M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Comme M. le rapporteur vient de le signaler, la liste des fonctions visées à l’article 13 de la Constitution est très longue : elle inclut, par exemple, les dirigeants de l’Office national des forêts, de Météo-France ou du Haut Conseil des biotechnologies. Au demeurant, il faudrait peut-être se poser la question du nombre des autorités administratives indépendantes ; mais il n’y a pas lieu de la poser dans le cadre du présent débat.
Permettez-moi de vous rappeler les termes de l’alinéa 5 de cet article, introduit dans la Constitution par la représentation nationale il y a peu de temps : pour certains emplois ou fonctions, « le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée » ; plus précisément, « le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions ».
M. Pierre-Yves Collombat. Vous savez bien que cela ne se produit jamais !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. En d’autres termes, comme l’a souligné M. Bouvard, il est de la responsabilité du Parlement de s’opposer éventuellement à une nomination, s’il juge, à la faveur de ce coup de projecteur, qu’elle est impossible. Ces amendements, mesdames, messieurs les sénateurs, vont donc contre votre responsabilité !
Indépendamment de ce défaut, la liste des fonctions visées à l’article 13 est, je le répète, extrêmement longue – elle inclut aussi, par exemple, le président du directoire de la Compagnie nationale du Rhône –, alors que, à mon avis, les auteurs des amendements n’ont à l’esprit qu’un poste ou deux.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Madame Lienemann, que vous n’ayez pas confiance dans le Parlement, c’est votre droit ! (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.) Je vous rappelle simplement que la procédure prévue à l’article 13, alinéa 5 de la Constitution a été conçue pour répondre à votre préoccupation. Peut-on penser qu’un contrôle à la majorité des trois cinquièmes du Parlement aboutit encore à l’« entre soi » qu’a dénoncé Mme Bouchoux ?
J’ajoute que l’« entre soi » le plus souvent critiqué, c’est celui de la haute fonction publique !
M. Roger Karoutchi. Tout à fait !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Ainsi, parce que l’on est membre de l’inspection générale des finances, on peut devenir responsable des autorités régulatrices, y compris, par exemple, de l’Autorité des normes comptables – encore un organisme qui figure dans la liste. Cet « entre soi » aussi est souvent montré du doigt et considéré comme une source de difficultés !
Il y a là un vrai problème de non-confiance ; j’entends, madame Lienemann, que vous n’avez pas confiance. La présidence de l’Office national des forêts, pour ne prendre que cet exemple, ne peut pas être concernée.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mais si !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Sans doute cette non-confiance devrait-elle trouver sa traduction dans un autre texte. Toujours est-il qu’on ne peut pas maintenant faire un trait sur une cinquantaine d’emplois. Sans compter qu’on ne voit pas au nom de quoi le directeur adjoint d’un établissement ne pourrait plus accéder à la présidence de celui-ci, ce qui se produirait si les amendements étaient adoptés !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce n’est pas vrai !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Madame la sénatrice, si tel n’est pas ce que vous souhaitez, la rédaction de l’amendement n’est pas conforme à votre intention. Je répète que, s’il était adopté, celui des adjoints qui serait destiné à devenir président ou directeur d’une entité devrait au préalable en sortir pendant trois ans.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Non, puisqu’il est déjà au service de l’intérêt général !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je m’arrête là, car ce débat est constitutionnel et il nous reste de nombreux amendements à examiner. S’il y a un problème de non-confiance dans les parlementaires, il faut peut-être revoir d’autres dispositions.
M. le président. La parole est à M. René Vandierendonck, pour explication de vote.
M. René Vandierendonck. Je suis très sensible aux arguments des uns et des autres.
Il est vrai, monsieur Bouvard, que la procédure de contrôle prévue à l’article 13, alinéa 5 de la Constitution a été conçue pour que les parlementaires puissent apprécier les situations.
Monsieur le rapporteur, vous cherchez, une fois encore, un compromis. Permettez-moi de vous faire une proposition : nous pourrions adopter ces amendements, étant entendu que leur rédaction a besoin d’être modifiée d’ici à la commission mixte paritaire.
Pour l’essentiel, en effet, ils correspondent au délai de viduité en matière de veuvage ! (Sourires.) De fait, il est tout de même assez difficile d’admettre que, quelques mois après avoir quitté une entreprise privée, on puisse postuler à un emploi public en se prétendant garant de l’intérêt général. (Mme Corinne Bouchoux acquiesce.) Ce qui ne signifie pas qu’il existe nécessairement une présomption – pater is est quem nuptiae demonstrant… Monsieur le rapporteur, je vous demande d’y réfléchir !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 137 rectifié bis et 159 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Chapitre II
Des cumuls d’activités
Article 6
Après l’article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 25 septies ainsi rédigé :
« Art. 25 septies. – I. – Le fonctionnaire consacre l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut exercer, à titre professionnel, une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit, sous réserve des II à V.
« Il est interdit au fonctionnaire :
« 1° (Supprimé)
« 2° De participer aux organes de direction de sociétés ou d’associations à but lucratif ;
« 3° De donner des consultations, de procéder à des expertises ou de plaider en justice dans les litiges intéressant toute personne publique, le cas échéant devant une juridiction étrangère ou internationale, sauf si cette prestation s’exerce au profit d’une personne publique ne relevant pas du secteur concurrentiel ;
« 4° De prendre ou de détenir, directement ou par personnes interposées, dans une entreprise soumise au contrôle de l’administration à laquelle il appartient ou en relation avec cette dernière, des intérêts de nature à compromettre son indépendance ;
« 5° De cumuler un emploi permanent à temps complet avec un ou plusieurs autres emplois permanents à temps complet.
« II. – Il est dérogé à l’interdiction d’exercer à titre professionnel une activité privée lucrative :
« 1° Lorsque le dirigeant d’une société ou d’une association à but lucratif, lauréat d’un concours ou recruté en qualité d’agent contractuel de droit public, continue à exercer son activité privée pendant une durée d’un an, renouvelable une fois, à compter de son recrutement ;
« 2° Lorsque le fonctionnaire, ou l’agent dont le contrat est soumis au code du travail en application des articles 34 et 35 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, occupe un emploi permanent à temps non complet ou incomplet pour lequel la durée du travail est inférieure ou égale à 70 % de la durée légale ou réglementaire du travail.
« La dérogation fait l’objet d’une déclaration à l’autorité hiérarchique dont l’intéressé relève pour l’exercice de ses fonctions.
« III. – Le fonctionnaire peut être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à créer ou reprendre une entreprise et exercer, à ce titre, une activité privée lucrative. Cette dérogation est ouverte pendant une durée maximale de deux ans, renouvelable pour une durée d’un an, à compter de cette création ou reprise.
« L’autorisation d’accomplir un service à temps partiel, qui ne peut être inférieur au mi-temps, est accordée, sous réserve des nécessités de la continuité et du fonctionnement du service et compte tenu des possibilités d’aménagement de l’organisation du travail.
« Une nouvelle autorisation d’accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise ne peut être accordée moins de trois ans après la fin d’un service à temps partiel pour la création ou la reprise d’une entreprise.
« IV. – Le fonctionnaire peut être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à exercer à titre accessoire une activité, lucrative ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées et n’affecte pas leur exercice.
« V. – La production des œuvres de l’esprit, au sens des articles L. 112-1, L. 112-2 et L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle, s’exerce librement, dans le respect des dispositions relatives au droit d’auteur des agents publics et sous réserve de l’article 26 de la présente loi.
« Les membres du personnel enseignant, technique ou scientifique des établissements d’enseignement et les personnes pratiquant des activités à caractère artistique peuvent exercer les professions libérales qui découlent de la nature de leurs fonctions.
« V bis (nouveau). – La commission mentionnée à l’article 25 octies de la présente loi est obligatoirement saisie des demandes d’autorisation prévues aux deuxième et troisième alinéas du III du présent article.
« L’autorité hiérarchique peut également saisir cette commission en cas de doute concernant l’application des II et IV du présent article.
« VI. – Sans préjudice de l’engagement de poursuites disciplinaires, la violation du présent article donne lieu au reversement des sommes perçues au titre des activités interdites, par voie de retenue sur le traitement.
« VII. – Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
M. le président. L'amendement n° 99, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« 1° De créer ou de reprendre une entreprise lorsque celle-ci donne lieu à immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou à affiliation au régime prévu à l’article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, s’il occupe un emploi à temps complet et qu’il exerce ses fonctions à temps plein ;
II. – Alinéa 8
Compléter cet alinéa par les mots :
ou incomplet
II. – Alinéas 13 et 14
Rédiger ainsi ces alinéas :
« III. – Le fonctionnaire qui occupe un emploi à temps complet peut, à sa demande, être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise et à exercer, à ce titre, une activité privée lucrative.
« L’autorisation d’accomplir un service à temps partiel, qui ne peut être inférieur au mi-temps, est accordée, sous réserve des nécessités de la continuité et du fonctionnement du service et compte tenu des possibilités d’aménagement de l’organisation du travail, pour une durée maximale de deux ans, renouvelable pour une durée d’un an, à compter de la création ou de la reprise de cette entreprise.
IV. – Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La demande d’autorisation prévue aux deuxième et troisième alinéas du présent III est au préalable soumise à l’examen de la commission mentionnée à l’article 25 octies de la présente loi, dans les conditions prévues aux II, IV et V du même article.
V. – Alinéa 16
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« IV. – Le fonctionnaire peut être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à exercer à titre accessoire une activité, lucrative ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées et n’affecte pas leur exercice. Par dérogation au 1° du I, ces activités peuvent être exercées sous le régime prévu à l’article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale.
« Il peut notamment être recruté comme enseignant associé en application de l’article L. 952-1 du code de l’éducation.
VI. – Alinéas 19 et 20
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. La question de l’interdiction du cumul d’emplois dans la fonction publique a suscité beaucoup de débats, y compris sur la nature des activités que les fonctionnaires peuvent exercer.
Tout d’abord, il est important de rappeler que le Gouvernement propose de maintenir l’interdiction pour un fonctionnaire de cumuler un emploi à temps complet avec un autre emploi à temps complet. Cela va de soi.
Le Gouvernement propose également de maintenir la possibilité du cumul de plusieurs emplois à temps incomplet au sein de la fonction publique territoriale. En effet, il arrive parfois que certains fonctionnaires qui travaillent pourtant dans deux collectivités territoriales différentes ne cumulent pas suffisamment d’heures pour réaliser un véritable temps complet. Par ailleurs, certains employés municipaux ont parfois besoin d’un supplément d’activité, ce qui les conduit à exercer un service qui représente 115 % d’un équivalent temps plein.
Si un tel complément d’activité ne me choque pas pour ce type d’emplois, cela pose en revanche un problème à l’UPA, l’Union professionnelle artisanale, qui pointe souvent du doigt les difficultés qui résultent de la possibilité laissée à certaines personnes de travailler en dehors des emplois qu’ils occupent.
Ensuite, le Gouvernement souhaite maintenir l’interdiction pour un fonctionnaire de créer une entreprise lorsqu’il occupe un emploi à temps complet. Selon moi, il est impossible pour un individu de créer une entreprise dans de bonnes conditions, qu’il s’agisse d’une société anonyme – SA – ou d’une société à responsabilité limitée – SARL –, s’il ne prend pas au moins une ou deux heures de son temps de travail pour s’y consacrer.
Quel danger pourrait faire courir un fonctionnaire à temps complet qui crée son entreprise ? Pour moi, ce danger réside dans la possible superposition de difficultés. Nous nous interrogeons par exemple sur le profit qu’un fonctionnaire pourrait tirer de la création de son propre garage, alors que la municipalité dans laquelle il travaille est déjà cliente d’un autre garage. Après tout, on parle beaucoup des conflits d’intérêt dans la haute fonction publique, mais nous sommes parfois confrontés à des problèmes de cette nature !
Pour le Gouvernement, un fonctionnaire qui occupe un emploi à temps complet doit demander l’autorisation à son chef de service d’accomplir un temps partiel pour pouvoir créer son entreprise. Même si, dans la plupart des cas, il obtient cette autorisation, elle ne doit pas être automatique et ne lui être accordée que dans l’intérêt du service.
Enfin se pose la question du cumul d’une activité à temps complet avec une activité dite « accessoire ». C’est sur ce point que le débat a été le plus important et le plus emporté avec vos collègues députés, notamment sur le statut des auto-entrepreneurs.
Je vous livre ma position telle que je l’ai défendue à l’Assemblée nationale : j’ai toujours considéré que l’auto-entreprise était un premier pas vers l’entreprise et non une manière d’exercer une prestation de service pour autrui. En outre, je n’ai jamais pensé que l’auto-entreprise pouvait se substituer au chèque emploi service universel, le CESU. Les améliorations apportées au CESU, par Jean-Louis Borloo tout d’abord sur le volet fiscal, puis au travers de plusieurs réécritures successives du dispositif, renvoient bien à l’idée que certaines personnes peuvent travailler quelques heures chez un particulier, lequel doit pouvoir bénéficier en contrepartie d’un crédit d’impôt intéressant.
En ce qui me concerne, j’ai donc prôné la possibilité pour les fonctionnaires d’exercer une activité à titre accessoire, mesure destinée essentiellement aux fonctionnaires appartenant à la catégorie C, au bas de l’échelle indiciaire de la catégorie B, et aux agents de la fonction publique territoriale plus particulièrement.
J’ai proposé que l’on s’en tienne à cette disposition, mais on m’a objecté que le statut d’auto-entrepreneur était plus facile à mettre en œuvre. Pourtant, je le dis maintenant pour ne pas avoir à le répéter plus tard : ce statut créé des difficultés. L’UPA – j’y reviens – estime que ce statut permet à son bénéficiaire de profiter de réductions de cotisations et d’avantages fiscaux qui lui permettent de proposer des prix plus bas que ses concurrents.
J’ai mis tous les sujets sur la table. Si j’entends ceux qui veulent laisser davantage de latitude à la création d’auto-entreprises, je tiens à rester clair sur les modalités d’encadrement de la création d’entreprises dans la fonction publique.
En définitive, je considère qu’il est préférable d’aider l’auto-entrepreneur à devenir micro-entrepreneur lorsqu’il commence à avoir des clients. C’est mieux pour tout le monde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet amendement a effectivement suscité un débat en commission. Au préalable, nous avions également débattu des dispositions relatives au cumul d’activités dans la fonction publique et de la pertinence des dispositions figurant dans le projet de loi transmis par l’Assemblée nationale.
Nous ne partageons pas du tout l’analyse développée par Mme la ministre et sommes même en contradiction avec elle : nous pensons, pour notre part, qu’il faut favoriser le cumul d’activités des fonctionnaires.
Madame la ministre, vous indiquez être prête à autoriser le cumul d’un emploi à temps complet avec des activités « accessoires ». Nous pensons qu’il faudrait plutôt donner la possibilité à certains fonctionnaires qui le souhaiteraient de cumuler leur emploi avec d’autres activités.
Par ailleurs, vous rendez possible le cumul d’un emploi à temps complet avec un emploi à temps incomplet dans la seule fonction publique territoriale, et ne l’autorisez pas au sein de la fonction publique d’État ou de la fonction publique hospitalière. Or l’un des principaux objectifs de ce texte est précisément d’harmoniser certaines dispositions pour qu’elles puissent s’appliquer dans les trois fonctions publiques. Je citerai l’exemple de kinésithérapeutes qui exercent une activité privée, mais qui ont également une activité dans des établissements hospitaliers. On est bien content de trouver ces personnes pour satisfaire les besoins de ces établissements !
Enfin, s’agissant de l’« embolie » qui pourrait affecter la commission de déontologie en raison du trop grand nombre d’avis qu’elle aurait à émettre, je tiens à dire que nous avons fait en sorte de bien en définir le périmètre afin que le risque soit nul.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. René Vandierendonck, pour explication de vote.
M. René Vandierendonck. Le groupe socialiste et républicain suivra la position de Mme la ministre, ne serait-ce que par cohérence avec le vote sur le précédent amendement.
Très franchement, on ne va tout de même pas interdire à un fonctionnaire qui a accompli son temps plein hebdomadaire de vendre un peu de miel – pour prendre un exemple qui fera plaisir à Mme Bouchoux (Sourires.) – à son comité d’œuvres sociales ! Ou alors, il faudra m’expliquer pourquoi tout est permis dans la haute fonction publique alors que rien ne l’est pour ceux dont le point d’indice est coincé depuis six ans !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. On doit intégrer dans notre réflexion le fait qu’il existe un certain nombre de territoires dans lesquels on n’a pas forcément suffisamment de travail pour occuper un fonctionnaire à temps complet toute l’année, notamment au sein de la fonction publique territoriale.
Il existe des territoires, singulièrement en montagne, où la pluriactivité est quelque chose de souhaitable. Qu’un fonctionnaire territorial puisse donner des cours de ski pendant quelques semaines en haute saison, au moment où les écoles de ski peuvent avoir besoin de renforts, ne me paraît donc pas absurde s’il n’y a pas suffisamment de travail pour lui toute l’année !
La pluriactivité s’inscrit dans l’organisation économique d’un certain nombre de territoires. Se priver de l’accès à cette pluriactivité pour la fonction publique territoriale constituerait une grande absurdité !
Il y a quinze ans environ, nous nous sommes battus à l’Assemblée nationale pour créer les groupements d’employeurs mixtes publics-privés dans un certain nombre de cas : nous avions alors mené un véritable combat philosophique. Par conséquent, tout ce qui permet de favoriser la pluriactivité là où c’est utile aujourd’hui est une bonne chose ! Il n’y a aucune raison d’adopter une législation qui l’empêcherait.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. En premier lieu, un travail important a déjà été mené à l’Assemblée nationale sur l’article 6 : nos collègues députés ont déjà contribué à « déverrouiller » quelque peu le système.
En second lieu, la commission des lois du Sénat a proposé un certain nombre de mesures pour atténuer les règles fixées par l’article.
Je pense que tout cela va dans le bon sens. Il est certes nécessaire de poser des règles en matière de cumul d’activités, mais il ne faut pas non plus étouffer toutes les initiatives.
L’équilibre trouvé par la commission des lois me semble être un bon équilibre qui maintient le principe de l’interdiction du cumul en en aménageant certains aspects.
Dans ces conditions, je ne voterai pas l’amendement du Gouvernement.
M. le président. L'amendement n° 30 rectifié ter, présenté par Mmes Loisier et Morin-Desailly, M. Longeot, Mme Férat et M. Cigolotti, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par les mots :
, sauf dans le domaine du conseil ou de l’expertise
La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.
Mme Anne-Catherine Loisier. Afin de prévenir de potentielles distorsions de concurrence, l’amendement a pour objet d’exclure les activités de conseil et d’expertise, notamment dans les domaines foncier, agricole ou forestier, de la dérogation à l'interdiction d'exercer une activité privée lucrative à titre professionnel, qui a été introduite à l’alinéa 9.
En effet, les fonctionnaires de ces secteurs ont accès à des informations privilégiées dans le cadre de leur mission et peuvent être tentés de les valoriser dans le cadre d’une activité lucrative au détriment de leurs concurrents du secteur privé.
Ils peuvent également être contactés par des usagers à la recherche d’informations, de conseils ou de services. Ces contacts peuvent par la suite leur permettre de développer une activité privée.
Enfin, le statut de fonctionnaire garantit à ces prestataires potentiels un revenu qui leur permettrait de pratiquer des prix sur lesquels le secteur concurrentiel ne pourrait pas s’aligner.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir une interdiction spécifique de cumul d’activités pour les secteurs du conseil ou de l’expertise.
Il complexifierait grandement le dispositif en conduisant à distinguer ces domaines des autres secteurs d’activités.
En outre, le cadre déontologique applicable aux fonctionnaires – qui sera clarifié dans le présent projet de loi – les empêche d’utiliser leur position pour profiter d’un avantage concurrentiel dans le cadre de leur cumul d’activités.
Enfin, cet amendement est plus restrictif que le droit en vigueur, alors que la commission a jugé l’équilibre actuel concernant le cumul d’activités satisfaisant.
C’est pourquoi la commission vous demande de retirer votre amendement, ma chère collègue ; faute de quoi, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Loisier, l'amendement n° 30 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le rapporteur, si j’ai bien compris, vous me proposez de faire le choix de la confiance. Dans ce cas, je retire mon amendement !
M. le président. L'amendement n° 30 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 6 bis
(Non modifié)
L’article 6 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les fonctions de membre du conseil d’administration ou de membre du conseil de surveillance d’une coopérative, d’une union ou d’une fédération ouvrant droit aux indemnités mentionnées au deuxième alinéa du présent article ne constituent ni des activités professionnelles procurant des revenus au sens de l’article L. 161-22 du code de la sécurité sociale, ni une activité privée lucrative au sens de l’article 25 septies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. » – (Adopté.)
Article 7
I (Non modifié). – Sont supprimés :
1° Le troisième alinéa de l’article 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État ;
2° Le troisième alinéa de l’article 60 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
3° Le troisième alinéa de l’article 46-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.
II. – (Supprimé)
III. – Les fonctionnaires qui occupent un emploi permanent à temps complet et qui exercent un ou plusieurs autres emplois permanents à temps complet se conforment, sous peine de poursuites disciplinaires, au même article 25 septies dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.
IV (Non modifié). – Les fonctionnaires autorisés à accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise à la date d’entrée en vigueur de la présente loi continuent à accomplir ce service jusqu’au terme de leur période de temps partiel.