que vous aviez proposé pour cet article lors de la réunion de la commission, j’ai préféré après coup l’amender, par précaution.
Je reconnais que nous travaillons dans une certaine précipitation, c’est pourquoi je propose d’adopter l’amendement n° 506, avant de poursuivre notre travail et d’approfondir notre réflexion en vue de la deuxième lecture. Sur ce sujet complexe d’un point de vue à la fois juridique et technique, je suis tout à fait ouvert.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 524.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7 bis AA, modifié.
(L’article 7 bis AA est adopté.)
Motion d’ordre
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Madame la présidente, la commission demande l’examen séparé de l’amendement n° 480 à l’article 20 et de l’amendement n° 416 à l’article 24.
Mme la présidente. Je suis saisie par la commission d’une demande d’examen séparé de l’amendement n° 480 du Gouvernement à l’article 20 et de l’amendement n° 416 du Gouvernement à l’article 24.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
4
Communication relative à des commissions mixtes paritaires
Mme la présidente. J’informe le Sénat que sont parvenues à l’élaboration d’un texte commun :
- d’une part, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs ;
- d’autre part, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat.
5
Communications du Conseil constitutionnel
Mme la présidente. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 10 février 2016 :
- qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles 266 sexies II et 268 ter du code des douanes (taxe générale sur les activités polluantes) (2016-537 QPC) ;
- qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles 1 ter et 1 quater de l’article 150-0 D du code général des impôts (plus-values de cession à titre onéreux de biens ou de droits de toute nature) (2016-538 QPC).
Le texte de ces décisions de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de ces communications.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à vingt et une heures trente.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
6
Conférence des présidents
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vais vous donner lecture des conclusions de la conférence des présidents, qui s’est réunie aujourd'hui :
SEMAINES RÉSERVÉES PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
JEUDI 11 FÉVRIER 2016 |
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À 10 h 30 |
- Dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes par M. Didier MIGAUD, Premier président de la Cour des comptes • Temps attribué à la commission des finances : 10 minutes • Temps attribué à la commission des affaires sociales : 10 minutes - Projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République du Mali (texte de la commission, n° 359, 2015-2016) • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 30 minutes - 3 conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié : => Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande concernant le statut des forces en visite et la coopération en matière de défense (texte de la commission, n° 361, 2015-2016) => Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Lituanie relatif à la coopération dans le domaine de la défense et de la sécurité (texte de la commission, n° 364, 2015-2016) => Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Croatie relatif à la coopération dans le domaine de la défense (texte de la commission, n° 363, 2015-2016) - Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (texte de la commission, n° 341, 2015-2016) |
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À 15 heures |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur France 3, Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : jeudi 11 février, à 11 heures |
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À 16 h 15, le soir et la nuit |
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (texte de la commission, n° 341, 2015-2016) |
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VENDREDI 12 FÉVRIER 2016 |
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À 9 h 30, à 14 h 30 et, éventuellement, le soir |
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (texte de la commission, n° 341, 2015-2016) |
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MARDI 16 FÉVRIER 2016 |
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À 15 h 15 |
- Explications de vote des groupes sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (texte de la commission, n° 341, 2015-2016) • Temps attribué aux orateurs des groupes pour les explications de vote, à raison d’un orateur par groupe : 7 minutes pour chaque groupe et 3 minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe • Délai limite pour les inscriptions de parole : lundi 15 février, à 17 heures |
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De 16 heuresà 16 h 30 |
- Scrutin public solennel, en salle des Conférences, sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (texte de la commission, n° 341, 2015-2016) |
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À 16 h 30 |
- Proclamation du résultat du scrutin public solennel sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (texte de la commission, n° 341, 2015-2016) |
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À 16 h 45 |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mardi 16 février, à 12 h 30 |
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À 17 h 45et le soir |
- Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif au droit des étrangers en France (n° 339, 2015-2016) Ce texte a été envoyé à la commission des lois. • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 15 février, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 16 février matin • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 15 février, à 17 heures |
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MERCREDI 17 FÉVRIER 2016 |
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À 14 h 30 |
- Suite de l’ordre du jour de la veille - Proposition de loi organique (texte de la commission, n° 390, 2015-2016) et proposition de loi (texte de la commission, n° 391, 2015-2016), adoptées par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle Ces textes ont été envoyés à la commission des lois avec une saisine pour avis de la commission de la culture. Ils feront l’objet d’une discussion générale commune. • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 15 février, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 17 février matin • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale commune : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale commune : mardi 16 février, à 17 heures |
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À 17 h 30 |
- Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 18 et 19 février Intervention liminaire du Gouvernement : 10 minutes 8 minutes attribuées à chaque groupe politique et 5 minutes aux sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 16 février, à 17 heures 8 minutes attribuées respectivement à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et à la commission des affaires européennes Après la réponse du Gouvernement, débat spontané et interactif de 1 heure : 2 minutes maximum par sénateur avec possibilité d’une réponse du Gouvernement ou de la commission des affaires européennes |
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Le soiret la nuit |
- Suite de l’ordre du jour de l’après-midi |
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JEUDI 18 FÉVRIER 2016 |
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À 10 h 30 |
- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu (texte de la commission, n° 386, 2015-2016) • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 30 minutes • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 17 février, à 17 heures - Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse modifiant le protocole additionnel à la convention entre la France et la Suisse du 9 septembre 1966 modifiée, en vue d’éliminer les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l’évasion fiscales (texte de la commission, n° 388, 2015-2016) • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 30 minutes • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 17 février, à 17 heures |
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À 14 h 30 et le soir |
- Suite éventuelle de la proposition de loi organique (texte de la commission, n° 390, 2015-2016) et de la proposition de loi (texte de la commission, n° 391, 2015-2016), adoptées par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle - Nouvelle lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, relative à la protection de l’enfant (texte de la commission, n° 379, 2015-2016) Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales. • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 15 février, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 17 février matin • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 17 février, à 17 heures |
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JEUDI 18 FÉVRIER 2016 (SUITE) |
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À 14 h 30 et le soir(suite) |
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi d’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée (texte de la commission, n° 355, 2015-2016) • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 17 février, à 17 heures |
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Suspension des travaux en séance plénière : |
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du lundi 22 au dimanche 28 février 2016 |
SEMAINE DE CONTRÔLE
MARDI 1ER MARS 2016 |
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À 14 h 30 |
- Débat sur le dispositif exceptionnel d’accueil des réfugiés (demande du groupe Les Républicains) • Temps attribué au groupe Les Républicains : 10 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 29 février, à 17 heures |
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À 16 h 45 |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mardi 1er mars, à 12 h 30 |
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À 17 h 45 |
- Question orale avec débat n° 12 de M. Jean DESESSARD à Mme la secrétaire d’État, auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l’État et de la simplification sur la situation des salariés rémunérés par le chèque emploi service universel (CESU), en cas d’arrêt pour maladie (demande du groupe écologiste) • Temps attribué à l’auteur de la question : 10 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 29 février, à 17 heures • Possibilité pour l’auteur de la question et chaque orateur d’utiliser une partie de son temps pour répondre au Gouvernement |
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MERCREDI 2 MARS 2016 |
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À 14 h 30 et, éventuellement,le soir |
- Débat sur la situation financière des départements (demande du groupe Les Républicains) • Temps attribué au groupe Les Républicains : 10 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 1er mars, à 17 heures - Débat sur « le trentième anniversaire du baccalauréat professionnel » (demande du groupe communiste républicain et citoyen) • Temps attribué au groupe communiste républicain et citoyen : 10 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 1er mars, à 17 heures |
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MERCREDI 2 MARS 2016 (SUITE) |
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À 14 h 30 et, éventuellement,le soir(suite) |
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs (texte de la commission, n° 382, 2015-2016) (demande du Gouvernement) • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 1er mars, à 17 heures - Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat (texte de la commission, n° 384, 2015-2016) (demande du Gouvernement) • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 1er mars, à 17 heures |
SEMAINE SÉNATORIALE
MARDI 8 MARS 2016 |
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À 14 h 30 |
- Proposition de loi tendant à permettre le maintien des communes associées en cas de création d’une commune nouvelle, présentée par M. Bruno SIDO et plusieurs de ses collègues (n° 181, 2015-2016) (demande du groupe Les Républicains) Ce texte a été envoyé à la commission des lois. • Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 29 février, à 12 heures • Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 2 mars matin • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : ouverture de la discussion générale • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : à l’issue de la discussion générale • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 7 mars, à 17 heures - Proposition de loi visant à augmenter de deux candidats remplaçants la liste des candidats au conseil municipal, présentée par M. Jean-Noël CARDOUX et plusieurs de ses collègues (n° 591, 2014-2015) (demande du groupe Les Républicains) Ce texte a été envoyé à la commission des lois. • Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 29 février, à 12 heures • Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 2 mars matin • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : ouverture de la discussion générale • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : à l’issue de la discussion générale • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 7 mars, à 17 heures |
MARDI 8 MARS 2016 (SUITE) |
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À 16 h 45 |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mardi 8 mars, à 12 heures 30 |
À 17 h 45et, éventuellement,le soir |
- Suite de l’ordre du jour de l’après-midi |
MERCREDI 9 MARS 2016 |
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De 14 h 30à 18 h 30 (ordre du jour réservé au groupe écologiste) |
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation (n° 303, 2015-2016) Ce texte a été envoyé à la commission des affaires économiques. • Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 29 février, à 12 heures • Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 2 mars matin • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 7 mars, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 9 mars matin • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 8 mars, à 17 heures - Proposition de résolution pour l’instauration d’un revenu de base présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par M. Jean DESESSARD et plusieurs de ses collègues (n° 353, 2015-2016) • Temps attribué à l’auteur de la proposition de résolution : 10 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 8 mars, à 17 heures • Les interventions des orateurs vaudront explications de vote |
JEUDI 10 MARS 2016 |
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À 10 h 30 |
- Nouvelle lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées (n° 372, 2015-2016) (demande du Gouvernement) Ce texte a été envoyé à une commission spéciale. • Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 15 février, à 12 heures • Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mardi 16 février après-midi • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 7 mars, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 9 mars après-midi • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 9 mars, à 17 heures |
De 14 h 30à 18 h 30 (ordre du jour réservé au groupe socialiste et républicain) |
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’économie bleue (n° 370, 2015-2016) Ce texte a été envoyé à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, avec une saisine pour avis de la commission des affaires économiques. • Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : vendredi 19 février, à 17 heures • Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 2 mars matin • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 7 mars, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 9 mars matin • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 9 mars, à 17 heures |
À 18 h 30 et, éventuellement,le soir |
- Suite éventuelle de l’ordre du jour du matin |
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
MARDI 15 MARS 2016 |
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À 9 h 30 |
- 26 questions orales L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement. • n° 1236 de Mme Marie-Hélène DES ESGAULX à M. le secrétaire d’État chargé du budget (Recouvrement de la taxe d’aménagement) • n° 1249 de Mme Pascale GRUNY à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement (Simplification des normes pour les agriculteurs) • n° 1254 de M. Serge DASSAULT à M. le ministre de l’intérieur (Logement des forces de police de la base CRS 8 à Bièvres) • n° 1256 de M. Gérard LONGUET à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche (Fonds de soutien au développement des activités périscolaires) • n° 1265 de M. Loïc HERVÉ à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes (Devenir de la clinique de Cluses) • n° 1268 de M. Alain CHATILLON à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité (Gens du voyage et aires d’accueil) • n° 1271 de M. Henri TANDONNET à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité (Aide personnalisée au logement pour les apprentis) • n° 1293 de M. Simon SUTOUR à M. le ministre de l’intérieur (Dotation de solidarité rurale et fraction bourg-centre) • n° 1300 de M. Cédric PERRIN à Mme la secrétaire d’État chargée du numérique (Couverture en téléphonie mobile) • n° 1302 de Mme Corinne IMBERT à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes (Modification de la gouvernance des caisses de retraite des professions libérales) • n° 1303 de M. Jean-François HUSSON à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement (Projet de fermeture du centre de formation de l’office national des forêts de Velaine-en-Haye) • n° 1312 de M. Yannick VAUGRENARD à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique (Contrats de volontariat en petites et moyennes entreprises) • n° 1313 de Mme Dominique ESTROSI SASSONE à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité (Rénovation des logements sociaux étudiants à Nice) • n° 1315 de Mme Claire-Lise CAMPION à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes (Professionnels de santé et lutte contre les violences conjugales) |
MARDI 15 MARS 2016 (SUITE) |
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À 9 h 30(suite) |
• n° 1317 de M. Jean-Jacques FILLEUL à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique (Compétence eau et assainissement des collectivités territoriales) • n° 1318 de M. Daniel DUBOIS à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique (Fonds pour la société numérique et schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique) • n° 1319 de M. Georges PATIENT à M. le ministre de l’intérieur (Montée de l’insécurité en Guyane) • n° 1322 de M. Claude BÉRIT-DÉBAT à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie (Versement de la prime à la naissance) • n° 1326 de M. Jean-Yves LECONTE à M. le ministre des finances et des comptes publics (Conséquences pour la France de la convention fiscale franco-qatarie) • n° 1329 de Mme Michelle DEMESSINE à M. le garde des sceaux, ministre de la justice (Responsabilité des entreprises dans l’exposition de leurs salariés à l’amiante) • n° 1330 de Mme Aline ARCHIMBAUD à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (Projet d’enfouissement d’une portion de l’autoroute A1 à Saint-Denis) • n° 1334 de M. Michel LE SCOUARNEC à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche (Avenir du collège Montaigne de Vannes) • n° 1336 de M. Jacques MÉZARD à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes (Isolement géographique du centre hospitalier d’Aurillac) • n° 1337 de M. Jean Louis MASSON à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes (Régimes complémentaires de retraite des élus locaux et reprise d’activité) • n° 1339 de Mme Claudine LEPAGE à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes (Qualité d’ayant-droit d’un retraité français résidant hors de France) • n° 1340 de Mme Stéphanie RIOCREUX à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (Pratiques commerciales du secteur des énergies renouvelables) |
MARDI 15 MARS 2016 (SUITE) |
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À 14 h 30 |
- Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur le rapport au Parlement relatif aux conditions d’emploi des forces armées lorsqu’elles interviennent sur le territoire national pour protéger la population, en application de l’article 50-1 de la Constitution • Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure • Temps attribué à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées : 10 minutes • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 14 mars, à 17 heures - 4 conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié : => Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif au site technique de l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice entre le Gouvernement de la République française et l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (n° 106, 2014-2015) => Projet de loi autorisant l’approbation de l’amendement à la convention sur la future coopération multilatérale dans les pêches de l’Atlantique du Nord-Ouest du 24 octobre 1978 (n° 212, 2014-2015) => Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord (ensemble un règlement transférant la compétence de régulation économique ferroviaire de la Commission intergouvernementale aux organismes de contrôle nationaux, établissant les principes de la coopération entre ceux-ci et portant établissement d’un cadre de tarification pour la liaison fixe transmanche, et une annexe) (n° 173, 2015-2016) => Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Pérou (n° 352, 2015-2016) • Délai limite pour qu’un président de groupe demande le retour à la procédure normale : vendredi 11 mars, à 17 heures |
MARDI 15 MARS 2016 (SUITE) |
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À 14 h 30(suite) |
- Projet de loi autorisant l’accession de la France au protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du Traité de l’Atlantique Nord (n° 286, 2015-2016) • Temps attribué aux orateurs des groupes : 30 minutes • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 14 mars, à 17 heures - Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 17 et 18 mars Intervention liminaire du Gouvernement : 10 minutes 8 minutes attribuées à chaque groupe politique et 5 minutes aux sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 14 mars, à 17 heures 8 minutes attribuées respectivement à la commission des finances et à la commission des affaires européennes Après la réponse du Gouvernement, débat spontané et interactif de 1 heure : 2 minutes maximum par sénateur avec possibilité d’une réponse du Gouvernement ou de la commission des affaires européennes |
MERCREDI 16 MARS 2016 |
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À 14 h 30et le soir |
- Projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, de protection de la Nation (n° 395, 2015-2016) Ce texte a été envoyé à la commission des lois. • Réunion de la commission pour le rapport : mercredi 9 mars matin • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 14 mars à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 16 mars matin • Temps attribué à la commission des lois dans la discussion générale : 20 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 2 heures • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 15 mars à 17 heures |
JEUDI 17 MARS 2016 |
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À 11 heures |
- Suite de l’ordre du jour de la veille |
À 15 heures |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : jeudi 17 mars, à 11 heures |
À 16 h 15et le soir |
- Suite de l’ordre du jour du matin |
SEMAINE DE CONTRÔLE
MARDI 22 MARS 2016 |
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À 15 h 15 |
- Explications de vote des groupes sur le projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, de protection de la Nation (n° 395, 2015-2016) • Temps attribué aux orateurs des groupes pour les explications de vote, à raison d’un orateur par groupe : 7 minutes pour chaque groupe et 3 minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe • Délai limite pour les inscriptions de parole : lundi 21 mars, à 17 heures |
De 16 heuresà 16 h 30 |
- Scrutin public solennel, en salle des Conférences, sur le projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, de protection de la Nation (n° 395, 2015-2016) |
À 16 h 30 |
- Proclamation du résultat du scrutin public solennel sur le projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, de protection de la Nation (n° 395, 2015-2016) |
À 16 h 45 |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mardi 22 mars, à 12 heures 30 |
À 17 h 45 |
- Débat sur la santé au travail (demande du groupe communiste républicain et citoyen) • Temps attribué au groupe communiste républicain et citoyen : 10 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 21 mars, à 17 heures |
MERCREDI 23 MARS 2016 |
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À 14 h 30et le soir |
- Débat sur les conclusions du rapport d’information de la commission des finances sur les moyens consacrés au renseignement intérieur (demande du groupe Les Républicains) • Temps attribué au groupe Les Républicains : 10 minutes • Temps attribué aux orateurs des groupes : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 22 mars, à 17 heures |
MERCREDI 23 MARS 2016 (SUITE) |
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À 14 h 30et le soir(suite) |
- Deuxième lecture de la proposition de loi, rejetée par l’Assemblée nationale, en faveur de la compétitivité de l’agriculture et de la filière agroalimentaire (n° 371, 2015-2016) (demande du groupe Les Républicains) Ce texte a été envoyé à la commission des affaires économiques. • Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 14 mars, à 12 heures • Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 16 mars matin • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 21 mars, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mercredi 23 mars matin • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 22 mars, à 17 heures - Suite de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’économie bleue (n° 370, 2015-2016) (demande du Gouvernement en application de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution) |
JEUDI 24 MARS 2016 |
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À 14 h 30et, éventuellement, le soir |
- Suite de l’ordre du jour de la veille |
SEMAINE GOUVERNEMENTALE
MARDI 29 MARS 2016 |
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À 14 h 30et le soir |
- Sous réserve de sa transmission, projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale (procédure accélérée) (AN, n° 3473) Ce texte sera envoyé à la commission des lois. • Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 21 mars, à 12 heures • Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 23 mars matin • Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : vendredi 25 mars, à 12 heures • Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 29 mars matin et mercredi 30 mars matin • Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure • Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 25 mars, à 17 heures |
MERCREDI 30 MARS 2016 |
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À 14 h 30et le soir |
- Suite du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale (procédure accélérée) (AN, n° 3473) |
JEUDI 31 MARS 2016 |
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À 10 h 30 |
- Suite du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale (procédure accélérée) (AN, n° 3473) |
À 15 heures |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : jeudi 31 mars, à 11 heures |
À 16 h 15 et, éventuellement, le soir |
- Suite de l’ordre du jour du matin |
SEMAINE SÉNATORIALE
MARDI 5 AVRIL 2016 |
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À 15 h 15 |
- Sous réserve de sa transmission, explications de vote des groupes sur le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale (AN, n° 3473) • Temps attribué aux orateurs des groupes pour les explications de vote, à raison d’un orateur par groupe : 7 minutes pour chaque groupe et 3 minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe • Délai limite pour les inscriptions de parole : lundi 4 avril, à 17 heures |
De 16 heuresà 16 h 30 |
- Sous réserve de sa transmission, scrutin public solennel, en salle des Conférences, sur le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale (AN, n° 3473) |
À 16 h 30 |
- Sous réserve de sa transmission, proclamation du résultat du scrutin public solennel sur le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale (AN, n° 3473) |
À 16 h 45 |
- Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat et sur le site Internet du Sénat) • Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mardi 5 avril, à 12 heures 30 |
Prochaine réunion de la Conférence des Présidents : |
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mercredi 9 mars 2016, à 19 heures |
Je consulte le Sénat sur les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui résultant des inscriptions prioritaires du Gouvernement.
Y a-t-il des observations ?…
Ces propositions sont adoptées.
7
Liberté de création, architecture et patrimoine
Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. Nous reprenons l’examen du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II du titre Ier, à l’article 7 bis A.
TITRE Ier (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES À LA LIBERTÉ DE CRÉATION ET À LA CRÉATION ARTISTIQUE
Chapitre II (suite)
Le partage et la transparence des rémunérations dans les secteurs de la création artistique
Article 7 bis A
L’avant-dernier alinéa du II de l’article 144 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Ce rapport est public. Une copie en est adressée aux présidents des commissions permanentes parlementaires chargées de la culture. » – (Adopté.)
Article 7 bis
L’article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« Un conseiller d’État désigné par le vice-président du Conseil d’État, un magistrat de la Cour de cassation désigné par le premier président de la Cour de cassation et un magistrat de la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes sont nommés par arrêté conjoint des ministres chargés de la culture, de l’industrie et de la consommation. Ils participent aux travaux de la commission avec voix consultative. Le président et les membres de la commission transmettent au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dans un délai de deux mois suivant leur désignation, une déclaration d’intérêt telle que prévue au III de l’article 4 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. » ;
2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le règlement intérieur de la commission et ses modifications font l’objet d’une publication au Journal officiel. »
Mme la présidente. L'amendement n° 312, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le premier alinéa de l’article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Trois représentants des ministres chargés de la culture, de l’industrie et de la consommation participent aux travaux de la commission avec voix consultative. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication. Cet amendement vise à rétablir la disposition du projet de loi votée par l’Assemblée nationale qui créait un pôle public au sein de la commission pour la rémunération de la copie privée, composé de représentants des ministères principalement concernés.
Je considère en effet que le renforcement de la représentation des pouvoirs publics au sein de la commission se justifie avant tout au regard des ministères qui ont la responsabilité de nommer ces membres et de garantir son bon fonctionnement.
À cet égard, la désignation de magistrats issus des grands corps paraît moins justifiée et moins adaptée, dès lors que les membres de ce pôle public n’auront qu’un rôle d’observateurs au sein de la commission.
Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. L’objet de cet amendement est la composition de la commission pour la rémunération de la copie privée, qui a causé toutes les difficultés que vous connaissez.
Le Gouvernement demande le rétablissement de la disposition tendant à prévoir la nomination au sein de cette commission d’un représentant, en observateur avec voix consultative, de chacun des trois ministères suivants : culture, industrie et consommation. Pour notre part, dans un souci d’indépendance, nous avons proposé de nommer trois magistrats à la place.
Les auditions que nous avons menées nous ont aiguillés vers ce choix. En effet, les collèges dépendant, pour le premier, des industriels, pour le deuxième, des ayants droit, et pour le troisième, des consommateurs, l’ajout de représentants des ministères de tutelle de chacune de ces composantes ne contribuerait pas à beaucoup changer les équilibres. Notre choix s’est donc porté sur la nomination de trois magistrats indépendants, avec voix consultative également.
Par ailleurs, je précise tout de suite, pour ne pas avoir à y revenir, que nous avons souhaité que les membres de la commission soient aussi soumis à l’obligation de déposer une déclaration d’intérêts, comme c’est le cas pour nous tous – ce point a également été évoqué lors de nos auditions –, les sommes en jeu, à savoir plus de 200 millions d’euros, étant importantes. Il nous semble que cette disposition est bien dans l’esprit de clarification et de transparence qu’incarne ce texte.
Enfin, le dernier point concerne les études, mais nous y reviendrons par la suite.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cette proposition de modification de la composition nous a aussi interpellés. Comme il y a beaucoup de recours, il n’est pas idiot de prévoir des magistrats.
Par ailleurs, madame la ministre, votre amendement n’a pas seulement pour objet de revenir sur la modification de la commission : il tend aussi à supprimer l’obligation de transmission d’une déclaration d’intérêts par ses membres. Pour notre part, nous jugions cette disposition utile.
Pour ces raisons, nous voterons contre cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7 bis.
(L'article 7 bis est adopté.)
Article 7 ter
L’article L. 311-6 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« Art. L. 311-6. – I. - La rémunération prévue à l’article L. 311-1 est perçue pour le compte des ayants droit par un ou plusieurs organismes mentionnés au titre II du présent livre, agréés conjointement à cet effet par les ministres chargés de la culture, de l’industrie et de la consommation.
« L’agrément est délivré pour cinq années en considération :
« 1° De la représentation paritaire des membres de la commission mentionnée à l’article L. 311-5 au sein des organes dirigeants de l’organisme ;
« 2° De la qualification professionnelle des dirigeants de l’organisme ;
« 3° Des moyens que l’organisme propose de mettre en œuvre pour assurer la perception des droits.
« II. - La rémunération prévue à l’article L. 311-1 est répartie entre les ayants droit par les organismes mentionnés au I du présent article, à raison des reproductions privées dont chaque œuvre fait l’objet.
« III. - Une part ne pouvant excéder 1 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée est affectée par les organismes mentionnés au I du présent article au financement des enquêtes d’usages réalisées par l’autorité mentionnée à l’article L. 331-12, sur le fondement de cahiers des charges rédigés par la commission mentionnée à l’article L. 311-5. »
Mme la présidente. L'amendement n° 324, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 311-6 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une part ne pouvant excéder 1 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée est affectée par ces organismes au financement des enquêtes d’usage réalisées, en application du troisième alinéa de l’article L. 311-4, par la commission mentionnée à l’article L. 311-5. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement a pour objet de supprimer l’agrément des sociétés chargées de percevoir et de répartir la rémunération pour copie privée et la responsabilité confiée à l’HADOPI de conduire les études d’usage.
Ces organismes étant des sociétés civiles, un tel régime d’agrément n’est prévu par le code de la propriété intellectuelle que dans des hypothèses limitées où un motif d’intérêt général le commande. Par ailleurs, les sociétés de perception et de répartition des droits, les SPRD, sont d’ores et déjà soumises à différents contrôles, dont celui de la commission permanente de contrôle des SPRD.
S’agissant des études d’usage nécessaires à la fixation des barèmes de rémunération pour copie privée, il ne me paraît pas du tout opportun de confier leur réalisation à la HADOPI, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet.
L’affectation d’une petite partie du montant global de la rémunération pour copie privée au financement des études d’usage contribuera au contraire à garantir leur totale indépendance.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Madame la ministre, l’article 7 ter vise, s’agissant de filières professionnelles complexes, à renforcer la transparence de leur fonctionnement. – c’est même là sa vocation principale. L’un des angles sous lesquels nous avons traité du sujet de la commission copie privée est d’ailleurs celui de la transparence.
Les études qui doivent être menées doivent l’être, en effet, par des personnes compétentes. Votre proposition, madame la ministre, consiste à faire réaliser ces études par des cabinets, après appel d’offres. Nous pensons, quant à nous, d’une part, que le cahier des charges doit être élaboré par la commission, c’est-à-dire par les membres des trois collèges qui la composent, et, d’autre part, qu’il entre tout à fait dans les missions de la HADOPI, qui est indépendante, d’effectuer ces études d’usage.
Je crois que notre proposition va davantage dans le sens de la transparence que la vôtre, madame la ministre. Pour cette raison, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 324.
Mme la présidente. L'amendement n° 298 rectifié ter, présenté par Mme Duchêne, M. Cardoux, Mme Di Folco, MM. Vogel, Milon, Laufoaulu, Mandelli, Laménie, Mayet et Kennel, Mmes Deromedi et Hummel, MM. Pellevat et Chasseing, Mme Morhet-Richaud, MM. Chaize et Gournac, Mme Primas et M. Husson, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 7
Remplacer le mot :
rémunération
par les mots :
compensation équitable
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. L’amendement n° 298 rectifié ter a pour objet d’introduire une modification sémantique dans la rédaction de l’article 7 ter. Le même sujet a été évoqué lors de la discussion de l’amendement n° 292 rectifié ter. J’avais alors émis un avis défavorable.
La substitution de la notion de « rémunération » par celle de « compensation » relève d’un peu plus que d’un simple problème sémantique ; elle mériterait un travail approfondi. En attendant, j’émets de nouveau un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Chaize. Je retire mon amendement, madame la présidente !
Mme la présidente. L'amendement n° 298 rectifié ter est retiré.
L'amendement n° 208 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère, Capo-Canellas, Laurey, Cadic et Cigolotti, Mme Goy-Chavent, MM. Marseille et Guerriau, Mme Gatel et M. Gabouty, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
les ministres chargés de la culture, de l'industrie et de la consommation
par les mots :
les ministres chargés de la culture et de l'industrie
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.
M. Philippe Bonnecarrère. Cet amendement traite des modalités de l’agrément créé par l’article 7 ter.
Que les ministères chargés de la culture et de l’industrie soient parties prenantes dudit agrément, cela se justifie assez bien au regard des enjeux culturels et économiques d’un tel dispositif, qui a d’ailleurs toute sa place dans le présent projet de loi. Je suis moins convaincu de l’opportunité d’un agrément délivré par le ministère chargé de la consommation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Notre collègue M. Bonnecarrère propose de confier aux seuls ministres chargés de la culture et de l’industrie l’agrément de l’organisme chargé de la collecte de la rémunération pour copie privée, qu’il s’agisse de Copie France ou d’une autre structure. Le texte gagnerait ainsi en clarté et en simplicité.
La commission émet donc un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt et une heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Quel est donc l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 208 rectifié ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d'abord souligner un point, qui tient à la méthode de nos travaux : alors que le Gouvernement a déposé la quasi-totalité de ses amendements jeudi dernier, nous découvrons aujourd’hui, au dernier moment, un certain nombre d’amendements rectifiés, et parfois de manière très substantielle.
Si nous voulons travailler sereinement, ce n’est pas exactement la bonne méthode ! Je suis tout à fait disposée à avoir avec vous un débat constructif, mais encore faudrait-il que nous disposions plus tôt du texte des amendements rectifiés.
L’amendement n° 208 rectifié vise à imposer un agrément, alors même que les sociétés chargées de percevoir et de répartir la rémunération pour copie privée – je l’ai dit tout à l’heure – sont des sociétés civiles qui, à ce titre, ne sauraient être soumises à un régime général d’agrément. Un tel régime n’est en effet prévu par le code de la propriété intellectuelle que dans des hypothèses très limitées, notamment lorsqu’un motif d’intérêt général le commande.
Lors de la transposition de la directive « Services », le champ d’application limité des procédures d’agrément a d’ailleurs été un élément clef pour que la compatibilité de la législation française avec ladite directive soit reconnue par la Commission européenne.
Par ailleurs, les sociétés de perception et de répartition des droits sont d’ores et déjà soumises à différents contrôles, dont celui de la commission de contrôle des SPRD – là encore, je l’ai déjà dit tout à l’heure. C’est pourquoi j’avais présenté, au nom du Gouvernement, l’amendement n° 324, qui visait à supprimer l’article 7 ter du projet de loi.
Je ne puis donc qu’être défavorable à cet amendement n° 208 rectifié, qui tend à aménager, sans la supprimer, la procédure d’agrément.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7 ter, modifié.
(L'article 7 ter est adopté.)
Article 7 quater AA (nouveau)
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° L’article L. 311-4 est ainsi modifié :
La seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 311-4 est complétée par les mots : « réalisées dans les conditions fixées par le III de l’article L. 311-6. » ;
2° L’article L. 331-31 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle fournit à la commission mentionnée à l’article L. 311-5 les enquêtes sur les usages de l’exception de copie privée réalisées en application de l’article L. 311-6. »
Mme la présidente. L'amendement n° 325, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. L’article 7 quater AA, dont nous demandons la suppression, vise à confier à la HADOPI la responsabilité de conduire les études d’usage en matière de copie privée – j’ai déjà évoqué cette question lors de l’examen de l’amendement n° 324.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, il convient prioritairement de donner à la commission pour la rémunération de la copie privée les moyens qui sont nécessaires pour lui permettre de conserver la pleine maîtrise des études d’usage préalables à la fixation des barèmes de rémunération.
Tel est l’objet de cet amendement, qui vise à revenir sur la rédaction proposée par la commission, laquelle a au contraire pour conséquence de dessaisir la commission en lui imposant de confier les études d’usage à la HADOPI.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Madame la ministre, cet amendement vise à supprimer l’article 7 quater AA. Or il s’agit d’un article de coordination, essentiel à l’applicabilité des différentes dispositions que nous avons adoptées en commission et en séance.
Pour des raisons de cohérence, l’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7 quater AA.
(L'article 7 quater AA est adopté.)
Article 7 quater A
L’article L. 311-8 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Après le mot : « acquis », la fin du II est ainsi rédigée : « à des fins professionnelles. » ;
1° Après le même II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – La rémunération pour copie privée n’est pas due non plus par les personnes qui procèdent à l’exportation ou à la livraison intracommunautaire de supports d’enregistrement mis en circulation en France. » ;
2° À la première phrase du premier alinéa du III, les références : « I ou II » sont remplacées par les références : « I, II ou II bis ».
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 326 est présenté par le Gouvernement.
L'amendement n° 449 rectifié est présenté par Mmes Laborde et Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la ministre, pour présenter l'amendement n° 326.
Mme Fleur Pellerin, ministre. J’ai eu l’occasion de le répéter tout à l’heure : le sujet de la copie privée est extrêmement sensible, tant d’un point de vue politique qu’en termes de ressources, pour l’ensemble du milieu de la création artistique. Nous devons donc nous montrer très vigilants s’agissant des propositions qui sont faites dans le cadre du présent projet de loi.
Il n’est pas possible, au regard du droit communautaire, d’exonérer de la rémunération pour copie privée tous les supports de reproduction acquis à des fins professionnelles. La jurisprudence communautaire tient compte du critère de l’usage effectif des supports. En conséquence, il est exigé, pour permettre une exonération, que le support soit manifestement réservé à un usage autre que la réalisation de copies privées.
Dans ces conditions, il n’apparaît pas envisageable de prévoir une exonération au seul motif que l’acquéreur pourrait revendiquer un usage professionnel, sans s’assurer de l’usage effectif.
L’amendement présenté par le Gouvernement vise donc, précisément, à rétablir ce critère de l’usage effectif, qui avait été supprimé par la commission.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l’amendement n° 449 rectifié.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement étant identique à celui du Gouvernement, que Mme la ministre vient de défendre, je ne m’étendrai pas. Son objet est de supprimer une disposition qui exonère du paiement de la rémunération pour copie privée tous les supports d’enregistrement acquis à des fins professionnelles.
Le droit existant exonère déjà du paiement de la rémunération pour copie privée « les supports d'enregistrement acquis notamment à des fins professionnelles dont les conditions d’utilisation ne permettent pas de présumer un usage à des fins de copie privée ».
Or les dispositions introduites par la commission écartent le critère de l’usage effectif qui est fait du support. Exonérer tous les supports acquis à des fins professionnelles n’est pas justifié : le code de la propriété intellectuelle le permet déjà lorsque les conditions d’utilisation ne permettent pas de présumer un usage à des fins de copie privée.
Il faut donc revenir au droit existant et mettre le critère de l’usage effectif au premier plan pour l’exonération de la rémunération pour copie privée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cette redevance pour copie privée et son mode de fonctionnement constituent des sujets très importants, sur lesquels il faut travailler avec une main prudente.
Le principe des exonérations est simple en ce qui concerne les professionnels et les exportateurs. Néanmoins, il est légitime que les professionnels, quand ils font de ces outils un usage professionnel, soient exonérés.
Quant à savoir si un professionnel qui achète ce matériel s’en servira à des fins professionnelles ou non, cela n’est plus trop de notre ressort. Ce sujet est quelque peu délicat. Il faut selon nous préciser les choses ; on me dit en effet que certains professionnels qui achètent ces outils ne s’en servent pas, mais le distribuent à leur personnel pour des raisons personnelles. J’aimerais pour ma part ne pas avoir à trop entrer dans ces détails.
Il faut savoir que, pour appliquer la règle, à l’heure actuelle, deux mécanismes existent.
D’une part, pour les gros matériels, destinés par exemple aux ministères ou aux collectivités, les clients peuvent signer une convention définitive : dans ce cas, aucune rémunération n’est payée d’entrée.
D’autre part, il existe une procédure de remboursement, qui se révèle au dire des industriels extrêmement compliquée : en réalité, ils y renoncent, quand bien même la somme ainsi perdue représente plusieurs dizaines de millions d’euros ! De l’argent entre donc dans les caisses, mais c’est de l’argent qui n’est pas dû. Il faudrait donc analyser plus avant cette partie du problème, car nous ne disposons pas d’informations suffisantes.
En l’état, afin d’avancer vers un consensus et au vu de l’importance du sujet, j’émettrai un avis de sagesse sur ces amendements. Toutefois, je demande que l’on revienne sur ce point et que l’on précise davantage les modalités de remboursement. Celles-ci sont extrêmement difficiles, non pas pour les gros clients, mais, par exemple, pour les cabinets d’avocats, qui achètent du matériel une ou deux fois par an et renoncent à se faire rembourser tant les procédures sont compliquées et tant on leur demande de justificatifs.
La commission s'en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Monsieur le rapporteur, vous avez touché à ce dispositif d’une main tremblante, c’est vrai, mais comme vous y avez tout de même touché, vous déséquilibrez quelque peu le droit, malgré tout !
On visait l’effectif, et désormais vous voulez passer au déclaratif. Je ne vois pas pourquoi ceux qui voudraient contourner la règle ne déclareraient pas ce qu’ils veulent, parce que vous pensez bien qu’on ne va pas encore compliquer les choses en embauchant des contrôleurs et des administrations pour voir si le déclaratif est effectif, notamment.
Vous touchez donc le dispositif, et cela concerne des sommes importantes. Si votre objectif ici est de dire que, la procédure étant longue, il vaut mieux que les gens concernés déclarent et que cela suffise, vous transférez déjà une charge sur le contrôle. Soit, mais on peut faire cela autrement que par la loi ! On peut tout simplement demander au ministère de prendre le problème à bras-le-corps, en soulignant que les procédures doivent se simplifier et s’accélérer.
S'agissant des gros industriels, je ne pense pas qu’ils renoncent, parce qu’ils peuvent attendre et qu’ils ont les moyens de rentabiliser les matériels. S’il y a des industriels à protéger parce que les procédures sont trop lourdes, agissons plutôt par l’incitation et par la simplification, et ne touchons pas à une règle majeure qui figure dans les règlements et la loi sur la copie privée, où c’est l’effectivité qui est en jeu.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Je remercie M. le rapporteur de ne toucher ce dispositif que d’une main tremblante. Que ce soit bien clair : nous sommes attachés au dispositif qui permet de rémunérer les auteurs. Je pense d’ailleurs que tel est aussi l’esprit de la commission et du rapporteur. Nous sommes attachés au droit de la propriété, notamment à la propriété intellectuelle.
Par ailleurs, le mécanisme existant est quelque peu compliqué, mais relativement simple dans sa conception : il consiste à taxer non pas le matériel, mais sa finalité et son usage. Voilà ce qui, en réalité, déclenche la redevance pour copie privée. Pourquoi la commission a-t-elle réfléchi et pourquoi le rapporteur a-t-il fait cette proposition ? Tout simplement parce que les entreprises françaises et les professionnels croulent sous la paperasse !
Au moins, les choses sont claires : M. le rapporteur a émis un avis de sagesse et ce texte n’est pas examiné en procédure accélérée. Dès lors, si Mme la ministre prend l’engagement d’avoir mis sur la table, d’ici au retour de ce texte au Sénat, un système concret pour simplifier le mécanisme en vigueur, lequel relève du domaine réglementaire, et non législatif, j’estime que nous pouvons voter l’amendement du Gouvernement.
J’attends donc une explication de Mme la ministre à ce sujet.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. J’ai exprimé la position du Gouvernement : nous considérons qu’il faut rétablir le critère de l’usage effectif. Selon quelles modalités faut-il le faire ? Ce gouvernement, comme vous le savez, est attaché à simplifier la vie de nos concitoyens comme celle des entreprises. Tel est en tout cas l’objectif que nous visons. Nous pouvons donc examiner selon quelles modalités cet usage effectif peut être vérifié.
Là encore, nous touchons à un élément important du financement de la création et de la rémunération des artistes et des auteurs. Je crois donc qu’il faut être très vigilant à ce que nous modifions : je suis d’accord pour avancer et essayer de simplifier les dispositifs, mais il nous faut à mon sens rester très fermes sur le critère de l’usage effectif.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Comme l’a souligné M. le rapporteur, il faut approfondir le travail sur ce point : la navette parlementaire est faite aussi pour cela. Et, Dieu merci, ce texte bénéficiera de deux lectures, madame la ministre !
À titre personnel, je voterai l’amendement du Gouvernement, car je sais que les ayants droit sont inquiets. Nous sommes attachés au système de rémunération pour copie privée. En l’absence d’études approfondies, restons-en donc à ce texte. Bien entendu, madame la ministre, j’espère que vous nous fournirez les éléments demandés par M. Retailleau : nous avons besoin de progresser sur ce sujet pour simplifier la vie de nos entreprises.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 326 et 449 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 498, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
et après les mots : « premier alinéa » est insérée la référence : « du I »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le III de l’article L. 311-8 du code de la propriété intellectuelle doit être complété d’une nouvelle référence pour garantir que les procédures de remboursement et d’exonération de la rémunération pour copie privée seront bien applicables aux exportateurs de supports d’enregistrement, ce qui est extrêmement important.
Or en tendant à intégrer cette nouvelle référence au 2° de l’article 7 quater A modifiant l’article L. 311–8, les dispositions de votre amendement, monsieur le rapporteur, ne permettent plus de garantir cet objectif.
Je suis donc défavorable à cet amendement de coordination.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Puisque Mme la ministre pense que la forme de cet amendement est fautive, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 498 est retiré.
Je mets aux voix l’article 7 quater A, modifié.
(L'article 7 quater A est adopté.)
Article 7 quater
L’article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « vivant », sont insérés les mots : « , au développement de l’éducation artistique et culturelle » ;
2° Les deux premières phrases du dernier alinéa sont remplacées par trois phrases ainsi rédigées :
« Les sociétés de perception et de répartition des droits établissent et gèrent une base de données électronique unique recensant le montant et l’utilisation de ces sommes. Cette base est régulièrement mise à jour et mise à disposition gratuitement, sur un service de communication au public en ligne, dans un format ouvert et librement réutilisable. Le commissaire aux comptes vérifie la sincérité et la concordance avec les documents comptables de la société des informations contenues dans cette base de données. » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’aide au développement de l’éducation artistique et culturelle s’entend des concours apportés par des auteurs ou des artistes-interprètes aux actions mentionnées au 4° bis de l’article 2 de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. »
Mme la présidente. L’amendement n° 434 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Après le mot :
recensant
insérer les mots :
, avec le nom de leurs bénéficiaires,
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Dans un souci de transparence, cet amendement vise à rendre publics les noms des bénéficiaires des aides à la création et à la diffusion du spectacle vivant, ainsi que ceux des bénéficiaires des actions de formation des artistes accordées par les sociétés de perception et de répartition des droits.
Plusieurs dispositions ont déjà été prises pour rendre ces aides plus transparentes, notamment par la création d’une base de données qui les recense. Cet amendement tend à compléter le travail déjà effectué.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Madame la sénatrice, je partage votre souci de faire en sorte que les données contenues dans la base concernée soient non seulement accessibles, mais également exploitables et interprétables.
Pour autant, il ne me paraît pas opportun de figer dans la loi les rubriques qui composeront cette future base de données. Ces dernières ont vocation à être précisées ultérieurement par la voie réglementaire : ainsi, l’article R. 321–8 du code de la propriété intellectuelle précise d’ores et déjà que les comptes annuels des sociétés de perception et de répartition des droits, ou SPRD, doivent indiquer la ventilation des montants versés par catégorie d’action artistique et culturelle, ainsi que les organismes ayant bénéficié de concours pendant trois années consécutives.
Les bénéficiaires des aides auront donc bien vocation à être identifiés dans la base de données électronique créée par la présente loi.
Dans ces conditions, je suis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 327, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 4, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, en particulier les sommes utilisées à des actions d’aide à la jeune création
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement vise à restaurer la mention des actions en faveur de la jeune création dans la base de données électronique qui recense les actions culturelles des SPRD.
La légitimité de la rémunération pour copie privée s’apprécie en particulier au regard de son impact sur la création et son renouvellement, la vitalité du tissu artistique français et l’accompagnement des générations nouvelles d’artistes. Il me semble donc justifié que la nouvelle base de données commune qui recensera les sommes utilisées par les SPRD au titre de leur action culturelle fasse bien mention des sommes spécifiquement dédiées à la formation et à l’insertion des jeunes artistes, à l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail et au soutien des nouveaux créateurs, dans la diversité des pratiques et des esthétiques.
L’amendement du Gouvernement vise à rétablir cette marque de soutien à la jeune création.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous avions supprimé en commission cette mention de l’aide à la jeune création. En effet, elle nous paraît constituer un ajout inutile, qui ferait de ce texte une nouvelle loi trop bavarde.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. J’ai peine à comprendre l’articulation entre l’avis défavorable formulé par Mme la ministre sur l’amendement n° 434 rectifié et le présent amendement du Gouvernement.
Mme Laborde défendait une forme d’open data sur la base de données créée à cet article. Cet amendement, quant à lui, vise à valoriser l’action d’aide à la jeune création, qui doit être favorisée.
Nous soutenons cette volonté de rendre transparentes les actions d’aide à la jeune création. Pour autant, je ne puis comprendre pourquoi ce qui vaudrait pour la partie ne vaudrait pas pour le tout. Si je suis prête à voter l’amendement du Gouvernement, je vois là un défaut de logique. Mais peut-être est-ce moi qui manque d’éléments de compréhension, auquel cas je vous serai reconnaissante, madame la ministre, de bien vouloir m’éclairer sur ce point avant le vote.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Vous avez tout à fait raison, madame la sénatrice : ces deux amendements visent en réalité le même objectif, auquel je suis favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je veux expliquer à Mme Bouchoux la différence entre les deux amendements.
L’amendement n° 434 rectifié de Mme Laborde n’était pas du tout le même que celui du Gouvernement. Le premier tend à préciser l’ensemble des actions. Son principe est donc d’ordre général, tandis que l’amendement gouvernemental vise « en particulier » la jeune création. La commission est favorable à l’amendement de Mme Laborde, car son amendement est générique, et défavorable à celui du Gouvernement, qui ajoute un élément partiel.
Mme la présidente. L’amendement n° 499, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer la référence :
4° bis
par la référence :
6°
La parole est à M. le rapporteur.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7 quater, modifié.
(L'article 7 quater est adopté.)
Article 8
Après le chapitre III du titre Ier du livre II du code du cinéma et de l’image animée, il est inséré un chapitre III bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE III BIS
« Transparence des comptes de production et d’exploitation des œuvres cinématographiques de longue durée
« Section 1
« Transparence des comptes de production
« Sous-section 1
« Obligations des producteurs délégués
« Art. L. 213-24. – Tout producteur qui, en sa qualité de producteur délégué, a pris l’initiative et la responsabilité financière, artistique et technique de la réalisation d’une œuvre cinématographique de longue durée, admise au bénéfice des aides financières à la production du Centre national du cinéma et de l’image animée et dont il a garanti la bonne fin, doit, dans les huit mois suivant la date de délivrance du visa d’exploitation cinématographique, établir et transmettre le compte de production de l’œuvre aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles il a conclu un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, ainsi qu’aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle et, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée, avec lesquels il a conclu un contrat leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production.
« Le compte de production est également transmis à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production.
« Le compte de production comprend l’ensemble des dépenses engagées pour la préparation, la réalisation et la post-production de l’œuvre, en arrête le coût définitif et indique les moyens de son financement.
« Art. L. 213-25. – La forme du compte de production, la définition des différentes catégories de dépenses qui le composent, ainsi que la nature des moyens de financement sont déterminées par accord professionnel conclu entre les organisations professionnelles représentatives des producteurs d’œuvres cinématographiques de longue durée, les organismes professionnels d’auteurs et les sociétés de perception et de répartition des droits des auteurs mentionnés au titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle. L’accord peut être rendu obligatoire à l’ensemble des intéressés du secteur d’activité concerné par arrêté de l’autorité compétente de l’État.
« À défaut d’accord professionnel rendu obligatoire dans le délai d’un an à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, la forme du compte de production, la définition des dépenses de préparation, de réalisation et de post-production d’une œuvre, ainsi que la nature des moyens de financement sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 213-26. – Le contrat de coproduction, le contrat de financement, ainsi que les contrats conclus avec les auteurs et avec toute autre personne physique ou morale bénéficiant d’un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production comportent une clause rappelant les obligations résultant de l’article L. 213-24.
« Sous-section 2
« Audit des comptes de production
« Art. L. 213-27. – Le Centre national du cinéma et de l’image animée peut, dans les trois ans suivant la date de délivrance du visa d’exploitation cinématographique, procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte de production mentionné à l’article L. 213-24. Cet audit a pour objet de contrôler la régularité et la sincérité du compte.
« Le producteur délégué transmet au Centre national du cinéma et de l’image animée ou à l’expert indépendant tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l’audit.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet le projet de rapport d’audit au producteur délégué qui présente ses observations. Le rapport d’audit définitif est transmis au producteur délégué, aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles le producteur délégué a conclu un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, ainsi qu’aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle et, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée, avec lesquels il a conclu un contrat leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet également le rapport d’audit définitif à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production.
« Lorsque le rapport d’audit révèle l’existence d’une fausse déclaration pour le bénéfice des aides financières à la production du Centre national du cinéma et de l’image animée, celui-ci peut procéder au retrait de l’aide attribuée après que le bénéficiaire a été mis à même de faire valoir ses observations. En outre, lorsque le rapport d’audit révèle un manquement mentionné à l’article L. 421-1, celui-ci est constaté et sanctionné dans les conditions prévues au livre IV.
« Section 2
« Transparence des comptes d’exploitation
« Sous-section 1
« Obligations des distributeurs
« Art. L. 213-28. – Tout distributeur qui, en sa qualité de cessionnaire ou de mandataire, dispose de droits d’exploitation pour la commercialisation d’une œuvre cinématographique de longue durée admise au bénéfice des aides financières à la production du Centre national du cinéma et de l’image animée doit, dans les six mois suivant la sortie en salles, puis au moins une fois par an pendant la durée d’exécution du contrat conclu avec le producteur délégué, établir et transmettre à ce dernier le compte d’exploitation de cette œuvre.
« Art. L. 213-29. – La forme du compte d’exploitation ainsi que la définition des différentes catégories qui le composent sont déterminées par accord professionnel conclu entre les organisations représentatives des producteurs d’œuvres cinématographiques de longue durée, les organisations professionnelles représentatives des distributeurs de ces œuvres, les organismes professionnels d’auteurs et les sociétés de perception et de répartition des droits des auteurs mentionnées au titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle. L’accord peut être rendu obligatoire à l’ensemble des intéressés du secteur d’activité concerné par arrêté de l’autorité compétente de l’État.
« À défaut d’accord professionnel rendu obligatoire dans le délai d’un an à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, la forme du compte d’exploitation ainsi que la définition des encaissements bruts, des coûts d’exploitation et des frais généraux d’exploitation sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 213-30. – (Non modifié) Le contrat de cession de droits d’exploitation ou le contrat de mandat de commercialisation comporte une clause rappelant les obligations résultant de l’article L. 213-28.
« Art. L. 213-31. – Les obligations résultant de l’article L. 213-28 ne sont applicables ni aux exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques, ni aux éditeurs de services de télévision ni aux éditeurs de services de médias audiovisuels à la demande au titre des acquisitions de droits de diffusion ou de mise à disposition du public sur les services qu’ils éditent réalisées en contrepartie d’un prix forfaitaire et définitif.
« Sous-section 2
« Obligations des producteurs délégués
« Art. L. 213-32. – Le producteur délégué transmet le compte d’exploitation qui lui est remis en application de la sous-section 1 aux autres coproducteurs, aux entreprises auxquelles il est lié par un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du même code, ainsi que, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée. Pour les auteurs, cette transmission tient lieu de la fourniture de l’état des recettes prévue à l’article L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle.
« Le compte d’exploitation est également transmis à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre.
« Art. L. 213-33. – Lorsque, pour un ou plusieurs des modes d’exploitation, le producteur délégué exploite directement une œuvre cinématographique de longue durée, il établit le compte d’exploitation correspondant conformément à la sous-section 1.
« Dans les délais prévus à l’article L. 213-28, le producteur délégué transmet le compte d’exploitation aux autres coproducteurs, aux entreprises auxquelles il est lié par un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, ainsi que, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée. Pour les auteurs, cette transmission tient lieu de la fourniture de l’état des recettes prévue à l’article L. 132-28 du même code.
« Le compte d’exploitation est également transmis à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre.
« Art. L. 213-34. – (Non modifié) Lorsqu’un contrat de cession de droits de diffusion d’une œuvre cinématographique à un éditeur de services de télévision prévoit une rémunération complémentaire en fonction des résultats d’exploitation de cette œuvre en salles de spectacles cinématographiques, le producteur délégué joint à la transmission du compte d’exploitation prévue aux articles L. 213-32 et L. 213-33 les informations relatives au versement de cette rémunération.
« Sous-section 3
« Audit des comptes d’exploitation
« Art. L. 213-35. – Le Centre national du cinéma et de l’image animée peut procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte d’exploitation. Cet audit a pour objet de contrôler la régularité et la sincérité du compte.
« Le distributeur ou, le cas échéant, le producteur délégué transmet au Centre national du cinéma et de l’image animée ou à l’expert indépendant tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l’audit.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet le projet de rapport d’audit au distributeur ou au producteur délégué dans le cas prévu à l’article L. 213-33, qui présente ses observations. Le rapport d’audit définitif est transmis au distributeur, au producteur délégué et aux autres coproducteurs.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée porte également à la connaissance de toute personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat conférant à cette personne un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre les informations relatives à cet intéressement.
« Lorsque le rapport d’audit révèle un manquement mentionné à l’article L. 421-1, celui-ci est constaté et sanctionné dans les conditions prévues par les dispositions du livre IV.
« Art. L. 213-36. – Lorsqu’un accord professionnel rendu obligatoire sur le fondement de l’article L. 132-25 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction antérieure à la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, ou de l’article L. 132-25-1 du même code prévoit notamment la définition du coût de production d’une œuvre cinématographique de longue durée, des modalités de son amortissement et des recettes nettes, le Centre national du cinéma et de l’image animée peut procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte d’exploitation établi par le producteur délégué en application de cet accord.
« Le producteur délégué transmet au Centre national du cinéma et de l’image animée ou à l’expert indépendant tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l’audit.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet le projet de rapport d’audit au producteur délégué qui présente ses observations. Le rapport d’audit définitif est transmis au producteur délégué, ainsi qu’aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle.
« Art. L. 213-37. – (Non modifié) Un décret fixe les conditions d’application du présent chapitre. »
Mme la présidente. L’amendement n° 435 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Jouve, MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mme Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
Après les mots :
code de la propriété intellectuelle
insérer les mots :
, aux artistes-interprètes liés contractuellement à l’œuvre
II. – Alinéa 18, seconde phrase
Après les mots :
code de la propriété intellectuelle
insérer les mots :
, aux artistes-interprètes liés contractuellement à l’œuvre
III. – Alinéa 26, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et les organisations professionnelles d’artistes-interprètes
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement vise à ce que les artistes-interprètes soient destinataires du compte de production de l’œuvre cinématographique de longue durée, du rapport d’audit et du compte de production, et à ce qu’ils prennent part à l’accord professionnel sur la forme du compte d’exploitation.
En effet, les droits des artistes-interprètes qui proviennent de l’exploitation des œuvres cinématographiques de longue durée sont calculés sur les recettes nettes d’exploitation. Il semble donc logique, dans un souci de transparence, qu’ils soient destinataires des documents les concernant.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à élargir aux artistes-interprètes liés contractuellement à une œuvre cinématographique la possibilité d’avoir accès aux comptes de production et d’exploitation relatifs à ladite œuvre.
Son objectif est intéressant et légitime, mais sa rédaction insuffisamment précise. Il lui sera préféré dans quelques instants l’amendement n° 239 de M. Abate et de ses collègues.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Françoise Laborde. Je retire mon amendement, au profit de l'amendement n° 239, madame la présidente !
Mme la présidente. L’amendement n° 435 rectifié est retiré.
L’amendement n° 239, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 9
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Lorsqu’il existe une convention collective ou un accord spécifique rendu obligatoire sur le fondement de l’article L. 212-8 du code de la propriété intellectuelle prévoyant au profit des artistes-interprètes une rémunération conditionnée à l’amortissement du coût de production de l’œuvre, le producteur délégué transmet le compte de production à ces derniers ou à une société de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes mentionnée au titre II du livre III de la première partie du même code désignée à cet effet. Lorsqu’un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre est déterminé en fonction de l’amortissement de certains éléments du coût de production, le producteur délégué transmet ces éléments, ainsi que le coût de production, au bénéficiaire de l’intéressement.
II. – Alinéa 19
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Lorsqu’il existe une convention collective ou un accord spécifique rendu obligatoire sur le fondement de l’article L. 212-8 du code de la propriété intellectuelle prévoyant au profit des artistes-interprètes une rémunération conditionnée à l’amortissement du coût de production de l’œuvre, le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet le rapport d’audit définitif à ces derniers ou à une société de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes mentionnée au titre II du livre III de la première partie du même code désignée à cet effet. Lorsqu’un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre est déterminé en fonction de l’amortissement de certains éléments du coût de production, le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet les informations relatives à ces éléments et au coût de production au bénéficiaire de l’intéressement.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à poursuivre l’amélioration de l’article 8, comme l’ont proposé nos collègues socialistes en commission. Ceux-ci ont souhaité élargir les destinataires du compte de production et du rapport d’audit du CNC, ce dont on peut se féliciter.
Cependant, la rédaction générique des alinéas 9 et 19 méconnaît certains cas spécifiques. À titre d’exemple, je pourrais citer le cas de certains techniciens du cinéma qui voient leur rémunération débloquée à 12 % de l’amortissement du coût de production. La rédaction actuelle de ces alinéas aurait pour effet de créer un décalage entre le déblocage des salaires et la remise des rapports de transparence.
Notre amendement vise à remédier à ce problème.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Comme je le disais précédemment, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Il est tout à fait légitime de prendre en compte la situation spécifique des artistes-interprètes et des techniciens au regard des accords collectifs et des conventions collectives du secteur.
Tout d’abord, pour ce qui est des artistes-interprètes, l’ADAMI, qui est chargée de percevoir pour leur compte une rémunération après amortissement du coût de production, pourra être directement destinataire des comptes de production et, le cas échéant, du rapport d’audit.
Ensuite, s’agissant des techniciens, l’amendement tend à assurer une meilleure cohérence avec les stipulations de l’annexe III de la Convention collective nationale de la production cinématographique du 19 janvier 2012.
Je suis donc favorable à cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 500, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 20, seconde phrase
Après la référence :
L. 421-1
insérer les mots :
du présent code
La parole est à M. le rapporteur.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
Après le 6° bis de l’article L. 421-1 du code du cinéma et de l’image animée, sont insérés des 6° ter et 6° quater ainsi rédigés :
« 6° ter Des dispositions de l’article L. 213-24 relatives à l’établissement et à la transmission du compte de production, des dispositions des articles L. 213-28 et L. 213-32 à L. 213-34 relatives à l’établissement et à la transmission du compte d’exploitation, ainsi que des dispositions des articles L. 213-27, L. 213-35 et L. 213-36 relatives à la transmission des documents et pièces utiles à la réalisation des audits ;
« 6° quater Des stipulations d’un accord professionnel rendu obligatoire dans les conditions prévues aux articles L. 213-25 et L. 213-29 ou des dispositions des décrets en Conseil d’État mentionnés aux mêmes articles ainsi que des stipulations d’un accord professionnel rendu obligatoire mentionné à l’article L. 213-36 ; ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 9
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je souhaite faire un point sur les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 9 déposés par David Assouline.
Ces amendements importants, qui méritent que l’on s’y arrête un instant avant de les examiner, visent à confier au Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, une nouvelle mission de contrôle de l’information dans les médias audiovisuels. Or ces dispositions reprennent pour partie celles d’une proposition de loi déposée par M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, dont sont donc saisis nos collègues députés.
Concernant un sujet aussi important que la liberté de l’information, qui est sans rapport avec la création, même dans le domaine audiovisuel, il est essentiel que notre commission de la culture puisse mener un travail de fond à l’occasion de l’examen de la proposition de loi précitée.
À ce stade, il convient de mentionner la réaction du Syndicat national des journalistes, le SNJ, relative à ces dispositions : « Le SNJ rappelle que le CSA est une instance administrative composée de personnalités nommées par le pouvoir politique. Elle a, de par la loi, des responsabilités de régulation des entreprises audiovisuelles. Le CSA n’a aucune responsabilité ni aucune légitimité en matière de contrôle de l’information et des journalistes. Il ne doit pas en avoir ! ».
Vous le voyez, mes chers collègues, ces dispositions sont loin pour l’instant de faire l’unanimité et mériteront de notre part une étude approfondie en temps voulu ; c’est pour éclairer ce qui va suivre que je fais ce préambule.
Je propose donc à notre collègue de bien vouloir retirer l’amendement n° 92 rectifié et les amendements suivants portant articles additionnels après l’article 9, car je souhaite revenir en commission sur la question qu’ils tendent à soulever. L’indépendance des médias n’a rien à faire dans ce texte sur la liberté de création, et je propose que l’on tienne une séance de travail au sein de notre commission pour préparer la proposition de loi qui va nous arriver de l’Assemblée nationale.
Je formule donc globalement et par avance, sur l’ensemble de ces amendements, un avis défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 92 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article 3-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel veille à l’indépendance de l’information, des programmes et des rédactions. Il veille à ce que les intérêts économiques des éditeurs de services de communication audiovisuelle, de leurs actionnaires et de leurs annonceurs ne portent pas atteinte au respect de cette indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes. Il peut adresser des recommandations et des mises en demeure aux éditeurs de service qui ne respectent pas ces principes. »
La parole est à M. David Assouline.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Pour économiser du temps !
M. David Assouline. Il ne s’agit pas d’économiser du temps, car cela fait de longues années que l’on travaille sur ces questions ; elles ne viennent pas d’arriver !
Nous avons souvent débattu de l’indépendance des médias, sur lequel nous avons fait des rapports et des propositions. Nous attendions une loi sur l’audiovisuel au cours de ce quinquennat. Il existe en effet une loi sur l’indépendance de l’audiovisuel public, mais nous savions qu’il fallait évoquer plus globalement le secteur de l’audiovisuel.
Est arrivé ce projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. Je me doutais, et je l’ai dit à tous, que si ce texte était déposé sans qu’on examine avant une loi sur l’audiovisuel, alors même qu’une gigantesque révolution a bouleversé l’ensemble du paysage audiovisuel français depuis que nous avons légiféré pour la dernière fois sur ce sujet, nous nous retrouverions à essayer d’introduire ce sujet dans les textes touchant de près ou de loin à l’audiovisuel, à l’instar du présent projet de loi.
Pour moi, si une proposition de loi relative à l’audiovisuel doit arriver, il n’y a pas de problème sur le fond. J’y souscris totalement, puisque je contribue à ce travail. J’ai d’ailleurs proposé à plusieurs reprises, dans cet hémicycle, de le mener.
Vous me dites, monsieur le rapporteur, qu’il ne faut pas traiter ce problème à l’occasion de l’examen du présent texte. Pourtant, ce projet de loi comprend des dispositions relatives aux radios, au cinéma, au CNC. Vous y avez même ajouté, monsieur Leleux, l’ensemble des rapports entre producteurs et diffuseurs de télévision, ce qui n’est pas un mince sujet ! Vous avez même proposé de consacrer un chapitre du projet de loi à l’audiovisuel.
Mme Françoise Férat, rapporteur. Ce n’est pas M. Leleux, c’est toute la commission !
M. David Assouline. Voyant cela, j’ai fait des propositions concernant cette question qui est, selon moi, importante.
Chers collègues, n’avez-vous pas vu que l’indépendance, avec tout ce qui va avec – affaires, rumeurs, faux et vrais procès – est un sujet majeur, qui touche à l’information, mais aussi à la création, et qui tient au paysage audiovisuel français, lequel est tout à fait particulier ?
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. David Assouline. Dans ce cas, je poursuivrai mon intervention plus tard.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Je m’exprimerai globalement, moi aussi, sur l'amendement n° 92 rectifié et les amendements suivants, qui tendent à insérer des articles additionnels après l’article 9 et qui ont tous pour objet de renforcer les dispositions de loi de 1986 sur l’audiovisuel en matière d’honnêteté de l’information, de pluralisme et d’indépendance des rédactions.
Tout d’abord, je voudrais remercier M. David Assouline et l’ensemble du groupe socialiste et républicain de cette initiative. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Vous soulevez là, monsieur le sénateur, un sujet d’une réelle importance, et chacun connaît votre expertise et votre implication sur ces questions.
J’ai eu l’occasion, il y a quelques semaines, de rappeler la vigilance que je porte au respect du pluralisme et à l’indépendance des rédactions, et je sais que l’ensemble des formations politiques ici présentes partage le même souci.
Toutefois, et je me suis déjà exprimée en ce sens à l’Assemblée nationale, je ne suis pas favorable à l’introduction, dans le présent texte, de modifications de la loi de 1986 sur l’audiovisuel. Une exception a certes été faite pour les quotas applicables aux radios, mais il s’agissait d’une disposition de ladite loi qui avait moins pour objet la régulation du secteur que la promotion de la diversité et de la création artistique, qui est au cœur de ce projet de loi.
Je propose en outre, comme vous l’avez suggéré, monsieur le sénateur, que nous débattions de nouveau de cette question très rapidement. Le groupe socialiste a en effet déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias, qui reprend en grande partie les dispositions des amendements nos 92 rectifié, 99 rectifié et 317.
Cette proposition de loi formule des avancées majeures, et je me réjouis de la cohérence des propositions qu’elle contient avec les vôtres, monsieur Assouline.
Il s’agit, tout à la fois, de renforcer la mission générale du CSA, de veiller à l’indépendance de l’information, des programmes et des rédactions, de donner au CSA les moyens de cette mission, par exemple au sein des conventions qu’il conclut avec les éditeurs de services, de tenir compte du respect de ces principes au niveau de la délivrance des autorisations ou de leur reconduction, de généraliser la mise en place de comités de déontologie au sein des chaînes. Nous aurons, sur l’ensemble de ces sujets, un débat complet dans quelques semaines.
L’importance de cette question mérite, je le crois, qu’une proposition de loi lui soit entièrement consacrée. Je serai donc heureuse que, au bénéfice de ces discussions à venir, vous acceptiez de retirer ces amendements, dans l’attente d’un débat qui sera nécessairement ample.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Si l’amendement n° 92 rectifié n’est pas retiré, nous voterons en sa faveur, tout comme pour les suivants. En effet, le sujet qui est soulevé nous paraît d’importance. Notre collègue Patrick Abate nous a de nouveau alertés, dans son rapport budgétaire relatif à la presse, sur la question de la concentration des médias et les problèmes d’indépendance qui étaient désormais posés.
Par ailleurs, au-delà de ce phénomène de concentration qui existe depuis plusieurs années, on sait que, dans le secteur audiovisuel et de la presse, de nombreux médias ont changé de mains ces derniers temps. On assiste à une accélération de la mainmise des intérêts financiers sur des secteurs entiers des médias, et singulièrement de l’audiovisuel.
Les amendements qui sont présentés nous paraissent tout à fait intéressants. On nous promet une discussion à venir ; nous ne la bouderons évidemment pas. Toutefois, pour le moment, puisque des amendements nous sont enfin proposés sur ce sujet et qu’ils vont dans le bon sens, je le répète, nous les voterons s’ils sont maintenus. Nous souhaitons nous aussi une loi d’ensemble sur ces questions, et le plus rapidement possible.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.
Mme Catherine Tasca. Je souscris totalement aux préoccupations exprimées par notre collègue David Assouline en ce qui concerne l’évolution de l’information dans notre pays.
Néanmoins, ce projet de loi est déjà un patchwork dont il n’est pas toujours simple de voir les grandes lignes. En tant que législateurs, nous devons être attentifs, car il est toujours possible de raccrocher des sujets à un texte de loi. Il est vrai que ce projet de loi comprend des mesures concernant l’audiovisuel, mais, dans la stricte mesure où elles concernent la création, la production. Il faut, me semble-t-il, s’en tenir à cela.
Par ailleurs, je note, et c’est une excellente nouvelle, que nous aurons prochainement à débattre plus globalement du problème du CSA, de ses compétences et de l’évolution de l’information. Je le répète, ce serait selon moi une erreur d’inclure ces questions dans le texte dont nous discutons actuellement. J’espère donc que notre collègue acceptera de retirer ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je voudrais apporter une précision qui me paraît importante pour éviter les procès d’intention. Cher David Assouline, je n’ai absolument pas dit, et je tiens à faire la nuance, que vos amendements n’étaient pas intéressants. Ce n'est d’ailleurs pas pour cette raison que j’ai émis un avis défavorable, que ce soit bien clair ! C'est parce que j’estime que le contenu de ces amendements ne doit pas figurer dans ce texte.
Je partage l’avis de Mme la ministre, qui souhaite que ce débat ait lieu quand la proposition de loi de Patrick Bloche sera examinée par notre assemblée.
Mme la présidente. Monsieur Assouline, l'amendement n° 92 rectifié est-il maintenu ?
M. David Assouline. Si l’on me demande de retirer mes amendements parce que tout le monde est pressé… (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Chers collègues, laissez-moi parler ! (Exclamations ironiques sur les mêmes travées.)
Je tiens tout d’abord à expliquer leur contenu. Mon objectif était de provoquer un débat ici pour que je voie, sur le fond, qui est pour et qui est contre. Nous voterons sur toute cette série d’amendements sans que j’intervienne à chaque fois pour les présenter un par un (Marques de soulagement sur les travées de l'UDI-UC.), mais je tiens à rappeler de quoi il s’agit.
Je ne retirerai pas mes amendements, parce que je pense que ce sujet, qui a souvent été débattu au Sénat, mérite d’être abordé au cours de nos longues discussions sur ce texte. En effet, il concerne – peut-être indirectement, mais parfois directement – la création. En effet, quand on fait de l’information, on crée aussi. Si l’on prépare un documentaire, par exemple, on touche à des domaines qui peuvent être liés au problème que je pose ici.
Ce problème, je le définirai ainsi : nous avons un paysage audiovisuel particulier. Nous allons faire avec ! Les plus grands médias français sont, pour l’essentiel, détenus par de grands groupes dont le métier n’est ni l’audiovisuel ni la création. Bouygues, c'est le BTP ; Vivendi, c’est autre chose. Cela peut être les câbles ou les télécoms. En Allemagne et en Angleterre, la situation n’est pas la même : il y a de grands groupes de médias.
Se posent donc deux problèmes : tout d’abord, la concentration ; ensuite, le fait que ces groupes peuvent vivre de la commande publique.
Un groupe qui fait de l’information, de la recherche et du documentaire peut, à un moment donné, considérer que les activités de ses actionnaires sont remises en cause par l’information. On ne peut pas changer cela, ce n’est plus possible ! Ces groupes sont là, mais il faut créer des règles qui permettent une indépendance de l’information et, j’irai même plus loin, de la création, car celle-ci peut être menacée par cette situation.
J’ai proposé une série d’amendements dont les dispositions vont toutes dans ce sens. Au travers du premier, je ne dis pas que le CSA n’est pas l’instance qui va juger le travail des journalistes. Ce n’est pas le sujet ! Au contraire, il s’agit de garantir qu’il n’y ait pas d’intervention intempestive dans le travail des journalistes. C’est autre chose. On peut avoir des discussions avec le SNJ, qui voit peut-être les choses autrement, mais le Sénat discutera de façon plus approfondie de ce sujet majeur si une proposition de loi arrive.
Or on ne me dit pas quand ce texte, que nous attendons depuis longtemps, doit venir en discussion. Il aurait pu venir du Gouvernement, mais il vient de l’Assemblée nationale. Dans quelle niche ? Je ne sais pas.
Ce que je sais, en revanche, c'est que ce sujet devra être abordé avant l’été prochain, parce que des problèmes vont se poser régulièrement et qu’il vaut mieux que la loi tranche au lieu d’en arriver à des scandales, des rumeurs ou des procès, vrais ou faux.
Je maintiens donc mon amendement n° 92 rectifié, madame la présidente. Par ailleurs, je considère que mes amendements nos 99 rectifié, 93 rectifié, 94 rectifié, 95 rectifié, 97 rectifié, 98 rectifié, 96 rectifié et 317 sont défendus.
Mme la présidente. L'amendement n° 99 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article 18 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport fait état du respect, par les éditeurs de services de communication audiovisuelle, des principes prévus à l’article 3-1 et, le cas échéant, des mesures prises par le conseil pour faire cesser les manquements constatés. »
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 93 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au deuxième alinéa de l’article 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, après les mots : « Dans le respect de l’honnêteté et du pluralisme de l’information et des programmes », sont insérés les mots : « , de l’indépendance éditoriale et du pluralisme des opinions des rédactions ».
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 94 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 1° de l’article 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les engagements permettant de garantir la diversité dans l’exercice du métier de journaliste et l’indépendance éditoriale du service, conformément à l’article 3-1 ; ».
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 95 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 6° de l’article 28 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par les mots : « , notamment par des engagements permettant de garantir l’indépendance éditoriale des sociétés et les principes mentionnés au troisième alinéa de l’article 3-1 ».
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 97 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 3° du I de l’article 28-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …°Si la reconduction de l’autorisation hors appel aux candidatures est de nature à porter atteinte à l’indépendance éditoriale et au pluralisme des opinions au sein des rédactions, prévus à l’article 3-1 ; ».
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 98 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 6° de l’article 29 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Pour le renouvellement d’autorisation d’un service préalablement autorisé, du respect des principes d’indépendance éditoriale et de respect du pluralisme des opinions au sein des rédactions, prévus à l’article 3-1. »
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 96 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 1° de l’article 33 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les engagements permettant de garantir la diversité dans l’exercice du métier de journaliste et l’indépendance éditoriale du service, conformément à l’article 3-1 ; ».
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° 317, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 41-4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un article 41-… ainsi rédigé :
« Art. 41-… – Tout éditeur de services de communication audiovisuelle autorisé conformément aux articles 28 et 29 ou qui a conclu une convention prévue à l’article 33-1 est tenu de constituer un comité de déontologie qui veille au respect du pluralisme et de l’indépendance au sein de ses rédactions et à ce que les émissions d’information que le service diffuse soient réalisées dans des conditions qui garantissent l’indépendance de l’information à l’égard des intérêts économiques de ses actionnaires.
« Le comité de déontologie est composé de représentants des organisations représentatives et de personnalités qualifiées ne détenant aucun intérêt dans la société éditrice de services ou dans l’une des sociétés dans lesquelles la société éditrice détient des parts de capital ou des droits de vote.
« Le comité de déontologie adresse un rapport annuel au Conseil supérieur de l’audiovisuel. Ce rapport est transmis pour avis aux présidents des commissions en charge de la culture et de l’audiovisuel du Sénat et de l’Assemblée nationale. »
Cet amendement a été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9 bis A (nouveau)
Le chapitre IV de la loi n° 87-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un article 43-2 ainsi rédigé :
« Art. 43-2. - Le distributeur de programmes audiovisuels est la personne physique ou morale, à laquelle un ou plusieurs détenteurs des droits desdits programmes confient le mandat d’en assurer la commercialisation. »
Mme la présidente. L'amendement n° 100 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer la référence :
87-1067
par la référence :
86-1067
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement rédactionnel tend simplement à corriger la référence à la loi relative à la liberté de communication.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 9 bis A, modifié.
(L'article 9 bis A est adopté.)
Article 9 bis
(Non modifié)
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article L. 132-25 est supprimé ;
2° Après l’article L. 132-25, il est inséré un article L. 132-25-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 132-25-1. – Les accords relatifs à la rémunération des auteurs, ainsi que ceux traitant des pratiques contractuelles ou des usages professionnels entre auteurs et producteurs, conclus entre les organismes professionnels d’auteurs ou les sociétés de perception et de répartition des droits mentionnées au titre II du livre III de la présente partie, les organisations professionnelles représentatives des producteurs et, le cas échéant, les organisations représentatives d’autres secteurs d’activité peuvent être étendus à l’ensemble des intéressés par arrêté du ministre chargé de la culture. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 9 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 242, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de mettre en place un fonds de soutien des arts visuels financé par un pourcentage du produit des droits d’entrée et de visites-conférences dans les monuments, sites ou collection des musées de France tels que définis par l’article L. 442-1 du code du patrimoine, et des recettes perçues à l’occasion d’exposition permanentes ou temporaires et de manifestations artistiques ou culturelles.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Par parallélisme avec notre amendement précédent visant la création d’un fonds de soutien au cinéma, celui-ci tend à demander un rapport sur l’opportunité de créer un fonds de soutien des arts visuels.
Le fonds de soutien des arts visuels pourrait être abondé par un pourcentage du produit des droits d’entrée et de visites-conférences dans les monuments, sites ou collection des musées de France, tels qu’ils sont définis par l’article L. 442-1 du code du patrimoine, et des recettes perçues à l’occasion d’expositions, de manifestations artistiques ou culturelles. Cette solution permettrait d’intégrer une dimension intergénérationnelle dans le fonds de soutien, les artistes reconnus, exposés et renommés finançant un fonds pour des artistes en devenir.
La création de ce fonds serait un message particulièrement positif envoyé aux artistes. En effet, si le secteur des arts visuels arrive en tête de la création en termes d’emplois et de chiffre d’affaires, plus de la moitié des artistes visuels vivent sous le seuil de pauvreté. Des études de 2013 et 2015 montrent notamment la profonde inégalité entre les artistes, les 10 % les plus riches se partageant près de 50 % de l’ensemble des revenus distribués aux artistes visuels.
C’est dans ce cadre qu’il nous paraît nécessaire, à la fois, d’assurer un niveau de vie décent à tous les artistes et de réduire les inégalités entre ces derniers. L’instauration d’un fonds de soutien pourrait grandement y contribuer.
Je le répète, nous débattons tout de même d’un texte consacrant la liberté de création. Or, mes chers collègues, la première des exigences à atteindre en matière de création artistique n’est-elle pas de permettre aux artistes de pratiquer leur activité dans de bonnes conditions ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission est bien entendu attachée de longue date au soutien aux arts visuels. Ce dernier se traduit notamment par l’existence du groupe d’études sur la photographie et autres arts visuels, rattaché à notre commission et présidé par notre collègue Corinne Bouchoux.
L’idée qui sous-tend l’amendement est une véritable préoccupation pour nombre d’entre nous. Le sujet mérite donc d’être traité. Pour autant, même s’il ne faut pas en faire une doctrine ou une lubie, comme l’a fait remarquer un orateur hier, nous ne sommes pas favorables aux demandes de rapport. Car il s’agit bien d’une énième demande. J’ai arrêté de les compter, mais il doit y avoir dans ce texte treize ou quatorze demandes de ce type…
Sans en faire un dogme, je maintiens donc pour l’instant notre doctrine et j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Je voudrais aller dans le sens de nos collègues communistes en ce qui concerne la situation des arts visuels. Les dispositions de cet amendement présentent au moins l’intérêt de nous rappeler que la précarité chez les acteurs des arts visuels est de plus en plus importante et qu’il faut en tenir compte. Il est vrai, monsieur le rapporteur, que nous avons eu une discussion sur les rapports, qui peuvent parfois être inopportuns ou insuffisamment pertinents.
Pour ma part, j’estime que nous pourrions soutenir cette proposition, d’autant que notre groupe avait déposé un amendement visant à la mise en place d’un Conseil national des arts visuels, lequel amendement avait été considéré comme irrecevable au titre de l’article 41. Ce conseil est une attente très forte du secteur. À l’image du Conseil national des professions du spectacle, il aurait pu être un cadre de négociations important pour réfléchir à leurs droits et à leur statut.
Madame la ministre, je profite de cette discussion pour vous demander de mettre en place par voie réglementaire, puisqu’un décret suffirait, ce Conseil national des arts visuels, qui, je le répète, est très demandé par le secteur.
Nous voterons donc en faveur de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Pour aller dans le sens de ce qui a été dit, nous souscrivons pleinement à cet amendement, dont les dispositions soulèvent une véritable question.
Madame la ministre, vous voyez que, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, nous réclamons tous…
M. André Reichardt. Ou presque tous !
Mme Corinne Bouchoux. … un geste fort en faveur des arts visuels et des photographes, qui ne sont peut-être pas les plus remuants, mais qui apportent énormément à notre culture.
Nous comptons vraiment sur vous. Même si nous ne sommes pas non plus, par principe, fanatiques des rapports, celui-là constituerait un geste important vis-à-vis de tous ces artistes.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 242.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 9 ter (nouveau)
L’article L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute cession du bénéfice d’un contrat de production audiovisuelle à un tiers ne peut intervenir qu’après une information préalable des coauteurs par le cédant dans un délai minimal d’un mois avant la date effective de la cession. Tout contrat de production audiovisuelle fait mention de l’obligation prévue au présent alinéa. » – (Adopté.)
Article 9 quater (nouveau)
Le code du cinéma et de l’image animée est ainsi modifié :
1° Le livre II est complété par un titre V ainsi rédigé :
« TITRE V
« EXERCICE DES PROFESSIONS ET ACTIVITÉS DE LA PRODUCTION ET DE LA DISTRIBUTION AUDIOVISUELLE
« CHAPITRE UNIQUE
« Transparence des comptes de production et d’exploitation des œuvres audiovisuelles
« Section 1
« Transparence des comptes de production
« Sous-section 1
« Obligations des producteurs délégués
« Art. L. 251-1. – Tout producteur qui, en sa qualité de producteur délégué, a pris l’initiative et la responsabilité financière, artistique et technique de la réalisation d’une œuvre audiovisuelle appartenant aux genres de la fiction, de l’animation, du documentaire de création ou de l’adaptation audiovisuelle de spectacle vivant, admise au bénéfice des aides financières à la production du Centre national du cinéma et de l’image animée et dont il a garanti la bonne fin, doit, dans les six mois suivant la date d’achèvement de l’œuvre audiovisuelle, établir et transmettre le compte de production de l’œuvre aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles il a conclu un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, aux éditeurs de services de télévision qui ont contribué au financement de la production de l’œuvre, ainsi qu’aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle et, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée, avec lesquels il a conclu un contrat leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production.
« Le compte de production est également transmis à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production.
« Le compte de production comprend l’ensemble des dépenses engagées pour la préparation, la réalisation et la post-production de l’œuvre, en arrête le coût définitif et indique les moyens de son financement.
« Art. L. 251-2. – La forme du compte de production, la définition des différentes catégories de dépenses, la nature des moyens de financement, ainsi que les modalités d’amortissement du coût de production sont déterminées par accord professionnel conclu entre les organisations professionnelles représentatives des producteurs d’œuvres audiovisuelles, les organisations professionnelles représentatives des distributeurs de ces œuvres, les organisations professionnelles représentatives des éditeurs de services de télévision ou un ensemble d’éditeurs de services de télévision représentatifs, les organismes professionnels d’auteurs et les sociétés de perception et de répartition des droits des auteurs mentionnées au titre II du livre III du code de la propriété intellectuelle. L’accord peut être rendu obligatoire à l’ensemble des intéressés du secteur d’activité concerné par arrêté de l’autorité compétente de l’État.
« À défaut d’accord professionnel rendu obligatoire dans le délai d’un an à compter de la publication de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, la forme du compte de production, la définition des dépenses de préparation, de réalisation et de post-production d’une œuvre, la nature des moyens de financement, ainsi que les modalités d’amortissement du coût de production sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 251-3. – Le contrat de coproduction, le contrat de financement, ainsi que les contrats conclus avec les auteurs et avec toute autre personne physique ou morale bénéficiant d’un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production, comportent une clause rappelant les obligations résultant de l’article L. 251-1.
« Sous-section 2
« Audit des comptes de production
« Art. L. 251-4. – Le Centre national du cinéma et de l’image animée peut, dans les trois ans suivant la date d’achèvement de l’œuvre audiovisuelle, procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte de production mentionné à l’article L. 251-1. Cet audit a pour objet de contrôler la régularité et la sincérité du compte.
« Le producteur délégué transmet au Centre national du cinéma et de l’image animée ou à l’expert indépendant tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l’audit.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet le projet de rapport d’audit au producteur délégué qui présente ses observations. Le rapport d’audit définitif est transmis au producteur délégué, aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles le producteur délégué a conclu un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, aux éditeurs de services de télévision qui ont contribué au financement de la production de l’œuvre, ainsi qu’aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle et, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée, avec lesquels il a conclu un contrat leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet également le rapport d’audit définitif à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre, conditionné à l’amortissement du coût de production.
« Lorsque le rapport d’audit révèle l’existence d’une fausse déclaration pour le bénéfice des aides financières à la production du Centre national du cinéma et de l’image animée, celui-ci peut procéder au retrait de l’aide attribuée après que le bénéficiaire a été mis à même de faire valoir ses observations. En outre, lorsque le rapport d’audit révèle un manquement mentionné à l’article L. 421-1 du présent code, celui-ci est constaté et sanctionné dans les conditions prévues au livre IV.
« Section 2
« Transparence des comptes d’exploitation
« Sous-section 1
« Obligations des distributeurs
« Art. L. 251-5. – Tout distributeur qui, en sa qualité de cessionnaire ou de mandataire, dispose de droits d’exploitation pour la commercialisation d’une œuvre audiovisuelle appartenant aux genres de la fiction, de l’animation, du documentaire de création ou de l’adaptation audiovisuelle de spectacle vivant, admise au bénéfice des aides financières à la production du Centre national du cinéma et de l’image animée, doit, dans les trois mois à compter du 1er janvier de l’année qui suit celle de la première diffusion de l’œuvre par un éditeur de services de télévision puis au moins une fois par an pendant la durée d’exécution du contrat conclu avec le producteur délégué, établir et transmettre à ce dernier le compte d’exploitation de cette œuvre.
« Art. L. 251-6. – La forme du compte d’exploitation, la définition des différentes catégories qui le composent, ainsi que les conditions dans lesquelles est négociée la commission opposable sont déterminées par accord professionnel conclu entre les organisations représentatives des producteurs d’œuvres audiovisuelles, les organisations professionnelles représentatives des distributeurs de ces œuvres, les organisations professionnelles représentatives des éditeurs de services de télévision ou un ensemble d’éditeurs de services de télévision représentatifs, les organismes professionnels d’auteurs et les sociétés de perception et de répartition des droits des auteurs mentionnées au titre II du livre III du code de la propriété intellectuelle. L’accord peut être rendu obligatoire à l’ensemble des intéressés du secteur d’activité concerné par arrêté de l’autorité compétente de l’État.
« À défaut d’accord professionnel rendu obligatoire dans le délai d’un an à compter de la publication de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, la forme du compte d’exploitation, la définition des encaissements bruts et des coûts d’exploitation, ainsi que les conditions dans lesquelles est négociée la commission opposable sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 251-7. – Le contrat de cession de droits d’exploitation ou le contrat de mandat de commercialisation comporte une clause rappelant les obligations résultant de l’article L. 251-5.
« Art. L. 251-8. – Les obligations résultant de l’article L. 251-5 ne sont pas applicables aux éditeurs de services de télévision et aux éditeurs de services de médias audiovisuels à la demande au titre des acquisitions de droits de diffusion ou de mise à disposition du public sur les services qu’ils éditent réalisées en contrepartie d’un prix forfaitaire et définitif.
« Sous-section 2
« Obligations des producteurs délégués
« Art. L. 251-9. – Le producteur délégué transmet le compte d’exploitation qui lui est remis en application des dispositions de la sous-section 1 aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles il est lié par un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, ainsi que, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée. Pour les auteurs, cette transmission tient lieu de la fourniture de l’état des recettes prévue à l’article L. 132-28 du même code.
« Le compte d’exploitation est également transmis à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre.
« Art. L. 251-10. – Lorsque, pour un ou plusieurs des modes d’exploitation, le producteur délégué exploite directement une œuvre audiovisuelle, il établit le compte d’exploitation correspondant conformément aux dispositions de la sous-section 1.
« Dans les délais prévus à l’article L. 251-5, le producteur délégué transmet le compte d’exploitation aux autres coproducteurs, aux entreprises avec lesquelles il est lié par un contrat de financement leur conférant un intéressement aux recettes d’exploitation, aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du code de la propriété intellectuelle, ainsi que, le cas échéant, aux éditeurs cessionnaires des droits d’adaptation audiovisuelle d’une œuvre imprimée. Pour les auteurs, cette transmission tient lieu de la fourniture de l’état des recettes prévue à l’article L. 132-28 du même code.
« Le compte d’exploitation est également transmis à toute autre personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat lui conférant un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre.
« Sous-section 3
« Audit des comptes d’exploitation
« Art. L. 251-11. – Le Centre national du cinéma et de l’image animée peut procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte d’exploitation. Cet audit a pour objet de contrôler la régularité et la sincérité du compte.
« Le distributeur ou, dans le cas prévu à l’article L. 251-10, le producteur délégué, transmet au Centre national du cinéma et de l’image animée ou à l’expert indépendant tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l’audit.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet le projet de rapport d’audit au distributeur ou, dans le cas prévu à l’article L. 251-10, au producteur délégué, qui présente ses observations. Le rapport d’audit définitif est transmis au distributeur, au producteur délégué, aux autres coproducteurs, ainsi qu’aux éditeurs de services de télévision qui ont contribué au financement de la production de l’œuvre.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée porte également à la connaissance de toute personne physique ou morale avec laquelle le producteur délégué a conclu un contrat conférant à cette personne un intéressement aux recettes d’exploitation de l’œuvre les informations relatives à cet intéressement.
« Lorsque le rapport d’audit révèle un manquement mentionné à l’article L. 421-1, celui-ci est constaté et sanctionné dans les conditions prévues par le livre IV.
« Art. L. 251-12. – Lorsqu’il existe un accord professionnel rendu obligatoire sur le fondement de l’article L. 132-25-1 du code de la propriété intellectuelle prévoyant notamment la définition du coût de production d’une œuvre audiovisuelle appartenant aux genres de la fiction, de l’animation, du documentaire de création ou de l’adaptation audiovisuelle de spectacle vivant, des modalités de son amortissement et des recettes nettes, le Centre national du cinéma et de l’image animée peut procéder ou faire procéder par un expert indépendant à un audit du compte d’exploitation établi par le producteur délégué en application de cet accord.
« Le producteur délégué transmet au Centre national du cinéma et de l’image animée ou à l’expert indépendant tous les documents ou pièces utiles à la réalisation de l’audit.
« Le Centre national du cinéma et de l’image animée transmet le projet de rapport d’audit au producteur délégué qui présente ses observations. Le rapport d’audit définitif est transmis au producteur délégué, ainsi qu’aux auteurs énumérés à l’article L. 113-7 du même code.
« Art. L. 251-13. – Un décret fixe les conditions d’application du présent chapitre. » ;
2° Après le 10° de l’article L. 421-1, sont insérés des 10° bis et 10° ter ainsi rédigés :
« 10° bis Des dispositions de l’article L. 251-1 relatives à l’établissement et à la transmission du compte de production, des dispositions des articles L. 251-5, L. 251-9 et L. 251-10 relatives à l’établissement et à la transmission du compte d’exploitation, ainsi que des dispositions des articles L. 251-4, L. 251-11 et L. 251-12 relatives à la transmission des documents et pièces utiles à la réalisation des audits ;
« 10° ter Des stipulations d’un accord professionnel rendu obligatoire dans les conditions prévues aux articles L. 251-2 et L. 251-6 ou des dispositions des décrets en Conseil d’État mentionnés aux mêmes articles, ainsi que des stipulations d’un accord professionnel rendu obligatoire mentionné à l’article L. 251-12 ; ».
Mme la présidente. L’amendement n° 101 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 44
Compléter cet alinéa par les mots :
et aux auteurs qui bénéficient d’un intéressement aux recettes d’exploitation
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. L’article L. 251-11 du code du cinéma et de l’image animée, créé par l’article 9 quater du projet de loi, prévoit que le rapport d’audit du compte d’exploitation d’un film est transmis dans son intégralité au distributeur, au producteur délégué, aux coproducteurs et aux éditeurs de services de télévision. Nous proposons, par cet amendement, qu’il soit aussi transmis, partiellement, aux auteurs.
Le rapport d’audit ne serait transmis aux auteurs que dans la limite des informations relatives à leur intéressement. En effet, nous ne comprenons pas ce qui pourrait justifier la limitation de l’information des auteurs qui bénéficient d’un intéressement. S’il nous semble opportun que le dispositif prévoie une transmission intégrale à tous, il est logique d’en prévoir la transmission aux auteurs bénéficiant d’un intéressement.
Pour rappel, l’article L. 132-28 du code de la propriété intellectuelle prévoit que « le producteur fournit, au moins une fois par an, à l’auteur et aux coauteurs un état des recettes provenant de l’exploitation de l’œuvre selon chaque mode d’exploitation. À leur demande, il leur fournit toute justification propre à établir l’exactitude des comptes, notamment la copie des contrats par lesquels il cède à des tiers tout ou partie des droits dont il dispose. »
Cette transmission partielle des comptes d’audit s’inscrit ainsi dans l’esprit du droit existant ; elle facilitera la tâche de tous ceux qui n’ont pas les moyens de mener un ensemble de démarches – avocats, conseillers, ou autres. La transmission transparente va dans le bon sens.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La transmission du rapport d’audit aux auteurs s’inscrit dans le prolongement de l’esprit et des dispositions de l’article 9 quater, qui vise à mieux informer l’ensemble des parties sur la réalité des comptes d’exploitation. Nous y sommes donc favorables.
J’ajoute que c’est le douzième amendement de M. Assouline que la commission soutient et j’observe que la réciproque n’est pas vraie… (Sourires.)
M. David Assouline. Comment ? Vous plaisantez, j’espère ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission émet donc un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement vise à prévoir la transmission aux auteurs de la partie du rapport d’audit des comptes d’exploitation d’une œuvre audiovisuelle relative à leur intéressement. Je souscris évidemment pleinement, moi aussi, à cet objectif, puisque les auteurs bénéficient d’une participation proportionnelle aux recettes de l’œuvre, conformément au code de la propriété intellectuelle.
Néanmoins, cet objectif est satisfait par les dispositions de l’alinéa 45 de l’article 9 quater, qui prévoient la transmission à « toute personne physique ou morale [bénéficiant d’]un intéressement aux recettes [des] informations [issues du rapport d’audit] relatives à cet intéressement. »
Cette disposition inclut donc bien sûr les auteurs, qui devraient d’ailleurs se voir transmettre le rapport d’audit dans sa globalité, puisque le code de la propriété intellectuelle prévoit leur participation proportionnelle à toutes les recettes d’exploitation, quels que soient les modes d’exploitation.
Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat, s’agissant d’un amendement qui est en réalité satisfait, me semble-t-il.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 9 quater, modifié.
(L’article 9 quater est adopté.)
Article 10
I. – A. – L’article L. 212-32 du code du cinéma et de l’image animée est ainsi modifié :
1° Au 1°, le mot : « billet » est remplacé par le mot : « droit » ;
2° Le 3° est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :
« Ils communiquent également cette déclaration de recettes aux distributeurs et à une société de perception et de répartition des droits relevant du titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle chargée des droits musicaux lorsqu’il existe un accord entre une telle société et les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques ou leurs représentants. Toutefois, le Centre national du cinéma et de l’image animée peut se charger, en lieu et place des exploitants, de la transmission de la déclaration de recettes, sous quelque forme que ce soit, aux distributeurs et, le cas échéant, à la société de perception et de répartition des droits précitée ; »
3° Sont ajoutés des 4° à 6° ainsi rédigés :
« 4° Les fabricants, les importateurs ou les marchands de billets d’entrée déclarent au Centre national du cinéma et de l’image animée la livraison de ces billets aux établissements de spectacles cinématographiques ;
« 5° Les constructeurs et les fournisseurs de systèmes informatisés de billetterie font homologuer ces systèmes par le Centre national du cinéma et de l’image animée, sur la base de leur conformité à un cahier des charges, et déclarent au Centre national du cinéma et de l’image animée la livraison de ces systèmes aux établissements de spectacles cinématographiques ;
« 6° Les installateurs de systèmes informatisés de billetterie déclarent au Centre national du cinéma et de l’image animée l’installation de ces systèmes dans les établissements de spectacles cinématographiques. Ils déclarent également, ainsi que les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques, l’état des compteurs de numérotation lors de toute mise en service, de tout changement de lieu d’implantation et de toute modification technique nécessitant l’intervention du constructeur ou du fournisseur. »
B. – La section 7 du chapitre II du titre Ier du livre II du même code est complétée par des articles L. 212-33 à L. 212-34 ainsi rédigés :
« Art. L. 212-33. – Le droit d’entrée à une séance de spectacles cinématographiques organisée par un exploitant d’établissement de spectacles cinématographiques est individuel. Sa tarification est organisée en catégories selon des modalités fixées par voie réglementaire.
« Sauf dérogation, il ne peut être délivré de droits d’entrée non liés à un système informatisé de billetterie en dehors des établissements de spectacles cinématographiques.
« Le droit d’entrée est conservé par le spectateur jusqu’à la fin de la séance de spectacles cinématographiques.
« Art. L. 212-33-1. – Le fait, pour un exploitant d’établissement de spectacles cinématographiques, d’offrir à un spectateur, quelles que soient les modalités de l’offre, la vente d’un droit d’entrée à une séance de spectacle cinématographique :
« 1° Soit associée, avec ou sans supplément de prix, à la remise d’un bien ou à la fourniture d’un service ;
« 2° Soit dans le cadre d’un service de vente ou de réservation en ligne,
« ne peut avoir pour effet d’entraîner une modification de la valeur de ce droit d’entrée par rapport au prix de vente du droit d’entrée qui aurait été remis au spectateur, dans les mêmes conditions et pour la même séance, s’il n’avait pas choisi cette offre ou n’en avait pas bénéficié, ce prix constituant dans tous les cas l’assiette de la taxe prévue à l’article L. 115-1 et l’assiette de la répartition des recettes prévue à l’article L. 213-10.
« Art. L. 212-34. – Les modalités d’application de la présente section sont fixées par voie réglementaire. »
II. – (Non modifié) L’article L. 213-21 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, le Centre national du cinéma et de l’image animée peut se charger, en lieu et place des exploitants, de la transmission aux distributeurs intéressés. » ;
2° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques ou les installateurs de leurs équipements de projection numérique transmettent au Centre national du cinéma et de l’image animée les certificats de ces équipements.
« Les distributeurs et les régisseurs de messages publicitaires qui mettent à la disposition des exploitants d’établissements de spectacles cinématographiques, sous forme de fichiers numériques, des œuvres ou des documents cinématographiques ou audiovisuels, ou les laboratoires qui réalisent pour ces distributeurs et ces régisseurs les fichiers numériques transmettent au Centre national du cinéma et de l’image animée les identifiants universels uniques de ces fichiers numériques ainsi que les numéros internationaux normalisés des œuvres et documents concernés ou tout numéro permettant de les identifier. » ;
3° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les modalités et la périodicité de la transmission des données, certificats, identifiants et numéros mentionnés au présent article ainsi que les modalités et la durée de la conservation de ces informations sont fixées par décision du président du Centre national du cinéma et de l’image animée. » – (Adopté.)
Article 10 bis
(Non modifié)
L’article L. 234-1 du code du cinéma et de l’image animée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’arrêté rend obligatoire ces accords pour une durée maximale de trois ans. » – (Adopté.)
Article 10 ter
Après la référence : « L. 212-32 », la fin du 5° de l’article L. 421-1 du code du cinéma et de l’image animée est ainsi rédigée : « , des deux premiers alinéas de l’article L. 212-33 et de l’article L. 212-33-1 relatives au contrôle des recettes des œuvres cinématographiques dans les établissements de spectacles cinématographiques ainsi que des textes et décisions pris pour leur application ; ». – (Adopté.)
Article 10 quater (nouveau)
I. – Le titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI
« Dispositions applicables à la recherche et au référencement des œuvres d’art plastiques, graphiques et photographiques
« Art. L. 136-1. – I. – La publication d’une œuvre d’art plastique, graphique ou photographique par un service de communication en ligne emporte cession du droit de reproduction et du droit de représentation de cette œuvre par des services de moteur de recherche et de référencement, au profit d’une ou plusieurs sociétés régies par le titre II du livre III de la présente partie et agréées à cet effet par le ministre chargé de la culture.
« II. – Les sociétés agréées sont seules habilitées à conclure toute convention avec les éditeurs des services de moteur de recherche et de référencement aux fins d’autoriser leur reproduction et leur représentation par ces services et de percevoir les rémunérations correspondantes fixées selon les modalités prévues à l’article L. 136-3. Les conventions conclues avec ces éditeurs prévoient les modalités selon lesquelles ils s’acquittent de leurs obligations de fournir aux sociétés agréées le relevé des exploitations des œuvres et toutes informations nécessaires à la répartition des sommes perçues aux auteurs ou leurs ayants droit.
« Art. L. 136-2. – L’agrément prévu au I de l’article L. 136-1 est délivré en considération :
« 1° De la diversité des associés ;
« 2° De la qualification professionnelle des dirigeants ;
« 3° Des moyens humains et matériels qu’ils proposent de mettre en œuvre pour assurer la gestion des droits de reproduction et de représentation des œuvres d’art plastiques, graphiques et photographiques par des services de moteur de recherche et de référencement.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de la délivrance et du retrait de cet agrément.
« Art. L. 136-3 – I. – La rémunération due au titre de la reproduction et de la représentation des œuvres d’art plastiques, graphiques et photographiques par des services de moteur de recherche et de référencement est assise sur les recettes de l’exploitation ou à défaut, évaluée forfaitairement dans les cas prévus à l’article L. 131-4.
« Le barème et les modalités de versement de cette rémunération sont fixés par voie de convention entre les sociétés agréées pour la gestion des droits des œuvres d’art plastiques, graphiques et photographiques par des services de moteur de recherche et de référencement et les organisations représentant les éditeurs de ces services.
« La durée de ces conventions est limitée à cinq ans.
« II. – À défaut d’accord conclu dans les six mois suivant la publication du décret en Conseil d’État prévu à l’article L. 136-2, ou si aucun accord n’est intervenu à la date d’expiration d’un précédent accord, le barème de la rémunération et ses modalités de versement sont arrêtés par une commission présidée par un représentant de l’État et composée, en nombre égal, d’une part, de représentants des sociétés agréées conformément au même article L. 136-2 et, d’autre part, des représentants des éditeurs de services de moteur de recherche et de référencement.
« Les organisations amenées à désigner les représentants membres de la commission, ainsi que le nombre de personnes que chacune est appelée à désigner, sont déterminés par arrêté du ministre chargé de la culture.
« La commission se détermine à la majorité des membres présents. En cas de partage des voix, le président a voix prépondérante.
« Les décisions de la commission sont publiées au Journal officiel. »
II. – Le I s’applique à compter de la publication du décret pris pour l’application du chapitre VI du titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle et, au plus tard, six mois après la date de promulgation de la présente loi.
Mme la présidente. L’amendement n° 414, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. J’adhère pleinement à la volonté exprimée au travers de cet article d’assurer une rémunération équilibrée de la valeur pour les auteurs et les artistes dans l’environnement numérique.
Néanmoins, le dispositif envisagé d’un droit à rémunération au titre du référencement des œuvres par les moteurs de recherche soulève d’importantes questions au regard de l’état actuel du droit européen, qui fixe un cadre restrictif en la matière. En particulier, la Cour de justice de l’Union européenne considère, depuis un arrêt du 13 février 2014, que les ayants droit ne peuvent s’opposer à la création d’un lien hypertextuel dès lors que celui-ci pointe vers une ressource librement accessible sur internet.
C’est donc au niveau européen que le problème doit être posé, ce que je fais d’ailleurs avec détermination, et j’ai suivi attentivement les projets en matière de droit des éditeurs de presse, qui soulevaient d’importants enjeux. Surtout, j’ai réussi à mettre le sujet du partage de la valeur et du rôle des intermédiaires techniques à l’ordre du jour du débat européen, notamment grâce au rapport que m’a remis Pierre Sirinelli.
Dans sa communication du 9 décembre dernier, la Commission européenne a exprimé sa volonté de déterminer si l’utilisation en ligne des œuvres protégées par le droit d’auteur est dûment autorisée et rémunérée au moyen de licences. Dans ce contexte, la Commission se penchera en particulier sur le rôle des services d’agrégation d’actualité.
La France est ainsi très mobilisée actuellement pour faire évoluer le droit européen qui fixe le cadre législatif. Vous pouvez aussi compter, vous le savez, sur mon engagement total dans ce chantier. D’où cet amendement, qui vise à supprimer le régime de rémunération pour le référencement des arts visuels.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Selon moi, il ne faut pas supprimer cet article.
C’est un sujet important, vous l’avez dit, madame la ministre, qui rejoint une grande préoccupation des photographes, lesquels assistent à la captation de leurs œuvres. Il faut maintenir cet article, que la commission a jugé important de faire figurer au sein de ce projet de loi. La situation des photographes et des autres auteurs d’art graphiques et plastiques est marquée par une précarité croissante ; il était indispensable de l’évoquer, et la commission a adopté cette mesure.
Vous mettez en avant, madame la ministre, un risque de contradiction entre ce dispositif et le droit européen, en particulier la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne de 2014.
Nous avons lu tous les arrêts en question, et la solution retenue par la Cour soulève tout de même quelques questions. En effet, l’arrêt cité évoque seulement la question des liens hypertextuels et il concernait un lien vers un article de presse. Peut-on transposer cette jurisprudence à la pratique des vignettes stockées sur les serveurs du moteur de recherche ou au stockage des photographies en format non réduit mises à la disposition du public hors de tout contexte ?
À ce stade, il paraît important d’approfondir davantage la question, mais nous ne pouvons pas abandonner ainsi tout un pan de la création. J’admets la possibilité que notre mesure soit fragile, mais, au fond, les arrêts de la Cour de justice européenne sont assez spécifiques et on pourrait peut-être élargir le champ.
Aujourd’hui, les auteurs, notamment les photographes, ont besoin d’un engagement politique fort de notre part. C’est pourquoi la commission souhaite conserver l’article 10 quater. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Pour qu’il n’y ait aucune méprise, je souhaite préciser que je suis extrêmement attachée à tous les travaux de réflexion que nous menons actuellement autour de la rémunération des artistes des arts visuels, qui pose effectivement des problèmes de répartition de la valeur, comme dans bien des industries touchées par la révolution numérique. Que l’on ne s’y trompe pas, l’objet de cet amendement était de discuter des modalités de la rémunération de ces artistes, non du principe de leur rémunération décente.
Je profite de cette prise de parole pour répondre à l’intervention de Mme Sylvie Robert à propos du Conseil national des arts visuels. Effectivement, vous le savez, j’ai annoncé en Arles la création d’un Conseil national de la photographie, qui doit être mis en place très prochainement. Toutefois, vous avez raison, la mise en place d’un Conseil national des arts visuels, plus général qu’un conseil ne concernant que la photographie, serait une avancée majeure pour ce secteur.
Cela permettrait de donner un cadre aux relations entre l’État et les organisations professionnelles du secteur et à celles des organisations professionnelles d’artistes auteurs avec les diffuseurs. En outre, elle favoriserait la structuration du secteur, dont la nécessité est de plus en plus évidente au regard de la paupérisation d’une grande partie des artistes auteurs et des difficultés à avancer sur des sujets majeurs, comme la réforme de la formation professionnelle ou les problèmes rencontrés par les différents acteurs du conseil de gestion de l’Assurance formation des activités du spectacle, l’AFDAS.
Le secteur des arts graphiques et plastiques est plus faiblement structuré que celui du spectacle vivant, nous le savons ; il lui manque une instance permanente de concertation avec l’État et avec les collectivités sur l’ensemble de ces sujets, qui sont articulés entre eux. C’est pourquoi je propose d’y travailler avec vous, madame la sénatrice, pour avancer sur ce chantier.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.
M. Claude Kern. L’article 10 quater, tel qu’il a été rédigé par la commission de la culture du Sénat, apporte l’espoir de pouvoir bénéficier de la valeur créée par les images référencées par les moteurs de recherche. Il apporte aussi l’espoir d’un changement de paradigme et d’une nouvelle économie d’internet, plus équitable pour les créateurs d’images.
Il garantit également la rémunération des auteurs et le renouvellement d’une création libre et diversifiée. Aussi, attaché à ces valeurs et à la diversité culturelle, je ne voterai pas pour l’amendement de suppression du Gouvernement. En effet, il faut envoyer un signal fort de soutien à la démarche de Mme la ministre à l’échelon européen. En revanche, je voterai en faveur de l’amendement rédactionnel de M. le rapporteur.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. J’ai également une divergence de vues avec le Gouvernement. Je ne suis pas d’accord avec la suppression de cet article, madame la ministre, parce que, ayant auditionné pendant deux ans des personnes du secteur des arts plastiques pour mon rapport sur la création, j’ai pu mesurer à quel point on méconnaît, même quand on est un parlementaire suivant les affaires culturelles, la situation sociale catastrophique de ce secteur.
Une majorité de ces personnes vit sous le seuil de pauvreté. Quand on va voir les œuvres d’un grand peintre, on s’imagine que celui-ci vit bien, mais, sur tous nos territoires, dans de petites villes, il existe des artistes dans une situation catastrophique, certes parce qu’ils n’ont pas d’organisations structurées et puissantes pour défendre leurs droits, mais aussi parce que la protection sociale dans ce domaine est en retard.
Dès lors, si nous pouvons aider… Par exemple, un focus politique inséré dans cette loi représenterait une partie de l’aide que nous pouvons apporter. La création d’aujourd’hui repose, en grande partie, sur ces artistes. Il y a sans doute les photographes – on en parle plus parce que c’est moderne –, mais il faut prendre en compte l’ensemble des arts plastiques.
En outre, l’une de nos propositions a été évincée de notre discussion en séance par le recours à l’article 41 de la Constitution, parce que la création d’un Conseil national des arts visuels relève du domaine réglementaire ; je veux appeler l’attention de tous sur ce point. Le pouvoir de décider qu’une telle mesure relève du domaine réglementaire, sans qu’on puisse même en discuter en séance, me semble exorbitant. Je me permets d’aborder cette question, parce qu’elle est connexe. Il ne faudrait pas abuser de l’article 41 au point d’éliminer certains débats !
Puisque notre amendement a été invalidé, il ne restera plus grand-chose si cet article aussi est supprimé. Nous voulons nous montrer attentifs à ce secteur dans cette loi et je sais que la ministre, qui a fait des annonces à Arles, y est aussi attentive. Nous l’aidons à l’être encore plus en lui disant que cette suppression ne serait pas opportune.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Nous ne sommes pas favorables à la suppression de cet article, raison pour laquelle nous ne voterons en faveur de l’amendement du Gouvernement.
J’en profite pour formuler une remarque concernant l’argument selon lequel cet article risquerait d’être contradictoire avec les règles européennes, argument souvent invoqué à l’occasion d’initiatives que nous prenons. Mes chers collègues, je vous invite à réfléchir à ce problème, qui se pose de manière récurrente.
Jusqu’à preuve du contraire, les directives européennes ne tombent pas du ciel : elles sont le fruit de décisions politiques ! Nous ne pouvons pas – vous ne pouvez pas, devrais-je dire, car je m’adresse ici à ceux dont les partis les votent au Parlement européen –, d’un côté, produire régulièrement des directives, et, de l’autre, buter sur ces règles quand nous réfléchissions, ici, à la manière de faire progresser les droits !
Il faudrait tout de même que nous cherchions un jour à inverser l’ordre des choses. La Commission européenne va-t-elle durablement empêcher l’ensemble des États européens de se pencher avec audace sur le problème que pose Google dans toute l’Europe, alors que l’envie d’avancer sur ce point est manifeste dans tous les pays ?
Le législateur, en France comme dans les autres pays européens, ne doit pas se laisser arrêter par l’argument des considérations. Cela permettra d’inverser progressivement la logique qui nous a conduits à nous dessaisir d’une partie de nos prérogatives, sur des bases particulièrement problématiques, puisque c’est la même Commission européenne qui nous explique que nous devons valider un accord dérogatoire au droit social obtenu avec la Grande-Bretagne au terme de négociations avec David Cameron et qui, si on la laisse faire, nous empêchera d’avancer dans des domaines comme ceux dont nous discutons aujourd'hui !
Je voulais formuler cette remarque à la faveur de cet amendement, parce que c’est un problème que nous rencontrons tous ici de plus en plus souvent, et pas seulement en matière culturelle.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Madame la ministre, vous nous dites que le Gouvernement n’est pas satisfait de la situation créée par la directive de 2000 et qu’il souhaite faire avancer les choses. C’est aussi ce que veut le Parlement !
À cet égard, je trouve que le signal par lequel vous nous demandez de retirer ce qui est l’affirmation de notre volonté de voir la situation évoluer est un peu particulier. Ce que nous voulons, c’est appuyer l’action que vous pourrez mener au niveau européen pour faire bouger les choses ! Ce n’est donc pas le moment de mettre sous le boisseau notre propre volonté sur ces sujets.
Dès lors, je ne peux pas moi non plus voter en faveur de l’amendement du Gouvernement.
M. André Reichardt. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Bien évidemment, j’irai dans le même sens que mes collègues.
Au-delà du signal qu’il donne aux arts visuels, je trouve que cet article est très équilibré. Au reste, je trouve assez étonnant que l’on veuille supprimer cette disposition au nom de l’arrêt Svensson, aux termes duquel les liens hypertextes ne sont pas soumis aux dispositions sur le droit d’auteur.
En effet, rien aujourd'hui ne permet d’assimiler des photos ou des dessins à un lien hypertexte ! Sinon, n’importe quelle œuvre en ligne pourrait, de la même manière, devenir un lien hypertexte cliquable. C’est presque toute la législation sur l’application du droit d’auteur en ligne qui pourrait être remis en cause !
Pour toutes ces raisons, nous ne sommes bien sûr pas favorables à la suppression de l’article 10 quater.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Comme M. le rapporteur l’a fort aimablement rappelé, il s’agit d’un sujet qui nous tient particulièrement à cœur.
En tout état de cause, l’argumentaire qui nous a été fourni par le Gouvernement nous semble procéder d’une interprétation extrêmement abusive de l’arrêt Svensson. Par conséquent, madame la ministre, soit il s’agit d’un malentendu, et celui-ci pourra donc être levé, soit il s’agit d’une voie dans laquelle vous voulez vous engager, auquel cas nous ne pourrons absolument pas vous soutenir – même si, sur d’autres points, nous vous soutenons.
En effet, ce que cache votre amendement, c’est tout simplement le consentement à une spoliation des photographes et des artistes. Les membres de la Haute Assemblée ne sauraient consentir à une telle mesure !
Par ailleurs, pour rebondir sur une remarque formelle qui a été formulée tout à l'heure, j’estime que nous devrions réfléchir sereinement à la façon extrêmement énergique dont l’article 41 de la Constitution semble appliqué.
Je veux rappeler que cette disposition n’est pas le pendant de l’article 40, qui permet d’opposer l’augmentation de la dépense publique dès le premier euro engagé. L’article 41 prévoit simplement que le Gouvernement ou le président de l’assemblée saisie peut opposer l’irrecevabilité lorsque la disposition relève du domaine réglementaire. Il s’agit bien d’une possibilité, qui n’a aucun caractère automatique !
J’aimerais donc que, pour la suite de nos travaux, l’article 41 ne soit pas dégainé de façon systématique. Il pourrait être utilisé avec un peu plus de modération, surtout lorsque le dispositif en cause permet de poser des questions extrêmement importantes en séance.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux de nouveau préciser les choses.
Évidemment, je partage l’objectif d’assurer une meilleure rémunération de l’exploitation numérique des œuvres des arts visuels. Vous le savez, puisque j’ai eu l’occasion de m’exprimer à de nombreuses reprises sur ce sujet. En particulier, voilà trois ans que je me bats pour que les intermédiaires, qui référencent les moteurs de recherche, puissent être associés au financement de la création, ainsi qu’à la participation aux charges publiques des pays dans lesquels ils réalisent des bénéfices.
Cependant, en l’état, cet article ne me paraît pas compatible avec la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne : une telle disposition serait écartée par la Commission européenne si nous devions la lui notifier.
Néanmoins, je trouve que le débat qu’a ouvert la discussion de cet amendement est très intéressant. Il me semble que nous partageons tous l’objectif d’assurer une meilleure rémunération des auteurs pour leurs œuvres.
J’estime que nous devons aussi être attentifs à ce qui s’est produit dans les pays voisins, notamment en Allemagne, qui a souhaité introduire un droit similaire ou un droit voisin sur l’utilisation de liens hypertextes renvoyant à des articles de presse. Ce n’est pas exactement le sujet qui nous occupe ce soir, mais la démarche était assez proche, puisqu’il s’agissait aussi d’une question de répartition de la valeur à partir de contenus ou d’objets mis en ligne par des tiers.
On voit bien les difficultés que rencontre aujourd'hui l’Allemagne ou l’Espagne, qui a elle aussi essayé d’introduire des dispositions du même type, pour tirer des ressources des droits voisins que leur législation a mis en place. (M. Pierre Laurent s’exclame.)
Je suis tout à fait d’accord pour réfléchir à ces questions, qui me semblent absolument indispensables pour garantir un meilleur partage de la valeur à l’avenir. Cet amendement visait justement à réfléchir aux modalités de partage les plus efficaces possible. Il ne faudrait pas, en effet, que nous mettions en place un dispositif qui ne soit pas compatible avec le droit européen : il ne pourrait malheureusement pas être mis en œuvre, et nous n’en tirerions aucune ressource pour nos artistes.
Avançons donc de conserve pour trouver le dispositif le meilleur et le plus efficace possible !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.
Mme Marie-Christine Blandin. Il semble que nous partagions tous le même objectif. J’en fais crédit à chacun de mes collègues !
Quand j’ai commencé à défendre les photographes, le ministre en charge s’appelait Jean-Jacques Aillagon. Depuis lors, on a vu défiler du monde…
Quand j’ai déposé ma proposition de loi pour défendre les photographes, le ministre s’appelait Frédéric Mitterrand.
Mme Françoise Férat, rapporteur. C’était hier ! (Sourires.)
Mme Marie-Christine Blandin. Depuis lors, on a encore vu défiler du monde !
Aujourd'hui, madame la ministre, vous nous dites que, depuis trois ans, vous travaillez avec acharnement et que vous vous êtes largement exprimée sur le sujet. Certes, vous vous êtes beaucoup exprimée, mais les aides à la presse n’ont pas changé ! Elles ont abondé des titres éditeurs, tandis que les photographes n’ont rien vu passer.
Le nombre de photographes disposant d’une carte de presse a été laminé. Dans les zones de combat, les photographes ne peuvent même pas présenter une carte de presse pour franchir les checkpoints, parce qu’ils ne sont plus salariés !
Les appareils numériques coûtent dix fois plus cher que ne coûtaient, autrefois, les appareils argentiques, sans parler de la rénovation de la conservation des stocks. Les photographes ne s’en sortent plus. On ne les aide qu’avec des paroles ! Alors, aujourd'hui, madame la ministre, non, nous ne vous suivrons pas sur la suppression de cet article, même si celui-ci chiffonne l’Europe. Il va falloir passer aux actes ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. L'amendement n° 497, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Remplacer les mots :
décret pris pour l'application du chapitre VI du titre III du livre Ier de la première partie du code de la propriété intellectuelle
par les mots :
décret en Conseil d'État mentionné au dernier alinéa de l'article L. 136-2, tel qu'il résulte du I du présent article
La parole est à M. le rapporteur.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 quater, modifié.
(L'article 10 quater est adopté.)
Article 10 quinquies (nouveau)
L’article 27 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi modifié :
1° Le 3° est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après les mots : « d’œuvres cinématographiques et », sont insérés les mots : « , pour au moins 60 % indépendante à leur égard, d’œuvres » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Cette contribution est à hauteur de 60 % indépendante à l’égard de l’éditeur de services. » ;
2° La première phrase du 4° est supprimée.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous abordons un sujet qui, ces dernières semaines, a suscité beaucoup de commentaires, notamment dans le monde de l’audiovisuel. Il me semble important que nous ayons un débat approfondi à son propos.
En adoptant ses amendements sur la production audiovisuelle, notre commission a d’abord voulu rappeler l’antériorité de sa réflexion sur ce sujet. Dès 2013, un rapport d’un groupe de travail, conduit par notre ancien collègue Jean-Pierre Plancade,…
Mme Françoise Laborde. Exact !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. … appelait à une restructuration du marché de la production audiovisuelle et proposait même de porter à 50 % le niveau de la part de production dépendante.
La première avancée consécutive à ce rapport a pris la forme d’une modification de l’article 71-1 de la loi du 30 septembre 1986, adoptée dans le cadre de la loi du 15 novembre 2013 et relative aux parts de coproduction et aux mandats de commercialisation. Dix-huit mois – j’y insiste – après la publication de la loi, un décret d’application a été publié le 27 avril 2015, mais celui-ci ne respectait pas complètement l’esprit de l’amendement déposé, à l’époque, par Jean-Pierre Plancade.
Depuis lors, madame la ministre, vous avez annoncé, en janvier 2015, un « acte II » de l’évolution des rapports entre diffuseurs et producteurs. Cette annonce n’a malheureusement pas eu de suite.
À la demande de Mme la présidente de la commission de la culture et dans le cadre de mon rapport, j’ai organisé, le 17 décembre dernier, au Sénat, deux tables rondes, l’une avec les producteurs indépendants et l’autre avec les diffuseurs – je précise que tous les membres de la commission y étaient conviés. Ces échanges ont montré que toutes les parties avaient bien conscience de la nécessité d’adapter les règles régissant leurs rapports. Toutefois, il fallait une initiative pour obliger les uns et les autres à se parler.
Plusieurs de mes interlocuteurs m’ont expliqué, depuis lors, que l’intention de notre commission de proposer des évolutions sur la réglementation de la production n’avait pas été sans effet sur la conclusion des accords entre France Télévisions et les producteurs indépendants ou sur son accélération.
Cette initiative du Sénat est donc utile et légitime.
M. Bruno Retailleau. Bravo !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Les dirigeants des trois groupes privés de télévision – TF1, M6 et Canal+ – que vous avez reçus lundi, madame la ministre, soutiennent cette démarche. Les producteurs indépendants, que je rencontre depuis dix jours, la comprennent de mieux en mieux quand je leur rappelle notre attachement à la production indépendante.
Comme je le répète chaque fois que l’on me demande mon avis, un accord interprofessionnel serait préférable à des dispositions législatives, mais l’intervention du législateur doit demeurer une solution en cas d’échec de la négociation.
En déposant des amendements tendant à des rédactions différentes, nos collègues David Assouline et Philippe Bonnecarrère ont à la fois légitimé l’initiative prise par le Parlement dans ce domaine et proposé des pistes de modification, qui pourront nous être utiles en deuxième lecture.
Comme je l’ai annoncé hier aux représentants du SPECT, le syndicat de producteurs et créateurs d’émissions de télévision, que j’ai reçus de nouveau, je proposerai aux représentants des diffuseurs et des producteurs de participer à une nouvelle table ronde au printemps prochain, afin d’ajuster nos dispositifs, le cas échéant.
Je ne doute pas qu’un compromis, absolument nécessaire si nous souhaitons conserver des groupes capables d’affronter le monde de l’audiovisuel dans les années à venir, notamment dans le cadre européen, recueillera un large assentiment du Sénat si aucun accord interprofessionnel n’est intervenu d’ici là.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 328 est présenté par le Gouvernement.
L'amendement n° 438 rectifié est présenté par Mmes Laborde et Jouve et M. Mézard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 328.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Avec votre permission, madame la présidente, en sus de cet amendement n° 328, j’évoquerai également les amendements nos 330 à l’article 10 sexies, 331 à l’article 10 septies et 332 à l’article 10 octies, qui ont pour objet de supprimer les quatre articles introduits par votre commission à la suite de l’amendement présenté par M. le rapporteur.
À chaque fois, notre volonté de suppression repose sur le même raisonnement : premièrement, ces dispositions modifiant la loi de 1986 sur l’audiovisuel n’ont pas leur place dans ce projet de loi, comme j’ai eu l’occasion de le dire voilà quelques instants ; deuxièmement, elles empiètent sur les compétences du pouvoir réglementaire ; troisièmement, leur mise en œuvre déséquilibrerait les relations entre producteurs et diffuseurs.
Nous avons la chance de disposer, en France, d’un paysage extrêmement diversifié, avec de grandes entreprises de production et de plus petites sociétés, des producteurs indépendants ou non, ce qui conduit à une production audiovisuelle extrêmement dynamique qui nous est enviée dans beaucoup d’autres pays. Pour l’essentiel, nous devons cette diversité au décret pris par Mme Tasca, à l’époque où celle-ci était en charge du secteur audiovisuel.
Comme je l’ai dit, cet article n’a pas de lien, même indirect, avec l’objet du projet de loi. Il s’insère dans le chapitre II, relatif au partage et à la transparence des rémunérations dans les secteurs de la création artistique. Je me suis déjà exprimée en ce sens à propos d’un amendement du groupe socialiste et républicain. Je le redis : le Gouvernement n’est pas favorable à l’introduction, dans ce texte, de modifications de la loi de 1986 sur l’audiovisuel.
Ensuite, sur le plan juridique, cette question ne relève pas du domaine de la loi. Cette dernière fixe les grands principes, tels que celui d’une contribution des éditeurs de services à la production d’œuvres audiovisuelles. En revanche, le décret vient en préciser l’ampleur en fixant les différents taux.
Enfin et surtout, une divergence de fond nous oppose au texte issu des travaux votre commission à la suite de l’adoption d’un amendement de votre rapporteur. Cette divergence porte tant sur les modalités des évolutions nécessaires que sur leur ampleur.
Sur les modalités, je souhaite rappeler la méthode qui est la mienne et que j’ai appliquée avec succès tant dans le domaine de la musique que dans celui du cinéma ou du livre.
Mon rôle est de définir les objectifs de réforme et d’inciter ensuite les professionnels à s’en saisir et à négocier. C’est mon rôle d’accompagner la négociation et de la traduire ensuite dans les dispositions réglementaires et, le cas échéant, législatives nécessaires. Dans le domaine des relations entre producteurs et diffuseurs, j’ai clairement indiqué que la situation actuelle devait évoluer.
Le paysage de la production se structure fortement, notamment sur l’initiative d’acteurs internationaux. Dans le même temps, les diffuseurs français sont soumis à une concurrence exacerbée de la part, entre autres, d’acteurs internationaux non régulés, dans un contexte d’atonie du marché publicitaire français.
Je souhaite des évolutions pour donner plus de flexibilité aux diffuseurs dans le respect de la production indépendante. Je l’ai dit à plusieurs reprises aux uns comme aux autres et j’ai engagé les travaux qui étaient nécessaires pour mettre tout le monde autour de la table. Ces évolutions sont en cours, afin de mieux partager le risque. Je tiens d’ailleurs à souligner le succès des négociations sur la transparence, qui ont abouti à un accord que nous signerons la semaine prochaine.
Les négociations se sont engagées voilà plusieurs mois. Elles ont connu une avancée décisive avec l’accord conclu entre France Télévisions et les producteurs, en décembre dernier, qui renforce les possibilités d’investissement du groupe audiovisuel public au travers de sa propre filiale de production, lui donne plus de marges de manœuvre pour exploiter ses œuvres, notamment de manière non linéaire, et, dans le même temps, préserve le cœur de l’investissement dans la production indépendante.
Voilà un exemple typique d’accord gagnant-gagnant dont les principales stipulations seront reprises dans le cahier des charges de France Télévisions.
Sur ce modèle, des discussions se sont engagées entre les chaînes privées et les producteurs. Elles doivent aboutir, dans le courant du premier trimestre, à des assouplissements que le Gouvernement pourra traduire dans la réglementation. Je le redis, à défaut d’accord, le Gouvernement prendra ses responsabilités.
Je comprends votre impatience, monsieur le rapporteur, mais je souhaite que vous mesuriez que nous risquons, aujourd’hui, d’interrompre ce processus de discussion engagé sur tous les sujets de l’équilibre producteurs-diffuseurs.
Il n’est donc pas opportun de légiférer en la matière et de mettre fin, de manière aussi abrupte, à l’ensemble des négociations professionnelles en cours ou à venir.
En effet, si elle était adoptée par la représentation nationale, la rédaction de ces articles figerait les relations entre producteurs et diffuseurs et entraînerait un déséquilibre en fixant un taux unique là où la réglementation module la part indépendante, notamment en fonction du niveau d’investissement – très variable – des chaînes.
Cette solution ne permettait plus d’aller au-delà du taux de 60 %, qui serait gravé dans le marbre de la loi, ce qui bouleverserait l’économie des relations entre diffuseurs et producteurs audiovisuels. France Télévisions, par exemple, consacre aujourd’hui quelque 95 % de sa contribution à la production audiovisuelle indépendante. Ce sera bientôt 75 %, en vertu de l’accord qui a été signé, et non 60 % comme vous le prévoyez.
Cet amendement me semble d’autant plus irrecevable qu’il doit être analysé au regard des dispositions de l’article 10 sexies, lequel supprime la fixation par le Conseil supérieur de l’audiovisuel de la durée des droits acquis par les éditeurs de services auprès des producteurs audiovisuels au sein des conventions qu’il conclut avec ces derniers.
Le mécanisme de fixation de la durée des droits par le CSA a été introduit en 2009 pour permettre la mise en œuvre des accords professionnels conclus en 2008 entre éditeurs et producteurs. Il s’agissait de permettre aux différentes chaînes de négocier avec les producteurs des droits adaptés à leurs besoins.
La fixation de ces droits par décret dans la part indépendante de la contribution a été supprimée et renvoyée aux conventions conclues par le CSA, qui tiennent compte des accords professionnels négociés en la matière.
Ce dispositif très équilibré a un double mérite : il est souple pour les diffuseurs et il protège les producteurs, ce qui permet de laisser toute sa place à la négociation interprofessionnelle. Cette négociation est aussi équilibrée en ce qu’elle associe diffuseurs, d'une part, et organisations professionnelles de producteurs, d'autre part.
Supprimer tout encadrement de la durée des droits pour le renvoyer à une négociation de gré à gré fragiliserait considérablement la situation des producteurs. Je vous proposerai de revenir sur ces dispositions au travers de l’amendement n° 330.
L’article 10 septies prévoit de fixer à 60 % la part de production indépendante au sein de l’obligation de contribution des éditeurs de services du câble, du satellite et de l’ADSL à la production audiovisuelle.
Il en va de même de l’amendement n° 332 visant à supprimer la détermination par la loi de la part maximale qu’une chaîne de télévision peut détenir dans un producteur indépendant. Passer de 15 % aujourd’hui à une notion de contrôle au sens du code du commerce provoquerait un bouleversement structurel majeur qui n’a pas été analysé. En toute hypothèse, ce débat doit avoir lieu au sein de la filière, avant d’être repris par le pouvoir réglementaire.
Pour toutes ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous demande de bien vouloir adopter l’amendement n° 328, ainsi que les amendements nos 330 à l’article 10 sexies, 331 à l’article 10 septies et 332 à l’article 10 octies.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour présenter l'amendement n° 438 rectifié.
Mme Françoise Laborde. Il est défendu, madame la présidente !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Ce sujet mérite que l’on s’y attarde quelque peu.
Le relèvement du plafond de la production dépendante à 50 % constituait une proposition quasi unanime du rapport publié par le groupe de travail sénatorial sur la production audiovisuelle,…
M. David Assouline. Ce n’est pas vrai !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. … dont notre collègue Jean-Pierre Plancade était le rapporteur en 2013. Depuis trois ans, de nombreuses discussions ont eu lieu, mais aucune n’a permis d’aboutir. Les choses bougent très vite à l’extérieur, mais les règles demeurent figées chez nous…
Le 17 décembre dernier, lors des tables rondes organisées au Sénat avec les producteurs et les diffuseurs, de fortes réticences subsistaient de la part de certains producteurs quant à l’idée de permettre aux diffuseurs privés d’investir davantage dans la production dépendante.
Cet article propose donc une voie moyenne, celle d’une part de production dépendante de 40 %, soit dix points de moins que la proposition du rapport Plancade et que les demandes des chaînes.
Si France Télévisions a signé un accord avec les producteurs indépendants, on ne peut dire que cette négociation se soit déroulée uniquement sur l’initiative des acteurs. Il a parfois été dit que les négociations se faisaient sous la menace, un pistolet sur la tempe… Dès lors, le fait que le Parlement s’intéresse à la question n’est pas illégitime.
M. David Assouline. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Certaines négociations paraissent soit être bloquées, soit faire l’objet d’atermoiements. Bien évidemment, la priorité doit aller à la négociation interprofessionnelle. Nous serions heureux qu’un accord intelligent soit signé entre les producteurs et les diffuseurs.
Toutefois, le législateur et le Gouvernement ne doivent pas éluder leurs responsabilités : si la négociation n’aboutit pas, il sera indispensable de prévoir des dispositions législatives. La poursuite de la navette permettra de mesurer les progrès accomplis avant d’adopter définitivement ces mêmes dispositions.
Notre commission poursuivra également son travail, parallèlement à la négociation, dont j’ai appris avec plaisir qu’elle avait repris vigueur. Je sais que les accords sur la transparence ont quasiment abouti, mais ce n’est pas suffisant. Il faut aller plus loin pour trouver le meilleur compromis possible, afin de préserver le puissant secteur de la production indépendante, sans nuire au développement de nos groupes audiovisuels.
Les amendements déposés par notre collègue David Assouline sont autant de propositions utiles pouvant permettre, en deuxième lecture, un rapprochement des points de vue ; le débat doit se poursuivre.
La commission est défavorable à ces deux amendements identiques, dont les dispositions constituent un point de départ, mais pas nécessairement un point d’arrivée.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. À l’instar de la commission, je pense que le législateur peut être actif dans ce processus de négociation, pourtant éminemment contractuel. Il est vrai que, depuis les décrets Tasca, le politique incite les acteurs à faire bouger les choses à travers la négociation.
Avant de réformer un système, il faut tout de même d’abord lui rendre hommage ! En effet, ne pas le faire, c’est laisser penser que l’on ne croit pas à son caractère vertueux. Or moi je ne veux pas que l’on tienne ici de faux débats.
Certains pensent que la production indépendante n’a pas de place dans notre pays, que les chaînes devraient pouvoir produire de manière intégrée, verticale, comme au temps de l’ORTF et de la SFP. Ce système, plus productif, doit permettre d’aller chercher les ressources dont les chaînes n’avaient pas autant besoin quand la manne publicitaire suffisait à financer les programmes, avant qu’elle ne s’éparpille sur internet ou ailleurs.
Selon moi, la qualité de la production audiovisuelle française est due à ce système. Le foisonnement de la production indépendante a permis de voir apparaître une diversité de l’offre. Certaines sociétés ont ainsi pu aller vers tous les médias, vendre des œuvres aussi bien à TF1 qu’au service public. L’ensemble de la chaîne a bénéficié de cette diversité.
Dans un système intégré, on a une seule entreprise de production, avec ses habitudes et son fonctionnement, c’est-à-dire avec une certaine lourdeur qui mine la créativité.
Pour commencer, je tenais donc à rendre hommage au système qui était en place.
Monsieur le rapporteur, vous avez raison : il faut que les choses bougent, ce que, du reste, nous avons proposé ensemble. En effet, à la fin, le système se bloquait et la situation était devenue anormale : France Télévisions avait besoin de trouver des ressources propres mais n’avait plus de ressources liées à la publicité. Elle n’avait donc pas la possibilité d’obtenir des parts de production plus importantes.
Néanmoins, vous avez oublié de mentionner une chose. Lorsque vous avez rendu hommage à M. Plancade, vous avez oublié de dire que le relèvement à 25 % du quota de production dépendante dans la loi, qui représentait déjà une hausse importante, résultait d’un amendement que j’ai moi-même proposé lors de l’examen de la dernière loi sur l’audiovisuel. Alors, continuons à progresser mais, attention, fixer ce quota à 40 % n’est pas une mince affaire ! Monsieur le rapporteur, en proposant cela, vous bougez brutalement le curseur. J’ai bien compris que vous le faisiez dans le but de négocier, car vous voulez une deuxième lecture. Toutefois, je vous ferai remarquer que nous ne nous trouvons pas dans le cadre d’une négociation mais dans celui de l’élaboration de la loi : ce qui est valable aujourd’hui le sera donc demain ! Or on met la pression en première lecture…
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. David Assouline. … comme si on était dans une négociation !
M. Éric Doligé. Il faut respecter le temps de parole !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Il s’agit d’un sujet très important à nos yeux. Nous allons soutenir l’amendement du Gouvernement. C’est pourquoi je formulerai plusieurs remarques à ce propos.
Monsieur le rapporteur, vous citez abusivement le rapport Plancade, car l’objectif visé par le rapport était très différent de ce que vous nous proposez aujourd’hui avec l’article 10 quinquies. La motivation initiale du rapport était de réfléchir sur la situation de déséquilibre très profond dans laquelle se trouvait le service public.
M. David Assouline. Tout à fait !
M. Pierre Laurent. Le rapport Plancade a tout d’abord soulevé le problème du relèvement des droits, parce que le système avait créé une situation de déséquilibre au détriment du service public à laquelle il fallait remédier. À cet égard, je suis un peu moins optimiste que notre collègue David Assouline sur les vertus du précédent système, du moins telles qu’il vient de les vanter.
Le rapport a également posé la question de la hausse de la part de la production interne du groupe.
Or, ce que vous nous proposez, monsieur le rapporteur, est de nature tout à fait différente. En effet, quand on examine à la fois l’article 10 quinquies et l’article qui vise à modifier la définition des sociétés de production indépendantes – car, à mon avis, ces deux articles ne peuvent pas être examinés indépendamment l’un de l’autre –, on s’aperçoit que vous proposez en réalité une concentration accélérée et brutale de la production au profit non pas des sociétés audiovisuelles en général mais des grands groupes privés de l’audiovisuel français. C’est cela qui nous préoccupe !
Aussi, je formulerai plusieurs remarques.
Première remarque : la production indépendante ne constitue pas un monde uniforme : Endemol et Troisième Œil Productions, ce n’est pas tout à fait la même chose ! Il faudrait entrer davantage dans le détail quand on parle de production indépendante.
Deuxième remarque : nous nous soucions justement du redressement de l’audiovisuel public et de la place que celui-ci prendra dans l’ensemble. Un processus a été engagé par France Télévisions. En créant un système extrêmement brutal qui vient percuter de plein fouet le travail que ce groupe essaie d’engager, vous favoriserez les seuls grands groupes de l’audiovisuel privé, alors même que chacun sait qu’il faut faire en sorte de sortir France Télévisions de la situation de déséquilibre dans laquelle elle a été entraînée pour des raisons sur lesquelles je ne reviendrai pas. En vérité, c’est bien ce que vous proposez avec la combinaison de ces deux articles car, je le répète, ces deux articles fonctionnent de pair.
Pour notre part, nous sommes favorables à la hausse de la part de la production interne dans les groupes audiovisuels, y compris pour les groupes privés, non pas selon la dynamique de concentration forcenée et accélérée que vous souhaitez, mais au travers d’un processus de négociation qui doit aussi contribuer à respecter les qualités de la production indépendante telle qu’elle est aujourd’hui.
M. Éric Doligé. Et le règlement ?
M. Pierre Laurent. Nous allons donc voter l’amendement du Gouvernement, tout en continuant à travailler dans l’esprit que je viens d’évoquer !
Mme la présidente. Mes chers collègues, je voudrais rappeler que le règlement a été récemment réformé pour réorganiser les temps de parole : désormais, chaque intervenant dispose de deux minutes et trente secondes.
M. Éric Doligé. Eh oui !
M. David Assouline. Attendez, je viens de retirer neuf de mes amendements ! Grâce à moi, on a gagné au moins une heure de discussion sur le texte !
Mme la présidente. Si vous ne respectez pas les temps de parole, nous risquons de ne pas parvenir à achever l’examen des articles du projet de loi d’ici à vendredi !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il y a de la marge !
Mme la présidente. Tout le monde portera la responsabilité de cette situation si vous n’êtes pas davantage attentifs, les uns et les autres, au temps de parole qui vous est imparti !
La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Madame la présidente, je vous remercie de ce rappel à un règlement que nous avons tous voulu et avons tous voté ! (M. David Assouline sourit.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Non, nous étions contre !
M. Bruno Retailleau. Madame la ministre, je voudrais vous expliquer pourquoi nous soutiendrons avec force et enthousiasme la position équilibrée que M. le rapporteur vient d’exprimer il y a quelques instants.
Pour commencer, vous nous dites qu’il y a d’un côté le domaine réglementaire et de l’autre le domaine de la loi. Soit, mais comme M. le rapporteur l’a déjà indiqué, c’est précisément parce que les dispositions réglementaires figurant dans le décret du 25 avril 2015 n’ont pas respecté la prescription législative que le législateur entend désormais mieux encadrer les choses.
Ensuite, vous nous dites que la disposition que nous soutenons ne trouve pas sa place dans le projet de loi. Pourtant, il s’agit d’un texte fourre-tout, madame la ministre ! Je ne vais pas lister la cinquantaine d’articles du projet de loi et les différents thèmes qu’il aborde pour tenter de vous convaincre que cette disposition pourrait évidemment figurer dans le texte final.
Sur le fond, maintenant, le Sénat n’en est pas à sa première tentative. Nous avons pratiquement tous approuvé les conclusions du rapport Plancade. Oui ou non, ce rapport proposait-il de porter la part de la production indépendante à 50 % ?
M. David Assouline. Non, moi j’étais dans le groupe de travail à l’époque !
M. Bruno Retailleau. Si, il le proposait !
M. Pierre Laurent. Arrêtez de ne prendre que ce qui vous intéresse et mettez donc toutes les recommandations du rapport Plancade dans le texte !
M. Bruno Retailleau. La démarche de M. le rapporteur tient compte d’une réalité, à savoir que le monde a changé !
Je tiens sincèrement à saluer Catherine Tasca. En effet, je pense que les décrets éponymes ont eu d’heureuses conséquences. Seulement, ils ont été conçus dans un autre monde ! (Mme Catherine Tasca opine.) Comment ne pas tenir compte de la révolution numérique et de l’ouverture d’un certain nombre d’acteurs émergents ? Hier, nous recevions cinq ou six chaînes de télévision par l’antenne râteau. Avec la télévision numérique terrestre, on a multiplié le nombre de ces chaînes par trois ou quatre ! À l’époque, il n’y avait ni Netflix ni YouTube, et pas plus d’internet !
Mes chers collègues, je l’affirme devant vous : si nous n’adaptons pas la réglementation à ces évolutions, nous tarirons la source même du financement des producteurs privés. Or nous ne le voulons pas !
D’ailleurs, Mme Tasca – je pense qu’elle nous le dira elle-même dans quelques instants – considérait à l’époque que « c’[était] le maintien du statu quo qui [devenait] périlleux ».
M. David Assouline. Le règlement !
M. Bruno Retailleau. Attendez, monsieur Assouline, je parle beaucoup moins que vous, vraiment beaucoup moins, croyez-moi ! (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
J’en termine : entre les propositions des uns et des autres, nous finirons par trouver la voie d’une négociation et de l’équilibre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Élisabeth Doineau applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.
Mme Catherine Tasca. Mes chers collègues, vous comprendrez que j’aie une certaine envie sinon une légitimité pour intervenir dans ce débat. J’ai toujours considéré que l’équilibre ou, mieux, la dynamique que nous avions créée avec les décrets dits « Tasca » avait été extrêmement fructueuse.
Je continue du reste à considérer que ce fut une bonne chose. En effet, alors qu’il existait beaucoup de problèmes liés au manque de diversité des productions à l’époque où celles-ci étaient intégrées, ces décrets ont favorisé la naissance d’un vivier considérable de productions.
Nous avons donc franchi une étape avec ces décrets. Néanmoins, cela fait des années – je dis bien des années et non quelques mois – que je considère qu’il faut bouger, puisque le contexte n’a plus grand-chose à voir, comme vous venez de le rappeler très justement, avec ce qu’il était au moment où nous avons établi ces règles.
Je le répète : je suis très attachée à l’existence d’une production indépendante qui représente une part importante de la production globale des diffuseurs ! Toutefois, la situation actuelle bloque le développement d’ensemble du secteur audiovisuel et de la production audiovisuelle. Il faut donc bouger !
Pour en revenir à votre principale objection, madame la ministre, à savoir que cet article n’a pas sa place dans le texte, parce que ses dispositions relèvent d’un décret, je reconnais que vous avez raison. D’ailleurs, nous avions agi par décret à l’époque.
Néanmoins, j’attire votre attention sur le fait qu’il y a vraiment urgence. Depuis des années, les concertations ne débouchent sur aucun résultat. Il faut absolument faire entendre aux différents partenaires que les négociations doivent aboutir. Le Parlement joue en cela son rôle de lanceur d’alerte, oserai-je dire !
Nous verrons si cette part sera finalement fixée à 30 %, 40 % ou 60 %. Quoi qu’il en soit, il fallait qu’ici, au Sénat, nous posions le problème, ce qu’ont fait nos collègues en défendant leurs amendements. À défaut d’une telle démarche, madame la ministre, vous risquez dans un an d’être toujours confrontée à ce face-à-face absolument infructueux.
C’est la raison pour laquelle nous tenons à ce que la question soit évoquée dans le cadre de l’examen de ce texte, tout en sachant que ces dispositions doivent naturellement aboutir à l’élaboration de décrets par le Gouvernement, après qu’il aura recueilli l’accord de la profession, voire sans un tel accord si celui-ci se révèle impossible à obtenir. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains. – Mme Corinne Bouchoux et M. Claude Kern applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Madame Tasca, vous l’avez dit vous-même : la concertation ne débouche sur rien ! D’une certaine façon, le système s’est enkysté. C’est donc bien entendu à nous qu’il revient de faire en sorte que les choses se débloquent.
Nous n’en sommes pas à notre première tentative.
M. Bruno Retailleau. C’est vrai !
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. J’évoquais déjà la question du déséquilibre du système et des nécessaires réponses qu’il fallait y apporter dans un rapport que j’ai commis en 2011 sur le financement de l’audiovisuel public. C’était il y a cinq ans déjà !
Je crois que le Sénat, qui est le fer de lance de la réflexion notamment dans le domaine de l’audiovisuel, se doit également d’être aujourd’hui au rendez-vous sur le sujet. Mes chers collègues, souvenez-vous qu’en 2009 c’est grâce au Sénat que nous avons réindexé et réévalué la contribution à l’audiovisuel public,…
M. Jacques Legendre. Oui !
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. … c’est-à-dire l’ex-redevance. C’est aussi au Sénat que nous avons traité de la question de la chaîne Numéro 23 ou de la spéculation sur les fréquences octroyées gratuitement aux opérateurs, afin d’éviter que ne se produisent des reventes pas très morales. C’est au Sénat que ce travail est mené. Par conséquent, il me semble que c’est au Sénat que nous devons lancer le débat sur la question de la production audiovisuelle.
Je rejoins les propos des uns et les autres : le monde a profondément changé. L’accélération des évolutions, à laquelle il faudra apporter des réponses, se fait à un rythme phénoménal. Or c’est précisément parce que nous sommes attachés à la diversité et la qualité de la production française indépendante que nous voulons trouver les moyens pour que celle-ci continue à vivre et à se développer. Nous souhaitons qu’elle y parvienne notamment grâce aux diffuseurs, puisque nous savons que les diffuseurs doivent investir dans la création et avoir recours à la production indépendante.
Comme l’a dit M. le rapporteur, il s’agit d’un point de départ et non d’un point d’arrivée. Mes chers collègues, donnons-nous les moyens d’aboutir à un texte qui sera très équilibré dans le cadre de la navette. Il me semble en effet important d’engager le débat avec nos collègues députés sur cette question. En tout état de cause, je pense que c’est à l’honneur du Sénat de contribuer à faire avancer les choses !
M. Jacques Legendre. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Je fais crédit aux uns et aux autres de souhaiter réellement, tout comme moi, que le secteur puisse continuer à se développer dans un environnement qui a radicalement changé depuis que les décrets qui régulaient le secteur ont été pris.
Cela étant, comme je l’ai dit tout à l’heure, je privilégie une méthode. Depuis que je suis à la tête de ce ministère, depuis dix-huit mois donc, j’ai su obtenir des résultats par la concertation. C’est le cas dans le secteur du livre où nous sommes parvenus à un accord sur l’édition numérique qui était pourtant l’objet de négociations depuis de très nombreuses années. C’est également le cas avec l’accord historique conclu dans la musique sur le partage de la valeur dans l’univers numérique, accord qui est scruté par les observateurs étrangers, parce qu’il n’a pas d’équivalent dans le monde pour le moment. Enfin, j’ai obtenu des résultats sur la transparence en matière audiovisuelle.
Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi donc d’avoir l’immodestie de penser que parvenir à de tels résultats en quelques mois n’est finalement pas si mal. Il me semble que cela prouve bien qu’on obtient des résultats lorsque l’on met les gens autour de la même table avec une saine pression ou en tout cas sous le regard insistant du Gouvernement.
Pierre Laurent a très bien résumé la situation : l’enfer peut être pavé de bonnes intentions ! Le problème de votre démarche – que je comprends bien –, c’est que vous souhaitez faire évoluer la réglementation, alors que votre texte risque en réalité de fragiliser considérablement la négociation.
J’en veux pour preuve que l’accord passé entre France Télévisions et les producteurs indépendants – que vous citez tous comme un accord de référence qui a permis de faire progresser les choses en accroissant la part de production indépendante au sein des engagements de France Télévisions – serait complètement remis en cause par la disposition que vous proposez. En effet, l’accord augmente cette part à 25 % – on serait bien en deçà de ce que vous suggérez.
M. Bruno Retailleau. De 5 % à 25 % !
Mme Fleur Pellerin, ministre. Effectivement. Vous voyez donc bien l’écart pour aller jusqu’à 40 % ! Si la disposition que vous proposez devait se matérialiser, elle poserait un vrai problème à France Télévisions. En effet, elle verrait anéantie, foulée aux pieds, toute sa négociation avec les producteurs indépendants, qui recueille aujourd'hui une satisfaction générale !
Je comprends bien votre insistance et votre empressement, mais je crois honnêtement qu’une telle disposition mettrait considérablement en danger le climat dans lequel la négociation doit avoir lieu.
Votre proposition risque d’être totalement contre-productive. Je vous engage donc vivement à laisser se dérouler ces négociations sous la saine pression que le Gouvernement y mettra – j’en prends l’engagement devant vous.
Je considère qu’il est certes normal que la Haute Assemblée se saisisse de cette question tout à fait importante, mais la méthode me semble inutilement brutale et monolithique, alors que les situations des chaînes privées entre elles et des chaînes privées et de la chaîne publique sont radicalement différentes.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 328 et 438 rectifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 146 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Pour l’adoption | 129 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 102 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 3 et 5
Remplacer le pourcentage :
60 %
par le pourcentage :
66 %
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Nous poursuivons le débat. Nous nous accordons pour trouver légitime d’aider à faire bouger des lignes qui sont restées trop statiques même s’il faut reconnaître que l’accord passé par France Télévisions pour faire passer les parts de la production indépendante à 25 % est déjà un pas significatif, c’est même un bond !
J’ai cru comprendre, monsieur le rapporteur, que vous considérez comme un bon point de départ mon amendement. Je suis dans le même état d’esprit que la commission, je n’attends pas que les négociations fassent tout parce qu’elles sont trop lentes, mais je ne vais pas aussi loin que la commission.
J’ai proposé de monter à 34 %, un taux qui se situe entre les 25 % actuellement inscrits dans de la loi et les 40 % que vous proposez, pour éviter d’assister à ce que M. Pierre Laurent a très bien décrit. Je ne veux pas une montée brutale au terme de laquelle l’ensemble du secteur serait déstabilisé au détriment de France Télévisions. Elle a passé un accord à 25 %, elle n’est, de toute façon, pas du tout en capacité de monter à 40 %, mais les grands groupes privés peuvent le faire et il y aurait un véritable déséquilibre. C’est cela qu’il faut aujourd'hui modérer en encourageant à bouger.
Je le dis, les producteurs ont leur part de responsabilité dans ce qui est en train de se passer parce qu’ils sont restés trop immobiles.
Les éditeurs n’ont pas toutes les vertus. En effet, eux, quand ils viennent vous voir, monsieur Retailleau ou monsieur Leleux…
M. Bruno Retailleau. Parce que vous, vous ne les voyez jamais ?
M. David Assouline. Bien sûr ! Sauf que quand nous, nous recevons des producteurs et éditeurs dont les intérêts peuvent être contradictoires notamment par rapport aux parts, nous essayons de les écouter, de voir quels sont leurs impératifs, de rapprocher les points de vue, tout en restant dans l’intérêt général.
M. Bruno Retailleau. Comme nous !
M. David Assouline. Je propose, dans le sens de M. Leleux, de relever le taux, mais pas trop brutalement, pas à 40 %, pour que les choses soient amortissables et que la négociation permette d’avancer.
Mme Catherine Tasca. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je trouve ce débat extrêmement intéressant et pense qu’il sera véritablement utile.
Je salue la démarche de M. Assouline, qui se situe dans le prolongement des interventions et discussions que nous avons eues. Je me suis entretenu à deux ou trois reprises avec Mme Tasca – sans doute un peu rapidement – pour lui « tâter le pouls ». Il faut lui rendre hommage pour avoir pris ces décrets voilà quelques années dans un contexte complètement différent – comme l’a dit M. Retailleau. Le monde a changé.
Je vois que sur ces travées, nous sommes au fond tous d’accord pour faire évoluer les choses. Je prends acte de ce qu’a dit Mme la ministre, qui préfère la négociation et les accords. Nous aussi ! Encore faut-il qu’ils avancent.
Je prends acte des propositions faites. Je vous suggère d’en rester en l’état. Je l’ai dit, le taux est sans doute un peu fort, et celui qui sera proposé dans l’amendement suivant le sera peut-être aussi. Mais il faut partir d’un point et arriver à un autre.
Je maintiens ma position. J’aimerais bien entendre ce que diront les députés lors du débat à l’Assemblée nationale. Entre-temps, nous allons continuer à discuter avec le monde de la production et le monde de la diffusion pour essayer de trouver le point d’équilibre et sceller, si possible, le bon accord qui nous évitera d’intervenir sur le plan législatif.
Je maintiens mon avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. L’avis est défavorable, pour les raisons évoquées tout à l’heure : même à 66 %, on se retrouverait bien au-delà de ce qui est envisageable pour France Télévisions ! On ne peut pas tout à la fois dire qu’on privilégie les accords interprofessionnels et s’asseoir dessus une fois qu’ils ont été signés au motif qu’ils ne devraient pas être ainsi !
Même si je trouve très intéressant d’avoir ensemble ce débat de fond, même si je souhaite moi aussi qu’il se prolonge devant les députés, je vous annonce que je demanderai le rejet de cet amendement à l’Assemblée nationale. En effet, je crois que ce n’est pas la bonne façon de procéder, que ce n’est pas la bonne manière de parvenir à un résultat. Or nous sommes tous d’accord sur le fait qu’il faut aboutir à un résultat. Je m’y engage personnellement, comme je l’ai fait dans d’autres secteurs.
Je reste, pour ma part, attachée à des accords interprofessionnels. Je ne me contente pas de le dire sans le faire. Je le dis et je suis dans l’action, en accord avec ce que je dis et avec mes convictions.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 102 rectifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 147 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 298 |
Pour l’adoption | 110 |
Contre | 188 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 10 quinquies.
(L'article 10 quinquies est adopté.)
Article 10 sexies (nouveau)
Au 2° de l’article 28 de la même loi, les mots : « , s’agissant notamment de la durée des droits » sont supprimés.
Mme la présidente. L'amendement n° 330, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Le présent amendement a pour objet de supprimer l’article 10 sexies, lequel supprime la fixation par le Conseil supérieur de l’audiovisuel de la durée des droits acquis par les éditeurs de services auprès des producteurs audiovisuels au sein des conventions qu’il conclut avec ces derniers.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer, ces dispositions déséquilibreraient et fragiliseraient les relations entre producteurs et diffuseurs, qui sont fondées sur la conclusion d’accords professionnels, en supprimant le mécanisme de fixation de la durée des droits par le CSA.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. L’adoption de cet amendement de suppression remettrait en cause l’objet de l’article 10 octies qui est d’adopter une nouvelle définition de l’indépendance.
La commission anticipe donc et, par coordination, émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 sexies.
(L'article 10 sexies est adopté.)
Article 10 septies (nouveau)
L’article 33 de la même loi est ainsi modifié :
1° La première phrase du 6° est ainsi modifiée :
a) Le mot : « du dernier » est remplacé par les mots : « de l’avant-dernier » ;
b) Après les mots : « d’œuvres cinématographiques et », sont insérés les mots : « , pour 60 % indépendante à leur égard, d’œuvres » ;
2° La première phrase du 7° est supprimée.
Mme la présidente. L'amendement n° 331, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Les mêmes raisons que celles que j’ai développées à l’amendement n° 328 prévalent. Cet amendement est donc défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Pour les mêmes raisons également, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 103 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer le pourcentage :
60 %
par le pourcentage :
66 %
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement tend à appliquer aux éditeurs de chaînes qui n’utilisent pas le réseau hertzien la même obligation de contributeurs, laquelle s’élève à hauteur de 66 % dans la production indépendante. Les arguments que j’ai développés tout à l’heure concernant les éditeurs de chaînes hertziennes sont valables pour le câble et tous les réseaux de communications électroniques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Par coordination avec l’avis rendu à l’amendement n° 102 rectifié, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Assouline, l'amendement n° 103 rectifié est-il maintenu ?
M. David Assouline. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 septies.
(L'article 10 septies est adopté.)
Article 10 octies (nouveau)
Le premier alinéa de l’article 71–1 de la même loi, est ainsi modifié :
1° Les mots : « de la part détenue, directement ou indirectement, » sont remplacés par les mots : « , du contrôle au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, direct ou indirect, » ;
2° Le mots : « au capital » sont supprimés.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 243 est présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 332 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Laurent, pour présenter l’amendement n° 243.
M. Pierre Laurent. Je l’ai déjà évoqué tout à l’heure, cet article tend à la concentration accélérée, dans des conditions qui mettent en danger la production indépendante. Il s’agit d’ailleurs d’articles convergents alimentant le même dispositif de concentration. C’est la raison pour laquelle nous en demandons la suppression.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 332.
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement vise à supprimer l’article 10 octies qui prévoit que le critère d’indépendance des producteurs s’apprécie en fonction de l’absence de contrôle au sens du code de commerce du producteur par l’éditeur.
Outre que cet article n’a pas sa place dans le projet de loi, passer de 15 %, comme c’est le cas aujourd’hui, à une notion de contrôle au sens du code de commerce provoquerait un bouleversement structurel majeur qui n’a pas été analysé et qui n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact. En toute hypothèse, ce débat me semble devoir avoir lieu dans le cadre des négociations au sein de la filière avant d’être repris par le pouvoir réglementaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques de suppression, car, au regard de la situation, elle souhaite maintenir le niveau qu’elle a fixé.
La question de la redéfinition de l’indépendance se pose. Elle doit être traitée de façon urgente pour préserver cette capacité, cette exception culturelle et un ancrage français de producteurs en nombre suffisant et assez puissants.
Le législateur est parfaitement légitime pour se saisir de cette problématique, même si la priorité doit être donnée à la négociation. Celle-ci a besoin d’être vivifiée, comme cela a été le cas pour l’accord entre France Télévisions et les producteurs. La navette parlementaire devrait permettre de prolonger les échanges avec les producteurs et diffuseurs afin d’ajuster au besoin la rédaction de cet article.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 243 et 332.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 104 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Après les mots : « services à la production indépendante », la fin du premier alinéa de l’article 71–1 de la même loi est ainsi rédigée : « indépendante. L’éditeur de services ou le ou les actionnaires le contrôlant au sens du 2° de l'article 41–3 ne peuvent détenir directement ou indirectement plus de la minorité de blocage au capital de l’entreprise qui produit l’œuvre, au sens du code de commerce. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Je ne pensais pas que l’on mettrait sur le même plan ce débat avec celui que nous venons d’avoir. Même si, pour le rapporteur, ce qu’il propose répond à une logique, on parvient à un excès qu’on ne trouvait pas même dans le rapport Plancade. D’aucuns ont proposé un seuil de 40 % de parts de coproduction. Pour ma part, j’ai proposé celui de 33 %, parce que je trouvais cette augmentation trop brutale, puisque le seuil est aujourd'hui fixé à 25 % et que certains professionnels n’y sont pas encore.
Avec cet article, la commission définit de façon complètement différente ce qu’est une production indépendante. Et, du décret du 2 juillet 2010 où l’on considère que l’éditeur de services ou la ou les personnes le contrôlant ne détiennent pas directement ou indirectement plus de 15 % du capital social, on passe à la majorité au sens du code de commerce.
Je n’ai pas besoin d’étude d’impact pour vous dire que, dans la mesure où toute la production indépendante est organisée sur la base des 15 %, si cet article reste en l’état, il n’y a plus de producteurs indépendants ! C’est la mort de la production indépendante dans notre pays.
Certes, on comprend bien que vous vouliez envoyer des signes pour que cela évolue, mais ce qui est excessif devient parfois inopérant pour faire bouger une ligne. Dans le secteur de l’audiovisuel en effet, votre proposition est telle qu’elle ne pourra pas ne pas tuer toute la production indépendante, au point que personne ne l’examinera sérieusement et on reviendra sans doute en arrière, alors que nous voulons faire avancer les choses.
Dans ces conditions, pourquoi ne pas parler plutôt de minorité de blocage ? C’est cela qui est constitutif de l’indépendance. Au sens du code de commerce, cela signifie détenir entre 30 % et 32 % d’une société. Avec ce niveau, il reste une production indépendante. Certes, il y aura des modifications, mais ce sera opérant.
Je sais que, sur le fond, nous sommes plutôt d’accord, monsieur le rapporteur. Vous avez choisi la stratégie qui consiste à demander le maximum. Quand le texte sera de nouveau examiné au Sénat, on se rabattra peut-être sur une position de compromis, mais, cette mesure étant tellement excessive, j’ai peur que les producteurs ne se braquent, que l’Assemblée nationale, sans même l’examiner (M. Claude Kern s’exclame.), ne la biffe d’un trait et que nous ayons ensuite à reprendre le débat de zéro. (M. Claude Kern s’exclame de nouveau.)
Mme la présidente. L'amendement n° 209 rectifié, présenté par MM. Bonnecarrère, Capo-Canellas, Laurey, Cadic et Cigolotti, Mme Goy-Chavent et MM. Guerriau et Gabouty, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le premier alinéa de l’article 71-1 de la même loi est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette part ne peut être inférieure à 33 % dudit capital. »
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.
M. Philippe Bonnecarrère. Monsieur le rapporteur, lors de la discussion générale, j’ai indiqué avoir compris votre souci de prendre en compte ce que vous considériez comme la fragilité économique de la filière et les risques sous-jacents pour les grands acteurs économiques du monde des médias – c’est ainsi que j’ai compris vos dernières interventions – par rapport à de puissants concurrents internationaux. Je respecte votre approche consistant à augmenter la capacité de la profession à s’organiser par filière et je ne vois pas forcément le mal dans ce cadre, même si nous comprenons bien que cela représente des changements importants.
Je ne suis pas du tout intervenu dans le débat sur le niveau de production indépendante. En revanche, à partir du moment où chacun admet qu’il est nécessaire de garder une production indépendante dans ce pays, le juriste que je suis se pose la question de ce qu’est l’indépendance. Le code de commerce n’en donne pas de définition.
Il m’a été permis de constater en commission que les choses allaient un peu trop loin, car le I de l’article L. 233–3 du code de commerce définit ce qu’est une filiale. Si je détiens plus de 49,9 % d’une société, étant majoritaire, celle-ci m’appartient. La question de l’indépendance ne se pose pas. A contrario se pose celle du niveau de l’indépendance. Pour ma part, je propose le seuil de 33,3 %. Je précise à David Assouline qu’il ne trouvera pas l’expression « minorité de blocage » dans le code de commerce ; c'est la raison pour laquelle je n’avais pas d’autre solution que de préciser ce pourcentage. Chacun comprend bien pourquoi. À partir du moment où j’ai la possibilité de m’opposer à l’augmentation de capital d’une entreprise économique parce que j’en détiens plus de 33,3 %, j’ai les moyens de ne pas permettre à celle-ci de se développer. Elle n’est donc pas indépendante.
Par ailleurs, chacun le sait, il faut prendre en compte un aspect fiscal. La consolidation fiscale est possible à partir de 34 %.
Il me semble donc que la définition retenue va un peu trop loin. C'est la raison pour laquelle je vous fais cette proposition.
J’indique dès à présent à M. le rapporteur que, s’il me demandait de retirer cet amendement, au profit d’une négociation au cours de la navette, je ne ferais bien entendu aucune difficulté, mais j’aurai marqué mon désaccord sur la définition de l’indépendance.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il va de soi, pour répondre aussi bien à M. Assouline qu’à M. Bonnecarrère, que je me pose la question du bon niveau garantissant l’indépendance. Un équilibre devra être trouvé et il faudra probablement accepter un taux inférieur – un taux supérieur ne sera pas possible ! (Sourires.)
On revient à une notion bien compréhensible, propre aux juridictions commerciales, mais, je le sais, le domaine n’est pas totalement le même.
Il sera quand même intéressant de voir ce que fera l’Assemblée nationale et comment le texte va nous revenir.
M. David Assouline. Tout cela sera nettoyé !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Probablement, mais je pense aussi que les députés seront sensibles à la nécessité de faire évoluer les choses, en tout cas je le souhaite. Je pense que le débat à l’Assemblée nationale sera aussi riche que le nôtre ici, même s’il est en effet possible que cet article soit rejeté à la demande du Gouvernement. En attendant que le texte nous revienne, nous allons continuer de travailler et d’écouter.
Vous savez, si nous n’avions pas déposé cet amendement, nous ne parlerions même pas de ce sujet. Il y aurait des négociations, dont on nous dirait dans deux ans qu’elles sont en cours, et rien ne se serait passé.
Aujourd'hui, je préfère en rester là et attendre de voir comment le débat va évoluer, tout en continuant la concertation.
Je prie donc nos collègues de bien vouloir retirer leurs amendements, s’ils veulent bien adopter cet axe de travail et attendre le débat sur ce sujet de nos collègues députés ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. L’inverse est aussi possible, monsieur le rapporteur : vous pourriez retirer cet article au profit d’une proposition plus modérée.
Jusqu’à présent, notre force, pour essayer de débloquer la situation, était de parler aux producteurs et aux chaînes. C’est en tout cas ce que j’ai fait dans toutes les enceintes où ils étaient réunis, tant pis si nous nous faisions siffler par une partie de la salle. Nous leur disions qu’il fallait qu’ils cèdent des parts de coproduction aux éditeurs, qui en ont besoin aujourd'hui. Nous ne sommes plus dans le même contexte qu’à l’époque où les accords ont été signés. En contrepartie, nous demandions aux éditeurs de s’engager à faire circuler les œuvres, à ne pas les bloquer, car ce que veut d’abord un auteur, c’est être vu. Dans ce pacte donnant-donnant, gagnant-gagnant, nous ne prenions pas parti. Nous faisions en sorte que l’ensemble progresse.
Monsieur le rapporteur, je constate que, sur ce sujet, comme sur d’autres, notamment le cloud, vous nous parlez des industries, des grands groupes et des grandes chaînes éditeurs, en oubliant les auteurs et les petites boîtes de production. Vous n’êtes le porte-parole que d’un seul côté !
Pour ma part, je discute avec tous les patrons des grands groupes, et je suis attentif à leur problématique. J’écoute également ceux qui travaillent avec eux, toute la chaîne. À la fin, j’essaie de voir où se situe l’intérêt général. Et on y parvient souvent.
Ce n’est pas bien de faire comme si les propositions des patrons n’avaient que des vertus, comme si les patrons ne pensaient pas d’abord à leurs propres intérêts, au détriment de ceux de tous les autres. Le résultat est qu’une partie des négociateurs ne nous écoutent plus, car ils pensent que nous écoutons davantage un camp. Nous ne sommes alors plus crédibles lorsque nous disons que nous défendons l’intérêt général. Je le dis parce qu’il y a des excès.
Nous avons tenté de rapprocher les points de vue. Quant à vous, vous avez fait des propositions qui pourraient conduire à la fin de la production indépendante. C’est vécu comme quelque chose de trop partisan.
Mme la présidente. Monsieur Bonnecarrère, l'amendement n° 209 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Bonnecarrère. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 209 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 10 octies.
(L'article 10 octies est adopté.)
Chapitre II bis
Soutien à la création artistique
(Division et intitulé nouveaux)
Article 10 nonies (nouveau)
L’article L. 123–7 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du présent article et par exception au principe d’inaliénabilité prévu à l’article L. 122-8, l’auteur mentionné au même article L. 122-8 peut transmettre par legs, en l’absence d’héritiers réservataires, son droit de suite aux musées de France ou aux fondations et associations reconnues d’utilité publique ayant un caractère culturel ou concourant à la mise en œuvre du patrimoine artistique. La durée mentionnée au premier alinéa du présent article s’applique dans les mêmes conditions. »
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 32 rectifié bis est présenté par MM. Kern, Cigolotti, Guerriau et Détraigne, Mme Joissains, M. Bonnecarrère, Mme Loisier et MM. Namy, Roche, Marseille, Gabouty, Luche et Longeot.
L'amendement n° 105 rectifié est présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 296 rectifié est présenté par Mmes Lopez et Duchêne, MM. J.P. Fournier, Laufoaulu et Milon, Mme Di Folco, M. Laménie, Mme Deromedi et MM. Longuet, Charon, Falco et Chasseing.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Ces dispositions sont immédiatement applicables aux ventes à venir, y compris celles portant sur des œuvres dont les droits d’auteur auraient été légués, au décès de l’auteur et avant l’entrée en vigueur de la présente loi, à des fondations et associations reconnues d’utilité publique.
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 32 rectifié bis.
M. Claude Kern. La disposition prévue à l’article 10 nonies du projet de loi, que j’ai soutenue en commission, est l’un des apports majeurs de notre rapporteur. Si cette mesure peut paraître technique, elle revêt une importance toute particulière pour la préservation de notre patrimoine national puisqu’elle permettra à un auteur de léguer son droit de suite à un musée, une fondation ou toute association reconnue d’utilité publique en charge de ses œuvres et de leur rayonnement.
La portée de cette avancée est néanmoins limitée, car la rédaction adoptée en commission ne permet pas de s’assurer que les fondations et musées existants pourront effectivement bénéficier de la disposition ouvrant la possibilité pour les auteurs de leur léguer leur droit de suite.
Le présent amendement tend donc à prévoir l’applicabilité immédiate à toutes les ventes à venir, y compris celles qui portent sur des œuvres dont les droits d’auteur auraient été légués, au décès de l’auteur et avant l’entrée en vigueur de la présente loi, à des fondations et associations reconnues d’utilité publique. Ce complément me semble essentiel afin qu’il n’y ait pas de différenciation arbitraire entre les fondations en fonction de la date de leur création.
Néanmoins, j’entends les arguments qui m’ont été avancés sur le respect du principe essentiel de non-rétroactivité de la loi.
Aussi, je tiens à saluer la nouvelle proposition de notre rapporteur, qui fait l’objet de l’amendement n° 495 que nous examinerons dans quelques instants. Cette proposition me semble assurer l’équilibre entre la préoccupation liée au financement des fondations et le respect du droit.
Pour gagner du temps, madame la présidente, je retire donc mon amendement au profit de celui de M. le rapporteur.
Mme la présidente. L’amendement n° 32 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour présenter l’amendement n° 105 rectifié.
Mme Maryvonne Blondin. Vous avez dit tout à l’heure, madame la ministre, qu’il fallait regarder ce que font les autres États européens. En l’occurrence, la plupart des États ont laissé la possibilité, pour l’auteur, de léguer son droit de suite à la personne de son choix. Les lois européennes et américaines s’assurent ainsi que l’auteur ne puisse, de son vivant, céder ce droit ou y renoncer, mais ne lui imposent pas de restriction dans la disposition pour cause de décès.
Seul le droit français en restreint le bénéfice à ses seuls héritiers légaux, à l’exclusion des légataires. Cette disposition a été introduite dans le droit français en 1957. Le droit de suite peut donc échoir à des personnes qui n’ont que des liens très indirects avec l’auteur défunt, qui peuvent même ne pas le connaître personnellement.
Le dispositif adopté par la commission de la culture procédait d’une bonne intention – résoudre le problème dont je viens de parler –, mais il présentait l’inconvénient de ne pouvoir permettre aux fondations qui promeuvent la mémoire d’artistes aujourd’hui décédés de bénéficier de ce droit de suite puisqu’il fallait que ce droit soit expressément cédé aux fondations par l’artiste. Or l’artiste est décédé.
Nous allons vous entendre présenter votre amendement, monsieur le rapporteur. Nous prendrons ensuite la décision de retirer, ou non, le nôtre.
Mme la présidente. La parole est à Mme Vivette Lopez, pour présenter l’amendement n° 296 rectifié.
Mme Vivette Lopez. L’article 10 nonies introduit par la commission de la culture, de l'éducation et de la communication prévoit de permettre à un auteur de léguer le droit de suite attaché à son œuvre.
S’il s'agit d'une réelle avancée pour la reconnaissance de la volonté de l'auteur et de son droit à transmettre son œuvre à des fondations ou à des musées qui en assureront la préservation, la rédaction proposée n'assure pas l'effectivité du dispositif pour des œuvres qui auraient déjà été léguées. Certes, l'auteur d'une œuvre ne pouvait indiquer jusqu'à présent sa volonté de léguer également son droit de suite puisque la législation ne le permettait pas, mais son geste traduit suffisamment son intention de léguer tous ses droits.
Sur le plan juridique, il faut souligner que la directive 2001/84/CE, transposée par la loi de 2006 relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information, dite loi DADVSI, s'est appliquée à « toutes les œuvres originales […] qui, au 1er janvier 2006, étaient encore protégées », adoptant donc un principe d'application immédiate similaire à celui que tend à instaurer cet amendement.
Par ailleurs, la précision que tend à introduire le présent amendement ne conduirait nullement à remettre en cause des successions déjà réglées puisque le droit de suite ne pourrait s'appliquer qu'à des ventes à venir. L'amendement vise simplement à supprimer une dérogation ajoutée au droit de suite en 1957, qui n'est plus en phase avec les pratiques européennes et internationales actuelles, pour revenir au droit commun de la propriété.
Maintenir le dispositif adopté en l'état reviendrait à priver les fondations déjà existantes de fonds dont elles ont besoin pour exercer la défense de l'œuvre, dont la charge est extrêmement onéreuse.
Mme la présidente. L'amendement n° 495, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le I est également applicable aux musées de France, fondations et associations mentionnés au second alinéa de l’article L. 123–7 du code de la propriété intellectuelle, tel qu’il résulte du présent article, légataires à titre universel ou, en l’absence de tout héritier réservataire, légataires des droits d’auteur, à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, pour les ventes mentionnées à l’article L. 122–8 du même code intervenant à compter de cette même date.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous abordons un sujet à la fois très compliqué sur le plan du droit et très sensible.
Les modifications apportées à l’article L. 123–7 du code de la propriété intellectuelle pour permettre la transmission du droit de suite par legs à un musée ou à une fondation ou association reconnue d’utilité publique sont immédiatement applicables aux successions à venir.
En revanche, une question se pose concernant la possibilité pour les musées de France, fondations et associations légataires des autres droits d’auteur de percevoir le droit de suite en application de cette nouvelle disposition.
Le présent amendement vise à permettre aux musées de France, fondations et associations qui seraient légataires des droits d’auteur sur les œuvres d’artistes décédés depuis moins de soixante-dix ans de pouvoir également percevoir le droit de suite sur les ventes qui pourraient intervenir après l’entrée en vigueur de la présente loi. Telle est la préoccupation des auteurs des amendements identiques qui viennent d’être présentés.
Ne seraient concernés par cette disposition que les musées, fondations et associations pour lesquels la volonté de l’artiste de leur léguer l’ensemble de ses droits d’auteur ne fait aucun doute, soit parce qu’ils sont légataires universels, soit, en l’absence de tout héritier réservataire, parce que l’auteur leur a légué ses autres droits d’auteur – droits moraux et droits patrimoniaux – au titre de la succession.
J’aimerais connaître la position du Gouvernement sur cette demande légitime de l’ensemble des fondations.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, il s’agit là d’un sujet extrêmement délicat sur le plan juridique. Je vous invite donc à la plus grande prudence. Je l’ai déjà fait tout à l’heure concernant la copie privée. Peut-être auriez-vous dû m’écouter davantage…
Nous abordons des sujets qui touchent à des droits garantis par la Constitution. Les différents amendements posant tous le même problème, je vous inviterai, mesdames, messieurs les sénateurs, à les retirer.
L’article 10 nonies introduit par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, sur lequel le Gouvernement avait émis un avis de sagesse, ouvrait la possibilité pour un auteur de léguer le droit de suite attaché à son œuvre.
Les amendements proposés vont beaucoup trop loin parce qu’ils ont tous pour effet de modifier, pour les auteurs dont la succession a déjà été réglée, les actuels bénéficiaires du droit de suite.
Or le droit de suite détenu aujourd'hui par les actuels héritiers légitimes est entré dans leur patrimoine à la date de la liquidation de la succession.
Donc, en portant atteinte au droit des héritiers pour des successions déjà réglées, ces amendements constituent une forme d’expropriation à portée rétroactive.
Faute de justifications suffisantes et d’indemnisations, ces dispositions doivent être regardées comme contraires à la Constitution.
Pour toutes ces raisons, il me paraît extrêmement dangereux de légiférer dans ces conditions et je ne peux qu’être défavorable à ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Madame la ministre, l’adoption de ces amendements conduirait, dites-vous, à une forme d’expropriation à l’égard des héritiers actuels qui ont déjà bénéficié de la succession, ce qui est effectivement assez grave. Cela signifie que la rédaction que nous proposons n’est pas encore suffisamment aboutie. On ne peut pas, aujourd'hui, cette mesure ayant nécessairement un effet rétroactif, récupérer ce que les héritiers, même non réservataires, ont pu acquérir dans le passé. Il y a là un vrai risque, j’en conviens.
Toutefois, j’aimerais qu’un texte puisse être mis au point. Si, comme je m’apprête à le faire, les auteurs des autres amendements acceptaient de les retirer, nous pourrions ensuite, au cours de la navette, soit à l’Assemblée nationale soit ici au Sénat, revenir sur cette question et élaborer un texte plus adapté. Avec votre aide et celle de vos services, madame la ministre, nous pourrions trouver une solution pour les fondations, qui, en France en tout cas, constituent une exception légitime. (Mme la ministre opine.)
Je retire donc mon amendement, en demandant aux auteurs des autres amendements en discussion commune de faire de même.
Mme la présidente. L’amendement n° 495 est retiré.
Madame Blondin, l'amendement n° 105 rectifié est-il maintenu ?
Mme Maryvonne Blondin. J’ai bien entendu votre volonté de poursuivre ce travail, monsieur le rapporteur. J’ose espérer qu’en deuxième lecture nous pourrons disposer d’un texte législativement correct, répondant à notre volonté qu’aucun légataire propre ni aucun ayant droit propre ne soient spoliés, tout en aidant les fondations à assurer le nécessaire devoir de protection des œuvres.
Donc, au regard de la proposition du rapporteur et de ce travail à venir, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 105 rectifié est retiré.
Madame Lopez, l'amendement n° 296 rectifié est-il maintenu ?
Mme Vivette Lopez. Non, je le retire, madame la présidente. Je vais suivre la proposition du rapporteur, mais je serai très attentive à la discussion à venir.
Mme la présidente. L'amendement n° 296 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 10 nonies.
(L'article 10 nonies est adopté.)
Articles additionnels après l'article 10 nonies
Mme la présidente. L'amendement n° 373, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 10 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Néanmoins, ce droit est réputé éteint lorsque l’auteur, ou ses ayants droit, déclare, par une manifestation expresse de volonté à portée générale, renoncer à ce droit pour que son œuvre entre par anticipation dans le domaine public. Cette déclaration est alors irrévocable. Une telle manifestation de volonté ne peut être valablement insérée dans un contrat d’édition tel que défini à l’article L. 132-1 du présent code. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre…
Domaine public
La parole est à Mme Corinne Bouchoux.
Mme Corinne Bouchoux. Cet amendement est issu d’une préconisation du rapport Lescure. Il permet à un créateur, à un auteur, de renoncer, s’il le souhaite, à son droit d’auteur et de placer de son vivant les œuvres qu’il a créées dans le domaine public.
J’insiste bien sur le fait qu’il s’agit d’une possibilité et que ce n’est en aucun cas une obligation. Ainsi, les auteurs qui le souhaitent pourront donner, de leur vivant, leurs œuvres à tous ceux qui ont envie de s’en servir pour en écrire une suite, en faire une parodie ou un film, en tirer une pièce de théâtre, ou toute autre adaptation.
Plusieurs écrivains contemporains souhaitent offrir leurs œuvres à la société, faute d’héritier. Or ils ne le peuvent pas, car notre législation, contrairement au droit anglo-saxon, ne prévoit pas cette possibilité.
Notre amendement vise ainsi à combler cette lacune, dans un nombre restreint de cas.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement, qui tend à revenir sur l’inaliénabilité du droit moral de l’auteur, pose à ce titre plusieurs difficultés.
D’abord, les textes internationaux et européens qui nous lient imposent une durée minimale de protection, ainsi qu’un droit moral inaliénable.
Ensuite, le déséquilibre du rapport de force dans l’économie de la culture, notamment entre créateurs et diffuseurs de contenus, pourrait conduire à ce qu’une telle possibilité offerte aux auteurs se révèle in fine à leur désavantage.
Enfin, le code de la propriété intellectuelle permet déjà, dans des conditions, bien sûr, strictement encadrées, comme vous l’avez d'ailleurs dit, madame Bouchoux, à un auteur de mettre gratuitement une œuvre à la disposition du public en renonçant à ses droits voisins.
C'est pourquoi, compte tenu de ces trois éléments, je donne un avis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Bouchoux, l’amendement n° 373 est-il maintenu ?
Mme Corinne Bouchoux. Je remercie le rapporteur de l’éclairage qu’il a apporté. J’ai bien entendu ses arguments qui, pour partie, sont intéressants. Après l’inaliénabilité, il faut que soit prévue une disposition s’appliquant systématiquement. Nous maintenons donc cet amendement et nous défendrons les suivants.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 373.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 148 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Pour l’adoption | 27 |
Contre | 298 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 375, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 10 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le a du 3° de l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« a) Les analyses et citations concernant une œuvre protégée au sens des articles L. 112-1 et L. 112-2 du présent code, justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées et effectuées dans la mesure justifiée par le but poursuivi ; ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre…
Domaine public
La parole est à Mme Corinne Bouchoux.
Mme Corinne Bouchoux. Cet amendement a pour objet d’adapter dans le domaine de l’audiovisuel l’exception de courte citation, actuellement réservée au domaine de l’écrit.
La restriction actuelle du champ de cette exception représente une contrainte importante puisqu’elle interdit les citations musicales, graphiques et audiovisuelles.
Bien évidemment, cette possibilité de citation sera toujours subordonnée à certaines conditions cumulatives : l’autorisation préalable en cas de document inédit ; l’utilisation doit être justifiée par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre à laquelle elle est incorporée ; la citation doit comporter la mention claire de la source de l’emprunt ; la citation doit être courte au sens habituel de la jurisprudence ; la citation ne doit pas porter atteinte au droit moral de l’auteur de l’œuvre originale.
J’ajoute que cet amendement traduit les propositions de Valérie-Laure Benabou qui figurent dans le rapport qu’elle a remis au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, le CSPLA, en décembre 2014. Ce rapport a notamment fait suite à la jurisprudence Eva-Maria Painer de la Cour de justice de l’Union européenne qui oblige le droit français à revoir les conditions de cette exception, à la fois dans la loi et dans la jurisprudence afin de se mettre en conformité avec le droit de l’Union, par son application à toutes les œuvres de l’esprit sans distinction.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement vise à assouplir les conditions d’application de l’exception de citation en remplaçant la condition « courte citation » par celle de « citation proportionnée au but poursuivi ». Cette définition nous apparaît trop imprécise et donc potentiellement très large, alors que toute exception aux droits d’auteur se doit d’être parfaitement encadrée.
Pour cette raison, nous y sommes défavorables.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Cet amendement soulève une question extrêmement intéressante, qui est celle de la portée à donner à l’exception de citation à la lumière des nouveaux usages qui sont rendus possibles par le numérique.
Vous nous proposez, madame la sénatrice, de supprimer le critère de la brièveté de la citation pour le remplacer par un critère relatif de proportionnalité.
Or votre amendement n’apporte pas nécessairement la bonne réponse à la question posée, car il ne vise qu’à étendre le champ de l’exception sans bien en maîtriser la portée. Faire disparaître l’exigence que la citation soit courte ou bien prétendre revenir sur les jurisprudences dans le domaine de l’audiovisuel ou de la musique est une entreprise assez périlleuse qui ne peut pas se traiter ainsi et qui ferait naître probablement une nouvelle incertitude juridique.
Cela reviendrait aussi à fragiliser des lignes de partage aujourd'hui très subtilement dessinées, mais qui demeurent très importantes et même cruciales pour l’économie de tous les secteurs culturels comme pour les prérogatives des créateurs.
De plus, au moment où les exceptions aux droits d’auteur sont un sujet très sensible dans le débat européen, je suis assez convaincue qu’il faut éviter de déstabiliser des acteurs et de brouiller notre message.
Je suis défavorable à cet amendement, même si je considère que le débat qu’il ouvre est extrêmement intéressant et stimulant intellectuellement.
Mme la présidente. L’amendement n° 374, présenté par Mmes Blandin, Bouchoux et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 10 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles L. 123-8 et L. 123-9 du code de la propriété intellectuelle sont abrogés.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre…
Domaine public
La parole est à Mme Corinne Bouchoux.
Mme Corinne Bouchoux. Le code de la propriété intellectuelle français prévoit un certain nombre de dérogations qui avaient leur sens au moment où elles ont été imaginées. Il existe notamment des prorogations pour les droits des auteurs morts pour la France ou pour temps de guerre.
Nous considérons que le maintien de ce système complique énormément le calcul des droits d’auteur.
S’il est totalement compréhensible que ces prorogations aient été introduites à l’époque en particulier pour rendre hommage à des auteurs tombés au champ d’honneur, aujourd’hui, ce mécanisme contribue à restreindre la diffusion de leurs œuvres et nuit à leur rayonnement.
Ainsi, depuis le début de l’année, les œuvres de Saint-Exupéry peuvent être librement adaptées au cinéma ou en bande dessinée dans tous les pays du monde, sauf dans celui de Saint-Exupéry ! Au mois de février, la Belgique a pu organiser toute une journée autour de Saint-Exupéry et du Petit Prince, ce que nous, Français, ne pouvons pas faire.
Nous souhaiterions donc, afin que ces auteurs, dont certains sont des héros, et dont beaucoup ont été honorés, puissent bénéficier de la plus large audience possible, revenir sur cette exception, qui devient contre-productive à l’heure de la francophonie, qui désavantage les initiatives prises en France et favorise celles qui naissent ailleurs, une situation qui nous semble totalement ubuesque.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Cet amendement consiste en réalité à supprimer la règle de la prorogation de la durée des droits post mortem pendant une période de guerre, un mécanisme qui allonge la durée de protection d’une œuvre de la durée d’une ou deux guerres mondiales afin de compenser la moindre rentabilité de l’œuvre pendant ces périodes. Ce mécanisme ne s’oppose pas à l’application parallèle du régime spécifique des auteurs morts pour la France, qui vaut par exemple pour Saint-Exupéry.
La question des prorogations de guerre est effectivement source de contentieux et d’injustice, puisque le dispositif varie selon la situation de l’œuvre à la date prévue pour la transposition de la directive du 29 octobre 1993, soit le 1er juillet 1995, et sa nature – musicale, picturale, etc.
Néanmoins, on ne saurait modifier un droit aussi complexe que le droit d’auteur sans étudier plus finement les conséquences économiques d’une telle réforme.
J’aimerais recueillir l’avis du Gouvernement sur cet amendement et, éventuellement, j’émettrai un avis de sagesse, tout en vous invitant, mes chers collègues, à être très précautionneux.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. L’avis est défavorable. Comme M. le rapporteur vient de le rappeler à l’instant, les prorogations de guerre visent à compenser les lourds préjudices subis par les auteurs pendant les hostilités liées à la Première et à la Seconde Guerre mondiale. Le motif d’intérêt général qui fonde ce dispositif me semble suffisamment important pour ne pas le remettre en question aujourd’hui.
Surtout, je tiens à rappeler, pour bien mesurer l’impact de ce dispositif, que le bénéfice de cette protection est aujourd’hui très limité. En effet, depuis un arrêt de la Cour de cassation de 2007, elle ne concerne que les auteurs et compositeurs de musique.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. J’entends bien les différents arguments, y compris les messages d’alerte. Je remercie également M. le rapporteur pour l’avis de sagesse qu’il a émis.
Toutefois, ne s’agirait-il que des auteurs de musique, je ne pense pas qu’on leur rende hommage et qu’on les honore seulement à travers une logique économique. Nous persistons à penser qu’il y a là une symbolique historique qui, si elle avait toute sa portée auparavant, ne se justifie plus aujourd’hui, car elle a pour conséquence de rendre plus tardivement accessibles certaines œuvres.
Nous restons donc favorables à la modification de ce point.
Mme la présidente. L'amendement n° 491, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A. – Après l’article 10 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 1464 L du code général des impôts, il est inséré un article 1464 … ainsi rédigé :
« Art. 1464 … – Les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale dotés d’une fiscalité propre peuvent, par une délibération de portée générale prise dans les conditions prévues à l’article 1639 A bis, accorder une réduction d’impôt aux entreprises assujetties à la cotisation foncière des entreprises au titre de leurs établissements situés sur leur territoire lorsqu’elles ont mené des actions de mécénat sur ces mêmes territoires.
« Sont considérés comme des actions de mécénat au titre du présent article les versements effectués au profit d’œuvres ou d’organismes d’intérêt général ayant un caractère culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine ou à la diffusion de la culture et de la langue françaises, notamment quand ces versements sont faits au bénéfice de fondations ou associations reconnues d’utilité publique.
« La réduction d’impôt est égale à 60 % du montant des versements dans la limite de 2 500 €.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. »
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
B. – En conséquence faire précéder cet article additionnel d’une division et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre …
Soutien au mécénat
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous sortons quelque peu du champ dont nous avons débattu jusqu’à présent, même si cet amendement conserve un lien avec le soutien à la création. Il vise à mettre en place un dispositif que nous avons appelé « le mécénat territorial ».
Il s’agit de mettre en place un dispositif de mécénat culturel sur le territoire, qui permettrait aux entreprises et aux commerçants d’une communauté, d’une métropole ou d’une commune de soutenir l’action d’un organisme associatif reconnu d’intérêt général dans le domaine de la culture, afin de l’aider financièrement. En contrepartie, ils pourraient déduire de leur taxe locale au profit du territoire une partie de ce don de mécénat.
Ce système est comparable au dispositif de mécénat actuel de la loi Aillagon, qui offre aux ménages une possibilité de déductibilité fiscale, et qui fonctionne d’ailleurs très bien.
Ce dispositif, qui serait une source supplémentaire d’alimentation du vivier culturel du territoire, favoriserait une plus grande proximité de connaissance entre les acteurs économiques locaux et les acteurs de la culture locale. La déduction fiscale sur la cotisation foncière des entreprises, impôt local payé soit à la commune, soit à l’EPCI, serait limitée à 60 %, comme dans les dispositifs nationaux, et plafonnée prudemment à 2 500 euros par don.
Ce dispositif original pourrait, dans le cadre d’une réduction des ressources publiques globales, territoriales ou nationales, générer par capillarité davantage de création et de diffusion artistique dans les territoires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Vous proposez à travers cet amendement un dispositif extrêmement intéressant, monsieur le rapporteur.
Je comprends votre souhait de développer le mécénat en ouvrant une nouvelle possibilité de déduction pour les entreprises qui ne peuvent bénéficier du dispositif actuel, compte tenu de leur situation fiscale. J’y suis évidemment très sensible, et c’est pourquoi votre dispositif mérite d’être étudié de manière très approfondie, en concertation avec les collectivités territoriales.
S’agissant de la création d’une dépense fiscale pesant sur le budget des collectivités locales, il faut toujours être prudent, pour des raisons tenant à la nécessaire compensation lorsque c’est l’État qui prend une telle décision.
Évidemment, le Gouvernement ne pourrait envisager la création d’une nouvelle réduction d’impôt sans une évaluation aussi précise que possible de la dépense induite, en raison de la nécessaire compensation de la perte de recettes pour les collectivités territoriales.
J’émets donc un avis défavorable sur votre amendement, mais je suis évidemment favorable à ce que l’on puisse réfléchir aux moyens d’apporter de nouvelles ressources à la culture dans les territoires.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Nous avons débattu de cet amendement en commission, et l’intention de M. Leleux est bien sûr tout à fait louable. Nous partageons son objectif d’essayer de trouver de nouvelles ressources pour le mécénat, a fortiori dans les territoires.
Toutefois, ainsi que je l’ai indiqué, on peut également utiliser d’autres dispositifs, comme les fonds de dotation, qui permettent aux collectivités d’alimenter des fonds avec d’autres partenaires privés.
Ce dispositif ne me semble pas suffisamment abouti, et cela me dérange quelque peu, notamment parce qu’il touche aux finances des collectivités territoriales.
Tout à l’heure, la majorité sénatoriale a poussé des hauts cris sur le « 1 % artistique », prétendant qu’il serait difficile, dans le contexte budgétaire contraint actuel, qui se caractérise par une baisse des dotations des collectivités, de donner de l’argent pour les artistes.
Et là, à travers des dispositions de réduction fiscale pour les entreprises, on toucherait les collectivités territoriales pour faire du mécénat. J’y vois un petit paradoxe, mais, en même temps, je trouve l’intention louable et je demanderai surtout à M. le rapporteur d’améliorer son dispositif.
Nous ne sommes pas favorables, en l’état, à cette proposition, mais nous sommes prêts à poursuivre la réflexion avec lui.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.
M. Claude Kern. Je voudrais également souligner l’originalité de ce dispositif. À travers le mécénat, on favorise la participation des collectivités à la diffusion de la culture.
À l’heure où les collectivités rencontrent des problèmes financiers pour mettre en œuvre cette participation à la diffusion de la culture, c’est l’un des leviers que l’on devrait soutenir. Une déduction fiscale plafonnée à 2 500 euros, ce n’est pas grand-chose, mais cela permet de soutenir le mécénat et de faire participer plus largement les collectivités à la diffusion de la culture.
C’est pourquoi je soutiens cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Je voudrais éclairer le paradoxe que vous avez souligné, madame Robert.
Il y a une différence entre le « 1 % artistique » et le dispositif que je propose. À terme, si le rapport était concluant et si la loi l’entérinait, le « 1 % » deviendrait obligatoire. À l’inverse, le dispositif de mécénat serait établi avec l’accord délibéré de la collectivité. (M. Claude Kern opine.) Celle-ci fera donc librement le choix de s’engager dans ce dispositif et de gérer son budget en conséquence.
Il s’agirait, au fond, de substituer au mode subventionnel une irrigation des territoires par capillarité, en déléguant aux acteurs du territoire une partie de la capacité des collectivités à soutenir la culture.
Par ailleurs, on m’a soutenu que, juridiquement, le gage était nécessaire pour respecter l’article 40 de la Constitution. L’idéal serait toutefois de le lever, car, évidemment, il serait inconcevable que cette « perte fiscale » pour la collectivité soit compensée par une augmentation de la DGF. Je comprendrais que le Gouvernement n’accepte pas cette demande. Notre objectif est de laisser la responsabilité aux collectivités, et l’on pourrait imaginer qu’elles délibèrent une fois par an sur ce sujet.
Le dispositif doit sans doute être peaufiné, j’en conviens, mais le concept me semble extrêmement intéressant. L’expérience mérite d’être tentée, et je pense que l’on en percevrait les effets bénéfiques dans les territoires au bout de deux ou trois ans.
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Si nous ne sommes pas d’accord, c’est parce que le dispositif ne nous semble pas complètement abouti.
Au-delà des problèmes que peut poser le gage, puisque vous souhaitez qu’il ne se traduise pas par une augmentation de la DGF pour l’État, il faudrait au moins un débat, au mieux une étude d’impact sur ce dispositif.
Je crains qu’il n’ait certains effets pervers. Sur un territoire donné, j’imagine que la recherche de mécénat pour des activités culturelles va donner lieu à une concurrence entre communes. Et les acteurs privés pourront choisir les destinataires de leurs dons. Tout cela peut devenir assez malsain. Je n’en suis pas certain, évidemment, mais c’est un risque qu’il faut prendre en compte, car tout le monde n’est pas toujours très vertueux.
Nous souhaitons toutefois continuer à travailler sur l’idée, et nous nous abstiendrons lors du vote sur cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10 nonies.
Chapitre III
Promouvoir la diversité culturelle et élargir l’accès à l’offre culturelle
Article 11 A
Après l’article L. 7121-4 du code du travail, il est inséré un article L. 7121-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 7121–4–1. – I. – Est artiste amateur dans le domaine de la création artistique toute personne qui pratique seule ou en groupe une activité artistique à titre non professionnel et qui n’en tire aucune rémunération.
« L’amateur peut obtenir le remboursement des frais occasionnés par son activité sur présentation de justificatifs.
« II. – Par dérogation à l’article L. 8221-4, la représentation en public d’une œuvre de l’esprit par un amateur ou par un groupement d’amateurs relève d’un cadre non lucratif, y compris lorsque sa réalisation a lieu avec recours à la publicité et à l’utilisation de matériel professionnel.
« La représentation en public d’une œuvre de l’esprit effectuée par un amateur ou par un groupement d’amateurs et organisée dans un cadre non lucratif ne relève pas des articles L. 7121-3 et L. 7121-4.
« Le cadre non lucratif défini au premier alinéa du présent II n’interdit pas la mise en place d’une billetterie payante. La part de la recette attribuée à l’amateur ou au groupement d’amateurs sert à financer leurs activités et, le cas échéant, les frais engagés pour les représentations concernées.
« III. – Sans préjudice de la présomption de salariat prévue aux articles L. 7121-3 et L. 7121-4, les structures de création, de production, de diffusion, d’exploitation de lieux de spectacles mentionnées aux articles L. 7122-1 et L. 7122-2 dont les missions, établies par une convention signée avec une ou plusieurs personnes publiques, prévoient l’accompagnement de la pratique amateur et la valorisation des groupements d’amateurs peuvent faire participer des amateurs et des groupements d’amateurs à des représentations en public d’une œuvre de l’esprit sans être tenues de les rémunérer, dans la limite d’un nombre annuel de représentations défini par voie réglementaire, et dans le cadre d’un accompagnement de la pratique amateur ou d’actions pédagogiques et culturelles.
« La part de la recette des spectacles diffusés dans les conditions prévues au premier alinéa du présent III attribuée à l’amateur ou au groupement d’amateurs sert à financer leurs frais liés aux activités pédagogiques et culturelles et, le cas échéant, leurs frais engagés pour les représentations concernées. »
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, sur l’article.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous en arrivons à l’article 11 A, qui est relatif à la reconnaissance des pratiques artistiques amateurs.
Le Gouvernement a introduit ce nouveau dispositif en première lecture à l’Assemblée nationale. La commission de la culture, de l’éducation et de la communication s’est montrée tout à fait favorable à la reconnaissance de ces pratiques, qui concernent plus de 12 millions de nos concitoyens.
Notre commission s’est montrée également soucieuse de préserver l’emploi des professionnels de la création artistique, en particulier celui des artistes dits de complément, et d’éviter tout effet d’éviction, voire d’uberisation, des professionnels par les amateurs.
Dans l’examen des dispositifs et des amendements qui nous ont été soumis, notre souci a donc été double : d’une part, permettre l’expression et le développement des pratiques amateurs, qui sont une véritable richesse pour notre pays ; d’autre part, préserver les emplois artistiques.
Nous examinerons les amendements sous cet angle et, je le répète, cet article constitue une véritable avancée pour protéger les artistes amateurs des présomptions de salariat.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l’article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’existence même de cet article, introduit en commission à l’Assemblée nationale, doit être saluée. Il constitue la consécration législative du fait que les artistes amateurs ont toute leur place dans la pratique artistique et culturelle, et plus, qu’ils y tiennent un rôle central.
Cet article, tel qu’il est rédigé, comporte des points positifs. Nous saluerons, par exemple, l’ouverture de certains droits aux artistes amateurs, notamment en matière de remboursement de frais occasionnés dans le cadre de l’activité.
Toutefois, notre groupe ne votera pas, en l’état, cet article. La raison en est fort simple : son paragraphe III introduit des dispositions particulièrement dangereuses, et ce sur plusieurs points.
Tout d’abord, il crée une concurrence déloyale entre artistes professionnels et amateurs, conduisant soit à une réduction drastique de l’activité des premiers, soit à des pratiques de dumping social et de course effrénée à la baisse des coûts, nuisant tout autant à la qualité de la prestation qu’aux conditions de vie et de travail des artistes.
Ensuite, il constitue un potentiel effet d’aubaine pour certaines structures et pour des phénomènes de travail dissimulé : les artistes amateurs occupent en effet une activité qui, intrinsèquement, pourrait être occupée par des professionnels.
Nous ne pensons pas que la valorisation des artistes amateurs doive être une excuse pour encourager des pratiques douteuses. Nous pouvons entendre que les structures concernées soient en manque de financements et qu’ainsi le recours gratuit à des artistes amateurs soit la solution qui semble la plus pratique.
Toutefois, cette logique ne sert ni les artistes amateurs, ni les artistes professionnels, ni les structures elles-mêmes. Cette solution ne peut pas être pérenne pour ces dernières.
Pour finir, nous ne pouvons ni nous satisfaire que le nombre de représentations autorisées sous ce régime soit fixé par voie réglementaire, ni accepter les premières propositions que nous avons entendues, à savoir quinze ou trente représentations. Ces dernières, déjà trop nombreuses, semblent trouver leur justification dans la satisfaction de quelques structures privées – il faut le dire –, amassant pourtant d’importants bénéfices.
Mme la présidente. L'amendement n° 106 rectifié, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, M. Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Est artiste amateur dans le domaine de la création artistique toute personne qui pratique seule ou en groupe une activité artistique à titre non professionnel et qui n’en tire aucune rémunération.
L’artiste amateur peut obtenir le remboursement des frais occasionnés par son activité sur présentation de justificatifs.
II. – La représentation en public d’une œuvre de l’esprit effectuée par un artiste amateur ou par un groupement d’artistes amateurs et organisée dans un cadre non lucratif ne relève pas des articles L. 7121-3 et L. 7121-4 du code du travail.
Par dérogation à l’article L. 8221-4 du même code, la représentation en public d’une œuvre de l’esprit par un artiste amateur ou par un groupement d’artistes amateurs relève d’un cadre non lucratif, y compris lorsque sa réalisation a lieu avec recours à la publicité et à l’utilisation de matériel professionnel.
Le cadre non lucratif défini au deuxième alinéa du présent II n’interdit pas la mise en place d’une billetterie payante. La part de la recette attribuée à l’artiste amateur ou au groupement d’artistes amateurs sert à financer leurs activités et, le cas échéant, les frais engagés pour les représentations concernées.
III. – Sans préjudice de la présomption de salariat prévue aux articles L. 7121-3 et L. 7121-4 du code du travail, les structures de création, de production, de diffusion, d’exploitation de lieux de spectacles mentionnées aux articles L. 7122-1 et L. 7122-2 du même code dont les missions prévoient l’accompagnement de la pratique amateur et la valorisation des groupements d’artistes amateurs peuvent faire participer des artistes amateurs et des groupements d’artistes amateurs à des représentations en public d’une œuvre de l’esprit sans être tenues de les rémunérer, dans la limite d’un nombre annuel de représentations défini par voie réglementaire, et dans le cadre d’un accompagnement de la pratique amateur ou d’actions pédagogiques et culturelles.
La part de la recette des spectacles diffusés dans les conditions prévues au premier alinéa du présent III attribuée à l’artiste amateur ou au groupement d’artistes amateurs sert à financer leurs frais liés aux activités pédagogiques et culturelles et, le cas échéant, leurs frais engagés pour les représentations concernées.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Nous abordons effectivement un sujet sensible, sur lequel notre commission a déjà eu l’occasion, dans le passé, de se pencher. J’ai souvenir d’avoir défendu, en 2008 déjà, les pratiques amateurs, à la suite des propositions qui avaient été faites par la ministre Mme Christine Albanel et qui avaient suscité beaucoup d’inquiétudes sur nos territoires. En effet, chacun d’entre nous a connu des expériences de pratiques amateurs et y est pleinement attaché. Elles représentent les expressions culturelles de nos territoires, si riches et si spécifiques.
Après les nombreux échanges qui ont eu lieu en 2008, un équilibre a été recherché, ce qui n’est pas un exercice facile. Ce que vous avez évoqué à l’instant, madame Gonthier-Maurin, a été débattu en 2008 et a finalement été abandonné, parce que, loin de se concurrencer, ces deux pratiques – amateurs et professionnels – se complètent et participent toutes deux à l’essor de notre culture et à la promotion culturelle. Cela correspond d’ailleurs bien à l’intitulé du chapitre III du présent projet de loi : promouvoir la diversité culturelle et élargir l’accès à l’offre culturelle.
Il est vrai que les deux pratiques, qui se situent dans des cercles frontaliers, se fondent parfois, mais cet article, pour lequel je vous propose de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale, ancre les pratiques amateurs dans un texte juridique et leur garantit solidité et sécurité.
Pour autant, commencer à toucher aux droits et devoirs des différentes parties serait compliqué. Nous devons rappeler notre attachement à la présomption de salariat.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Nous avons en effet beaucoup parlé de cette question. Le débat pourrait d’ailleurs durer sans fin, tant la sémantique et l’histoire des mots sont riches et fortes. Il serait impressionnant de rappeler tout ce qui peut être dit et écrit sur le mot « artiste » : l’ensemble de ses dimensions, qu’elles soient esthétiques, de rayonnement ou d’émotion, son évolution dans le temps ou encore ses composantes techniques, puisque – rappelons-le – les artistes étaient d’abord des techniciens manuels. Le mot « artiste » recouvre donc un champ important, que ce soit dans sa dimension substantive ou adjective.
Mme Maryvonne Blondin. Qualificative !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Oui, qualificative, en effet !
On peut être « un » artiste, comme on peut être artiste ! On ne trouvera jamais la clé.
Mme Maryvonne Blondin. Effectivement !
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Il en est de même pour l’amateur, dont on pourrait aussi beaucoup parler.
Au-delà de ces questions d’histoire du mot, qui sont passionnantes dans notre belle et riche langue, nous savons ce que représentent les amateurs et les professionnels. C’est pourquoi nous avons voulu faire en sorte que l’un ne mange pas l’autre, alors qu’ils peuvent mutuellement se nourrir. Une bonne compréhension de leur travail en commun serait extrêmement riche pour la qualité culturelle. (Mme Maryvonne Blondin opine.)
Nous avons donc trouvé, en commission, une formule, sur laquelle revient cet amendement. Notre proposition a sa raison d’être, comme celle de l’amendement. Il nous semble toutefois que notre rédaction précise mieux la différence entre l’amateur et l’artiste professionnel.
C’est pourquoi je suis défavorable à l’amendement, qui revient sur la position adoptée par la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Je suis favorable à l’amendement, qui a été présenté et qui vise à rétablir l’article 11 A dans sa rédaction adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale.
Nous partageons tous la volonté de reconnaissance des artistes amateurs, tout en étant extrêmement attachés à la place des professionnels et à la présomption de salariat.
Pour autant, nous devons veiller à ne pas empêcher la production de certains spectacles et leur rencontre avec le public.
Des choses extraordinaires se font et il ne faudrait pas qu’une vision trop restrictive de la reconnaissance de la pratique amateur nous conduise à exclure des spectacles formidables.
Certains d’entre vous ont peut-être eu l’occasion de voir la troupe éphémère du théâtre Gérard-Philipe à Saint-Denis. Elle a rassemblé beaucoup de jeunes, scolarisés ou non, qui découvraient l’amour du texte et du théâtre ; ils ont travaillé durant un an, puis rencontré le public, encadrés par un metteur en scène et des moyens professionnels.
Je pourrais également citer « Le monstre du labyrinthe », spectacle créé lors du dernier festival d’Aix-en-Provence : il réunissait près de 300 enfants et adultes amateurs, qui participaient à un chœur au côté de grands professionnels de la musique.
Ce sont des expériences magiques, à la fois pour le public et pour les amateurs, qui correspondent bien à la façon dont je souhaite promouvoir la participation de tous à la culture.
Le texte adopté par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication prévoit notamment d’insérer les dispositions de l’article 11 A dans le code du travail.
Cela ne me semble pas de nature à rassurer les professionnels du secteur, car le code du travail régit exclusivement les relations entre employeurs et salariés. Or, au contraire, l’article 11 A définit l’artiste amateur comme exerçant son activité à titre non professionnel et sans en tirer une quelconque rémunération. Ces artistes ne sont donc pas des salariés et il ne serait pas cohérent, d’un point de vue tant symbolique que juridique, d’insérer les dispositions les concernant dans le code du travail.
Pour ces raisons, je le répète, je suis favorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 106 rectifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 149 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Pour l’adoption | 136 |
Contre | 188 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 492, présenté par M. Leleux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer le mot :
artiste
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Le texte de la commission n’a pas été totalement ni parfaitement reproduit. Il s’agit de corriger une erreur matérielle en supprimant le mot « artiste ». Une abstention bien comprise serait bienvenue…
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 244, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 3 et 8
Avant le mot :
amateur
insérer le mot :
artiste
II. – Alinéas 7 (trois fois) et 8
Avant le mot :
amateurs
insérer le mot :
artistes
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Avec cet amendement, nous voulons contredire les choix de M. le rapporteur. Nous souhaitons en effet revenir sur une modification introduite par la commission de la culture du Sénat. Il s’agit de rétablir la mention « artiste amateur ».
Comme souvent, ce qui est présenté comme une simple correction rédactionnelle revêt pour nous un intérêt particulier. Si l’intégration des artistes amateurs dans le code du travail est un sujet sur lequel nous pouvons discuter, leur retirer l’appellation d’artistes au motif qu’elle définirait un métier nous semble à la fois incohérent avec cette intégration dans le code du travail et dévalorisant.
Mme la présidente. L’amendement n° 245, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 7 et 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement est un peu radical, puisqu’il vise à supprimer les alinéas 7 et 8 de l’article 11 A.
Évidemment, nous sommes tout à fait favorables à la valorisation des pratiques amateurs qui fait l’objet de cet article et extrêmement vigilants à l’égard de la présomption de salariat. Cependant, nous pensons que, en l’état, les alinéas 7 et 8 comportent beaucoup trop d’ambiguïtés et n’offrent pas une définition suffisamment claire. Comme l’a dit ma collègue Brigitte Gonthier-Maurin tout à l’heure, ces alinéas pourraient ouvrir la porte à un nombre excessif de représentations, voire à l’utilisation de travail dissimulé.
Ces deux alinéas qui nous sont présentés comme une protection face à la présomption de salariat nous paraissent donc totalement insuffisants. Nous aurions préféré les réécrire, mais nous vous proposons, en l’état, de les supprimer.
Mme la présidente. L’amendement n° 246, présenté par M. Abate, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7
1° Avant le mot :
amateurs
insérer (trois fois) le mot :
artistes
2° Supprimer les mots :
sans être tenues de les rémunérer
3° Après le mot :
réglementaire
insérer les mots :
et ne pouvant dépasser le nombre de douze
II. – Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Lorsque ce spectacle est organisé dans un cadre lucratif, il est réputé acte de commerce. La prestation des artistes amateurs et des groupements d’artistes amateurs relève alors des articles L. 7121-3 et L. 7121-4 du code du travail. Ils reçoivent une rémunération au moins égale au minimum conventionnel du champ concerné. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Cet amendement de repli vise, d’une part, à limiter à douze le nombre de représentations annuelles pouvant faire intervenir gratuitement des artistes amateurs – le sujet a été évoqué en commission – et, d’autre part, à attribuer la qualité d’acte de commerce au spectacle, lorsqu’il est organisé dans un cadre lucratif. Dans un tel cadre, les artistes amateurs relèvent alors des articles L. 7121–3 et L. 7121–4 du code du travail et perçoivent une rémunération au moins égale au minimum conventionnel du champ concerné.
Cette solution de repli est à la fois suffisamment dissuasive pour éviter une mise en concurrence déloyale des professionnels et des amateurs, tout en protégeant ces derniers du travail dissimulé, mais n’hypothèque pas totalement leur possibilité de participer à des spectacles ayant recours à une billetterie payante.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. La commission a tranché il y a déjà deux semaines en préférant l’expression « amateur dans le domaine de la création artistique » plutôt que celle d’« artiste amateur » qui va nécessairement induire une confusion avec les « artistes professionnels ». Je rappelle que le code du travail, comme le code de l’éducation, considère – à mon avis, à tort – qu’être artiste est un métier. Il y va donc de la sécurité juridique des amateurs, mais aussi de la sécurité professionnelle des artistes de métier qui ne doivent pas être concurrencés abusivement par l’emploi d’amateurs en leurs lieux et places.
La position de la commission était une mesure d’équilibre et je souhaite que cet équilibre soit maintenu.
J’émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. Sur l’amendement n° 244, le Gouvernement émet un avis favorable. En effet, sans le mot « artiste », les dispositions de l’article 11 A pourraient être appliquées à d’autres métiers que les métiers artistiques. Je pourrais citer l’exemple de chargés de communication ou de production qui travailleraient dans le domaine de la création artistique.
En outre, ne pas ajouter le mot « artiste » induirait que celui-ci est réservé aux professionnels, ce qui ne correspond pas au message que nous voulons adresser aux artistes amateurs.
L’amendement n° 245 tend à supprimer deux alinéas qui sont essentiels à la valorisation et à la sécurisation de la pratique amateur dans le cadre professionnel, sans toutefois menacer les artistes professionnels ni porter atteinte à la présomption de salariat. Vous le savez, la question des pratiques amateurs, qui concernent plus de 12 millions de nos concitoyens, est un enjeu majeur de politique culturelle. Elle est d’ailleurs depuis longtemps au centre des débats, parce que l’encadrement de ces pratiques n’est plus adapté à leur réalité ni aux enjeux de démocratisation qui s’y attachent.
L’ouverture que nous proposons est strictement encadrée. Ainsi, le projet de loi limite le recours à des amateurs dans le cadre de spectacles professionnels aux entreprises qui exercent des missions d’accompagnement de la pratique amateur ou aux manifestations s’inscrivant dans le cadre de projets d’éducation artistique et culturelle. Par ailleurs, ces spectacles ne seront possibles que pour un nombre annuel de représentations limité et défini par décret. Je m’engage devant vous à ce que ce décret soit prêt au terme de l’examen parlementaire de ce projet de loi, en toute transparence et en concertation avec les parlementaires.
Les dispositions du projet de loi prévoient enfin un encadrement des recettes de billetterie, pour empêcher toute pratique de concurrence déloyale.
Pour l’ensemble de ces raisons, je crois que nous allons parvenir à mettre en place un dispositif sécurisant pour les pratiques amateurs, mais aussi pleinement respectueux des artistes professionnels. Ce sera une étape historique pour notre pays et un pas important pour nos politiques culturelles.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 245.
En ce qui concerne l’amendement n° 246, il vise à limiter le nombre annuel de représentations mêlant des amateurs au spectacle professionnel à un seuil de douze. La fixation de ce seuil est particulièrement sensible, nous le savons tous ici : c’est pourquoi je pense qu’il n’est pas souhaitable de l’inscrire dans la loi, ce qui risquerait de figer des situations. Je privilégie, au contraire, une solution pragmatique qui renvoie à un décret la détermination de ce seuil, comme je l’ai déjà dit.
J’émets donc également un avis défavorable sur l’amendement n° 246.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Madame la présidente, nous maintenons les amendements nos 244 et 246 et nous retirons l’amendement n° 245.
Mme la présidente. L’amendement n° 245 est retiré.
Je vais mettre aux voix l’amendement n° 244, sur lequel je suis saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
M. Pierre Laurent. Je demande la parole.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Madame la présidente, permettez-moi de remarquer que nous enchaînons les scrutins publics parce que nos collègues de la majorité sénatoriale ne sont plus assez nombreux en séance.
Soit on lève la séance à minuit et demi, soit on travaille jusqu’à une heure et demie, mais on ne peut pas multiplier les scrutins publics, cela n’a aucun sens !
Mme la présidente. Je mets donc aux voix l’amendement n° 244.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement…
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 150 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 326 |
Pour l’adoption | 139 |
Contre | 187 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 246.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons examiné 100 amendements au cours de la journée ; il en reste 319.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
8
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 11 février 2016 :
À dix heures trente :
Dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes par M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes.
Projet de loi autorisant la ratification du traité de coopération en matière de défense entre la République française et la République du Mali (n° 483, 2014-2015) ;
Rapport de M. Claude Nougein, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 358, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 359, 2015-2016).
Trois conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifiée :
- Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande concernant le statut des forces en visite et la coopération en matière de défense (n° 340, 2014-2015) ;
Rapport de M. Michel Billout, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 360, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 361, 2015-2016).
- Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Lituanie relatif à la coopération dans le domaine de la défense et de la sécurité (n° 74, 2014-2015) ;
Rapport de M. Jean-Marie Bockel, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 362, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 364, 2015-2016).
- Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Croatie relatif à la coopération dans le domaine de la défense (n° 803, 2013-2014) ;
Rapport de M. Jean-Marie Bockel, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 362, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 363, 2015-2016).
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (n° 15, 2015-2016).
Rapport de M. Jean-Pierre Leleux et Mme Françoise Férat, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 340, tomes I et II, 2015-2016).
Texte de la commission (n° 341, 2015-2016).
À quinze heures : questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures quinze, le soir et la nuit : suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine (n° 15, 2015-2016).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 11 février 2016, à une heure trente.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD