Mme la présidente. Merci de conclure, mon cher collègue !
M. Michel Bouvard. Je conclus, madame la présidente. Les dispositifs actuels de zonage sont vecteurs d’iniquité et d’inefficacité. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
M. André Trillard. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. François Calvet.
M. François Calvet. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier Mme Estrosi Sassone, dont le rapport remarquable fait au sein de notre commission des affaires économiques a permis que nous ayons un bon débat sur le sujet.
Le secteur d’activité de la construction et du logement reste malmené, malgré les tentatives faites pour revenir sur les effets désastreux de la loi ALUR et autres textes d’encadrement du secteur de la construction et du logement.
Dans un environnement déjà atone, le nombre de logements autorisés a reculé, entre juillet 2014 et juillet 2015, de 4,2 %, et le nombre de chantiers engagés de 1,2 %.
Le logement privé et le logement intermédiaire sont au point mort ; seul le logement social, produit à grand renfort d’argent public et de stigmatisation des communes carencées, se maintient à un rythme de construction d’environ 120 000 logements par an.
Votre politique du logement s’est cristallisée, depuis 2012, autour du seul logement locatif social, alors que nos territoires ont fortement besoin d’un parc de logements diversifié, et que le financement du logement social a l’inconvénient de reposer sur un pilotage difficile à suivre des aides à la pierre et des aides à la personne.
L’article 56 du projet de loi de finances prévoit la création d’un fonds national des aides à la pierre.
Ce nouveau fonds va notamment se substituer au fonds national de développement d’une offre de logements locatifs très sociaux, créé par la loi du 18 janvier 2013.
Ce fonds avait pour mission de gérer les pénalités majorées des communes carencées, celles-ci devant être reversées – c’est ainsi que le dispositif nous avait été présenté – soit aux EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale, soit aux EPF, les établissements publics fonciers, des territoires concernés.
Les collectivités ont ainsi perdu le bénéfice de cette manne, sans disposer d’aucune visibilité sur son utilisation effective.
En réalité, cette ponction du budget des communes carencées justifie avant tout le désengagement de l’État du financement des opérations de logement, au détriment des organismes d’HLM et des collectivités territoriales.
Au titre des aides à la pierre, la communauté urbaine de Perpignan, en 2015, recevra seulement 1 200 000 euros de crédits de paiement au lieu des 2 200 000 euros contractualisés. Cela va obliger notre collectivité à assurer, pour le compte de l’État, l’avance des demandes de paiement des organismes, afin de ne pas les mettre en difficulté en termes de trésorerie.
L’État est en train de reproduire avec les collectivités territoriales délégataires des aides à la pierre ce qu’il a déjà fait avec les organismes d’HLM : il n’honore pas ses engagements financiers.
En résumé, il serait donc opportun – nous en sommes convenus en commission des affaires économiques – de lancer une évaluation des mécanismes de financement du logement social, celui-ci reposant de plus en plus sur d’autres acteurs que l’État.
Nous assistons désormais, sur nos territoires, à une multiplication du nombre de logements sociaux sans locataires. Les copropriétés ne peuvent plus être entretenues, et les collectivités n’ont plus les moyens de financer la construction et l’entretien des équipements publics, écoles, réseaux de transport et d’assainissement.
Nous sommes également confrontés à une désertification et donc à une dégradation de l’habitat dans les centres-villes, au profit de logements sociaux neufs situés en périphérie, qui coûtent cher à la collectivité publique.
Le financement de l’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat, n’est pas sécurisé, et de nombreux projets de réhabilitation devront être reportés.
Sur la seule communauté urbaine de Perpignan, les dossiers qui ne pourront être financés en 2015, faute de crédits de l’ANAH, représentent un montant total de près de 500 000 euros, alors même que la plupart des projets s’inscrivent dans le périmètre du futur programme de renouvellement urbain de notre centre-ville.
Les dispositions de ce projet de budget ne sont pas à la hauteur des difficultés que rencontrent tant les collectivités que les organismes d’HLM pour faire face à leurs besoins.
La politique du logement doit être repensée en tirant la leçon des erreurs commises dans l’élaboration des textes, tous plus dogmatiques qu’efficaces, votés ces dernières années.
Nous devons abandonner la politique de la punition au profit d’une politique de la construction et de la réhabilitation du patrimoine existant. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Yonnet.
Mme Evelyne Yonnet. Madame la présidente, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits alloués pour 2016 aux trois actions du programme 177, « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », s’élèvent à 1,44 milliard d’euros. Ils sont en hausse de 6 % par rapport à la loi de finances pour 2015 et continuent donc d’augmenter, comme chaque année depuis 2012.
L’action 11, Prévention de l’exclusion, a pour objet les allocations et prestations d’aide sociale versées aux personnes âgées et handicapées, ainsi que les actions de prévention et d’accès au droit. Ses crédits augmentent de 1,3 million d’euros par rapport au budget précédent.
L’action 12, Hébergement et logement adapté, représente 95 % des crédits du programme 177. Ses crédits augmentent également – de 69 millions d’euros –, ce qui permettra de financer un total de 103 500 places d’hébergement, soit plus de 10 000 places supplémentaires en un an.
Les crédits de l’action 14 « Conduite et animation des politiques de l’hébergement et de l’inclusion sociale », passent de près de 16 millions à 10 millions d’euros.
Toutefois, cette baisse s’explique en grande partie par le transfert budgétaire du Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, le FONJEP, vers le programme 163 « Jeunesse et vie associative ».
J’attire tout particulièrement votre attention sur deux orientations fortes de l’action 12.
En 2016, l’État sera mobilisé pour répondre au défi des migrations, avec l’objectif de créer 5 000 places de logement adapté pour les réfugiés et 1 500 places d’hébergement d’urgence pour les personnes sans solution sur le territoire national.
Il s’agit bien de sincérité budgétaire, contrairement à ce qu’a dit tout à l’heure M. le rapporteur spécial !
Par ailleurs, le plan triennal 2015-2017 de réduction du recours aux nuitées hôtelières sera poursuivi cette année, avec le développement de solutions alternatives.
L’objectif sur trois ans est de remplacer 10 000 nuitées hôtelières par la création de 2 500 places d’hébergement d’urgence pour les familles, de 9 000 places en intermédiation locative et de 1 500 places en pensions de famille.
Ces augmentations sensibles de crédits risquent cependant d’être insuffisantes.
Je tiens de ce point de vue, mes chers collègues, à relayer l’inquiétude des acteurs de terrain, qui accompagnent nos collectivités territoriales dans l’aide à l’insertion des personnes vulnérables.
Je connais bien ces acteurs, que nous avons auditionnés dans le cadre de la commission des affaires sociales : le SAMU social, la Fondation Abbé Pierre, Emmaüs, la Croix-Rouge, les Restos du cœur, ATD Quart Monde, la FNARS – Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale –, l’Union sociale pour l’habitat. J’en profite pour saluer leur travail remarquable.
Chaque année, les crédits votés en loi de finances initiale au titre du programme 177 se révèlent insuffisants, et font l’objet d’une réévaluation en loi de finances rectificative.
Au regard du 1,5 milliard d’euros finalement engagé en 2015, les crédits prévus pour 2016 me paraissent insuffisants.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Voilà ! Nous sommes d’accord !
Mme Evelyne Yonnet. Je rappelle que 3,5 millions de personnes sont mal logées en France, dont 140 000 sans domicile – un quart d’entre elles ont moins de 30 ans.
Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Evelyne Yonnet. Ces crédits sont calculés pour répondre au mieux à l’urgence de la situation actuelle. Toutefois, ils ne permettent pas d’offrir le minimum à de nombreuses familles de nos banlieues et des territoires isolés, et notamment aux milliers d’enfants hébergés.
En outre, ils ne nous donnent pas les moyens d’anticiper les prochaines migrations de réfugiés politiques et climatiques, à propos desquelles des réponses doivent être apportées à l’échelle européenne.
J’appelle donc le Gouvernement à poursuivre et à amplifier sa politique de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, en vue de renforcer l’égalité des territoires.
Malgré les inquiétudes dont j’ai fait part, je vous invite à voter en faveur des articles du projet de loi de finances 2016 relevant du programme 177 concernant l’hébergement, le parcours vers le logement et l’insertion des personnes vulnérables. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le logement constitue une priorité pour nos concitoyens, peut-être même la priorité des priorités.
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Jacques Mézard. Il représente en effet leur premier poste de dépenses, et grève très souvent lourdement leur pouvoir d’achat.
Chacun ici considère que le droit de vivre dans la dignité, c’est avant tout le droit au logement. L’État – quelle que soit l’orientation politique du Gouvernement – doit donc se donner les moyens d’élever la politique du logement au rang de priorité nationale.
C’est aujourd’hui, madame la ministre, en tout cas depuis que vous êtes en charge de ce poste, votre priorité et nous savons combien votre engagement est total.
D’ailleurs, je me réjouis que la construction reparte. Les derniers chiffres sont positifs. (Mme la ministre opine.) « Enfin ! », serais-je tenté de dire. Mais c’est d’abord le résultat de votre politique volontariste.
Madame la ministre, dans ce secteur, entre la prise de décision et le résultat, il faut des mois, souvent des années. (Mme la ministre acquiesce.) On ne peut juger une politique du logement qu’en considération de ce temps qui passe ; il est nécessaire.
La complexité et l’éparpillement de la politique du logement ont longtemps nui, et continuent de nuire à son efficacité. Son coût est estimé à 40 milliards d’euros, soit presque 2 % du produit intérieur brut national. De ce point de vue, la France fait des efforts importants, mais il en faut souvent plus. Il y a urgence, car 3,5 millions de nos concitoyens sont encore considérés comme « mal-logés ».
Faciliter l’acte de construire, c’est aussi un moyen de développer l’économie.
L’acceptabilité du poids de cette dépense publique par le contribuable dans un contexte budgétaire contraint implique de concentrer les efforts sur ceux qui en ont le plus besoin.
Nous le savons – on le constate depuis des décennies, quel que soit le gouvernement –, c’est d’abord l’absence de vision prospective et de réelle politique d’aménagement du territoire qui est souvent à l’origine des difficultés actuelles et des déséquilibres entre l’offre et la demande de logements. Le besoin de logements ne remonte pas à 2015, ni même à 2012 ; c’est malheureusement le résultat de décennies d’absence d’une politique d’aménagement du territoire suffisante. Nous connaissons les débats – certains y ont fait référence tout à l’heure – entre secteurs tendus et détendus. Il est peut-être urgent d’essayer de faciliter l’arrivée de populations dans des territoires et des départements où il n’y a pas suffisamment d’habitants, au lieu de les concentrer toujours au même endroit.
M. Michel Bouvard. Très bien !
M. Jacques Mézard. J’en viens à la construction des logements.
Nous constatons actuellement, je l’ai indiqué, une reprise des mises en chantier. À ce stade de l’année, nous avons dépassé la barre des 350 000 logements. C’est une très bonne nouvelle, mais, vous le savez, cela demeure encore insuffisant pour faire face à l’accroissement de la démographie. Il faut donc poursuivre l’effort entrepris.
Les normes de construction – nous en avons souvent parlé ici –, les délais et les contentieux renchérissent encore le coût de la construction. Le rapport pour avis de la commission des affaires économiques fait état de 30 000 logements bloqués pour ces raisons. C’est encore beaucoup trop ! C’est l’un des véritables chantiers sur lesquels le Parlement peut agir.
Les freins doivent être levés si l’on veut relancer l’emploi dans un secteur fragile et encore en difficulté. Il convient de poursuivre les actions en ce sens pour parvenir à enrayer la crise de l’offre de logement. Ce n’est pas facile, nous le savons.
Je retiendrai deux des caractéristiques principales des crédits de la mission « Égalité des territoires et logement » : la lisibilité et l’efficience.
En matière de lisibilité, j’évoquerai la création d’un fonds national des aides à la pierre ou le transfert de l’allocation de logement familiale au sein de la présente mission, dont le financement était auparavant assuré par la branche famille de la sécurité sociale.
À ce titre, la réforme des aides personnelles au logement, qui représentent 18,2 milliards d’euros, constitue un impératif pour concentrer les efforts sur ceux qui en ont le plus besoin et cibler plus efficacement les ménages les plus précaires.
C’est le sens de la prise en compte du patrimoine des bénéficiaires dans le calcul du revenu fiscal de référence à partir d’un seuil de 30 000 euros. La dégressivité des aides au-delà d’un loyer plafond permettra de contrer en partie les effets inflationnistes.
Madame la ministre, nous devons veiller à ne pas pénaliser certains ménages en difficulté ou à réduire le fort effet redistributif de ces aides pour des économies qui pourraient être mineures.
L’efficacité sociale de ces aides constitue donc l’un des chantiers sur lesquels nous devons poursuivre notre réflexion dans les années à venir, dans l’objectif de contenir une dépense qui ne cesse de progresser.
Dans ce budget, il y a des moyens de lutter contre la fraude aux aides personnalisées au logement, les APL. À mon sens, c’est important, notamment pour des raisons d’équité. Un amendement de la commission a pour objet la remise d’un rapport visant à étudier la création d’une base de données interministérielle relative au logement ; un tel document nous éclairerait sur l’utilité du dispositif.
L’accession à la propriété progresse ; elle doit être favorisée – c’est l’un de vos objectifs fondamentaux –, en particulier pour les jeunes. Nous soutenons pleinement l’élargissement des critères d’octroi du prêt à taux zéro intervenus avant et pendant l’examen du projet de loi de finances. Nous pouvons, me semble-t-il, saluer l’action que vous avez menée à cet égard.
Enfin, je tiens à saluer la hausse des crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ». Je pense que c’est une bonne chose.
Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE votera avec conviction les crédits de la mission « Égalité des territoires et logement ». (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Madame la présidente, monsieur le rapporteur spécial, madame, monsieur les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, il nous revient d’examiner les crédits de la mission budgétaire « Égalité des territoires et logement ».
Je souhaite vous exposer les grandes lignes et les évolutions de la politique que le Gouvernement mène en matière de logement et d’hébergement. Mon propos me permettra également d’apporter quelques éléments de réponse aux interrogations qui ont été soulevées.
Dans l’ensemble de ses composantes, mon ministère est doté d’un budget à la hauteur des objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés pour relancer la construction, aider les ménages à se loger et assurer l’hébergement des plus fragiles.
Un an après la présentation du plan de relance, les chiffres de la construction commencent à se redresser. Bien entendu, nos efforts doivent se poursuivre. La reprise des ventes se confirme, ce qui montre la bonne adaptation des mesures prises dans le cadre du plan de relance. Les ventes des promoteurs progressent ainsi de 18 % au troisième trimestre 2015 par rapport au troisième trimestre 2014. Les permis de construire et les mises en chantier sont repartis à la hausse depuis le début de cette année ; et je remercie M. Mézard de l’avoir rappelé.
Nous savons l’importance du logement parmi les préoccupations de nos concitoyens ; cela a été évoqué. Mais les problématiques se posent différemment selon les territoires. Nous devons donc adapter certains de nos dispositifs, et telle est bien notre volonté.
Ainsi, nous avons choisi de refonder le financement du logement social, afin de le pérenniser et de le sécuriser.
Pour ce faire, nous créons un fonds national des aides à la pierre, qui bénéficiera d’une gouvernance paritaire, entre l’État et les bailleurs sociaux ; je m’y engage devant vous. Le montant de ces aides s’élève à 500 millions d’euros.
Conformément aux engagements pris par le Président de la République, lors du dernier congrès de l’Union sociale pour l’habitat, l’USH, au mois de septembre dernier à Montpellier, le Gouvernement a déposé et fait adopter à l’Assemblée nationale un amendement visant à porter sa participation à 250 millions d’euros en 2016. Je peux vous confirmer une nouvelle fois que celle-ci sera maintenue à un niveau substantiel en 2017. Il est donc inexact de parler de « désengagement de l’État », comme j’ai pu l’entendre à plusieurs reprises aujourd'hui.
Par ailleurs, j’ajoute que le financement du logement social ne se limite pas aux subventions de l’État. Il faut également y ajouter 4 milliards d’euros d’aides fiscales, principalement le taux réduit de TVA à 5,5 %, l’exonération d’impôt sur les sociétés ou l’abattement de taxe foncière, ainsi que les financements des collectivités et d’Action logement.
J’évoquerai maintenant le livret A. Outre la baisse du taux, la diminution de la rémunération des banques, annoncée par le Président de la République au congrès de l’USH, créera une enveloppe d’environ 200 millions d’euros, qui sera redistribuée aux bailleurs, sous forme de bonifications d’intérêts dès l’année prochaine,…
M. Michel Bouvard. Très bien !
Mme Sylvia Pinel, ministre. … selon des modalités en discussion avec les acteurs du secteur, notamment le mouvement HLM.
D’une manière générale, notre politique en direction du logement social doit être confortée pour renforcer la mixité sociale dans nos villes et nos quartiers. Quinze ans après l’adoption de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU », il m’apparaît indispensable de repenser les outils pour que ce texte soit mieux appliqué et que la mixité sociale progresse concrètement dans notre pays.
Un projet de loi est en préparation, qui devrait être déposé au Parlement au premier trimestre de l’année 2016. Il portera sur la production de logements sociaux, sur leur attribution, ainsi que sur la politique des loyers.
Je souhaite également aborder l’hébergement, objet du programme 177.
Vous le savez, depuis plusieurs mois, notre pays doit faire face à l’accueil de réfugiés fuyant des zones de guerres. Nous engagerons donc 279 millions d’euros pour accueillir 30 000 personnes supplémentaires au cours des deux prochaines années.
Cet effort n’obérera nullement celui qui est réalisé en direction des personnes en situation de grande précarité. Je le rappelle, entre 2012 et 2015, nous sommes passés de moins de 82 000 à plus de 110 000 places pérennes d’hébergement. De nouveaux crédits viennent d’ailleurs d’être ouverts en 2015 pour l’hébergement de ces publics, qui, je tiens à le redire très clairement ici, n’entrent pas en concurrence avec les réfugiés. Cela a, au contraire, permis de prévoir plus de 13 000 places mobilisables pour faire face aux besoins supplémentaires d’hébergement cet hiver.
Ce rappel était nécessaire, car j’entends certains s’escrimer à tenter de faire croire le contraire et d’opposer les uns aux autres. Ce n’est pas acceptable.
Comme M. le rapporteur pour avis l’a rappelé, j’ai lancé au mois de mars dernier un plan triennal pour réduire le recours aux nuitées hôtelières, afin de sortir de la gestion d’urgence et d’encourager les solutions de substitution, notamment par l’intermédiation locative, avec 9 000 places prévues.
Ces modes d’hébergement sont non seulement mieux adaptés pour mettre en place un parcours de réinsertion, mais également moins coûteux. Vous avez été plusieurs à souligner la dynamique des crédits d’hébergement et la difficulté à provisionner les crédits suffisants.
Cependant, je tiens à préciser que l’État consent un effort exceptionnel pour 2016, en augmentant les crédits de ce programme de 160 millions d’euros, dont 90 millions d’euros étaient prévus dans le texte initial et 70 millions d’euros ont été ajoutés à la suite de l’adoption d’un amendement du Gouvernement par l’Assemblée nationale.
Le projet de loi procède également à une réforme des APL, à la suite des propositions du groupe de travail présidé par François Pupponi et réunissant des députés de toutes sensibilités politiques.
Comme je vous y invitais l’an dernier lors du débat sur les APL accession, votre commission des finances a demandé à la Cour des comptes un rapport sur ce sujet, qui a nourri la réflexion du Gouvernement. Nous nous sommes également appuyés sur un rapport d’inspection, qui vous a été transmis sous la forme d’une revue de dépenses.
Au final, le Gouvernement a retenu trois mesures, qui vont dans le sens d’une plus grande équité dans le calcul des aides.
Monsieur le rapporteur spécial, tout en saluant ces propositions, vous souhaitez que nous allions plus loin. En l’occurrence, vous proposez l’instauration d’un taux d’effort minimal. Je dois vous le dire, cette proposition ne me semble pas opportune ; son adoption conduirait à pénaliser les ménages les plus modestes qui habitent dans le parc social, notamment les familles monoparentales et les familles nombreuses.
Je suppose que nous aurons l’occasion d’aborder plus largement le sujet lors de l’examen de l’article 55, qui maintient l’APL accession. En effet, nous avons fait le choix de renforcer résolument l’accession à la propriété.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Nous en sommes heureux, mais c’est un peu tardif !
Mme Sylvia Pinel, ministre. En effet, si la vente de logements neufs est en progression de 18 % au troisième trimestre, l’accession reste encore trop faible et diminue même en Île-de-France.
Face à ce constat, nous avons décidé de consolider et d’amplifier les dispositifs de relance que nous avions mis en place. Ainsi, les critères d’octroi du prêt à taux zéro seront élargis pour rendre ce prêt encore plus efficace et permettre à davantage de ménages modestes d’accéder à la propriété, notamment les jeunes.
Dans le neuf, nous souhaitons, notamment, relever le plafond de revenus pris en compte, porter la quotité empruntée à taux zéro jusqu’à 40 % de l’opération et augmenter le différé d’amortissement à cinq ans au moins pour toutes les tranches de revenus.
Dans l’ancien, nous élargirons à toute la France le bénéfice du prêt à taux zéro, sous condition de travaux de réhabilitation à hauteur de 25 % du prix d’achat. Un amendement au présent projet de loi de finances a été adopté en ce sens par l’Assemblée nationale et un décret est en préparation pour la mise en œuvre de cette mesure dès le 1er janvier 2016.
Un autre moteur de la construction est le dispositif d’investissement locatif intermédiaire. En vigueur depuis un an, il connaît un succès certain et a besoin de stabilité ; les professionnels sont unanimes sur ce point. Pour répondre à votre question, monsieur Bouvard, j’indique que cette stabilité concerne également le zonage qui y est associé et que nous avons corrigé en août 2014, alors qu’il n’avait pas changé depuis une dizaine d’années.
Les mesures du plan de relance de la construction que nous avons engagé feront l’objet d’un comité de pilotage, réunissant prochainement les acteurs du logement. Il visera à s’assurer de leur bonne diffusion et à suivre les effets de ce plan sur la construction et sur les prix. C’est une question que vous avez soulevée, madame la sénatrice Lienemann : les aides publiques doivent bénéficier immédiatement et directement aux ménages.
Afin de favoriser la rénovation énergétique pour les ménages et les copropriétés, le crédit d’impôt pour la transition énergétique, le CITE, et l’éco-prêt à taux zéro sont reconduits. Vous le savez aussi, la meilleure manière de lutter contre les effets inflationnistes consiste à instaurer des conditions permettant une offre suffisante sur chaque segment du marché immobilier.
C’est l’objet même du plan de relance, conduit par le Gouvernement, qui agit sur tout le parcours résidentiel – je sais que ce sujet vous tient particulièrement à cœur, madame la sénatrice. Je constate à ce jour que l’augmentation des ventes s’accompagne d’une maîtrise des prix et que l’ensemble des professionnels s’accordent pour saluer la bonne adaptation des mesures et des dispositifs que nous mettons en œuvre.
J’ai d’ailleurs obtenu la semaine dernière des engagements des banques et des professionnels pour développer la distribution de l’éco-prêt à taux zéro auprès des ménages modestes et des copropriétés. En la matière, les résultats étaient insuffisants.
Pour mener notre politique, l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, est un opérateur précieux, et nous agissons pour pérenniser son action sur le plan à la fois environnemental et social.
J’ai entendu les craintes exprimées par plusieurs d’entre vous sur ce point. Aussi, je veux vous rassurer sur le fait que le budget de l’ANAH sera sanctuarisé l’année prochaine. L’agence contribuera ainsi à la rénovation de plus de 78 000 logements, dont 50 000 avec amélioration énergétique grâce au programme « Habiter mieux », pour lequel le ministère de l’écologie accentuera son soutien financier.
Au total, dans ce projet de loi de finances, les dépenses de mon ministère en matière de logement et d’hébergement s’élèveront à 18 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent 14 milliards d’euros au titre des dépenses fiscales.
Voilà très rapidement brossées les grandes orientations de la mission, et plus largement de notre politique.
Elles nous permettent, d’une part, d’accélérer le plan de relance de la construction et de favoriser la rénovation et, d’autre part, de mieux accompagner les parcours résidentiels et les projets de vie de nos concitoyens. J’aurai l’occasion, mesdames, messieurs les sénateurs, de compléter mon propos dans le cadre du débat interactif et spontané et au cours de l’examen des articles rattachés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)