M. Jacques Cornano. Cet amendement, qui s’articule en deux temps, a pour objet de proposer que l’on étudie l’opportunité d’une augmentation de la redevance perçue sur les tronçons routiers connaissant des problèmes de congestion ou dont l’utilisation par des véhicules produit une pollution atmosphérique et sonore.
Ainsi, l’article 7 quater de la directive 2011/76/UE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2011 dite « Eurovignette III », modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, prévoit un dispositif permettant d’internaliser dans la tarification du transport routier le coût des externalités négatives qu’il engendre, comme le coût d’une pollution atmosphérique ou d’une pollution sonore.
L’article 7 septies de cette même directive prévoit, pour les infrastructures situées dans des zones montagneuses, une majoration de la « redevance d’infrastructure perçue sur des tronçons routiers spécifiques qui connaissent de graves problèmes de congestion, ou dont l’utilisation par des véhicules cause des dommages importants à l’environnement ».
Ces mesures, qui n’ont à l’heure actuelle pas encore été transposées en droit national, permettraient de financer le report modal de la route vers le rail et pourraient alors constituer une réponse à des épisodes de pollution.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, corapporteur. Comme il s’agit d’une demande de rapport, l’avis de la commission est connu de tous, à savoir une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable. Néanmoins, le Gouvernement pourra sans doute apporter des précisions sur ses intentions, dès lors que cette mesure relève plutôt de la ministre chargée de l’écologie et des transports.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Il n’est pas certain qu’un tel rapport ait vocation à s’inscrire dans le cadre de ce projet de loi. De toute façon, monsieur le sénateur, votre amendement semble prématuré, dans la mesure où la Commission européenne a fait part de sa volonté de présenter en 2016 un paquet législatif routier, dont la tarification des infrastructures est l’un des trois piliers. Par conséquent, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Cornano, l'amendement n° 1123 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Cornano. Non, je le retire. Je précise néanmoins que le report modal est un objectif constant que nous appelons tous ici de nos vœux.
M. le président. L'amendement n° 1123 rectifié est retiré.
L'amendement n° 1124 rectifié, présenté par MM. Cornano, Antiste, Desplan, J. Gillot, Patient, Cazeau, Masseret et Karam, Mme Jourda et M. S. Larcher, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur les mesures envisageables face à des épisodes de pollution en raison de brume des sables dans les outre-mer.
La parole est à M. Jacques Cornano.
M. Jacques Cornano. Le département de la Guadeloupe a dû faire face à trois reprises au cours de cette seule année 2015 à une pollution en raison de brumes de sable, phénomène météorologique en provenance d’Afrique. De la poussière est charriée dans un couloir ininterrompu entre l’Afrique et les Caraïbes et est à l’origine d’une dégradation notable de la qualité de l’air. Le dernier épisode a eu lieu le 3 septembre dernier, au cours duquel les concentrations de particules fines élevées dans l’atmosphère ont dépassé le seuil de 50 microgrammes par mètre cube.
Ce phénomène provoque une pollution aux PM10, qui sont des particules en suspension dont la taille est inférieure à 10 microgrammes. Considérées comme parmi les polluants les plus dangereux, celles-ci pénètrent en profondeur dans les poumons et, pour les plus petites d’entre elles, jusque dans les alvéoles pulmonaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, corapporteur. Il s’agit d’une demande de rapport. Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Les épisodes de l’air provoqués par des brumes de sable ayant une origine naturelle, la mise en œuvre de mesures de réduction de la pollution s’avère impossible. Il est donc inutile de prévoir la remise d’un rapport spécifique du Gouvernement au Parlement sur ce sujet.
Néanmoins, je souhaite vous rassurer, monsieur le sénateur, en vous indiquant que des actions sont déjà mises en place pour surveiller la qualité de l’air et pour informer les populations, notamment les plus fragiles. En particulier, des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air donnent ces informations et les communiquent aux autorités.
Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Cornano, l'amendement n° 1124 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Cornano. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 1124 rectifié est retiré.
Article 11
I (Non modifié). – Le chapitre IV du titre III du livre III de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Est ajoutée une section 1 intitulée : « Lutte contre la présence de plomb » et comprenant les articles L. 1334-1 à L. 1334-12 ;
1° bis Après le mot : « concernés », la fin de la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1334-1 est remplacée par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , des familles et, le cas échéant, des femmes enceintes. Il incite les parents ou les titulaires de l’autorité parentale d’enfants mineurs à adresser ces derniers en consultation auprès d’un médecin. » ;
1° ter Au premier alinéa de l’article L. 1334-12, la référence : « du présent chapitre » est remplacée par la référence : « de la présente section » ;
2° Est ajoutée une section 2 intitulée : « Lutte contre la présence d’amiante » et comprenant les articles L. 1334-12-1 à L. 1334-17 ;
3° L’article L. 1334-14 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1334-14. – Les organismes réalisant les repérages et les opérations de contrôle communiquent aux ministres chargés de la santé et de la construction et au représentant de l’État dans le département les informations nécessaires à l’observation de l’état du parc immobilier et les informations nécessaires à la gestion des risques. » ;
4° L’article L. 1334-15 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « prescrire au » sont remplacés par les mots : « mettre en demeure le » et la seconde occurrence du mot : « à » est supprimée ;
b) Au 1°, les mots : « La mise » sont remplacés par les mots : « De mettre » et, après le mot : « œuvre », sont insérés les mots : « , dans un délai qu’il fixe, » ;
c) Au début du 2°, les mots : « La réalisation d’une » sont remplacés par les mots : « De faire réaliser, dans un délai qu’il fixe, une » ;
5° Après l’article L. 1334-16, sont insérés des articles L. 1334-16-1 et L. 1334-16-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 1334-16-1. – Si, à l’expiration du délai fixé dans la mise en demeure en application de l’article L. 1334-15, le propriétaire ou l’exploitant de l’immeuble bâti n’a pas mis en œuvre les mesures prescrites ou n’a pas fait réaliser l’expertise visant à déterminer les mesures nécessaires ou à les vérifier, le représentant de l’État dans le département peut, en cas de danger grave pour la santé, suspendre l’accès et l’exercice de toute activité dans les locaux concernés et prendre toutes mesures pour limiter l’accès aux locaux dans l’attente de leur mise en conformité.
« Art. L. 1334-16-2. – Si la population est exposée à des fibres d’amiante résultant d’une activité humaine, le représentant de l’État dans le département peut, en cas de danger grave pour la santé, ordonner, dans des délais qu’il fixe, la mise en œuvre des mesures propres à évaluer et à faire cesser l’exposition. Faute d’exécution par la personne responsable de l’activité émettrice, le représentant de l’État dans le département y procède d’office aux frais de celle-ci.
« La créance publique est recouvrée comme en matière de contributions directes. » ;
6° L’article L. 1334-17 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les références : « des articles L. 1334-12-1 à L. 1334-16 » sont remplacées par la référence : « de la présente section » ;
b) Le 5° est ainsi rédigé :
« 5° Les conditions dans lesquelles les organismes réalisant les repérages et les opérations de contrôle communiquent :
« a) Aux ministres chargés de la santé et de la construction et au représentant de l’État dans le département les informations nécessaires à l’observation de l’état du parc immobilier et les informations nécessaires à la gestion des risques mentionnées à l’article L. 1334-14 ;
« b) Au directeur général de l’agence régionale de santé, sur sa demande, les informations nécessaires à l’exercice des missions prévues au 1° de l’article L. 1431-2 et à l’article L. 1435-7. »
II. – Sont rendues publiques sous un format réutilisable par les ministères concernés :
1° La liste des centres de valorisation et d’apport des déchets encombrants pouvant recueillir des déchets amiantés ;
2° La liste des installations de stockage de déchets non dangereux pouvant recueillir les déchets d’amiante liés à des matériaux inertes dont l’intégrité est maintenue ainsi que les déchets naturels de terrains amiantifères ;
3° La liste des installations de stockage de déchets dangereux ;
4° Les informations disponibles sur la collecte des déchets amiantés auprès des particuliers.
III. – (Supprimé)
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l'article.
M. Maurice Antiste. Comme vous le savez, le mercure est un produit très toxique pour la santé des personnes et dangereux pour l’environnement. L’exposition au mercure, même à de petites quantités, cause de graves dommages au système nerveux, digestif et immunitaire, ainsi qu’aux poumons, aux reins, à la peau et aux yeux.
Face à ce constat, la communauté internationale, sous la houlette du programme des Nations unies pour l’environnement, s’est engagée dans des négociations visant à réduire le recours au mercure et à l’interdire dans un certain nombre de produits et procédés industriels. À cet égard, le choix de la ville de signature de la convention, Minamata, est lourd de sens, puisque cette ville a particulièrement souffert des effets d’une pollution industrielle aux métaux lourds. En 2009, soit plus d’un demi-siècle après le début officiel de la maladie, plus de 13 000 malades ont été reconnus et près de 25 000 sont dans l’attente d’une décision.
La France s’est particulièrement engagée dans le cadre des négociations internationales de ce traité : d’une part, elle met, depuis 2010, une experte à la disposition du programme des Nations unies pour l’environnement, organisme qui a mené les négociations, et, d’autre part, elle soutient la participation des pays en voie de développement aux sessions de négociations.
Notre pays a signé ce traité en octobre 2013. Le projet de loi autorisant la ratification de cette convention a ainsi été présenté au conseil des ministres, juste avant l’été, le 10 juin 2015, et déposé au Sénat. On ne peut que souhaiter que ce texte soit rapidement inscrit à l’ordre du jour du Parlement, afin de permettre une ratification rapide.
Cette convention impose des contrôles et des mesures de réduction relatifs à cette substance. Ainsi, elle prévoit à partir de 2018 la fixation de listes évolutives d’interdiction ou de restriction pour les produits contenant du mercure et les procédés utilisant le mercure lourd. Ce sera notamment le cas de l’interdiction du mercure dans les piles, les lampes, les pesticides et les instruments de mesure en 2020. Si cette mesure est importante, il apparaît nécessaire que notre pays réfléchisse, dans le respect du droit européen, aux possibilités d’une interdiction totale à terme des produits contenant du mercure.
Un autre point important concerne l’information du patient et du consommateur. En effet, on retrouve du mercure dans de nombreux produits de la vie courante : amalgames dentaires, maquillage, jouets, etc. Or le consommateur ou le patient n’a pas toujours conscience que le produit qu’il achète contient du mercure. Il serait donc utile de renforcer l’information sur ce point.
La prévention contre les effets nocifs du mercure passe également par la récupération et le traitement des produits l’utilisant. Nombre de nos concitoyens ne savent pas quoi faire, par exemple, des anciens thermomètres au mercure. En effet, les pharmacies ou les déchetteries refusent parfois de les prendre, car elles manquent d’information quant aux organismes aptes à collecter ces thermomètres. II semble ainsi nécessaire de clarifier la chaîne de récupération de ces instruments de mesure, afin d’éviter qu’ils ne finissent au fond d’une poubelle d’ordures ménagères, ou pis dans la nature.
Enfin, la notion d’intoxication chronique aux métaux lourds est aujourd’hui essentiellement réservée aux travailleurs exposés de façon habituelle dans leur profession à des agents nocifs. Or le mercure se trouve dans des produits allant au-delà du secteur professionnel. Aussi, il serait intéressant que le Gouvernement réfléchisse à la nécessité et au moyen d’étendre cette notion d’intoxication chronique aux métaux lourds en dehors de ce cadre professionnel.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 35 rectifié, présenté par Mme Morhet-Richaud, MM. Béchu, Cambon, César, Commeinhes, Chatillon et de Nicolaÿ, Mmes Deromedi, Duchêne et Duranton, MM. Grand, Houel, Gremillet et Karoutchi, Mme Lamure, MM. P. Leroy, Lemoyne, Malhuret, Reichardt, Vogel, Masclet, Mayet et Morisset, Mme Primas, MM. Revet, D. Robert, Vasselle, Danesi et Gournac et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Après les mots :
Au directeur général de l'agence régionale de santé
insérer les mots :
et au maire de la commune concernée, à leurs demandes
La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Les dispositions prévues par l’article 11 sont relatives aux risques sanitaires liés à l’environnement.
Les élus des collectivités locales sont au premier rang pour l’information des habitants, la mise en œuvre des mesures de protection et, au-delà, pour la territorialisation du plan national santé-environnement sur lequel la plupart des politiques municipales ont un impact. Il est donc nécessaire qu’ils soient étroitement associés à la définition des plans régionaux santé-environnement pour pouvoir en assurer la déclinaison locale sur leur territoire.
M. le président. L'amendement n° 292 rectifié ter, présenté par Mme Imbert, MM. Longuet, D. Laurent, Laufoaulu, Lefèvre, Mouiller, Mandelli et de Nicolaÿ, Mme Deromedi, MM. Huré, Grand, Lemoyne, G. Bailly, Morisset, B. Fournier, Houel et Raison, Mme Mélot, MM. de Raincourt, Laménie, Béchu, Vaspart et Houpert, Mme Estrosi Sassone, MM. Cornu, Vasselle et A. Marc, Mme Lamure, M. Pointereau et Mme Gruny, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) Au maire de la commune concernée les informations nécessaires à l'observation de l'état du parc immobilier. »
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Cet amendement a le même objet que l’amendement précédent. Il vise simplement à préciser que les informations nécessaires à l’observation de l’état du parc immobilier devront être transmises au maire de la commune concernée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, corapporteur. Il paraît effectivement nécessaire de transmettre au maire de la commune concernée les informations qui sont données au préfet et au directeur général de l’Agence régionale de santé s’agissant du risque d’amiante dans les immeubles.
Cela étant, la commission demande le retrait de l’amendement n° 35 rectifié au profit de l’amendement n° 292 rectifié ter, dont la rédaction nous a paru meilleure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Morhet-Richaud, l'amendement n° 35 rectifié est-il maintenu ?
Mme Patricia Morhet-Richaud. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 35 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 292 rectifié ter.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 717 est présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 963 est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - L’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail est chargée d’élaborer une méthodologie pour estimer le coût global du désamiantage par secteur, d’identifier les faiblesses dans la réglementation relative à l’amiante et d’évaluer l’organisation et l’implication des services administratifs dans la mise en œuvre d’une stratégie nationale de désamiantage.
La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 717.
M. Dominique Watrin. Les cinq amendements que je vais présenter au nom du groupe communiste républicain et citoyen reprennent des préconisations du comité de suivi sur l’amiante présidé par notre collègue Aline Archimbaud.
Pour avoir activement participé aux travaux de ce comité de suivi, je peux vous dire qu’il est important de garder à l’esprit que le drame de l’amiante n’est pas derrière nous. Penser le contraire serait une erreur ! Non seulement il est d’actualité, mais il constitue aussi un problème majeur de santé publique pour l’avenir. À cet égard, les chiffres sont éclairants : près de 100 000 morts sont attendus d’ici à 2050 du fait de l’exposition à l’amiante par mésothéliome ou par cancer broncho-pulmonaire.
Lorsque nous avons été reçus par le cabinet du Premier ministre, nous nous attendions à entendre des réponses. Or quelle n’a pas été notre déception quand on nous a demandé une nouvelle fois d’exposer les conclusions du rapport. Nous avons même entendu qu’il ne fallait surtout pas affoler la population, comme si le sujet n’était pas suffisamment dramatique.
Le projet de loi de santé semble être une bonne opportunité pour commencer à mettre en œuvre les propositions du comité de suivi. Commençons au moins par les cinq recommandations qui font l’objet des cinq amendements que je vais défendre ! N’oublions pas que ces recommandations font suite à de multiples auditions et que nos travaux ont fait l’unanimité au sein de la Haute Assemblée.
Le chantier du désamiantage est à la fois complexe et gigantesque : il touche le logement, les services publics, les hôpitaux, les écoles... Il relève donc de différents domaines : la santé, l’éducation, l’environnement, le travail... Or, à la suite de ses auditions, le comité de suivi a pointé du doigt un manque d’évaluation et de coordination des services de l’État. Il faut absolument remédier à cette défaillance. Ce premier amendement vise donc à mettre en place une véritable stratégie nationale de désamiantage des bâtiments publics et privés.
Il est évident que nous devons aussi mesurer les enjeux financiers. Dans ce but, je m’appuierai sur l’exemple donné par l’Union sociale pour l’habitat, qui évalue à 2,3 milliards d’euros hors taxes par an le surcoût dû à la présence d’amiante dans le seul parc social collectif. Ce chiffre nous donne une mesure de l’échelle et apporte de l’eau à notre moulin.
Tout ne pourra pas être fait en même temps, bien entendu. Nous devons donc dégager des priorités, hiérarchiser les problèmes et étaler les actions dans le temps. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l'amendement n° 963.
Mme Aline Archimbaud. J’insiste sur le fait que les trente-huit propositions du comité de suivi sur l’amiante, qui a travaillé pendant plus d’un an, ont fait l’objet d’un consensus de tous les groupes politiques du Sénat.
Si nous sommes d’accord pour dire qu’il faut éviter de tenir des propos anxiogènes, il ne faut pas non plus se cacher la tête dans le sable. Il faut donc affronter le problème avec lucidité. Or la résolution de ce problème ne pourra se faire sans la mise en place d’un pilotage gouvernemental, sans établir de priorités et sans un calendrier, qui devra certainement s’étaler sur plusieurs décennies puisque tous les bâtiments construits avant 1997, qu’ils soient publics ou privés, sont susceptibles de contenir de l’amiante.
Nous devons mettre en place un réseau et mutualiser les bonnes pratiques. Il faut aussi renforcer les formations, notamment celles des professionnels diagnostiqueurs et désamianteurs, et rendre plus opérationnelle sur le terrain la protection des salariés et des populations, tout en sachant que la réglementation française est assez en avance sur le plan européen, en tout cas sur le papier, car le manque de pilotage national ne garantit pas aujourd’hui une protection efficace.
La disposition prévue par cet amendement est donc très importante. Comme nous l’avons expliqué au cabinet du Premier ministre, aucun changement ne pourra s’opérer sans l’instauration d’un pilotage national. En effet, de nombreuses personnes sont prêtes à travailler pour le désamiantage mais elles sont aujourd’hui encore trop isolées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, corapporteur. Chers collègues, le problème que vous soulevez préoccupe le Sénat depuis longtemps. Je pense au rapport d’information de 2005 et au rapport du comité de suivi publié en 2014, dans lequel beaucoup d’entre vous se sont impliqués.
En fait, c’est plus au Gouvernement qu’à l’ANSES que les questions doivent être posées. Aussi la commission des affaires sociales se tourne-t-elle vers le Gouvernement pour connaître son calendrier sur cette question importante. Le Sénat s’est beaucoup impliqué et à différentes reprises sur ce dossier et tient à ce qu’une action soit menée le plus rapidement possible.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission des affaires sociales. Même si je n’ai pas cosigné les amendements de notre collègue Aline Archimbaud, qui présidait le comité de suivi, je partage tout à fait leur esprit.
Les membres du comité de suivi ont été unanimes pour dire que le désamiantage constituait un problème important. Nous étions également tous d’accord pour affirmer qu’une action interministérielle devait s’engager, un peu à l’image de la sécurité routière. Avec Aline Archimbaud et Dominique Watrin, nous nous sommes même déplacés au cabinet du Premier ministre pour lui faire part de cette proposition.
Il me semble donc important que le Gouvernement apporte des réponses aux propositions du comité de suivi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Ces amendements portent effectivement sur une question extrêmement importante.
Je crois que chacune et chacun peut partager l’objectif de donner un élan nouveau à cette politique. Dans ce domaine, nous avons besoin d’identifier des responsables de l’action à engager. Cependant, désigner un chef de file ne relève pas du domaine législatif. En tout cas, ce rôle ne peut assurément pas être tenu par l’ANSES. À qui revient-il alors ? La réponse n’est pas évidente.
Sachez que le Gouvernement présentera avant la fin de l’année une feuille de route interministérielle sur la base des préconisations du comité de suivi afin d’engager des actions. Nous pourrons alors répondre à la question que vous posez. Je n’en conteste pas le bien-fondé, mais je pense que la réponse n’est pas celle que vous proposez.
Je ne dispose pas aujourd’hui des éléments me permettant de vous indiquer qui doit conduire cette politique interministérielle.
Sous le bénéfice de ces explications, je demande à leurs auteurs respectifs de bien vouloir retirer ces deux amendements identiques ; faute de quoi, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Watrin, l'amendement n° 717 est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Ce comité de suivi a mené un travail sérieux, complet et sur la durée. Quelques années auparavant, la mission commune d’information sur l’amiante avait formulé plusieurs propositions ; or ce comité n’a pu que constater qu’elles n’avaient toujours pas été mises en œuvre.
Il serait quand même bon que le Gouvernement comprenne la nécessité de faire un effort de réflexion. Précisément, le présent amendement vise à mettre en place une structure interministérielle pour mener ce travail transversal.
Le travail qu’a conduit le comité de suivi, les multiples auditions auxquelles il a procédé l’ont amené à la conclusion que, dans ce dossier de l’amiante, nous devions faire face à un certain nombre de défaillances, plus ou moins accentuées.
Le degré de prise de conscience varie d’un ministère à l’autre, d’un service à l’autre. Il serait quand même temps que l’État harmonise son action. Comme je l’ai dit, il faut bien évidemment fixer des priorités. Pour sa part, le comité de suivi a formulé vingt-huit propositions. Ses membres sont tout à fait conscients que toutes ne pourront pas être tout de suite mises en œuvre, qu’il faudra les hiérarchiser, étaler dans le temps leur concrétisation. Il n’en demeure pas moins qu’il va bien falloir à un moment donné définir une stratégie de désamiantage ! Cette responsabilité ne pourra pas être celle d’un seul ministère, cette question concernant des domaines divers – la santé, le travail, l’environnement, etc.
Je comprends les propos de Mme la ministre, mais, précisément, cet amendement vise à aider le Gouvernement à s’attaquer à ce problème dans un cadre interministériel. C’est pourquoi je le maintiens.
M. le président. Madame Archimbaud, l'amendement n° 963 est-il maintenu ?
Mme Aline Archimbaud. Oui, monsieur le président.