M. Jean-Pierre Raffarin. C’est scandaleux !
M. le président. Votre temps de parole est épuisé !
M. David Rachline. … vous qui n’êtes pas respectueux des élections et encore moins des élections sénatoriales !
M. Alain Bertrand. Vous votez contre tout, dans toutes les régions !
M. David Assouline. Retirez-vous dans le Languedoc, la droite !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour le groupe du RDSE. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, n’ayons pas peur de ceux qui soufflent le vent de la tempête : la République en a vu d’autres ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et républicain et de l'UDI-UC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
Notre assemblée, dans ce contexte difficile, s’apprête à se prononcer sur le projet de loi de finances pour 2016.
Nous avons examiné quelque 400 amendements en première partie et un nombre à peu près équivalent en seconde partie. Les amendements ont porté, dans une large proportion – plus d’une centaine d’amendements ! – sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Preuve de l’intérêt que porte la Haute Assemblée, sur toutes les travées, à cette question, et ce conformément, d’ailleurs, à notre mission constitutionnelle. De nombreux amendements ont également été déposés sur les articles non rattachés, qui constituent quasiment une troisième partie du projet de loi de finances.
Les graves événements qui ont frappé notre pays au cours de ces dernières semaines se sont télescopés avec cet exercice annuel. Les attentats du 13 novembre dernier étant survenus après l’adoption, en première lecture, du projet de loi de finances pour 2016 par l’Assemblée nationale, c’est au Sénat qu’est revenue la responsabilité d’adopter les mesures exceptionnelles relevant des missions régaliennes de l’État, à savoir les missions « Sécurités », « Justice » et « Défense ».
Ces mesures, nous le voulons tous, devront être appliquées sans délai, afin de remédier le plus rapidement possible à la situation d’insécurité que craignent nos concitoyens, une situation qui fait partie, avec celle de l’emploi, de leurs préoccupations prioritaires.
Il faut aussi, comme nous l’avons rappelé au cours des débats, que la Commission européenne prenne en compte les dépenses militaires exceptionnelles assumées, au nom de l’Europe, afin de défendre les objectifs énoncés dans les traités fondateurs de l’Union européenne. C’est ce que souhaite notre groupe, dont l’engagement européen correspond à une conception exigeante de l’Europe, une conception qui ne se limite pas à un projet mercantile et technocratique et qui doit, plus que jamais, être un projet politique au sens le plus noble. Oui, nous avons besoin de l’Europe et d’une Europe forte : c’est l’intérêt de la France !
Comme chaque année, le groupe du RDSE a formulé nombre de propositions pour tenter de construire un budget à la fois responsable, solidaire et, surtout, favorable à la croissance et au développement économique, sans lesquelles rien n’est possible sur le long terme.
Les quelque soixante amendements que nous avons déposés sur l’ensemble du texte, et que nous avons tous défendus en séance publique, témoignent de cette volonté, par-delà les clivages idéologiques et partisans. Nous avons apprécié les débats toujours constructifs, aussi bien avec le Gouvernement, le rapporteur général qu’avec les autres groupes politiques.
Nous nous félicitons d’avoir permis l’adoption de plusieurs amendements significatifs. Ainsi, en première partie, comme je l’ai mentionné la semaine dernière, nous avons fait reconnaître le principe d’un traitement fiscal égal des structures non lucratives du secteur médico-social.
Je note aussi que c’est par un amendement du RDSE qu’a été abaissé le taux de TVA sur les produits hygiéniques reconnus de première nécessité.
Nous avons, surtout, beaucoup défendu les intérêts des territoires ruraux, notamment en préservant les ressources des chambres d’agriculture.
Ces mêmes territoires, nous les avons aussi défendus lors de l’examen de la mission « Politique des territoires ». Leur revitalisation doit être une priorité, alors que les grandes métropoles sont soumises à des pressions démographiques de plus en plus fortes. Nous devons rééquilibrer la relation entre les grandes villes et les territoires ruraux, sans les opposer ; les remontées que nous avons du terrain nous le confirment. Concernant une autre mission, nous avons fait adopter un amendement de nature à préserver la géographie prioritaire de la politique de la ville. En tout état de cause, nous ne pouvons que déplorer le rejet des crédits de cette mission.
Nous avons fait entendre la voix des collectivités et des élus de terrain, dont il faut reconnaître les efforts importants réalisés en faveur du redressement des finances publiques et de l’activité économique de notre pays.
Nous avons œuvré pour la préservation de l’investissement public, en particulier des bourgs-centres. Ainsi, une enveloppe de 300 millions d’euros leur sera consacrée dans le cadre de la création du fonds, doté de 1 milliard d’euros, en faveur du soutien à l’investissement local.
Mes chers collègues, le Sénat représente les collectivités territoriales, aux termes de la Constitution. C’est encore l’empreinte que nous avons essayé d’exprimer dans ce budget.
Notre pays traverse une période particulièrement difficile, comme nous le savons tous : les chiffres de l’emploi et de l’économie, tout comme les résultats électoraux de dimanche dernier, nous le rappellent. Les parlementaires que nous sommes doivent, plus que jamais, être à la hauteur des défis et savoir répondre aux attentes légitimes de la population, que ce soit en termes de sécurité, d’emploi ou d’exemplarité.
Toutefois, mes chers collègues, l’adoption de plusieurs de nos amendements les plus significatifs – nous espérons que l'Assemblée nationale les maintiendra ! – ne suffira pas à nous faire approuver le texte issu des travaux du Sénat.
Il s’agit en effet d’un budget incomplet, puisque près du tiers des missions de la seconde partie n’a pas été adopté, alors que ce sont les missions qui touchent à des secteurs essentiels pour notre pays : agriculture, politique d’immigration et d’asile, culture, écologie, santé, logement, politique des territoires, médias et presse, gestion des ressources humaines. Comment approuver un budget ainsi amputé ?
Il est vrai que l’on peut relever de réels apports. Toutefois, force est de constater que l’attitude constructive qui a prévalu n’a pas permis d’aboutir à la proposition d’un budget alternatif sur lequel nous aurions pu réellement nous prononcer.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La LOLF nous l’interdit !
M. Jacques Mézard. Le RDSE, réfractaire aux postures par trop partisanes, ne peut que déplorer ce résultat final.
Par conséquent, l’ensemble des membres du RDSE, à l’exception de notre collègue Gilbert Barbier, s’opposera à la copie du projet de loi de finances pour 2016 élaborée par la majorité sénatoriale. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour le groupe les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voilà donc au terme de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, qui sera, rappelons-le, le dernier, en année pleine, du quinquennat de François Hollande.
M. Hubert Falco. Tout à fait !
Mme Frédérique Espagnac et M. Alain Bertrand. Du premier quinquennat !
M. Philippe Dallier. En comptant le collectif budgétaire de l’automne 2012, c’est donc la cinquième fois que la majorité gouvernementale a l’occasion de traduire ses options politiques en mesures budgétaires. Pour quels résultats jusqu’à présent ?
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Aucun !
M. Philippe Dallier. Alors que nous débattions de ce projet de loi de finances sont tombés les derniers chiffres du chômage.
M. Bruno Sido. Des claques !
M. Philippe Dallier. Ils sont calamiteux : 42 000 chômeurs de plus !
La croissance sera de 1,1 % ou, au mieux, de 1,2 % en 2015, et vous n’anticipez qu’un maigre 1,5 % de croissance pour l’an prochain, ce qui est, certes, prudent, mais tellement insuffisant.
Pourquoi en sommes-nous là, mes chers collègues ? Pourquoi, alors que les taux d’intérêt, l’euro, mais aussi les matières premières sont au plus bas, la croissance reste-t-elle aussi faible chez nous ? Pourquoi, partout en Europe, les autres font-ils mieux que nous ?
Ce sont bien les questions que se posent tous les Français, mais aussi nos partenaires, qui finissent d’ailleurs par regarder la France comme l’homme malade de l’Europe.
Si certains à gauche cherchent encore des explications aux résultats des élections de dimanche dernier, je leur répondrai simplement : commencez donc par regarder cela !
M. Dominique Bailly. Attendez dimanche prochain !
M. Didier Guillaume. Ce n’est guère mieux pour vous !
M. Philippe Dallier. Pourquoi ? La réponse est pourtant claire, et le Président de la République lui-même a fini par le reconnaître. À l’automne 2012, vous avez manié l’assommoir fiscal avec une telle brutalité que vous avez étouffé la croissance et la consommation. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Depuis, vous courez derrière les conséquences sans aller assez loin, faute d’avoir le courage d’engager les réformes nécessaires, c'est-à-dire de baisser les dépenses pour redonner de l’air à nos entreprises, du pouvoir d’achat aux Français et pour réduire le déficit.
M. Jean-Louis Carrère. Continuez comme cela ! Vous allez voir ce que cela va donner ! Vous n’avez donc rien compris ?
M. Philippe Dallier. Ce projet de loi de finances pour 2016 en est l’illustration parfaite.
Côté recettes, nous avons connu, en plein débat budgétaire, un épisode « de panique à bord au Gouvernement », alors que les Français recevaient leur avis d’impôt sur le revenu et découvraient, ahuris, même chez les plus modestes, que votre discours sur la pause fiscale était un leurre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Sido. C’est exact !
M. Didier Guillaume. On a corrigé vos erreurs !
M. Thierry Carcenac. Ce sont vos mesures !
M. Philippe Dallier. Comment en serait-il autrement, alors que le produit de l’impôt sur le revenu a progressé de 25 milliards d'euros depuis 2012 ? Vous parlez de justice fiscale, mais tout le monde a été touché.
Pour calmer les alarmes, vous avez, en catastrophe, trouvé 2 milliards d'euros pour exonérer d’impôt sur le revenu les personnes les plus modestes, oubliant une nouvelle fois les classes moyennes, qui sont et restent les grandes oubliées du projet de loi de finances pour 2016.
Il est vrai, mes chers collègues, que nous sommes en désaccord sur la définition des classes moyennes ; nos débats l’ont encore montré. Du reste, ce n’est guère étonnant, puisque, pour François Hollande, à partir de 4 000 euros de revenu par mois, on est riche !
M. Roger Karoutchi. Ah ça !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Eh oui !
M. Philippe Dallier. Il l’a dit : il n’aime pas les riches ! (M. Maurice Vincent s’exclame.)
M. Christian Cambon. Il vit avec !
M. Philippe Dallier. Mes chers collègues, avec 4 000 euros par mois, un célibataire paie 7 321 euros d’impôt sur le revenu. Rajoutez-y les impôts locaux et le prix d’un loyer dans une grande ville, vous comprendrez alors pourquoi beaucoup de jeunes préfèrent partir sous d’autres cieux pour tenter de réussir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l'UDI-UC. – M. Jean-Louis Carrère s’exclame.)
Riche avec 4 000 euros par mois ? Allons donc ! Que dire alors de ceux qui gagnent 2 500 euros par mois et qui sont soumis, comme les précédents, au taux marginal d’imposition de 30 % ?
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Philippe Dallier. Oui, la majorité sénatoriale a une autre vision des choses, et elle l’a de nouveau traduite dans ce projet de loi de finances, en cherchant aussi à soulager le fardeau fiscal des classes moyennes et des familles. (Mme Marie-France Beaufils s’exclame.)
Nous avons aussi pensé aux agriculteurs, qui souffrent en silence, mais dont la colère gronde, et nous nous réjouissons de voir le Gouvernement reprendre quasiment toutes nos propositions dans le projet de loi de finances rectificative pour 2015, que nous discuterons à la fin de cette semaine.
M. Didier Guillaume. Ben voyons !
Un sénateur du groupe socialiste et républicain. Vous voulez le voter ?
M. Philippe Dallier. Et que dire aussi des entreprises ?
Votre projet de budget pour 2016 revenait malheureusement sur la promesse de réduction des charges liée à la montée en puissance du pacte de responsabilité. La majorité sénatoriale vous a aidés à tenir vos promesses, en faisant sauter le décalage au 1er avril prochain, pour ramener au 1er janvier la nouvelle phase de baisse des charges.
Pour aller plus loin, il faudrait bien sûr faire des économies sur les dépenses, ce que vous n’osez manifestement pas faire, en tous les cas, dans des proportions qui nous permettraient de redonner de l’air à notre économie et de réduire le déficit public.
M. Alain Néri. C’est vous qui ne manquez pas d’air !
M. Philippe Dallier. Votre budget n’envisageait qu’une réduction de 1 milliard d'euros du déficit du budget de l’État – un petit milliard, mes chers collègues, un milliard seulement ! –, alors même que vous amputiez encore une fois les dotations aux collectivités locales de 3,6 milliards d'euros et que nous constatons la chute de l’investissement public que vous aviez niée jusqu’à présent.
Quant aux hausses d’impôts locaux qui en découleront également, vous êtes trop heureux de repasser le mistigri aux élus locaux. Heureusement, le Sénat a su corriger le tir ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées de l'UDI-UC.)
Réduire les dépenses, c’est possible, et nous l’avons encore démontré en remettant, par exemple, un peu d’équité entre le secteur public et le secteur privé pour ce qui concerne les jours de carence,...
Mme Éliane Assassi. Ah !
M. Philippe Dallier. ... en réformant l’aide médicale de l’État, qui est un puits sans fond, en réduisant le nombre de fonctionnaires hors missions régaliennes,...
M. Dominique Bailly. Lesquelles ?
M. Philippe Dallier. ... en ralentissant le glissement vieillesse-technicité, le GVT.
Il faudrait aller plus loin, mais vous le savez tous, mes chers collègues, la LOLF étant ce qu’elle est, il n’est pas possible, au travers d’une loi de finances, de faire beaucoup plus.
Nous avons également été amenés à repousser les crédits d’un certain nombre de missions, non pas, contrairement à ce que vous répétez, monsieur le secrétaire d'État, parce que nous voudrions dépenser plus,...
M. Didier Guillaume. Mais si !
M. Philippe Dallier. ... mais parce que les crédits sont manifestement insincères, car sous-estimés.
M. Gérard César. Eh oui !
M. Roger Karoutchi. C’est exact!
M. Philippe Dallier. Je citerai la mission « Égalité des territoires et logement », que je connais le mieux : il manque manifestement entre 300 millions d'euros et 400 millions d’euros. Excusez du peu !
Mme Sylvie Goy-Chavent. En effet !
Mme Catherine Troendlé. C’est lamentable !
M. Philippe Dallier. Le Parlement n’ayant pas le pouvoir d’augmenter les crédits, nous ne pouvons donc que les repousser pour manifester notre désaccord sur ces budgets en trompe-l’œil, qui vous conduiront nécessairement, en cours d’année, comme cela a été le cas en 2015, à réajuster les choses à coups de rabot ou alors à creuser le déficit.
La majorité sénatoriale est parfaitement dans son rôle en pointant du doigt l’insincérité manifeste des crédits de certaines missions.
Mes chers collègues, il me reste à remercier le rapporteur général du travail accompli (M. Philippe Bas acquiesce.), ainsi que Mme la présidente de la commission des finances. Je tiens également à vous remercier, monsieur le secrétaire d'État, de la qualité de nos échanges, même si cela n’aura pas suffi à nous faire changer d’avis.
Votre projet de budget pour 2016 n’était pas un bon projet. Le Sénat aura fait ce qu’il a pu pour l’améliorer. Le groupe Les Républicains du Sénat votera donc le projet de loi de finances pour 2016 ainsi modifié. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. François Zocchetto, pour le groupe UDI-UC.
M. François Zocchetto. Monsieur le secrétaire d'État, nous ne vous comprenons pas. La France compte plus de 5,4 millions de chômeurs. Après trois années à attendre l’inversion de la courbe, nous venons de franchir un nouveau record historique en matière de chômage.
M. Gérard Longuet. Hélas !
M. François Zocchetto. Dans le même temps – mais est-ce un hasard ? –, la France est devenue la vice-championne du monde des prélèvements obligatoires.
Mme Sylvie Goy-Chavent. Hallucinant !
M. François Zocchetto. Après trois années de déclarations d’intention à l’endroit de nos entreprises, 1 000 sociétés déposent chaque semaine leur bilan.
Malgré l’alignement des astres économiques, les entreprises françaises n’investissent plus. Le tissu économique local se délite.
Et le Gouvernement reste passif !
M. Gérard Longuet. Eh oui !
M. François Zocchetto. Personne n’est dupe en effet de l’absence d’envergure du texte qui a été déposé sur le bureau du Sénat voilà trois semaines.
Monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement a remis les clefs de notre destin collectif entre les mains d’une conjoncture internationale incertaine. C’était pourtant la dernière loi de finances utile de ce quinquennat ! Vous auriez pu engager la décrue fiscale attendue par nos concitoyens. Vous auriez pu moderniser notre fiscalité. Vous auriez pu moderniser nos politiques publiques.
Où sont passées les déclarations volontaristes du mois d’avril 2014 ?
Mme Catherine Troendlé. Absolument !
M. François Zocchetto. J’entends encore le Premier ministre soutenir farouchement : « Sans une croissance plus forte, nous ne ferons rien. Et la croissance ne se décrète pas. Elle se stimule, avec pragmatisme et volontarisme. »
M. Didier Guillaume. Nous le faisons !
M. François Zocchetto. Il ajoutait : « Sans croissance, pas de confiance, et sans confiance, pas de croissance. »
Où sont les réalisations du Premier ministre qui affirmait il n’y a pas deux ans : « Nous avons besoin de nos entreprises, de toutes nos entreprises, de nos PME, de nos start-up, de nos artisans. » En tout cas, elles ne sont pas dans ce projet de loi de finances.
La majorité sénatoriale a ainsi dû relever la lourde tâche de donner à ce projet de loi de finances inerte le souffle qui lui manquait. Nous avons tâché de produire un texte assez significatif pour envoyer ce message d’espoir à nos concitoyens : cette politique, la politique du Gouvernement, n’est pas une fatalité ! Un avenir différent est possible.
Pour ce faire, la majorité sénatoriale a investi plus de 4 milliards d’euros pour répondre aux attentes des Français. Je ne puis citer tout le travail important qui a été accompli durant les trois semaines qui viennent de s’écouler, mais nous avons proposé la décrue de l’impôt sur le revenu des classes moyennes, la hausse du quotient familial pour les familles, la rénovation du pacte Dutreil pour nos entreprises, la réforme de la fiscalité des plus-values de cessions mobilières, la réforme de l’actualisation des valeurs locatives cadastrales.
Je tiens à évoquer la prorogation de l’avantage fiscal sur le suramortissement des entreprises. C’était en effet une proposition du groupe UDI-UC lors de la précédente loi de finances, qui a été adoptée par le Sénat lors de l’examen de la loi « Macron ». Après avoir participé à la création de ce mécanisme, nous sommes aujourd'hui heureux de proposer son adaptation de façon qu’il bénéficie au plus grand nombre possible d’entreprises.
Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de vous poser une question. Tous les textes économiques et financiers que nous examinons depuis maintenant près de trois ans donnent lieu à de terribles affrontements entre, d’une part, le Gouvernement et, d’autre part, les frondeurs, les écologistes et les élus du Front de gauche.
Mme Sylvie Goy-Chavent. Oui !
M. François Zocchetto. Vous avez accordé il y a quelques mois des pouvoirs accrus aux régions en matière économique. Plus que jamais, celles-ci sont devenues les interlocutrices des artisans et des entreprises en matière d’apprentissage, de formation professionnelle et d’investissement.
Or, depuis dimanche dernier, nous assistons à une course à l’échalote entre les socialistes, le Front de gauche et les écologistes (Eh oui ! sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.),…
M. Didier Guillaume. Balayez donc devant votre porte !
M. Dominique Bailly. Pas de leçons !
M. François Zocchetto. … qui fusionnent leurs listes chaque fois que cela est possible, y compris là où ne le Front national ne présente pas de menace. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC. – Exclamations sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. Dominique Bailly. Parlez donc du budget !
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. C’est la réalité !
M. François Zocchetto. Comment voulez-vous qu’un entrepreneur, un artisan ne soient pas perplexes et ne doutent pas de votre sincérité ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Dominique Bailly. Ne donnez pas de leçon !
M. François Zocchetto. D’un côté, ils entendent Emmanuel Macron et Manuel Valls leur déclarer des « Je vous aime ! » à profusion ; de l’autre, ils voient Alain Rousset et Claude Bartolone s’allier avec les tenants d’une idéologie d’un autre âge ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC. – Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.) Comment voulez-vous établir de la confiance et restaurer de la croissance en envoyant des signaux aussi contradictoires et incompréhensibles ?
M. Jean-Louis Carrère. Décidément, vous n’avez rien compris !
M. François Zocchetto. La balle est dans votre camp, monsieur le secrétaire d’État.
Nous avons fait des propositions opérationnelles, pratiques, concrètes, pragmatiques. Il vous reste maintenant dix-huit mois. Vous devez les mettre à profit pour mettre en œuvre les réformes dont nous avons besoin et que nous ne cessons de réclamer : réforme du marché du travail, réforme des investissements, réforme des retraites, décrue de la dépense publique. Voilà ce qu’il vous reste à faire, en peu de temps !
Aussi, fidèles à leur engagement pour un État au service de l’économie et de nos concitoyens au lieu d’un État qui étouffe et écrase, les sénateurs du groupe UDI-UC voteront en faveur du projet de loi de finances pour 2016 tel qu’il a été réécrit par le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour le groupe CRC.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi de rappeler, en préambule, à M. Zocchetto, qui a évoqué les alliances en vue du second tour des élections régionales, que l’essence même du parti communiste français, depuis sa création, c’est le combat contre le capitalisme et le fascisme. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Christian Cambon. Et les goulags ? (Mme Éliane Assassi s’exclame.)
M. Thierry Foucaud. Nous voici parvenus, mes chers collègues, au terme de la discussion du projet de loi de finances pour 2016, et on se souviendra des circonstances tout à fait particulières qui l’ont marqué.
Ce texte, qui, à l’origine, contenait peu d’aspérités, s’est retrouvé « coincé », en quelque sorte, par les plus terribles attentats que notre pays ait connus. Il aura malheureusement fallu ces attaques terroristes pour que soit remis en question le dogme de la baisse des dépenses et des effectifs publics. Les dégâts provoqués par le chômage de masse, l’urgente transition énergétique ou encore la nécessité de faire face à la crise des réfugiés n’avaient pas jusqu’à présent permis une telle remise en cause.
Cette crise doit donc sonner le glas de la politique d’austérité qui enferme l’Europe dans la stagnation économique et menace la cohésion sociale. La réponse immédiate aux besoins de sécurité de nos concitoyens doit cependant être l’occasion d’ouvrir – et d’ouvrir en grand ! – un véritable débat sur la dépense publique en ce qu’elle a de déterminant pour la vie économique et sociale de la nation.
Agir contre le terrorisme et préserver notre peuple des dangers qui viendraient à le menacer nécessitent d’appliquer sans faiblir le principe de précaution, lequel appelle à repenser l’action publique à tous les niveaux.
Nous avons ainsi besoin d’une dépense publique renforcée dans le domaine de l’éducation, afin de lutter contre l’échec scolaire. Comme la précarité, le chômage et l’absence de perspectives, l’échec scolaire nourrit la désocialisation, la colère, la déculturation.
« Ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons. » : c’est ainsi que Victor Hugo avait, en son temps, résumé la nécessité de l’éducation et de l’instruction publiques. Cela reste vrai aujourd'hui. L’éducation est la mission cardinale de l’État !
Une politique audacieuse doit également être menée en matière de logement, d’emploi, de santé publique.
M. Bruno Sido. Avec quel argent ?
M. Thierry Foucaud. Il faut faire en sorte que chacun puisse trouver sa place dans la société, apporter sa sensibilité et son originalité, fût-ce pour changer l’ordre des choses par ailleurs, en lieu et place de la véritable « machine à exclure », qui continue de diviser. Cela demande des efforts à la collectivité et lui impose des objectifs sans commune mesure avec tout ce qui a pu se faire jusqu’à présent.
Surtout, mes chers collègues, nous devons abandonner le cadrage budgétaire européen, dont les limites viennent d’être démontrées. Il ne permet pas en effet de répondre aux défis du temps et aux besoins de la société. À cet égard, comment ne pas rappeler la lourde responsabilité des gouvernements qui se sont succédé au cours de ces dix dernières années, qui ont tout fait, j’y insiste, pour enterrer le vote des Français contre l’Europe libérale en 2005 ?
Il est temps – il est plus que temps ! – d’agir pour la santé publique, le développement des activités culturelles, le logement social, l’emploi.
C’est ce message que nous retenons de dimanche dernier : pas plus d’un électeur sur quatre n’a voté pour l’un des deux partis politiques qui conduisent depuis fort longtemps les affaires du pays.
Nous ne vous cacherons pas notre inquiétude face à la cristallisation et à l’influence des idées de division, de régression sociale et de chaos soutenues aujourd’hui par les six millions d’électeurs du Front national. Mais c’est bel et bien la somme des déceptions, des attentes non satisfaites, des limites imposées à la démocratie, …