M. le président. Madame Blondin, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. le rapporteur général ?
Mme Maryvonne Blondin. Tout à fait, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 240 rectifié, présenté par M. F. Marc et Mme Blondin, et ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le premier alinéa du 2° du III est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Au-delà de cette part, les biocarburants susmentionnés peuvent être comptabilisés de telle sorte à satisfaire la part de 7 %, dans la limite de 0,3 %. »
La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.
M. Jean Bizet. Voilà trois ans que cette question est soulevée pratiquement à chaque projet de loi de finances.
Je n’ai aucune aversion pour les esters méthyliques d’huile animale, les EMHA, non plus que pour les esters méthyliques d’huile usagée, les EMHU. Néanmoins, il ne faudrait surtout pas qu’ils handicapent la filière des esters méthyliques d’huiles végétales, les EMHV, comme M. le secrétaire d’État vient de le souligner.
En effet, la création d’une filière comme celle-ci demande du temps ; elle suppose lisibilité et durabilité. C’est pourquoi un accord prévaut depuis un certain nombre d’années au niveau gouvernemental – jusqu’au plus haut niveau de l’État, puisque le Président de la République lui-même l’a confirmé en mars dernier – pour sécuriser la proportion de 7 % d’EMHV pour un certain nombre d’années. Les huiles animales ou usagées, pourquoi pas ? Mais à la condition qu’elles soient exclues de la part des 7 %.
Au surplus, madame Blondin, votre amendement est en quelque sorte satisfait par l’amendement n° 635, qui a été adopté par l’Assemblée nationale et qui vise le gazole non routier, ou GNR. Les députés ont en effet décidé qu’un peu plus de 0,3 % d’EMHA ou d’EMHU pourraient être incorporées à ce gazole, par paliers, jusqu’en 2017 – M. le secrétaire d’État connaît ce dispositif mieux que quiconque.
Je regrette que notre collègue Joël Labbé ne soit pas dans l’hémicycle, car il nous aurait expliqué qu’avoir suscité la création d’une filière végétale nous permet aussi, au-delà du biocarburant, de disposer de drêches ou de tourteaux, grâce auxquels nous n’importons plus que 45 % de nos protéines végétales, contre 75 % au moins il y a encore quelques années. Une très belle articulation a donc été trouvée entre les différentes filières.
Je vais donc plus que M. le secrétaire d'État : je considère que cet amendement est satisfait par les dispositions sur le GNR votées à l’Assemblée nationale.
M. le président. Je mets aux voix l'article 28 bis.
(L'article 28 bis est adopté.)
Articles additionnels après l’article 28 bis
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 2 rectifié bis est présenté par MM. Houpert, Pellevat, Doligé et Laufoaulu, Mme Garriaud-Maylam, M. Canevet, Mme Mélot, MM. Mouiller, Lefèvre, Longeot, Bonhomme, Chaize, Grosdidier, Marseille et Détraigne, Mme M. Mercier, MM. P. Leroy, Commeinhes et Gilles, Mme Hummel, MM. Milon et D. Laurent, Mme Goy-Chavent, MM. Falco, Houel, Mandelli, Laménie, Cadic et Revet, Mme Des Esgaulx et MM. Pierre, Vasselle et Kern.
L'amendement n° 42 rectifié bis est présenté par MM. Genest et Darnaud.
L'amendement n° 202 est présenté par MM. Requier, Collin, Mézard, Arnell, Castelli et Fortassin, Mme Laborde et M. Vall.
L'amendement n° 349 est présenté par MM. F. Marc, Guillaume, Yung, Vincent, Berson, Botrel, Raynal, Courteau, Raoul et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 28 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le III de l’article 266 quindecies du code des douanes est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« À partir de 2017, son taux est fixé au minimum à 7,12 % dans la filière essence et à 7,82 % dans la filière gazole et en cohérence avec l’objectif mentionné à l’article L. 661-1-1 du code de l’énergie. » ;
2° Au troisième alinéa, après la référence : « 11 ter », sont insérées les références : « , 36, 38 bis » ;
3° Au quatrième alinéa, la référence : « et 22 » est remplacée par les références : « , 22, 36 et 38 bis » ;
4° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les quantités de biocarburants incorporées dans les produits repris aux indices d'identification 36 et 38 bis du même tableau sont comptabilisées à compter de 2017. » ;
5° Le sixième alinéa est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « pour 2016 et au moins 7,12 % à partir de 2017. Cette part est de 0,12 % pour le biogaz produit à partir de matières premières d’origine animale ou végétale énumérées à l’article 21 de la directive 2009/28/ CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 précitée. » ;
6° La seconde phrase du septième alinéa est ainsi modifiée :
a) Après la référence : « 0,7 % », sont insérés les mots : « pour 2016 et au moins 0,82 % à partir de 2017 » ;
b) Sont ajoutés les mots : « , dont en 2017 un maximum de 0,12 % pour le biogaz produit à partir de matières premières d’origine animale ou végétale énumérées à l’article 21 de la directive 2009/28/ CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 précitée » ;
7° Au neuvième alinéa, après la référence : « 22 », sont insérées les références : « , 36, 38 bis ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié bis.
M. Marc Laménie. Cet amendement, dont le premier signataire est M. Houpert, vise à soutenir le développement des énergies renouvelables dans les transports.
Il s’agit surtout d’encourager le développement du biométhane carburant, ce qui créerait des emplois à moyen terme au sein de la filière industrielle d’avenir de la mobilité au gaz, qui fournit dès à présent 1 000 emplois sur cinq usines.
M. le président. L’amendement n° 42 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 202.
M. Jean-Claude Requier. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Maurice Vincent, pour présenter l’amendement n° 349.
M. Maurice Vincent. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 2 rectifié bis, 202 et 349 ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements identiques visent à étendre au biométhane carburant la TGAP incitative, que l’article 28 bis étend déjà au gazole non routier. La commission des finances n’a pas pu évaluer quels seraient les effets d’une telle mesure. Conduirait-elle à une hausse globale du prix à la pompe, supportée par tous les consommateurs ?
Faute d’avoir pu mener les études nécessaires, la commission sollicite le retrait de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Vincent, l’amendement n° 349 est-il maintenu ?
M. Maurice Vincent. Les membres du groupe socialiste et républicain ont présenté cet amendement pour mettre en valeur les avantages du biométhane carburant, en particulier son insertion dans l’économie circulaire.
Toutefois, j’ai bien entendu la critique formulée tout à l’heure par M. le secrétaire d’État : une remise à plat de ces différentes catégories de carburants serait nécessaire, sur laquelle il vaut mieux se pencher à froid.
Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 349 est retiré.
Monsieur Requier, l’amendement n° 202 est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Requier. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Laménie, l’amendement n° 2 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Marc Laménie. Oui, je le maintiens également, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 rectifié bis et 202.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 28 ter (nouveau)
Après le mot : « agriculture », la fin du dernier alinéa du III de l’article 266 quindecies du code des douanes est ainsi rédigée : « fixe la liste des matières premières permettant de produire des biocarburants, qui peuvent être pris en compte pour le double de leur valeur réelle exprimée en quantité d'énergie renouvelable, ainsi que les conditions et modalités de cette prise en compte, notamment en matière d’exigence de traçabilité. »
M. le président. L’amendement n° 154, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet article nous paraît être un cavalier budgétaire : nous considérons qu’il n’a pas sa place dans une loi de finances, fût-elle rectificative.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement ne saurait être favorable à la suppression d’une disposition qu’il a lui-même proposée.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mais elle n’a pas de caractère budgétaire !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Si, monsieur le rapporteur général, car il s’agit de s’assurer que le respect des pourcentages dont nous venons de parler est bien contrôlé, et par voie de conséquence que les sommes dues sont bien recouvrées. Si les contrôles n’étaient pas rendus fiables par cette disposition, une évaporation des recettes perçues au titre de la TGAP risquerait de se produire.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je tiens simplement à souligner que la rédaction de l’article 28 ter manque de précision, dans la mesure où cet article fixe les conditions et les modalités de la prise en compte des matières premières permettant de produire des biocarburants « notamment en matière d'exigence de traçabilité. »
La commission des lois du Sénat n’apprécie guère que l’adverbe « notamment » figure dans les textes législatifs. La commission des finances non plus !
M. le président. Je mets aux voix l'article 28 ter.
(L'article 28 ter est adopté.)
Article 29
L’article 220 octies du code général des impôts est complété par un VII ainsi rédigé :
« VII. – Le bénéfice du crédit d’impôt mentionné au I est subordonné au respect de l’article 53 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 29
M. le président. L'amendement n° 384 rectifié, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 29
Insérer un article ainsi rédigé :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 4° du II de l’article 199 ter B, au 1° du II de l’article 199 ter C, au 4° du II de l’article 199 ter D, au e du I de l’article 199 terdecies-0 B, à la seconde phrase du seizième alinéa du III de l’article 220 octies, au premier alinéa du I de l’article 235 ter ZCA, au premier alinéa du k du II de l’article 244 quater B, au premier alinéa du 1 du I de l’article 885 I ter et au 1° du II des articles 1464 I, 1464 L et 1599 quinquies B, les mots : « (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d’aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie) » sont remplacés par les mots : « (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité » ;
2° Le IV de l'article 44 sexies est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Au second alinéa, les mots : « Pour les exercices clos à compter du 1er janvier 2014, » sont supprimés ;
3° A la seconde phrase du huitième alinéa du II de l’article 44 terdecies, au V de l’article 244 quater E, à la seconde phrase du huitième alinéa de l’article 1383 I et à la seconde phrase du cinquième alinéa du I quinquies B de l’article 1466 A, les mots : « 13 du règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d’aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie) » sont remplacés par les mots : « 14 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité » ;
4° Au III bis de l'article 220 octies, les mots : « (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 » sont remplacés par les mots : « (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 » ;
5° Le 4 de l'article 238 bis est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « 1 de l’article 12 du règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie) » sont remplacés par les mots : « 3 de l’article 17 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité » ;
b) Au 3°, les mots : « 15 du règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 » sont remplacés par les mots : « 17 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 » ;
6° Au seizième alinéa du k du II de l'article 244 quater B, les mots : « 30, 31, 33 et 34 du règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission, du 6 août 2008, » sont remplacés par les mots : « 2, 25 et 30 et des 1, a du 2 et 3 de l'article 28 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement de clarification, qui a pour objet de modifier plusieurs articles du code général des impôts, afin que ceux-ci renvoient au règlement général d’exemption par catégorie, le RGEC, du 17 juin 2014.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 29.
Article 30
I. – L’article 278 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 3°, les mots : « . Ces dispositions ne s’appliquent pas aux opérations relatives aux équidés lorsque ceux-ci ne sont normalement pas » sont remplacés par les mots : « et qui sont normalement » ;
2° Le 3° bis est complété par un d ainsi rédigé :
« d) Produits de l’horticulture et de la floriculture d’ornement n’ayant subi aucune transformation ; ».
II. – Le I s’applique aux opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2016. – (Adopté.)
Article 30 bis (nouveau)
I. – Le F de l’article 278-0 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin du 1°, les mots : « à l’exception de ceux qui sont donnés dans les établissements où il est d’usage de consommer pendant les séances » sont supprimés ;
2° Au 2°, les mots : « exclusivement accès à des concerts donnés » sont remplacés par les mots : « accès à des interprétations originales d’œuvres musicales nécessitant la présence physique d’au moins un artiste du spectacle percevant une rémunération ».
II. – Le I s’applique aux établissements affiliés au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz.
III. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
IV. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. L'amendement n° 155, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Avec l’article 30 bis, ce n’est plus l’open bar, mes chers collègues : c’est l’happy hour ! (Sourires.)
Plus sérieusement, cet article prévoit d’élargir le champ d’application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux spectacles donnés dans des établissements où il est d’usage de consommer pendant les séances – je ne parle pas des séances de nuit, mes chers collègues ! (Nouveaux sourires.) –, tels que les discothèques ou les dancings, ainsi qu’aux « interprétations originales d’œuvres musicales nécessitant la présence physique d’au moins un artiste du spectacle percevant une rémunération », par exemple celle d’un disc-jockey. Il étend donc une niche fiscale.
Par ailleurs, la disposition ne concernerait que 1 800 établissements extrêmement hétérogènes. Autant on peut comprendre que le taux réduit de TVA à 5,5 % s’applique aux spectacles vivants, autant l’élargissement prévu ici ne semble pas se justifier.
La commission souhaite donc la suppression de cet article introduit par l’Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Tout cela sent le vécu, monsieur le rapporteur général… Vous semblez avoir une bonne connaissance du milieu ! (Rires.)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Oui, je connais le monde de la nuit, mais c’est celui des séances de nuit du Sénat ! (Mêmes mouvements.)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. En tout cas, le Gouvernement n’était pas favorable à l’introduction d’un tel article à l’Assemblée nationale. Il s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. En conséquence, l'article 30 bis est supprimé.
Article 30 ter (précédemment examiné)
M. le président. L’article 30 ter et l’amendement n° 87 rectifié ter portant article additionnel après l’article 30 ter ont été examinés par priorité.
Article 30 quater (nouveau)
I. – À la fin du II de l’article unique de la loi n° 2014-237 du 27 février 2014 harmonisant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicables à la presse imprimée et à la presse en ligne, la date : « 1er février 2014 » est remplacée par la date : « 12 juin 2009 ».
II. – Le I s'applique à compter du 1er janvier 2016.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, sur l'article.
M. David Assouline. Avec cet article, nous abordons la question de l’égalité fiscale au sein de toute la presse, quel que soit son support, papier ou numérique, conformément au principe de neutralité technologique.
La loi du 12 juin 2009 a reconnu que la presse en ligne faisait partie intégrante de la presse en général. Dès lors, et par voie de conséquence, la fiscalité qui s’appliquait à la presse en général, à savoir un taux réduit de TVA à 2,1 %, aurait dû s’appliquer à la presse en ligne.
Or, en raison de la lenteur législative à interpréter la directive européenne TVA – un manque de réactivité dont nous avons trop souvent fait preuve devant la révolution numérique –, entre autres, ce n’est qu’au mois de février 2014 que les deux assemblées ont adopté à l’unanimité une loi qui reconnaît clairement que la presse en ligne devrait bénéficier du même taux réduit de TVA à 2,1 % que la presse imprimée. En définitive, nous sommes responsables de ce retard à mettre en conformité le droit de la presse redéfini en 2009 avec le droit fiscal qui devrait en résulter.
Notre lenteur législative a créé une ambiguïté qui est à l’origine de la question posée aujourd’hui. En effet, les services fiscaux ont continué à demander que soit appliqué un taux de TVA à 19,6 %, puis à 20 %, aux entreprises de la presse numérique, alors qu’il n’était pourtant plus possible de les distinguer juridiquement des entreprises de la presse en général, qui, elles, bénéficiaient d’un taux réduit de TVA à 2,1 %.
Certains titres émergents de la presse numérique, compte tenu de toutes les difficultés qu’il y a à percer, à faire émerger une innovation que chacun salue aujourd’hui, ont considéré que leurs chances de se développer et de s’implanter étaient réduites à néant si on leur appliquait un taux de TVA dix fois plus élevé que celui qui était en vigueur pour le reste de la presse.
En février 2014, la loi que nous avons votée leur a donné raison. Il est donc déraisonnable d’exiger aujourd’hui de ces sociétés de presse qu’elles règlent des impayés de TVA, qui sont de surcroît majorés de lourdes pénalités, comme si elles avaient fraudé.
C’est d’autant plus déraisonnable que la lenteur à mettre en conformité le droit fiscal avec le droit de la presse est à mettre à notre actif, ou plutôt à notre passif ! Nous viendrions en quelque sorte sanctionner les victimes de ce qui s’apparente à une inconséquence législative au regard des deux principes constitutionnels que sont la liberté de la presse et l’égalité fiscale.
C’est pourquoi je défends l’article 30 quater, dans sa rédaction transmise par l’Assemblée nationale après l’adoption d’un amendement cosigné par l’ancien Premier ministre, M. Jean-Marc Ayrault, et par le président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, M. Patrick Bloche, et défendu par Mme la rapporteur générale de la commission des finances, Valérie Rabault ! (Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. André Gattolin applaudissent.)
M. Jean-Claude Requier. C’est l’affaire Mediapart !
M. le président. L'amendement n° 156, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je ne connais pas du tout l’affaire qui vient d’être évoquée. Comme il s’agit d’un cas particulier, je ne me permettrais pas de me prononcer sur le fond. En revanche, j’exposerai les trois raisons qui nous poussent à souhaiter la suppression de l’article 30 quater.
Premièrement, comme M. le secrétaire d’État l’a rappelé lors d’un débat similaire qui s’est déroulé pendant l’examen du projet de loi de finances pour 2016, la Commission européenne a engagé une procédure contre notre pays pour qu’il cesse d’appliquer un taux réduit de TVA à la presse en ligne. Comme cette procédure est en cours, nous ne souhaitons pas fragiliser la position de la France.
Deuxièmement, il faut rappeler que le principe d’égalité devant l’impôt n’a pas été respecté : certains journaux ont appliqué le taux de TVA réellement en vigueur, quand d’autres ont choisi d’appliquer un taux réduit de TVA. En pratique, je ne sais pas comment on rembourserait les entreprises qui se sentiraient lésées si l’article n’était pas supprimé.
Troisièmement, et plus fondamentalement peut-être, la jurisprudence constitutionnelle, que vous connaissez tous, mes chers collègues, ne reconnaît le caractère rétroactif des mesures fiscales que dans les cas où il existe un motif d’intérêt général suffisant, ce qui ne nous semble pas avéré dans le cas présent.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Ce débat doit être conduit de manière très précise, car ses différents aspects seront probablement examinés de près.
Plusieurs journaux en ligne – on peut sans aucune honte prononcer le nom de Mediapart, même si ce n’est pas l’unique journal concerné – ont appliqué de leur propre chef un taux de TVA réduit à 2,1 % à leurs activités, alors même que les services fiscaux leur avaient clairement indiqué, en réponse à leur propre demande, que le taux de TVA à appliquer était le taux normal, à 19,6 % à cette époque.
L’administration fiscale fondait son avis sur l’analyse des directives européennes, sur lesquelles s’est d’ailleurs également appuyée la Commission européenne pour engager des poursuites contre la France, après que notre pays a décidé, en 2014, d’appliquer un taux réduit de TVA à la presse en ligne.
Comme le précise parfaitement la Commission européenne, la situation légale est aujourd’hui très claire : en vertu de la règle communautaire, la directive TVA exclut expressément l’application d’un taux super-réduit de TVA aux services de presse en ligne, qui constituent un service fourni par voie électronique, qu’il s’agisse du champ d’application du taux de TVA ou de son niveau.
L’analyse de la Commission européenne est donc la même que celle à laquelle était arrivée l’administration fiscale en 2008, lorsqu’elle a adressé un courrier à la directrice générale de la SAS Mediapart – j’ai ce courrier entre les mains, mais je ne peux malheureusement pas le diffuser pour des raisons tenant au secret fiscal –, pour lui signifier clairement que, en conformité avec le droit européen, le droit français prescrivait d’appliquer un taux de TVA à 19,6 %.
Les entreprises de presse en ligne qui ont délibérément choisi d’appliquer un taux réduit de TVA n’ont posé aucune question prioritaire de constitutionnalité – ou QPC –, voie qui leur était pourtant ouverte, et n’ont pas non plus contesté l’avis rendu par l’administration fiscale devant les tribunaux, que ce soit au moment où cet avis leur a été signifié ou même plus tard, au moment où elles ont fait l’objet de redressements fiscaux.
Ces entreprises auraient pourtant pu lancer une procédure judiciaire, afin de mettre fin à l’obligation de payer des arriérés de TVA. Elles pouvaient notamment avoir recours à la procédure du sursis à payer, mais elles n’ont apparemment pas souhaité la mettre en œuvre.
Tout ou presque a déjà été dit au sujet du motif d’intérêt général. Il revient au Conseil constitutionnel de l’apprécier. En ce qui nous concerne, nous considérons que les cas qui nous intéressent ne répondent pas à ce motif, mais le Conseil constitutionnel pourrait très bien considérer qu’il en est autrement. Seulement, le Conseil n’a jamais eu à se prononcer sur le sujet, car il n’a jamais été saisi par la voie d’une QPC. Je le répète : je ne comprends pas pourquoi personne n’a eu recours à cette procédure jusqu’à présent.
Enfin, l’application du taux réduit de TVA à la presse en ligne pose un problème d’égalité des contribuables devant l’impôt. En effet, les deux ou trois entreprises de presse que j’évoquais tout à l’heure ont certes appliqué de leur propre chef un taux réduit de TVA à 2,1 % à partir de 2008, mais tous les organismes de presse en ligne qui se sont développés par la suite ont, quant à eux, appliqué un taux de TVA à 19,6 %.
Je ne citerai aucun nom, mais vous connaissez tous ces sites en « .fr » ! À l’époque, le débat était connu de tous. Des amendements tendant à faire appliquer un taux réduit de TVA au secteur de la presse en ligne avaient déjà été déposés lors de l’examen des différentes lois de finances et avaient tous été rejetés par le Parlement.