M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Dans l’article 35 quater tel qu’il résulte des travaux de l’Assemblée nationale, il est question d’« opération intérieure ». Cette définition nous semble beaucoup trop vague. L’objet de cet amendement est donc de préciser cette notion en opérant un renvoi à l’article L. 138–3–1 du code de la défense.
Pour ne rien vous cacher, cet amendement de précision résulte d’une suggestion du ministère de la défense : parler d’« opérations de sécurité intérieure », c’est bien faire référence à des opérations liées à des actes de guerre.
Évidemment, je ne nie pas la problématique qui peut se poser pour des exemples tels que ceux que vous venez d’évoquer, monsieur le rapporteur général, mais je partage l’avis de M. Gattolin. Nous risquons d’être confrontés à une difficulté d’application qui, de toute façon, serait livrée à une doctrine ou à une instruction, et je ne suis pas sûr que vous en soyez d’accord.
Par souci de clarté, nous souhaitons donc, au travers de cet amendement, préciser les choses.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je suis favorable à l’article 35 quater, qui exonère de droits de mutation les victimes du terrorisme, dans sa version actuelle, telle qu’elle nous a été transmise par l’Assemblée nationale.
Ce qui me gêne dans l’amendement du Gouvernement, c’est que, de fait, il exclut du droit à exonération le décès intervenu « au cours d’une opération de sécurité intérieure désignée par arrêté interministériel, visant à la défense de la souveraineté de la France ou à la préservation de l’intégrité de son territoire, d’une intensité et d’une dangerosité particulières, assimilables à celles d’une opération extérieure ».
Cette définition restrictive a, par exemple, pour conséquence que les militaires – M. le secrétaire d’État nous le confirmera sans doute – détachés chaque année pour la lutte contre les feux de forêt et qui décèdent en service ne bénéficient pas de l’exonération fiscale.
De même, si un militaire décède en Guyane dans le cadre de l’opération Harpie, du fait de la restriction introduite par cet amendement, sa famille ne pourra pas bénéficier de l’exonération des droits de succession.
Par conséquent, à moins que M. le secrétaire d'État nous confirme que les militaires décédés lors de l’opération Harpie ou au cours d’une opération de lutte contre les feux de forêt sont bien indemnisés, auquel cas je modifierai ma position, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 387 qui est trop restrictif.
M. le président. L'amendement n° 158, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 6
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Au 8° du I, après le mot : « secours », sont insérés les mots : « ou des blessures reçues dans cette opération » ;
…) Aux 9° et 10° du I, après le mot : « mission », sont insérés les mots : « ou des blessures reçues dans les mêmes circonstances » ;
II. – Alinéa 12
Après le mot :
reçus
insérer les mots :
par une personne blessée dans les circonstances prévues aux 1° à 2° bis ou aux 8° à 10° du I de l’article 796
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant pour l’État du I et du II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État de l’exonération de droits de mutation à titre gratuit des dons reçus par une personne blessée dans les circonstances prévues aux 1° à 2° bis ou aux 8° à 10° du I de l’article 796 et des successions des personnes décédées des suites de blessures mentionnées aux 8° à 9° du I de l’article 796 du code général des impôts est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à étendre l’exonération des dons à ceux qui sont reçus par un militaire, un policier, un gendarme, un pompier ou un douanier blessé dans l’accomplissement de sa mission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 159, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 12
Après le mot :
descendants
insérer les mots :
, les ascendants
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - La perte de recettes résultant pour l’État de l'exonération de droits de mutation à titre gratuit des dons reçus par les ascendants d'une personne mentionnée au 2° bis ou aux 8° à 10° du I de l’article 796 est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 160, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 12
Remplacer la référence :
au 2° bis
par les références :
aux 1° à 2° bis
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - La perte de recettes résultant pour l’État de l'exonération de droits de mutation à titre gratuit des dons reçus par le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, le concubin notoire, les descendants et les personnes considérées comme à la charge, au sens des articles 196 et 196 A bis, de toute personne mentionnée aux 1° et 2° de l'article 796 du code général des impôts est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du même code.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est un amendement de précision.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 35 quater, modifié.
(L'article 35 quater est adopté.)
Article 35 quinquies (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 2° de l’article 1382 est ainsi rétabli :
« 2° Dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa du 1°, les propriétés transférées par l’État aux grands ports maritimes en application de l’article L. 5312-16 du code des transports ; »
2° Le I de l’article 1382 E est complété par les mots : « et qui ne sont pas exonérées en application du 2° de l’article 1382 » ;
3° Après l’article 1388 sexies, il est inséré un article 1388 septies ainsi rédigé :
« Art. 1388 septies. – La base d’imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties des biens qui font l’objet d’un transfert de propriété de l’État aux grands ports maritimes en application de l’article L. 5312-16 du code des transports fait l’objet d’un abattement dégressif.
« Cet abattement s’applique au titre des cinq années qui suivent celle au cours de laquelle le transfert de propriété a été publié au fichier immobilier. Son taux est fixé à 100 % au titre des deux premières années, à 75 % la troisième année, à 50 % la quatrième année et à 25 % la cinquième année.
« Il cesse de s’appliquer en cas de changement de redevable au cours de cette période. » ;
4° Le 3° de l’article 1394 est ainsi rétabli :
« 3° Dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa du 2°, les propriétés transférées par l’État aux grands ports maritimes en application de l’article L. 5312-16 du code des transports ; ».
II. – A. – Le I s’applique à compter des impositions établies au titre de l’année 2016.
B. – Lorsque la publication au fichier immobilier est intervenue avant le 1er janvier 2015, l’abattement prévu à l’article 1388 septies du code général des impôts s’applique pour la durée restant à courir. – (Adopté.)
Article 35 sexies (nouveau)
I. – Au premier alinéa de l’article 1609 duodecies du code général des impôts, après le mot : « nature », sont insérés les mots : « , y compris des livres numériques au sens de l’article 1er de la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix unique du livre, ».
II. – Le I du présent article s’applique aux opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2016.
M. le président. L'amendement n° 161, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le mot :
impôts,
insérer les mots :
les mots : « la Communauté » est remplacé par les mots : « l'Union » et
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 35 sexies, modifié.
(L'article 35 sexies est adopté.)
Article 35 septies (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 1681 F est ainsi rétabli :
« Art. 1681 F. – I. – Sur demande du redevable, l’impôt sur le revenu afférent aux plus-values à long terme réalisées par une entreprise individuelle à l’occasion de la cession à titre onéreux de l’ensemble des éléments de l’actif immobilisé affectés à l’exercice d’une activité professionnelle ou d’une branche complète d’activité ou à l’occasion de la cession d’un fonds de commerce, d’un fonds artisanal ou d’une clientèle peut faire l’objet d’un plan de règlement échelonné, lorsque les parties sont convenues d’un paiement différé ou échelonné du prix de cession portant sur une entreprise.
« II. – La demande de plan de règlement échelonné doit être formulée au plus tard à la date limite de paiement portée sur l’avis d’imposition.
« III. – L’octroi du plan de règlement échelonné est subordonné aux conditions cumulatives suivantes :
« 1° La plus-value à long terme est réalisée par une entreprise qui emploie moins de dix salariés et a un total de bilan ou a réalisé un chiffre d’affaires n’excédant pas deux millions d’euros au titre de l’exercice au cours duquel la cession a lieu ;
« 2° L’imposition ne résulte pas de la mise en œuvre d’une rectification ou d’une procédure d’imposition d’office ;
« 3° Le redevable respecte ses obligations fiscales courantes ;
« 4° Le redevable constitue auprès du comptable public compétent des garanties propres à assurer le recouvrement de l’impôt afférent à la plus-value.
« IV. – La durée du plan de règlement échelonné ne peut excéder celle prévue pour le paiement total du prix de cession ni se prolonger au-delà du 31 décembre de la cinquième année qui suit celle de la cession. Les échéances de versement de l’impôt sont fixées selon les modalités de paiement du prix de cession prévues dans l’acte.
« V. – En cas de dépréciation ou d’insuffisance des garanties constituées, le comptable public compétent peut, à tout moment, demander un complément de garanties.
« VI. – À défaut de constitution du complément de garanties mentionné au V ou de respect par le redevable des échéances du plan de règlement échelonné ou de ses obligations fiscales courantes, le plan de règlement échelonné est dénoncé.
« VII. – Lorsque les versements sont effectués aux échéances mentionnées au IV du présent article, la majoration prévue à l’article 1730 du présent code est plafonnée, pour chaque versement, au montant de l’intérêt légal mentionné à l’article L. 313-2 du code monétaire et financier. Le taux de l’intérêt légal est celui applicable au jour de la demande de plan. » ;
2° Le 1 de l’article 1684 du code général des impôts est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « trois mois » sont remplacés par les mots : « quatre-vingt-dix jours » ;
b) Après le même alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’il s’agit de la vente ou de la cession de fonds de commerce, le délai mentionné au deuxième alinéa commence à courir à compter du jour où la vente ou la cession a été publiée conformément aux prescriptions de l’article L. 141-12 du code de commerce, ou du dernier jour du délai imparti par le même article, à défaut de publication.
« Toutefois, lorsque la déclaration mentionnée au premier alinéa du 3 et au 3 bis de l’article 201 du présent code n’a pas été déposée dans le délai prévu au même article, le cessionnaire et le cédant sont solidairement tenus responsables du paiement des impositions mentionnées au premier alinéa du présent 1 pendant un délai de quatre-vingt-dix jours courant à compter de l’expiration du délai imparti pour déposer la déclaration de résultats. » ;
c) Au dernier alinéa, le mot : « paragraphe » est remplacé par la référence : « 1 ».
II. – L’article L. 143-21 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « les cinq mois » sont remplacés par les mots : « un délai de cent cinq jours à compter » ;
2° Après le même alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lorsque la déclaration mentionnée au premier alinéa du 3 et au 3 bis de l’article 201 du code général des impôts n’a pas été déposée dans le délai prévu aux mêmes 3 et 3 bis, le délai dans lequel la répartition des fonds doit être réalisée est prolongé de soixante jours. » ;
3° Au second alinéa, les mots : « ce délai » sont remplacés par les mots : « ces délais ».
III. – A. – Le 2° du I et le II s’appliquent aux cessions faisant l’objet d’une publication à compter du 1er janvier 2016.
B. – Le 1° du I s’applique aux cessions intervenues à compter du 1er janvier 2016. – (Adopté.)
Article 35 octies (nouveau)
La première phrase du IV de l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime est complétée par les mots : « conjoint des ministres chargés de l’agriculture et du budget ». – (Adopté.)
Article 35 nonies (nouveau)
I. – Le I bis de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° Des cotisations de sécurité sociale, à hauteur de 2 €, dans les cas autres que celui mentionné au 3° ; »
2° Le 2° est abrogé.
II. – Le I entre en vigueur pour les cotisations dues au titre des périodes courant à compter du 1er décembre 2015. – (Adopté.)
Article 35 decies (nouveau)
Au I de l’article 122 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, l’année : « 2005 » est remplacée par l’année : « 2014 » et les mots : « lorsque leur dette sociale est inférieure à 10 000 € » sont remplacés par les mots : « lorsque leur dette sociale au 1er janvier 2005 était inférieure à 10 000 € pour les entreprises et exploitations créées avant cette date ».
M. le président. L'amendement n° 162, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à supprimer l’article 35 decies dans la mesure où celui-ci ne concerne aucun des éléments visés à l’article 34 de la loi organique relative aux finances publiques. Cet article apparaît donc étranger au domaine des lois de finances.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'article 35 decies est supprimé.
Article 35 undecies (nouveau)
Les sociétés cotées et celles qui, à la date de clôture du bilan, dépassent les limites chiffrées d’au moins deux des trois critères suivants :
a) Total du bilan : 20 000 000 € ;
b) Chiffre d’affaires net : 40 000 000 € ;
c) Nombre moyen de salariés au cours de l’exercice : 250,
publient des informations sur leurs implantations, incluses dans le périmètre de consolidation dans chaque État ou territoire, au plus tard six mois après la clôture de l’exercice.
Les informations suivantes sont publiées pour chaque État ou territoire :
1° Nom des implantations et nature d’activité ;
2° Chiffre d’affaires ;
3° Effectifs, en équivalent temps plein ;
4° Bénéfice ou perte avant impôt ;
5° Montant des impôts sur les bénéfices dont les implantations sont redevables ;
6° Subventions publiques reçues.
Pour les informations mentionnées aux 2° à 6°, les données sont agrégées à l’échelle de ces États ou territoires.
En cas de manquement à ces obligations d’information, toute personne intéressée peut demander au président du tribunal compétent statuant en référé d’enjoindre à la société concernée, le cas échéant sous astreinte, de se conformer à ces obligations.
Ces informations sont publiées en ligne, en format de données ouvert, centralisées et accessibles au public.
M. le président. L'amendement n° 163, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. L’article 35 undecies, adopté à l’Assemblée nationale après avis défavorable du Gouvernement, a pour objet d’obliger les entreprises réalisant plus de 40 millions d'euros de chiffre d’affaires à publier en ligne les informations relatives à leur chiffre d’affaires, leur bénéfice, les impôts qu’elles paient et les subventions qu’elles reçoivent, pays par pays.
En prévoyant la publicité de ces informations, cet article va au-delà du plan BEPS de l’OCDE.
C'est la raison pour laquelle, compte tenu du risque que présente l’article 35 undecies pour la compétitivité des entreprises, nous souhaitons le supprimer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Le rapporteur général a raison de souligner que le reporting prévu à l’article 35 undecies va plus loin que ce qu’on appelle le reporting BEPS de l’OCDE sur deux points, que je ne détaillerai pas. Toutefois, il a tort sur plusieurs autres points.
D’abord, les informations publiques qui sont demandées à l’article 35 undecies ne sont pas les informations du reporting BEPS. Ce reporting prévoit cinq informations qui ne figurent pas à l’article 35 undecies : actifs, ventes, détail du chiffre d’affaires, parties liées et parties indépendantes, impôts effectivement payés, actifs corporels hors trésorerie.
Les informations publiques demandées à l’article 35 undecies sont les mêmes que celles qui sont exigées des banques depuis 2013. Sur ce point, il est d'ailleurs important de noter que le reporting public n’a pas fait s’effondrer les banques, qu’il a été adopté par la France avant qu’une mesure similaire soit approuvée au niveau de l’Union européenne. La Commission européenne n’a, en effet, rendu son avis final sur le caractère public de certaines informations, bénéfices et impôts, qu’en novembre 2014. La Commission européenne a finalement considéré dans son avis que le caractère public ne devrait pas avoir d’incidence économique négative notable, en particulier sur la compétitivité et l’investissement. Au contraire, il semble qu’une telle obligation pourrait avoir une incidence positive limitée.
Étant donné que l’article 35 nonies se limite à demander que les mêmes informations que celles qui sont exigées des banques soient rendues publiques, la crainte de risques majeurs pour la compétitivité est sans fondement.
Ensuite, affirmer qu’il n’existe à ce stade aucun projet de directive de la Commission européenne visant à prévoir une telle obligation de publication à l’échelon européen relève quelque peu de la mauvaise foi. Je rappelle au rapporteur général que les eurodéputés ont voté très largement en faveur du reporting public en juillet 2015 dans la directive « Droits des actionnaires », aux articles 2 et 2 bis, 404 voix pour, 127 voix contre, une majorité du groupe du Parti populaire européen s’étant abstenue. Donc, il y a bien un projet de directive.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je m’étonne que le Gouvernement demande l’abandon de cet amendement qui a été largement approuvé à l’Assemblée nationale.
D’abord, le reporting public a été soutenu, par exemple, par Pierre Moscovici. En tant que commissaire européen, il s’est exprimé favorablement pour la mise en œuvre de reporting public par les entreprises.
Ensuite, comme vient de le dire notre collègue Foucaud, dans le cadre de la directive « Droits des actionnaires » qui est en débat, le reporting public par les entreprises a été massivement approuvé par les députés européens. Un vaste mouvement se met en place au niveau européen afin de faire pression par le biais de cette directive.
Notre gouvernement s’était historiquement honoré en disant qu’il voulait être à l’avant-garde dans ce domaine afin de faire progresser la politique européenne.
Je rappelle que nous avons voté une mesure semblable pour les banques, qui n’a en rien pénalisé les banques françaises. Cela a au contraire favorisé une dynamique de transparence qui progresse au niveau européen.
On a tellement de problèmes en matière d’évasion fiscale, on met tellement de temps à mettre en œuvre des stratégies qui permettent de récupérer des impôts qu’il me paraît fondamental d’adopter cet article.
J’évoquerai un dernier point. Les grandes multinationales, par diverses combines – parce qu’elles peuvent notamment créer des filiales et délocaliser leurs sièges sociaux, ce que ne peuvent faire les PME françaises –, parviennent à payer beaucoup moins d’impôts. Cette transparence serait une première étape qui permettrait aux services fiscaux de l’ensemble des États membres d’agir efficacement.
Je soutiens pleinement l’article adopté par l’Assemblée nationale et je suis étonnée que le Gouvernement n’ait pas plus d’ambition sur ce sujet : pourtant, il a souvent exprimé sa volonté d’aller de l’avant.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. Je souhaite moi aussi exprimer mon désaccord total avec la suppression de cet article voté à l’Assemblée nationale.
Il faut savoir ce que l’on veut. La publicité des données fiscales a un effet dissuasif sur l’évasion fiscale des entreprises. En effet, la société civile, notamment les associations qui militent pour la transparence, exploite davantage ces données que certaines administrations fiscales – peut-être pas la nôtre qui est très vertueuse. La transparence devient aussi, pour les entreprises qui s’y prêtent, un enjeu d’image dans leur reporting social.
C’est aussi un enjeu de démocratie, parce que certaines firmes sont extrêmement puissantes et rivalisent parfois avec les pouvoirs publics. L’entreprise Monsanto est ainsi plus puissante qu’un certain nombre d’États, et il est important d’en comprendre les ramifications.
Nous jouons aussi de cela à travers la défense de nos entreprises. L’argument de la concurrence, excusez-moi, mes chers collègues, mais c’est un peu « le pompon ». En la matière, il faut faire preuve de volontarisme, comme ce fut le cas au sujet des banques. Il est tout de même assez stupéfiant de considérer l’optimisation fiscale comme un élément de compétitivité. Dans ce cas, créons nos propres paradis fiscaux ! Je me demande d’ailleurs si l’on n’y contribue pas déjà à travers certaines conventions fiscales croisées que nous signons avec des micro-États, sur lesquelles je ne reviendrai pas.
La loi « Canfin » comportait des avancées certaines en matière de transparence dans d’autres domaines, dont la portée a malheureusement été réduite à l’occasion de transpositions « DADUE » – diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne.
On prétend qu’il faut attendre que l’OCDE, le G20 et tous les pays bougent ensemble. Prenons l’exemple de la COP 21 : si nous avions attendu que tout le monde vienne et prenne des décisions, nous ne serions pas allés très loin. D’ailleurs, même en faisant preuve de volontarisme, les progrès restent modestes.
Ayons le courage de défendre les valeurs que nous portons, ou alors allons faire du commerce ailleurs !