Sommaire
Présidence de Mme Isabelle Debré
Secrétaires :
M. Bruno Gilles, Mme Valérie Létard.
2. Organisme extraparlementaire
3. Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’une proposition de loi
4. Modernisation de notre système de santé – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 699 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1192 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l'article 2 quater
Amendement n° 184 rectifié bis de M. Alain Vasselle. – Retrait.
Amendement n° 460 de Mme Michelle Meunier. – Retrait.
L’article demeure supprimé.
Articles additionnels après l'article 3 bis
Amendement n° 701 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1024 rectifié de Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Amendement n° 371 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Rejet.
Amendement n° 968 de Mme Corinne Bouchoux. – Retrait.
Amendement n° 969 de Mme Corinne Bouchoux. – Rejet.
Amendement n° 424 rectifié ter de M. Franck Montaugé. – Adoption.
Mme Marisol Touraine, ministre
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
5. Engagement des forces aériennes au-dessus du territoire syrien – Déclaration du Gouvernement suivie d’un débat
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré
6. Communication du Conseil constitutionnel
7. Modernisation de notre système de Santé – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 702 de M. Paul Vergès. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 4
Amendement n° 704 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Amendement n° 1118 rectifié de M. Jacques Cornano. – Retrait.
Amendement n° 703 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Article 4 bis (suppression maintenue)
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet
8. Communication relative à une commission mixte paritaire
10. Modernisation de notre système de Santé – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 1034 de Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Amendement n° 706 de Mme Laurence Cohen. – Retrait.
Amendement n° 562 de M. Gérard Roche. – Retrait.
Amendement n° 1035 de Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Amendement n° 289 rectifié de Mme Corinne Imbert. – Devenu sans objet.
Amendement n° 705 de M. Paul Vergès. – Adoption.
Amendement n° 1037 de Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Amendement n° 1114 de Mme Aline Archimbaud. – Rejet.
Amendement n° 503 de M. Jean-Baptiste Lemoyne. – Non soutenu.
11. Mises au point au sujet de votes
12. Modernisation de notre système de santé – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Articles additionnels après l'article 5
Amendement n° 1039 de Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Amendement n° 1040 de Mme Aline Archimbaud. – Rejet.
Amendement n° 1042 de Mme Aline Archimbaud. – Rejet.
Amendement n° 126 rectifié de M. Olivier Cadic. – Rejet.
Amendement n° 1041 de Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Amendement n° 1043 de Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Amendement n° 563 rectifié de Mme Françoise Gatel. – Rejet.
Amendement n° 306 rectifié bis de M. François Commeinhes. – Retrait.
Amendement n° 240 rectifié quater de Mme Jacky Deromedi. – Retrait.
Amendement n° 461 de M. Pierre Camani. – Retrait.
Amendement n° 708 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
Amendement n° 1193 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 290 rectifié bis de Mme Corinne Imbert. – Retrait.
Amendement n° 1157 de M. Mathieu Darnaud. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 2 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Retrait.
Amendement n° 1194 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l'article 5 quater
Amendement n° 510 rectifié de Mme Dominique Gillot. – Rejet.
Article 5 quinquies A (supprimé)
Amendement n° 3 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Article 5 quinquies B (supprimé)
Article 5 quinquies C (supprimé)
Amendement n° 707 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 321 de Mme Patricia Schillinger. – Devenu sans objet.
Amendement n° 900 rectifié de M. Michel Amiel. – Devenu sans objet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 604 rectifié de Mme Chantal Jouanno. – Non soutenu.
Amendement n° 614 rectifié bis de M. Yves Daudigny. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1156 rectifié bis de Mme Chantal Deseyne. – Devenu sans objet.
Amendement n° 1159 rectifié bis de Mme Chantal Deseyne. – Devenu sans objet.
Renvoi de la suite de la discussion.
13. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de Mme Isabelle Debré
vice-présidente
Secrétaires :
M. Bruno Gilles,
Mme Valérie Létard.
1
Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Organisme extraparlementaire
Mme la présidente. M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de deux sénateurs – un titulaire et un suppléant – appelés à siéger au sein de l’Observatoire des espaces naturels agricoles et forestiers.
Conformément à l’article 9 du règlement, la commission des affaires économiques et la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont été invitées à présenter chacune une candidature.
Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par ce même article.
3
Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’une proposition de loi
Mme la présidente. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 9 septembre 2015.
4
Modernisation de notre système de santé
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé (projet n° 406, texte de la commission n° 654, rapport n° 653, tomes I et II, avis nos 627 et 628).
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
TITRE Ier (suite)
RENFORCER LA PRÉVENTION ET LA PROMOTION DE LA SANTÉ
Chapitre Ier (suite)
Soutenir les jeunes pour l’égalité des chances en santé
Mme la présidente. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre Ier, à l’article 2 bis B.
Article 2 bis B
(Supprimé)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 698 est présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 1033 est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le troisième alinéa de l’article L. 5314-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À ce titre, les missions locales sont reconnues comme participant au repérage des situations qui nécessitent un accès aux droits sociaux, à la prévention et aux soins, et comme mettant ainsi en œuvre les actions et orientant les jeunes vers des services compétents qui permettent la prise en charge du jeune concerné par le système de santé de droit commun et la prise en compte par le jeune lui-même de son capital santé. »
La parole est à Mme Annie David, pour présenter l’amendement n° 698.
Mme Annie David. Par cet amendement, nous souhaitons que les missions locales soient reconnues comme participant au repérage des jeunes dans un but de prévention, mais aussi de soins.
Les missions locales exercent une mission de service public de proximité afin de permettre à tous les jeunes de seize ans à vingt-cinq ans de surmonter les difficultés qui font obstacle à leur insertion professionnelle et sociale. En ce sens, elles les préparent à répondre aux offres d’emploi, les aident au maintien dans l’emploi et les prennent en charge dans l’après-emploi.
Cependant, le rôle des missions locales ne se limite pas à informer, orienter et accompagner les jeunes vers le monde du travail. Le réseau des missions locales représente plus de 450 associations, qui assistent plus d’un million de jeunes dans toutes les dimensions de l’insertion sociale et professionnelle, leur apportant un soutien dans les recherches d’emploi, ainsi que dans les démarches d’orientation professionnelle, d’accès à la formation, à la santé, au logement, au droit, à la citoyenneté ou à la mobilité.
Le réseau des missions locales joue donc un rôle important d’accompagnement des jeunes dans l’information sur la santé pour réduire les inégalités sociales et territoriales. Les actions menées par les missions locales dans la prise en charge des jeunes par le système de santé doivent être reconnues par la loi, comme l’Assemblée nationale l’avait prévu, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Le réseau demande simplement à être reconnu comme un partenaire privilégié dans l’accompagnement des jeunes vers la santé, notamment grâce à la prévention. Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l’amendement n° 1033.
Mme Aline Archimbaud. Nous défendons un amendement identique. C’est vrai, aujourd’hui, un certain nombre de missions locales sont d’ores et déjà engagées dans des actions de santé auprès de cette jeunesse issue de familles populaires, mais l’inscription de leur rôle dans la loi constituerait une reconnaissance.
Pour avoir suivi d’assez près certaines de ces missions, je suis persuadée que cette officialisation faciliterait le travail des équipes pour trouver des partenariats et des soutiens. Ces amendements identiques, s’ils étaient adoptés, fourniraient un véritable appui à ce réseau.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission des affaires sociales. Ces deux amendements visent à rétablir l’article 2 bis B, que la commission a supprimé au mois de juillet.
Cet article avait pour objet de faire reconnaître dans la loi le rôle joué par les missions locales en matière de prévention, d’éducation et d’orientation des jeunes dans le domaine de la santé.
Il n’a pas paru utile à la commission de préciser les dispositions actuelles de l’article L. 5314-2 du code de la santé publique, dont la formulation est suffisamment large pour couvrir l’ensemble des dimensions de l’insertion professionnelle et sociale des jeunes.
De plus, la définition des objectifs visés en matière d’accès à la santé relève à la fois des conventions pluriannuelles d’objectifs signées entre l’État et chaque mission locale et des démarches de contractualisation entre partenaires au niveau local.
Enfin, de façon générale, la loi n’est pas là pour reconnaître les pratiques, mais pour prescrire.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Je suis favorable à ces deux amendements, qui me semblent aller dans le bon sens.
Nous le savons, aujourd’hui, l’un des obstacles pour l’accès non seulement à la santé, mais également à d’autres droits et à d’autres pratiques, est l’éclatement des lieux de prise en charge. Que des jeunes soient orientés en matière de santé dans les lieux où ils doivent se rendre par ailleurs, même s’ils n’y vont pas nécessairement pour parler de leurs problèmes de santé ou pour les traiter, est évidemment une bonne manière de favoriser leur accès à la prévention et aux soins.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 698 et 1033.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’article 2 bis B demeure supprimé.
Article 2 bis
La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa de l’article L. 1111-5 est ainsi modifié :
aa) (nouveau) À la première phrase, la référence : « 371-2 » est remplacée par la référence : « 371-1 » ;
a) Aux trois premières phrases, après le mot : « médecin », sont insérés les mots : « ou la sage-femme » ;
b) Aux première et avant-dernière phrases, les mots : « le traitement » sont remplacés par les mots : « l’action de prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement » ;
2° Après le même article L. 1111-5, il est inséré un article L. 1111-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-5-1. – Par dérogation à l’article 371-1 du code civil, l’infirmier, sous la responsabilité du médecin, peut se dispenser d’obtenir le consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale sur les décisions à prendre lorsque l’action de prévention, le dépistage ou le traitement s’impose pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d’une personne mineure, dans le cas où cette dernière s’oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, l’infirmier doit, dans un premier temps, s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, l’infirmier, sous la responsabilité du médecin, peut mettre en œuvre l’action de prévention, le dépistage ou le traitement. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix. »
Mme la présidente. L'amendement n° 699, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
à l’exception de la vaccination
II. – Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 1111-5-1. – Par dérogation à l’article 371-1 du code civil, un infirmier, sous la responsabilité d’un médecin, peut se dispenser d’obtenir le consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale sur les décisions à prendre lorsque l’action de prévention, le dépistage ou le traitement, à l’exception de la vaccination, s’impose pour sauvegarder la santé sexuelle et reproductive d’une personne mineure âgée de quinze ans ou plus, dans le cas où cette dernière s’oppose expressément à la consultation du ou des titulaires de l’autorité parentale afin de garder le secret sur son état de santé. Toutefois, l’infirmier doit, dans un premier temps, s’efforcer d’obtenir le consentement du mineur à cette consultation. Dans le cas où le mineur maintient son opposition, l’infirmier, sous la responsabilité d’un médecin, peut mettre en œuvre l’action de prévention, le dépistage ou le traitement à l’exception de la vaccination. Dans ce cas, le mineur se fait accompagner d’une personne majeure de son choix. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’objet de notre amendement de réécriture de cet article 2 bis est de lever une ambiguïté possible.
Si nous soutenons pleinement la décision de permettre aux mineures de conserver le secret vis-à-vis de leurs parents en particulier lorsqu’il s’agit de leur santé sexuelle et reproductive, il nous semble que l’article vise des actes pour lesquels le consentement parental est incontournable ; je pense notamment à la vaccination. Or l’on sait que la vaccination dans le domaine de la santé sexuelle et reproductive se fait le plus fréquemment par le Gardasil et le Cervarix.
Ces deux vaccins administrés aux jeunes filles sont censés prévenir les cancers du col de l’utérus. Jusqu’à présent, rien ne démontrait l’efficacité de ces vaccins. Appuyés sur des travaux scientifiques, des cas troublants de sclérose en plaques suscitaient, au contraire, des inquiétudes. Je rappelle que des plaintes ont même été déposées.
Une étude vient d’être rendue publique – l’examen du projet de loi débutait hier, mais il s’agit bien évidemment d’une coïncidence – étude largement relayée par les médias et prouvant que le risque est finalement nul.
Sans remettre en doute l’objectivité de cette étude réalisée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, et l’assurance maladie – je dis bien que je ne la mettais pas en doute – je me permets de regretter qu’elle ne respecte pas, me semble-t-il, les principes de la charte de l’expertise sanitaire mise en place par un décret de mai 2013.
En effet, cette charte « doit permettre aux commanditaires et aux organismes chargés de la réalisation des expertises de respecter les principes d’impartialité, de transparence, de pluralité et du contradictoire posés par l’article L. 1452-1 du code de la santé publique ». Or les scientifiques démontrant l’inefficacité, voire le danger de ces vaccins n’ont pas été associés à cette étude.
Sachant, par ailleurs, que le Gouvernement espère, au travers du plan cancer, que, dans les cinq ans à venir, 80 % des jeunes filles âgées de dix à quatorze ans seront vaccinées par le Gardasil, nous sommes conduits à émettre des doutes quant à la rédaction initiale de cet article.
C’est la raison pour laquelle nous demandons que les décisions prises en matière de vaccination par le Gardasil ou d’autres vaccins – décisions qui sont irréversibles – soient prises après avoir recueilli l’accord parental.
Loin de vouloir minorer les risques, nous défendons ici un amendement de précaution.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’article 2 bis a en effet permis aux infirmiers de déroger, sous la responsabilité d’un médecin, à l’obligation d’obtenir le consentement des titulaires de l’autorité parentale pour des décisions sur les mineurs lorsqu’il s’agit de sauvegarder la santé sexuelle et reproductive de ces derniers.
Bien sûr, l’infirmier, comme le médecin, doit encourager le mineur à accepter de consulter les titulaires de l’autorité parentale. Toutefois, lorsque ce n’est pas possible, il peut s’exonérer de cette autorisation.
L’objet de l’amendement est d’exclure la vaccination, notamment contre le papillomavirus, du champ de la dérogation à l’obligation de recueil du consentement parental. Or cette vaccination permet de faire reculer les risques de cancer de l’utérus. Tous les médecins qui suivent cette pathologie vous diront que, dans certains pays, le cancer du col de l’utérus sera bientôt éradiqué, ce qui ne sera pas forcément le cas en la France, car notre pays prend un retard considérable dans la vaccination contre le papillomavirus.
La commission des affaires sociales n’a pas approuvé cet amendement. J’émets donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. J’émets, moi aussi, un avis défavorable sur cet amendement, qui a servi de prétexte à une charge extrêmement virulente contre la vaccination, en tout cas contre celle qui protège du papillomavirus.
De quelle étude parlons-nous ? Il n’y a pas de coïncidence, madame la sénatrice ! L’étude, la plus vaste jamais réalisée, a été publiée à l’issue d’années de travaux. Lancés en 2008, ils ont porté sur la période 2008-2012 et ciblé des centaines de milliers de jeunes filles et de jeunes femmes.
Par cette étude de pharmaco-épidémiologie, il s’agit non pas d’examiner médicalement des jeunes femmes, mais d’exploiter des données disponibles à des fins épidémiologiques. Ces données sont publiques ; elles sont exploitées par des acteurs publics, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et la Caisse nationale d’assurance maladie.
Cette étude montre qu’il n’y a pas, contrairement à ce que l’on prétendait, de risques associés d’une sclérose en plaques. Le fait que des jeunes femmes aient, de toute bonne foi, déposé des plaintes ne signifie pas que la relation entre la vaccination et la sclérose en plaques soit avérée. Il ne suffit pas de porter plainte pour établir le risque !
Je comprends parfaitement la détresse de ces jeunes femmes, mais il appartiendra à la justice de se prononcer. Je m’en tiens simplement à l’étude qui a été réalisée. Et cette étude démonte ces rumeurs et ces allégations concernant la sclérose en plaques.
C'est la raison pour laquelle je dis très sereinement que nous n’avons pas à redouter cette vaccination. Alors que, en France, 17 % des jeunes filles sont vaccinées, dans les pays qui nous entourent – pour ne pas prendre d’exemples plus lointains – les taux de vaccinations se situent entre 75 % et 88 %. Or il ne semble pas que des risques accrus et des difficultés plus importantes soient apparus dans ces pays.
Cette vaccination est un enjeu majeur pour faire reculer le cancer de l’utérus. Tel n’est pas l’objet de votre amendement. Le choix que vous avez fait, c’est de profiter de l’occasion pour aborder le sujet.
J’émets donc un avis défavorable sur votre amendement, tout en tenant à souligner les enjeux de santé publique qui sont associés à la diffusion de cette vaccination pour lever les peurs, les inquiétudes et les doutes.
Je souhaite à cet égard que le débat sur la vaccination qui sera lancé à l’automne puisse être l’occasion d’évoquer la question du papillomavirus.
Cette étude fournit des arguments absolument fondamentaux aux médecins,…
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Aux parents !
Mme Marisol Touraine, ministre. … aux parents, en effet, mais aussi à tous les professionnels de santé, qui pouvaient être légitimement démunis face aux interrogations de leurs patientes ou des parents de ces dernières. Ils disposent aujourd'hui d’une étude tout à fait significative.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce sont 2 200 000 jeunes femmes et jeunes filles de treize à seize ans dont l’état de santé a été analysé de près grâce aux données publiques dont nous disposons !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Sans renier les explications que j’ai précédemment apportées, je souhaite repréciser qu’il s’agit d’un amendement de précaution dont l’objet est de permettre aux parents d’émettre leur avis et ainsi en quelque sorte de cadrer les choses.
Je profite de l’occasion qui m’est donnée pour me réjouir que Mme la ministre ait pris l’initiative d’organiser un débat sur la vaccination, un débat plus que nécessaire et plus qu’urgent !
J’espère que toutes les recherches réalisées – je pense notamment à celles dont les résultats nous sont parvenus dans les jours précédant le débat, sur les adjuvants aluminiques – rencontreront la même objectivité de sa part et que nous pourrons examiner ensemble le cas de ces vaccins qui ne doivent pas contenir d’adjuvants.
Je reviens à cet amendement : il me paraît absolument important de maintenir l’intervention parentale.
Mme la présidente. L'amendement n° 1192, présenté par Mmes Deroche et Doineau et M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas et un paragraphe ainsi rédigés :
...° À la première phrase du cinquième alinéa de l’article L. 1111-2, les mots : « des dispositions de l’article L. 1111-5 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1 » ;
...° À la première phrase du cinquième alinéa de l’article L. 1111-7, les mots : « à l’article L. 1111-5 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1 ».
... – Au 2° de l’article 49 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, les mots : « à l’article L. 1111-5 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1 ».
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié.
(L'article 2 bis est adopté.)
Article 2 ter
(Supprimé)
Article 2 quater
L’article L. 321-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes admises dans une école de la deuxième chance mentionnée à l’article L. 214-14 du code de l’éducation, les jeunes effectuant un service civique en application du II de l’article L. 120-1 du code du service national, les apprentis mentionnés à l’article L. 6221-1 du code du travail, les volontaires stagiaires du service militaire adapté mentionnés à l’article L. 4132-12 du code de la défense et les titulaires d’un contrat de professionnalisation mentionnés au 1° de l’article L. 6325-1 du code du travail sont informés, dans des conditions définies par voie réglementaire, de la possibilité d’effectuer l’examen prévu au premier alinéa. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 2 quater
Mme la présidente. L'amendement n° 184 rectifié bis, présenté par MM. Vasselle, B. Fournier et Laménie, Mme Hummel et MM. Mayet et Cambon, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le soutien des jeunes enfants pour l’égalité des chances en santé, avant l’entrée dans les dispositifs scolaires, repose sur l’accompagnement des parents dès la naissance et pendant la petite enfance. Des interventions socio-éducatives et de soutien à la parentalité pendant la période périnatale, par des professionnels de l’aide à domicile, techniciens de l’intervention sociale et familiale, seront développées dans le cadre des politiques familiales de la caisse nationale d’allocations familiales et de la protection maternelle et infantile qui relève de la compétence du département.
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement s’inscrit dans la politique de prévention que nous devons tous encourager en matière de santé. Il intéresse plus particulièrement les jeunes enfants. L’objectif de cette proposition est d’initier et d’accompagner la prévention et la promotion de la santé au sein de la cellule familiale, de la naissance à l’entrée dans le milieu scolaire, mais plus particulièrement auprès des familles vulnérables et fragilisées par des difficultés ponctuelles.
Il existe deux possibilités pour exercer cette action de prévention : soit la confier à l’Aide sociale à l’enfance, soit faire intervenir les caisses d’allocations familiales. Il nous intéresserait, nous, les auteurs de cet amendement, de connaître les intentions du Gouvernement quant à la suite qu’il entend donner à cette politique de prévention dont j’ai cru comprendre qu’il souhaitait faire une priorité de sa politique en matière de santé. Nous écouterons bien sûr également avec intérêt l’avis de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Je vous rappelle que nous avons examiné hier deux amendements, les amendements nos 693 et 883 rectifié bis, qui avaient le même objet et qui ont été rejetés au motif que le droit en vigueur et l’action sociale extralégale permettent de donner satisfaction à leurs auteurs.
Je répéterai pour M. Vasselle les arguments de la commission : la portée normative de la première phrase n’est pas assurée et la seconde relève de l’action sociale extralégale des caisses d’allocations familiales, organisée par voie de circulaire et est donc satisfaite par le droit en vigueur. Je vous épargne la lecture de l’article L. 2111-1 du code de la santé publique dont j’ai rappelé hier les termes.
Je demande, au nom de la commission, le retrait de l’amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Vasselle, l'amendement n° 184 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. À partir du moment où cet amendement est satisfait, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ! (Sourires.) Ceux qui m’ont invité à déposer cet amendement ont eu les réponses qu’ils attendaient.
Puisque tout est parfait, je retire l’amendement n° 184 rectifié bis !
Mme la présidente. L'amendement n° 184 rectifié bis est retiré.
Article 3
(Non modifié)
I. – À l’intitulé de la deuxième partie du code de la santé publique, après la première occurrence du mot : « santé », sont insérés les mots : « sexuelle et ».
II. – Le dernier alinéa du I de l’article L. 5134-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase, les mots : « si un médecin, une sage-femme ou un centre de planification ou d’éducation familiale n’est pas immédiatement accessible, », les mots : « à titre exceptionnel et » et les mots : « et de détresse caractérisés » sont supprimés ;
2° La dernière phrase est complétée par les mots : « , notamment en orientant l’élève vers un centre de planification ou d’éducation familiale ».
III. – Au a du 2° de l’article L. 5521-7 du même code, les mots : « ou un centre de planification ou d’éducation familiale n’est pas immédiatement accessible » sont remplacés par les mots : « , notamment en orientant l’élève vers un centre de planification ou d’éducation familiale ». – (Adopté.)
Article 3 bis
(Supprimé)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 1 rectifié ter est présenté par Mmes Laborde, Billon, Jouanno, Blondin et Jouve, MM. Amiel, Castelli et Guérini, Mme Malherbe, MM. Requier, Bonnecarrère et Détraigne, Mme Gatel, MM. Guerriau, L. Hervé et Kern, Mme Morin-Desailly et M. Houpert.
L'amendement n° 700 est présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 943 est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au début de l’article L. 5134-1 du code de la santé publique, il est inséré un I A ainsi rédigé :
« I A. – Toute personne a le droit d’être informée sur les méthodes contraceptives et d’en choisir une librement.
« Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser. »
La parole est à Mme Françoise Laborde, pour défendre l’amendement n° 1 rectifié ter.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement résulte d’une recommandation adoptée par la délégation sénatoriale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes en conclusion de son rapport Femmes et santé : les enjeux d’aujourd’hui.
Il a pour objet de rétablir un article qui avait été inséré dans le projet de loi par l’Assemblée nationale en première lecture avec le soutien de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée.
Compte tenu de la très grande diversité des méthodes contraceptives susceptibles d’être aujourd’hui proposées aux femmes et des risques que peuvent présenter certaines d’entre elles, l’information des patientes est plus que jamais primordiale. Il est indispensable que toute femme concernée puisse choisir en connaissance de cause la méthode qui lui convient véritablement le mieux.
Or les femmes n’ont pas toujours le sentiment d’avoir véritablement choisi leur méthode contraceptive. Elles ont plutôt l’impression d’avoir adopté celle qui leur a été indiquée.
Cet amendement pose donc le principe du droit à l’information et au libre choix dans un domaine aux très fortes implications pour la santé des femmes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° 700.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement, identique à celui qui vient d’être défendu, vise à demander le rétablissement de l’article 3 bis.
Ce dispositif vise à améliorer l’information sur les méthodes contraceptives en établissant, à l’article L.5134-1 du code de la santé publique relatif à la délivrance des contraceptifs, le droit de toute personne à être informée sur les méthodes contraceptives et une liberté de choix préservée. Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables.
Comme l’indique dans son rapport de 2010 le Conseil économique, social et environnemental, au fil du temps, les méthodes de contraception ont connu une très grande diversification, sans pour autant que l’état des connaissances de la population et l’information des jeunes gens et des médecins suivent cette évolution des techniques.
Par ailleurs, un grand nombre des dispositifs existants ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale. Leur coût, de l’ordre de 150 à 200 euros par an pour l’anneau et le patch, par exemple, constitue un obstacle évident à leur diffusion.
De plus, chez les jeunes femmes, la pilule, qui n’est pas systématiquement remboursée, fait l’objet d’une prescription « de principe », alors qu’elle ne correspond pas forcément au mieux à la situation individuelle et au mode de vie des utilisatrices.
Devant ce constat, il est important de rappeler que tous les hommes et toutes les femmes doivent être informés par les professionnels de santé du panel contraceptif mis à leur disposition. Cette information doit être suivie du rappel de la liberté de choix par le patient de sa contraception, même si ce choix va à l’encontre d’une prescription régulièrement pratiquée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l’amendement n° 943.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement, identique aux deux précédents, se justifie par les mêmes arguments.
Mme la présidente. L'amendement n° 460, présenté par Mmes Meunier, Monier, Jourda et Génisson, M. Daudigny, Mme Bricq, M. Caffet, Mmes Campion et Claireaux, M. Durain, Mmes Emery-Dumas et Féret, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mmes Yonnet, D. Gillot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au début de l’article L. 5134-1 du code de la santé publique, il est ajouté un I A ainsi rédigé :
« I A. – Toute personne a le droit d’être informée sur les méthodes contraceptives masculines et féminines et d’en choisir une librement.
« Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer peuvent l’en dispenser. »
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Il s’agit là aussi de développer l’information sur l’ensemble des méthodes contraceptives. En effet, trop souvent, la pilule est systématiquement prescrite aux jeunes filles ou aux jeunes femmes alors qu’elle n’est pas forcément adaptée à leur mode de vie et que d’autres méthodes existent.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’article 3 bis, supprimé par la commission et que ces quatre amendements visent à rétablir, visait à reconnaître à toute personne le droit d’être informée sur les méthodes contraceptives et d’en choisir une librement.
Il a paru à la commission que ces dispositions n’étaient pas nécessaires. En effet, un principe général de droit à l’information est prévu à l’article L. 1111-2 du code de la santé publique, tandis qu’un principe de droit au consentement est consacré par l’article L. 1111-4 du même code.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. J’entends bien le raisonnement de Mme la rapporteur. Néanmoins, en matière de droit à l’information sur la contraception, l’enjeu est suffisamment important pour qu’il paraisse utile d’inscrire clairement ce droit dans la loi.
Je voudrais rappeler que 70 % des interruptions volontaires de grossesse concernent des femmes sous contraceptif. Cela signifie que la contraception est mal maîtrisée, mal utilisée, pour quelque raison que ce soit. L’information doit donc être renforcée.
C’est la raison pour laquelle je suis favorable à ces amendements. Je demande cependant à Mme Meunier de bien vouloir retirer l’amendement n° 460 au bénéfice des amendements identiques nos 1 rectifié ter, 700 et 943, dont la rédaction me paraît meilleure.
Mme la présidente. Madame Meunier, l'amendement n° 460 est-il maintenu ?
Mme Michelle Meunier. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 460 est retiré.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, corapporteur. Si la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements, c’est parce que le droit à l’information et le droit au consentement existent déjà. Remettre dans la loi ce qui y figure déjà nous semble complètement inutile. Il est possible que le public ne soit pas suffisamment informé et que la contraception ne soit pas toujours bien utilisée, comme l’a indiqué Mme la ministre, mais ce n’est pas en répétant ce qui a déjà été dit que l’on va changer les choses.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié ter, 700 et 943.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 245 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 163 |
Contre | 178 |
Le Sénat n'a pas adopté.
En conséquence, l’article 3 bis demeure supprimé.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 701, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au 4° de l’article L. 2112-2, les mots : « lors d’un entretien systématique psycho-social réalisé au cours du quatrième mois de grossesse » sont remplacés par les mots : « lors de l’entretien prénatal visé à l’article L. 2122-1. » ;
2° Le dernier alinéa de l’article L. 2122-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lors de cet examen, le médecin ou la sage-femme propose à la femme enceinte un entretien prénatal dont l’objet est de permettre au professionnel d’évaluer avec elle ses besoins en termes d’accompagnement au cours de la grossesse. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à repositionner l’entretien prénatal précoce comme un outil de prévention en santé au sens large – c'est-à-dire incluant les aspects somatiques, psychiques et sociaux –, en l’inscrivant à l’article L. 2122-1 du code de la santé publique, consacré aux examens de prévention durant la grossesse. Il s’agit de permettre ainsi à un nombre plus important de femmes d’y accéder.
Pour mémoire, cet entretien individuel ou en couple a été instauré dans le cadre du plan périnatalité 2005-2007 comme la première mesure de l’axe « Plus d’humanité », afin de favoriser la mise en place au plus tôt des conditions d’un dialogue permettant à toutes les femmes enceintes et aux futurs parents d’exprimer leurs attentes et leurs besoins.
Inscrit dans la législation au travers de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, cet entretien a été, à cette occasion, introduit dans le code de la santé publique en tant qu’« entretien psycho-social ».
Des professionnels nous ont alertés sur le fait que, d’une part, cet intitulé restreint le contenu de l’entretien prénatal précoce, lequel relève pourtant du champ de la prévention en santé au sens large, et que, d’autre part, le présenter comme un entretien « psycho-social » constitue un frein à son acceptation, aussi bien pour les populations qui accèdent le plus difficilement à la prévention que pour celles qui ne s’estiment pas concernées par les problématiques d’ordre psycho-social. Or cet entretien est extrêmement important !
C’est pourquoi nous proposons, au travers de cet amendement, une reformulation sémantique.
Mme la présidente. L'amendement n° 1024 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au 4° de l’article L. 2112-2, les mots : « d’un entretien systématique psycho-social réalisé au cours du quatrième mois de grossesse » sont remplacés par les mots « de l’entretien prénatal mentionné à l’article L. 2122-1 » ;
2° L'article L. 2122-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un entretien prénatal précoce au cours du quatrième ou du cinquième mois de grossesse est systématiquement proposé. Cet entretien est réalisé par une sage-femme ou par un médecin. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement a un objet similaire. Présenter cet entretien comme étant d’ordre psycho-social est stigmatisant et constitue dans les faits un frein à son acceptation par certaines populations, notamment celles qui ont le plus de difficultés à accéder à la prévention.
Il faut souligner que l’adoption d’un tel amendement visant à faire de l’entretien prénatal précoce un outil de prévention en santé n'impliquerait aucune charge nouvelle, puisque l'entretien prénatal est déjà inscrit à la nomenclature de l'assurance maladie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La proposition des auteurs de ces deux amendements fait écho à l’une des préconisations du rapport d’information sur la protection de l’enfance de Muguette Dini et Michelle Meunier, publié au mois de juin 2014. Cette préconisation a également été reprise par l’Assemblée nationale, au travers de l’introduction d’un article 11 ter dans la proposition de loi relative à la protection de l’enfant, texte qui sera examiné en deuxième lecture par le Sénat dans les prochaines semaines. Dans cette perspective, la commission demande le retrait de ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. La disposition figure en effet à l’article 11 ter de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant, à la suite de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement du Gouvernement. J’ajoute que cet article prévoit en outre, au contraire des deux amendements, que l’entretien sera systématique. Le Gouvernement étant attaché à ce caractère systématique, il demande également le retrait de ceux-ci ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Madame Cohen, l'amendement n° 701 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Madame Archimbaud, l'amendement n° 1024 rectifié est-il maintenu ?
Mme Aline Archimbaud. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 1024 rectifié est retiré.
L'amendement n° 371 rectifié, présenté par Mmes Laborde, Billon et Blondin, M. Bonnecarrère, Mme Bouchoux, MM. Castelli et Détraigne, Mme Gatel, MM. Guérini, Guerriau, L. Hervé et Houpert, Mmes Jouanno et Jouve, M. Kern, Mme Morin-Desailly et M. Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique, il est inséré un titre … ainsi rédigé :
« Titre…
« Information des mineurs
« Chapitre unique
« Art. L. ... – Une consultation par un médecin ou une sage-femme est proposée aux mineurs pour les informer sur la contraception et sur la prévention des infections sexuellement transmissibles et des conduites addictives.
« Le mineur est informé de cette consultation lors de l’envoi de la carte Vitale par la caisse d’assurance maladie. »
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. En France, 6,7 % des jeunes filles âgées de douze à dix-sept ans ont déjà eu recours à une interruption volontaire de grossesse. Cette proportion signe un constat d’échec pour un pays comme le nôtre. Il est donc indispensable de simplifier et de faciliter l’accès à la contraception pour les adolescents.
L’objet de cet amendement, qui reprend une recommandation de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, part du principe que l’information des jeunes en matière de contraception n’est pas toujours suffisante et que la famille n’est pas le lieu le plus propice à une telle information.
Il s’agit donc de proposer aux jeunes, dès seize ans, une consultation auprès d’un médecin ou, pour les jeunes filles qui le souhaiteront, auprès d’une sage-femme. Au cours de cette consultation, conçue non comme une obligation, mais comme une faculté, les jeunes pourraient recevoir une information sur les différentes méthodes de contraception existantes. Une totale confidentialité leur serait garantie. L’envoi de la carte Vitale pourrait être l’occasion de proposer cette consultation aux jeunes.
Instaurée dans un esprit de santé publique, cette consultation pourrait aussi contribuer à renforcer l’information des jeunes sur les pratiques à risques et sur la protection contre les infections sexuellement transmissibles. (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Si nous ne pouvons que partager le souci d’assurer une bonne information des jeunes sur les conduites à risques, cette proposition soulève toutefois plusieurs questions.
Ainsi, comment sera financée la prise en charge de la consultation prévue ? En effet, celle-ci devra nécessairement être payante, puisque la proposition a été validée au titre de l’article 40 de la Constitution. Les jeunes mineurs seront-ils incités à y recourir, alors que de nombreuses instances, en particulier l’école, les auront déjà sensibilisés à ces sujets ? Quid des mineurs de moins de quinze ans ?
Par ailleurs, l’article L. 161-31 du code de la sécurité sociale, qui pose le principe de la carte d’assurance maladie inter-régimes, dite « carte Vitale », précise que le contenu de la carte, les modalités d’identification du titulaire ainsi que ses modes de délivrance sont fixés par décret en Conseil d’État. On peut donc se demander si la disposition proposée a bien sa place dans un nouveau titre de la partie législative du code de la santé publique.
Néanmoins, en dépit de ces réserves, la commission sollicite l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra, à ce stade, un avis défavorable, en l’absence d’étude d’impact d’une mesure dont la mise en œuvre serait nécessairement très coûteuse. La consultation prévue ne pourrait qu’être payante, ce qui implique d’organiser sa prise en charge.
Au-delà, le projet de loi prévoit la mise en place d’un parcours éducatif de santé de l’enfant – cette disposition a été supprimée par la commission des affaires sociales du Sénat – et est inspiré par la volonté de proposer des actions ciblées en direction des mineurs plutôt que des stratégies globales.
Cela étant, madame la sénatrice, j’entends votre préoccupation. Nous devons mener une réflexion sur la manière de mettre en place d’éventuelles consultations ou séances d’information sur la prévention à destination des jeunes. Cette réflexion doit également porter sur les aspects financiers d’un tel dispositif.
Mme la présidente. Madame Billon, l'amendement n° 371 rectifié est-il maintenu ?
Mme Annick Billon. Je remercie la commission et le Gouvernement de leur réponse. Les collèges ont l’obligation d’assurer une formation, mais cette obligation n’est que peu respectée. C’est pourquoi je maintiens cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 371 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 4
(Non modifié)
I. – Le livre II du code pénal est ainsi modifié :
1° À l’article 225-16-1, après le mot : « dégradants », sont insérés les mots : « ou à consommer de l’alcool de manière excessive, » ;
2° L’article 227-19 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le fait de provoquer directement un mineur à la consommation excessive d’alcool est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
« Le fait de provoquer directement un mineur à la consommation habituelle d’alcool est puni de deux ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. » ;
b) Après la seconde occurrence du mot : « locaux », la fin du second alinéa est ainsi rédigée : « le fait de se rendre coupable de l’une des infractions définies au présent article porte au double le maximum des peines encourues. »
II. – Le livre III de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° A L’article L. 3311-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces campagnes doivent aussi porter sur la prévention de l’alcoolisme des jeunes afin de lutter contre leur consommation excessive d’alcool. » ;
1° B (Supprimé)
1° L’article L. 3342-1 est ainsi modifié :
a) À la dernière phrase, les mots : « peut exiger » sont remplacés par le mot : « exige » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’offre, à titre gratuit ou onéreux, à un mineur de tout objet incitant directement à la consommation excessive d’alcool est également interdite. Un décret en Conseil d’État fixe les types et les caractéristiques de ces objets. » ;
2° L’article L. 3353-3 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « publics, », la fin de la seconde phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « ou l’offre, à titre gratuit ou onéreux, à un mineur de tout objet incitant directement à la consommation excessive d’alcool dans les conditions fixées à l’article L. 3342-1 sont punies de la même peine. » ;
b) Après le mot : « chapitre », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « porte au double le maximum des peines encourues. » ;
3° L’article L. 3353-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3353-4. – Le fait de provoquer directement un mineur à la consommation excessive d’alcool et le fait de provoquer directement un mineur à la consommation habituelle d’alcool sont réprimés par l’article 227-19 du code pénal. »
Mme la présidente. La parole est à M. François Commeinhes, sur l'article.
M. François Commeinhes. Nous sommes tous attachés aux avancées législatives qui ont permis, au cours des dernières décennies, de doter notre pays de politiques publiques efficaces en matière de lutte contre l’alcoolisme et les comportements excessifs. Nous le savons, ces derniers peuvent mettre en danger la santé et même l’existence. Le phénomène du binge drinking chez les jeunes en atteste.
Il faut naturellement agir, mais les actions doivent porter avant tout sur l’information, l’éducation et la prévention, à l’instar de celles mises en œuvre par la filière viticole, que je qualifierai d’exemplaire. En effet, seule la promotion d’une consommation qualitative et responsable est à même de permettre de lutter contre les abus.
La France doit continuer à favoriser le développement économique de la filière viticole. La viticulture française est l’un des fleurons de notre patrimoine ; elle contribue grandement à nos exportations et à notre prestige culturel. Demain, l’œnotourisme sera un atout de plus pour l’attractivité de nos territoires. Les viticultrices et les viticulteurs français sont des gens responsables, qui aiment leur métier et mettent en valeur nos terroirs. Ils doivent être en mesure de poursuivre leur travail sans subir de nouvelles contraintes.
Madame la ministre, vous avez exprimé votre souhait de ne pas remettre en cause le cadre législatif actuel, c’est-à-dire la loi Évin. Le Président de la République et le Premier ministre se sont également engagés en ce sens. Nous sommes toutefois favorables à la clarification de la loi, comme en témoigne l’amendement n° 32 rectifié de notre collègue Gérard César, que je soutiens résolument.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Excellent amendement !
M. François Commeinhes. Il vise à définir la publicité et à la distinguer clairement de ce qui relève de l’information, de la création artistique ou culturelle, de la promotion de nos communes et de nos territoires. Bref, il s’agit de faire en sorte que les journalistes qui parlent de nos régions ne puissent pas être condamnés pour cela. (M. Gérard César applaudit.)
Mme la présidente. L'amendement n° 968, présenté par Mmes Bouchoux, Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 1 à 7
Supprimer ces alinéas.
II. - Alinéas 19 et 20
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Corinne Bouchoux.
Mme Corinne Bouchoux. Cet amendement, qui vise à supprimer l’infraction générale de provocation à la consommation excessive d’alcool, ne s’inscrit pas vraiment dans la logique de la précédente intervention…
Nous sommes bien sûr contre la consommation excessive d’alcool et contre l’incitation à celle-ci, mais le rapport d’information sur les rassemblements festifs et l’ordre public remis au gouvernement Fillon au mois d’octobre 2012 par mon collègue André Reichardt et moi-même a montré que la législation générale sur l’alcool était surabondante et l’arsenal répressif déjà considérable. Nous avions souhaité mettre l’accent sur la prévention, sans préconiser l’adoption de nouvelles mesures législatives.
Qu’il s’agisse de l’obtention d’une licence pour pouvoir vendre des boissons lors d’un rassemblement festif ou des dispositions introduites par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, notre législation comprend déjà une dizaine de mesures destinées à réprimer sévèrement la consommation excessive d’alcool.
Il faut également souligner que la loi de 1998 interdisant le bizutage et la législation réprimant la conduite en état d’ivresse sont appliquées de façon très rigoureuse, ce qui est heureux.
Puisque le cadre légal semble suffisant, pourquoi en rajouter ? Le président de la commission n’a-t-il pas indiqué tout à l’heure que lorsque la loi suffit, il faut se borner à l’appliquer ?
Dès lors, comment éviter les drames liés à l’hyper-alcoolisation des jeunes ? C’est tout l’objet, selon nous, d’une prévention énergique et efficace.
Des actions de prévention coordonnées peuvent aboutir à des résultats, comme en témoignent les opérations engagées par un certain nombre de collectivités locales. Nous y reviendrons lors de l’examen de l’amendement n° 969.
Nous considérons qu’il s’agit avant tout d’un problème éducatif, qui concerne toutes les familles, et d’un problème de coordination des politiques publiques. Il convient selon nous d’agir en ce sens, plutôt que d’élaborer une nouvelle loi qui permettra un affichage répressif mais ne sera pas respectée.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de la création d’une infraction générale de provocation à la consommation excessive d’alcool, mesure qui n’aurait pas de portée concrète.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Malgré les difficultés posées par le problème de la preuve, les dispositions prévues à l’article 4 du projet de loi devraient en principe faciliter la caractérisation de l’infraction en évitant l’exigence de conditions cumulatives, à savoir le caractère à la fois excessif et habituel de la consommation à laquelle le mineur se trouve incité.
En dépit des arguments développés par Mme Bouchoux, la commission a souhaité adopter l’article 4 sans modification. Elle demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Nous aurons sans doute l’occasion, lors de l’examen d’autres amendements, d’aborder la question de l’incidence de la consommation excessive d’alcool sur la santé publique, que l’on ne peut pas ignorer.
Il faut sortir des débats manichéens : se préoccuper des enjeux de santé publique ne signifie pas nier l’importance économique et culturelle de la filière viticole. Cependant, aujourd'hui, ignorer le coût social et sanitaire de la consommation excessive d’alcool dans notre pays, en particulier par les jeunes, c’est véritablement tourner le dos à une réalité que vient à nouveau de mettre en évidence de façon spectaculaire une étude indépendante, qui chiffre ce coût à 120 milliards d'euros pour la France.
Les jeunes – qui ne sont pas seuls concernés, je vous rejoins sur ce point, madame Bouchoux – sont particulièrement exposés à des stratégies commerciales visant à inciter à la consommation d’alcool, qui se déploient notamment dans des endroits où est vendu de l’alcool à bon marché ou lors de fêtes, sur des campus universitaires, dans certaines grandes écoles où se pratique ce que l’on appelle le bizutage.
À ce propos, j’observe que les critiques que vous exprimez étaient également formulées, voilà maintenant quinze ans, contre la répression du bizutage. Les opposants à la mise en œuvre d’une législation visant à lutter contre cette pratique faisaient valoir qu’il serait difficile de l’appliquer, dans la mesure où tout se passe dans le secret des universités ou des grandes écoles. Aujourd'hui, la pratique du bizutage n’a pas disparu, mais elle est clairement identifiée comme problématique. Elle a régressé, et l’existence d’une telle législation a libéré la parole de ceux qui en sont victimes.
Tout en exprimant mon incompréhension, j’émets un avis défavorable sur cet amendement, dont l’adoption constituerait un signal préoccupant à destination des jeunes et des moins jeunes en ce qui concerne la consommation d’alcool.
Mme la présidente. Madame Bouchoux, l'amendement n° 968 est-il maintenu ?
Mme Corinne Bouchoux. Non, je le retire, madame la présidente, mais je défendrai maintenant un amendement de repli.
Mme la présidente. L'amendement n° 968 est retiré.
L'amendement n° 969, présenté par Mmes Bouchoux, Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les messages de lutte contre les comportements d’hyperalcoolisation des jeunes doivent être réalisés et diffusés y compris dans le cadre de la prise en charge et la régulation par les pairs.
La parole est à Mme Corinne Bouchoux.
Mme Corinne Bouchoux. Nous sommes bien entendu extrêmement favorables à la lutte contre l’alcoolisation massive des jeunes et des moins jeunes : il n’y a aucune ambiguïté sur ce point ; je puis l’affirmer, pour m’être occupée de la vie étudiante durant quatre ans.
Cela étant, je ne suis pas sûre que les jeunes et les moins jeunes boivent uniquement parce qu’il existe une offre d’alcool. Si la question était aussi simple, elle aurait été tranchée depuis longtemps.
Nous entendons ici insister sur l’importance de la prévention et de la prise en charge par les pairs pour lutter contre les comportements d’alcoolisation massive des jeunes.
La diffusion d’une information par des jeunes auprès d’autres jeunes, telle que mon collègue André Reichardt et moi-même l’avions préconisée en 2012, constitue à nos yeux un moyen efficace de prévention, dans la perspective d’un renforcement des mesures en faveur de la protection des plus jeunes contre les dangers de la consommation excessive d’alcool.
Une étude sur la consommation d’alcool réalisée en mai 2014 par la Fédération des associations générales étudiantes, la FAGE, auprès de plus de 3 000 étudiants montre que 71,4 % des sondés sont plus sensibles au message de prévention lorsque celui-ci émane d’une personne du même âge que le leur.
En ce sens, la prévention entre pairs, outre qu’elle semble moins coûteuse, a une efficacité plus grande que la communication institutionnelle et les campagnes médiatiques : si celles-ci constituent un business florissant, elles n’ont toujours pas, depuis vingt ans, donné de résultats probants, quelles que soient les politiques publiques mises en œuvre.
La méthode de communication que nous proposons de retenir est plus horizontale que verticale. Elle a été adoptée avec succès dans plusieurs communes, y compris rurales ; nous voudrions insister sur ce point.
Selon nous, dans cette perspective, la réalisation de spots télévisés par des jeunes pour des jeunes, au sein de nos écoles de cinéma ou de nos écoles d’art, devrait être privilégiée, de même que l’intervention d’étudiants en médecine dans les lycées.
Pour le dire autrement, plutôt que de favoriser un business de la prévention, il nous paraît préférable d’associer les jeunes à cette politique publique. J’aimerais aussi que l’on s’interroge sur les raisons qui poussent notre jeunesse à boire autant : quelles perspectives lui donnons-nous ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. On peut certes penser qu’il n’est pas du ressort de la loi de définir les modalités de réalisation et de diffusion des campagnes de lutte contre l’alcoolisation excessive. Néanmoins, pour répondre à Mme Bouchoux, je soulignerai que, hier, lors de l’examen de l’article 1er du projet de loi, sur une initiative de notre collègue Catherine Génisson, a déjà été inscrit à l’article 1er l’objectif de prévention partagée, qui recouvre d'ailleurs d’autres domaines que la lutte contre la consommation excessive d’alcool.
En conséquence, je demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je demande également le retrait de cet amendement ; sinon, l’avis du Gouvernement sera défavorable.
Votre proposition, madame Bouchoux, est déjà mise en œuvre, notamment par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, qui élabore des campagnes de prévention en demandant aux publics cibles, en particulier les jeunes, quels sont, selon eux, les messages les plus efficaces. Par exemple, au début de l’année, nous avons fait réaliser une campagne dont l’élaboration reposait sur la consultation de jeunes.
En tout état de cause, il n’appartient pas à la loi de déterminer les modalités de réalisation des campagnes de prévention et d’information.
Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. André Reichardt. J’ai effectivement cosigné en 2012 avec Mme Bouchoux un rapport sur l’hyperalcoolisation des jeunes, élaboré à la demande de la commission des lois. Ce rapport concluait, comme l’a dit Corinne Bouchoux tout à l’heure, que la législation générale sur l’alcool était déjà très abondante et l’arsenal répressif considérable.
Pour autant, je n’aurais pas voté l’amendement précédent de Mme Bouchoux, estimant pour ma part que la provocation à l’hyperalcoolisation mérite d’être sanctionnée.
En revanche, je la remercie de ne pas avoir retiré le présent amendement, car il me paraît important que nous poussions les feux en matière de prévention.
Nous avions déjà relevé, en 2012, que les campagnes de prévention sont insuffisantes, notamment en ce qu’elles n’associent pas assez ceux que Corinne Bouchoux appelle les « pairs », en l’occurrence les jeunes. Il faut y être particulièrement attentif.
Revient-il à la loi de fixer les modalités d’organisation des campagnes de prévention ou d’information ? Cela nous paraît plutôt relever du domaine réglementaire. Je crois néanmoins, mes chers collègues, que ce serait faire œuvre utile que d’adopter cet amendement. Cela poussera peut-être les instances publiques à financer la mobilisation des pairs à l’occasion de la mise en œuvre de telles campagnes. Je voterai donc cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je voterai moi aussi cet amendement, car l’hyperalcoolisation est un réel et ancien problème de société, qui provoque un gravissime gâchis, allant jusqu’à la perte de jeunes vies.
S’agissant des campagnes d’information évoquées par Mme la ministre, j’observerai que les maires des petites communes ne disposent que de peu de moyens pour les relayer. Il conviendrait de leur permettre de jouer un plus grand rôle en matière d’information et de sensibilisation.
Je prendrai l’exemple des fêtes patronales organisées en milieu rural. On a beau prendre des arrêtés municipaux, mettre en place une buvette, les jeunes s’y rendent après avoir rempli le coffre de leur voiture de boissons alcoolisées achetées en grande surface. Dans les faits, le pouvoir du maire est malheureusement bien limité quand il s’agit de faire respecter la réglementation… C’est au point que l’on finit par renoncer à organiser les fêtes patronales, pour ne pas avoir à vivre ces situations dramatiques que nous connaissons tous. Il est vraiment urgent de prendre des mesures pour lutter contre cet énorme problème de société.
Mme la présidente. L'amendement n° 424 rectifié ter, présenté par M. Montaugé, Mme D. Gillot, M. Berson, Mmes Blondin et Yonnet, MM. Sueur et Cazeau, Mme Khiari, M. F. Marc, Mmes Bataille, Féret et Monier et M. Delebarre, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 11
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° L’article L. 3322–9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le prix unitaire de vente des boissons alcoolisées pratiqué par les commerçants lors d’opérations de promotion ponctuelle dans le temps ne peut être inférieur à un seuil, fixé par décret, correspondant à une fraction du prix de vente unitaire affiché dans l’établissement. »
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. L’article 4 vise à renforcer les moyens de lutte contre les nouvelles pratiques de la jeunesse en matière d’alcoolisation massive, que l’on appelle parfois binge drinking.
Au nombre des pratiques commerciales incitatives figurent par exemple les happy hours, au cours desquelles un débit de boissons propose des produits, en particulier alcoolisés, à des tarifs plus avantageux que d'ordinaire, et parfois très bas.
L’amendement vise à encadrer – et non à supprimer, je le souligne – ces pratiques, par la fixation d’un prix de vente plancher, calculé par application d’un taux de rabais autorisé sur le prix de vente unitaire affiché, ce taux étant fixé par décret. Ce dispositif simple permettrait de justifier objectivement les sanctions prévues par la loi, qu’il faut effectivement maintenir.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La pratique des prix réduits par les débitants de boissons est encadrée par le décret n° 2010-465 du 6 mai 2010 relatif aux sanctions prévues pour l’offre et la vente de boissons alcooliques.
Il apparaît donc à la commission que le dispositif de cet amendement relève du niveau réglementaire. En conséquence, elle sollicite le retrait de celui-ci. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends pleinement le sens de votre amendement, monsieur le sénateur. On voit bien qu’il existe des stratégies d’incitation qui, sous couvert de convivialité, conduisent des jeunes – ces derniers sont sans doute plus sensibles que d’autres à l’aspect financier –, mais aussi des moins jeunes, à privilégier la consommation au sein de ces tranches horaires où les tarifs sont parfois extrêmement bas.
Même si l’alcoolisation rapide au sein de l’espace public, au vu et au su de tous, reste plus développée dans les pays anglo-saxons qu’en France, où l’on consomme plus souvent l’alcool au domicile ou dans des lieux clos, cette pratique commence à émerger chez nous.
Si je partage totalement votre objectif, monsieur le sénateur, je dois avouer que, juridiquement, je ne sais pas comment faire pour mettre en œuvre votre proposition. Comment fixer des prix planchers uniformes alors que les prix de l’immobilier varient selon les villes ? Comment tenir compte de l’interdiction de la vente à perte ? Comment prendre en compte la multiplicité des boissons consommées ?
Je me vois donc dans l’obligation de vous demander de retirer votre amendement, monsieur le sénateur. À défaut, j’émettrai un avis défavorable : je souscris certes à son esprit, mais je ne vois pas comment mettre en œuvre son dispositif par décret.
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Je voudrais insister sur l’importance de se pencher sur cette question de l’incitation des jeunes à consommer dans une mesure excessive des boissons alcooliques, notamment pendant les soirées étudiantes.
Nous avons tous été sensibilisés à cette question. Certaines pratiques commerciales visent à permettre à des jeunes de boire des mètres linéaires d’alcool fort pour un coût très modique, voire gratuitement.
J’entends bien, madame la ministre, qu’il est difficile de régler ce problème par la voie réglementaire, mais il importe que le législateur manifeste sa préoccupation et sa volonté de faire cesser, ou tout au moins de limiter, des pratiques commerciales qui gâchent une partie de notre jeunesse en la rendant dépendante à l’alcool.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Je ne suis ni pour ni contre, bien au contraire (Sourires.)…
J’entends parler de binge drinking et de happy hours : il me semble que nous devrions défendre notre belle langue française, en parlant plutôt d’« alcoolisation massive » et d’« heures heureuses » ! (Sourires.)
La semaine dernière, ma collègue Claudine Lepage et moi-même sommes allés rendre visite à nos amis et cousins francophones d’outre-Atlantique, qui nous reprochent souvent l’utilisation d’anglicismes. Soyons donc tous attentifs à notre façon de nous exprimer, y compris sur ces sujets.
Mme la présidente. Vous avez raison, mon cher collègue : l’expression « heures heureuses » est vraiment très belle !
La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.
M. Gérard Roche. Nous avons tous envie de souscrire à un tel amendement, mais, comme Mme la ministre l’a indiqué, son application serait difficile. De surcroît, elle ne résoudrait pas complètement le problème, car les débits de boissons ne sont pas seuls en cause : les jeunes se fournissent souvent en alcools au supermarché, avant de les consommer à l’abri des regards. C’est peut-être d’ailleurs la modalité la plus grave de l’alcoolisation, car elle est complètement cachée.
Mme la présidente. Monsieur Montaugé, l'amendement n° 424 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Franck Montaugé. Oui, madame la présidente. Sur cette question politique, je souhaite faire prévaloir un point de vue moral. Il y va de la vie de certains de nos jeunes, et je ne doute pas que ce point de vue soit largement partagé sur nos travées.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Il ne faut pas, me semble-t-il, nous abriter derrière la difficulté de légiférer ou de réglementer en la matière. Au minimum, une mission devrait être instituée sur ce sujet, que ce soit sur l’initiative du Sénat ou sur celle du Gouvernement.
Par l’intermédiaire de mes enfants, j’ai eu connaissance de cas dramatiques de jeunes plongés dans un coma éthylique à la suite d’une surconsommation d’alcool.
Évidemment, le contrôle est très difficile. Comme l’a dit M. Roche, les jeunes peuvent s’approvisionner en alcools au supermarché. L’alcoolisation se déroule souvent dans des lieux relevant d’une université ou d’une grande école, mais parfois aussi au domicile de parents qui manquent ainsi à leurs responsabilités.
J’ajoute que ces pratiques ont également de lourdes conséquences en termes de santé publique et de comptes sociaux.
Je souhaite donc qu’une initiative soit prise et que l’on ne renonce pas à agir, au motif que ce serait trop difficile.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 424 rectifié ter.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Je prends acte de ce vote avec beaucoup d’intérêt et beaucoup d’espoir : il marque un engagement en faveur de la santé publique, dont j’espère qu’il se concrétisera au travers d’autres votes… (Sourires. –Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)
Je suis bien entendu extrêmement sensible à la préoccupation exprimée par M. Montaugé. Mais la difficulté, monsieur Vasselle, ne tient pas à un manque de savoir-faire du Gouvernement ou de l’administration : nous devons aussi tenir compte du droit européen, du principe de libre concurrence.
Je ne sais pas quel sort sera finalement réservé à cet amendement dans la suite du processus législatif, mais je considère son adoption comme une invitation exigeante à engager une réflexion collective sur la manière de prendre en compte l’évolution des modes de consommation de l’alcool dans notre pays. Pour toute une série de raisons, les réponses ne sont pas toujours simples à imaginer, mais nous ne devons pas nous résigner face à l’alcoolisation des jeunes et des moins jeunes.
Je vous remercie donc, monsieur le sénateur, d’avoir favorisé le débat en déposant cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
M. le président. La séance est reprise.
5
Engagement des forces aériennes au-dessus du territoire syrien
Déclaration du Gouvernement suivie d’un débat
M. le président. L’ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur l’engagement des forces aériennes au-dessus du territoire syrien, en application de l’article 35, alinéa 2, de la Constitution.
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les sénateurs, le Président de la République l’a annoncé le 7 septembre dernier : la France a décidé de procéder à des vols de reconnaissance au-dessus de la Syrie.
Comme le prévoit l’article 35, alinéa 2, de la Constitution, le Premier ministre en a immédiatement informé les présidents des deux assemblées et a décidé d’organiser un débat parlementaire, à l’Assemblée nationale avec le ministre de la défense et au Sénat avec moi-même.
Je vais vous expliquer, au nom du Premier ministre, pourquoi nous intervenons, dans quel contexte, et vous dire les objectifs que se fixe notre pays.
D’abord, pourquoi agir en Syrie ?
Le chaos règne en Syrie, ce qui déstabilise l’ensemble du Moyen-Orient. Ce pays constitue le repaire des terroristes djihadistes, à la fois de Daech et d’autres groupes, tel Jabhat al-Nosra. Il alimente le drame des réfugiés, qui fuient non seulement Daech, mais aussi et surtout – ne l’oublions jamais – la barbarie du régime de M. Bachar al-Assad. Au cours des derniers mois, les territoires contrôlés par les groupes terroristes se sont étendus sur le sol syrien. Cette progression a déstabilisé plus encore l’ensemble de la région.
Il faut être lucide : l’avancée de Daech est avant tout le résultat d’un calcul cynique de M. Bachar al-Assad, qui s’est d’abord servi de Daech comme d’un instrument pour prendre l’opposition modérée en étau, puis pour l’écraser. Il s’en est également servi comme d’une terrible justification pour commettre des crimes et employer des armes chimiques contre sa propre population.
Le résultat aujourd’hui est que des régions entières ont été abandonnées aux mains des djihadistes. Dorénavant, tout le grand est syrien, c'est-à-dire à peu près 30 % de la Syrie, constitue un solide bastion pour Daech, avec les conséquences extrêmement funestes que nous connaissons.
La première conséquence, c’est la menace pour notre propre sécurité.
Nous le savons, la menace djihadiste dirigée contre la France provient précisément des zones que Daech contrôle. Il y a en Syrie des centres de commandement de cette organisation. C’est également depuis la Syrie que s’organisent les filières qui recrutent de nombreux individus voulant prendre les armes, mener les combats là-bas, mais aussi frapper, en retour, notre propre pays.
C’est enfin en Syrie que se structure et que s’alimente la propagande qui, par la mise en scène macabre de la violence, irrigue constamment les réseaux sociaux, notamment francophones.
Aujourd’hui, entre 20 000 et 30 000 ressortissants étrangers sont recensés dans les filières irako-syriennes. Nous estimons le nombre de Français ou de résidents en France enrôlés dans les filières djihadistes à 1 880 ; 491 sont sur place et 133 ont à ce jour trouvé la mort, de plus en plus à la suite d’actions meurtrières, sous forme d’attentats suicides.
La deuxième conséquence, c’est que, dans cet immense espace, Daech impose sa domination.
Daech est plus qu’une organisation terroriste voulant fédérer différents mouvements d’un djihadisme composite. C’est un totalitarisme à certains égards nouveau, qui dévoie l’islam pour imposer son joug et ne recule absolument devant rien : le massacre de mouvements de résistance, la mise en scène de la torture et de la barbarie, l’asservissement des minorités, les trafics, la vente d’êtres humains. Cette organisation anéantit également l’héritage culturel et le patrimoine universel de cette région : le tombeau de Jonas, le musée et la bibliothèque de Mossoul, les ruines assyriennes de Nimrod ou encore les vestiges antiques de Palmyre.
La troisième conséquence, qui est intimement liée à la deuxième, c’est bien sûr le drame des réfugiés.
Le peuple syrien est aujourd’hui décimé : on dénombre plus de 250 000 morts en quatre ans, dont 80 % sous les coups du régime et de sa répression.
C’est un peuple déplacé : des millions de Syriens sont pris en étau sur le territoire, entre la répression de Bachar al-Assad et la barbarie de Daech.
C’est un peuple, enfin, réduit à l’exil : 4 millions de Syriens se sont réfugiés dans les camps du Liban, de la Jordanie et de la Turquie. Ils ont souvent un seul espoir : atteindre l’Europe, pour y trouver l’asile. La crise des réfugiés est la conséquence directe du chaos syrien. Nous y consacrerons, ici même, un débat demain.
Comment agir en Syrie ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, depuis mardi 8 septembre, nos forces aériennes survolent la Syrie.
Il s’agit, d’abord, et avant tout, d’une campagne de renseignement grâce à des vols de reconnaissance. Plusieurs missions ont d’ores et déjà été réalisées. Cette campagne durera le temps qui sera nécessaire, certainement plusieurs semaines. Nous devons mieux identifier et localiser le dispositif de Daech pour être en mesure de le frapper sur le sol syrien et d’exercer ainsi notre légitime défense, comme le prévoit l’article 51 de la Charte des Nations unies.
Ces missions de reconnaissance sont conduites à titre national, en pleine autonomie de décision et d’action : pleine autonomie de décision, car nous choisissons nous-mêmes les zones de survol où effectuer notre recherche ; pleine autonomie d’action, car, comme le Président de la République l’a dit hier, des frappes seront nécessaires, et nous choisirons seuls les objectifs à frapper. Il est bien sûr hors de question que, par ces frappes, nous contribuions à renforcer le régime de M. Bachar al-Assad.
Ces missions, coordonnées – pour des raisons opérationnelles – avec la coalition que dirigent les États-Unis, s’appuient sur les moyens actuellement mobilisés dans le cadre de l’opération Chammal : douze Rafale et Mirage 2000, un Atlantique 2 et un ravitailleur C-135 sont engagés. Notre frégate Montcalm, déployée en Méditerranée, continue, quant à elle, de collecter des renseignements sur la situation en Syrie.
Je veux rendre hommage devant vous et – je le sais – avec vous à l’action de nos soldats engagés au Levant. Avec courage, avec ténacité, avec professionnalisme, ils défendent nos valeurs, ils protègent nos compatriotes, et ils agissent pour la sécurité de la nation.
Cette stratégie aérienne est-elle suffisante ? En d’autres termes, faut-il envisager d’intervenir au sol ? Des voix plaident pour une telle option. Si la France intervient au sol, agira-t-elle seule ? Nous l’avons fait au Mali, mais les circonstances étaient totalement différentes, comme chacun le sait. La France interviendrait-elle avec les Européens ? Qui parmi eux serait prêt à une telle aventure ? Interviendrait-elle au sol avec les Américains ? Le veulent-ils ? Il faut savoir tirer les enseignements du passé, lesquels sont douloureux. On pense en particulier à la bataille de Falloujah en Irak.
Ce que les exemples en Irak et en Afghanistan nous apprennent, c’est qu’il faudrait mobiliser à coup sûr plusieurs dizaines de milliers d’hommes, qui seraient alors exposés à un danger extrêmement grand. Tel est d’ailleurs le piège, si on y réfléchit bien, que nous tendent les djihadistes : ils veulent nous contraindre à intervenir sur leur terrain pour que nous nous y enlisions, pour invoquer contre nous un prétendu esprit de « croisade », et susciter une solidarité face à ce qui serait, selon eux, une « invasion ».
Le Président de la République a donc répondu à ces interrogations de manière extrêmement claire : toute intervention terrestre – c’est-à-dire toute intervention au sol de notre part ou occidentale – serait « inconséquente et irréaliste ». D’ailleurs, aucun de nos partenaires ne l’envisage.
Toutefois, si une coalition de pays de la région se formait pour aller libérer la Syrie de la tyrannie de Daech, alors le contexte serait différent. Ces pays auraient alors le soutien de la France.
Mener une guerre, ce n’est pas, comme s’y emploient certains, faire de grandes déclarations, fixer des échéances qui ne sont pas réalistes. Mener une guerre, c’est se fixer des objectifs et se donner les moyens de les atteindre.
Comment donc intervenir en Syrie à la suite de nos précédentes interventions ? Nous voulons faire preuve de constance, de cohérence dans l’action.
Contrairement à ce que nous avons entendu dire, nous ne changeons pas de stratégie, nous ne changeons pas de cible. Nous luttons contre le terrorisme, mais – grâce à la vigilance du ministre de la défense et à sa connaissance des situations – nous adaptons nos moyens militaires et notre présence en fonction du contexte politique.
Dans la bande sahélo-saharienne, dans le cadre de l’opération Barkhane, nos armées sont déployées aux côtés des unités africaines. Elles infligent de lourdes pertes aux groupes terroristes d’AQMI, d’Ansar Eddine ou du MUJAO ; autant de groupes qui prospèrent sur la déliquescence des États. Je pense en particulier au vide politique qui s’est installé en Libye après l’intervention de 2011.
Nous luttons, ensuite, en Irak où, depuis un an, nos forces aériennes sont engagées à la demande des autorités irakiennes. Les opérations de la coalition ont permis d’enrayer la progression de Daech, notamment dans le Kurdistan.
Cependant, nous le savions dès le départ et nous l’avons dit sans démagogie, car nous devons cette vérité à nos concitoyens : combattre les groupes terroristes, lutter contre Daech en particulier, ne peut être qu’un combat de longue haleine. Il doit être mené en soutien des forces locales, qui sont en première ligne sur le terrain ; je pense en particulier aux peshmergas kurdes que nous aidons et dont il faut saluer le courage.
Nous n’en sommes qu’au début. Il nous faut donc continuer à agir, consolider les acquis sur le terrain et ne rien abandonner de la partie. Tel est donc le sens de notre intervention.
Nous devons aussi agir politiquement, car si toutes ces actions militaires sont nécessaires, elles ne peuvent être suffisantes. Sans solution politique durable, la situation ne pourra être stabilisée.
Il est impératif d’arrêter l’engrenage fatal de la dislocation du Moyen-Orient. Il faut aujourd’hui tout faire pour stopper cette mécanique effrayante : les fractures régionales qui réapparaissent, la tectonique des rivalités ancestrales – en particulier entre chiites et sunnites – qui se réveillent, les appétits de puissance qui transforment la Syrie en un champ clos d’ambitions régionales et qui empêchent l’Irak de se relever des conséquences de l’intervention de 2003.
Quelle solution politique envisager ?
Face aux risques de fragmentation du Moyen-Orient, nous devons intensifier nos efforts pour faire émerger des solutions politiques qui puissent refonder l’unité de ces États et de ces peuples.
En Irak, d’abord, le gouvernement de M. al-Abadi doit rassembler toutes les communautés du pays pour lutter contre Daech. Le Président de la République l’a dit avec force lors de son déplacement à Bagdad, à l’été 2014, un gouvernement qui ne respecterait pas la minorité sunnite continuerait de précipiter celle-ci dans l’étreinte mortelle de Daech.
Nous devons également intensifier nos efforts en Syrie. Bien sûr, nous ne ferons rien qui puisse consolider le régime. L’urgence consiste, au contraire, à chercher un accord qui tourne définitivement la page des crimes de M. Bachar al-Assad. Ce dernier est une grande part du problème et ne peut pas être la solution. Avec un homme responsable de tant de morts, de crimes de guerre, de ce que M. Ban Ki-moon nomme des crimes contre l’humanité, aucun compromis, aucun arrangement n’est possible ! Transiger, pactiser, comme le proposent certains, serait une faute morale. Dès août 2013, nous étions prêts à réagir, mais les États-Unis et le Royaume-Uni n’étaient finalement pas au rendez-vous.
Au-delà de l’aspect moral, ce serait aussi une faute politique et stratégique. Les combattants ne déposeront les armes en Syrie que lorsque l’État syrien garantira leurs droits et ne sera plus aux mains d’un groupe criminel. C’est pourquoi, même si cette ligne de conduite est très difficile à tenir, il faut travailler sans relâche à accélérer la transition politique. Elle devra rassembler, dans un gouvernement de transition, les forces de l’opposition – elles sont aujourd’hui malheureusement encore trop affaiblies – et les éléments les moins compromis du régime. En aucun cas, cette transition ne peut remettre dans le jeu les factions terroristes : il y a là une ligne qui ne doit pas être franchie.
Cette solution politique ne peut voir le jour que par la convergence de toute une série d’efforts diplomatiques. Nous connaissons les paramètres du règlement de la crise syrienne. Ils ont été déterminés lors des réunions de Genève, dès 2012, et adoptés par les principaux pays intéressés par l’avenir de la Syrie. La tâche est très difficile, mais cette difficulté ne doit pas être un prétexte au statu quo, à l’inaction, au renoncement.
La France parle donc à tous. Le Premier ministre, ainsi qu’il l’affirme, tient à saluer « l’action remarquable que conduit le ministre des affaires étrangères à la tête de notre diplomatie ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Didier Guillaume. Bravo !
M. Laurent Fabius, ministre. Cette phrase n’est pas de moi ! (Sourires.) Je ne voudrais pas que ce passage du discours du Premier ministre soit le seul à être applaudi !
Nous discutons bien sûr avec tous nos partenaires membres permanents du Conseil de sécurité, les Britanniques, les Américains, les Chinois, et plus particulièrement avec les Russes. Samedi dernier, à Berlin, j’ai eu un long entretien avec M. Lavrov, pour envisager ce qu’il est possible de faire. Les positions de la Russie demeurent malheureusement éloignées des nôtres.
Nous avons tous un devoir de responsabilité : tout soutien militaire au régime de Bachar, en vertu de l’analyse que j’ai développée devant vous, ne fait qu’alimenter la spirale de la violence. Nous devons d’autant plus parler à la Russie qu’il faut surmonter la défiance née chez elle de l’intervention en Libye en 2011.
Parler à tous, c’est aussi travailler avec l’ensemble des acteurs de la région. L’histoire parle en ce sens, mais aussi la géographie.
Parler à tous, c’est d’abord parler aux pays arabes sunnites. C’est parler, aussi, à la Turquie, qui a besoin de l’Union européenne, et dont nous avons besoin. Ce pays doit toutefois préciser davantage ses objectifs.
C’est parler, enfin, à l’Iran. Sur ce point, on peut relever une évolution. Le Président de la République recevra à Paris, en novembre, le président iranien Rohani. Je me suis moi-même rendu en Iran et nous aurons l’occasion de rencontrer les dirigeants iraniens lors de la réunion de l’Assemblée générale des Nations unies dans quelques jours. La France recevra l’Iran, car après la conclusion de l’accord sur son programme nucléaire, Téhéran doit pouvoir, nous l’espérons, peser positivement en faveur d’une solution politique.
Il est donc clair que la France parle à tous, car telle est sa vocation !
Nous devons agir militairement, politiquement, mais aussi sur le plan humanitaire, pour protéger les minorités au Moyen-Orient.
La survie de communautés entières est en jeu – les chrétiens, les yézidis, et bien d’autres – et, avec elle, la diversité culturelle, religieuse et ethnique de cette région. J’ai reçu, il y a quelques jours, en présence d’un certain nombre d’entre vous, le patriarche de l’Église chaldéenne d’Irak, Mgr Sako. Il m’a lancé un cri d’alarme, un appel à l’aide, mais il m’a dit aussi, de manière très émouvante, sa confiance en la France.
Le 8 septembre dernier, j’ai organisé une conférence internationale consacrée aux victimes de persécutions ethniques et religieuses au Moyen-Orient. Les participants ont tous été bouleversés, je peux en porter témoignage, par les mots de Jinan, une jeune yézidie. Le plan d’action de Paris a été adopté et devrait nous permettre d’avancer. Notre devoir est d’en assurer la mise en œuvre. Ce plan fera l’objet d’un suivi : nos amis espagnols organiseront la même conférence l’année prochaine.
Dans l’attente d’un retour de la Syrie à une forme de stabilité, nous devons venir en aide au peuple syrien. Une conférence internationale sur les réfugiés sera organisée pour mobiliser tous les pays, pour dégager les ressources financières qui font aujourd’hui tant défaut – je pense, en particulier, aux moyens dont doivent disposer le Haut-Commissariat pour les réfugiés et le Programme alimentaire mondial –, pour organiser, aussi, au-delà des initiatives prises par l’Europe, la solidarité avec les pays accueillant des réfugiés.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Premier ministre l’a dit, la France est en guerre contre le terrorisme, le djihadisme et l’islamisme radical. Derrière le Président de la République, ce combat mobilise toute la nation et nous lui consacrons tous les moyens que nous jugeons nécessaires.
Nous savons que ce combat sera long et qu’il sera marqué par les épreuves, car la menace est lourde. Nous savons tous aussi que ce combat est absolument décisif, car il y va de nos valeurs, de ce que nous sommes, de ce en quoi nous croyons. Il y va de l’avenir de peuples voisins et amis, mais d’abord de notre propre avenir. Nos concitoyens sentent bien que quelque chose de fondamental se joue là.
Alors, au-delà de la diversité de nos sensibilités, nous devons, face à ce danger, être unis, rassemblés, à la hauteur des enjeux, pour agir et mener ce combat. C’est ainsi que nous pourrons l’emporter. Nous avons la ferme conviction, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous l’emporterons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du RDSE, de l'UDI-UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. J’indique au Sénat qu’il a été décidé d’attribuer, à raison d’un orateur par groupe, un temps de quinze minutes au groupe Les Républicains, ainsi qu’au groupe socialiste et républicain, et un temps de dix minutes à chacun des autres groupes politiques, l’orateur des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.
Dans la suite du débat, la parole est à M. Jeanny Lorgeoux, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jeanny Lorgeoux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 8 septembre, nos forces ont effectué leur premier vol de reconnaissance au-dessus de la Syrie : deux appareils Rafale, de l’escadron Lorraine, basés à Al Dhafra aux Émirats arabes unis, appuyés par un ravitailleur C-135 du groupe de ravitaillement Bretagne, ont mené une mission de reconnaissance de plus de six heures, visant à recueillir des renseignements sur le groupe terroriste Daech.
Le lendemain, le 9 septembre, c’est un avion de patrouille Atlantique 2, doté d’équipements de recueil de renseignement électromagnétique, qui a survolé l’espace aérien syrien.
Tournant stratégique ? Adaptation conjoncturelle ? Urgence opérationnelle ? Deux jours avant, le Président de la République avait défini, lors de sa conférence de presse, le cadre de notre lutte contre Daech. Cette action est conduite par des femmes et des hommes œuvrant dans la discrétion ou le secret, avec pugnacité et abnégation. Qu’ils soient ici remerciés pour leur dévouement à la patrie, car l’ennemi est violent, volatil, sans pitié. Notre ennemi est un fanatisme obscurantiste, aux antipodes de nos valeurs. Nous sommes en guerre.
Nous nous sommes engagés en Irak, parce que Daech, cette organisation terroriste qui non seulement trahit et mutile l’islam, mais bafoue aussi les valeurs universelles, fait peser une menace mortelle sur le Moyen-Orient, ainsi que sur la sécurité de l’Europe, en particulier sur celle de la France.
En Irak, c’est précisément le gouvernement qui nous a appelés à l’aide et notre intervention reçoit le soutien de tous les États de la région. J’ajoute que le Conseil de sécurité a appelé à combattre Daech par tous les moyens, conformément à la Charte des Nations unies, et à soutenir les forces qui luttent sur le terrain contre cette organisation.
La montée en puissance des frappes de la coalition a incontestablement été efficace : elle a donné de l’air aux forces régulières irakiennes, ainsi qu’aux peshmergas, qui ont pu contenir, freiner, enrayer la progression de Daech, voire amorcer par endroits une reconquête. Ces premiers résultats confirment le bien-fondé de la stratégie choisie, celle d’un soutien aérien aux forces terrestres irakiennes, auxquelles il incombe principalement de mener cette guerre, car nous ne devons pas nous substituer aux Irakiens ni à leurs voisins immédiats.
Cette région du monde, reconnaissons-le, a souffert de multiples ingérences. Elle doit aujourd’hui, avec notre aide, rebâtir le cadre de l’État. Tel est le sens de la stratégie politique que nous menons parallèlement à notre engagement militaire. Daech se nourrit des divisions entre les Irakiens, et son action ne sera contrecarrée que lorsque le gouvernement irakien aura rétabli au sein des populations un minimum de confiance dans leur État.
Par sa nature et sa dimension, par le nombre de ses combattants – autour de 40 000 –, par ses capacités militaires – chars, blindés, armements lourds, missiles –, et par sa capacité d’intervention, Daech change la donne.
Cette organisation mène à la fois des opérations conventionnelles et des opérations de type terroriste ou de guérilla urbaine. Elle acquiert même une dimension internationale, en raison de sa capacité à attirer très largement, y compris chez nous. Outre son recrutement français, cette organisation a enrôlé, du Maroc à l’Extrême-Orient, près de 10 000 étrangers sur 40 000 combattants.
Ce chiffre impressionnant indique que ce type de terrorisme est radicalement nouveau, dans un contexte stratégique qui a changé, ainsi que l’ont illustré dramatiquement les attentats de Paris en janvier, puis une série d’attaques en France, en Belgique, en Algérie, en Tunisie, en Arabie Saoudite et au Koweït.
Le Président de la République l’a lui-même affirmé lors de sa conférence de presse : les attaques terroristes sur le territoire national ne sont pas déconnectées des théâtres syriens ou irakiens. Les territoires de la Syrie et de l’Irak forment un continuum, où Daech déploie et implante des camps, tout en s’appropriant des infrastructures, afin de développer sa capacité de commanditer, de préparer et de coordonner des attentats sur le territoire national et partout dans le monde. Raqqa, vieille cité sur l’Euphrate, en est un symbole.
C’est une raison supplémentaire d’intervenir. Il est ainsi devenu indispensable d’approfondir notre connaissance du terrain, lequel s’étend, pour la partie syrienne, sur des dizaines de milliers de kilomètres carrés, en récoltant les renseignements nécessaires pour mieux frapper l’ennemi.
Le renseignement, au sens opérationnel du terme, demeure une matière difficile à partager, y compris entre alliés, car il touche à la souveraineté et alimente utilement notre autonomie de décision. La France a toujours eu à cœur de conserver son autonomie stratégique, y compris au sein d’une coalition, cette indépendance n’excluant toutefois pas la loyauté avec nos alliés.
Du point de vue opérationnel, l’extension du périmètre d’action de l’opération Chammal au territoire syrien et le prolongement des missions de renseignement permettront de repérer et de désigner des cibles névralgiques de Daech, notamment des infrastructures et les unités qui ourdissent les tueries chez nous et ailleurs.
Cette extension ne change rien à notre ordre de bataille, car l’opération Chammal continuera de répondre aux mêmes objectifs, qui sont, à terme, de réduire Daech et, d’une manière plus globale, d’annihiler sa capacité de nuisance, y compris à l’extérieur.
Sur le terrain, en Irak, nous fournissons un appui aérien et du renseignement aux forces armées irakiennes. Cela se traduit concrètement par l’engagement de 700 militaires armant un parc d’une quinzaine d’appareils : six Rafales, trois Mirages 2000, trois Mirages 2000 N, un avion de patrouille, deux Atlantiques 2, un avion ravitailleur C-135. Le groupe aéronaval autour du porte-avions Charles-de-Gaulle peut venir renforcer l’action des forces françaises sur place, comme cela a été le cas pendant quatre mois, de février à mai dernier.
Au sein de la coalition internationale, notre force constitue la seconde en nombre après celle des États-Unis, ce qui représente un effort non négligeable contre ce fléau de type nouveau, auquel nous devons nous adapter d’autant plus que le contexte diplomatique et stratégique s’est considérablement modifié.
À l’échelon international, on ne dira jamais assez que l’accord signé avec l’Iran sur le nucléaire a considérablement modifié la donne. Monsieur le ministre, vous avez eu raison de résister et de vous montrer exigeant afin qu’il soit aussi robuste que possible. Votre fermeté loyale s’attachait, ni plus ni moins, à la vérification des installations et aux régimes de sanctions, c’est-à-dire, au bout du compte, à la consolidation de la paix dans la durée et à la stabilisation d’un équilibre toujours précaire de la sécurité au Moyen-Orient.
En filigrane, on devine bien que le règlement du dossier nucléaire entre l’Iran et les six puissances constitue déjà une véritable rupture stratégique. Outre sa force symbolique, il ouvre un nouveau champ des possibles en réintégrant l’Iran dans la boucle diplomatique. Il laisse non seulement entrevoir une éventuelle reconfiguration des relations entre l’Iran et l’Occident, mais il recèle également les germes de règlements en cascade de plusieurs crises régionales.
Tandis qu’en Syrie, des desperados de Daech mettent au point des machineries infernales pour éclabousser de sang nos populations civiles, fallait-il rester les bras ballants ? Y a-t-il de notre part un changement de cap ? Non ! La France veut à la fois l’élimination politique de M. al-Assad et la destruction de Daech, qui est une entreprise d’éradication ethnique et religieuse.
La France veut la paix pour la Syrie. C’est pourquoi elle soutient les modérés de bonne volonté, de toutes confessions et de toutes origines, pour reconstruire la nation. La France continue de reconnaître, à l’instar des États-Unis, la Coalition nationale syrienne comme unique représentant légitime du peuple syrien. Elle appelle de ses vœux une négociation vers une transition politique.
Vous y travaillez d’arrache-pied, monsieur le ministre, avec réalisme, mais en restant fidèle à vos principes. S’il est clair que la transition devra s’appuyer sur des éléments du régime – aucune issue ne sera possible sans représentation de toutes les composantes –, le règlement final ne pourra prévoir le maintien de M. al-Assad, bourreau de son propre peuple.
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. Jeanny Lorgeoux. À moyen terme, le point de mire est l’organisation d’élections sous supervision internationale, débouchant sur un processus de réconciliation. Certes, il y a loin de la coupe aux lèvres, mais il n’y a pas d’autres voies.
Aujourd’hui, sur place, règnent le chaos, le dépeçage et la souffrance. Plus de 4 millions de réfugiés fuient la barbarie et affrontent les affres de l’exode. Au-dedans, les activismes fanatiques sont à l’œuvre et perpétuent le malheur. Au-dehors, alentour, les États ont peine à sortir de leurs réflexes d’inquiétude : la Russie et l’Iran, grandes et vieilles civilisations ; Israël, angoissé pour sa sécurité ; la Turquie enchaînée au boulet kurde ; la Jordanie, transpercée par les exodes massifs ; le Liban, violé et violenté ; l’Arabie Saoudite, royale et secrète.
Dans l’Orient compliqué, il est très difficile de démêler l’écheveau politique. Peut-être est-il plus sage de s’en tenir à quelques constats.
Un, la Syrie doit renaître de ses cendres, avec un gouvernement de modérés, représentant toutes les parties et toutes les composantes. C’est la solution politique.
Deux, en attendant son avènement, il faut détruire Daech et éloigner M. al-Assad.
Trois, l’expérience irakienne commande que la coalition occidentale n’intervienne pas au sol.
Quatre, en débusquant ses ennemis là où ils ourdissent leurs attentats, la France protège la nation, dans un réflexe de légitime défense publique et collective.
La France n’abandonne pas les populations qui lui sont fidèles. Elle a raison de clamer, ici ou là, son message de fraternité et d’humanité, de défendre le pluralisme humain, de combattre bec et ongles l’inquisition barbare d’un faux islam.
Mes chers collègues, peut-on imaginer, demain, la Syrie sans Palmyre et ses colonnades enflammées par le soleil couchant ; sans Ougarit et ses tablettes d’un premier alphabet ; sans le Krak des Chevaliers francs ; sans le sanctuaire byzantin de Saint-Siméon ; sans Alep et sa citadelle ; sans Damas et la splendeur des Omeyyades. Irak, Syrie, berceaux de la civilisation, des Séleucides aux Lagides, des Romains aux Byzantins, des Arabes aux Ottomans.
Monsieur le ministre, nous savons gré au Président de la République, au Gouvernement et à vous-même, qui déployez une inlassable activité au service de la paix, de ne pas oublier, malgré le fracas des armes, l’histoire, notre histoire, celle des hommes ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE, ainsi que sur quelques travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme Leila Aïchi, pour le groupe écologiste.
Mme Leila Aïchi. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, l’annonce par le Président de la République, le 7 septembre dernier, de la mise en œuvre de vols de reconnaissance au-dessus du territoire syrien et les bombardements annoncés il y a quelques heures, correspondent, en pratique, aux prémices d’une extension de l’opération Chammal aux zones contrôlées par Daech sur le territoire syrien.
Cette évolution répond à la logique de la lutte contre Daech, car cette organisation terroriste se joue des frontières et assoit sa domination barbare de part et d’autre, en s’appuyant sur une stratégie médiatique de l’horreur, démontrant chaque jour un peu plus son goût pour les pires exactions et son absence totale de respect pour la vie humaine. Des deux côtés de la frontière, elle entend s’enraciner petit à petit et, pour ce faire, se donner les apparences d’un État.
Combattre cette organisation obscurantiste afin de mettre un terme à ce projet est un impératif auquel souscrit évidemment le groupe écologiste.
Une fois le contexte présenté, des questions persistent quant au manque de clarté de la politique étrangère française dans cette région.
Nous vous avions alerté en janvier dernier : limiter la lutte contre Daech à l’Irak seul était dangereux. Nous avions raison. En l’absence d’une vision globale régionale, nous avons perdu de précieux mois, durant lesquels la situation sur place n’a fait qu’empirer.
Daech concerne à la fois l’Irak et la Syrie !
Je regrette, une fois encore, l’absence criante de défense européenne. Le résultat sur ce point n’est pas à la hauteur de nos ambitions, alors qu’il est très clair que l’absence de défense européenne offre une chance supplémentaire au terrorisme.
Nous l’avions déjà souligné lors des débats sur l’opération Chammal, il nous apparaît primordial de ne pas nous enfermer dans une logique court-termiste uniquement militaire et dépourvue de toute stratégie politique à long terme. Une intervention de cette nature doit impérativement s’accompagner d’une stratégie de reconstruction de la zone, afin de mettre un terme au cercle vicieux des États faillis.
Nous devons être conscients que les erreurs du passé ont entraîné de nouvelles violences et de nouvelles déstabilisations dans la région. Nous le savons tous ici, l’invasion anglo-américaine de l’Irak en 2003 et l’éradication consécutive des structures civiles et militaires du parti Baas ont contribué à l’avènement de Daech, alors même que ce parti était, historiquement, laïc et protecteur des minorités religieuses.
M. Jacques Mézard. Très bien !
Mme Leila Aïchi. Il semble également urgent d’adjoindre à la mission que nous nous fixons une dimension humanitaire. Force est de constater que l’action de la coalition sous leadership américain est construite autour d’une logique de légitime défense et qu’elle ne s’accompagne pas d’une véritable stratégie politique régionale, pourtant indispensable. Nous le regrettons vivement, monsieur le ministre.
Sur ce point, les interrogations que nous avions soulevées il y a maintenant plusieurs mois restent pertinentes. Il nous revient de concilier les vues antagonistes de la Turquie et de la Russie au sujet du pouvoir syrien, car celles-ci constituent un obstacle à toute solution pérenne à la guerre civile qui ronge la Syrie.
Se pose également la question du rôle possible, dans le règlement de la crise, de l’Iran, soutien du pouvoir syrien, mais aussi puissance régionale de premier plan, avec laquelle nous partageons aujourd’hui un objectif.
Il apparaît en outre nécessaire de discuter avec nos partenaires du Golfe, afin qu’ils s’intègrent de manière cohérente dans une stratégie régionale. De même, Israël doit être partie prenante du règlement politique de la situation.
Enfin, on peut légitimement soulever le problème que pose l’instrumentalisation par la Turquie de la lutte contre l’État islamique aux fins de s’en prendre à la minorité kurde.
Quelle est la position de la France à l’égard de l’ensemble des acteurs de la région ? Il s’agit là d’une question majeure.
Plus encore, comment pouvons-nous prétendre combattre Daech sans nous attaquer aux sources mêmes de cette organisation ? D’où provient son armement ? D’où vient son financement ? Qui sont les intermédiaires ? Qui sont les clients ? Si la coalition ne parvient pas à contrôler ces réseaux par une action concertée et transparente, nous ne serons jamais en mesure de nous prémunir contre l’importation du conflit sur notre territoire. Comment prétendre mener une politique étrangère rationnelle sans nous attaquer au cœur du problème ? Nous avons déjà perdu trop de temps !
Seule une stratégie globale permettra de résoudre le conflit de manière durable. Selon le groupe écologiste, une intervention militaire ne peut se justifier que dans ce cadre.
Pour ces raisons, il est du devoir de la France d’œuvrer afin d’inscrire les actions actuellement menées dans un cadre authentiquement multilatéral. Il ne s’agit pas de prétendre qu’une telle solution serait miraculeuse ou d’entretenir une quelconque mystique du multilatéralisme. Un point est clair : les antagonismes en présence dans la région, ainsi que les profondes divergences d’intérêts qui s’y font jour, rendent illusoire toute résolution durable de la crise tant que l’action de la coalition reposera sur le seul leadership militaire américain.
Nous ne pouvons pas faire l’économie de la question de nos rapports avec le pouvoir syrien. La France doit adopter une position pleine et entière sur ce sujet.
Nous ne pouvons pas refuser de dialoguer avec Bachar al-Assad tout en entamant des discussions avec « des éléments du régime ». Ces derniers sont-ils moins ou plus coupables que Bachar al-Assad du bombardement des populations ?
Alors que plusieurs de nos partenaires européens ont déjà décidé de franchir le pas, nous devons, à notre tour, faire preuve de pragmatisme ! C’est justement parce que nous refusons d’utiliser tous les canaux de communication dont nous disposons que nous n’arrivons pas à contenir la progression de Daech. Dans ces circonstances, que cela nous plaise ou non, Bachar al-Assad est un interlocuteur inévitable.
Il y a deux ans déjà, je vous avais alerté d’un danger : des massacres intercommunautaires pouvaient se produire si Bachar-al-Assad était fragilisé. Force est de constater que cela s’est réalisé. J’en veux pour preuve le massacre, entre autres, de la minorité chrétienne et des yézidis. Punir le régime de Bachar al-Assad n’est qu’une réaction de court terme. La solution à ce conflit est avant tout politique.
Le Président de la République a souligné que Bachar-al-Assad ne pourrait rester au pouvoir et que la question de la transition démocratique serait inévitablement posée. Nous avons certes, de fait, un ennemi commun. Dans ces circonstances, frapper Daech, sans pour autant favoriser le régime syrien, relève d’une stratégie irréaliste sur le terrain.
Si le départ de Bachar al-Assad s’impose dans le cadre d’une transition vers un gouvernement d’union nationale, les circonstances de ce départ doivent toutefois être précisées. Le pouvoir syrien bénéficie en effet du soutien de la Russie, mais aussi de celui de l’Iran, un acteur régional qu’il convient d’associer à une stratégie de sortie de crise.
Il nous faut également nous interroger sur la forme que prendrait un gouvernement d’union nationale. L’opposition syrienne, même avec notre soutien, est-elle capable d’étayer un tel gouvernement ? Si l’objectif est de parvenir à la stabilité politique et à la paix civile, alors cette question doit être légitimement posée.
Monsieur le ministre, avec qui discutons-nous ? Nous devons une fois encore tirer les leçons du fiasco libyen. En Syrie, donner le pouvoir à une opposition, fût-elle démocratique, mais qui n’a pas de relais sur le terrain et qui est fortement fragilisée – et nous le déplorons –, mènerait à coup sûr à l’éclatement du pays, à l’embrasement de la région et à la démultiplication des foyers du terrorisme international. C’est une question de pragmatisme.
Enfin – et je conclurai sur ce point –, l’action que la France envisage de mener en Syrie ne doit pas occulter la question de l’accueil des réfugiés fuyant le triste sort qui est le leur en Syrie. Nous ne saurions saisir le prétexte de la lutte contre Daech pour considérer que la France prend sa part.
L’Europe doit se montrer à la hauteur. À cet égard, nous approuvons la proposition de Jean-Claude Juncker de réduire les fonds structurels versés par l’Union européenne aux pays qui rejettent l’idée de quotas en matière de répartition des réfugiés.
Mes chers collègues, entendons le grand élan de solidarité dont font preuve, aux quatre coins du pays, bon nombre de nos concitoyens, qui, par des initiatives concrètes, nous rappellent que l’accueil, la générosité et l’ouverture font partie de l’âme de la France. Soyons à la hauteur de cet élan ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et républicain, du RDSE et sur quelques travées de l'UDI-UC. – MM. Gérard Longuet et Jean-Pierre Vial applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour le groupe CRC.
M. Pierre Laurent. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur l’initiative du Président de la République, nous sommes une nouvelle fois saisis de la question de l’insupportable tragédie subie par la Syrie. Nous qui ne cessons de réclamer que la représentation nationale soit davantage associée aux décisions internationales qui engagent la France, nous nous félicitons de ce débat.
La France a plus que jamais le devoir d’agir. De nouvelles initiatives sont nécessaires face à l’ampleur de la tragédie humaine que vit la Syrie, face aux conséquences du chaos généralisé, à commencer par l’exode massif des réfugiés, et face à l’emprise croissante de Daech sur toute une partie des territoires syrien et irakien.
Malheureusement, une fois encore, la saisine du Parlement n’a été motivée par la seule décision – déjà prise ! – du Président de la République d’accroître notre engagement militaire. Cet engagement passe par l’extension de nos frappes aériennes et, dans un premier temps, de nos vols de reconnaissance sur le territoire syrien. Cette décision soulève de nouveau de très nombreuses objections et interrogations.
Le Président de la République a – enfin ! – déclaré, après avoir trop tardé à prendre la mesure de la tragédie humanitaire qui s’amplifiait, que la France devait accueillir les réfugiés. C’est un appel que, pour ma part, j’ai lancé en rentrant de Kobané il y a moins d’un an. Mais nous aurons l’occasion de débattre de cette question demain. Nous dirons alors pourquoi nous estimons que les mesures annoncées sont très loin d’être à la hauteur. Et je ne parle même pas des propos indignes et scandaleux tenus ces jours-ci par de nombreux dirigeants de la droite et du Front national contre des milliers de réfugiés.
Le Président de la République a ajouté qu’il fallait en même temps agir sur les causes de cet exode et sur les risques d’actes terroristes que fait courir l’emprise croissante de Daech. Nous en sommes d’accord. Mais comment agir ? Et dans quels buts ? Tel est le débat.
Ainsi, les frappes envisagées seront-elles justes et efficaces ? Et d’abord, quels sont leurs buts et quelles sont les cibles envisagées ?
Voulons-nous frapper Daech ou Bachar al-Assad, dont la France continue à faire de la « neutralisation » un objectif privilégié ?
Selon des spécialistes de la Syrie, Daech contrôle aujourd’hui 40 % du territoire syrien, le régime 30 %, c’est-à-dire les deux tiers de la population, soit entre 12 et 18 millions de Syriens vivant encore dans le pays.
Que changeront les frappes françaises, alors même que les milliers de frappes de la coalition dirigée par les États-Unis ont échoué à enrayer l’engrenage meurtrier ?
De surcroît, si le Président de la République a écarté une offensive terrestre – et vous venez de le confirmer, monsieur le ministre ! –, bien des voix continuent de plaider en faveur d’une telle opération. Où allons-nous réellement ?
Une nouvelle fois, notre pays risque de faire fausse route s’il continue à considérer que l’intervention militaire devrait précéder tout règlement politique. Pour notre part, nous pensons au contraire que, sans un engagement déterminé de la France dans la recherche immédiate d’une solution politique réunissant l’ensemble des parties et des puissances impliquées, la logique militaire s’embourbera et nourrira les forces de Daech, qui souhaitent, elles, la confrontation militaire avec l’« ennemi » occidental.
De grâce, qu’on nous épargne le couplet habituel selon lequel, posant ces questions, nous serions partisans de l’inaction ! Nous demandons, tout au contraire, une action internationale de la France plus efficace. Pour ce faire, tirons des leçons sérieuses de l’impasse dramatique dans laquelle nous ont conduits les guerres successives d’Afghanistan – ce pays dont plus personne ne parle est aujourd’hui livré à lui-même –, d’Irak – ce pays a été totalement démantelé par la guerre –, de la Libye – ce pays est plongé dans le chaos et livré aux réseaux djihadistes – et, aujourd'hui, de la Syrie.
Ces guerres successives n’ont pas fait reculer le danger terroriste ; elles n’ont fait que l’accroître. D’ailleurs, tous les actes terroristes ayant frappé notre pays ont été perpétrés par de jeunes Français qui avaient, à un moment ou à un autre, fait leurs armes sur ces champs de bataille.
Pour notre part, nous persistons à penser que, si action militaire il devait y avoir, elle devrait s’inscrire dès le départ sous mandat de l’ONU, en concertation avec toutes les puissances impliquées, en vue de rechercher un plan de paix aux objectifs clairs, débarrassé des visées prédatrices des grandes puissances internationales et régionales, à savoir la reconstruction de la Syrie dans son intégrité territoriale. Or nous estimons que rien de cela n’est fait sérieusement par la France.
M. Pierre Laurent. Le 17 août dernier, le Conseil de sécurité de l’ONU a unanimement soutenu une initiative reprenant les conclusions de Genève 1, avec, pour objectif de relancer un processus de règlement politique, lequel était au point mort depuis février 2014. Que fait la France pour activer ce processus ?
Permettez-moi de poser une autre question concernant le soutien aux forces combattantes kurdes de Syrie, qui ont notamment mené la bataille de Kobané. Où en est-on de notre soutien ? Pourquoi la France est-elle restée silencieuse face à la répression de grande ampleur lancée de nouveau par le pouvoir d’Erdogan cet été contre les forces kurdes du HDP, en Turquie, alors même que le pouvoir turc a nourri jusqu’à présent des relations plus que troubles avec les forces djihadistes ? Les forces kurdes du HDP sont pourtant les seules à avoir accueilli les réfugiés de Kobané.
Pourquoi maintenir le PKK sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne, alors que ce parti est l’une des rares forces combattantes efficaces sur le terrain face à Daech ?
Pourquoi, à part les frappes aériennes, rien ne semble possible pour assécher les circuits financiers, geler les avoirs bancaires, stopper les commerces d’armes et de pétrole qui alimentent Daech ? Quelles complicités couvre-t-on au nom de la préservation d’intérêts de grands groupes multinationaux ou de grandes puissances, dont la nôtre, dans la région ? Pour filer la métaphore, des vols de reconnaissance plongeant dans les arcanes des circuits financiers internationaux auraient peut-être aussi leur intérêt… (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe CRC.)
Le règlement politique auquel la France doit travailler sans relâche doit porter non pas sur le partage futur des zones d’influence, mais sur la reconstruction nationale et démocratique de la Syrie, dans le respect de son intégrité territoriale.
Toutes les parties, toutes les puissances régionales doivent œuvrer à cette fin. Nulle d’entre elles ne doit être exclue : ni la Russie, ni l’Iran, ni la Turquie, ni les monarchies du Golfe. Dans ce processus, la France doit porter des objectifs de paix clarifiés.
La reconstruction politique de la Syrie doit avoir pour objectif l’instauration démocratique d’un nouveau régime souverain pour le pays.
Bachar al-Assad porte une très grande responsabilité dans l’enclenchement de la guerre ; il ne peut garantir ce processus, ni en être l’aboutissement. Il devrait même, lui comme beaucoup d’autres parmi ses adversaires, répondre de ses crimes.
Enclencher un processus de négociation politique suppose de mettre aujourd’hui autour de la table toutes les parties impliquées.
Au-delà de la Syrie, c’est à l’organisation d’une conférence globale pour la paix dans le grand Moyen-Orient que devrait travailler la France, après l’accord sur le nucléaire iranien. Qu’attend le Président de la République pour donner suite au vote du Parlement voilà maintenant dix mois sur la reconnaissance de la Palestine ?
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. Pierre Laurent. La Syrie, l’Irak, les Kurdes : tout se tient et s’imbrique.
Mme Éliane Assassi. Eh oui !
M. Pierre Laurent. Il faut donc agir sur tous ces fronts.
La France, au fond, doit renverser ses priorités, retrouver sa liberté d’initiative et de parole, et conditionner son engagement militaire à la construction d’un règlement politique dans un cadre multilatéral, sous l’égide de l’ONU. Sinon, elle ne fera qu’alimenter les désastres en cours, les logiques de puissance génératrices des déséquilibres mondiaux et les forces obscurantistes qui cherchent la confrontation et la guerre.
Telles sont, monsieur le ministre, les convictions des membres du groupe CRC. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et sur quelques travées du groupe écologiste. – Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Dominique Gillot et Hermeline Malherbe applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour le groupe du RDSE.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà tout juste un an, le Gouvernement informait le Parlement de sa décision d’engager les forces aériennes françaises en Irak, en réponse à la menace croissante exercée par Daech.
Le 13 janvier dernier, le Parlement, dans un large consensus, autorisa la prolongation de l’opération Chammal. Aussi est-il logique aujourd'hui d’étendre cette opération à la Syrie.
Lors des différents débats du Sénat, le groupe RDSE, par la voix de notre collègue Robert Hue, avait approuvé la décision du Président de la République, une approbation qui fut toutefois, je le souligne, assortie de réserves.
Compte tenu de l’aggravation du chaos dans la zone irako-syrienne occupée par les djihadistes, on peut aujourd’hui s’interroger sur l’efficacité des réponses apportées par la communauté internationale.
Je ne remets pas en cause, bien sûr, le principe des frappes aériennes de la coalition anti-Daech en Irak. Elles étaient indiscutablement nécessaires pour mettre rapidement un terme à la progression fulgurante des combattants djihadistes.
D’abord, les autorités de Bagdad avaient demandé à la France une intervention extérieure.
L’instauration, au cours de l’été 2014, d’un califat terroriste sur une partie de l’Irak et de la Syrie a constitué une entreprise sans précédent et très inquiétante pour la région : al-Baghdadi a réussi là où Ben Laden avait échoué.
Ensuite, vous l’avez souvent rappelé dans vos interventions, monsieur le ministre, Daech constitue une menace non seulement pour la région proche-orientale, mais également pour le monde entier, notamment pour l’ensemble des pays européens, au premier rang desquels la France. Les attentats commis à Paris au début de l’année l’ont illustré tragiquement.
Je n’oublie pas non plus la crise des réfugiés, ce drame humanitaire qui pose un important défi à l’Europe, en termes non seulement d’accueil, mais aussi de cohésion politique. La France a pris ses responsabilités. C’est ainsi que 700 de nos militaires effectuent depuis douze mois des missions aériennes, des frappes ciblées. Saluons le courage de tous ces hommes et toutes ces femmes fortement mobilisés en soutien aux forces irakiennes !
Seulement voilà : cette supériorité dans les airs montre ses limites sur le terrain. De fait, si la coalition anti-Daech a évité le pire, on ne peut pas dire – soyons lucides – que la situation se soit améliorée.
Daech possède une capacité de résilience qui a sans doute été sous-estimée, et chacune de ses conquêtes lui ouvre une manne financière qui la régénère, ainsi qu’un réservoir humain. Les terroristes peuvent en effet s’appuyer aussi sur une partie de la population ; ils attirent par la terreur, mais nous savons qu’une partie des sunnites, éprouvés par la politique désastreuse de l’ancien premier ministre irakien al-Maliki, n’ont pas de mal à se laisser séduire : Mossoul s’est sentie plus libérée qu’envahie. Aussi le califat irako-syrien semble-t-il avoir de beaux jours devant lui, hélas !
La perte de Tikrit, en mars dernier, constitue la dernière défaite majeure de Daech. Depuis lors, l’organisation terroriste a conservé Falloujah à l’est, Mossoul au nord et, à l’ouest, elle s’est installée à Palmyre, en Syrie. Résultat : nous sommes au pied du mur.
Alors que la question des frappes en Syrie était restée taboue jusqu’à l’été, le Président de la République a annoncé la semaine dernière des vols de reconnaissance. Autant le dire : ils sont le préambule à des frappes. Autant dire aussi qu’un revirement s’est produit dans la position française.
Les sénateurs du groupe RDSE jugent eux aussi évident que la progression de Daech appelle un coup d’arrêt. Ils sont donc favorables à l’action entreprise, mais ils savent également que la réponse militaire ne suffira pas ; elle a d’ailleurs déjà montré ses limites.
Notre groupe s’est souvent exprimé sur les questions du Moyen-Orient et du Maghreb par la voix de notre ancien collègue Jean-Pierre Chevènement, dont je tiens à saluer la connaissance et la vision lucide, à laquelle nous souscrivons pleinement. Comme lui, nous considérons Daech comme un danger effroyable, qui ne saurait être combattu d’un seul côté d’une frontière devenue virtuelle. Nous sommes favorables à l’extension des frappes, considérant, comme lui, que cette intervention n’a de sens qu’avec un minimum de coordination avec le régime syrien, ce qui ne signifie en aucune façon que l’on excuserait les dérives et les atrocités de ce dernier.
À ce stade de mon propos, mes chers collègues, comment ne pas insister sur le désastre de la politique menée par les puissances occidentales au Moyen-Orient, et comment ne pas saluer une fois encore la sagesse dont fit preuve le président Jacques Chirac en 2003 ?
M. Bruno Sido. Très bien !
M. Jacques Mézard. Notre groupe ne s’est jamais fait remarquer par son attachement au gaullisme de la Ve République… (Sourires.) Reste qu’il est plus que temps de méditer sur la pertinence du principe de non-ingérence dans les affaires des autres États. Les peuples ont une histoire, et ces histoires sont diverses ; penser que nous allons imposer nos conceptions démocratiques par la force est une profonde erreur.
Certes, en Afghanistan, c’est l’URSS qui a commencé. Mais la suite n’est pas glorieuse, et voici que les talibans sont de nouveau à portée de Kaboul. Quel est le résultat de la guerre de 2003 en Irak ? La destruction totale d’un État clé dans la région, que l’Occident n’avait pas hésité à utiliser contre l’Iran ! Par ailleurs, si on ne peut défendre des régimes autoritaires souvent sanguinaires, était-il judicieux de détruire en Irak et en Syrie le parti Baas, seul parti laïc dans cette région du monde ?
Quant au printemps arabe, le sécateur de l’islamisme et du djihadisme en a fauché les bourgeons avant floraison. Fait-il aujourd’hui rêver un seul peuple ? Songeons à l’Égypte, où les mitrailleuses ont fait taire les manifestants pour asseoir le nouveau pouvoir, ou à la Tunisie, où, pour préserver un équilibre fragile, le concours de tous est aujourd’hui nécessaire, y compris d’un point de vue financier – il y a urgence, monsieur le ministre !
Comment pourrais-je oublier la Libye ? Kadhafi achevé dans un tunnel, ce pays, avec deux gouvernements et de multiples chefs de guerre, n’a désormais rien d’un État, et il est devenu un couloir de migration pour l’Afrique. Quand notre politique étrangère est inspirée par un philosophe doré, elle est fragile par définition…
Il est des interventions armées qui sont fondées en droit et que nous soutenons sans réserve, des interventions qui découlent de l’application de traités bilatéraux conclus par la France ou de votes de l’ONU : tel est le cas de nos engagements au Mali et en Centrafrique.
J’ajoute que le volet politique compte davantage que le volet militaire. En effet, il est évident que le règlement d’un conflit passe par une stratégie diplomatique claire associant tous les acteurs, dans la région et même au-delà ; une telle stratégie suppose un agenda et une concertation avec toutes les parties prenantes, hors Daech et assimilés.
Pour élaborer une pareille stratégie, mes chers collègues, il faut naturellement un minimum de suite dans les idées. De ce point de vue, je regrette que la position française ait évolué au gré des événements.
Vous nous dites, monsieur le ministre, que l’on pourrait frapper en territoire syrien, mais que ces éventuelles frappes seraient menées sans concertation avec le régime du président Bachar al-Assad. Vous nous dites aussi qu’il serait question non plus du départ de celui-ci, mais de sa « neutralisation » : qu’est-ce que cela signifie concrètement en langage diplomatique, et plus encore en langage militaire ? Ce nouvel objectif préfigure-t-il enfin une position plus réaliste ?
Ainsi que l’a conseillé Clausewitz, « il ne faut pas faire le premier pas sans envisager le dernier ». Or nous savons très bien que la stratégie de sortie devra intégrer les autorités de Damas, car tel est le vœu de la Russie et de l’Iran, qui sont des puissances incontournables dans la région – il suffit de se rappeler pourquoi Genève 1 et Genève 2 ont échoué.
Ensuite, soyons honnêtes concernant les résultats de la stratégie d’appui sur les islamistes modérés – deux mots assez difficiles à accoler. Force est de constater qu’elle n’a pas fonctionné, même si elle était plus souhaitable que le jeu dangereux joué par les États-Unis avec le Front al-Nosra, qui est tout simplement al-Qaïda. Qui aurait imaginé, à la fin de 2001, que les États-Unis aideraient al-Qaïda ?
Enfin, en éteignant un incendie ici, il ne faudrait pas en allumer un autre ailleurs. Je pense à la question kurde, qui rend nécessaire la pleine association de la Turquie à une stratégie de sortie.
Mes chers collègues, il me semble que la paix et une structuration politique sont possibles là-bas comme ailleurs. Le monde arabe a connu son siècle des Lumières : la Nahda, dont l’esprit a été perpétué par certains partis politiques arabes.
Monsieur le ministre, si des frappes militaires sont nécessaires pour stopper l’avancée de Daech, je répète que les membres du RDSE y sont favorables ; mais proposez-nous également un scénario de sortie qui serait mis en œuvre dans le cadre de l’ONU et qui rassemblerait toutes les parties prenantes, je dis bien : toutes. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour agir en ce sens, au service de la sécurité régionale et internationale ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur celles de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. David Rachline, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
M. David Rachline. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le chef des armées a décidé d’étendre au territoire de la Syrie l’engagement des forces françaises dans l’opération Chammal.
Je tiens tout d’abord à rappeler que, jusqu’à preuve du contraire, la Syrie est un État souverain. J’ai donc du mal à comprendre sur quoi repose la légalité de cette intervention, si les autorités légitimes de ce pays ne nous ont pas donné leur accord.
Par ailleurs, je rappelle à cet hémicycle que la précédente intervention de la France sur le territoire d’un État souverain sans l’accord des autorités légitimes de celui-ci, une opération menée sur les bons conseils d’un pseudo-philosophe à la chemise blanche, a aujourd’hui pour conséquences la déstabilisation de l’un des plus grands pays du Maghreb et l’implantation grandissante des islamistes de l’autre côté de la Méditerranée.
Vous avez donc décidé d’intervenir en Syrie. Aussi bien, monsieur le ministre, permettez-moi de vous poser quelques questions. Quel est votre véritable ennemi ? Quels sont vos objectifs ? Quelle est votre stratégie ? Quels sont vos alliés ? Quels sont vos moyens, après des décennies de diminution du budget alloué à nos armées ?
Si votre ennemi est Daech, alors, bien sûr, nous vous suivons. Si votre objectif est de garantir le retour de la paix dans cette région, une paix qui garantisse à toutes les personnes, quelle que soit leur religion – je pense particulièrement aux chrétiens d’Orient –, la possibilité de vivre sur leur sol, alors nous vous suivons encore. Malheureusement, pour ce qui est de la déclinaison de la stratégie pour atteindre les objectifs, nous ne vous suivons plus – si tant est que vous ayez réellement une stratégie, qui ne se résume pas à de grandes déclarations…
Votre idéologie vous pousse à limiter au strict minimum les liens avec la Russie, et, comme vos prédécesseurs de l’UMP, vous avez choisi de faire allégeance totale aux États-Unis. Où est l’indépendance de la France, où est le pays membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU ? En vérité, vous avez transformé notre pays en valet des États-Unis ! (Exclamations sur plusieurs travées.) Or dois-je vous rappeler que les États-Unis, depuis leur intervention de 2003, sans mandat international, sont largement responsables de la situation actuelle ?
À l’évidence, il faut intervenir contre Daech, et tout le monde sait bien que la seule intervention de nos avions de combat ne suffira pas, surtout contre un ennemi qui n’a aucun respect pour la vie humaine. Les bombardements contre Daech en Syrie sont une première étape à laquelle nous apportons notre soutien, à condition qu’ils soient menés en coordination avec les autorités légitimes de ce pays. Il ne s’agit pas de cautionner tel ou tel régime, en l’occurrence celui de M. al-Assad, dont je rappelle qu’il a été accueilli à Paris il n’y a pas si longtemps, et pas par mes amis politiques. Il s’agit d’appliquer le principe de réalité. En Syrie, Bachar al-Assad n’est-il pas le seul sur lequel on puisse s’appuyer pour vaincre Daech ? Évidemment si !
Pour éradiquer Daech, il faudra également que des troupes combattent maison par maison pour mettre hors d’état de nuire les combattants de l’État islamique. À cet égard, la Russie semble vouloir assumer une part de la responsabilité, en engageant des moyens importants pour anéantir cet adversaire. Plutôt que de critiquer à longueur de temps M. Poutine pour de vagues motifs idéologiques, réfléchissons plutôt à la manière dont nous pourrions l’aider !
Ce soutien peut prendre la forme d’un travail diplomatique visant à associer à cette action d’autres pays du Moyen-Orient qui, contrairement à nous, ont toujours montré une détermination sans faille dans leur lutte contre les islamistes. Je pense notamment à la Jordanie, mais aussi aux pays assez nombreux qui sont encore ambigus dans ce combat, et sur lesquels il convient de faire pression. Que les choses soient claires : ceux qui ne sont pas contre Daech sont de facto en sa faveur !
M. le président. Veuillez conclure.
M. David Rachline. Il est plus que temps que la France retrouve son rang, son indépendance et qu’elle propose au reste du monde une vision à long terme pour cette région, dont les difficultés influent fortement sur notre vieux continent. (Murmures sur diverses travées.)
Aujourd’hui, notre ennemi est l’État islamique, et notre seule stratégie pour gagner cette guerre passe par une alliance avec la Russie et un soutien au régime syrien en place.
M. le président. Veuillez maintenant conclure !
M. David Rachline. Nous ne pouvons attendre plus longtemps pour aller défendre l’un des berceaux des civilisations humaines contre la barbarie islamiste !
M. le président. La parole est à M. François Zocchetto, pour le groupe UDI-UC.
M. François Zocchetto. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut regarder la réalité en face et la décrire clairement : Daech est aujourd’hui la menace numéro un pour la sécurité du monde, en particulier pour celle des Français. Depuis l’élimination du nazisme, nous n’avons probablement jamais eu à relever un tel défi.
Je ne reviens pas sur les exactions commises ; chaque jour, dans une spirale sans fin, Daech accumule les crimes contre l’humanité avec l’arrogance des impunis. Personne, désormais, ne pourra dire : je ne savais pas.
L’urgence et la gravité de la situation nous imposent d’agir. L’urgence est d’abord humanitaire, car 11 millions de personnes sont déplacées et l’on dénombre plus de 250 000 victimes. Elle est ensuite migratoire ; je pense aux 4 millions de réfugiés syriens. Nous ne pouvons pas laisser le peuple syrien devenir un peuple de réfugiés, ni le laisser mourir sur son propre sol ! L’urgence est aussi sécuritaire, car nous savons tous que notre sécurité se joue à cinq heures d’avion de Paris.
Enfin, il y a un consensus national sur la nécessité de réduire militairement et définitivement la sinistre troupe de Daech ! En réalité, ce qui fait débat depuis plus d’un an, c’est la méthode pour vaincre, c’est-à-dire les modalités d’une intervention armée contre Daech.
Vous pourrez me répondre, monsieur le ministre, que nous intervenons déjà dans le cadre de l’opération Chammal ; mais après plusieurs mois de frappes en Irak, quel est le bilan de cette opération, et, plus largement, de la coalition ? La progression de Daech est à peine endiguée ; l’État islamique continue de prospérer sur le territoire qu’il occupe, et même s’organise.
Dans ce contexte, une approche exclusivement aérienne, même élargie à la Syrie, est insuffisante pour venir à bout de l’ennemi. Une intervention aérienne, fût-elle massive, ne peut venir qu’en soutien à des interventions au sol. Là est le cœur du problème qui se pose à nous cet après-midi : il nous faut décider qui peut intervenir efficacement au sol. La question est complexe, tant d’un point de vue politique que d’un point de vue opérationnel. Jean-Pierre Vial et moi-même l’avions déjà soulevée voilà six mois, ainsi que deux collègues députés, lors d’un déplacement à Damas qui avait fait polémique.
Sur le plan politique, une intervention au sol ne peut reposer que sur la plus large coalition possible, car il faut éviter qu’une opération terrestre ne passe pour une action unilatérale des Occidentaux en Orient. Nous ne pouvons pas non plus prendre le risque d’aviver la rivalité entre les sunnites et les chiites. Enfin, nous devons nous garder de tomber dans l’écueil ethnique en mettant en avant les Kurdes contre les Arabes, les Perses ou les Turcs.
Sur le plan opérationnel, l’actuelle coalition évite en apparence les obstacles. Toutefois, considérons lucidement la situation et analysons-la : la France n’a pas les moyens d’intervenir. Quand bien même nous les aurions, je ne recommanderais pas, bien évidemment, une intervention des soldats français sur le sol syrien.
L’Union européenne a pour sa part fait la triste démonstration de son inexistence sur ce dossier. Quant aux États-Unis, il semble bien qu’il n’y ait rien à espérer de leur côté au cours des deux prochaines années. Nous devons donc compter sur les acteurs régionaux pour intervenir contre Daech.
Les Kurdes – je pense notamment aux peshmergas – sont en première ligne, puisqu’ils sont les victimes directes du cancer terroriste que constitue Daech. Pourtant, après plusieurs années de conflit et d’engagement sur le terrain, ils sont exsangues et peinent à tenir leurs positions, et ce d’autant plus que la Turquie, qui avait fait semblant d’adopter une position attentiste depuis le début de cette crise, semble avoir profité de son récent engagement pour intervenir dans un même mouvement contre Daech et contre les Kurdes. Le jeu trouble de la Turquie, qui oscille ainsi entre attentisme et opportunisme, ne permet donc pas de la désigner d’emblée comme un partenaire de confiance pour une future intervention au sol.
Les monarchies pétrolières de la péninsule arabique, en particulier l’Arabie Saoudite et le Qatar, se sont jusqu’à présent comportées de manière tellement trouble vis-à-vis de Daech qu’elles ne peuvent, au mieux, que participer au volet politique de cette guerre.
Israël, dont personne ne parle aujourd’hui, demeure de son côté particulièrement discret sur le sujet.
L’Égypte est une puissance régionale disposant d’une longue tradition militaire. Elle a de ce fait vocation à prendre sa part dans la résolution de cette guerre.
Compte tenu des puissances régionales, il existe trois options, pouvant probablement se compléter utilement.
La Russie est engagée de longue date en Syrie et les échanges entre les peuples syrien et russe sont nombreux, pour des raisons historiques. La Russie a donc une parfaite connaissance du terrain et doit être associée au processus de résolution du conflit.
L’Iran, puissance importante dans la région, est plus que jamais qualifié pour contribuer à la résolution de la guerre sur le terrain.
Enfin, la dernière option, déjà évoquée dans cet hémicycle, nous conduit tout naturellement à regarder ce qui se passe sur le sol syrien. Depuis quelques jours, j’ai bien compris que nous avions enfin réévalué notre position concernant l’État syrien. Même si personne n’en parle ouvertement et si certaines précautions de langage rendent la position française difficile à décrypter, les initiés auront bien saisi que la position actuelle de la France est très différente de celle qui était la sienne voilà encore quelques mois.
Dans cette guerre contre Daech, la Syrie n’est pas notre ennemie. Son armée ne l’est pas non plus et son peuple encore moins ! Nous ne pouvons certes pas éluder la question du coût humain exorbitant de la guerre civile syrienne, mais force est de constater que l’Armée syrienne libre a été réduite à néant et qu’elle n’est plus en capacité d’être un acteur politique dans la région, et encore moins un acteur militaire.
Je ne reviendrai pas sur la déconvenue tragique que nous avons connue : les forces armées que nous avons formées ou aidé à former se sont alliées à Daech. La crise syrienne ayant désormais changé de nature, nous devons nous y adapter.
D’emblée, je tiens à lever un doute : il s’agit bien sûr de soutenir non pas la personne même de Bachar al-Assad, mais l’État syrien, ses structures, son administration et son armée. En Irak, les Américains ont commis l’erreur de faire table rase de l’État : on en voit le résultat aujourd’hui ! Nous ne sommes pas non plus au-dessus de tout soupçon concernant la Libye – c’est le moins que l’on puisse dire. Ne commettons donc pas les mêmes erreurs une nouvelle fois !
À défaut de pouvoir agir davantage d’un point de vue strictement militaire, la France a le devoir impérieux de prendre de façon urgente l’initiative de constituer, sous mandat des Nations unies, une coalition rassemblant tous les ennemis de Daech, laquelle sera destinée – il est inutile de le nier – à intervenir au sol.
Telle est la situation : il faut éliminer l’ennemi – Daech –, intervenir au sol pour atteindre cet objectif, et soutenir les acteurs locaux. Dès lors que l’on a ouvert les yeux, il est urgent de faire davantage et de s’engager vraiment ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, monsieur le ministre des affaires étrangères et du développement international, mes chers collègues, nous sommes réunis cet après-midi parce qu’il y a cinq ans, la majorité de l’époque avait souhaité modifier l’article 35 de la Constitution selon lequel, désormais, « le Gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l’étranger, au plus tard trois jours après le début de l’intervention. »
L’article 35 prévoit également que le Parlement votera l’autorisation de prolongation de cette intervention à l’issue d’une période de quatre mois, comme il l’a fait en janvier dernier, lorsque le Gouvernement lui a demandé de prolonger l’intervention française en Irak, première étape du processus qui nous occupe.
Le Parlement français, et tout particulièrement le Sénat, est donc mobilisé pour réfléchir durant quatre mois, au terme desquels nous serons de nouveau appelés à voter. Pour ma part, je suis profondément convaincu que le conflit ne sera pas encore terminé, hélas ! J’espère toutefois que la France aura alors clarifié sa position et qu’elle sera fermement engagée.
Nous devons une telle clarification à tous ceux qui sont concernés par ce conflit : nous le devons à nos soldats, tout d’abord, qui doivent savoir ce que le pays attend d’eux, aux victimes, ensuite, et à tous ceux au Proche-Orient, enfin, pour qui la France est une référence, un partenaire attentif sur lequel on peut compter.
Monsieur le ministre, mon cher Laurent, nous avons donc aujourd’hui le devoir de vous interroger sur cette guerre civile, devenue un conflit régional. À l’ère de la mondialisation, ce conflit est un défi à l’ordre mondial que souhaitent les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. À cet égard, nous autres, Français, nous avons à la fois la fierté et le devoir d’être à la hauteur de notre statut de membre permanent !
Cette guerre, je le disais, est d’abord une guerre civile. Nous connaissons bien la Syrie. Je ne m’attarderai pas sur ce sujet, mais, depuis l’indépendance effective de la Syrie en 1946, qui a fait suite à la déclaration du général Catroux et à la mise en place des institutions en 1943, la Syrie n’a jamais connu de gouvernance heureuse et harmonieuse. Ce pays de culture ancienne et de vieille tradition n’a jamais su se doter d’une véritable vie publique.
Certains orateurs ont évoqué avec raison l’héritage de Michel Aflak et de Bitar, les deux fondateurs du pays, l’un chrétien, l’autre sunnite. Dans les faits, ceux-ci ont été évincés par un pouvoir militaire auquel la France ne doit rien.
N’oublions pas les agissements du pouvoir de Damas contre notre pays, responsable, depuis 1971, de l’assassinat de l’ambassadeur français Louis Delamare, des 58 chasseurs parachutistes du Drakkar et de Rafik Hariri, qui était une véritable chance pour le Liban, ce pays auquel nous sommes tant liés. Nous ne devons donc rien à Damas.
Force est cependant de constater que ce régime minoritaire est également le régime des minorités et que ces minorités ont, semble-t-il, fait le choix de ne pas l’abandonner, contrairement à ce qui s’est passé pour d’autres pouvoirs autoritaires lors du printemps arabe.
Notre collègue François Zocchetto a parlé en des termes vrais et profondément passionnés – comment en effet rester indifférent ? – des opposants au régime. Daech trahit l’islam. Sa violence effective rappelle le massacre de Hama en 1982, dont furent victimes les sunnites.
Malheureusement, cette guerre civile a des racines profondes : les combattants envisagent de s’exclure et non de se parler. La Ligue arabe a échoué, tout comme les conférences de Genève 1 et de Genève 2.
Pour autant, faut-il ne rien faire ? La réponse est évidemment non. Monsieur le ministre, vous êtes à la tête d’une diplomatie qui connaît bien la région. Il existe une tradition française au Proche-Orient, que les présidents successifs ont honorée. Vous pouvez la poursuivre en rappelant qu’il s’agit d’un conflit régional et que nous devons prendre en compte le rôle des voisins de la Syrie, lesquels profitent de cette guerre civile pour avancer leurs pions.
Les Turcs – qui sont sunnites, mais pas arabes – ne veulent pas d’un État kurde, que ce soit en Irak ou en Syrie. Ils craignent en effet qu’un tel État s’établisse un jour aussi chez eux.
Si vous avez eu raison de souligner l’évolution favorable de l’Iran chiite, à laquelle la France a contribué, il faut toutefois rappeler que l’Iran protège l’Irak, à majorité relative chiite, et qu’il s’efforce, au travers de la Syrie, d’établir un lien avec le Liban pour compter dans la région et bloquer l’alliance sunnite que l’Arabie Saoudite et les monarchies pétrolières du Golfe souhaitent établir.
Chacun des acteurs a donc sa part de responsabilité dans l’existence de Daech : les uns, parce qu’ils ont fermé les yeux sur les ventes de pétrole qui financent l’État islamique ; les autres, parce qu’ils ont laissé circuler de l’argent. C’est ainsi que le conflit est devenu régional.
Dans cette affaire, un acteur mondial se comporte d’ailleurs comme un acteur régional : il s’agit de la Russie. Il convient de comprendre ce pays, de lui parler et, je l’espère sincèrement, de le convaincre. Si la Russie se comporte ainsi, c’est parce qu’elle se veut – son choix n’a après tout rien de déshonorant – le troisième foyer de la chrétienté, après Rome et Byzance, et le protecteur des minorités chrétiennes de l’Orient, lesquelles – je vous le rappelle – sont largement antérieures à l’islam. L’Union soviétique avait joué un rôle tout à fait différent, mais qui revenait au même : le but était d’être présent en Méditerranée, avec l’appui syrien.
En vérité, la solidarité et la protection qu’affiche la Russie, et qui conviennent parfaitement à M. Poutine en termes de politique intérieure, visent à ne pas laisser se développer l’islamisme dans les républiques démembrées de l’ancienne Union soviétique à majorité musulmane et sunnite. Cet islamisme est en effet déjà à l’origine de l’afflux de très nombreux combattants en Syrie.
La Russie, au même titre que la Turquie, l’Iran, l’Arabie Saoudite ou Israël, est donc une puissance régionale et se comporte donc comme telle. Néanmoins, elle est aussi un acteur mondial, membre permanent du Conseil de sécurité – c’est là votre responsabilité, monsieur le ministre ! –, qui a souvent utilisé son droit de veto pour paralyser l’avènement d’un ordre mondial susceptible d’assurer la paix, ordre mondial auquel nous aspirons tous sur l’ensemble des travées du Sénat.
Nous avons participé, nous participons et nous participerons encore demain aux opérations des Nations unies. Je pense profondément que nous avons le devoir de respecter les formes, parce que la démocratie, même mondiale, résulte d’abord du formalisme, du respect de la parole et des responsabilités des uns et des autres.
À ce stade de mon intervention, monsieur le ministre, je vous poserai quatre questions très simples.
La première est d’ordre militaire. Survoler la Syrie n’est pas anodin et représente un danger. Dès lors, comment intervenir ? Il est nécessaire de guider les frappes, et pas seulement au moyen de radars et de satellites. Jusqu’où intervenir ? Qu’aurions-nous fait face à la progression des troupes de Daech vers Palmyre si nous avions déjà lancé cette opération ? Monsieur le ministre, vous avez évoqué à plusieurs reprises, et à juste titre, l’article 51 de la Charte des Nations unies, qui permet à la France de se défendre face au terrorisme. Une surveillance aérienne permettra-t-elle d’empêcher une progression qui déstabiliserait la région ? Je pense que vous aurez à cœur, monsieur le ministre, de répondre à cette question.
Ma deuxième question porte sur le volet humanitaire du conflit, dont nous débattrons demain. Comme le pense mon ami Claude Malhuret, membre durant quinze ans de Médecins sans frontières, l’Europe ne devrait-elle pas aller au-devant des réfugiés syriens, que ce soit en Turquie, où se trouve 1,8 million de réfugiés, au Liban, pays totalement déstabilisé par l’afflux de 1,7 million de réfugiés, ou encore en Jordanie, où l’on dénombre un million de réfugiés ? C’est au sein même des camps de réfugiés que l’Europe doit être présente et non pas à ses frontières, où elle se comporte de manière à la fois incertaine, équivoque et baroque, pour ne pas dire honteuse parfois.
Ma troisième question porte sur un volet rarement évoqué, monsieur le ministre, même si vous l’avez mentionné, à savoir la pénalisation du terrorisme et le rôle de la Cour pénale internationale. Avez-vous l’intention de présenter les combattants français ou résidents français de retour dans notre pays à la Cour pénale internationale pour examen ? Si nous avions la certitude de bénéficier d’un appui international, peut-être les attitudes changeraient-elles ?
Ma quatrième et dernière question est la plus importante : elle porte sur la transition. Nous avons bien compris en vous écoutant que la situation était différente : Damas existe bel et bien et le président syrien représente un obstacle. Les diplomates savent tout régler dès lors que la volonté existe. Force est de reconnaître que l’Iran, revenu à la raison après la signature de l’accord sur le nucléaire, et la Russie sont les deux soutiens du régime de Damas.
Il faut demander à ces pays non pas de ne plus soutenir le régime de Damas mais d’envisager le « pas d’après ». Lorsque l’on fait le premier pas, il faut savoir envisager le dernier. La situation aujourd’hui, que ce soit pour les Russes ou pour les Iraniens, est une impasse. Ce serait l’honneur de la diplomatie française, et j’ai la certitude qu’elle en a la capacité, d’en faire la démonstration à ces deux acteurs, sans l’engagement desquels il sera impossible d’obtenir un résultat dans ce malheureux pays.
Certes, l’actuel gouvernement syrien est minoritaire et absolument discutable, mais Damas a été depuis 45 ans un manipulateur talentueux, se comportant avec brutalité et autoritarisme envers sa population - je pense notamment au massacre de Hama - tout en se faisant accepter par ceux-là mêmes qui auraient eu toutes les raisons de le refuser.
Après le septembre noir de 1970, le père de Bachar al-Assad, alors au pouvoir, est devenu en quelque sorte le gardien des Palestiniens. On avait la certitude qu’il les maintiendrait contenus dans leurs camps. Il a su rallier la coalition de 1990, pour des raisons purement opportunistes. De mémoire, ce sont les chrétiens du Liban qui ont sollicité son appui, avant de s’en mordre les doigts.
Ce pays existe dans l’espace local, mais il n’existera pas sans le soutien permanent de l’Iran et de la Russie. C’est la raison pour laquelle notre diplomatie doit tourner ses efforts vers ces deux pays.
Les États-Unis semblent actuellement indifférents à la situation, mais le Royaume-Uni nous suit. Au nom de l’Europe, nous pouvons apporter une double réponse à la situation en Syrie : par un engagement militaire d’une part, sur le fondement d’une décision du Conseil de sécurité des Nations unies et dans le cadre une coalition à dominante régionale, comme cela a été rappelé avec bon sens ; par un engagement humanitaire sur place d’autre part, car le Proche-Orient ne doit pas être vidé de ses chrétiens, qui font complètement partie de son histoire. Ce serait pour nous, après le traité des Capitulations de 1536, un déshonneur que de trahir une tradition dans laquelle la France n’a jamais été l’ennemi ni du monde arabe ni du monde islamique.
Nous comptons donc sur vous, monsieur le ministre, durant ces quatre mois de négociations et d’opérations militaires – dont nous souhaitons connaître les limites –, pour parvenir à un résultat. Nous aurions alors le sentiment que, grâce à l’article 35 de la Constitution, l’exécutif et le législatif auront su faire vivre l’unité nationale, ce qui réhabiliterait la politique dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comment peut-on faire la guerre à ceux qui se nourrissent de la guerre ?
La guerre en Irak, dont Jacques Chirac nous avait protégés, est l’une des origines du terrorisme qui nous menace aujourd’hui. Au vue de l’histoire récente, il apparaît clairement que l’effondrement d’un État donne naissance au terrorisme.
Personne ici ne conteste aujourd’hui la nécessité de frapper Daech dans sa profondeur stratégique, dans ses centres névralgiques, au cœur même de son centre de gravité, c’est-à-dire en territoire syrien. La situation d’entre-deux, de « ni-ni », dans laquelle nous étions placés n’avait pas de sens d’un point de vue militaire. Le Président de la République propose aujourd’hui d’en sortir, nous en prenons acte.
Cette inflexion politique a un nom : l’émotion. Nous l’avons tous ressentie à la vue du corps d’un petit enfant de trois ans gisant sur une plage turque. Sa photo a servi de déclencheur, car ce petit garçon ressemblait trop à nos enfants. Il devenait alors nécessaire d’agir.
Étendre l’opération Chammal à la Syrie était au fond la décision la plus visible, la moins coûteuse et la plus immédiate. Toutefois, comme chacun l’a souligné, l’émotion ne doit pas fixer le cap de la diplomatie française.
Ce changement de pied est-il justifié ? Daech est sans aucun doute aujourd’hui l’ennemi principal, voire l’ennemi absolu. Cette hydre djihadiste sème chaos et terreur au Moyen-Orient, essaime en Arabie Saoudite et au Yémen, franchise les terroristes du Sahel, de la Libye et du Sinaï. Daech s’enrichit partout grâce au pétrole, au racket fiscal et au commerce des antiquités. Je n’évoquerai pas la déflagration possible et redoutée que pourrait provoquer la rencontre entre Daech, s’il poursuivait son expansion, et les Palestiniens, en particulier dans la bande de Gaza.
En pratiquant le terrorisme, Daech a fait entrer la guerre au cœur même de nos sociétés. La lutte contre Daech est donc sans aucun doute nécessaire, même si, sur le plan du droit international, nous ne pouvons pas nous appuyer sur une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies pour intervenir en Syrie ou sur l’appel à l’aide d’un gouvernement, dans le cadre de l’article 51 de la Charte des Nations unies.
Nos nouvelles initiatives militaires doivent également tenir compte de la « surchauffe opérationnelle » – je pèse mes mots –, liée à la dispersion des théâtres et à la diversité des opérations extérieures. Je rappelle ainsi que plus de 10 000 de nos militaires sont engagés dans ces opérations.
En l’occurrence, l’intervention en Syrie sera une extension de l’opération Chammal, c’est-à-dire un dispositif aérien accompagné de l’appui du groupe aéronaval. Ce dispositif sera financé sur le budget des opérations extérieures, lequel est chaque année supérieur à un milliard d’euros, contre les 450 millions initialement prévus. Il est donc de notre responsabilité de prévoir les moyens financiers correspondants à nos objectifs militaires. À cet égard, on mesure la pertinence des clauses de sauvegarde insérées par le Sénat dans la loi de programmation militaire !
L’intervention militaire sera-t-elle efficace ? D’un point de vue militaire, l’imbroglio épouvantable sur le terrain ne permettra sans doute que des frappes très ciblées. En un an, seules 200 frappes françaises ont eu lieu en Irak.
Chacun mesure avec un certain effarement la capacité de résilience de Daech, qui ne cesse de renaître malgré les coups qui lui sont portés. C’est ainsi que 10 000 combattants étrangers, venus de 80 pays, dont la France, sont venus grossir ses rangs en un an. Il nous faut donc bien mesurer les conséquences d’un engagement militaire en Syrie.
D’un point de vue opérationnel, notre action en Syrie permettra vraisemblablement de contenir l’avancée de Daech, mais non de renverser la situation, car la guerre se gagne au sol. Pour autant, je souscris pleinement à la décision de ne pas envoyer de troupes françaises sur le terrain. En effet, quels seraient nos points d’appui ? Les combattants kurdes, les soldats de l’armée irakienne, les opposants syriens modérés ?
Sachons tirer les leçons de l’intervention américaine en Irak en 2003. L’histoire a montré à quel point la décision de la France de s’y opposer était légitime. Ne tombons pas dans le piège qui nous est tendu visant à nous enfermer dans une guerre entre les musulmans et les prétendus « croisés » que nous serions. La situation appelle nécessairement une solution politique, comme cela a été affirmé avec clarté.
Nous devons bien entendu dissocier les terroristes des populations. En Irak, la mainmise chiite a provoqué des ressentiments qui nous privent du soutien des tribus sunnites et des cadres de l’armée baasiste. Nous apprécions l’action du Gouvernement, qui tente actuellement d’obtenir du gouvernement irakien qu’il s’ouvre à d’autres composantes.
Je partage bien entendu totalement l’analyse selon laquelle le régime de Bachar al-Assad est responsable en Syrie de la mort de 200 000 personnes. La culpabilité de Bachar est géante. C’est précisément cette analyse qui fonde depuis des mois l’action du Gouvernement.
Monsieur le ministre, nous pensons tous que notre politique étrangère doit être ambitieuse et qu’il nous faut aujourd’hui mettre en œuvre une politique diplomatique allant au-delà du « ni Bachar al-Assad ni les islamistes ». Il nous faut surmonter l’impuissance résultant de la situation d’équilibre trop longtemps maintenue et refonder notre politique diplomatique en tenant compte de l’axe Syrie-Russie-Iran qui se dessine aujourd’hui.
Nous observons une forme de glissement dans le discours de nos responsables, et je m’en réjouis, en particulier concernant le moment du départ de Bachar al-Assad ou les éléments du régime susceptibles d’être conservés. Nous constatons aussi une évolution notable et positive du discours sur le rôle de la Russie, qui d’évidence accroît son engagement en Syrie. En effet, la bonne application des accords de Minsk – la stratégie Normandie – permettra peut-être de lever les sanctions contre la Russie, ce qui serait utile de mon point de vue.
L’accord conclu avec l’Iran permet aussi d’envisager de mettre cet acteur majeur – pour ne pas dire principal – de la crise syrienne à la table des négociations, même si c’est difficile, compte tenu notamment du jeu joué par l’Arabie Saoudite.
Monsieur le ministre, travaillons à créer des espaces et œuvrons sans désemparer à un règlement politique de la crise. Il est urgent d’inscrire la diplomatie française dans ce jeu. Votre rôle est donc majeur. La politique étrangère doit continuer à guider notre politique de défense.
Conservons donc notre indépendance, laquelle est l’essence même de notre politique étrangère, et misons sur le génie de celle-ci, qui est de parler à tous et sans relâche.
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission. Nous ne pouvons pas rester dans une situation où les relations avec les États-Unis pourraient être ambiguës, où nos relations avec la Russie seraient fermées et nos relations avec l’Iran lentes.
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission. La France doit retrouver sa capacité de parler à tous, par la force de ses convictions, mais aussi par l’indépendance de sa stratégie. Alors seulement notre action militaire, par notre diplomatie, trouvera son sens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Fabius, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie l’ensemble des orateurs de leur intervention. Bien sûr, comme le veut la tradition, et également par courtoisie, je répondrai à chacun d’entre eux, très brièvement cependant, ce dont je vous prie de me pardonner.
À M. Lorgeoux, j’adresse mes remerciements pour son soutien au Gouvernement, pour l’analyse très pertinente qu’il a faite de ce que représente Daech, pour son insistance – à juste raison – sur la notion de légitime défense, car c’est dans ce cadre que nous intervenons, et pour avoir souligné la nécessité de rechercher une solution politique, notamment avec l’Iran.
Je reviendrai sur ce point dans ma réponse aux autres orateurs.
Je remercie également Mme Aïchi, même si elle a eu recours à quelques formules qui ne recueillent pas mon soutien enthousiaste et spontané. (Sourires.) Ainsi, je ne souscris pas totalement à l’idée selon laquelle nous n’aurions pas de « vision globale ». Vous avez des informations, madame la sénatrice, nous aussi ! Vous avez vos idées, nous aussi !
Loin de moi l’idée de tenir des propos désagréables, mais j’ai parfois eu le sentiment au cours de ce débat que certains des orateurs considéraient que la politique internationale de la France serait plus facile à mener s’il n’y avait que la France ! (Sourires.) C’est exact, mais telle n’est pas la réalité ! Jaurès a dit des choses qui restent pertinentes sur l’idéal et le réel…
Vous avez insisté, madame Aïchi, avec raison, sur le rôle de l’Iran et dressé une liste de questions tout à fait pertinentes. Ce sont précisément ces questions auxquelles nous essayons de répondre. J’ai eu le sentiment – à moins que ce ne soit réellement le sens des propos que vous avez tenus – que vous souhaitiez que nous soutenions M. Bachar al-Assad. J’y reviendrai.
L’analyse qu’a faite M. Laurent n’est pas nouvelle en ce qui le concerne. Il a néanmoins, je pense, oublié un point. Dans son analyse, il a fait comme si notre objectif était de frapper Daech, de frapper Bachar al-Assad. Mais, cher ami, revenons au texte, qui n’est pas un prétexte : c’est la sécurité de la France qui est en cause. Si le Président de la République a décidé d’envoyer des avions, ce n’est pas, comme on l’a dit, un revirement de stratégie – j’accepte tout à fait le mot « adaptation », qui me paraît légitime – : notre perspective n’a pas changé, mais, compte tenu de l’évolution des circonstances, il serait fou de ne pas nous adapter.
Mesdames, messieurs les sénateurs, quand nous avons la preuve que des attentats qui visent le sol français sont conçus et organisés depuis le sol de la Syrie par Daech, alors le rôle du chef de l’État, notre rôle à tous, c’est de décider des opérations nécessaires. Celles-ci, bien sûr, doivent être précédées d’actions de renseignement. Vous connaissez tout cela par cœur.
Cher Pierre Laurent, vous avez beaucoup insisté sur les solutions politiques. J’y reviendrai, mais laissez-moi vous dire que c’est exactement ce que nous recherchons. Que croyez-vous que nous faisons, le Président de la République, le ministre de la défense et moi-même, lorsque – je parle pour moi – nous rencontrons les Iraniens ? Quel est le premier ministre des affaires étrangères à s’être rendu en Iran – non pas pour faire du commerce, celui-ci viendra en son temps – ? C’est le ministre français ! Qui a, comme tout le monde le reconnaît, donné le la, son imprimatur à l’accord sur le nucléaire iranien ? C’est la France ! Que faisais-je samedi dernier à Berlin sinon discuter de la Syrie avec le ministre Sergueï Lavrov ? Que faisons-nous lorsque, seuls avec les Allemands, nous discutons avec les Ukrainiens et les Russes sinon édifier d’indispensables passerelles ?
Vous avez tout à fait raison de poser des questions, mais il ne faut pas donner de fausses impressions sur ce qu’essaie de bâtir la diplomatie française. Simplement, ce n’est pas par l’opération du Saint-Esprit que l’Iran et la Russie, en particulier, mais aussi M. Bachar al-Assad, les populations arabes, la Turquie et les autres se rangeront à nos arguments, fussent-ils excellents.
Monsieur Laurent, vous avez aussi insisté, avec raison, sur la Palestine. Voilà quelques jours, nous avons reçu le gouvernement palestinien. Mahmoud Abbas sera à Paris dans quelques jours. Vous connaissez bien les responsables palestiniens et je ne veux pas trahir leur pensée, mais ils disent, y compris publiquement, que seul un pays se préoccupe de la situation en Palestine et du conflit israélo-palestinien : le nôtre. Ne laissons donc pas entendre le contraire.
M. Mézard, au début de son propos, a fait une analyse forte. Il a ensuite appelé à une réponse politique, et je ne peux que lui donner raison. Il a rappelé à juste titre dans quelles conditions le président Chirac, avec raison, avait refusé d’engager la France. Pour rendre justice à l’histoire, je rappelle que nos formations, à l’époque dans l’opposition, avaient soutenu immédiatement la position de Jacques Chirac – nous l’avions même peut-être précédée, mais nous n’étions pas au pouvoir. Quand il dit qu’il faut avoir de la suite dans les idées, je suis tout à fait d’accord avec lui. Nous nous y efforçons.
M. Rachline est intervenu brièvement, ainsi le veut le règlement du Sénat. Chaque fois que je l’entends, ses révélations mettent en défaut ma propre perspicacité.
Vous avez dit que nous étions les « valets des États-Unis » ; à vrai dire, je ne l’avais pas remarqué, eux non plus d’ailleurs. En revanche, j’ai bien compris que les deux personnes que vous soutenez sont le président Poutine et M. Bachar al-Assad. Je l’avais déjà remarqué.
Vous avez commencé votre intervention – aussi courte soit-elle – en disant que nous n’avions pas le droit d’intervenir. Mais, cher monsieur, nous intervenons au nom de la légitime défense pour défendre la sécurité des Français : c’est l’article 51 de la Charte des Nations unies. Et je ne peux pas ne pas être surpris – cela me donne même à réfléchir – lorsque vous prétendez que défendre la sécurité des Français ne nous donne pas le droit d’intervenir. Si, cela nous en donne le droit, c’est même un devoir.
M. Zocchetto a bien sûr abordé plusieurs sujets, comme il le fait chaque fois, avec talent. Il a en particulier soulevé, comme M. Longuet, qui a pris du recul et de la hauteur sur le plan historique, la question de l’Iran et de la Russie. Traitons donc de ce sujet majeur.
Nous discutons avec l’Iran et avec la Russie, mais discuter ne signifie pas nécessairement adopter les positions de l’autre. Encore faut-il les entendre.
Que me dit mon collègue M. Lavrov lorsque je m’entretiens avec lui ? Il me dit – et j’essaie de ne pas trahir sa pensée – : « Il ne faut pas que ce soit le chaos en Syrie. » Je lui réponds ceci : « Je suis bien d’accord, mais si ce n’est pas le chaos aujourd’hui, qu’est-ce qu’un chaos ? »
Une fois que nous avons eu ces échanges, toujours les mêmes, nous essayons d’avancer. La distinction très intéressante qu’a faite, me semble-t-il, M. Longuet, nous la reprenons à notre compte. Nous n’avons – c’est un euphémisme – aucune sympathie pour M. Bachar al-Assad, dont la politique, il faut le rappeler, est à l’origine du départ de 80 % de ceux qui ont quitté leur pays.
L’un d’entre vous, avec talent et émotion, a évoqué le petit garçon syrien échoué sur les côtes turques. Je rappelle, comme vous le savez certainement, que le père de ce petit garçon, avant d’être attaqué à Kobané, avait séjourné dans les geôles de M. Bachar al-Assad, où il avait été torturé, comme je l’ai lu. C’est donc le comportement de M. Bachar al-Assad qui a déclenché la fuite de cette famille ayant pris une telle importance.
Je ne dis pas que des évolutions ne sont pas possibles – d’ailleurs, vous les avez senties –, mais au-delà de l’argument moral, réel – nous sommes la France –, il y a un argument d’efficacité que je vous demande de prendre en considération. Si nous devions, comme le soutiennent les Russes, accepter, même si nous ne sommes pas mariés avec lui, de compter avec M. Bachar al-Assad et consulter les Syriens en organisant une élection – les Syriens ont déjà voté, dans les conditions que l’on sait –, alors nous nous interdirions ce que vous souhaitez tous, à savoir une Syrie unie respectant les minorités, les majorités, dotée d’un État fort dans un territoire en paix.
Ce n’est pas uniquement un argument moral que je vous demande de prendre en compte, c’est aussi un argument d’efficacité.
Lorsque je m’entretiens avec mon collègue Lavrov, il me dit qu’il ne faut pas que l’État s’écroule. Je suis tout à fait d’accord, car, le cas échéant, c’est la situation irakienne qui se reproduirait. Ensuite, nous discutons.
Lors des conférences de Genève 1 et de Genève 2, il a été décidé de mettre en place un gouvernement de transition doté de tous les pouvoirs exécutifs – c’est le texte. S’il est doté de tous les pouvoirs exécutifs, cela signifie que, d’une manière ou d’une autre, M. Bachar al-Assad se délestera de ses pouvoirs. Nous n’en sommes pas là et les discussions achoppent pour le moment.
Comme vous le savez, du matériel – et même probablement un peu plus que du matériel – a été envoyé à Tartous et à Lattaquié. J’ai interrogé mon collègue Lavrov à ce sujet. Cela a été dit par certains orateurs, il s’agirait de défendre les intérêts russes à Tartous. Mais, mesdames, messieurs les sénateurs, il est hors de question de dénier aux Russes le droit de défendre leurs intérêts en Syrie. Personne n’imagine un instant que nous allons les bouter hors de Tartous. Ces intérêts ne sont d’ailleurs pas aussi considérables qu’on le pense ; c’est une base à partir de laquelle les Russes observent ce qui se passe dans l’ensemble de la région. D’ailleurs, chaque grand pays dispose de ce type de base. Il n’est absolument pas question de remettre en cause la présence russe classique en Syrie.
Mon homologue russe m’affirme que, finalement, selon son gouvernement, toute solution passe par Bachar al-Assad et qu’il faut donc le soutenir. Fort bien, mais, s’il est écrit d’emblée que Bachar al-Assad est l’avenir de la Syrie, nous aurons énormément de mal – c’est un euphémisme ! – à trouver une solution pour ce pays.
Certains ont affirmé que l’Iran et la Russie, c’était la même chose. Non ! Ces deux pays n’ont pas des positions identiques, même s’ils soutiennent tous deux Bachar al-Assad. D’ailleurs, à certains égards, le soutien iranien est encore plus fort que celui de la Russie.
En effet, les Iraniens, sous bénéfice d’inventaire – je suis actuellement en discussion avec mon homologue Mohammad Javad Zarif, et le Président Rohani rendra visite au président Hollande –, déclarent que, quoi qu’il arrive, ce sera avec Bachar al-Assad. Cela pose évidemment une difficulté !
Que faisons-nous face à cela ? L’un d’entre vous nous a reproché de ne rien faire à l’ONU, tout en soulignant par ailleurs que la résolution proposée par M. Stephan Di Mistura avait été – et c’était la première fois sur cette question – adoptée à l’unanimité. Or la France fait bien partie de cette unanimité : n’est-elle pas membre permanent du Conseil de sécurité ?
Ce que nous avons fait, c’est permettre que cette résolution, dont la portée n’est certes pas très grande, mais qui constitue néanmoins un premier élément, puisse être votée à l’unanimité. Nous soutenons les travaux de Stephan Di Mistura et travaillons d’ailleurs en permanence avec lui. Lors de la prochaine session de l’Assemblée générale des Nations unies, qui s’ouvrira dans quelques jours, nous œuvrerons avec nos partenaires du P5, et au-delà si c’est possible, pour aller en ce sens. Seulement, n’oubliez pas les autres intervenants !
On a évoqué la Turquie, et nombre d’entre vous ont critiqué l’attitude de celle-ci. Soyons prudents : comme nous l’avons dit, c’est une bonne chose que la Turquie s’engage contre Daech. Dans le même temps, on ne va pas traiter la question kurde par une approche militaire. Donc, nous avons appelé à une négociation.
Et puis, il y a les pays du Golfe ! Quand il va falloir, à un moment, s’engager au sol, comme vous le préconisez, qui va le faire ? L’armée syrienne, bien sûr, mais il faudra d’autres troupes arabes, voisines. Comment s’engageraient-elles si aucune discussion n’est engagée avec ces pays ? Or il se trouve que c’est la France, toujours la France, je suis désolé de le dire, qui maintient le contact avec l’ensemble des pays du Golfe. Quel est le seul chef d’État qui ait été reçu par l’ensemble des pays du Golfe ? C’est le Président de la République française !
Le président Raffarin a eu raison de souligner que la clef, c’est l’indépendance. Nous sommes ceux qui parlent à la fois avec les États-Unis d’Amérique, la Russie, l’Iran, l’opposition syrienne, qui sont en même temps ouverts à des éléments du régime, qui parlent avec les populations arabes et les Turcs. C’est la position singulière de la France.
Malheureusement, ce n’est pas parce que nous discutons avec tous que nous convainquons tout le monde. Le reproche que l’on pourrait d’ailleurs nous adresser est de ne pas emporter la conviction de l’ensemble de nos interlocuteurs ; je l’accepte, mais on ne peut pas dire que nous soyons pour les uns contre les autres, ou pour les autres contre les uns, puisque, quand on examine la situation, c’est la France qui assure le lien.
D’aucuns pourraient alléguer que c’est à d’autres de remplir cette mission, comme les États-Unis d’Amérique. Peut-être, mais, sans vouloir aggraver la plaie, je me dois de rappeler des épisodes que l’histoire méditera. Souvenez-vous de cette intervention chimique qui avait dépassé la « ligne rouge » : la France était prête, contrairement à nos amis britanniques et américains. C’est à ce moment-là que les choses ont basculé, y compris dans d’autres parties du monde. Le Président Poutine a alors compris que beaucoup de choses étaient possibles. Gardons cela à l’esprit !
Je souhaiterais maintenant revenir sur les questions précises qu’a posées M. Longuet.
Il s’est d’abord interrogé sur les djihadistes français.
La France, vous le savez, s’est engagée à juger les criminels français qui relèvent de sa compétence et, au nom de notre ordre juridique, la Cour pénale internationale agit, dans ce cas, de façon subsidiaire. Néanmoins, je ne crois pas inutile de rappeler que c’est la France qui a proposé au Conseil de sécurité une résolution en ce sens, résolution à laquelle la Russie s’est opposée. Voilà, monsieur Longuet, la ligne à laquelle nous nous tiendrons sur ce point.
Vous avez dit par ailleurs que l’Europe devrait œuvrer davantage sur le plan humanitaire, y compris sur place. Je vous rejoins totalement.
Vous vous êtes aussi interrogé sur les conséquences d’une intervention pour notre sécurité, posant au passage une question difficile : que se serait-il passé à Palmyre, lors de l’avancée des troupes de Daech, si nous avions eu des forces au sol ? On ne refait pas l’histoire !
Quoi qu'il en soit, la position du Président de la République, chef des armées, est la suivante : pour des raisons qui sont liées à notre sécurité, nous allons survoler la zone visée afin d’obtenir des renseignements supplémentaires. S’il apparaît, lors de l’accomplissement de cette mission, que telle ou telle opération menace la sécurité de la France, nous nous réservons le droit d’intervenir. Nous n’avons pas été plus loin pour le moment.
La plupart d’entre vous ont estimé qu’il serait totalement déraisonnable d’engager les seules forces françaises au sol. Car j’ai lu des écrits qui prônaient un tel engagement, mais qui ont, en général, été aussitôt contrés par d’autres personnalités sans doute plus au fait de ces sujets. Une telle intervention serait non seulement déraisonnable mais encore dangereuse. Ce n’est donc pas ainsi que nous agirons.
Monsieur Longuet, vous avez employé une jolie formule au début de votre intervention : Bachar al-Assad, régime minoritaire, régime des minorités ! C’est vrai, et c’est pourquoi, dans notre quête vers un nouvel équilibre de la Syrie, l’une des conditions que nous posons à la fois aux éléments du régime et à l’opposition, c’est le respect des minorités.
Vous entretenez, les uns et les autres, des contacts avec les chrétiens. Si ceux-ci reconnaissent ne pas éprouver un grand amour pour Bachar al-Assad, ils mettent en avant les vives craintes qu’ils ressentent actuellement. Il faut donc leur assurer – ce sera une demande légitime de la France – qu’ils ne seront pas pénalisés ni, bien sûr, anéantis.
J’en viens à l’intervention du président Raffarin.
Vous avez dit « ni, ni ». Nous n’allons pas chipoter, mais nous sommes plutôt favorables au « et, et » ! (Sourires.) : et contre Daech, pour des raisons évidentes, et pour que Bachar al-Assad ne soit pas là éternellement, pour des raisons tout aussi évidentes.
Vous avez dit d’une façon très topique, et je vous en remercie, pourquoi il n’était pas raisonnable – j’emploie à dessein ce mot neutre – d’envoyer des troupes françaises au sol. Vous avez ensuite utilisé une expression très forte, évoquant « la géante culpabilité de Bachar al-Assad ».
Je ne rivaliserai pas d’adjectifs, mais je vous suggère de garder à l’esprit – si nous ne devions retenir que cet élément, ce serait déjà utile –, que cette affaire ne relève pas uniquement de la morale, même si celle-ci est importante ; c’est une question d’efficacité. N’oublions jamais que, à l’époque de la conférence de Genève 1, il n’y avait pas de terroristes en Syrie. C’est la façon dont une petite révolte, dans un coin de Syrie, a été mal prise qui aboutit aujourd’hui à l’expansion de troupes terroristes, au décès de 250 000 personnes et à l’apparition de milliers de réfugiés.
Je reviendrai sur une remarque de M. Raffarin que je partage totalement et qui va, je l’espère, nous permettre d’avancer, notamment lors de débats ultérieurs. Il a fort justement mis en avant la notion d’indépendance.
La France est une nation indépendante. Cela ne plaît pas à tout le monde, à l’étranger, mais c’est ainsi que nous concevons notre rôle – je ne parle pas seulement du gouvernement actuel, car c’est une tradition –, et c’est ce qui nous vaut parfois quelques batailles.
La France n’est pas indépendante au regard de l’exigence d’efficacité, ni des principes, ni d’une certaine vision de ce que doivent être le Proche et le Moyen-Orient. Mais elle est indépendante. Les autres pays ne le comprennent pas toujours…
On a cité les États-Unis, dont nous sommes un allié tout à fait loyal. Néanmoins, quand nous disons non, c’est non ! On a cité la Russie, qui est fort critiquée dans certains milieux, alors que nous avons une relation historique, stratégique avec ce pays. Néanmoins, quand la Russie agit comme elle le fait en Crimée, nous disons non !
S’agissant de l’Iran, nous ne pouvions pas être d’accord avec ce qu’il préparait sans doute sur le plan nucléaire. Nous l’avons dit. Puis, lorsque l’accord est apparu raisonnable, nous avons dit oui.
C’est cette indépendance qui donne à la France un poids plus important que celui que représente sa seule démographie.
Nous allons, écoutant bien sûr vos avis, vos conseils, vos opinions, vos objections, vos observations, poursuivre sur la voie que j’ai indiquée à l’occasion de ce débat, car, dans un domaine qui est si difficile, il importe, autant que faire se peut, que la représentation nationale soit unie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du RDSE, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur l’engagement des forces aériennes au-dessus du territoire syrien.
Mes chers collègues, avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures quinze, sous la présidence de Mme Isabelle Debré.)
PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
6
Communication du Conseil constitutionnel
Mme la présidente. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 15 septembre 2015, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel un arrêt de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 308 du code de procédure pénale (Enregistrement audiovisuel des débats de la cour d’assises) (2015 499 QPC).
Acte est donné de cette communication.
Le texte de cet arrêt de renvoi est disponible à la direction de la séance.
7
Modernisation de notre système de Santé
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 4.
Article 4 (suite)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 400 rectifié est présenté par M. Adnot et Mme Gruny.
L'amendement n° 613 est présenté par M. Vasselle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – L’ordonnance n° 59-28 du 5 janvier 1959 réglementant l’accès des mineurs à certains établissements est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi modifié :
a) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « d’une commission » sont remplacés par les mots « du conseil mentionné à la première phrase de l’article L. 224-2 du code de l’action sociale et des familles » ;
b) Le dernier alinéa est abrogé ;
2° Au premier alinéa de l’article 2, les mots : « de la commission » sont remplacés par les mots : « du conseil mentionné à l’article L. 224-2 du code de l’action sociale et des familles ».
L’amendement n° 400 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour présenter l'amendement n° 613.
M. Alain Vasselle. Cet amendement tend à assurer le toilettage de certaines dispositions en vigueur. Je ne m’étendrai pas sur leur contenu : j’imagine que l’ensemble de nos collègues, ainsi que nos corapporteurs et le Gouvernement, en ont pris connaissance. L’adoption de cet amendement ne me paraît pas, a priori, devoir soulever de difficultés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à modifier les règles relatives à l’interdiction, par arrêté préfectoral, de l’accès des mineurs à certains établissements.
L’ordonnance du 5 janvier 1959 prévoit que le préfet peut interdire l’accès des mineurs à certains établissements de spectacle lorsque leur fréquentation est susceptible de mettre en danger leur santé ou leur moralité. Il est précisé que l’arrêté préfectoral doit être pris après consultation du maire et après avis d’une commission.
Le présent amendement vise à remplacer l’avis de la commission existante, dont le fonctionnement laisse effectivement à désirer, par celui du conseil de famille constitué au niveau départemental et chargé, avec le préfet, de la tutelle des enfants pupilles de l’État.
Il nous est apparu que de telles fonctions consultatives étaient un peu éloignées des missions d’un conseil de famille. En outre, il existe parfois plusieurs conseils de famille par département.
Néanmoins, il convient bel et bien de trouver une solution pour que cette ordonnance du 5 janvier 1959 soit réellement appliquée.
Au cours des prochaines semaines, le Sénat examinera, en deuxième lecture, la proposition de loi relative à la protection de l’enfant. Il a semblé à la commission que ce texte permettrait de se pencher de nouveau sur cette question.
Quoi qu’il en soit, il serait intéressant d’entendre dès à présent l’avis de Mme la ministre au sujet de ce problème soulevé par M. Vasselle.
Mme la présidente. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Monsieur Vasselle, la protection de l’enfant fait d’ores et déjà l’objet d’une proposition de loi.
Que ce soit dans les textes de loi, dans les autres éléments du droit ou dans la pratique quotidienne, rien ne permet d’estimer qu’un conseil de famille des pupilles de l’État pourrait être assimilé à une commission consultative. Dès lors, je ne vois pas sur quelles bases juridiques un tel amendement pourrait être admis, même si l’on peut en comprendre le sens général.
Aussi, si vous ne retirez pas cet amendement, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Vasselle, l’amendement n° 613 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. La réponse que Mme la ministre vient de m’apporter me laisse sur ma faim… J’étais pourtant rassuré en entendant Mme Deroche reconnaître, au nom de la commission, qu’il existait effectivement un problème.
Je veux bien entendre que le conseil de famille n’est pas, en la matière, la bonne instance. Mais, je le rappelle, le conseil départemental de l’enfance ne fonctionne plus depuis 2005, date à laquelle ses compétences en matière de spectacles et de fermeture des établissements sociaux pour l’enfant lui ont été retirées.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. C’est un réel problème !
M. Alain Vasselle. Il faut donc bien confier à une autre instance le soin de traiter les dossiers dont il s’agit.
J’admets qu’il faille d’attendre le nouvel examen de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant ; nous reviendrons à la charge à cette occasion. Mais mettons à profit le délai qui va s’écouler d’ici à cette discussion ! De son côté, le Gouvernement doit, lui aussi, rechercher à quel organisme il conviendra de faire appel.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Tout à fait !
M. Alain Vasselle. Cela étant, puisque tel semble être le souhait de la commission, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 613 est retiré.
L'amendement n° 702, présenté par M. Vergès, Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Pour lutter contre le syndrome d’alcoolisation fœtale, la stratégie nationale de santé, comporte notamment dans les départements et régions d’outre-mer, l’incitation à la création de centres de ressources régionaux destinés aux professionnels de la santé, de l’éducation, du social, de la justice, et au public visant à l’information, au suivi des femmes concernées par les problèmes d’alcoolisme ainsi que le soutien à leur famille.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement, auquel notre collègue Paul Vergès attache beaucoup d’importance, vise à lutter contre le syndrome d’alcoolisation fœtale, le SAF.
Selon la représentation réunionnaise de l’association SAF France, à La Réunion, 7 600 femmes sont alcoolodépendantes. Or moins de 10 % de ces dernières bénéficient de soins. En d’autres termes, près de 7 000 femmes sont en train de mourir à petit feu chez elles, victimes des tabous, de la culpabilité et de la honte. N’est-ce pas là une certaine forme de non-assistance à personne en danger ?
En outre, chaque année à La Réunion, 150 enfants naissent cérébrolésés par l’alcool in utero. Selon l’association RéuniSaf, 3 000 enfants, adolescents et jeunes adultes souffrent de ces atteintes cérébrales. Ces personnes sont en grande difficulté d’insertion sociale, de scolarité, etc.
RéuniSaf estime le coût économique de l’accompagnement de ces populations à environ 200 millions d’euros par an pour La Réunion. L’expérience de cette association a permis à 75 % des femmes malades de l’alcool d’être dirigées vers des soins et, pour certaines, de donner naissance à des enfants indemnes de tout problème de santé.
Cette expérience devrait être reprise, non seulement à l’échelle de La Réunion tout entière, mais aussi dans l’ensemble des régions qui connaissent des problèmes de cette nature.
Enfin, notons que la création de centres de ressources de ce type est l’une des préconisations du plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Dans le cadre de la stratégie nationale de santé, cet amendement tend à assurer une incitation à la création de centres de ressources régionaux, en particulier dans les départements et les collectivités d’outre-mer, afin d’intensifier la lutte contre le syndrome d’alcoolisation fœtale.
Force est de constater qu’il s’agit là d’une véritable question de santé publique. Toutefois, la formulation de cet amendement nous a paru particulièrement vague. De quelle incitation doit-il s’agir ? De plus, si la création de centres de ressources est déjà programmée, est-il utile de mentionner ces structures dans le présent texte ?
La commission souhaite que le Gouvernement éclaire la Haute Assemblée quant au degré d’avancement de la lutte contre le syndrome d’alcoolisation fœtale, en particulier dans les territoires ultramarins. Elle demande qu’il précise les dispositions prises à cet égard au cours de la période récente.
Mme la présidente. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame David, les dispositions dont vous demandez l’adoption s’appuient, en particulier, sur la situation réunionnaise. La Réunion est, en effet, l’un des territoires français dans lesquels l’alcoolisme, souvent très précoce, fait le plus de ravages.
Au demeurant, les moyens de toucher et d’informer les populations concernées constituent une vive préoccupation. C’est la raison pour laquelle j’ai expressément demandé à la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives de définir une stratégie spécifique à La Réunion, sur le front de l’alcool.
L’Assemblée nationale a débattu de ce problème concernant la réalité réunionnaise et il est apparu clairement qu’il nous fallait définir une stratégie spécifique à ce territoire.
La démarche que vous proposez est plus large puisqu’elle ne vise pas le seul département de La Réunion.
Vous l’avez rappelé vous-même, un plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives a été lancé en 2013 et doit se déployer jusqu’en 2017. Ce plan prévoit, en particulier, l’expérimentation, au niveau régional, de centres de ressources permettant d’informer et d’accompagner des femmes qui sont, notamment, mais non exclusivement, en situation de grossesse. (Mme Annie David acquiesce.) Ces femmes doivent être alertées quant aux risques que représentent l’alcool et, plus largement, les conduites addictives.
Une première expérimentation est en cours dans la région Nord – Pas-de-Calais. Une autre expérimentation est menée, parallèlement, dans l’océan Indien.
Aussi, vous le constatez, la démarche est déjà engagée. Or les mesures détaillées dans votre amendement semblent, globalement, plus restrictives que les initiatives mises en œuvre : ces expérimentations doivent s’étendre à l’ensemble des conduites addictives, au-delà de la seule alcoolisation dont sont frappées les femmes enceintes.
Voilà pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable. En effet, les dispositions dont il s’agit s’inséreraient mal dans les stratégies actuellement lancées.
Mme la présidente. Madame David, l’amendement n° 702 est-il maintenu ?
Mme Annie David. Je vais accéder à la demande de Mme la ministre en retirant cet amendement, puisque ses dispositions semblent plus restrictives que les initiatives déjà engagées.
Néanmoins, je tiens à le rappeler, le syndrome d’alcoolisation fœtale ne saurait être considéré, dans cet hémicycle, comme un problème nouveau. (M. Gérard César opine.) Les plus anciens d’entre nous – dont je fais partie ! – se souviennent de l’époque où Anne-Marie Payet l’avait évoqué ici.
Chers collègues de l’UDI-UC, vous constaterez que je rends hommage à une ancienne sénatrice centriste !
Mme Jacqueline Gourault. Merci !
Mme Annie David. Ainsi, je rends à César ce qui lui appartient. (Sourires. – M. Gérard César rit.)
M. Roland Courteau. Et c’est bien normal ! (Nouveaux sourires.)
Mme Annie David. Lors de ce débat, nous avions voté la création des pictogrammes qui figurent aujourd’hui sur toutes les étiquettes de vin. Je me souviens que cette disposition avait alors suscité des débats très animés !
Il n’empêche que, avec Mme Payet et plusieurs de nos collègues, nous avions réussi à faire adopter cette mesure. Il s’agissait d’un enjeu important, notamment pour La Réunion, département qui, Mme la ministre vient de le rappeler, est particulièrement confronté à ce problème.
Si, à travers cet amendement, nous n’avons pas voulu cibler tel ou tel département en particulier, c’est parce que nous ne souhaitions pas donner l’impression de stigmatiser une population par rapport à d’autres. Néanmoins, nous sommes bien conscients que ce problème présente une gravité particulière à La Réunion.
Mme la présidente. L’amendement n° 702 est retiré.
Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 4
Mme la présidente. L'amendement n° 704, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 3° de l’article L. 3323-2 du code de la santé publique, après les mots : « Sous forme d’affiches et d’enseignes », sont insérés les mots : « dans la limite du respect d’une distance de deux cents mètres d’un établissement scolaire, ».
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. L’article 4 du projet de loi vise à lutter contre la consommation excessive d’alcool, notamment chez les plus jeunes. Le présent amendement tend à interdire tout affichage publicitaire en faveur des boissons alcoolisées à moins de 200 mètres d’une école.
À l’intérieur des agglomérations, conformément au code de l’environnement, la publicité est notamment interdite autour des sites et monuments historiques classés, ainsi qu’à moins de 100 mètres et dans le champ de visibilité des immeubles classés monuments historiques ou inscrits à l’inventaire supplémentaire.
Si ces dispositions permettent de préserver notre cadre de vie et notre patrimoine, l’environnement direct de nos enfants doit nous également nous préoccuper. Une proposition de loi du député Franck Marlin visant à interdire la publicité pour les boissons alcoolisées à proximité des établissements scolaires, notamment, avait déjà été déposée en février 2013.
Les jeunes, particulièrement sensibles et réceptifs à la publicité, constituent un marché privilégié. Si la législation a évolué ces dernières années, avec l’interdiction de la publicité pour les boissons alcoolisées sur les services de communication en ligne destinés à la jeunesse, force est de constater que rien n’a été prévu concernant la publicité aux abords des établissements scolaires. Or des panneaux publicitaires sont fréquemment implantés à proximité de ces établissements, notamment dans les communes disposant de mobilier urbain – je pense en particulier aux abribus équipés d’espaces publicitaires – dont le financement ainsi que l’entretien ont fait l’objet d’une délégation de service auprès d’une société privée.
Alors que les modes de consommation d’alcool chez les jeunes évoluent radicalement et que la fréquence des ivresses est en hausse, il est de notre devoir de les protéger au moins autant et même bien plus que notre patrimoine historique et notre cadre de vie, qui bénéficient d’une législation et d’une réglementation adaptées.
Aussi proposons-nous d’interdire toute publicité sur les boissons alcoolisées par voie d’affichage dans un rayon de 200 mètres d’un établissement scolaire, de la même manière que des dispositions prévoient déjà de prémunir les jeunes contre de tels messages publicitaires à la télévision, au cinéma ou sur internet, notamment.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Bien qu’elle comprenne l’objet de cet amendement, la commission estime que la définition précise de la distance devant séparer les affiches et enseignes des établissements scolaires relève du domaine réglementaire. Le problème se pose d’ailleurs dans les mêmes termes à propos des débits de tabac.
De surcroît, il s’avère que ce type de dispositions fixant une distance minimale peut être difficile à appliquer, par exemple dans les communes de petite taille.
La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Mme Orphé, députée de La Réunion qui intervient sur ces questions avec beaucoup de conviction, avait présenté un amendement du même type lors de l’examen de ce projet de loi par l’Assemblée nationale. Celui-ci avait été retiré au bénéfice de travaux à mener dans le cadre de la mission interministérielle de lutte contre les addictions.
Je comprends parfaitement votre argumentation, monsieur le sénateur. Nous sommes, c’est vrai, dans une situation qui peut paraître paradoxale puisque les débits de boissons alcoolisées sont interdits dans un rayon de moins de 200 mètres d’une école, alors que ce n’est pas le cas pour les publicités portant sur ces mêmes boissons alcoolisées.
Du reste, je le relève au passage, cet amendement montre bien que, contrairement à ce que j’entends parfois dire, la publicité pour l’alcool est possible dans notre pays : non seulement elle s’offre à ceux qui choisissent de lire tel ou tel journal, mais elle s’invite aussi dans l’espace public, sur les abribus ou les colonnes Morris, par exemple. L’amendement que vous défendez, monsieur Watrin, part bien de ce constat et des préoccupations qu’il entraîne à propos des enfants.
Toutefois, je vous demande de retirer votre amendement au profit du travail qui est mené dans le cadre de la mission interministérielle. Celui-ci est porté notamment par des parlementaires issus de territoires directement concernés par les enjeux de santé publique, tels que le vôtre ou celui de La Réunion, évoqué il y a un instant. Cela étant, il faut bien le dire, il y a peu de territoires qui ne sont pas confrontés à ce problème !
Mme la présidente. Monsieur Watrin, l'amendement n° 704 est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Non, madame la présidente, je vais le retirer.
Madame la ministre, je me réjouis de l’intérêt que vous portez à la question sensible posée par les élus du groupe CRC concernant l’affichage de publicités à proximité immédiate des établissements scolaires. À mes yeux, un débat s’impose sur la façon d’en réduire le volume au maximum.
Il y a en tout cas nécessité d’agir, et c’est pourquoi je ne comprends pas la justification apportée à l’avis défavorable de la commission, car l’amendement visait avant tout à interdire l’affichage de publicités à proximité des établissements scolaires, la distance proposée étant accessoire.
Nous entendons vos paroles, madame la ministre. Nous espérons que ce travail ne va pas durer des mois et qu’il aboutira rapidement à une solution concrète. C’est pourquoi je retire cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 704 est retiré.
L'amendement n° 1118 rectifié, présenté par MM. Cornano, S. Larcher, Karam, Masseret, Cazeau, Patient, Desplan et Antiste et Mme Jourda, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 3° de l’article L. 3323-2 du code de la santé publique, après le mot : « enseignes », sont insérés les mots : « , les affiches ne pouvant dépasser une surface maximale, inférieure de moitié à la surface des autres panneaux publicitaires autorisés ».
La parole est à M. Jacques Cornano.
M. Jacques Cornano. L’article 4 du projet de loi vise à lutter contre la consommation excessive d’alcool, notamment chez les plus jeunes. Or nous constatons actuellement la présence, dans les agglomérations, notamment ultramarines, de très nombreux panneaux publicitaires qui font la promotion de boissons alcoolisées.
La loi n° 9132 du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme, dite « loi Évin », impose un certain nombre de mentions légales concernant le contenu de ces affiches, par exemple l’indication : « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ». Par ailleurs, les articles R. 580-26, R. 581-32 et R. 581-34 du code de l’environnement imposent des formats – surfaces et hauteur – pour les panneaux publicitaires en fonction du nombre d’habitants des agglomérations et des caractéristiques du dispositif.
Il ne s’agit ici non de modifier le dispositif de la loi Évin, mais de le compléter : nous proposons de réduire de moitié les surfaces autorisées en matière d’affichage lorsque la publicité a trait à des boissons alcoolisées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Certes, on peut partager l’objectif de réduire la taille de ces affiches, mais la commission a jugé que ces dispositifs relèvent vraiment de la partie réglementaire du code de la santé publique.
La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur Cornano, le Gouvernement, lui aussi, demande le retrait de cet amendement, pour les raisons que j’ai exposées précédemment.
Toutefois, en écoutant vos propos très fondés et argumentés, en repensant également aux propos de M. Watrin à l’instant, je me suis dit qu’il fallait faire en sorte d’accélérer les travaux de cette mission interministérielle, le cas échéant lors du débat à l’Assemblée nationale, au cas où, d’aventure, la commission mixte paritaire échouerait, ce qui n’est pas totalement exclu…
Mme la présidente. Monsieur Cornano, l'amendement n° 1118 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Cornano. Je le retire, madame la présidente, dans l’espoir que le travail sera repris très rapidement à l’Assemblée nationale. Je suivrai ce dossier de près !
Mme la présidente. L'amendement n° 1118 rectifié est retiré.
L'amendement n° 703, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 9° de l’article L. 3323-2 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les conditionnements des bières titrant à plus de 5,5 % d’alcool ne peuvent dépasser une contenance de trente-trois centilitres par unité de conditionnement. »
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Nous assistons depuis quelques années à un développement considérable du marché des bières fortes, dites « spéciales », qui titrent généralement plus de huit degrés et demi et parfois jusqu’à dix ou douze, soit autant que des vins.
Ces bières ont un succès réel, notamment auprès d’un certain nombre de jeunes, mais aussi de moins jeunes, et sont bien souvent consommées dans l’espace public. Ces boissons contiennent une quantité importante d’alcool, en particulier dans les formats de 50 centilitres, et sont facilement transportables lorsqu’elles sont conditionnées dans des canettes en métal.
Le problème tient à la fois à la quantité d’alcool contenue dans ces boissons, mais également à leur conditionnement. Une fois ouverte, la canette en métal ne peut être refermée, ce qui incite évidemment à la terminer avant toute activité ou tout mouvement vers un lieu où l’usage d’alcool est interdit ou impossible.
Ces comportements ont pour effet une alcoolisation importante – il faut boire très vite la canette –, avec un pic d’alcoolémie qui augmentera le risque d’effets dommageables pour les consommateurs et leur entourage, notamment sur la route, sur la vie au travail, voire entraînera des violences, etc.
L’objet du présent amendement est de limiter à 33 centilitres la contenance des conditionnements des bières dites « spéciales », et notamment des bières titrant plus de cinq degrés et demi d’alcool, afin de limiter le caractère incitatif à l’alcoolisation excessive.
Une telle disposition aurait également un effet sur le prix de l’unité d’alcool, car plus le contenant sera petit, plus le prix du produit devra être élevé, ce qui peut, a priori, avoir un effet dissuasif.
Il convient d’agir sur les comportements d’alcoolisation excessive, dans un esprit de prévention des risques et de réduction des dommages.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La commission a jugé les arguments de notre collègue recevables. Néanmoins, elle a estimé que le volume de conditionnement des boissons alcoolisées ne relevait pas du domaine législatif et a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Bosino, l'amendement n° 703 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Bosino. Je tiens à préciser que l’objet de cet amendement était d’attirer l’attention sur ces bières et ces canettes de 50 centilitres qui font beaucoup de dégâts. Cela étant, nous le retirons.
Mme la présidente. L'amendement n° 703 est retiré.
Je suis saisie de cinq amendements identiques.
L'amendement n° 31 rectifié quinquies est présenté par MM. Courteau, Patriat, Bérit-Débat, Carrère, Filleul, Montaugé, Daunis et Cabanel, Mme Schillinger, MM. Durain, Cazeau, Labazée et Vaugrenard, Mme Jourda, MM. Miquel et Camani, Mmes Bonnefoy et Espagnac, MM. Bigot, Boutant, Carcenac, Duran, Haut, Lalande et Madrelle, Mme Monier et M. Raoul.
L'amendement n° 32 rectifié est présenté par M. César, Mme Férat, MM. Détraigne, P. Leroy et Pintat, Mmes Des Esgaulx et Troendlé, MM. Reichardt, D. Laurent, Grand, Bouchet, Darnaud, Genest, Commeinhes, Guené, Grosperrin, Trillard, Houpert et Pierre, Mme Lamure, MM. Houel, Chaize, Pointereau, Mouiller, Longuet, Bonhomme, Chatillon, Lefèvre, J.P. Fournier et Pillet, Mme Lopez, MM. Raison, G. Bailly, Huré, Morisset et Danesi, Mmes Loisier et Gourault, MM. Bonnecarrère, Dufaut, Bockel, Lasserre, B. Fournier, Kern, Longeot, Gabouty et Cigolotti, Mme Gatel, MM. Guerriau, J.L. Dupont, Laménie, de Raincourt, Tandonnet et Béchu, Mme Estrosi Sassone, MM. Cornu, Vaspart, Marseille, L. Hervé, Cadic, Mayet et Doligé, Mme Gruny et M. Maurey.
L'amendement n° 399 rectifié est présenté par MM. Adnot, Lenoir et Husson.
L'amendement n° 410 rectifié est présenté par MM. Savary, Cardoux et Gilles, Mme Imbert et M. Lemoyne.
L'amendement n° 859 rectifié est présenté par MM. Requier et Barbier et Mme Malherbe.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 3323-3 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3323-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3323-3-1. – Ne sont pas considérés comme une publicité ou une propagande, au sens du présent chapitre, les contenus, images, représentations, descriptions, commentaires ou références relatifs à une région de production, à une toponymie, à une référence ou à une indication géographique, à un terroir, à un itinéraire, à une zone de production, au savoir-faire, à l’histoire ou au patrimoine culturel, gastronomique ou paysager liés à une boisson alcoolique disposant d’une identification de la qualité ou de l’origine, ou protégée au titre de l’article L. 665-6 du code rural et de la pêche maritime. »
La parole est à M. Roland Courteau, pour présenter l’amendement n° 31 rectifié quinquies.
M. Roland Courteau. Cet amendement vise à clarifier la législation afin de favoriser la promotion touristique de nos paysages viticoles. Nous souhaitons que l’on puisse communiquer en toute sécurité juridique sur les terroirs, la toponymie, les itinéraires touristiques, et plus généralement en faveur de ce patrimoine viticole, gastronomique et culturel qui est le nôtre.
Nous ne proposons pas de modifier l’encadrement de la publicité en faveur des boissons alcooliques, et nous ne contestons nullement le fait qu’elle soit soumise à des restrictions afin de prévenir des consommations excessives.
En revanche, nous proposons de lever le flou juridique qui résulte des dérives jurisprudentielles de ces dernières années. En effet, la jurisprudence assimile de fait un contenu journalistique, culturel ou œnotouristique à de la publicité. Or tel n’était pas l’objectif du législateur lors de l’adoption de la loi de 1991, et les juges n’ont pas à se substituer au législateur.
Nous voulons donc, sur ce point, reprendre la main en faisant la distinction entre ce qui relève de la publicité, d’une part, et ce qui relève d’un contenu journalistique ou œnotouristique, d’autre part, de manière à sortir de cette situation d’insécurité juridique manifeste qui conduit souvent journalistes et opérateurs œnotouristiques à s’autocensurer.
Je le répète, il ne s’agit pas d’assouplir l’encadrement de la publicité en faveur des boissons alcooliques, qui est une chose différente de l’information journalistique ou œnotouristique.
J’ajouterai, pour conclure, que cet amendement est identique, à la virgule près, à celui qui avait été présenté par le Gouvernement lors de la discussion de la loi Macron.
Madame la ministre, mes chers collègues, nous ne proposons rien d’autre que de permettre, en toute sécurité juridique, la promotion de nos terroirs, de nos paysages viticoles, de nos savoir-faire et de nos produits, toutes choses qui contribuent au rayonnement de la France dans le monde. (Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard César, pour présenter l’amendement n° 32 rectifié.
M. Gérard César. Le Conseil constitutionnel a censuré, début août, une disposition de la loi Macron visant à clarifier les notions d’information et de publicité relatives aux boissons alcooliques.
Je vous rappelle qu’un amendement allant en ce sens, et cosigné par les membres du groupe d’études de la vigne et du vin du Sénat, avait été adopté à l’unanimité, toutes tendances politiques confondues, lors de la première lecture du projet de loi Macron dans notre assemblée.
Un amendement à ce même texte, présenté par le Gouvernement, a ensuite été adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture. C’est le dispositif de ce dernier amendement que nous proposons d’adopter aujourd’hui dans le cadre du projet de loi santé, comme vient de l’expliquer Roland Courteau, à qui je me permets de souhaiter une bonne fête puisque c’est aujourd'hui la Saint-Roland. (Sourires et exclamations.)
M. Roland Courteau. Merci !
M. Marc Daunis. C’est l’occasion de boire un bon verre de vin ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard César. En rejetant cette disposition, pour des raisons de forme, et non de fond, le Conseil constitutionnel n’a toutefois pas remis en cause l’objectif de clarification de la loi Évin. Comme l’ont rappelé les juges constitutionnels, le but de la loi Évin était « de lutter contre les excès de consommation d’alcool et de protéger les populations à risque ». Sa validation par le juge a reposé sur le fait que « le législateur, qui [avait] entendu prévenir une consommation excessive de boissons alcooliques, [s’était] borné à limiter la publicité en ce domaine, sans la prohiber de façon générale et absolue. »
Pourtant, nous constatons aujourd’hui que l’application de la loi Évin connaît une dérive, car elle s’est écartée de l’esprit du texte. Ainsi, une définition du champ de la publicité par la Cour de cassation induit l’assimilation d’un contenu journalistique, œnotouristique, culturel ou artistique à de la publicité, et des journaux tels que Paris Match ou Le Parisien ont été condamnés à ce titre.
Aujourd’hui, compte tenu des risques juridiques et judiciaires, beaucoup de journalistes pratiquent l’autocensure en s’abstenant d’écrire des articles sur les régions viticoles, fût-ce pour se contenter d’évoquer leurs paysages.
Dans ce contexte, il est essentiel d’apporter la sécurité juridique nécessaire aux opérateurs publics et privés, tels que les collectivités territoriales, les offices du tourisme, les agences de voyage ou les journaux pour valoriser, dans une optique d’information, les vignobles de France, nos territoires et nos paysages.
Mes chers collègues, tel est l’enjeu de cet amendement. Il s’agit d’une clarification et d’une sécurisation faisant écho à l’engagement responsable de la filière viti-vinicole,…
Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collège.
M. Gérard César. … laquelle promeut le principe d’une consommation quantitativement responsable au travers d’actions concrètes sur le terrain, en particulier en matière de prévention du risque « alcool » pour nos jeunes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Bravo !
Mme la présidente. L’amendement n° 399 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 410 rectifié.
M. Jean-Noël Cardoux. Notre collègue René-Paul Savary étant malheureusement immobilisé, il n’est pas en mesure de défendre son amendement. Il me revient donc de le faire, en accord avec ses autres signataires.
Je ne reprendrai pas les arguments de fond qui viennent d’être avancés par nos collègues Roland Courteau et Gérard César : j’y souscris totalement. J’ajouterai simplement deux précisions.
Tout d’abord, comme l’a souligné Gérard César, le Conseil constitutionnel a jugé qu’il s’agissait d’un cavalier dans la loi Macron, mais, lorsque l’on présente le même amendement dans un texte relatif à la santé, ce qu’était aussi la loi Évin, il nous est rétorqué que qu’il n’y a pas non plus sa place…
M. Gérard César. Ce n’est jamais le bon texte !
M. Jean-Noël Cardoux. Je me demande donc sur quel texte on peut le présenter !
C’était un des arguments qui nous ont été opposés ce matin en commission. Du reste, je remercie son président et ses corapporteurs d’avoir, dans leur grande sagesse, accepté de soumettre ces amendements au vote des commissaires, qui se sont prononcés en leur faveur à une large majorité, convertissant ainsi l’avis de sagesse qui avait été initialement émis en avis favorable.
Ensuite, l’esprit de cet amendement milite en faveur des terroirs, en faveur de la ruralité, bien malmenée actuellement avec la loi NOTRe et la crise agricole. En le votant, nous permettrons aux viticulteurs de nos régions, qui ne ménagent pas leurs efforts, de se faire connaître par des annonces non pas publicitaires, mais informatives. Ce vote constituera le signal fort en faveur de la ruralité et du terroir que chacun appelle de ses vœux pour sa propre région.
À cet égard, il faut savoir que les petites communes rurales se plaignent, même si le phénomène est tout juste émergent, de la législation sur les enseignes, qui empêche de signaler à l’entrée de leur territoire tel ou tel producteur ou artisan local à l’attention des touristes qui le traversent. L’ajout d’une interdiction à une autre finit par asphyxier totalement la ruralité, la vie locale et les petits villages.
Tels sont les arguments que je voulais ajouter à ceux qui ont déjà été développés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 859 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Je me contenterai d’ajouter une remarque. Il m’arrive d’aller voir des matches de rugby à l’étranger, à l’occasion du Tournoi des Six nations.
En Écosse, on fait de la publicité, ou de l’ »information », dans les stades pour la boisson nationale à base de malt fermenté. De même, à Dublin, on voit partout des images de cette bière brune qui fait la renommée de l’Irlande.
En revanche, en France, rien de tout cela n’est possible !
Ainsi, dans le Lot, lors de la construction de l’autoroute A20, le conseil général avait décidé de planter une vigne et d’installer un panneau évoquant le vin de Cahors, le tracé ne passant pas par le vignoble. L’interdiction est tombée, et il a fallu arracher la vigne !
On ne peut donc plus faire d’information suffisante sur le vin. Or il s’agit du patrimoine de la France, de notre terroir. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement.
De grâce, madame la ministre, arrêtons de nous tirer une balle, non pas dans le pied, mais dans le gosier ! (Rires et vifs applaudissements sur de nombreuses travées.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Ces amendements visent à clarifier l’interdiction de la publicité pour les boissons alcooliques issue de la loi Évin.
Notre collègue Gérard César a rappelé que, lors de l’examen en première lecture de la loi Macron, des amendements avaient été présentés par des sénateurs de plusieurs groupes politiques pour arriver à une formulation proche de celle qui est ici proposée. M. Macron avait alors donné un avis de sagesse, et l’amendement avait été adopté par le Sénat. En nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a, à son tour, fait adopter un amendement légèrement différent, dont la rédaction lui semblait meilleure. Le Sénat a ensuite adopté cette disposition en nouvelle lecture, mais le Conseil constitutionnel l’a finalement censurée.
Ce matin, lors de l’examen ces amendements, il nous a été expliqué qu’une telle disposition ne saurait figurer dans la loi santé. Pourtant, elle fait bien référence au code de la santé publique puisqu’elle tend à rajouter, après l’article L. 3323-3 de ce code, un article L. 3323-3-1 rédigé conformément à la volonté du Gouvernement, exprimée lors de l’examen de la loi Macron.
J’ai préconisé un avis de sagesse, mais la commission a souhaité un vote sur ces amendements et une majorité s’est dégagée pour leur donner un avis favorable.
M. André Reichardt. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, en tant que ministre en charge de la santé, je veux rappeler les enjeux de santé publique.
Mme Annie David. Très bien !
Mme Marisol Touraine, ministre. À l’occasion d’un débat sur la santé, qui vise à prémunir nos concitoyens contre les risques auxquels ils peuvent être exposés, les propos que je viens d’entendre, et qui visent ni plus ni moins à provoquer la remise en cause des enjeux de santé publique par une ministre de la santé, sont assez étonnants…
M. André Reichardt. Mais qui a parlé de cela ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Que dirait-on d’une ministre de la santé qui ne se préoccuperait pas des 50 000 morts que fait l’alcool chaque année ?
M. Gérard César. Et l’économie viticole, vous y pensez ?
M. Didier Guillaume. Écoutez Mme la ministre, mon cher collègue !
M. Gérard César. Cela n’a rien à voir avec le vin ! On parle de vin, pas d’alcool ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Marisol Touraine, ministre. Selon vous, quand on parle de vin, on ne parle pas d’alcool ? C’est un peu difficile à entendre ! (M. Gérard César proteste.)
Mme la présidente. Monsieur César, laissez parler Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Je pense qu’un peu de raison est nécessaire dans ce débat. Que vous défendiez votre territoire, vos terroirs, une filière économique, l’activité touristique, je peux l’entendre, même si je ne partage pas votre point de vue. Mais que vous balayiez d’un revers de main, en haussant le ton, 50 000 morts dans notre pays…
M. Gérard César. C’est facile !
Mme Marisol Touraine, ministre. C’est facile, dites-vous ? Pour les femmes et les hommes qui meurent, non, ce n’est pas facile ! Pour les familles, ce n’est pas facile ! Au regard du coût pour la société, ce n’est pas facile ! Je suis désolée d’en venir à ces réalités triviales, mais cela représente une charge financière pour l’assurance maladie.
Avant que vous n’interveniez, je n’avais entendu, mais peut-être était-ce une illusion, que des déclarations en faveur de la santé publique, à propos d’autres amendements qui ont été votés, d’autres retirés parce qu’un travail était réalisé par ailleurs. Je me suis dit qu’il y avait là beaucoup de déclarations d’amour… Mais, vous le savez, au-delà des déclarations d’amour, il faut aussi des preuves d’amour !
Dans le texte que j’ai présenté initialement ne figurait aucune mesure visant à modifier l’équilibre de la loi Évin ; il n’y avait aucune mesure de durcissement à ce sujet, excepté pour ce qui concerne les séances d’alcoolisation rapide chez les jeunes. En effet, je voulais éviter un débat qui serait une foire d’empoigne et j’estimais qu’il ne fallait pas toucher à l’équilibre de la loi Évin.
Que dit cette loi ? Elle ne tend pas à interdire la publicité : elle vise à protéger les jeunes en encadrant la publicité, tout en respectant l’activité économique liée à l’alcool et au vin. (M. Gérard César s’exclame.)
Mme Annie David. Eh oui !
Mme Marisol Touraine, ministre. La publicité est-elle devenue impossible ? J’ai là un certain nombre de documents qui montrent le contraire. (Mme la ministre brandit successivement différentes pages de journaux.)
Le 31 août, la une du journal Le Monde contient une immense publicité avec une énorme bouteille de vin…
M. Gérard César. Il peut être condamné pour ça !
Mme Marisol Touraine, ministre. Cela n’a pas été le cas, en l’occurrence !
Qu’on ne me dise donc pas que la publicité pour le vin est interdite !
Du reste, quelques jours plus tard, paraît dans Les Échos cette énorme publicité présentant différentes bouteilles, avec toutes les qualités de vin que vous pouvez souhaiter.
Alors, me direz-vous – pas vous puisque, à l’évidence, toute publicité vous paraît impossible, mais d’autres –, « Au fond, nous savons bien que la publicité est possible. Ce qui nous paraît compliqué, c’est la publicité qui ne porte pas directement sur un produit, une bouteille, mais qui s’exprime à travers un reportage à l’occasion duquel on donne des indications sur des territoires. »
Eh bien, vous voyez ici une page qui fait référence à un territoire, une autre page consacrée à un autre territoire. Là, c’est une double page. Elles sont tirées d’un numéro spécial de L’Express, dont la couverture est titrée « Vins 2015 », et où il est également question des « Vignerons indépendants », de « Coups de cœur ». Nous avons ainsi de multiples reportages sur des sujets très à la mode, depuis « Les femmes vigneronnes » jusqu’aux « Productions biologiques » en passant par « Les nouveaux mécanismes d’installation ». Je pourrais poursuivre l’énumération, mentionner l’article qui cite une grande région, bien connue, avec un vin bien connu et toute une sélection.
Il est tellement possible de faire ce genre de publicité que Le Petit Quotidien, qui s’adresse aux enfants, a fait voilà quelques mois sa une sur « La vigne en France, un métier, une histoire, un art ». S’agissant d’un journal qui s’adresse à des enfants, on aurait pu penser que le sujet serait interdit. Eh bien, non, pas du tout ! L’article est paru, et l’on y voit des grappes de raisin, on y décrit un métier. Le tout est d'ailleurs très bien fait et l’on y apprend des tas de choses.
Et puis, oui, il y a eu, dans Paris Match, un article qui n’était pas une publicité. (Mme la ministre montre le document.) Il était consacré à une actrice de cinéma bien connue – américaine, en l’espèce, même si elle vit à Paris – avec une bouteille de champagne – il n’y a évidemment aucun mal à citer cette appellation. Cette actrice pose dans une attitude tout à fait suggestive. Et, à aucun moment, l’article n’évoque la bouteille d’alcool. Nulle part il n’est écrit : « L’abus d’alcool nuit à la santé. » On associe directement un alcool de fête à une actrice incontestablement très belle, très attirante et photographiée dans une position très lascive. (Sourires et exclamations.)
Pour ma part, je n’y vois que des choses très charmantes. Néanmoins, tout cela, c’est une publicité déguisée pour l’alcool, et c’est cela qui a été condamné.
Mon propos n’est pas du tout d’opposer à l’objectif de santé publique l’activité de filières économiques, la viticulture et le tourisme, qui sont des vecteurs de développement, qui exportent, apportent des devises, etc. Je veux simplement rappeler que la loi Évin a mis en place un équilibre qui, depuis des années, nous permettait de développer cette activité, de vendre, de favoriser le tourisme. Il y a des routes du vin partout en France ! Dans mon département, qui est un département viticole, il y a des routes du vin, comme partout ailleurs. Ce n’est pas interdit !
La position que je défends, je l’ai défendue depuis le début. En effet, si l’amendement contenu dans la loi Macron a été décrété inconstitutionnel, c’est non parce qu’il ne figurait pas dans le bon texte, mais parce qu’il était intervenu trop tardivement dans la procédure.
M. Gérard César. C’est le Gouvernement qui l’a introduit !
Mme la présidente. Monsieur César, vous pourrez prendre la parole tout à l’heure pour expliquer votre vote !
Mme Marisol Touraine, ministre. J’entends les positions, j’écoute ce qui est dit et je veux exprimer par avance mes regrets. Et je les exprimerai à nouveau après le vote s’il est favorable à ces amendements, parce qu’il s’agit ici d’une loi de santé publique !
Après ce vote, nous reprendrons les débats sur les questions relatives au diabète et à l’obésité. Nous reprendrons nos discussions sur l’organisation du système de santé. Nous reviendrons sur la manière de suivre dans la durée les personnes atteintes de maladies chroniques.
Or, parmi ces maladies, certaines sont liées à la consommation excessive d’alcool. Refuser de le voir, fermer les yeux sur ce fait, je ne crois pas que ce soit rendre service à une filière économique ! C’est, au fond, ne pas tenir compte d’une réalité qui coûte à notre pays. Une étude récente vient encore de le montrer, il y a le coût direct pour la santé, il y a le coût des vies humaines brisées, des familles détruites, il y a le coût pour l’activité économique de salariés qui ne peuvent pas se rendre régulièrement à leur travail.
Aujourd'hui, si nous voulons que notre population vive mieux, nous devons nous donner les moyens de lutter contre les maladies qui peuvent être évitées, c'est-à-dire celles qui sont liées à des comportements excessifs.
Évidemment, il y a des millions de gens qui boivent du vin de façon tout à fait raisonnable et responsable. Là n’est pas le problème. Vos amendements ne changeront rien à cette réalité. Mais, en matière de santé publique, la publicité a un impact et nous devons donc préserver l’équilibre issu de la loi Évin.
C'est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur ces amendements identiques, déposés sur un texte dont l’objet est la santé. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Les envolées, les considérations plus ou moins théologiques sur les politiques de santé, c’est bien, mais je crois qu’il faut s’en tenir au texte proposé dans ces amendements. Que dit-il ? Il prévoit que ne sont pas considérés comme de la publicité ou de la propagande les contenus, les images, les commentaires sur une région de production, une indication géographique, un terroir, un itinéraire.
Notre objectif est tout simplement d’éviter que des articles de presse faisant la promotion de l’œnotourisme soient empêchés de paraître.
Je rappelle que si la France accueille 83 millions de touristes, elle est en retard, notamment par rapport à l’Espagne, sur le critère du panier moyen de dépenses. Nous sommes en train de nous faire dépasser !
Il y a bien, à la suite de l’arrêt de la Cour de cassation de 2004, des articles qui ont été condamnés. Celui du Parisien a été condamné alors qu’il était dédié à la réussite de l’exportation des vins de Champagne. On parlait d’export ! La Cour de cassation ayant dit que « tout acte en faveur d’un organisme ou d’un produit ayant pour effet, quelle qu’en soit la finalité, de rappeler une boisson alcoolique… » – tout est dans « quelle qu’en soit la finalité » –, on est bloqué ! Nous avons besoin de cette clarification législative pour permettre enfin aux journalistes de faire leur travail sans danger de condamnation. Il ne s’agit pas d’être irresponsable !
Les filières ont fait d’énormes efforts. Il y a une prise de conscience générale. Madame la ministre, croyez bien que nous sommes également sincères dans notre démarche !
Si l’on pousse votre raisonnement jusqu’au bout, madame la ministre, faudrait-il encadrer strictement la publicité pour les voitures, qui, elles aussi, tuent plusieurs milliers de personnes chaque année ?
Je crois que nous sommes là pour légiférer sous l’empire du bon sens et faire en sorte que nos territoires, nos terroirs puissent communiquer – il s’agit de communication, pas de publicité – et être ainsi attractifs partout dans le monde.
Mme la présidente. Il faut conclure !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Je conclus en rappelant que les auteurs de ces amendements ont repris mot pour mot la rédaction qui avait été proposée par le Gouvernement lors de la discussion de la loi Macron. Vous êtes certes ministre de la santé, mais vous êtes solidaire de l’ensemble du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Il y a, c’est vrai beaucoup de passion dans ce débat, et je remercie la ministre de la santé de l’avoir recadré : il s’agit d’un texte de santé publique, non d’un texte sur le tourisme.
Quand on parle de santé publique, entendre les arguments que j’ai entendus me choque. Cela me choque d’autant plus que nous en sommes au titre Ier, intitulé « Renforcer la prévention et la promotion de la santé », et même au chapitre 1er, intitulé « Soutenir les jeunes pour l’égalité des droits en santé ».
Quelle image donnons-nous ?
Nous parlons de la prévention ! Nous parlons des méfaits de l’alcoolisation chez les jeunes !
M. André Reichardt. Cela n’a rien à voir !
Mme Laurence Cohen. Vous entendez introduire des dispositions qui sont à l’opposé du sens même de ce projet de loi !
M. Roland Courteau. Ce n’est pas vrai !
Mme Laurence Cohen. Si ! Relisez les intitulés !
Vous ne donnez pas un exemple positif quand vous vous apprêtez à condamner, la main sur le cœur, des excès de fête, par exemple, parmi les étudiants. Il est un certain nombre de dérives que nous condamnons toutes et tous ! Je trouve donc qu’il y a là de votre part une sacrée hypocrisie !
Par ailleurs, mes chers collègues, j’ai le sentiment que la loi Évin faisait plus ou moins consensus et qu’elle était porteuse d’un équilibre. Cet équilibre, vous le remettez en cause !
Là, il n’y a pas de digue ! Vous nous parlez d’une similitude entre les publicités pour tel ou tel vin et les voitures. Or, s’agissant de tout ce qui est vitesse automobile, il y a des limites, il y a des contrôles, il y a des radars. Quelle est donc la pertinence de cette comparaison ?
Je me soucie de l’image que nous donnons ici en passant des heures sur cette question ? Que vont penser les jeunes si, demain, monsieur César et les autres auteurs de ces amendements, vous vous élevez contre toute mesure concernant le cannabis ?
Mme la présidente. Il faut conclure !
M. Gérard César. Cela n’a rien à voir !
Mme Laurence Cohen. Je trouve cela lamentable !
Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.
M. Rémy Pointereau. Je veux rebondir sur ce qu’a dit tout à l’heure notre collègue Gérard César.
Oui, le vin, c’est le patrimoine de la France. Samedi et dimanche prochains, ce sont les Journées du patrimoine. À cette occasion, le vin devrait être très largement mis en avant. D’autant que c’est l’un des rares succès de notre commerce extérieur, il faut tout de même le rappeler !
Vous avez évoqué, madame la ministre, les 50 000 décès à l’alcool. Ils sont dus non à l’alcool, mais à l’excès d’alcool !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
M. Rémy Pointereau. Madame la ministre, l’obésité fait aussi beaucoup de morts en France. Alors, empêchez la publicité pour tous les produits agroalimentaires français, depuis les fromages, qui font aussi partie de notre patrimoine, jusqu’aux viennoiseries et aux pâtisseries, autant de produits dont une consommation excessive mène à l’obésité !
À un moment donné, il faut arrêter de prendre nos concitoyens pour des irresponsables !
Il faudrait faire en sorte que les conditions de la concurrence soient identiques dans tous les pays européens. En Espagne, on peut faire un peu de publicité. Il faut que tous les pays européens se mettent au même niveau en matière de publicité en faveur des vins. Il n’y a pas de raison que la France soit encore en « surtransposition » par rapport à ses voisins !
C'est la raison pour laquelle je voterai bien évidemment l’amendement de notre collègue César et les amendements identiques. Il me paraît important de clarifier les choses eu égard aux problèmes qui peuvent se poser sur le plan juridique.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote.
Mme Françoise Férat. Je ne vous cacherai pas que je suis gênée par certains propos que j’ai entendus. Comme si nous étions en train de faire l’apologie de l’alcool !
Comment penser que les hommes et les femmes qui ont cosigné ces amendements l’aient fait au détriment de nos concitoyens, au détriment de nos enfants ou de nos petits-enfants ?
M. Roland Courteau. Merci !
Mme Françoise Férat. Comment est-il possible d’imaginer la conscience qui serait alors la nôtre ?
Sans reprendre les arguments qui ont déjà été avancés, je dirai qu’il s’agit de défendre nos territoires, à travers des savoir-faire, à travers la gastronomie, etc.
Non, ces amendements ne visent nullement à libérer la publicité pour l’alcool. Ne faisons pas d’amalgame !
M. Roland Courteau. Exactement !
Mme Françoise Férat. Et puis, madame la ministre, vous nous avez fait une brillante démonstration en nous montrant divers journaux et magazines. Or cela atteste avant tout que la plus grosse difficulté dans l’application de la loi Évin tient bien à l’interprétation qu’en font les juges.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
Mme Françoise Férat. Dès lors, votre argument lui-même démontre, s’il en était besoin, l’intérêt de ces amendements ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.
Mme Aline Archimbaud. Il ne paraît pas possible que, dans une loi de santé publique, on puisse proposer des amendements qui visent à reculer par rapport à la loi Évin. (Protestations.)
Mme la ministre a cité un chiffre : 50 000 morts par an. Est-ce que l’on mesure ce que cela veut dire ? Est-ce que l’on mesure la responsabilité qui est aujourd'hui la nôtre ?
Comme cela a été dit, la loi Évin avait établi, dans un consensus, un équilibre. Pourquoi vouloir rompre cet équilibre ?
Sur le fond, pourquoi reprendre cette vieille opposition entre, d’un côté, le développement économique, l’emploi, la défense de la ruralité et, de l’autre, la santé ? Pourquoi continuer avec ces vieilles lunes ?
Cela me fait songer à une autre situation, particulièrement douloureuse. Relisez donc les textes du comité permanent amiante : pendant cinquante ans, ce comité a affirmé que, au nom de la défense de l’emploi, parce qu’il ne fallait pas mettre des gens au chômage, on ne pouvait pas interdire l’amiante. Or que se passe-t-il aujourd’hui ? L’Institut national de veille sanitaire nous prédit 100 000 morts de l’amiante en 2050 !
On ne peut plus continuer à opposer ainsi économie et santé. Cette opposition est derrière nous !
Avec l’ensemble des membres de mon groupe, je suis, bien sûr, tout à fait d’accord pour examiner rapidement, si nécessaire, un projet ou une proposition de loi de soutien au développement local rural et à y consacrer des moyens, mais non pour reculer sur la loi Évin.
Ces 50 000 morts par an nous imposent une responsabilité : c’est à nous, parlementaires, d’être courageux et de soutenir le Gouvernement sur ce point.
J’ajoute que ceux qui sont le plus souvent tentés par cette addiction de l’alcool sont aussi les plus fragiles.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Je n’allongerai pas les débats : je dirai simplement que, en ce qui me concerne, je soutiens l’argumentation de Mme la ministre.
Mme Dominique Gillot. Moi aussi !
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. Je soutiendrai bien sûr les amendements en discussion. Il me semble en effet que ce sont des amendements de précision et de clarification.
On sait les craintes qu’ont nos viticulteurs – ils nous le rappellent souvent – du fait de ce problème de publicité ou de promotion.
Alors, je pense que c’est une bonne chose de clarifier la situation. Je vais vous citer un exemple. Je viens de me prêter à une émission, comme d’autres collègues avant moi, sur Public Sénat : Manger, c’est voter, avec Périco Légasse. On a bien montré nos paysages, on a montré des caves et on a aussi montré la gastronomie, avec des bouteilles sur la table.
Alors, premièrement, madame la ministre, est-ce que l’on pourra faire cela demain ? Il est tout de même important pour les viticulteurs de le savoir !
Deuxièmement, quitte à pousser le raisonnement jusqu’au ridicule, je me demande si, demain, sur nos menus, on pourra encore inscrire « Poulet au vin jaune » ? Car ce fleuron de la gastronomie franc-comtoise est aussi, d’une certaine façon, une incitation à consommer de l’alcool ! (Sourires.)
Mme Laurence Cohen. C’est de la caricature !
M. Gérard Bailly. Je rappelle d’ailleurs que nous demandons l’inscription de notre gastronomie au patrimoine de l’UNESCO !
Et puis, dimanche dernier, je regardais la messe télévisée, retransmise depuis Arbois. C’était le Biou, la fête de la viticulture. Pourra-t-on encore suivre cette tradition ?
Alors, pour toutes ces raisons, je pense que ces amendements sont excellents. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Cohen. Lamentable !
Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Vive l’Alsace !
M. André Reichardt. Je ne vais naturellement pas allonger le débat…
Mme Laurence Cohen. Mais si !
M. André Reichardt. Tout a été dit. Néanmoins, je ne comprends pas les difficultés qui naissent à propos d’amendements dont il faut tout de même relativiser la portée.
En aucun cas il ne s’agit de revenir sur la loi Évin, de négliger les 50 000 morts par an dont on parlait tout à l’heure ou encore de nier l’importance qui s’attache à la lutte contre l’alcoolisme. Il s’agit simplement ici de faire échec à l’interprétation faite de la loi par certains juges qui considèrent qu’on ne peut pas faire de distinguo entre la promotion et la publicité.
Nous entendons simplement clarifier les choses : alors, ne nous opposons pas sur un point qui, en fin de compte, est tout à fait technique.
Mme Laurence Cohen. Et la santé publique ?
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je crois que, parmi tous nos collègues qui ont cosigné ces amendements, aucun ne nie les dangers de l’excès d’alcool.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier la géographie. Je pense au terroir, auquel nous sommes toutes et tous très attachés.
À un moment, il faut surtout que le bon sens l’emporte, pour parvenir à un bon compromis et ne pénaliser personne.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 31 rectifié quinquies, 32 rectifié, 410 rectifié et 859 rectifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et celui du Gouvernement, défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 246 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 320 |
Pour l’adoption | 287 |
Contre | 33 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Laurence Cohen. Quelle honte ! C’est une loi de santé publique !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Bien entendu, par principe, je prends acte du résultat de ce vote. Je le fais cependant avec une grande déception et une grande préoccupation. (Exclamations moqueuses sur quelques travées du groupe Les Républicains.)
Pour ma part, j’assume mes responsabilités et je reste déterminée.
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Nous aussi !
Mme Marisol Touraine, ministre. Parce que c’est la mission qui m’a été confiée, je continuerai d’alerter sur les enjeux de santé publique dans ce pays. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)
Article 4 bis
(Suppression maintenue)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
8
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
9
Conférence des présidents
M. le président. La conférence des présidents, réunie ce soir, a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Seconde session extraordinaire 2014-2015
Mercredi 16 septembre 2015
À 14 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé (texte de la commission, n° 654, 2014-2015)
À 21 heures 30 et la nuit :
2°) Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur l’accueil des réfugiés en France et en Europe, en application de l’article 50-1 de la Constitution
(La conférence des présidents a décidé de fixer, à raison d’un orateur par groupe, à quinze minutes le temps attribué au groupe Les Républicains ainsi qu’au groupe socialiste et républicain et à dix minutes le temps attribué à chacun des autres groupes politiques, l’orateur des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 16 septembre, à midi.)
3°) Suite de l’ordre du jour de l’après-midi
En outre, de 14 heures 30 à 15 heures :
Scrutin pour l’élection d’un membre titulaire représentant la France à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en remplacement de M. Jean-Marie Bockel (Ce scrutin secret se déroulera, pendant la séance, dans la salle des Conférences.)
Jeudi 17 septembre 2015
À 10 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi de modernisation de notre système de santé
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur France 3 et Public Sénat)
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.)
À 16 heures 15 et le soir :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin
Vendredi 18 septembre 2015
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de modernisation de notre système de santé
Lundi 28 septembre 2015
À 10 heures :
1°) Suite du projet de loi de modernisation de notre système de santé
À 14 heures 30, le soir et la nuit :
2°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord entre la République française et l’Union européenne visant à l’application, en ce qui concerne la collectivité de Saint-Barthélemy, de la législation de l’Union sur la fiscalité de l’épargne et la coopération administrative dans le domaine de la fiscalité (n° 418, 2014-2015)
(La conférence des présidents a fixé à trente minutes la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 25 septembre, à 17 heures.)
3°) Projet de loi autorisant l’approbation de la décision du Conseil du 26 mai 2014 relative au système des ressources propres de l’Union européenne (n° 552, 2014-2015)
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 25 septembre, à 17 heures.)
4°) Suite de l’ordre du jour du matin
Mardi 29 septembre 2015
À 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi de modernisation de notre système de santé
Mercredi 30 septembre 2015
À 14 heures 30 et le soir :
1°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie sur le règlement des obligations complémentaires liées à la cessation de l’accord du 25 janvier 2011 relatif à la coopération dans le domaine de la construction de bâtiments de projection et de commandement (Procédure accélérée ; A.N., n° 3039)
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 29 septembre, à 17 heures.)
2°) Suite du projet de loi de modernisation de notre système de santé
3°) Clôture de la seconde session extraordinaire 2014-2015
Session ordinaire 2015-2016
SEMAINES RÉSERVÉES PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Jeudi 1er octobre 2015
À 10 heures 30 :
1°) Ouverture de la session ordinaire 2015-2016
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
2°) Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’actualisation du droit des outre-mer ou nouvelle lecture
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 30 septembre, à 17 heures.)
3°) Suite du projet de loi de modernisation de notre système de santé
À 15 heures :
4°) Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur France 3 et Public Sénat)
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.)
À 16 heures 15 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
5°) Suite de l’ordre du jour du matin
Éventuellement vendredi 2 octobre 2015
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite et fin de l’examen des articles du projet de loi de modernisation de notre système de santé
Lundi 5 octobre 2015
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 16 heures :
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre (texte de la commission, n° 682, 2014-2015)
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 2 octobre, à 17 heures.)
Mardi 6 octobre 2015
SCRUTIN SOLENNEL (explications de vote et vote)
À 15 heures 15 :
1°) Explications de vote des groupes sur le projet de loi de modernisation de notre système de santé
(La conférence des présidents a fixé, à raison d’un orateur par groupe, à sept minutes le temps attribué à chaque groupe politique, l’orateur des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 5 octobre, à 17 heures.)
De 16 heures à 16 heures 30 :
2°) Vote par scrutin public sur le projet de loi de modernisation de notre système de santé
(La conférence des présidents a décidé que le scrutin public serait organisé en salle des Conférences pendant une durée de trente minutes à l’issue des explications de vote, en application du chapitre XV bis de l’Instruction générale du Bureau.)
À 16 heures 30 :
3°) Proclamation du résultat du scrutin public sur le projet de loi de modernisation de notre système de santé
À 16 heures 45 :
4°) Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat)
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 12 heures 30.)
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 17 heures 45 :
5°) Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur la situation et l’avenir de l’agriculture, en application de l’article 50, alinéa 1, de la Constitution
(La conférence des présidents a fixé à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 5 octobre, à 17 heures.)
Le soir :
6°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au droit des étrangers en France (n° 655, 2014-2015)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 30 septembre matin (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 28 septembre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 5 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 5 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 7 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
Mercredi 7 octobre 2015
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi relatif au droit des étrangers en France
Jeudi 8 octobre 2015
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 10 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
1°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et la République d’Afrique du Sud, d’autre part, modifiant l’accord sur le commerce, le développement et la coopération (n° 561, 2014-2015)
2°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord de partenariat économique d’étape entre la Côte d’Ivoire, d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part (n° 560, 2014-2015)
(Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a décidé de recourir à la procédure simplifiée. Selon cette procédure, les projets de loi sont directement mis aux voix par le président de séance. Toutefois, un groupe politique peut demander, au plus tard le mardi 6 octobre, à 17 heures, qu’un projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle.)
3°) Suite du projet de loi relatif au droit des étrangers en France
Éventuellement, vendredi 9 octobre 2015
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi relatif au droit des étrangers en France
SEMAINE SÉNATORIALE DE CONTRÔLE
Lundi 12 octobre 2015
À 16 heures :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
1°) Débat sur les conclusions de la commission d’enquête sur le fonctionnement du service public de l’éducation, sur la perte de repères républicains que révèle la vie dans les établissements scolaires et sur les difficultés rencontrées par les enseignants dans l’exercice de leur profession (demande de la commission d’enquête)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de dix minutes à la commission d’enquête ;
- fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 9 octobre, à 17 heures.)
2°) Explications de vote et vote sur la proposition de loi et la proposition de loi organique portant dématérialisation du Journal officiel de la République française, présentées par M. Vincent Eblé et les membres du groupe socialiste et républicain (n° 573, 2014-2015, et n° 572, 2014-2015) (demande du Gouvernement)
(Ces deux textes seront examinés conjointement, conformément à la procédure d’examen en commission selon laquelle le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement s’exerce en commission.
La commission des lois se réunira pour l’examen des amendements, l’adoption du rapport et l’élaboration des deux textes le mercredi 7 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 5 octobre, à 12 heures).
Lors de la séance publique, pourront intervenir le Gouvernement, le rapporteur de la commission des lois pendant dix minutes et, pour explications de vote, communes aux deux textes, un représentant par groupe pendant sept minutes, ainsi qu’un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe pendant trois minutes.)
Le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement (en application de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution) :
3°) Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la protection de l’enfant (n° 444, 2014-2015)
(La commission des affaires sociales se réunira pour le rapport le mercredi 7 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 5 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 9 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 12 octobre, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des affaires sociales se réunira pour examiner les amendements de séance les lundi 12 octobre, en fin d’après-midi, et mardi 13 octobre, en début d’après-midi.)
Mardi 13 octobre 2015
À 9 heures 30 :
1°) Vingt-cinq questions orales
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 1132 de M. Christian Cambon à Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche
(Désert médical dans les établissements scolaires)
- n° 1160 de M. Antoine Lefèvre à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche
(Lignes ferroviaires dans l’Aisne)
- n° 1167 de Mme Dominique Estrosi Sassone à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche
(Fermeture de la base régionale d’Air France à Nice)
- n° 1178 de Mme Catherine Morin-Desailly à Mme la ministre de la culture et de la communication
(Situation des conservatoires et des écoles de musique)
- n° 1179 de M. Martial Bourquin à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social
(Application des conventions collectives au sein des entreprises d’insertion)
- n° 1181 de M. Jean-Pierre Vial à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique
(Brevets industriels Carbone Savoie)
- n° 1184 de M. François Bonhomme à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social
(Coût du traitement social du chômage)
- n° 1185 de M. Jean-Claude Carle à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité
(Communes et obligations de production de logements sociaux)
- n° 1191 de M. Jean Bizet transmise à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique
(Conséquences pour le personnel retraité de la restructuration de l’entreprise Areva)
- n° 1192 de Mme Evelyne Yonnet à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité
(Projet d’aménagement du parc Georges Valbon à la Courneuve)
- n° 1193 de M. Roland Courteau à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Mer Méditerranée et héritage des pollutions passées)
- n° 1194 de Mme Patricia Morhet-Richaud à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche
(Avenir du train de nuit Paris-Briançon)
- n° 1197 de M. Jean-Léonce Dupont à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes
(Accès au revenu de solidarité active)
- n° 1201 de M. Gilbert Roger à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche
(Nuisances du trafic aérien de l’aéroport de Genève)
- n° 1203 de Mme Nicole Bonnefoy à M. le ministre de l’intérieur
(Port de gilets de haute visibilité par les élèves usagers de transports scolaires)
- n° 1204 de Mme Anne-Catherine Loisier à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Continuité écologique des cours d’eau)
- n° 1206 de M. Michel Savin à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique
(Communes nouvelles et classement touristique)
- n° 1207 de M. Joël Guerriau à M. le ministre de l’intérieur
(Politique gouvernementale de sécurité en milieu rural)
- n° 1209 de Mme Delphine Bataille à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Maîtrise de l’urbanisation autour des sites nucléaires)
- n° 1211 de Mme Michelle Demessine à M. le ministre de l’intérieur
(Accueil collectif des mineurs en refuge)
- n° 1214 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement
(Rémunération des assistants d’éducation dans l’enseignement technique agricole)
- n° 1216 de Mme Catherine Deroche à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Difficultés entre collectivités locales et Eco-DDS)
- n° 1219 de Mme Laurence Cohen à M. le ministre de l’intérieur
(Contrôles au faciès)
- n° 1226 de M. Alain Duran à M. le ministre des finances et des comptes publics
(Fermetures de perceptions en Ariège)
- n° 1250 de M. Hervé Maurey à M. le secrétaire d’État chargé du budget
(« Pacte financier » pour les communes nouvelles créées après le 1er janvier 2016)
SCRUTIN SOLENNEL (explications de vote et vote)
À 14 heures 30 :
2°) Explications de vote des groupes sur le projet de loi relatif au droit des étrangers en France
(La conférence des présidents a fixé, à raison d’un orateur par groupe, à sept minutes le temps attribué à chaque groupe politique, l’orateur des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 12 octobre, à 17 heures.)
De 15 heures 15 à 15 heures 45 :
3°) Vote par scrutin public sur le projet de loi relatif au droit des étrangers en France
(La conférence des présidents a décidé que le scrutin public serait organisé en salle des Conférences pendant une durée de trente minutes à l’issue des explications de vote, en application du chapitre XV bis de l’Instruction générale du Bureau.)
À 15 heures 45 :
4°) Proclamation du résultat du scrutin public sur le projet de loi relatif au droit des étrangers en France
À 16 heures :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement (en application de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution) :
5°) Suite de la deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la protection de l’enfant
À 18 heures :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
6°) Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 15 et 16 octobre (demande de la commission des affaires européennes)
(La conférence des présidents a décidé d’attribuer, à la suite de l’intervention liminaire du Gouvernement de dix minutes, un temps d’intervention :
- de huit minutes à chaque groupe (cinq minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe) ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 12 octobre, à 17 heures ;
- puis, de huit minutes à la commission des finances, à la commission des lois et à la commission des affaires européennes.
À la suite de la réponse du Gouvernement, les sénateurs pourront, pendant une heure, prendre la parole (deux minutes maximum) dans le cadre d’un débat spontané et interactif comprenant la possibilité d’une réponse du Gouvernement ou de la commission des affaires européennes.)
Le soir et la nuit :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement (en application de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution) :
7°) Suite de la deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la protection de l’enfant
Mercredi 14 octobre 2015
À 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
1°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (n° 794, 2013-2014) (demande du Gouvernement)
2°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’amendement à la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, pris par décision II/1 adoptée dans le cadre de la deuxième réunion des Parties à la convention (n° 482, 2014-2015) (demande du Gouvernement)
3°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi autorisant la ratification du protocole pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac (Procédure accélérée) (A.N., n° 2741) (demande du Gouvernement)
(Pour ces trois projets de loi, la conférence des présidents a décidé de recourir à la procédure simplifiée. Selon cette procédure, les projets de loi sont directement mis aux voix par le président de séance. Toutefois, un groupe politique peut demander, au plus tard le lundi 12 octobre, à 17 heures, qu’un projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle.)
Ordre du jour fixé par le Gouvernement (en application de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution) :
4°) Éventuellement, suite de la deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la protection de l’enfant
5°) Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes (n° 565, 2014-2015)
(La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable se réunira pour le rapport le mercredi 7 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 5 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 13 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 12 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
6°) Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées (n° 519, 2014-2015)
(La commission spéciale se réunira pour le rapport le mercredi 7 octobre en début d’après-midi (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 5 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 13 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 12 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission spéciale se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 14 octobre en début d’après-midi.)
Jeudi 15 octobre 2015
Éventuellement, à 10 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement (en application de l’article 48, alinéa 3, de la Constitution) :
1°) Suite de la deuxième lecture de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur France 3 et Public Sénat)
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.)
À 16 heures 15 :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
2°) Débat sur le thème : « La politique étrangère de la France : quelle autonomie pour quelle ambition ? » (demande de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de dix minutes à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ;
- fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 14 octobre, à 17 heures.)
SEMAINE SÉNATORIALE
Mardi 20 octobre 2015
À 14 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
1°) Proposition de loi visant à rendre effective l’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact avec des mineurs lorsqu’une personne a été condamnée pour des agressions sexuelles sur mineur, présentée par Mme Catherine Troendlé et plusieurs de ses collègues (n° 437, 2014-2015) (demande du groupe Les Républicains)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 19 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 19 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements de séance le mardi 20 octobre matin.)
À 16 heures 45 :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat)
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 12 heures 30.)
À 17 heures 45 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
3°) Suite de la proposition de loi visant à rendre effective l’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact avec des mineurs lorsqu’une personne a été condamnée pour des agressions sexuelles sur mineur (demande du groupe Les Républicains)
Mercredi 21 octobre 2015
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste et républicain :
1°) Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique et sociale (n° 489, 2014-2015)
(La commission de la culture se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 20 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 19 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission de la culture se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
2°) Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre (n° 376, 2014-2015)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 20 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 19 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
De 18 heures 30 à 20 heures et de 21 heures 30 à minuit :
Ordre du jour réservé au groupe écologiste :
2°) Proposition de résolution visant à la promotion de mesures de prévention et de protection des déplacés environnementaux présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par Mme Esther Benbassa et les membres du groupe écologiste (n° 632, 2014-2015)
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 20 octobre, à 17 heures. Les interventions des orateurs vaudront explications de vote.)
3°) Proposition de loi relative à la suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique, présentée par M. André Gattolin et les membres du groupe écologiste (n° 656, 2014-2015)
(La commission de la culture se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 20 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 19 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission de la culture se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
Jeudi 22 octobre 2015
À 10 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
1°) Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, tendant à clarifier la procédure de signalement de situations de maltraitance par les professionnels de santé (n° 517, 2014-2015 ; demande du groupe Les Républicains)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 21 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 19 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
2°) Explications de vote et vote sur la proposition de loi organique, modifiée par l’Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy (deuxième lecture ; n° 518, 2014-2015 ; demande du groupe Les Républicains)
(Ce texte sera examiné conformément à la procédure d’examen en commission selon laquelle le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement s’exerce en commission.
La commission des lois se réunira pour l’examen des amendements, l’adoption du rapport et l’élaboration d’un texte le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures.)
Lors de la séance publique, pourront intervenir le Gouvernement, le rapporteur de la commission des lois pendant dix minutes et, pour explications de vote, un représentant par groupe pendant sept minutes, ainsi qu’un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe pendant trois minutes.)
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe UDI-UC :
3°) Proposition de résolution pour le soutien au plan d’électrification du continent africain : « plan Électricité – Objectif 2025 » présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par M. Jean-Marie Bockel et plusieurs de ses collègues (n° 540, 2014-2015)
(La conférence des présidents fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 21 octobre, à 17 heures. Les interventions des orateurs vaudront explications de vote.)
4°) Proposition de loi visant à instaurer des contrats territoriaux de développement rural présentée, le 28 mai 2015, par M. Pierre Jarlier et plusieurs de ses collègues (n° 470, 2014-2015)
(La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 21 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 19 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
Éventuellement, à 18 heures 30 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
5°) Suite de l’ordre du jour du matin
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Lundi 26 octobre 2015
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 16 heures et le soir :
1°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public (Procédure accélérée ; A.N., n° 3037)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 19 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 23 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 26 octobre, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements de séance le lundi 26 octobre après-midi.)
2°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la prévention des risques (Procédure accélérée ; A.N., n° 2982)
(La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 12 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 23 octobre, à 17 heures ;
- au jeudi 22 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable se réunira pour examiner les amendements de séance le lundi 26 octobre après-midi.)
Mardi 27 octobre 2015
À 9 heures 30 :
1°) Questions orales
À 14 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
2°) Projet de loi constitutionnelle autorisant la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires (n° 662, 2014-2015)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 14 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].
La conférence des présidents a fixé :
- à deux heures trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 26 octobre, à 17 heures ;
- au jeudi 22 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements de séance le mardi 27 octobre matin.)
Le soir et, éventuellement, la nuit :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Sous réserve de sa transmission, proposition de loi relative aux mesures de surveillance des communications électroniques internationales (Procédure accélérée ; A.N., n° 3042)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 19 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 26 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 26 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements de séance le mardi 27 octobre matin.)
Mercredi 28 octobre 2015
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 et le soir :
- Sous réserve de sa transmission, deuxième lecture du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement (A.N., n° 2674)
(La commission des affaires sociales se réunira pour le rapport le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 19 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 27 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 26 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des affaires sociales se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 28 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
Jeudi 29 octobre 2015
À 10 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part (n° 559, 2014-2015)
(Pour ce projet de loi, la conférence des présidents a décidé de recourir à la procédure simplifiée. Selon cette procédure, le projet de loi est directement mis aux voix par le président de séance. Toutefois, un groupe politique peut demander, au plus tard le mardi 27 octobre, à 17 heures, que le projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle.)
2°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord multilatéral entre autorités compétentes concernant l’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers (n° 651, 2014-2015)
(La conférence des présidents a fixé à trente minutes la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 28 octobre, à 17 heures.)
3°) Suite de la deuxième lecture du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement
4°) Sous réserve de sa transmission, deuxième lecture de la proposition de loi créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie (A.N., n° 2887)
(La commission des affaires sociales se réunira pour le rapport le mercredi 21 octobre matin [réunion législative du mercredi matin] (délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 19 octobre, à 12 heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 28 octobre, à 17 heures ;
- au lundi 26 octobre, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La commission des affaires sociales se réunira pour examiner les amendements de séance le mercredi 28 octobre matin [réunion législative du mercredi matin].)
À 15 heures :
4°) Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur France 3 et Public Sénat)
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.)
À 16 heures 15 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
5°) Suite de l’ordre du jour du matin
Mardi 3 novembre 2015
SCRUTIN SOLENNEL (explications de vote et vote)
À 15 heures 15 :
1°) Explications de vote des groupes sur l’ensemble du projet de loi constitutionnelle autorisant la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires*
(La conférence des présidents a fixé, à raison d’un orateur par groupe, à sept minutes le temps attribué à chaque groupe politique, l’orateur des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 2 novembre, à 17 heures.)
De 16 heures à 16 heures 30 :
2°) Vote par scrutin public sur l’ensemble du projet de loi constitutionnelle autorisant la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires*
(La conférence des présidents a décidé que le scrutin public serait organisé en salle des Conférences pendant une durée de trente minutes à l’issue des explications de vote, en application du chapitre XV bis de l’Instruction générale du Bureau.)
À 16 heures 30 :
3°) Proclamation du résultat du scrutin public sur l’ensemble du projet de loi constitutionnelle autorisant la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires
À 16 heures 45 :
4°) Questions d’actualité au Gouvernement (Diffusion en direct sur Public Sénat)
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 12 heures 30.)
Y a-t-il des observations sur les propositions de la conférence des présidents relative à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui résultant des inscriptions prioritaires du Gouvernement ?...
Ces propositions sont adoptées.
10
Modernisation de notre système de Santé
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre Ier, à l’article 5.
Article 5
(Non modifié)
I A. – À l’avant-dernier alinéa de l’article L. 2133-1 du code de la santé publique, après le mot : « conditions », sont insérés les mots : « de révision régulière de l’information à caractère sanitaire et ».
I. – Le chapitre II du titre unique du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 3232-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-8. – Afin de faciliter le choix du consommateur au regard de l’apport en énergie et en nutriments à son régime alimentaire, sans préjudice des articles 9, 16 et 30 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) n° 1924/2006 et (CE) n° 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) n° 608/2004 de la Commission, la déclaration nutritionnelle obligatoire prévue par le même règlement peut être accompagnée d’une présentation ou d’une expression complémentaire au moyen de graphiques ou de symboles, dans les conditions prévues à l’article 35 dudit règlement.
« Les modalités selon lesquelles les recommandations de l’autorité administrative prévues au 2 du même article 35 sont établies et font l’objet d’une évaluation sont définies, après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, par décret en Conseil d’État. »
II. – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un article L. 112-13 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-13. – Les conditions dans lesquelles la déclaration nutritionnelle obligatoire prévue par le règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) n° 1924/2006 et (CE) n° 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) n° 608/2004 de la Commission peut être accompagnée d’une présentation ou d’une expression complémentaire sont fixées à l’article L. 3232-8 du code de la santé publique. »
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'article 5 a trait à l’information nutritionnelle complémentaire facultative sur les emballages alimentaires.
Aussi Paul Vergès a-t-il souhaité saisir cette occasion pour revenir sur un sujet qui le préoccupe particulièrement et sur lequel, en 2013, une proposition de loi visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire en outre-mer avait été adoptée par le Parlement, et à l’unanimité au Sénat. Ce texte portait notamment sur la teneur en sucres des produits alimentaires distribués outre-mer et fabriqués outre-mer.
Si, pour les produits vendus outre-mer, on a fait le nécessaire, cela fait maintenant plus de deux ans que le Gouvernement doit prendre un arrêté visant à limiter la teneur en sucres des produits fabriqués outre-mer. Et rien n’arrive...
Pourtant, le texte initial de la proposition de loi était clair : « Un arrêté du ministre chargé de la santé fixe, après avis du Haut Conseil de la santé publique, la liste des denrées alimentaires de consommation courante distribuées dans les régions d’outre-mer soumises à une teneur maximale en sucres et les teneurs y afférentes. »
Or, lors de l’examen à l'Assemblée nationale, M. Victorin Lurel, alors ministre des outre-mer, avait déposé un amendement tendant à prévoir que les ministres chargés de l’agriculture et de la consommation soient aussi signataires de l’arrêté : « Il est tout à fait fondé qu’ils contresignent l’arrêté prévu audit alinéa, puisque nous sommes bien dans des matières relatives à la consommation et à l’agroalimentaire. » Malheureusement, l’allongement des délais nécessaires à la publication de l’arrêté était prévisible.
En septembre 2015, c'est-à-dire aujourd'hui, l’arrêté n’est toujours pas signé. Pis, la situation s’est considérablement complexifiée. En effet, l’arrêté était prêt ; plusieurs ministres l’ont signé, mais un ministère ne l’a toujours pas fait, le vôtre, madame la ministre, celui des affaires sociales et de la santé !
C’est donc pour progresser sur cette question que nous avons déposé un amendement, que je défendrai tout à l’heure.
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l'article.
M. Maurice Antiste. Madame la ministre, j’avais déposé un amendement d’appel au titre de la prévention, du traitement et de la lutte contre la dénutrition, notamment au travers du suivi nutritionnel des établissements d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes, en vous demandant, dans les six mois suivant la publication de la présente loi, un décret qui définirait les modalités d’application de l’article L. 3232-10 concernant le suivi nutritionnel des établissements d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes.
Ce décret donnerait compétence aux agences régionales de santé pour contrôler chaque année le respect de ces obligations par les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et relever tout manquement éventuel.
Il est nécessaire, selon moi, d’inscrire la prévention de la dénutrition comme priorité de la politique de santé publique et le suivi nutritionnel des établissements d’hébergement des personnes âgées comme principe législatif.
Le principe législatif d’équilibre alimentaire et les recommandations pour un suivi nutritionnel dans les établissements doivent faire l’objet d’obligations réglementaires précises, et un contrôle régulier du respect de ces obligations doit être mis en place pour que soit assurée une réelle mission de veille et de sécurité sanitaire.
En effet, d’après un rapport de 2005 du Conseil national de l’alimentation, jusqu’à 38 % des résidents seraient touchés par la dénutrition, alors même que ces établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou EHPAD, disposent d’axes de recommandations définis par les autorités sanitaires et les groupes d’experts, qui permettent d’éviter la dénutrition en veillant au respect des rythmes et de l’équilibre alimentaires, ainsi qu’au suivi de l’état de santé nutritionnel des résidents.
Une récente étude de l’UFC-Que Choisir pointe d’ailleurs du doigt une qualité nutritionnelle aléatoire, des rythmes de repas trop resserrés sur la journée et un suivi nutritionnel insuffisant.
Nous devons inciter les professionnels, dans les établissements, à mieux respecter le principe législatif d’équilibre alimentaire prévu par l’article D. 230-29 du code rural et de la pêche maritime, ainsi que les recommandations de suivi nutritionnel reposant sur trois axes essentiels à la prévention de la dénutrition : respecter les rythmes alimentaires particuliers des personnes âgées, fournir une alimentation de bonne qualité – nutritionnelle et gustative – et suivre l’état nutritionnel de chaque pensionnaire.
Je considère que ce sujet revêt une certaine importance et qu’il est urgent, d’où mon intervention. J’insiste, madame la ministre, afin que vous interveniez sur ce thème.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 575 est présenté par M. Lemoyne.
L'amendement n° 830 rectifié bis est présenté par M. Raison, Mme Hummel, MM. Commeinhes, Longuet et Lefèvre, Mme Deromedi, M. Joyandet, Mme Morhet-Richaud et MM. Lenoir, Charon, Laménie et Gremillet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
I. – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un article ainsi rédigé :
II. – Alinéa 3
Remplacer la référence :
Art. L. 3232-8
par la référence :
Art. L. 112-13
III. – Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour présenter l’amendement n° 575.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Il s’agit en quelque sorte d’un amendement de cohérence.
L’article 5 traite de l’information nutritionnelle complémentaire facultative sur les emballages alimentaires. Or, tel qu’il est rédigé, cet article renvoie, dans les paragraphes IA et I, au code de la santé publique, et dans le paragraphe II, au code de la consommation, un renvoi au code de la santé publique étant même prévu in fine.
Dans un souci de lisibilité qui est cher, me semble-t-il, au Gouvernement tout entier, le Premier ministre, ainsi d'ailleurs que le chef de l’État, appelant de ses vœux un « choc de simplification », il serait bon que l’ensemble des dispositions relatives au mode de présentation et d’étiquetage soient regroupées dans un même texte.
Or il se trouve que le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code de la consommation regroupe toutes ces règles. Il serait donc quelque peu incongru que la règle spécifique à l’information nutritionnelle complémentaire soit la seule à ne pas figurer dans cette partie du code de la consommation et soit renvoyée à un autre code.
Mon amendement a pour objet de rétablir une lisibilité, une cohérence. On sait combien sont importants ces débats qui traversent la société. Un travail considérable est par exemple en cours sur le code du travail. En fait, il importe que nous fassions tous un effort en amont pour éviter la complexification et l’éparpillement de normes sur un même sujet dans différents codes. Cela commence ici, par l’élaboration de la loi !
Il me semblerait de bon aloi que nous puissions rectifier l’article 5 ainsi que je le propose. Cela n’enlève rien au fond de cette disposition qui, naturellement, reste définie et applicable, comme le souhaite le Gouvernement. Toutefois, en termes de compréhension des règles par les acteurs qui doivent l’appliquer, cela semble de meilleure politique.
J’avais cru comprendre d'ailleurs que Mme Deroche ne trouvait pas une telle mesure inenvisageable...
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission des affaires sociales. J’y étais défavorable !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Même si la commission avait émis un avis plutôt défavorable, elle semblait ouverte à la discussion en séance.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour présenter l'amendement n° 830 rectifié bis.
M. Michel Raison. Je vais développer de façon plus brève les mêmes arguments que mon collègue Jean-Baptiste Lemoyne, avec qui je suis parfaitement d’accord.
Nous, parlementaires, devons être très attentifs à ne pas nous enfermer dans une sorte d’excès de langage administratif, un jeu intellectuel auquel nous sommes parfois tentés de nous abandonner.
À y regarder de plus près, on s’aperçoit en effet que, dans un certain nombre de textes, on complique les choses, notamment par des renvois de code à code. Or ce n’est pas ce qu’attendent de nous ceux qui nous ont élus. Ils nous demandent de simplifier leur vie quotidienne, notamment par une meilleure lisibilité des textes. S’ils ne sont pas opposés à l’application d’un certain nombre de mesures nouvelles, ils demandent qu’une simplification de toutes ces normes soit mise en œuvre.
Tel est l’objet de cet amendement, qui vise à améliorer le texte, en opérant une véritable simplification.
Je sais, madame la ministre, que vous êtes très impliquée dans votre texte. Même si nos fonctions et nos méthodes diffèrent, nous partageons la même ambition en matière de santé publique. Nous partageons aussi l’ambition du Président de la République s’agissant du choc de simplification. Pour lui faire plaisir, je vous propose donc de donner un avis favorable à notre amendement ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 1034, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 3232-8. – Afin de faciliter le choix du consommateur au regard de l’apport en énergie et en nutriments à son régime alimentaire, la déclaration nutritionnelle obligatoire prévue par le règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, modifiant les règlements (CE) n° 1924/2006 et (CE) n° 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 87/250/CEE de la Commission, la directive 90/496/CEE du Conseil, la directive 1999/10/CE de la Commission, la directive 2000/13/CE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2002/67/CE et 2008/5/CE de la Commission et le règlement (CE) n° 608/2004 de la Commission est accompagnée d’une présentation ou d’une expression complémentaire au moyen de graphiques ou de symboles, dans les conditions prévues à l’article 35 dudit règlement.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 706, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 3 et 6
Remplacer les mots :
peut être
par le mot :
est
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Comme l’a signalé la commission des affaires sociales, la hausse de la prévalence de l’obésité n’épargne pas la France. Ce phénomène concernait en effet 15 % des adultes en 2012, contre seulement 6,1 % en 1980.
L’article 5 ouvre la possibilité, pour les producteurs et distributeurs du secteur de l’alimentation, conformément au droit européen, de prévoir une information nutritionnelle complémentaire sur les emballages alimentaires au moyen de graphiques ou de symboles.
Les dispositions du présent article devraient être de nature à éclairer les choix du consommateur, sous réserve que l’information complémentaire soit aisément compréhensible et suffisamment discriminante pour l’ensemble des aliments.
Si l’on veut que cette déclaration soit utile, il est indispensable de l’assortir d’une obligation d’information en facilitant la compréhension. La loi fait de cette information une simple faculté ; nous vous proposons d’en faire une obligation. Tel est le sens de cet amendement.
Nous avons conscience que l’article 35 du règlement européen de 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires ne fixe pas l’obligation d’information sur les denrées alimentaires.
Toutefois, nous souhaitons saisir cette occasion pour rappeler que notre réglementation nationale doit tendre à un niveau élevé de protection de la santé et des intérêts des consommateurs, et ce en fournissant à ces derniers les bases à partir desquelles ils peuvent faire un choix et utiliser les denrées alimentaires en toute sécurité, dans le respect, notamment, de considérations sanitaires, économiques, écologiques, sociales et éthiques.
L’information obligatoire sur les denrées alimentaires date seulement de 2004 ; il paraît normal que la prochaine étape soit l’information nutritionnelle.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 146 rectifié est présenté par MM. Commeinhes, Calvet et Charon, Mmes Deromedi et Hummel, M. Houel et Mme Mélot.
L'amendement n° 1036 est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 3
Remplacer les mots :
d’une présentation ou d’une expression complémentaire au moyen de graphiques ou de symboles, dans les conditions prévues par l’article 35 dudit règlement
par les mots :
d’un dispositif coloriel complémentaire défini au deuxième alinéa
II. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Afin de répondre aux exigences de l’article 35 du règlement précité, ce dispositif coloriel est élaboré sous l’égide du ministre chargé des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes en concertation avec l’ensemble des parties prenantes, sur la base des études et recommandations formulées dans le cadre de la stratégie nationale de santé. Ces modalités de mise en œuvre et d’évaluation sont définies après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. François Commeinhes, pour défendre l’amendement n° 146 rectifié.
M. François Commeinhes. Si le projet de loi pose bien le principe d’un étiquetage nutritionnel simplifié, les modalités et le format de celui-ci restent encore à définir. Alors que le développement préoccupant en France du surpoids, de l’obésité, du diabète et des maladies cardiovasculaires trouve notamment son origine dans une alimentation trop riche en sucres, en graisses saturées et en sel, il est crucial d’améliorer l’information des consommateurs quant à la qualité nutritionnelle des produits alimentaires.
Dès lors que les divers formats nutritionnels existants nuisent par leur diversité à la compréhension et à la comparaison entre produits, cet amendement vise à consacrer le dispositif coloriel comme modèle national unique d’étiquetage simplifié que les professionnels pourront mettre en place à titre volontaire. Son élaboration se ferait en concertation avec l’ensemble des parties prenantes, sur la base du rapport remis en janvier 2014 à la ministre de la santé dans le cadre de la stratégie nationale de santé.
Ce modèle, qui repose sur une échelle nutritionnelle simple et compréhensible par tous, classant les aliments en cinq classes sous la forme d’une échelle colorielle, assure une grande lisibilité, dont l’efficacité a par ailleurs été récemment démontrée par le test d’une association de consommateurs.
Les précisions apportées par cet amendement visent à répondre aux exigences de l’article 35 du règlement européen n° 1169/2011, qui prévoit que toute mesure de présentation complémentaire se fonde sur de solides études auprès des consommateurs, est le résultat d’une large consultation et vise à faciliter l’identification de l’intérêt nutritionnel des aliments par le consommateur.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l'amendement n° 1036.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement vise à mettre en place un dispositif coloriel complémentaire, tel qu’il est défini au deuxième alinéa.
J’en profite pour revenir sur l’amendement n° 1034, dont je pensais qu’il avait été défendu. L’étiquetage nutritionnel est déjà une avancée importante en termes d’information des consommateurs et de santé publique. L’amendement n° 1034 a problème objet que le recours à cet étiquetage soit non pas simplement une possibilité, mais une obligation, un délai assez long pouvant être envisagé avant la parution des décrets d’application de manière à laisser aux industriels le temps de s’adapter.
M. le président. Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° 861 rectifié est présenté par MM. Barbier, Mézard et Guérini, Mme Malherbe et MM. Requier, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Vall.
L'amendement n° 1158 rectifié bis est présenté par MM. Raison et Commeinhes, Mme Hummel, MM. Longuet, Lefèvre et Joyandet, Mmes Morhet-Richaud et Deromedi et MM. Lenoir, Charon, Laménie, Lemoyne et Gremillet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Après les mots :
et du travail
insérer les mots :
et du Conseil national de l’alimentation
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 861 rectifié.
M. Gilbert Barbier. Cet amendement a pour objet de prévoir les modalités selon lesquelles les recommandations adressées aux producteurs et aux distributeurs seront définies après avis non seulement de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, mais également du Conseil national de l’alimentation, le CNA.
Le Conseil national de l’alimentation est une instance consultative indépendante, placée auprès des ministres chargés de l’agriculture, de la santé et de la consommation. Il est amené à intervenir sur tous les grands débats de l’alimentation, notamment l’information des consommateurs.
Si une bonne information représente un élément fondamental dans la relation de confiance entre les entreprises et les consommateurs, nous devons toutefois rester vigilants dans la mise en place d’un système à destination des consommateurs. Ainsi, de nombreux travaux de l’INRA, de l’INSERM ou du CNA ont montré que des messages prescriptifs pouvaient être mal compris, voire conduire à des comportements opposés à l’effet recherché.
C’est pourquoi l’analyse du CNA serait très utile dans la définition d’un système d’information complémentaire.
M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour présenter l'amendement n° 1158 rectifié bis.
M. Michel Raison. J’abonde dans le sens de mon collègue Gilbert Barbier, élu du Jura. De grâce, veillons à ne pas être contreproductifs dans ce dossier !
Notre gastronomie a été classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, certes en raison de nos productions de qualité, mais surtout pour notre faculté à associer les aliments au sein de menus équilibrés.
Or, avec ce système de couleurs, on veut montrer du doigt chaque produit individuellement, de façon contreproductive selon moi.
Depuis quand un morceau de langres ou de comté serait-il nocif pour la santé ? Évidemment, si vous mangez un kilogramme de comté au cours d’un repas, ce n’est pas terrible ! (Sourires.) Néanmoins, la couleur ne réglera pas le problème. Ce n’est pas non plus une question d’appellations d’origine, car il existe également de très bons produits qui ne sont pas labellisés AOP.
Il faut surtout veiller à l’équilibre de nos menus. Quand vous allez chez votre diététicienne – je suis allé chez la mienne, mais je n’ai pas complètement suivi ses recommandations, ce qui explique sans doute pourquoi je suis moins mince que le président de la commission des affaires sociales (Sourires.) ! –, elle vous apprend à respecter les équilibres, et il n’y a alors aucun problème avec tel ou tel fromage ou tel ou tel morceau de viande.
Certains fromages à 11 % de matière grasse vont ainsi recevoir une étiquette jaune, alors que le comté, fromage de grande qualité s’il en est – je parle sous le contrôle du spécialiste qu’est Gérard Bailly (Nouveaux sourires.) –, sera étiqueté en rouge. Pourtant ce fromage ne pose pas de problème s’il est consommé avec modération, dans le cadre d’un menu équilibré.
J’ajouterai un autre argument pour défendre ces amendements identiques.
Les gens quelque peu attentifs ou peureux vont renoncer à acheter un produit étiqueté en rouge. Toutefois, les catégories les plus touchées par la malnutrition sont aussi les catégories sociales les plus défavorisées. Or ces personnes ne vont pas choisir un produit en fonction de la couleur de son étiquetage nutritionnel, mais en fonction de son prix, en optant pour le produit le moins cher. Si vous mettez du rouge sur un produit, il va moins bien se vendre, son prix va donc baisser et les catégories sociales défavorisées vont en acheter davantage !
Il me semble que ces moyens de défense de nos consommateurs sont contreproductifs. Nous devons plutôt rester très attachés à notre gastronomie française, qui repose sur l’équilibre de nos menus.
Les médecins ici présents savent que nous avons en France un niveau de santé meilleur que dans un certain nombre d’autres pays, où les gens équilibrent mal leurs menus, même s’ils ont dans leurs assiettes des produits plus maigres.
M. le président. L'amendement n° 562, présenté par MM. Roche, Vanlerenberghe et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les recommandations font l’objet d’une expérimentation en conditions réelles d’achat et d’une étude d’impact avant leur publication officielle.
La parole est à M. Gérard Roche.
M. Gérard Roche. L’objet de cet amendement, proche du précédent, est de s’assurer que la signalétique nutritionnelle fera l’objet d’une expérimentation en conditions réelles.
En effet, pour l’heure, aucune expérimentation n’a été conduite auprès des Français sur cette mesure. Ainsi, le système de pastilles de couleur n’a jamais été testé auprès des Français, et encore moins auprès des populations les plus touchées par la fracture alimentaire.
Les études se fondent aujourd’hui sur des hypothèses empiriques et des tests menés sur internet, auprès de publics très avertis. Or l’alimentation est un sujet complexe, qui fait appel non pas seulement à des choix rationnels, mais aussi à des déterminants sociaux, culturels, identitaires et économiques très forts.
Sur un sujet aussi lourd de conséquences, une expérimentation solide, large et réalisée dans des conditions d’achat réelles est essentielle pour éviter à tout prix que les pouvoirs publics et les opérateurs engagés dans la démarche ne soient décrédibilisés par des résultats diamétralement opposés au but recherché.
Si nous voulons tout simplement améliorer l’équilibre alimentaire de la population française, nous devons tout simplement nous donner les moyens et le temps de parfaire le système choisi, quel qu’il soit.
Le Conseil national de l’alimentation a conclu, à l’issue de ses travaux, que cette complexité nécessitait de prendre le temps d’étudier les différentes options possibles et leur impact prévisible dans le contexte français, afin de construire un système pertinent eu égard aux objectifs politiques fixés.
L’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – je remercie Mme Archimbaud de m’avoir éclairé sur ce point tout à l’heure –, a été saisie de la faisabilité du système : elle reconnaît que l’on ne peut présager de la manière dont celui-ci pourrait être compris et utilisé.
Écoutons donc ces instances pour mieux légiférer et être collectivement plus efficaces demain.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements en discussion ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission des affaires sociales. Les amendements identiques nos 575 et 830 rectifié bis visent à rattacher exclusivement le dispositif prévu à l’article 5 au code de la consommation. C’est une option envisageable, mais, pour la commission, l’avantage de la solution actuelle est précisément de rattacher les dispositions de l’article 5 aux enjeux de santé publique liés à la nutrition.
J’ai bien entendu les appels vibrants de notre collègue Michel Raison à la simplification. Toutefois, les renvois opérés dans ce type de textes ne sont pas d’une grande complexité, et je doute que les Français, si l’on adoptait l’amendement, se réjouissent aussitôt et y voient une réelle simplification.
En conséquence, la commission est défavorable à ces deux amendements identiques.
Les amendements nos 1034 et 706, visant à rendre obligatoire la signalétique nutritionnelle complémentaire, ont également reçu un avis défavorable de la commission. En effet, l’article 5 ouvre la possibilité, pour les producteurs et distributeurs du secteur de l’alimentation, conformément au droit européen, de prévoir une information nutritionnelle complémentaire sur les emballages alimentaires. Il nous a semblé important de conserver le caractère facultatif du dispositif.
Les amendements identiques nos 146 rectifié et 1036 visent à mettre en place un dispositif coloriel pour l’étiquetage nutritionnel complémentaire. Or la définition de la signalétique nutritionnelle facultative complémentaire – par exemple, le choix d’un système de couleurs – que le Gouvernement pourra proposer aux producteurs et aux distributeurs relève du décret en Conseil d’État prévu à l’alinéa 2 de l’article L. 3232-8 du code de la santé publique créé à l’article 5 du projet de loi. En conséquence, l'avis de la commission est défavorable.
Les amendements identiques nos 861 rectifié et 1158 rectifié bis ont pour objet la consultation du Conseil national de l’alimentation sur l’étiquetage nutritionnel qui sera adopté.
Cette précision n’apparaît pas utile, car le règlement européen concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires – INCO – impose déjà, à son article 5, que la mise au point des formes d’expression et de présentation complémentaires soit le résultat de la consultation d’un large éventail de groupes d’intérêt et qu’elle se fonde sur de solides études auprès des consommateurs. L’article 5 n’a pas vocation à énumérer l’ensemble des acteurs que le Gouvernement est amené à consulter.
En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Enfin, l’amendement n° 562 tend à ce que la mesure proposée à l’article 5 concernant la possibilité d’un étiquetage nutritionnel complémentaire sur les aliments manufacturés soit ouverte dans le cadre d’une simple expérimentation.
Tout d’abord, le dispositif proposé étant seulement facultatif, prévoir une simple expérimentation n’a pas vraiment de sens. En outre, la mesure a déjà fait l’objet de nombreux travaux scientifiques et sociologiques. Enfin, une simple expérimentation conduirait à retarder l’entrée en vigueur de cette possibilité sur tout territoire, pour l’ensemble du secteur de l’alimentation. Il convient d’ajouter que rien n’empêchera un producteur ou un distributeur, à son échelle, de prévoir une expérimentation du dispositif dans des conditions réelles d’achat.
En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Je voudrais tout d’abord dire quelques mots sur l’esprit de cette disposition et sur son contour, tel que nous le concevons actuellement.
L’enjeu est de donner une meilleure information aux consommateurs. Le surpoids constitue un enjeu de santé publique. En France, environ 17 % de la population adulte est obèse. C’est moins que dans d’autres pays, notamment anglo-saxons, grâce à une politique résolue engagée voilà maintenant treize ans, en 2002, avec le premier programme national nutrition santé, et poursuivie sans discontinuer depuis lors.
Cette politique a permis d’enregistrer des résultats, mais, si nous voulons poursuivre sur cette voie, nous devons être attentifs à prévenir aussi l’apparition de maladies, car le surpoids et l’obésité constituent des facteurs de risque pour de nombreuses pathologies, notamment le diabète, qui, aujourd’hui, selon les spécialistes, fait l’objet d’une véritable « épidémie » dans les pays développés, le nombre de personnes diabétiques augmentant de façon extrêmement rapide et préoccupante.
Dès lors, l’objectif de cet étiquetage nutritionnel, auquel de nombreux autres pays ont réfléchi, est d’apporter une information aux consommateurs.
On parle bien ici de produits transformés, et non de produits du terroir ou directement issus de la production de proximité. Mesdames, messieurs les sénateurs, prenez un paquet d’un produit quelconque : les informations nutritionnelles qui y figurent sont très nombreuses. Néanmoins, la plupart d’entre nous, qui n’avons pas de compétences particulières en matière de médecine ou de nutrition, ne sont pas capables de faire la synthèse d’informations concernant le sel, le sucre, le gras, etc. L’idée est donc d’apporter une vision globale de la qualité nutritionnelle du produit.
Nous proposons que cet étiquetage soit simple à comprendre et à appliquer, unique, global et immédiatement compréhensible, afin de permettre des comparaisons entre plusieurs produits.
Le dispositif que nous avons conçu est facultatif – je réponds ainsi par avance aux auteurs de certains amendements –, ce qui rend inutile la conduite d’expérimentations. Les industriels qui le souhaiteront s’engageront dans cette démarche, à condition que le dispositif qu’ils appliquent soit celui qui aura été homologué par la puissance publique, afin que l’on puisse comparer les produits les uns avec les autres.
Avant l’été, une revue bien connue, Que choisir ?, a évalué 500 produits sur le marché à partir de l’un des dispositifs d’étiquetage nutritionnels envisagés, qui comprend plusieurs couleurs et qui est sans doute l’un des plus simples et des plus faciles à reconnaître.
Or les résultats de cette étude sont très surprenants : par exemple, certaines lasagnes industrielles affichaient une très bonne couleur, tandis que d’autres ne présentaient pas la même qualité nutritionnelle. Certains goûters pour enfants sont plus recommandables que d’autres. Des poissons avec des légumes, théoriquement très légers, recevaient une étiquette très défavorable, parce que ces plats comprenaient quantité d’additifs qui en rendaient la qualité nutritionnelle beaucoup moins positive.
On va ainsi de surprise en surprise – je vous avoue très sincèrement que cela a été mon cas – pour des produits très connus, de marques très célèbres… Je me suis moi-même aperçue que, depuis des années, je consommais certains produits en pensant qu’ils étaient formidables, alors qu’ils ne l’étaient pas autant que cela, tandis que je m’étais privée pendant des années d’autres produits que je croyais beaucoup moins formidables et qui en réalité auraient été meilleurs. Je me suis donc dit : « Si j’avais su, je ne me serais pas privée de ces produits-là, qui, en théorie, n’étaient pas recommandés, alors qu’ils étaient recommandables en pratique ! »
Afin d’avancer dans cette direction, nous avons mis en place un groupe de réflexion. L’ANSES proposera un dispositif. Des consultations sont menées, auxquelles les consommateurs sont associés. Des intérêts contradictoires se font naturellement entendre ; je crois qu’il est aussi important que les consommateurs, les industriels, évidemment, et les distributeurs soient associés. C’est donc dans cette direction que nous travaillons.
Pour les raisons que je viens d’exposer, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 575 et 830 rectifié bis. En effet, il s’agit bien d’une mesure de santé publique et non simplement d’une mesure de consommation. Il faut guider nos concitoyens vers des choix favorables à leur santé.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 1034, dans la mesure où nous voulons que la démarche soit volontaire, afin que ce dispositif se diffuse progressivement et fasse ses preuves.
Pour la même raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 706.
Le Gouvernement émet de nouveau un avis défavorable sur les amendements identiques nos 146 rectifié et 1036. En effet, leurs auteurs proposent de déterminer immédiatement quel sera le type d’étiquetage nutritionnel.
Je dois dire que je suis personnellement assez sensible aux atouts du dispositif de couleurs. Cependant, encore une fois, il faut le décliner précisément et être capable de dire quels seront les produits concernés. Par exemple, monsieur Raison, il existe aujourd’hui un débat à l’ANSES sur le fromage, pour savoir si celui-ci doit faire l’objet d’un étiquetage spécifique, comme on l’envisage.
Ensuite, le Gouvernement émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 861 rectifié et 1158 rectifié bis. Je l’ai dit : un groupe de travail dont l’industrie alimentaire est partie prenante avec d’autres acteurs se réunit. L’ensemble des acteurs, experts, médecins – aussi bien nutritionnistes que non-nutritionnistes –, industriels, distributeurs, consommateurs, sont consultés.
Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 562. En effet, dès lors que le dispositif n’est pas obligatoire, il n’est pas nécessaire de procéder à des expérimentations.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 575 et 830 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote sur l'amendement n° 1034.
Mme Aline Archimbaud. L’existence de groupes de travail autour de l’ANSES, qui rassemblent les industriels et les consommateurs, me paraît une chose importante.
En effet, dans une démarche de santé publique, on a tout à fait intérêt à identifier des objectifs clairs et à sensibiliser et écouter les industriels, afin de définir des calendriers qui soient à la fois exigeants et réalistes. Par ailleurs, si l’on oublie les consommateurs, on perd un levier d’action important, car des consommateurs avertis et bien informés sont essentiels pour transformer la politique de santé.
Compte tenu des explications données par Mme la ministre, monsieur le président, je retire les amendements nos 1034 et 1036.
M. le président. Les amendements nos 1034 et 1036 sont retirés.
Madame Cohen, l'amendement n° 706 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. À l'évidence, tout un travail est fait au ministère de la santé par plusieurs groupes de travail. Nous n’en doutions pas, mais nous regrettons que ce projet de loi soit présenté sans que ces groupes de travail aient rendu des conclusions que nous aurions pu prendre en compte.
Néanmoins, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 706 est retiré.
Monsieur Commeinhes, l'amendement n° 146 rectifié est-il maintenu ?
M. François Commeinhes. Je suis quelque peu déçu que l’on fasse un amalgame entre l’ensemble des plats ou des produits cuisinés et les produits naturels.
Tout à l’heure, M. Raison évoquait la « bonne bouffe » française, avec des produits bien préparés et bien équilibrés… Je crois que l’évolution de l’obésité chez nos jeunes, ainsi que l’augmentation du nombre de diabétiques en France et des pathologies artério-vasculaires sont le fruit d’une consommation excessive et croissante des produits précuisinés.
Toutefois, si un groupe de travail étudie cette question, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 146 rectifié est retiré.
Monsieur Barbier, l'amendement n° 861 rectifié est-il maintenu ?
M. Gilbert Barbier. Madame la ministre, vous avez énuméré un certain nombre de personnes ou d’organismes qui participent à ces travaux. Nous ne connaissons pas la liste exacte de ces intervenants, mais il semble que le Conseil national de l’alimentation devrait obligatoirement en faire partie.
Ces groupes sont-ils seulement consultés ou une place leur est-elle systématiquement réservée auprès de l’ANSES ? En effet, cette agence travaille aussi de son côté, sans toujours demander l’avis d’experts extérieurs. C’est positif, mais je souhaiterais que le Conseil national de l’alimentation, qui est un organisme indépendant, notamment par rapport aux experts, soit systématiquement et obligatoirement associé à ce travail intéressant, par exemple en vertu de la loi.
Je maintiens donc l’amendement n° 861 rectifié.
M. le président. Monsieur Raison, l'amendement n° 1158 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Michel Raison. Monsieur le président, non seulement je le maintiens, mais encourage mes collègues à le voter ! Je vous assure que l’on est en train de faire une erreur. Au sujet d’un certain nombre de produits de base, on confond les plats préparés avec les repas. Or ces derniers sont faits de l’addition de différents aliments, si possible cuisinés.
De plus en plus de repas ne sont pas pris à domicile, ce qui entraîne une augmentation de l’obésité dans notre pays. Mes chers collègues, vous connaissez les résultats des analyses sociologiques de l’obésité !
On est en train de confondre l’addition des produits qui permet d’équilibrer un repas, comme je l’ai expliqué tout à l’heure, avec les plats préparés. Vous verrez que l’on va montrer du doigt des produits de qualité, qui certes doivent être consommés avec une certaine modération. Pourquoi ne mettrait-on pas tout à coup une étiquette rouge sur le pain, comme on le fera pour certains fromages ? C’est ridicule !
Quand nous faisons des tables rondes au Sénat lorsque survient une crise agricole, tout le monde autour de la table s’exclame : « Il y a trop de normes ! On interdit tout ! On nous infantilise ! ». Tout le monde est d’accord. Pourtant, quand nous sommes dans l’hémicycle, nous votons tous les jours ce genre de mesures. C’est comme cela que notre pays finit par sombrer !
Je maintiens donc mon amendement et j’encourage mes collègues à le voter.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 861 rectifié et 1158 rectifié bis.
M. Gérard Bailly. Je voterai, bien sûr, ces amendements identiques. Je ne vois vraiment pas en quoi, madame la ministre, consulter le Conseil national de l’alimentation peut poser problème. À notre avis, ce ne peut qu’être une bonne chose.
Par ailleurs, on entend tous les jours le ministre de l’agriculture, mais aussi le Président de la République, parler de simplification. Or je ne sais pas si ce dispositif va vraiment simplifier les choses. Le hasard fait que j’ai ici un emballage dans lequel il y avait du fromage ce matin. (M. Gérard Bailly montre une étiquette de fromage.) Or les étiquettes actuelles sont déjà bien longues, et les gens s’y perdent. Toutefois, vous nous direz que, demain, on les simplifiera en mettant des couleurs.
Gare aux produits qui auront une étiquette rouge ! M. Raison m’a tendu la perche en parlant du comté : si vous achetez un comté de cinq mois, celui-ci ne contiendra guère de sel. Deviendra-t-il rouge à sept mois parce qu’il y aura plus de sel, rouge foncé à douze mois et écarlate à quinze ? Il faudra nous expliquer cela ! Jusqu’où nous porteront ces dérives ?
Mes chers collègues, le mieux serait de voter ces amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 861 rectifié et 1158 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Monsieur Roche, l'amendement n° 562 est-il maintenu ?
M. Gérard Roche. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 562 est retiré.
L'amendement n° 1035, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Afin de faciliter l’information du consommateur et de l’aider à choisir en toute connaissance de cause, sans préjudice des articles 21, 22, 23, 24 du règlement (CE) n° 1333/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 sur les additifs alimentaires, l’étiquetage des additifs alimentaires peut être accompagné d’une présentation ou d’une expression complémentaire au moyen de graphiques ou symboles dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Les additifs alimentaires sont des produits ajoutés aux produits alimentaires afin d’en améliorer la conservation, l’aspect, le goût, etc. C’est le cas par exemple des colorants alimentaires, des conservateurs, des émulsifiants, des épaississants, des stabilisants, des gélifiants, des exhausteurs de goût ou encore des édulcorants. Si certains sont réputés inoffensifs pour la santé, d’autres sont au cœur de polémiques et d’autres encore sont réputés dangereux pour la santé.
Aussi, le consommateur a le droit de savoir si les produits qu’il consomme en contiennent ou non. Ils doivent être inscrits sur l’emballage, dans la liste des ingrédients. Classiquement, les additifs sont repérables aux formules débutant par « E » suivi de quelques chiffres sur les emballages alimentaires. Toutefois, de plus en plus souvent, les industriels, qui connaissent la volonté des consommateurs de les éviter, dissimulent les noms des additifs en les présentant directement sous leur nom et non sous leur code en « E ».
À l’heure où l’Autorité européenne de sécurité des aliments cherche à affiner les méthodes d’évaluation des risques associés à une exposition simultanée à des produits chimiques présents dans l’alimentation, cet amendement vise donc à intégrer dès maintenant les additifs alimentaires dans la simplification de l’étiquetage prévue à l’article 5.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet amendement tend à prévoir la possibilité d’un étiquetage complémentaire mentionnant les additifs alimentaires. Or, si la commission a pu se montrer favorable à ce qu’un étiquetage nutritionnel plus simple figure sur les plats préparés ou autres produits alimentaires manufacturés, il lui semble qu’ajouter les additifs dans cet étiquetage serait excessivement compliqué.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. J’émettrai le même avis, à moins que vous ne retiriez votre amendement, madame la sénatrice. Je rappelle que les additifs doivent déjà figurer dans l’étiquetage des produits industriels. Par conséquent, soit votre amendement est satisfait par l’état de la réglementation, soit son adoption tendrait à complexifier davantage l’étiquetage nutritionnel, en ajoutant, dans l’évaluation globale, la prise en compte des additifs.
Je vous suggère donc de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame Archimbaud, l’amendement n° 1035 est-il maintenu ?
Mme Aline Archimbaud. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 1035 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 26 rectifié ter est présenté par Mme Lamure, MM. César et Chasseing, Mme Deromedi, MM. Lemoyne, Chaize, Mouiller et de Legge, Mme Cayeux, M. de Nicolaÿ, Mmes Duchêne et Gruny et M. Husson.
L’amendement n° 311 rectifié ter est présenté par Mmes Génisson, Bataille et Bonnefoy, M. Courteau, Mmes Bricq et Claireaux, M. Daudigny, Mmes Espagnac et Jourda, M. Labazée, Mme Lepage, MM. F. Marc et Masseret, Mme Schillinger, M. Tourenne, Mmes Meunier et Cartron et MM. Rome et Delebarre.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ce même décret peut préciser les catégories de produits d’alimentation particulière pour lesquelles ces informations ne sont pas pertinentes du fait de besoins nutritionnels spécifiques différents de ceux de la population générale. »
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l'amendement n° 26 rectifié ter.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à permettre d’exclure du champ d’application de l’information nutritionnelle, telle qu’elle est décrite dans l’article 5, les denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière.
En effet, certaines populations ont des besoins nutritionnels particuliers, du fait d’un métabolisme ou d’un processus d’assimilation perturbés : ainsi, les nourrissons et enfants en bas âge, les malades et les personnes âgées dénutris, les intolérants à certains constituants comme le gluten, les personnes souhaitant perdre du poids ou le stabiliser, ou encore les grands sportifs.
Des catégories d’aliments sont alors spécifiquement destinées à répondre aux besoins spécifiques de ces populations. Par exemple, le nourrisson a des besoins plus importants que l’adulte en matières grasses, qui doivent être présentes dans les aliments en quantité et en qualité, la personne dénutrie aura besoin d’un aliment hyperprotéiné, etc.
Ces produits font déjà l’objet d’une réglementation spécifique, soit nationale, soit européenne. C’est pourquoi des règles d’information générales seraient susceptibles de brouiller l’information destinée à ces populations, voire d’aller à l’encontre des recommandations particulières édictées par les professionnels de santé.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour présenter l’amendement n° 311 rectifié ter.
Mme Catherine Génisson. Compte tenu des explications que vient de donner notre collègue, je considère que cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 289 rectifié, présenté par Mme Imbert, MM. Longuet, Lefèvre, Mouiller, Mandelli et de Nicolaÿ, Mme Morhet-Richaud, M. D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Lemoyne, Huré et Morisset, Mme Debré, MM. Houel et Raison, Mme Mélot, MM. Laménie et Houpert, Mme Estrosi Sassone, MM. Cornu, Vasselle et A. Marc et Mme Lamure, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ce même décret précise les catégories de produits d’alimentation particulière pour les personnes auxquelles ils sont destinés et pour lesquelles ces informations ne sont pas pertinentes du fait de leurs besoins nutritionnels spécifiques différents de ceux de la population générale. »
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Je souhaiterais seulement apporter une précision. Madame la ministre, j’ai bien compris que, tout à l’heure, en évoquant les « denrées alimentaires », vous pensiez aux produits transformés.
Or le Parlement européen, en 2002, a défini la notion de « denrée alimentaire » en ces termes : « Toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé, destiné […] à être ingéré par l’être humain ». Je me permets ce rappel, compte tenu de l’inquiétude exprimée par notre collègue Michel Raison, et sans pour autant vouloir rouvrir le débat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Il paraît en effet souhaitable à la commission que le décret puisse identifier les catégories de produits pour lesquels l’étiquetage n’est pas pertinent. Nous nous sommes cependant interrogés sur l’intérêt de cette démarche, dans la mesure où il s’agit d’un étiquetage facultatif. Néanmoins, la commission a émis un avis favorable sur les amendements identiques nos 26 rectifié ter et 311 rectifié ter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends parfaitement l’objectif visé par les auteurs de ces trois amendements. Cependant, je suis obligée d’émettre un avis défavorable, pour des raisons juridiques.
Le droit européen impose en effet que nous traitions l’ensemble des produits transformés de la même manière. Ensuite, nous pouvons demander à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, s’il est possible d’envisager des traitements différenciés. Néanmoins, nous ne pouvons pas établir des catégories différentes dans notre droit, dès lors que le droit européen n’en identifie qu’une seule.
Par ailleurs, je tiens à souligner que, l’étiquetage étant facultatif, rien n’interdit à ceux qui fabriquent des produits destinés à des populations particulières, telles que celles que vous avez évoquées, à procéder pas à un tel étiquetage. Ce serait tout à fait légal.
En résumé, je comprends très bien la préoccupation qui vous anime, mais je ne vois pas comment de telles dispositions pourraient tenir juridiquement.
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 26 rectifié ter et 311 rectifié ter.
M. Yves Daudigny. Je veux exprimer mon soutien aux mesures figurant à l’article 5, qui transpose dans notre droit les dispositions européennes visant à réduire les inégalités sociales en matière d’accès à une alimentation équilibrée par l’introduction d’un principe d’information nutritionnelle volontaire sous forme de graphique ou de symbole.
Je soutiens également l’amendement n° 311 rectifié ter dont je suis cosignataire : je précise que le décret pourra tenir compte de la spécificité de produits destinés à une alimentation particulière, qu’il s’agisse, par exemple, des nourrissons ou des grands sportifs.
J’ai bien entendu vos explications, madame la ministre. Mme Génisson nous dira si elle maintient ou non cet amendement. En tout état de cause, nous souhaitons qu’il en soit tenu compte – ce qui va sans dire va parfois mieux en le disant. Outre une vertu de précision, cette précaution peut avoir un effet pédagogique important pour la compréhension et l’acceptabilité d’un dispositif nouveau susceptible de susciter de l’inquiétude.
En l’espèce, le renvoi par l’article 5 à l’article 35 du règlement transposé mérite d’être souligné, puisque ce dernier fixe des conditions préalables d’étude scientifiquement valides, de consultations et de symboles ou graphiques objectifs et non discriminatoires.
Par ailleurs, la Commission européenne doit présenter au Parlement européen et au Conseil, avant le 13 décembre 2017, un rapport sur l’utilisation de ces symboles ou graphiques, sur leurs effets sur le marché intérieur et sur l’opportunité de poursuivre l’harmonisation de ces formes d’expression et de présentation.
Il me semble utile de rappeler la progressivité et la réversibilité de ce qui s’apparente, avec bon sens, à une expérimentation qui pourra être poursuivie si elle se révèle probante.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Je tiens à remercier Mme la ministre de l’attention qu’elle porte à ces amendements. Nous sommes intéressés par de possibles travaux de l’ANSES qui pourraient approfondir le sujet. Je comprends les contraintes imposées par la réglementation européenne, même si des évolutions doivent intervenir avant la fin de l’année, comme vient de le rappeler Yves Daudigny.
Ce sujet est préoccupant et mérite d’être pris en compte. Cependant, compte tenu des explications que Mme la ministre vient de nous donner, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 311 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 26 rectifié ter.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 289 rectifié n’a plus d’objet.
L’amendement n° 705, présenté par M. Vergès, Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Au deuxième alinéa de l’article L. 3232-6 du code de la santé publique, les mots : « des ministres chargés de la santé, de l’agriculture, de la consommation et » sont remplacés par les mots : « du ministre chargé ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Mes chers collègues, dans la continuité de mon intervention sur l’article 5, je vous présente cet amendement au nom de mon groupe. Il tend à préciser qu’un seul ministre est signataire de l’arrêté visant à limiter la teneur en sucre des produits fabriqués et consommés dans les outre-mer.
En effet, depuis 2013, date à laquelle le Parlement a adopté la proposition de loi visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire en outre-mer – je rappelle que le Sénat l’a votée à l’unanimité – tous les arguments ont été avancés pour justifier le retard pris dans ce dossier.
À présent, on nous parle de l’autorisation de la Commission européenne. On nous dit qu’il faut reprendre toute la procédure au motif fallacieux que ce dispositif constituerait peut-être une barrière à l’entrée outre-mer des produits alimentaires.
L’explication avancée ne nous convainc pas : la mesure prise dans cet arrêté ne constitue en rien une barrière à l’entrée sur les territoires des collectivités d’outre-mer. En effet, il n’est pas question de l’importation de produits, mais de la fabrication et de la consommation de produits dans les outre-mer. En quelque sorte, il s’agit d’un soutien aux produits locaux.
Nous n’acceptons pas non plus l’argument avancé pour justifier le retard pris : l’arrêté doit être soumis pour consultation aux professionnels du secteur. Or, depuis 2013, les industriels ultramarins sont sensibilisés.
Dans votre réponse d’avril 2015 à la question écrite du sénateur Vergès, vous affirmez qu’« un arrêté des ministres chargés de la santé, de l’agriculture, de la consommation et de l’outre-mer répertoriant les produits concernés est en cours de concertation » – une concertation avec qui ?
Votre collègue ministre des outre-mer donne une autre explication : « L’arrêté sera notifié en septembre à la Commission européenne, et sa publication sera effective avant la fin de l’année 2015 ».
Vous comprendrez, madame la ministre, l’agacement de notre collègue : entre les tergiversations des différents ministres et leurs déclarations contradictoires, tout porte à croire que cette question n’est pas une priorité ! Pourtant, tout le monde partage le même constat : le diabète est un fléau pour les outre-mer. Sur l’île de la Réunion, par exemple, près de 9 % de la population souffrent de diabète, soit deux fois plus qu’en France métropolitaine.
Madame la ministre, les Ultramarins sont impatients de voir cet arrêté signé !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Le problème soulevé par les auteurs de cet amendement est réel, puisque, depuis 2013, l’arrêté n’est toujours pas pris. J’ai par exemple été consultée par des industriels travaillant outre-mer, auxquels ce retard pose un réel problème.
La commission souhaite donc entendre les explications de Mme la ministre sur les raisons de ce retard.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Tout d’abord, je tiens à dire que le Gouvernement dans son ensemble, et non pas seulement la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes que je suis, n’entend pas revenir sur le caractère interministériel de la démarche, puisque les ministères de l’agriculture, de la consommation, des outre-mer et de la santé sont concernés.
Les deux réponses que vous avez évoquées, madame la sénatrice, ne sont absolument pas contradictoires. D’une part, nous rencontrons des difficultés dans la rédaction de l’arrêté. D’autre part, nous sommes soumis à une obligation de notification à la Commission européenne.
Sur la difficulté rédactionnelle, il existe un consensus de l’ensemble des départements ministériels que j’ai mentionnés, y compris celui des outre-mer. En effet, pour pouvoir affirmer que les produits disponibles outre-mer ne présentent pas un taux de sucre supérieur à celui des produits équivalents disponibles en métropole, encore faut-il pouvoir établir des comparaisons entre des produits similaires.
Or certains produits ne se trouvent que dans les outre-mer. Comment établir alors la comparaison ? Voilà un exemple des difficultés techniques que nous essayons de surmonter et je dois dire que l’ensemble des ministères concernés s’y emploie.
À ce stade, je ne puis que vous demander de bien vouloir retirer votre amendement, madame la sénatrice ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable, car je ne sais pas sur quelles bases techniques le ministère des outre-mer pourrait statuer seul.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. J’ai bien entendu vos explications, madame la ministre. Il existe sans doute des difficultés techniques : les comparaisons sont difficiles, parce que les produits disponibles outre-mer ne se trouvent pas nécessairement en métropole. Cependant, la teneur en sucre est facilement identifiable, et c’est elle qui doit être définie par l’arrêté.
Vous avez également évoqué la notification à la Communauté européenne. Or, comme je l’ai expliqué, les produits concernés sont fabriqués dans les outre-mer et consommés sur place. Je ne vois donc pas en quoi il faudrait consulter la Commission européenne, puisque ces produits n’auront pas à circuler en dehors des territoires où ils sont fabriqués.
Pour reprendre l’exemple donné tout à l'heure par M. Raison, cela reviendrait à devoir obtenir de la Commission européenne les définitions nécessaires à la fabrication du comté. Les producteurs de fromage de notre pays ne seraient sans doute pas satisfaits d’en passer par là, s’agissant de produits fabriqués sur leur territoire ! (M. Gérard Bailly acquiesce.)
Les habitants et les élus des territoires d’outre-mer demandent la mise en place d’une réglementation qui tienne compte de la santé publique – c’est l’objet de ce texte –, en prenant en considération l’obésité, le diabète et toutes les maladies évoquées au cours de ce débat, pour définir le taux de sucre maximal dans les produits qui sont fabriqués et consommés en outre-mer.
Je vous rappelle que nous avons adopté à l’unanimité, ici même, le texte rendant ce décret nécessaire. Au Sénat, le ministre de l’époque, M. Victorin Lurel, avait proposé de ne le faire signer que par un seul ministre. C’est à l’Assemblée nationale, par voie d’amendements, que d’autres ministères ont été ajoutés, ce qui n’a conduit qu’à allonger les délais.
Madame la ministre, j’ai retiré les précédents amendements déposés par notre collègue Paul Vergès, mais celui-ci m’a demandé de maintenir cet amendement, ce que je fais.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.
Mme Aline Archimbaud. J’étais présente lors de la discussion de la loi du 3 juin 2013, et je me souviens qu’il s’agissait bien des mêmes produits qui, lorsqu’ils étaient distribués en outre-mer, comportaient un taux de sucre plus élevé. Nos collègues d’outre-mer doivent intervenir pour le confirmer. Je me souviens que l’on citait des noms de sodas ou d’autres produits, qui étaient bien les mêmes que ceux que l’on trouve en métropole. C’est en tout cas ce que j’avais compris, et je vous assure que je n’étais pas la seule. C’était même assez choquant !
Depuis lors, ces informations ont peut-être été contredites par la réalité. En tout cas, il semble exister une certaine confusion sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Michel Vergoz, pour explication de vote.
M. Michel Vergoz. Madame la ministre, je suis assez étonné de la situation où nous nous trouvons ce soir concernant l’outre-mer. Et votre intervention me surprend d’autant plus que, ayant été dans cet hémicycle il y a deux ans le rapporteur de la proposition de loi dont il est question, je confirme qu’elle avait reçu un soutien unanime.
De quoi s’agit-il, madame la ministre ? D’une population en grand danger ! Je vous ai entendu discourir depuis plusieurs jours. Vous ne pouvez pas laisser passer ce rendez-vous et traiter de la sorte cette échéance.
J’apporte mon soutien total à mes collègues du groupe CRC. Il s’agit d’un important problème de santé publique : l’obésité et le diabète gagnent nos populations à grande vitesse. C’est effrayant ! Je suis moi-même pharmacien et j’ai pu constater que, en quinze ans, la situation a été bouleversée. Il y a urgence à agir, madame la ministre, au moment où nous discutons de cette loi relative à la modernisation de notre système de santé.
Je vous parle de grande urgence, car c’est une question de semaines. Nous avons suffisamment attendu ! Toutes tendances politiques confondues, nous demandons l’application de la loi de juin 2013, avec des mots durs et graves. Nous parlons d’obésité, de diabète, de maladies cardiovasculaires, qui provoquent des AVC, des infarctus, des cas de cécité, des amputations. Nous le vivons au quotidien.
Telle est la gravité de la situation dans nos outre-mer ! Elle est la conséquence de l’ajout de sucre dans des proportions inacceptables et dangereuses dans des produits qui sont importés de l’Hexagone. Certains d’entre eux contiennent un taux de sucre ajouté plus élevé de 50 % par rapport à leur équivalent vendu ici.
Nous n’allons pas recommencer ce débat. Mes chers collègues, quelle que soit votre sensibilité politique, vous pouvez agir, ne serait-ce que pour marquer le coup. Il faut voter cet amendement. Nous sommes en grand danger et je lance à cette tribune un SOS au nom des outre-mer.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1037, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - Le chapitre II du titre unique du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 3232–9 ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-9. - Dans le cadre de l’application de l’article 39 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, afin de renforcer la protection de la santé publique et du consommateur et de permettre au consommateur de faire des choix informés au regard des impacts de son alimentation, l’indication du mode d’élevage est rendue obligatoire pour l’ensemble des produits carnés et laitiers destinés à la consommation humaine, à l’état brut ou transformé.
« La liste des produits concernés et les modalités d'application de l'indication du mode de production mentionné au premier alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État. »
... - Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un article L. 112–... ainsi rédigé :
« Art. L.112-... - Les conditions de mise en place de l’étiquetage obligatoire du mode d’élevage des produits carnés et laitiers, en application de l’article 39 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, sont fixées à l’article L. 3232-9 du code de la santé publique. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement tend à mettre en place un système permettant d’informer les consommateurs sur le mode d’élevage des produits carnés et laitiers qu’ils achètent, répondant ainsi à une demande forte de leur part.
De nombreuses études montrent que, selon la façon dont les animaux sont élevés – en plein air, en élevage biologique ou selon d’autres méthodes –, la teneur en acides gras et le taux de matière grasse diffèrent considérablement. Il en va de même de la surutilisation d’antibiotiques, qui suscite le dangereux développement de phénomènes d’antibiorésistance.
L’indication du mode d’élevage existe aujourd’hui pour les œufs – code 3, en cages, code 2, au sol, code 1, en plein air, code 0, biologique. L’introduction de cette réglementation sur l’étiquetage s’est accompagnée d’une augmentation considérable de la vente d’œufs de poules élevées en plein air. Les consommateurs réagissent donc bien positivement à la mise à disposition d’informations claires sur le mode d’élevage.
Par cet amendement, nous proposons la mise en œuvre de l’étiquetage relatif au mode d’élevage des produits carnés ou laitiers. Il est bien sûr possible de proposer des calendriers différents, ménageant aux différents éleveurs le temps de s’adapter, mais cette mesure semble intéressante.
M. le président. L'amendement n° 1114, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... – Le chapitre II du titre unique du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 3232-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-9. – Dans le cadre de l’application de l’article 39 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, afin de renforcer la protection de la santé publique et du consommateur et de permettre au consommateur de faire des choix informés au regard des impacts de son alimentation, le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi n° … du … relatif à la santé, un rapport étudiant les possibilités d’introduction d’un étiquetage obligatoire en fonction des modes d’élevage pour l’ensemble des viandes et produits laitiers, à l’état brut ou transformés, inspiré du modèle existant pour les œufs. Après remise de ce rapport, il pourra être procédé à une expérimentation du dispositif, en concertation avec l’ensemble des acteurs des filières concernées. »
... – Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un article L. 112-… ainsi rédigé :
« Art. L. 112-... – Les conditions de mise en place de l’étiquetage obligatoire du mode d’élevage des produits carnés et laitiers, en application de l’article 39 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2011, concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, sont fixées à l’article L. 3232-9 du code de la santé publique. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Il s’agit d’un amendement de repli, dans l’hypothèse d’un rejet de notre proposition précédente.
Nous proposons la réalisation de l’étude, puis de l’expérimentation de l’élargissement du dispositif existant pour les œufs à tous les produits carnés et laitiers, visant à évaluer les différents systèmes d’étiquetage et leurs intérêts respectifs pour le consommateur, avant de définir le système qui sera retenu en concertation avec l’ensemble des acteurs des filières concernées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Archimbaud, je ne vois pas pourquoi il faudrait rendre obligatoire cet étiquetage alors que nous proposons par ailleurs un étiquetage facultatif sur la qualité nutritionnelle des produits.
Par ailleurs, ce que vous proposez n’a rien à voir avec des enjeux de santé, mais concerne des questions éthiques, si l’on peut dire, relatives aux types d’élevage des animaux. Cela relève du ministère de l’agriculture et en aucun cas du ministère en charge de la santé.
Pour ce qui me concerne, si je propose un étiquetage facultatif, ce n’est pas pour ajouter un étiquetage obligatoire touchant à d’autres sujets qui n’ont pas grand-chose à voir avec les questions de santé.
Si vous ne retiriez pas ces deux amendements, je serais donc contrainte d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Madame Archimbaud, les amendements nos 1037 et 1114 sont-ils maintenus ?
Mme Aline Archimbaud. Je comprends que le ministère de l’agriculture puisse avoir son mot à dire, mais il me semble qu’il s’agit bien d’une question de santé publique. Je n’ai pas eu le temps d’évoquer aussi longuement que je le souhaitais la qualité des produits et des différences entre eux, mais cela emporte bien des conséquences sanitaires.
Je maintiens donc au moins l’amendement n° 1114, monsieur le président, parce que je pense que cette proposition répond à une demande de la population.
M. le président. L’amendement n° 1037 est retiré.
La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote sur l’amendement n° 1114.
M. Gérard Bailly. Je souhaite rappeler à nos collègues écologistes qu’un animal passe parfois par deux ou trois exploitations au cours de sa vie. Il peut donc être au foin à un moment, au pré ensuite, et finir à l’ensilage. Que devrons-nous indiquer sur ses étiquettes ?
Ensuite, la viande que nous consommons, ainsi que le lait à moindre échelle, vient des États-Unis, du Canada, d’Irlande ou du Brésil. Madame Archimbaud, pensez-vous que l’on dira aux exportateurs de viande américaine : « Non, vos bêtes sont issues d’une étable de trois mille vaches » ? Pour moi, offrir la certitude de vendre de la viande française constitue déjà une garantie importante face à toutes ces viandes importées.
Je ne trouve pas votre proposition réaliste. Je le répète : le ministre de l’agriculture nous a affirmé, il n’y a pas longtemps, qu’il n’introduirait pas plus de complications pour les éleveurs français que celles qui sont décidées à l’échelle européenne. Vous cherchez pourtant à en ajouter une couche importante !
Je suis donc naturellement défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Je suis également surpris de cet amendement, dont l’adoption perturberait la lisibilité des produits au prétexte fallacieux, car il ne s’agit pas de cela, de la santé.
Aujourd’hui, aucun produit en France n’est mis sur le marché s’il n’est pas conforme à la réglementation sanitaire et à la législation française et européenne, comme le rappelait mon collègue Gérard Bailly.
En outre, cet amendement tend à introduire une distorsion terrible entre les pays de l’Union européenne, sans rien apporter de positif en matière de santé.
Cette question fait déjà l’objet de réglementations : pour ceux qui pratiquent l’élevage en agriculture biologique, le cahier des charges permet la lisibilité. Il en est de même pour ceux qui travaillent en appellation d’origine contrôlée, où les conditions d’élevage sont précisées, bien qu’elles soient différentes d’une production à l’autre. Nous disposons donc déjà de tout l’arsenal permettant aux consommateurs de bénéficier de cette visibilité.
Je suis donc troublé par votre amendement, madame Archimbaud. Je vous rappelle que la France, avec l’Italie, est le pays qui compte le plus d’appellations d’origine contrôlée, donc le plus de visibilité proposée à la compréhension du consommateur sur les conditions de production.
Pour ces raisons, je suis opposé à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 503, présenté par M. Lemoyne, n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
11
Mises au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Michel Amiel.
M. Michel Amiel. Monsieur le président, lors du scrutin n° 246, j’ai été comptabilisé comme m’étant abstenu, alors que je souhaitais voter pour. Il en est de même pour MM. Pierre-Yves Collombat et Jean-Noël Guérini, ainsi que pour Mme Mireille Jouve.
M. le président. Acte est donné de ces mises au point, mon cher collègue. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin.
12
Modernisation de notre système de santé
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé.
Nous poursuivons l’examen des articles.
Articles additionnels après l'article 5
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 307 rectifié bis est présenté par MM. Commeinhes et G. Bailly, Mme Deseyne, MM. Houpert et Houel et Mme Mélot.
L'amendement n° 318 est présenté par Mmes Schillinger et Yonnet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’intitulé du chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé : « Alimentation et hydratation, publicité et promotion »
La parole est à M. François Commeinhes, pour présenter l’amendement n° 307 rectifié bis.
M. François Commeinhes. L’hydratation doit être érigée au rang de priorité de santé publique au regard de ses enjeux sanitaires. Une étude du CREDOC montre que les cas de déshydratation sont encore trop présents en France, car 80 % des Français, tous âges confondus, ne boivent pas assez d'eau. Certaines catégories de la population sont davantage touchées : quelque 90 % des enfants et 86 % des adolescents ne s’hydratent pas correctement.
Or une étude relative à l’impact des messages sanitaires réalisée en 2007 par BVA pour le ministère de la santé et l’INPES, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, montre que les enfants sont particulièrement touchés par les messages sanitaires diffusés par le biais de la télévision. Ceux-ci sont déterminants dans la modification de leur comportement alimentaire et représentent un important levier pour l’apprentissage des règles d’hygiène de vie.
Il importe donc de conseiller aux enfants, par le biais d’un message sanitaire approprié, d’avoir des apports hydriques suffisants, au même titre qu’une alimentation équilibrée, et de pratiquer une activité physique.
Par ailleurs, cet amendement vise à prendre en compte les recommandations de l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, publiées en février 2015, aux termes desquelles il n’y aurait pas d’élément probant de nature à encourager, dans le cadre d’une politique de santé publique, la substitution des sucres par des édulcorants intenses.
Cet objectif de réduction des apports en sucres doit être atteint avec la réduction globale du goût sucré de l’alimentation, et ce dès le plus jeune âge. La promotion de l’hydratation par l’eau entre dans cet objectif.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 318.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement a pour objet de promouvoir l’hydratation, au même titre que l’alimentation, dans les politiques de santé publique.
La mise en place d’une politique nutritionnelle est apparue, au cours des dernières années, comme une priorité en matière de santé publique. Les gouvernements successifs ont mis en place différents programmes visant à répondre à des objectifs globaux, tels que la réduction de l’obésité et du surpoids de la population, l’augmentation de l’activité physique, l’amélioration des pratiques alimentaires et des apports nutritionnels ou encore la réduction des pathologies nutritionnelles.
Toutefois, pour l’heure, les programmes tels que le programme national pour l’alimentation, le programme éducation santé, le plan national santé environnement, le plan cancer, etc., n’ont pas traité l’hydratation comme un facteur de santé à renforcer.
Pourtant, les dernières études de consommation sont formelles : les Français ne boivent pas suffisamment d’eau. Selon une étude du CREDOC, le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, quelque 90 % des enfants et 86 % des adolescents ne boivent pas assez d’eau en France. Or une déshydratation, même légère, peut entraîner des troubles, tels que l’insomnie, la fatigue ou des maux de tête.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission des affaires sociales. Ces deux amendements identiques tendent à modifier l’intitulé du titre du chapitre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique.
Même si l’on comprend l’objectif visé, à savoir favoriser l’hydratation, je rappelle que les aliments qu’on consomme contiennent de l’eau. De plus, ce changement d’intitulé n’est pas nécessaire pour prendre en compte les recommandations des autorités sanitaires et promouvoir la substitution de l’eau aux boissons sucrées. En effet, l’intitulé n’a pas de valeur normative.
Aussi, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Même avis défavorable.
M. François Commeinhes. Je retire l’amendement n° 307 rectifié bis, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° 307 rectifié bis est retiré.
Madame Schillinger, l'amendement n° 318 est-il maintenu ?
Mme Patricia Schillinger. Mes chers collègues, vous le savez, en vertu du code du travail, les entreprises sont obligées de fournir de l’eau à leurs employés. Or cette mesure n’est pas toujours respectée. C’est pourquoi il conviendrait de mettre en œuvre une politique nationale d’hydratation.
Quoi qu’il en soit, même si cela me semble dommage, je vais retirer mon amendement, monsieur le président, tout en espérant qu’on suivra la voie que je viens d’indiquer.
M. le président. L'amendement n° 318 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 326 rectifié est présenté par MM. Antiste, Cornano, J. Gillot, Karam, Mohamed Soilihi et Patient.
L'amendement n° 1115 est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 2133-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-... – Les messages publicitaires télévisés ou radiodiffusés portant sur les boissons et les produits alimentaires manufacturés fixés par décret ne peuvent être diffusés pendant des programmes qui, sur la base de données de médiamétrie, sont regardés par un nombre important d’enfants et d'adolescents. Ces messages ne peuvent être diffusés dans les quinze minutes qui précèdent et suivent de tels programmes. Ces dispositions s’appliquent aux messages émis et diffusés à partir du territoire français et sur le territoire, à compter du 1er janvier 2016.
« L'interdiction prévue au premier alinéa ne s'applique pas aux aliments et boissons qui figurent sur une liste fixée par décret du ministre chargé de la santé, pris après avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, compte tenu de leurs caractéristiques nutritionnelles adaptées aux besoins de l'enfant et de l'adolescent dans le cadre d'une alimentation équilibrée. »
La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 326 rectifié.
M. Maurice Antiste. Alors même que, dans son dernier rapport de février 2015, l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé, nous alerte une fois de plus sur les effets néfastes sur l’enfant du marketing d’aliments hautement énergétiques, riches en matières grasses, en sucre ou en sel, qui entraînent une propension à préférer les aliments et modes d’alimentation peu sains et favorisent l’obésité, il importe que la loi régule l’influence néfaste de ces publicités, dont le programme national nutrition santé recommande également la limitation.
L’obésité infantile reste la plus problématique : quelque 60 % des enfants regardent le petit écran tous les jours en rentrant de l’école. Les trois quarts des enfants avouent préférer les produits promus à la télévision, plutôt que ceux qui ne bénéficient d’aucune publicité. Plus de 80 % des parents achètent les produits vus à la télévision, qui sont réclamés par les enfants.
Même si une charte d’engagement a été publiée, les régies publicitaires n’offrent aucune protection aux enfants. Ce document ne prévoit en effet que des spots de sensibilisation à caractère très général, sans imposer la moindre limitation aux publicités pour les produits les plus caloriques.
C’est pourquoi cet amendement vise à renforcer la protection des enfants et des adolescents au moyen d’un encadrement strict de la publicité pour les produits à forte teneur en sucre ou en matière grasse.
Le bénéfice serait triple : les enfants seront encouragés à manger des produits plus sains ; l’industrie alimentaire sera fortement incitée à améliorer les recettes des produits les plus déséquilibrés ; enfin, les chaînes de télévision apporteront leur concours à la santé publique, sans subir aucune altération de leurs recettes publicitaires issues de l’industrie agroalimentaire.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l'amendement n° 1115.
Mme Aline Archimbaud. Mon amendement étant identique au précédent, je rejoins les arguments de mon collègue Maurice Antiste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Ces deux amendements visent à limiter et mieux encadrer la diffusion de la publicité sur les boissons et produits alimentaires manufacturés pendant les programmes télévisés, qui sont regardés par un nombre important de jeunes.
Certes, eu égard aux enjeux sanitaires majeurs liés à la diffusion de spots publicitaires à des heures de grande écoute par les enfants, nous partageons la préoccupation des auteurs de ces amendements. Néanmoins, il nous semble que, en la matière, la plus grande prudence est de mise, car se posent les questions du modèle économique et du mode de financement de notre système audiovisuel. Ces questions font d’ailleurs actuellement l’objet de plusieurs travaux au sein de notre assemblée:
À la fin du mois, les commissions de la culture et des finances publieront conjointement le résultat de leurs travaux relatifs à l’audiovisuel public.
Par ailleurs, nous aurons à examiner au mois d’octobre prochain la proposition de loi n° 656 de notre collègue André Gattolin relative à la suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique.
C’est pourquoi il nous semble préférable d’attendre ces éclairages et ces échéances pour discuter, ensemble, de manière approfondie de ces questions.
Aussi, la commission vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir retirer vos amendements respectifs ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l’objectif que vous visez est absolument incontestable. Nous devons faire en sorte que les enfants ne soient pas exposés à des publicités qui les inciteraient à consommer des produits sucrés ou mauvais pour leur santé. On le sait, certains programmes télévisés sont particulièrement regardés.
C’est pour cette raison qu’une charte a été signée par, d’une part, les ministères de l’éducation nationale, de la culture, de l’agriculture, des sports, de l’outre-mer et des affaires sociales, et, de l’autre, les annonceurs, ainsi que les chaînes de télévision, sous l’égide du CSA, le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Il revient à cette dernière instance de procéder à la régulation, en s’assurant du respect des principes énoncés dans la charte. Si des manquements sont observés, je suis tout à fait disposée à les faire connaître au CSA et à lui demander les raisons qui l’ont conduit à tolérer des programmes de publicité à certains horaires. On pourrait alors évoluer vers des dispositions législatives contraignantes.
Pour l’heure, c’est par la voie du consensus et de la coopération que nous avançons. En conséquence, je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements respectifs ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Antiste, l'amendement n° 326 rectifié est-il maintenu ?
M. Maurice Antiste. J’entends bien les arguments avancés par Mme la corapporteur et Mme la ministre, mais ceux-ci ne m’ont pas convaincu. Qu’avons-nous à perdre à devancer les avis des commissions sénatoriales ou autres organes de recherche ?
J’ai l’impression que l’adoption de ces amendements identiques pourrait influencer les personnes qui se préoccupent de cette question. C’est pourquoi je maintiens mon amendement.
M. le président. Madame Archimbaud, l'amendement n° 1115 est-il maintenu ?
Mme Aline Archimbaud. Nous n’examinerons pas de sitôt un nouveau projet de loi consacré à la modernisation de notre système de santé. Il est souhaitable que le Parlement prenne position sur la question de la publicité en direction des enfants.
Si un travail en la matière est mené par le CSA, tant mieux. Néanmoins, cela ne nous empêche pas de nous prononcer sur cette question très importante. Nous avons là une énorme capacité d’influence, bonne ou mauvaise.
Quoi qu’il en soit, je retire mon amendement n° 1115 au profit de l’amendement n° 326 rectifié de M. Antiste.
Mme Marisol Touraine, ministre. Permettez-moi de formuler une observation pour éviter tout malentendu.
Le CSA ne mène pas de travaux sur cette question. Les travaux ont abouti à la signature d’une charte, qui a déjà fait l’objet d’une première évaluation par le CSA lui-même. Nous n’en sommes plus au stade de la mise en place de mesures ; nous sommes entrés dans la seconde phase, à savoir une régulation par le CSA.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 326 rectifié.
M. Alain Vasselle. Pour ma part, j’ai été sensible aux amendements identiques défendus par mes collègues.
Je déplore que l’on reporte toujours au lendemain ce que l’on peut faire le jour même. La question des messages publicitaires portant sur les boissons et produits alimentaires ne date pas d’aujourd’hui, et ce n’est pas la première fois que nous nous prononçons sur ce point. Nous avons été plusieurs à reconnaître l’inefficacité des messages adressés dans les spots publicitaires pour ce qui concerne les produits trop gras ou trop sucrés.
L’initiative de nos collègues est, à mon avis, heureuse. La démonstration n’a pas été faite que la charte signée par plusieurs partenaires soit suffisante. S’il en était ainsi, nous n’en serions pas à examiner aujourd'hui de tels amendements et à débattre de cette question.
Pourquoi attendre les conclusions de la concertation entre les commissions des finances, de la culture et des affaires sociales ? Je veux bien que l’on reporte à demain ou après-demain toutes les décisions, mais cela devient une habitude. Chaque fois qu’on ne veut pas faire adopter un amendement, on nous dit – l’expérience le montre – que des études sont en cours et qu’il convient d’attendre l’éclairage des rapports pour se prononcer !
En la circonstance, je suis prêt à voter l’amendement n° 326 rectifié, afin de prouver notre détermination à avancer dans ce domaine.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements présentés par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 1039 est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 3232-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3232-1-... ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-1-... – Les emballages des boissons avec ajouts de sucres comportent un avertissement “peut donner le diabète”. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Par cet amendement, nous voulons sensibiliser les consommateurs sur les boissons avec ajouts de sucres.
M. le président. L'amendement n° 1040 est ainsi libellé :
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 3232–1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3232–1–... ainsi rédigé :
« Art. L. 3232–1–... - Les emballages des boissons et produits alimentaires contenant de l'huile de palme comportent la mention “huile de palme”. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 1042 est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 3232-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3232-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-1-… – Les emballages des boissons et produits alimentaires contenant de l’aspartame comportent un pictogramme “déconseillé aux femmes enceintes”. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Plusieurs études montrent que l’aspartame peut entraîner des problèmes assez graves chez les femmes enceintes. Mes chers collègues, vous pouvez vous reporter à l’objet de cet amendement pour en savoir plus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 1039, 1040 et 1042 ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Ces trois amendements visent à faire figurer sur les emballages alimentaires divers messages sanitaires liés respectivement au diabète, à l’huile de palme et à l’aspartame. La définition des messages sanitaires relevant du pouvoir réglementaire, la commission a émis par trois fois un avis défavorable.
En ce qui concerne l’aspartame, nous avons conclu, après nous être penchés sur le problème de son innocuité ou de sa nocivité, qu’il était prématuré de diffuser un message de cet ordre. Quant à prévoir un avertissement portant sur les huiles végétales, sans viser une huile en particulier, cela peut très bien se concevoir, mais c’est au pouvoir réglementaire de s’en charger.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Il me paraît très difficile de désigner un aliment comme « pouvant donner le diabète », sans tenir compte d’autres facteurs alimentaires, sanitaires et sociaux ; cette idée me semble assez contestable, y compris sur le plan médical.
S’agissant de l’huile de palme, je comprends bien les préoccupations qui s’expriment, mais j’observe que des stratégies inverses se développent, c'est-à-dire des stratégies positives consistant à signaler qu’un produit est fabriqué sans huile de palme. Il s'agit probablement là d’une manière d’avancer.
Au sujet de l’aspartame, il n’y a pas de consensus, en l’état actuel des connaissances, sur l’existence de risques sanitaires liés à sa consommation par les femmes enceintes.
Je sollicite donc le retrait de ces trois amendements ; s’ils étaient maintenus, j’y serais défavorable.
M. le président. Madame Archimbaud, les amendements nos 1039, 1040 et 1042 sont-ils maintenus ?
Mme Aline Archimbaud. Je consens à retirer l’amendement n° 1039, monsieur le président, mais je maintiens les deux autres.
M. le président. L’amendement n° 1039 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 1040.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 126 rectifié, présenté par M. Cadic, Mmes Billon, Deromedi, Gatel et Loisier et MM. G. Bailly, Canevet, Chaize, Chasseing, Chatillon, Delahaye, Delattre, Duvernois, Falco, Gabouty, Guerriau, Kern, Lasserre, Luche et Masclet, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 3232-4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3232-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-4-1. – Les campagnes mentionnées à l’article L. 3232-3 valorisent le modèle alimentaire français fait de trois repas et intègrent un volet de promotion du petit-déjeuner. »
La parole est à M. Olivier Cadic.
M. Olivier Cadic. Bien qu’il soit la première pierre de l’édifice de l’équilibre alimentaire et nutritionnel, le petit-déjeuner est de plus en plus négligé, notamment par les enfants, les adolescents et les personnes défavorisées.
À cet égard, la dernière étude menée sur le sujet par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, le CREDOC, en 2013, est inquiétante : le nombre d’adultes qui ne petit-déjeunent plus chaque jour a été multiplié par deux en dix ans, et le nombre d’enfants par trois. Songez, mes chers collègues, que 29 % des enfants sautent au moins un petit-déjeuner par semaine, alors qu’ils n’étaient que 11 % il y a dix ans !
Le petit-déjeuner rompt le jeûne de la nuit, reconstitue les réserves glucidiques épuisées et contribue aux apports énergétiques de la journée à hauteur de 20 % à 25 % en moyenne. Le petit-déjeuner permet aussi de se réhydrater et fournit une quantité importante de plusieurs nutriments majeurs via la consommation de pain, de lait, de fruits ou de jus de fruits et de confiture.
Ainsi, les nutritionnistes rappellent que le petit-déjeuner apporte en moyenne 25 % des besoins en calcium et représente la première source de vitamine C pour les enfants et la deuxième pour les adultes.
Des études scientifiques montrent que la prise d’un petit-déjeuner équilibré est associée à un régime alimentaire de qualité, varié et équilibré, mais également à de meilleures capacités cognitives, à une réduction de la fatigue et, par conséquent, à de meilleures performances. Le petit-déjeuner apparaît donc comme un élément indispensable à une bonne hygiène de vie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet amendement a pour objet de valoriser le modèle alimentaire français, notamment en soulignant l’importance du petit-déjeuner.
La commission rappelle que la définition du contenu des campagnes de prévention de l’obésité et du surpoids relève des missions de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, en vertu des articles D. 3232-2 et D. 3232-3 du code de la santé publique ; elle n’est donc pas de la compétence du législateur.
Dans ces conditions, la commission demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer ; elle y sera défavorable s’il est maintenu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 305 rectifié bis est présenté par MM. Commeinhes et G. Bailly, Mme Deseyne et MM. Calvet et Houpert.
L'amendement n° 317 est présenté par Mmes Schillinger et Yonnet.
L'amendement n° 674 rectifié est présenté par M. Médevielle, Mmes Loisier et Micouleau et MM. Bonnecarrère, Chatillon, Cigolotti, Guerriau, Roche, Canevet, Cadic et Namy.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre unique du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 3232-… ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-... – La politique de santé contribue à la prévention, la promotion et l’éducation à la nécessité d’une bonne hydratation et à l’information sur les repères quantitatifs de consommation d’eau. »
La parole est à M. François Commeinhes, pour présenter l’amendement n° 305 rectifié bis.
M. François Commeinhes. J’entonne une nouvelle fois la même rengaine sur la nécessité de promouvoir l’hydratation. Il me paraît important que l’encouragement à une consommation d’eau suffisante figure parmi les objectifs de la politique de santé.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 317.
Mme Patricia Schillinger. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Gérard Roche, pour présenter l’amendement n° 674 rectifié.
M. Gérard Roche. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La commission est défavorable à ces trois amendements identiques, car il est inutile d’inscrire dans la loi une précision qui relève de programmes de mise en œuvre de la politique de santé. En outre, l’expression « prévention à la nécessité d’une bonne hydratation » pose un problème de rédaction.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je sollicite le retrait de ces amendements identiques ; s’ils étaient maintenus, j’y serais défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 305 rectifié bis, 317 et 674 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 1041, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La section VI du chapitre premier du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts est complétée par un article 520 B ainsi rédigé :
« Art. 520 B. – I. – Il est institué une contribution additionnelle à la taxe spéciale prévue à l’article 1 609 vicies sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah destinées à l’alimentation humaine, en l’état ou après incorporation dans tous produits.
« II. – Le taux de la taxe additionnelle est fixé à 200 € la tonne. Ce tarif est relevé portant actualisation des taux de la taxe sur les huiles perçue au profit du régime de protection sociale des non-salariés agricoles chaque 1er janvier, à compter du 1er janvier 2016, dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année. Les montants obtenus sont arrondis, s’il y a lieu, à la dizaine d’euros supérieure.
« III. – 1. La contribution est due à raison des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires les incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.
« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l’alimentation de leurs clients, les huiles mentionnées au I.
« IV. – Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité entrant dans leur composition.
« V. – Les expéditions vers un autre État membre de l’Union européenne ou un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ainsi que les exportations vers un pays tiers sont exonérées de la contribution lorsqu’elles sont réalisées directement par les personnes mentionnées au 1 du III.
« Les personnes qui acquièrent auprès d’un redevable de la contribution, qui reçoivent en provenance d’un autre État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou qui importent en provenance de pays tiers des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires incorporant ces huiles qu’elles destinent à une livraison vers un autre État membre de l’Union européenne ou un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou à une exportation vers un pays tiers acquièrent, reçoivent ou importent ces huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles en franchise de la contribution.
« Pour bénéficier du deuxième alinéa du présent V, les intéressés doivent adresser au fournisseur, lorsqu’il est situé en France, et, dans tous les cas, au service des douanes dont ils dépendent une attestation certifiant que les huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles sont destinés à faire l’objet d’une livraison ou d’une exportation mentionnées au même alinéa. Cette attestation comporte l’engagement d’acquitter la contribution au cas où l’huile ou le produit alimentaire ne recevrait pas la destination qui a motivé la franchise. Une copie de l’attestation est conservée à l’appui de la comptabilité des intéressés.
« VI. – La contribution mentionnée au I est acquittée auprès de l’administration des douanes. Elle est recouvrée et contrôlée selon les règles, sanctions, garanties et privilèges applicables au droit spécifique mentionné à l’article 520 A. Le droit de reprise de l’administration s’exerce dans les mêmes délais. »
II. – Les recettes de la contribution mentionnée à l’article 520 B du code général des impôts sont perçues par l’Agence française de développement.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Nous défendons cette proposition depuis plusieurs années, généralement dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Certes, l’huile de palme n’est pas un poison ; consommée à petite dose, elle ne pose pas de problème. Seulement, dans la mesure où elle est beaucoup moins taxée que les autres huiles alimentaires, elle est utilisée massivement dans des milliers de produits alimentaires cuisinés ou manufacturés, ce qui pose problème à la fois pour la santé des Français – je pense notamment au risque de maladies cardiovasculaires – et pour les pays dans lesquels cette culture est désormais pratiquée à très grande échelle, de manière industrielle, entraînant la dépossession de nombreuses familles de leurs terres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’instauration d’une taxation spéciale sur l’huile de palme est une question récurrente, qui a été soulevée dans le cadre de plusieurs projets de loi de financement de la sécurité sociale. La commission maintient l’avis défavorable qu’elle a toujours émis sur cette proposition.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Aline Archimbaud. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 1041 est retiré.
L'amendement n° 1043, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au chapitre III du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est rétabli une section 1 dans la rédaction suivante :
« Section 1
« Taxe spéciale sur les édulcorants de synthèse
« Art. 554 B. – I. – Il est institué une taxe spéciale sur l’aspartame, codé E951 dans la classification européenne des additifs alimentaires, effectivement destiné, en l’état ou après incorporation dans tous produits, à l’alimentation humaine.
« II. – Le taux de la taxe additionnelle est fixé par kilogramme à 30 € en 2014. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2015. À cet effet, les taux de la taxe sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l’évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l’année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors les prix du tabac. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique, social et financier annexé au dernier projet de loi de finances.
« III. – 1. La contribution est due à raison de l’aspartame alimentaire ou des produits alimentaires en incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.
« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l’alimentation de leurs clients, de l’aspartame.
« IV. – Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité d’aspartame entrant dans leur composition.
« V. – L’aspartame ou les produits alimentaires en incorporant exportés de France continentale et de Corse, qui font l’objet d’une livraison exonérée en vertu du I de l’article 262 ter ou d’une livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A, ne sont pas soumis à la taxe spéciale.
« VI. – La taxe spéciale est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d’affaires.
« Sont toutefois fixées par décret les mesures particulières et prescriptions d’ordre comptable notamment, nécessaires pour que la taxe spéciale ne frappe que l’aspartame effectivement destiné à l’alimentation humaine, pour qu’elle ne soit perçue qu’une seule fois, et pour qu’elle ne soit pas supportée en cas d’exportation, de livraison exonérée en vertu du I de l’article 262 ter ou de livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de l’Union européenne en application de l’article 258 A. »
II. – Après le h de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Le produit de la taxe mentionnée à l’article 554 B du code général des impôts est affecté à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du présent code. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Il faudra bien qu’un jour on s’interroge précisément sur les effets de l’aspartame, un produit, fabriqué par la firme Monsanto, dont l’histoire est trouble dès l’origine.
Un certain nombre d’études concluent qu’il peut avoir des conséquences néfastes sur la santé. Des études, il en faudrait bien sûr davantage : tant qu’on n’en fait pas plus, on nous objecte qu’il n’y en a pas assez, sans pour autant en commander de nouvelles… C’est le serpent qui se mord la queue !
Je défends de nouveau cet amendement que j’ai déjà présenté, parce que je persiste à penser qu’il faudrait au moins éclaircir la question ; un doute sérieux existe, et il faudrait que les pouvoirs publics se donnent les moyens d’y voir clair et de nous dire si, oui ou non, il y a un danger. Je répète que l’histoire de la reconnaissance de ce produit aux États-Unis est extrêmement trouble ; vous le constaterez si vous vous penchez sur la question.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. C’est un autre sujet récurrent que la taxation de l’aspartame. Je ne suis pas d’accord avec Mme Archimbaud, car une étude a été menée par l’Autorité européenne de sécurité des aliments. S’il s’agit de déposer toujours le même amendement jusqu’à ce qu’une étude prouve les méfaits de l’aspartame, soit ! Toutefois, je constate que, jusqu’ici, aucune étude scientifique n’a prouvé qu’il en avait, de sorte qu’il n’y a pas de raison de taxer.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Aline Archimbaud. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 1043 est retiré.
L’amendement n° 563 rectifié, présenté par Mme Gatel et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La sous-section 2 de la section 2 du chapitre Ier du titre IV du livre VI du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 641-19-… ainsi rédigé :
« Art. L. 641-19-… - Sans préjudice des réglementations communautaires ou nationales en vigueur à la date de promulgation de la loi n° … du … de modernisation de notre système de santé, peuvent être reconnus comme démarche agricole d’intérêt nutrition et environnement reconnue par l’État les produits agricoles ou alimentaires qui sont produits selon la démarche agricole d’amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments dont l’intérêt est reconnu par les ministères de la santé et de l’environnement dans le cadre du dispositif des accords collectifs préconisés par le ministère de l’agriculture.
« Un décret fixe les conditions dans lesquelles est délivrée cette mention valorisante. »
La parole est à Mme Françoise Gatel.
Mme Françoise Gatel. Dans un contexte de crise agricole très grave, le SPACE, premier salon de l’élevage au monde et vitrine du savoir-faire français, s’ouvre aujourd’hui dans mon département, l’Ille-et-Vilaine. C’est donc avec beaucoup de gravité et de conviction que je vous présente cet amendement, qui vise à répondre à la fois au besoin d’une alimentation saine et à la nécessité de soutenir les initiatives qualitatives, originales et remarquables de nos éleveurs.
Le règlement européen du 20 décembre 2006 concernant les allégations nutritionnelles et de santé relatives aux denrées alimentaires empêche toute communication et toute valorisation portant sur des démarches globales d’agriculture à vocation nutritionnelle, sanitaire et environnementale.
Or ces démarches globales d’amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments, dont l’intérêt est reconnu à la fois par le ministère de la santé et par celui de l’environnement, sont engagées dès la phase d’alimentation des animaux ou dès la mise en place des cultures.
Aucun signe de qualité ni aucun label existant – ni les AOC, ni le label AB, ni le label rouge – ne couvre ce terrain de la nutrition. Dans le contexte très difficile lié à la crise de l’élevage français, ces démarches très qualitatives entreprises par nos agriculteurs répondent à l’envie qui se fait jour, ainsi qu’à la nécessité, d’une préférence alimentaire nationale tournée vers des produits aux qualités nutritionnelles intrinsèques reconnues.
Alors que le lien entre le mode de production agricole, la densité nutritionnelle des produits et le développement de certaines maladies n’est plus à prouver, je vous invite, mes chers collègues, à soutenir la valorisation d’une démarche agricole à vocation sanitaire en adoptant le présent amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Le code rural et de la pêche maritime prévoit déjà la possibilité pour des denrées alimentaires et des produits agricoles non alimentaires de bénéficier d’un label rouge, dont vous connaissez les caractéristiques.
À la lecture de cet amendement, qui vise à créer une nouvelle mention valorisante, la commission n’a pas clairement compris en quoi la certification proposée se distinguerait des certifications existantes. C’est pourquoi elle a émis un avis défavorable sur cet amendement, même si elle est curieuse de connaître la position de Mme la ministre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Comme je l’ai déjà fait observer en commission, il y a une ambiguïté dans cette affaire.
Lorsqu’on est confronté à l’inconnu, on cherche à se raccrocher à quelque chose qui existe déjà ; en l’occurrence, on nous renvoie au label rouge et aux AOC, qui, en effet, sont déjà là, par exemple pour le poulet de Janzé ou pour les moules du Mont-Saint-Michel.
Or ce n’est pas de cela qu’il s’agit, mais d’une démarche et d’une philosophie tout à fait différentes, consistant à définir en quoi un produit apporte aux individus un mieux-être, en quoi il se suffit à lui-même, ce qui est autre chose que d’assurer sa traçabilité et de garantir sa qualité et son contenu.
Plus précisément, cette démarche consiste à partir des besoins du corps humain pour essayer de produire ce qui lui est nécessaire. Ainsi, sachant que les oméga-3 sont nécessaires à notre organisme et contribuent à la prévention des maladies cardiovasculaires, des agriculteurs se sont lancés dans la production de graines de lin ou de lupin, riches en protéines.
Cette démarche agricole révolutionnaire présente trois avantages : elle est au service de la santé, puisque les produits finis sont conçus pour être profitables au corps humain ; elle ouvre un chemin pour l’agriculture, qui connaît aujourd’hui des difficultés, en lui permettant de valoriser ses produits ; enfin, elle réduit la dépendance de notre agriculture au soja et aux compléments protéiniques complémentaires du maïs. Il s’agit donc d’une démarche au plus haut point intéressante.
Nos territoires ont du génie. Simplement, ce génie capable d’innover doit être reconnu. Il faut lui donner la possibilité d’aboutir à des résultats et de montrer au consommateur ce qu’il a réalisé et les domaines dans lesquels il procure des bienfaits à chacun. Tel est le sens de l’amendement de Mme Gatel, que je soutiens totalement.
M. le président. L'amendement n° 306 rectifié bis, présenté par MM. Commeinhes et G. Bailly, Mme Deseyne, MM. Houpert et Houel et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le repère nutritionnel actuel « boire de l’eau à volonté » du programme national relatif à la nutrition et à la santé est remplacé par le repère quantitatif « boire au moins 1,5 litre d’eau par jour ».
La parole est à M. François Commeinhes.
M. François Commeinhes. L’objet de cet amendement tourne toujours autour de la question de l’eau.
Bien que le programme national nutrition santé, ou PNNS, recommande de « boire de l’eau à volonté », force est de constater que ce repère n’est pas correctement compris par les Français. Une étude du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, le CREDOC, portant sur la consommation d’eau indique qu’entre 2007, date de l’introduction des messages sanitaires sur les publicités, et 2013 la consommation d’eau a connu une très nette baisse chez les enfants et les adolescents. La consommation en eau est également en baisse chez les adultes.
Au cours de cette même période, seule la consommation d’eau chez les personnes âgées est en hausse. L’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, prévoit un repère de consommation quantitatif clair pour les seniors en les encourageant à boire « au moins 1,5 litre d’eau par jour ». Or il n’existe aucun repère quantitatif sur l’eau pour les autres catégories de population. L’application du repère de 1,5 litre d’eau par jour doit donc être étendue à l’ensemble de la population pour lutter contre la diminution de la consommation d’eau et la hausse de la consommation de boissons sucrées, notamment chez les plus jeunes.
Conseiller d’avoir des apports hydriques suffisants est une règle d’hygiène de vie au même titre qu’avoir une alimentation équilibrée ou pratiquer une activité physique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’amendement vise à remplacer le repère nutritionnel du PNNS recommandant de « boire de l’eau à volonté » par un repère quantitatif qui incite à « boire au moins 1,5 litre d’eau par jour ». Les repères nutritionnels sont définis en annexe de l’arrêté du 27 février 2007 fixant les conditions relatives aux informations à caractère sanitaire devant accompagner les messages publicitaires ou promotionnels en faveur de certains aliments et boissons. Ils ne relèvent donc pas du niveau législatif. La commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur le sénateur ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est du même avis que la commission et pour les mêmes raisons.
M. le président. Monsieur Commeinhes, l'amendement n° 306 rectifié bis est-il maintenu ?
M. François Commeinhes. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 306 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 240 rectifié quater, présenté par Mme Deromedi, M. Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Cantegrit, Cadic, G. Bailly et Commeinhes, Mme Estrosi Sassone et MM. Houel, Laufoaulu, Malhuret, Pillet, Saugey et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport formulant des recommandations sur la reclassification des taux de taxe sur la valeur ajoutée en fonction de l'intérêt nutritionnel des produits alimentaires.
La parole est à M. François Commeinhes.
M. François Commeinhes. La notion de taxation différenciée selon la nature des aliments existe en France depuis l’introduction de la TVA. À cette époque, la taxation à taux réduit avait été accordée aux aliments de consommation courante, en raison de l’importance du budget alimentaire pour les ménages. À l'inverse, quelques aliments considérés comme des produits de luxe étaient taxés au taux plein.
Toutefois, ce distinguo est devenu obsolète en raison à la fois de l’amélioration du niveau de vie et de la banalisation de certains produits précédemment considérés comme luxueux.
En revanche, une autre problématique est apparue depuis cette époque, celle de la surconsommation d’aliments transformés très gras ou très sucrés, qui se sont progressivement substitués à une alimentation plus saine. Ainsi, les boissons sucrées constituent, aujourd’hui, la deuxième catégorie la plus consommée en France. La catégorie « gâteaux et pâtisseries » se classe, quant à elle, cinquième devant les fruits. Loin d’être anecdotiques, ces évolutions de consommation ont pour effet d’installer des déséquilibres nutritionnels majeurs, leur impact sur la santé publique étant considérable : 18 % des enfants français sont actuellement obèses ou en surpoids, ce qui est particulièrement élevé pour cette classe d’âge. Quant aux adultes français, 49 % d’entre eux sont soit obèses, soit en surpoids.
Dans ce contexte de progression des habitudes alimentaires néfastes pour la santé, cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement qui recommande la reclassification des taux de TVA en fonction de l’intérêt nutritionnel des produits alimentaires. Une taxation différenciée des produits alimentaires selon leurs caractéristiques nutritionnelles permettra ainsi d’orienter les consommateurs vers la consommation de produits sains, sans entraîner, par ailleurs, la captivité de ces derniers : les produits « surtaxés » pourront en effet facilement être remplacés par d’autres produits appartenant à la même catégorie d’aliments, ou par d’autres produits alimentaires ayant un plus grand intérêt nutritionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. En examinant les amendements, la commission a adopté une position draconienne en considérant qu’il ne faut pas multiplier les demandes de rapports dans les textes de loi. En conséquence, la commission a décidé de demander le retrait des amendements qui ont un tel objet.
C’est à ce titre que la commission émettra un avis défavorable sur l’amendement n° 240 rectifié quater. Cependant, je souhaite signaler au Gouvernement que nous avions constaté des distorsions en la matière, Yves Daudigny et moi-même, dans notre rapport sur la fiscalité comportementale (M. Yves Daudigny acquiesce.), et pas uniquement sur la TVA. Il y en avait également sur les taxes additionnelles, notamment celles qui étaient devenues identiques entre boissons sucrées et boissons non sucrées ou à taux de sucre moindre. Il existe également une distorsion en matière de taxation entre les différentes huiles, ce qui n’est pas sans poser question.
Une véritable étude est nécessaire sur ces différenciations de taxation, qui s’expliquent assez peu mais qui sont liées à l’histoire et sont apparues au fil du temps.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement a le même avis. D’ailleurs, M. Daudigny et vous-même, madame la rapporteur, étiez très circonspects dans votre rapport sur l’impact de ce que l’on appelle la fiscalité comportementale, même si certains points méritaient d’être davantage étudiés que d’autres. Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Commeinhes, l'amendement n° 240 rectifié quater est-il maintenu ?
M. François Commeinhes. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 240 rectifié quater est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 461, présenté par M. Camani, Mme Génisson, M. Daudigny, Mme Bricq, M. Caffet, Mmes Campion et Claireaux, M. Durain, Mmes Emery-Dumas et Féret, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mmes Yonnet et Monier, M. Courteau et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement dans un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, un rapport sur la prévalence, la prévention, le dépistage et la prise en charge de la maladie cœliaque en France ainsi que sur le niveau de connaissance des praticiens, et émet des recommandations de politique de santé publique en la matière.
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. La maladie cœliaque est l’une des maladies digestives les plus fréquentes en France.
L’absence de données françaises sur la prévalence et d’un état des lieux sur la connaissance de la maladie par les praticiens et la façon dont les malades font face au quotidien à la maladie empêche d’établir une politique de santé publique efficace en la matière.
Cet amendement vise donc à demander un rapport, dans un délai de deux ans, qui fera des recommandations sur la prise en charge et le diagnostic précoce d’une maladie pour laquelle il n’existe toujours aucun traitement médicamenteux capable de la guérir.
M. le président. L'amendement n° 708 rectifié, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin, Mmes Gonthier-Maurin, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement une évaluation annuelle sur la prévalence, la prévention, le dépistage et la prise en charge de la maladie cœliaque en France, et sur le niveau de connaissance des praticiens, et émet des recommandations de politique de santé publique en la matière.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à établir, dans un délai de deux ans, une évaluation dressant un état des lieux sur la maladie cœliaque en France et proposant des recommandations pour définir une politique de santé publique en la matière.
Cette maladie, plus connue sous le nom d’intolérance au gluten, est l’une des maladies digestives les plus fréquentes. Elle toucherait une personne sur cent en France comme en Europe. Selon le comité médical de l’Association française des intolérants au gluten qui est à l’origine de cet amendement, seuls 10 à 20 % des cas sont aujourd’hui diagnostiqués.
Cette maladie provoque une atrophie villositaire à l’origine d’une mauvaise absorption des nutriments, en particulier du fer, du calcium, de l’acide folique, d’où l’apparition de carences qui peuvent être nombreuses et importantes.
Si les connaissances sur cette maladie ont progressé ces dix dernières années, avec des diagnostics de plus en plus nombreux, il n’existe malheureusement toujours aucun traitement médicamenteux capable de la guérir. L’unique solution pour les malades reste un régime alimentaire sans gluten, très strict et à vie.
L’absence de diagnostic précoce et de prise en charge nutritionnelle adéquate engendrent de nombreuses pathologies comme l’anémie et l’ostéoporose, qui pourraient pourtant être prévenues, ainsi que des coûts de santé importants.
Face au surcoût engendré par le régime sans gluten, face aux difficultés de son suivi au quotidien, seuls 50 % des malades adultes suivent correctement ce régime. L’absence d’une stratégie de santé adaptée provoque, en outre, de nouvelles peurs alimentaires infondées chez des personnes qui ne sont d’ailleurs pas intolérantes au gluten. Cela les conduit à suivre des interdits alimentaires en contradiction avec une alimentation variée et équilibrée.
Enfin, l’absence de données françaises sur la prévalence et d’un état des lieux, sur la connaissance de la maladie par les praticiens et la façon dont les malades font face au quotidien, empêchent d’établir une politique de santé publique efficace en la matière.
Il ne s’agit donc pas d’un énième rapport. Avant que la jurisprudence de la commission ne produise ses effets, j’insiste sur le fait que cela concerne de plus en plus de Françaises et de Français.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La commission reste sur les mêmes principes que ceux qu’elle a énoncés précédemment. Elle émettra donc un avis défavorable sur ces deux amendements, même si l’amendement n° 708 rectifié n’est pas une demande de rapport mais une demande d’évaluation annuelle.
En revanche, l’existence de besoins en matière de recherche, de données sur la maladie est évidente. Pour autant, les moyens à disposition existent : des études ont d’ores et déjà été publiées ; la Haute Autorité de santé, la HAS, peut donner son avis sur les bonnes pratiques en matière de dépistage, de diagnostic ou autre.
En tout état de cause, ce n’est pas le fait d’élaborer des rapports qui permettra de trouver un traitement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je demanderai à leurs auteurs de bien vouloir retirer leurs amendements, faute de quoi le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Cependant, à l’évidence, il s’agit d’une maladie qui, aujourd’hui, fait l’objet d’attentions et de préoccupations importantes, si j’en juge par le volumineux courrier qui m’est adressé sur ce sujet-là, en particulier, d’ailleurs, de la part de parlementaires.
Les connaissances relatives à cette maladie ont beaucoup évolué au cours des dernières années et la Haute Autorité de santé a déjà produit des recommandations de bonne pratique.
Aucune évolution dans les études au niveau international ne justifie que l’on relance des analyses épidémiologiques, notamment. En revanche, il me paraît utile de demander à la HAS de réévaluer ses analyses et ses recommandations de bonne pratique. C’est du reste ce que j’ai l’intention de faire. Pour autant, cela n’a pas à figurer dans une loi. Par nature, cela renvoie aux relations qu’entretient le Gouvernement avec des agences sanitaires.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote sur l’amendement n° 461.
Mme Catherine Génisson. Il s’agit d’un véritable sujet de santé publique. Tout d’abord, il faut faire la différence entre les intolérances au gluten à différents niveaux et la maladie cœliaque, pour laquelle il existe un diagnostic lourd puisqu’il faut pratiquer des biopsies.
Au motif qu’il existe une intolérance au gluten, on observe des « surdiagnostics » mais aussi des « sous-diagnostics ». Souvent, c’est l’enfant qui se plaint de maux de ventre alors qu’il doit partir à l’école. On croit qu’il ne veut pas s’y rendre, alors qu’il s’agit d’un vrai problème.
Compte tenu de cette intolérance au gluten, le seul traitement de la maladie résulte évidemment dans la suppression du gluten, pour laquelle nous attendons encore des informations complémentaires.
Madame la ministre, je tiens à vous remercier pour votre idée de solliciter la Haute Autorité de santé pour compléter nos connaissances sur cette maladie, qui est un vrai sujet d’actualité et qui pénalise, en particulier, les jeunes enfants qui sont porteurs de la maladie et qui doivent pouvoir être traités correctement.
Compte tenu de vos propositions, madame la ministre, nous retirons notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 461 est retiré.
Madame Cukierman, l'amendement n° 708 rectifié est-il maintenu ?
Mme Cécile Cukierman. Oui, il est maintenu, monsieur le président.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je souhaite également préciser à Mme la rapporteur que si l’évaluation ne règle évidemment pas la question du traitement de la maladie, elle permet d’obtenir un certain nombre de données et d’encourager la recherche. C’est en encourageant, en développant et en soutenant la recherche que nous pourrons espérer trouver des traitements à cette maladie. C’est pourquoi nous maintenons cet amendement, en espérant qu’il recueille l’assentiment de notre assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je tiens à faire une remarque de forme : à travers l’attitude de nos rapporteurs nous voyons bien que nous sommes limités au niveau de notre intervention en tant que parlementaire dans la mesure où nous sommes sous le couperet de l’article 40, et où nous serons bientôt sous celui de l’article 41 pour les dispositions d’ordre réglementaire.
Qu’il s’agisse de demandes de rapports ou d’évaluations, elles sont toujours rejetées. Ce refus n’est pas dû à un règlement mais correspond à une attitude qui se développe parmi les rapporteurs. Ce rejet systématique pose réellement problème car les rapports et les évaluations sont pour nous l’occasion d’identifier les difficultés et d’avoir des données objectives nous permettant par la suite de prendre des mesures et même d’aider le Gouvernement dans l’élaboration de celles-ci.
En l’occurrence, le rejet des demandes de rapports concerne la maladie cœliaque. Tout à l’heure, il avait trait à la fiscalité comportementale. Cela pose un réel problème pour l’initiative législative.
M. le président. L'amendement n° 1038, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur l'amélioration de l’information nutritionnelle dans la restauration collective. Cette mesure s’intègre dans un projet de santé publique qui articule la qualité d’accueil dans les restaurations collectives avec un projet d’éducation à la santé permettant aux usagers de la restauration collective, en premier lieu les élèves des établissements scolaires fréquentant la cantine, de faire des choix nutritionnels adaptés à leur santé et leur activité physique.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement vise à demander au Gouvernement la remise d’un rapport au Parlement sur l'amélioration de l’information nutritionnelle dans la restauration collective.
En effet, comme nous l’avons vu en commission, l’objectif est d’étendre l’étiquetage nutritionnel en général, en le rendant non pas obligatoire, mais facultatif et possible. Dans ce but, il semble que les lieux de restauration collective que ce soit les cantines scolaires, d’entreprise ou autres, apparaissent comme des lieux intéressants pour informer, sensibiliser et motiver nos concitoyens, notamment les jeunes mais pas uniquement, à s’alimenter de façon plus saine, dans la mesure où ce sont des lieux d’échanges, de discussions et de repos.
Un rapport sur ce sujet me paraît donc nécessaire afin d’avancer sur ce point et pour permettre d’élaborer des propositions concrètes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Au risque de déplaire, la commission émet de nouveau un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Au risque de d’étonner, le Gouvernement émet, au contraire, un avis favorable.
Mme Aline Archimbaud. Très bien !
Mme Marisol Touraine, ministre. Non seulement pour faire démentir les pronostics selon lesquels aucune demande de rapport ne serait acceptée, mais aussi par souci de cohérence, puisque l’information et l’étiquetage nutritionnels sont à l’évidence des éléments importants dans la restauration collective et doivent être mis à la disposition de tous les consommateurs.
Nous pourrons d’ailleurs réfléchir à la situation plus spécifique des enfants qui sont peut-être mieux informés, ou du moins dont les parents le sont, puisqu’une attention particulière est portée à l’alimentation dans le cadre la restauration scolaire.
L’information nutritionnelle doit être à la disposition des personnes, reste à savoir néanmoins la manière dont cette information doit être apportée, ce qui n’est pas évident (Mme Aline Archimbaud opine.), d’où l’utilité de ce rapport.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Article 5 bis A
Le chapitre II du titre unique du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 3232-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-8. – La mise à disposition de fontaines proposant une offre à volonté de boissons avec ajouts de sucres ou d’édulcorants de synthèse est interdite dans tous les lieux ouverts au public ou recevant du public.
« Un arrêté des ministres chargés de la santé, de l’agriculture et de la consommation fixe la liste des catégories de boissons visées au premier alinéa. »
M. le président. L'amendement n° 1193, présenté par Mmes Deroche et Doineau et M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Remplacer la référence :
L. 3232–8
par la référence :
L. 3232–9
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet amendement vise à corriger une erreur de référence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 290 rectifié bis, présenté par Mme Imbert, MM. Longuet, D. Laurent, Laufoaulu, Lefèvre, Mouiller et de Nicolaÿ, Mmes Morhet-Richaud et Deromedi, MM. Huré, Lemoyne, Karoutchi, Bonhomme, Morisset et Houel, Mme Mélot, MM. Laménie et Houpert, Mme Estrosi Sassone, MM. Cornu, Bouchet et Vasselle et Mmes Lamure et Gruny, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
offre
insérer les mots :
gratuite et
La parole est à Mme Corinne Imbert.
Mme Corinne Imbert. Si je comprends bien l’esprit de cet article, il s’agit de limiter la consommation excessive de boissons sucrées en interdisant la mise à disposition de fontaines proposant une offre à volonté de ces boissons.
Dans la mesure où nous savons tous que la gratuité encourage la consommation excessive, cet amendement vise à limiter l’interdiction de la mise à disposition gratuite de boissons sucrées dans les lieux ouverts au public ou recevant du public, ce qui touche bien entendu bon nombre de lieux.
Enfin, la disposition prévue à cet article cible uniquement les fontaines. Or la distribution de boissons sucrées peut se faire aussi à travers l’usage d’autres contenants ne permettant pas ainsi d’atteindre l’objectif de cet article, à savoir limiter la consommation de boissons sucrées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet article vise les fontaines contenant des boissons avec ajouts de sucres, et non les boissons naturellement sucrées.
La commission avait souhaité limiter l’interdiction à la mise à disposition des fontaines proposant en offre illimitée des boissons avec ajouts de sucres. L’interdiction ne devait pas concerner les fontaines proposant une quantité définie de boisson suite à l’insertion d’un jeton. La complexité du dispositif réside donc avant tout dans cette notion de fontaine.
Vous proposez de l’imiter l’interdiction aux fontaines distribuant gratuitement des boissons. Néanmoins, dans les faits, l’offre gratuite et l’offre illimité sont similaires. En effet, dans les clubs ou les restaurants les boissons sont certes gratuites, mais en réalité elles sont incluses dans le prix du repas.
La commission sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Toutefois, il conviendrait de bien définir dans les textes d’application du dispositif proposé les catégories de boissons et les lieux concernés. Même si nous partageons l’idée de ne pas encourager, par la mise à disposition à volonté, les boissons avec ajouts de sucres, ces éléments nécessitent en effet d’être précisés.
Les amendements suivants visent à différer l’entrée en vigueur de cette interdiction, ce à quoi la commission est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Imbert, l'amendement n° 290 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Corinne Imbert. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 290 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 1157, présenté par MM. Darnaud et Genest, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette interdiction s'applique à l'expiration des contrats en cours, conclus avant la promulgation de la loi n° … du … relatif à la santé entre, d'une part, une personne physique ou une personne morale de droit privé regroupant des commerçants, et, d'autre part, toute personne exploitant, pour son compte ou pour le compte d'un tiers, au moins un commerce de détail, proposant des fontaines de boissons à volonté avec ajouts de sucres ou d'édulcorants de synthèse, ainsi qu'entre, d'une part, l'une ou l'autre personne précitée, et, d'autre part, les fournisseurs de ces boissons. »
La parole est à M. Mathieu Darnaud.
M. Mathieu Darnaud. Dans le prolongement de nos débats sur ce sujet, le présent amendement vise à différer l’entrée en vigueur de l’interdiction des fontaines de boissons à volonté avec ajouts de sucres ou d’édulcorants de synthèse, après la date d’expiration des contrats en cours, en tout état de cause conclus avant la promulgation de la loi de modernisation de notre système de santé.
Ces contrats peuvent lier, d’une part, un groupe de restauration ou une chaîne hôtelière et des commerçants franchisés et, d’autre part, l’un ou l’autre des opérateurs économiques précités et les fournisseurs de boissons.
En outre, cet amendement est conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui tend à limiter les atteintes aux principes de valeur constitutionnelle de la liberté contractuelle et la liberté d’entreprendre, en enjoignant le législateur d’adopter des dispositions transitoires.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 303 rectifié bis est présenté par MM. Vanlerenberghe, Capo-Canellas, Cadic, Delahaye, Détraigne, Lasserre, Guerriau, Marseille, Namy, Roche et Bonnecarrère et Mme Joissains.
L'amendement n° 395 est présenté par M. Vaspart.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le présent article entre en vigueur dix-huit mois après la promulgation de la présente loi.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour présenter l’amendement n° 303 rectifié bis.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Cet amendement vise à permettre aux professionnels concernés de se conformer, à l’issue d’une période transitoire de dix-huit mois, à l’interdiction des fontaines de boissons à volonté avec ajouts de sucres ou d’édulcorants de synthèse.
Comme vient de le préciser M. Darnaud, cet amendement est en outre conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
M. le président. Le sous-amendement n° 1200, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 303 rectifié bis
Alinéa 2
Remplacer le mot :
dix-huit
par le mot :
six
La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends parfaitement la nécessité d’accorder un temps d’adaptation pour la mise en œuvre de cette mesure. Néanmoins, dix-huit mois me paraît être un délai trop long.
Après consultation des différents services juridiques des ministères concernés, il nous semble possible de proposer un délai de mise en œuvre de six mois, et c’est précisément l’objet du présent sous-amendement.
Aussi, le Gouvernement émet un avis favorable à l’amendement présenté par M. Vanlerenberghe sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour présenter l’amendement n° 395.
M. Michel Vaspart. Je maintiens la nécessité d’un délai de dix-huit mois pour l’entrée en vigueur de cette mesure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’amendement n° 1157 vise à différer l’entrée en vigueur du dispositif prévu après l’expiration des contrats en cours.
Néanmoins, la commission est plutôt favorable à un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi.
Elle sollicite donc le retrait de l’amendement n° 1157, et elle émet un avis favorable sur les amendements identiques nos 303 rectifié bis et 395.
Le sous-amendement du Gouvernement vise à remplacer le délai de dix-huit mois par un délai de six mois. Ce sous-amendement venant d’être déposé pour la séance, la commission n’a pu l’examiner. Néanmoins, à titre personnel, un délai de dix-huit mois me semble adapté dans la mesure où il correspond à ce que nous ont dit les professionnels concernés. En revanche, un délai de six mois me semble court.
M. Michel Vaspart. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 1157 ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Par souci de cohérence, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Darnaud, l'amendement n° 1157 est-il maintenu ?
M. Mathieu Darnaud. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Dix-huit mois, c’est très long. Si six mois ça paraît court, le Gouvernement accepterait un an. Je modifie donc en ce sens mon sous-amendement, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 1200 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
Amendement n° 303 rectifié bis
Alinéa 2
Remplacer le mot :
dix-huit
par le mot :
douze
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la ministre, je m’apprêtais justement à faire la même proposition. Un an me paraît être un délai tout à fait adapté dans la mesure où il correspond à la durée d’un exercice légal pour une entreprise et où il semble suffisant pour l’adaptation des professionnels concernés. Vous êtes sur la même longueur d’onde. Personnellement, je proposerai que l’on puisse transiger. Nous ne sommes pas au comice agricole, mais nous pouvons maquignonner un peu.
M. Alain Vasselle. Pourquoi, diable, n’y avez-vous pas pensé plus tôt ?
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote.
M. Michel Vaspart. Je considère qu’il s’agit d’un compromis tout à fait acceptable.
M. le président. Monsieur Darnaud, qu’advient-il de l'amendement n° 1157 ?
M. Mathieu Darnaud. Ayant pris la parole avant que Mme la ministre s’exprime, je souhaitais auparavant maintenir mon amendement. Néanmoins, la solution proposée par Mme la ministre faisant consensus, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 1157 est retiré.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1200 rectifié.
Mme Patricia Schillinger. Je souhaiterais obtenir une précision : l’interdiction de mise à disposition de fontaines proposant une offre à volonté de boissons concerne-t-elle aussi les hôtels proposant des forfaits all inclusive ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne. En français !
Mme Patricia Schillinger. Un forfait pension complète ou tout compris si vous préférez. Je pense par exemple aux instituts de thalassothérapies où les boissons sont offertes.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la sénatrice, le décret d’application prendra en considération l’ensemble des situations. Celle que vous décrivez entre bien dans le champ des pratiques qu’il s’agit d’encadrer. Ce ne sont pas simplement les fontaines qui sont visées ; c’est aussi le fait de donner un libre accès, sans limite, à des boissons sucrées.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1200 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 303 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 395 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 5 bis A, modifié.
(L'article 5 bis A est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, il est minuit. Afin de ne pas entretenir le suspense, je vous informe que, avec l’accord de la commission et du Gouvernement, la nuit étant ouverte, nous poursuivrons nos travaux jusqu’à une heure trente.
Article 5 bis B
(Supprimé)
Article 5 bis
(Non modifié)
L’article L. 2133-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase du premier alinéa, après le mot : « publicitaires », sont insérés les mots : « sur internet, » ;
2° À la seconde phrase du troisième alinéa et à la dernière phrase du quatrième alinéa, le taux : « 1,5 % » est remplacé par le taux : « 5 % ». – (Adopté.)
Article 5 ter
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 596 rectifié est présenté par Mmes Jouanno, Férat et Billon et M. Guerriau.
L'amendement n° 1044 est présenté par Mmes Archimbaud, Bouchoux et Blandin, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l'article L. 3232-4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 3232-4-... ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-4-... - Les campagnes mentionnées à l'article L. 3232-3 encouragent l'activité physique régulière et intègrent un volet de promotion des modes de déplacement actifs, notamment la marche et le vélo. »
L’amendement n° 596 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l'amendement n° 1044.
Mme Aline Archimbaud. Nous proposons de rétablir cet article, supprimé par la commission des affaires sociales du Sénat, qui prévoyait que les campagnes de prévention intègrent un volet de promotion des modes de déplacement actifs, notamment le vélo et la marche, dans l’encouragement de l’activité physique régulière.
Nous partons du principe que l’activité physique, à raison d’une demi-heure par jour, constitue un traitement pour à peu près toutes les pathologies contemporaines : maladies cardiovasculaires, obésité, diabète et cancers notamment.
La mobilité quotidienne, vers l’école ou le travail, constitue un gisement d’activité physique très important. Les économies de dépenses de santé qui représentent déjà 5,6 milliards d’euros par an pourraient s’élever à 15 milliards d’euros par an si la part modale du vélo atteignait entre 12 % et 15 % des déplacements.
L’étude réalisée par l’observatoire régional de santé d’Île-de-France en 2012, qui évalue l’impact d’une augmentation de la pratique du vélo en Île-de-France à l’horizon 2020, démontre que les bénéfices sur la santé de la pratique du vélo sont vingt fois supérieurs aux risques.
Aussi, mes chers collègues, je vous invite à accorder toute votre attention à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. J’ai apporté la même réponse pour d’autres amendements : la définition du contenu des campagnes de prévention de l’obésité et du surpoids relève des missions de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, en vertu des articles D. 3232-2 et D. 3232-3 du code de la santé publique. Cela ne relève donc pas de la loi. Par conséquent, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est favorable au rétablissement de cet article, supprimé par la commission des affaires sociales du Sénat. Il me paraît important de valoriser la pratique sportive et l’exercice physique.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Il faudrait que Mme la rapporteur et le Gouvernement s’entendent : cette mesure est-elle d’ordre réglementaire ou d’ordre législatif ? Si elle est d’ordre réglementaire, alors il faut opposer l’article 41 de la Constitution à cet amendement. Un point c’est tout.
Mme la rapporteur ou M. le président de la commission pourrait faire valoir que l’article 41 s’applique. (Mme Catherine Génisson s’exclame.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Monsieur Vasselle, l’article 41 ne sera applicable qu’à compter du 1er octobre. Pour l’instant, il ne l’est pas. C’est d’ailleurs pour cette raison que Mme la rapporteur vous a dit que cette mesure était d’ordre réglementaire et non pas législatif avant d’opposer l’avis défavorable de la commission.
Pour revenir sur cette question lancinante, depuis le début de l’examen de ce texte, de la pratique du sport en tant que traitement ou dans le but d’améliorer l’état de santé, je veux dire que les médecins depuis toujours prescrivent à leurs patients des activités sportives. Vouloir l’inscrire dans la loi, cela revient à dire carrément que les médecins ne savent pas qu’il leur faut dire à leurs patients de pratiquer une activité sportive. De fait, cela me semble totalement inutile. Les médecins ont conscience de la nécessité de pratiquer une activité sportive, laquelle peut faire partie des prescriptions qu’ils délivrent à leurs patients. L’inscrire dans la loi nous paraît tout à fait inadéquat.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Je ne vais pas contredire mon collègue et néanmoins confrère : en effet, les médecins connaissent par cœur ce mode de prescription. Les citoyens, quant à eux, beaucoup moins. De nos jours, on parle d’activité physique, de pratique sportive ; auparavant, on parlait de règles hygiéno-diététiques. Après avoir passé un quart d’heure à expliquer à un patient qu’il valait peut-être mieux pour lui d’avoir une activité physique – vélo, marche à pied ou autre chose –, on s’entendait répondre ceci : « Oui docteur, c’est très bien, mais qu’allez-vous me prescrire comme médicament ? »
La mention par la loi du recours à l’activité physique régulière et de la promotion des modes de déplacement actifs concerne beaucoup moins les médecins, qui sont bien conscients de la nécessité de ce type de prescriptions, que l’ensemble de nos concitoyens, qui s’y montrent souvent rétifs. Il est donc important de l’inscrire dans la loi.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La commission a, depuis le début de l’examen de ce texte, adopté une position constante.
Tout à l’heure, j’ai émis un avis défavorable sur un amendement de M. Commeinhes en lui opposant les mêmes arguments : je lui ai expliqué que les campagnes de sensibilisation ne relevaient pas du domaine législatif.
J’ai été suivie par le Gouvernement.
Dans le cas présent, l’argument est le même.
Aussi, je constate qu’il y a parfois des avis à géométrie variable.
M. Alain Vasselle. On va vous suivre, madame la rapporteur.
M. le président. En conséquence, l’article 5 ter demeure supprimé.
Article 5 quater
I. – Le titre unique du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« CHAPITRE III
« Lutte contre la maigreur excessive
« Art. L. 3233-1. – La politique de santé contribue à la lutte contre la valorisation de la maigreur excessive.
« Art. L. 3233-2. – Toute image publicitaire sur laquelle apparaît un mannequin mentionné à l’article L. 7123-2 du code du travail et dont la silhouette a été modifiée par un logiciel de traitement d’image doit comporter une mention qui indique que cette image a été retouchée.
« L’obligation prévue au premier alinéa s’impose à toute promotion, destinée au public, par voie d’imprimés et de publications périodiques. Dans les cas des messages publicitaires sur internet ou télévisés, elle ne s’applique qu’aux messages émis et diffusés à partir du territoire français et reçus sur ce territoire.
« Le fait pour tout annonceur ou promoteur de se soustraire à cette obligation est puni d’une amende de 30 000 €.
« Les conditions d’application du présent article sont déterminées par décret. »
II. – Le présent article entre en vigueur à la date de publication du décret mentionné à son dernier alinéa et au plus tard le 1er janvier 2017.
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par Mmes Laborde et Billon, MM. Amiel et Barbier, Mme Blondin, MM. Bonnecarrère et Détraigne, Mme Gatel, MM. Guérini, Guerriau, L. Hervé et Houpert, Mmes Jouanno, Jouve et Morin-Desailly et MM. Requier et Kern, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Après les mots :
contribue à
insérer les mots :
la prévention et au diagnostic précoce de l’anorexie mentale et des troubles des conduites alimentaires ainsi qu’à
II. – Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 3233-3. – Le fait de provoquer directement une personne à rechercher une maigreur excessive est réprimé par l’article 223-3 du code pénal. »
La parole est à M. Michel Amiel.
M. Michel Amiel. Cet amendement vise à lutter contre la maigreur excessive, sans faire la confusion avec l’anorexie mentale, qui est une maladie à part entière.
Nous proposons de rétablir dans le code de la santé publique l’infraction consistant à provoquer directement une personne à rechercher une maigreur excessive, punie par l’article 223–3 du code pénal d’un an d’emprisonnement et de 10 000 euros d’amende, dans l’esprit du texte transmis par l’Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet amendement comporte deux parties distinctes.
La première vise à rappeler que la politique de santé doit contribuer à la détection précoce et au diagnostic de l’anorexie mentale et des troubles du comportement alimentaire. Cet amendement établit par ailleurs un délit d’incitation à la maigreur excessive, qui figurait à l’article 5 quinquies A.
En fait, l’objet de cet article est tout à fait spécifique. Il ne s’agit pas des aspects médicaux liés au trouble du comportement alimentaire, qui font nécessairement déjà partie de la politique de santé. La détection et le diagnostic, qui doivent arriver le plus tôt possible, en font partie, comme l’ensemble des pathologies mentales, mais aussi le soin et le suivi, que l’amendement ne mentionne pas.
Il n’est pas utile de rappeler ce que la politique de santé publique comporte déjà par nature.
Si l’article 5 quater mentionne la politique de santé, c’est parce qu’elle sort de son domaine strict pour tenter de limiter la valorisation de la maigreur excessive dans notre société et donc, notamment, les images publicitaires.
La première partie de l’amendement n’est donc pas nécessaire.
En revanche, la seconde partie de l’amendement vise à créer un délit de provocation à la maigreur excessive. Nous aurons cette discussion à l’article 5 quinquies A. Il convient tout d’abord de rappeler que le type de provocation visé est essentiellement celui qui figure sur certains sites internet. Or ces sites sont tenus non pas par des entreprises de presse ou de mode, comme l’est la publicité, mais par des jeunes filles elles-mêmes anorexiques et qui expriment le symptôme de leur pathologie.
Ainsi que l’avait montré le rapport de Patricia Schillinger, si cette disposition est adoptée, elle aboutira principalement à pénaliser les jeunes filles souffrant d’anorexie et qui s’expriment sur internet.
Un travail particulièrement approfondi des sociologues, de la fédération nationale des associations d’aide aux troubles du comportement alimentaire, qui regroupe une trentaine d’associations, et des soignants a été publié en 2014. Il a montré que cette mesure nuirait aux soins, à l’inverse de ce qui se passe aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en Italie.
Il n’est pas question pour la commission des affaires sociales de nier les problèmes liés à l’incitation à la maigreur ; nous avons d’ailleurs adopté plusieurs dispositions en ce sens. Mais cette mesure-ci serait inefficace et surtout contreproductive pour les malades.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Celui-ci comporte en effet deux parties. La première vise à rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale relatif à la politique de santé en matière de lutte contre la maigreur excessive. J’y suis évidemment favorable. Or les sanctions mentionnées dans la seconde partie de l’amendement paraissent totalement disproportionnées puisque ce sont celles qui sont prévues à l’article 223-3 du code pénal, à savoir cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende, alors que l’Assemblée nationale avait prévu une sanction proportionnée d’un an d’emprisonnement et de 10 000 euros d’amende.
M. le président. Monsieur Amiel, l'amendement n° 2 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Amiel. Non, je le retire, monsieur le président, compte tenu de ce qui a été dit.
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié est retiré.
L'amendement n° 1194, présenté par Mmes Deroche et Doineau et M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 5
Remplacer le mot :
modifiée
par le mot :
affinée
II. - Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – L’article L. 3233-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant du I du présent article, entre en vigueur à la date de publication du décret mentionné à son dernier alinéa et au plus tard le 1er janvier 2017.
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Cet amendement vise à préciser que l'obligation d'apposer une mention spéciale sur les photographies de mannequins s'applique lorsque la silhouette a été affinée, et non pas modifiée.
Il tend en outre à procéder à une coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Modifier une silhouette sur une image, ce n’est pas seulement l’affiner. Présentement, nous avons un débat sur la maigreur excessive, mais on peut aussi envisager le grossissement de certaines parties du corps, les muscles par exemple – les hommes sont davantage visés, mais cette pratique peut aussi concerner les femmes –, par rapport à d’autres afin de parvenir à des proportions corporelles qui seraient jugées plus attractives ou plus élégantes.
Le but, c’est d’éviter toute modification de l’image, et non pas simplement l’affinement de la silhouette, même s’il est probable que c’est ce qui est le plus souvent pratiqué. Mais cela peut consister aussi en la suppression de rides ou de taches.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Nous avions modifié cet article en le réduisant à l’affinement, car il avait trait à la maigreur excessive.
M. le président. Madame la corapporteur, l'amendement n° 1194 est-il maintenu ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'article 5 quater, modifié.
(L'article 5 quater est adopté.)
Article additionnel après l'article 5 quater
M. le président. L'amendement n° 510 rectifié, présenté par Mmes D. Gillot, Espagnac et Khiari et MM. S. Larcher, Antiste, Duran, Manable et Cornano et les membres du , est ainsi libellé :
Après l’article 5 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase de l'article L. 718–4 du code de l'éducation est ainsi modifiée :
1° Après les mots : « de politique sociale et de », sont insérés les mots : « promotion de la » ;
2° Après le mot : « santé », sont insérés les mots : « , particulièrement sur les questions de consommation d’alcool, de produits psychoactifs et de tabac et de prévention en matière de santé, ».
La parole est à Mme Dominique Gillot.
Mme Dominique Gillot. Cet amendement vise à insérer un article additionnel afin de préciser l’article L. 718-4 du code de l’éducation tel qu’il avait été rédigé par la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, laquelle a déjà conféré des compétences en matière de politique sociale et de santé, notamment dans la rédaction des contrats de site des établissements.
De nombreuses études, réalisées par exemple par les agences régionales de santé, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, la MILDECA, des organisations étudiantes ou de jeunesse, montrent que la consommation de produits néfastes à la santé, qu’ils soient licites ou illicites, est importante chez les jeunes, et ne va malheureusement pas en diminuant. Les étudiants vivant en autonomie sont particulièrement concernés par le recours à ces substances.
Des avancées importantes ont été obtenues ces dernières années, notamment sur l’interdiction de fumer dans les lieux accueillant du public, particulièrement dans les espaces publics au sein des établissements scolaires.
Il reste pourtant beaucoup à faire, notamment pour la consommation d'alcool, comme l’ont montré les débats que nous avons eus à ce sujet depuis le début de la session.
Les pratiques de consommation, notamment excessive, ont principalement lieu dans un cadre privé : cela rend inopérantes les actions de régulation publique de la consommation.
Aussi, les actions d’éducation et de prévention deviennent fondamentales si l’on veut exercer une influence sur les comportements individuels.
Les acteurs de l’enseignement supérieur, singulièrement les universités, les écoles et le réseau des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, les CROUS, ont donc une responsabilité particulière, que leur confère déjà la loi de 2013 au titre de l’article L. 123–2 du code de l’éducation, qui dispose notamment : « Le service public de l'enseignement supérieur contribue : […] à l'amélioration des conditions de vie étudiante, à la promotion du sentiment d'appartenance des étudiants à la communauté de leur établissement, au renforcement du lien social et au développement des initiatives collectives ou individuelles en faveur de la solidarité et de l'animation de la vie étudiante ».
C’est pourquoi il est proposé, au travers de cet amendement, que les établissements assurant la coordination au titre de l’article L. 718–2 du code de l’éducation et les CROUS, auxquels l’article L. 718–4 confie la responsabilité d’établir un projet territorial d’amélioration de la vie étudiante, intègrent dans ces schémas un chapitre consacré à la promotion de la santé et à la lutte contre les addictions.
Un tel ajout ferait la démonstration du soutien institutionnel et constituerait un encouragement aux actions de prévention menées par les acteurs associatifs ou mutualistes œuvrant sur le terrain ayant fait le choix d'une politique de prévention partagée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’article L. 718-4 du code de l’éducation prévoit que l’établissement d’enseignement supérieur chargé d’organiser la coordination territoriale avec les autres établissements élabore avec le CROUS un projet d’amélioration de la qualité de la vie étudiante et de promotion sociale sur le territoire, en y associant l’ensemble des établissements partenaires.
Le contenu du projet est mentionné en termes généraux : il s’agit de présenter « une vision consolidée des besoins en matière de logement étudiant, de transport, de politique sociale et de santé et d’activités culturelles, sportives, sociales et associatives ». Selon la loi, la définition des besoins en santé fait donc pleinement partie de ce projet d’amélioration de la vie étudiante.
Au travers de votre amendement, madame la sénatrice, vous entendez préciser le contenu du projet en prévoyant qu’il concerne « particulièrement les questions de consommation d’alcool, de produits psychoactifs et de tabac et de prévention ».
Nous sommes bien sûr convaincus de la nécessité de renforcer encore la lutte contre les addictions chez les jeunes. Il ne nous semble cependant pas opportun de détailler dans la loi les divers aspects dont devra traiter le projet dont il est question. Il appartient à chaque réseau de définir les besoins, et nous ne pouvons en établir le catalogue dans la loi.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je comprends très bien la préoccupation exprimée par Mme Gillot et je partage son objectif et sa volonté. Il serait effectivement très utile que, dans chaque lieu de vie étudiante, soient mis en place des structures ou, en tout cas, des programmes d’accompagnement pour que les conduites addictives soient limitées au maximum.
La rédaction qui a été adoptée dans le texte qui vous est proposé correspond aussi à l’acception relativement large de la santé qui était partagée par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, c’est-à-dire avoir une vision globale de la santé des étudiants sans entrer dans chacune des catégories.
J’émets un avis de sagesse, pour marquer l’intérêt que j’éprouve à l’égard de votre amendement, madame Gilllot, tout en justifiant la rédaction initiale.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je suis toujours très attentif à l’avis de Mme la rapporteur, qui s’est exprimée une fois de plus dans l’esprit de ce qui a été défendu tout à l’heure par M. le président de la commission. Il me semble, madame la ministre, que cela relève plus d’une circulaire adressée aux présidents des universités que de la loi.
À mon sens, la sagesse voudrait que le Sénat rejette cet amendement et vous invite à rédiger une telle circulaire pour aller un peu plus loin que ce qui se pratique aujourd’hui en la matière.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Puisque Mme la ministre prescrit la sagesse, je vais me permettre d’insister un peu.
Effectivement, dans la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, figure une préoccupation particulière en vue de l’amélioration des conditions de vie étudiante portant notamment sur le logement, la culture et la prévention en matière de santé.
Actuellement, les établissements sont en train de rédiger leurs contrats de site qui doivent intégrer cette partie. Pour siéger dans plusieurs conseils d’administration, je me rends compte que l’acception de prévention en matière de santé recouvre un périmètre différent suivant les établissements. Or je vous rappelle que les établissements sont autonomes et qu’une circulaire ne peut pas venir prescrire de manière beaucoup plus importante l’acception de ces termes-là.
C’est pourquoi, en tant que rapporteur de la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, il m’a paru nécessaire, dans le cadre du projet de loi de modernisation de notre système de santé, d’introduire cette précision pour encourager les établissements à prévoir, dans leur contrat de site, des programmes qui se préoccupent de la consommation d’alcool, de produits psychoactifs et de tabac et de prévention en matière de santé de manière beaucoup plus précise.
Je vous encourage donc à voter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Il est important que, compte tenu de l’autonomie des établissements, nous puissions acter ensemble un engagement fort pour faire reculer notamment l’alcoolisation et la consommation de certains autres produits.
Il est intéressant d’avoir un tel débat à ce moment. En effet, celui que nous avons eu cet après-midi s’est révélé assez navrant – nous avons alors assisté à des attaques en règle notamment contre la loi Evin – et n’a pas donné une bonne image de notre représentation nationale. On a eu l’impression que l’on était plus sensible au lobbying…
M. Roland Courteau. Mais non !
Mme Laurence Cohen. … qu’à la santé et à la prévention en direction des jeunes. Car, je le rappelle, c’est dans le cadre de la prévention que cet article a été modifié.
Aussi, nous soutiendrons avec enthousiasme le présent amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 510 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5 quinquies A
(Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 3 rectifié, présenté par Mmes Laborde, Billon et Blondin, MM. Bonnecarrère et Détraigne, Mme Gatel, MM. Guérini, Guerriau, L. Hervé et Houpert, Mmes Jouanno et Jouve, M. Kern et Mme Morin-Desailly, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
La section 1 du chapitre III du titre II du livre II du code pénal est complétée par un article 223-2-1 ainsi rédigé :
« Art. 223-2-1. – Le fait de provoquer une personne à rechercher une maigreur excessive en encourageant des restrictions alimentaires prolongées ayant pour effet de l’exposer à un danger de mort ou de compromettre directement sa santé est puni d’un an d’emprisonnement et de 10 000 € d’amende. »
La parole est à Mme Françoise Gatel.
Mme Françoise Gatel. Dans la logique de l’amendement proposé à l’article 5 quater, cet amendement tend à rétablir l’article 5 quinquies A supprimé par la commission des affaires sociales, pour que soit puni par le code pénal d’un an d’emprisonnement et de 10 000 euros d’amende le fait de provoquer une personne à rechercher une maigreur excessive.
Les dégâts considérables causés par les restrictions alimentaires subies principalement par des jeunes filles pour suivre les diktats de la mode justifient que la loi réprime énergiquement toute incitation dans ce domaine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Je me suis déjà exprimée tout à l’heure sur ce sujet, lors de la discussion du précédent amendement.
La délégation aux droits des femmes constate avec raison « les dégâts considérables causés par les restrictions alimentaires subies par des jeunes filles pour suivre les diktats de la mode ».
Néanmoins, la mesure supprimée par la commission et que cet amendement tend à rétablir a une portée bien supérieure à cette simple incitation. Ainsi que l’avait montré le rapport de notre collègue Patricia Schillinger, si cette disposition était adoptée, elle aboutirait principalement à pénaliser les jeunes filles souffrant d’anorexie et qui s’expriment sur internet.
Donc, s’il n’est pas question pour nous de nier les problèmes liés à l’incitation à la maigreur, nous ne souhaitons pas que ce soit les personnes atteintes de cette pathologie mentale, qui sont des victimes, subissent les effets du délit d’incitation à la maigreur excessive.
Par conséquent, la commission sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est favorable à la réintroduction de dispositions adoptées à l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Mme la rapporteur a bien expliqué que j’avais rédigé un rapport sur ce point. Il faut en rester à ce que nous avions voté à l’époque. Je suivrai donc Mme la rapporteur et ne voterai pas cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour explication de vote.
Mme Hermeline Malherbe. Je trouve au contraire que ces dispositions sont beaucoup plus précises que celles de l’article 5 quater. De plus, les personnes évoquées par Mme la rapporteur étant victimes elles-mêmes, elles ne peuvent pas être également incitatrices. N’éprouvant donc aucune gêne de ce point de vue, je voterai cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Nous sommes quelque peu perplexes face à cet amendement. Les explications données par Mme Gatel nous semblent tout à fait convaincantes. Néanmoins, j’ai le souvenir du rapport qu’avait présenté Patricia Schillinger à la commission des affaires sociales et dans lequel elle exprimait déjà ce qu’elle vient de dire à l’instant.
Je serai plutôt tentée de suivre ce que nous dit Patricia Schillinger, puisque son rapport avait été approuvé à l’unanimité par la commission. Ne pas aller dans ce sens aujourd’hui équivaudrait à revenir sur le contenu même de ce rapport.
Le groupe CRC s’abstiendra sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. À mon sens, sur ce sujet très difficile, il faut distinguer clairement deux types de situations.
Un certain nombre de personnes atteignent une maigreur excessive, par souci de répondre à certains critères esthétiques actuels. Parallèlement, d’autres sont victimes d’une maladie mentale, qui s’appelle l’anorexie mentale.
Il me semble important de pénaliser les personnes qui incitent à de tels comportements de maigreur excessive : il s’agit là d’un véritable fléau social. Mais il faut séparer ce qui relève de la maladie et ce qui relève du désir de se conformer à tel stéréotype de beauté. Nous ne sommes plus à l’époque de Rubens ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Milon, corapporteur.
M. Alain Milon, corapporteur. Mes chers collègues, permettez-moi de vous le rappeler : l’important rapport rédigé par Patricia Schillinger,…
M. Gilbert Barbier. Excellent rapport !
M. Alain Milon, corapporteur. … a été voté à l’unanimité par la commission des affaires sociales.
De surcroît, sur ce sujet, nous avons entendu l’avis des psychiatres, dans le cadre d’une audition importante à laquelle plusieurs commissaires des affaires sociales ont pris part. Ces praticiens nous ont mis en garde au sujet de cette mesure. « Surtout, nous ont-ils dit, ne votez pas une telle disposition. » Ils ont insisté sur le danger que cette mesure représentait pour les patients, qui sont souvent des patientes, victimes d’anorexie mentale. Ces personnes risqueraient d’être punies, alors qu’elles s’expriment au sujet de leur maladie dans le but de s’en sortir.
Aussi, je vous demande de suivre l’avis de Mme la rapporteur, les conclusions établies par Patricia Schillinger, et surtout – pardonnez-moi d’insister sur ce point – l’avis que nous ont donné les psychiatres : n’instaurez pas une telle mesure !
M. le président. En conséquence, l’article 5 quinquies A demeure supprimé.
Article 5 quinquies B
(Supprimé)
Article 5 quinquies C
(Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 707, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le chapitre II du titre unique du livre II bis de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 3232-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 3232-10. – La politique de santé contribue à la prévention, au traitement et à la lutte contre la dénutrition, notamment au cours du traitement du cancer, des maladies chroniques et en péri-opératoire, dans tous les établissements de santé, les établissements d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes, en situation ambulatoire et à domicile. »
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Mes chers collègues, il s’agit là d’un sujet qui, je le sais, a déjà fait l’objet de longs débats en commission.
Avant de détailler les arguments de fond, je tiens à apporter cette précision : c’est à l’invitation d’un professeur de médecine que j’ai déposé le présent amendement. Ce nutritionniste, que je connais personnellement, centre ses recherches sur le problème du diabète chez les personnes âgées. Il a souhaité attirer mon attention sur ce sujet. Les dispositions de cet amendement ne sont donc, en aucun cas, une invention de ma part.
Avant son examen par la commission des affaires sociales du Sénat, le présent projet de loi indiquait, par l’article que le présent amendement tend à rétablir : « La politique de santé contribue à la prévention, au traitement et à la lutte contre la dénutrition, notamment à travers le suivi nutritionnel des établissements d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes », les EHPAD.
Cet article reconnaissait l’existence d’un problème de santé publique majeur, la dénutrition, et ciblait particulièrement les personnes âgées.
La dénutrition est un état pathologique qui touche près de 800 000 personnes en France et constitue l’un des principaux facteurs de perte d’autonomie chez les personnes âgées. En l’occurrence, nous sommes donc face à un réel problème de santé publique. Voilà pourquoi le rôle de l’État doit être précisé et affirmé dans la loi. C’est là le souhait exprimé par le médecin nutritionniste que je viens d’évoquer.
Pour la période 2006–2010, le rapport d’évaluation du programme national nutrition santé, le PNNS, dressait déjà ce constat : entre 4 % et 10 % des 10 millions de personnes âgées de plus de soixante-cinq ans vivant, en France, à leur domicile souffrent de dénutrition. Ce taux atteint même 25 % à 30 % pour celles d’entre elles qui souffrent de perte d’autonomie – cette situation se double, souvent, d’une perte de repères.
À travers son axe 3, le PNNS 2011–2015 prévoit d’organiser le dépistage et la prise en charge du patient en dénutrition, afin de réduire la prévalence de celle-ci.
Quant à nous, par cet amendement, nous vous proposons de rétablir l’article 5 quinquies C dans une rédaction plus large. La lutte contre la dénutrition et la prévention de ce phénomène doivent devenir des objectifs en cours de traitement, pour le cancer comme pour les maladies chroniques et empiriques opératoires, ce dans tous les établissements de santé et y compris, bien entendu, au sein des EHPAD.
En effet, si la prise en charge de la dénutrition est cruciale chez le sujet âgé, elle représente également un enjeu majeur au titre des pathologies chroniques comme l’insuffisance respiratoire, l’insuffisance rénale et les maladies neuromusculaires.
Les médecins qui se trouvent dans cet hémicycle ne me contrediront pas : pour un patient atteint d’un cancer, la dénutrition est un facteur pronostique de perte de chances majeur.
À cet égard, il ne s’agit pas de faire la révolution ! Il s’agit simplement d’inscrire dans le code de la santé publique un objectif de lutte contre la dénutrition, pour déterminer, mettre en œuvre et coordonner les politiques de santé publique.
À titre personnel, je me sens particulièrement concernée par ce problème. Je compte, dans mon entourage, plusieurs personnes âgées dépendantes. Or leur premier signe de faiblesse a été le fait qu’elles se nourrissent beaucoup moins bien. Lorsque, alarmée par de petites écorchures ou des plaies variqueuses qui ne guérissaient pas, je me suis tournée vers un médecin, ce dernier m’a répondu : cette personne âgée se nourrit mal. En dépit des médicaments, ces plaies ne guérissaient pas !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La commission a supprimé l’article 5 quinquies C, qui, alors, était plus strictement centré sur les EHPAD. À nos yeux, ses dispositions ne relevaient pas du domaine de la loi, mais des bonnes pratiques à promouvoir au niveau des établissements.
Cet amendement tend à rétablir cet article, en élargissant son champ à d’autres pathologies, aux soins à domicile, à la médecine ambulatoire.
Madame Didier, la commission est pleinement consciente de l’importance que revêtent les problèmes de dénutrition. À travers cet amendement, vous souhaitez assurer un affichage. Mais, je le répète, ces mesures relèvent des soins à apporter aux malades ou aux personnes âgées. Nous ne voyons pas l’intérêt de cibler spécifiquement ce problème au sein du présent projet de loi.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je note à mon tour que cet amendement ne tend pas simplement à rétablir des dispositions précédemment discutées : y figurent également des mesures nouvelles.
Je comprends parfaitement la logique suivie. Toutefois, la dénutrition fait déjà l’objet de mesures spécifiques dans le cadre du programme national nutrition santé. Ensuite, et surtout, des dispositions de cette nature figurent déjà dans le rapport introductif au projet de loi, actuellement en discussion, relatif à l’adaptation de la société au vieillissement. Ce texte d’orientation fixe un cadre. Il est assorti d’un très long rapport introductif, où sont résumés tous ces éléments.
En conséquence, le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Mme Didier l’a souligné à très juste titre : les personnes dénutries sont souvent affligées d’escarres. Pour guérir ces plaies et, plus généralement, améliorer leur état de santé, le meilleur moyen est souvent de leur donner des protéines.
Pour les personnes âgées résidant dans les EHPAD, l’ensemble des intervenants, notamment les infirmières, sont vigilants face à ces problèmes. Les médecins y sont très attentifs. Ils prescrivent systématiquement des hyperprotidiques lorsque telle ou telle personne éprouve des difficultés pour s’alimenter, notamment pour déglutir.
A contrario, les personnes âgées vivant à leur domicile peuvent prendre plus ou moins bien les repas qui leur sont apportés. Dès lors, outre les personnes qui se chargent de la livraison des repas, il est nécessaire que des intervenants spécifiques se rendent au domicile de ces personnes âgées, avec pour mission d’identifier telle ou telle fragilité.
Dès lors, on entre dans un problème social. La famille doit être présente. À défaut, les instances de coordination ou les référents doivent être informés de l’aggravation de l’état, de la fragilité de telle ou telle personne âgée.
Je le répète, en l’occurrence, nous sommes face à un problème social, qui ne relève pas nécessairement de ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je souscris pleinement aux précisions que M. Chasseing vient d’apporter : aussi, je n’ajouterai rien sur ce point. Je me contenterai d’apporter une précision.
Je ne nie nullement le bien-fondé de cet amendement. Je comprends les préoccupations exprimées par notre collègue, qui me semblent tout à fait justifiées.
Cela étant, il convient d’attirer l’attention du Gouvernement sur une nécessité : surveiller plus attentivement le fonctionnement de certains établissements d’hébergement pour personnes âgées ou adultes handicapés. En effet, diverses structures font face à des problèmes de maltraitance passive.
À mon sens, les conseils départementaux comme les services de sécurité sociale ne sont pas suffisamment attentifs aux modes de fonctionnement de ces établissements.
Il y a quelques années, notre ancien collègue M. Julhiard s’était rendu, au titre d’un rapport d’information, dans divers établissements pour handicapés, en vue d’enquêter sur les cas de maltraitance active. À cette occasion, il avait dressé ce constat : contrairement à la maltraitance active, qui peut être détectée assez facilement, la maltraitance passive est souvent due à la négligence ou au manque d’attention de la part des intervenants travaillant au sein de ces structures.
Selon moi, mieux vaut mettre l’accent sur cet enjeu. Cela étant, les dispositions de cet amendement nous permettent d’évoquer ce problème et d’y apporter une attention particulière.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Mes chers collègues, je le répète : les dispositions de cet amendement ont été conçues par un professeur spécialiste de la nutrition. Il ne s’agit en rien d’une invention de ma part !
Selon ce praticien, il convient d’attirer davantage l’attention des pouvoirs publics, du corps médical et, bien sûr, de l’entourage proche des personnes âgées concernées, sur le problème de la dénutrition.
On ne saurait réduire cette question à un problème social. Au sein de ma famille, nous n’avions pas conscience que telle ou telle personne âgée souffrait de dénutrition. Or, une fois que les médecins ont attiré notre attention sur ce point, nous nous sommes montrés beaucoup plus vigilants et, de ce fait, la situation s’est améliorée.
Il est important de fixer les objectifs. Ensuite, chacun fera au mieux, au sein du corps médical comme dans les familles. Mais, à mon sens, énoncer ces objectifs permet d’émettre un signal et d’exprimer une intention particulière.
Je ne voudrais pas trahir la confiance que le médecin nutritionniste avec lequel cet amendement a été élaboré avait placée en moi. Aussi, je maintiens mon amendement. Je l’avoue, je comprends mal les arguments qui m’ont été opposés.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. En commission, la pertinence de ces dispositions a déjà donné lieu à un véritable débat. Aujourd’hui, le message est clair : les diverses politiques déployées doivent inclure cet objectif.
Néanmoins, les discussions qui viennent d’avoir lieu dans cet hémicycle le montrent clairement : en définitive, on pointe du doigt des catégories et des structures. Face à ces situations délicates, veillons à ne pas mettre en cause spécifiquement les EHPAD, ou celles et ceux qui accompagnent les personnes âgées ou handicapées. Moi-même, j’ai revu mon appréciation de ce sujet au cours de la journée. Au total, il me semble que ces débats renforcent les interrogations exprimées en commission.
À mes yeux, l’argument exposé par Mme la ministre est tout à fait pertinent : cet enjeu est traité dans le projet de loi relatif au vieillissement de la population. L’inscrire, ce soir, dans le présent texte pourrait conduire à émettre un message négatif à destination d’un ensemble de professions, qui s’investissent énormément auprès des personnes âgées.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.
M. Michel Amiel. Mes chers collègues, permettez-moi de répéter, dans cet hémicycle, ce que j’ai déjà dit en commission : la dénutrition des personnes âgées est un véritable problème de santé publique. Il s’observe à la fois dans les établissements spécialisés comme les EHPAD – à ce titre, je précise qu’il frappe également les personnes handicapées – et à domicile.
Les solutions à apporter sont, pour partie, mais pas uniquement, de l’ordre des bonnes pratiques médicales.
À mon sens, ces bonnes pratiques ne relèvent pas du domaine de la loi. Mais il ne faut pas oublier non plus celles qui sont applicables par les autres personnes chargées de l’accompagnement, qu’il s’agisse du personnel soignant ou de la famille.
Prenons l’exemple, extrêmement simple, d’une personne âgée qui est en situation de perte d’autonomie plus ou moins grave, résidant dans un EHPAD ou à son domicile. Lorsque l’on pose son repas sur sa table et que l’on s’aperçoit, une demi-heure plus tard, qu’elle n’a rien mangé, le problème ne relève plus de la santé publique au sens strict : il devient un problème de comportement.
Il s’agit là d’un sujet ô combien grave. Tous les médecins, dont je suis, en mesurent la spécificité. Mais il ne me semble pas que cette question soit du ressort de la loi.
M. le président. La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.
M. Gérard Roche. Je partage à peu de choses près le point de vue de M. Amiel sur cet amendement que j’ai trouvé surprenant.
À mes yeux, cet amendement comporte deux parties : une partie sanitaire et une partie sociale. La première renvoie aux patients souffrant de pathologies lourdes – les insuffisances respiratoires ou rénales, les cancers en stades terminaux – qui entraînent un amaigrissement, voire un symptôme de dénutrition avec des complications telles que des escarres. Rongées par la maladie, ces personnes n’ont plus faim.
Le soin et le respect dus à ces malades consistent à adapter la nutrition à ce manque d’appétit, et même dans certains cas au profond dégoût que provoque la nourriture, en leur proposant par exemple des compléments alimentaires.
Le vieillissement entraîne également des problèmes de nutrition, posant la question de la maltraitance passive, à domicile comme cela a déjà été dit, mais aussi dans les EHPAD dont je souhaite dire un mot.
Dans certains EHPAD ayant un GIR moyen très élevé et où sont donc pris en charge de nombreux patients dépendants, il arrive que deux soignants soient chargés de faire manger trente personnes. Or il ne suffit pas de poser le plateau devant de tels patients, il faut prendre le temps de les aider à se nourrir, ne serait-ce qu’en ouvrant un pot de yaourt. Il ne s’agit pas là de maltraitance ou de mauvaise volonté mais de manque de moyens, ce qui soulève la question du forfait journalier et du reste à charge des familles.
À mes yeux, cet aspect plus social du problème devra être repris dans le cadre du débat sur le projet de loi sur le vieillissement, par le biais d’un amendement. Pour le reste, on est dans le domaine du soin et cet aspect n’a pas sa place dans la loi.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je suis étonnée par les arguments avancés. J’ai le sentiment qu’il est devenu extrêmement compliqué de parler de prévention sans être accusé d’attaquer le personnel des EHPAD, et notamment les médecins.
Que met-on dans un projet de loi de modernisation du système de santé si l’on ne peut pas parler de soin, d’hôpitaux et de groupements hospitaliers territoriaux sans poser la question des moyens ? Dans le cadre actuel de restrictions budgétaires, nos propositions n’iront pas bien loin.
On nous dit que tout relève de bonnes pratiques, que les médecins ont une très bonne formation et qu’ils savent tant de choses qu’une loi serait superflue. Pardonnez-moi l’expression, mais nous marchons sur la tête !
En outre, il ne faut pas faire dire à l’amendement ce qu’il ne dit pas ! Les termes « maltraitance » ou « contrainte » n’y figurent pas, mais il est précisé que la politique de santé contribue à la prévention, au traitement et à la lutte contre la dénutrition, notamment en cours de traitement dans les différents lieux accueillant les personnes âgées, pas seulement les EHPAD. L’amendement a pour objet d’attirer l’attention sur la situation actuelle de l’allongement de la durée de vie et de sensibiliser l’ensemble de la population à cette problématique.
Madame la ministre, peut-être n’est-ce pas le bon support législatif, mais nous pensons qu’un projet de loi de modernisation de notre système de santé doit mentionner ces questions. L’article 5 quinquies C était d’ailleurs presque exactement identique à l’amendement que nous proposons, à ceci près que nous avons ajouté « domicile » et « situation ambulatoire » pour ne pas stigmatiser les EHPAD.
Pour toutes ces raisons je vous demande d’apporter votre soutien à l’amendement que nous proposons.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Cet amendement traite des problèmes de nutrition de deux publics différents : d’un côté, les malades – ce point a été explicité par notre collègue M. Gérard Roche – et, de l’autre, les personnes âgées ou handicapées.
Je suis convaincue que les auteurs de cet amendement ne souhaitaient pas stigmatiser les personnels prenant en charge les personnes dépendantes. En ce qui concerne les personnes âgées ou handicapées, mais surtout les personnes âgées, la dépendance entraîne presque automatiquement la dénutrition. Les soignants qui prennent en charge ces personnes étant extrêmement dévoués, ce ne sont pas les conditions d’accueil qui sont en cause, mais la situation de fin de vie de ces personnes qui leur fait perdre l’envie d’à peu près tout, y compris celle de se sustenter.
Cet amendement est-il dans le bon véhicule législatif, je ne sais pas, mais il attire l’attention sur des questions importantes et, il faut le reconnaître, difficiles à résoudre.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Compte tenu des témoignages et des propos tenus notamment par Mme Cohen, je soutiendrai cet amendement, car il faut souvent du bon sens. Je tiens à saluer le travail de nos collègues de la commission des affaires sociales sur ce texte qui renvoie au code de la santé publique.
Les établissements d’hébergement – on a évoqué les EHPAD – posent la question de la gouvernance et du manque criant de personnel. Toutefois, l’aspect financier, et notamment le reste à charge, ne doit pas cacher la dimension humaine du travail effectué en leur sein par les personnels, aides-soignantes et agents qui ne comptent pas leur temps et ont le souci constant de mieux faire.
Il s’agit d’un important sujet de société.
M. le président. En conséquence, l’article 5 quinquies C demeure supprimé.
Article 5 quinquies D
Le chapitre III du titre II du livre Ier de la septième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° La sous-section 2 de la section 1 est complétée par un article L. 7123-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 7123-2-1. – L’exercice d’une activité de mannequin est interdit à toute personne dont l’indice de masse corporelle est inférieur à des niveaux définis, sur proposition de la Haute Autorité de santé, par arrêté des ministres chargés de la santé et du travail.
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles toute personne qui exploite une agence de mannequins ou qui s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin veille au respect de l’interdiction définie au premier alinéa. » ;
2° L’article L. 7123-27 est ainsi rétabli :
« Art L. 7123-27. – Le fait pour toute personne qui exploite une agence de mannequins ou qui s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin de ne pas veiller au respect de l’interdiction définie au premier alinéa de l’article L. 7123-2-1 est puni d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 75 000 €. »
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, sur l’article.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, mon intervention sur l’article vaudra également présentation de l’amendement n° 230 que j’ai déposé et soumis à l’attention de la commission et de la Haute Assemblée.
L’article 5 quinquies D introduit par l’Assemblée nationale visait à interdire l’exercice de l’activité de mannequin à toute personne dont l’indice de masse corporelle, ou IMC, serait inférieur à une valeur définie.
La difficulté tient au fait que l’Assemblée nationale a fait référence à cet indice. Il faut le rappeler, si l’anorexie mentale est un fléau qui touche près de 40 000 personnes en France et qui doit être fermement combattu, elle ne relève pas du domaine législatif et ne peut encore moins être réduite à un simple calcul mathématique. La pertinence de ce critère d’évaluation suscite des réserves et soulève des problèmes médicaux, juridiques et économiques.
L’anorexie est une maladie psychique complexe qui doit être appréhendée de manière globale par la médecine et non par un simple chiffre qui n’est qu’un indicateur. De plus, les limites des seuils IMC recommandés par l’OMS ne varient pas selon la morphologie d’une personne, son sexe, son âge. Il faut donc les interpréter avec la plus grande prudence.
Ce critère ne s’applique qu’à l’embauche du mannequin, et il est susceptible de varier au fil du temps sans aucune vérification ultérieure, ce qui ne peut en rien garantir l’état de santé du mannequin sur le long terme.
Dès lors qu’il s’appliquera au secteur spécifique du mannequinat, ce critère pourrait aussi être étendu à d’autres secteurs d’activité et d’autres métiers. Définira-t-on un seuil IMC par métier qui interdira certaines embauches ? Un IMC d’obésité sera-t-il défini pour empêcher l’accès à certaines professions ? Définira-t-on un IMC pour autoriser la pratique de certains sports, comme pour l’haltérophilie, le marathon… ?
Il introduit une discrimination forte à l’embauche, puisque « l’apparence physique » ou « l’état de santé » font partie des discriminations mentionnées à l’article L. 1132-1 du code du travail.
Il faut aussi s’interroger sur les conséquences économiques de cet unique critère d’embauche qui défavoriserait les agences de mannequins françaises au profit des agences étrangères ou les inciterait fortement à délocaliser leurs activités, Paris étant la capitale de la mode.
L’amendement n° 230 qui viendra en discussion dans un instant vise à supprimer le critère d'IMC dans l'exercice de l'activité de mannequin et à rappeler spécifiquement aux agences de mannequin leurs obligations, qui relèvent des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail, de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ».
Il permet au médecin du travail de jouer pleinement son rôle tant dans la prévention, dans le constat d’un risque pour la santé du mannequin que dans ses recommandations médicales auprès de l’agence de mannequins conformément aux articles L. 4624-1 et L. 4624-3 du code du travail.
Tels sont les éléments de l’exposé des motifs qui justifient cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L'amendement n° 230 est présenté par M. Vasselle.
L'amendement n° 320 est présenté par Mme Schillinger.
L'amendement n° 373 rectifié bis est présenté par Mme Imbert, M. D. Laurent, Mmes Cayeux, Morhet-Richaud et Deromedi, M. Charon, Mmes Deseyne et Mélot, MM. Fouché et Mouiller, Mme Giudicelli, M. Allizard et Mme Gruny.
L'amendement n° 899 rectifié est présenté par MM. Barbier, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Mézard, Requier et Vall.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 1 à 4
Rédiger ainsi ces alinéas :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° La sous-section 1 de la section 2 du chapitre III du titre II du livre Ier de la septième partie est complétée par un article L. 7123-16 ainsi rédigé :
« Art. L. 7123-16. – En application des articles L. 4121-1 et suivants, toute personne qui exploite une agence de mannequin ou qui s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un mannequin, veille à ce que l’exercice du métier de mannequin et les exigences propres à celui-ci ne mettent pas en danger la santé de l’intéressé.
« La médecine du travail contrôle que les conditions de travail du mannequin ne mettent pas en danger son état de santé et sa croissance et peut prescrire dans le cadre des articles L. 4624-1 et L. 4624-3 toutes mesures pertinentes. »
L’amendement n° 230 a été précédemment défendu.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 320.
Mme Patricia Schillinger. Il s’agit d’un amendement identique à celui qui vient d’être présenté, et qui vise donc à supprimer le critère d’IMC dans l’exercice de l’activité de mannequin et à redonner toute sa place à la médecine du travail.
Je tiens à rappeler que l’anorexie est une pathologie, et qu’un enfant ou un bébé peuvent être anorexiques sans que la mère les ait poussés à la maigreur extrême.
J'attire votre attention sur les dangers de l'utilisation de l'IMC, seul critère d'évaluation utilisé dans la rédaction actuelle de l'article pour juger de l'état d'anorexie d'un mannequin. L'IMC n'est qu'un indicateur et ne peut être considéré comme une donnée absolue. Comme je l'avais mentionné dans mon rapport de 2008 sur l'anorexie, l'IMC a ses limites.
Selon le docteur Xavier Pommereau, « l'IMC dépend de l'âge et ne prend pas en compte les différences de constitution », c'est-à-dire la masse musculaire et osseuse. Une maigreur constitutionnelle ou un corps trapu entraîneront des IMC bas ou élevés sans que le sujet soit dans un danger quelconque.
L'OMS est ainsi régulièrement interpellée par les gouvernements asiatiques sur l'inadaptation de l'indicateur à leurs populations et a mis en place plusieurs groupes d'experts successifs pour tenter de remédier à cette critique. Certains spécialistes envisagent même d'élaborer plusieurs IMC. Faire de l'IMC une référence légale ne semble donc pas être un choix satisfaisant, et il est essentiellement destiné à lutter contre l'obésité dans le cadre de comparaisons internationales.
De plus, la confusion entre maigreur et anorexie est néfaste, et il est essentiel de bien cerner ce qui relève de la pathologie. Il convient donc d'être très prudent en la matière.
La volonté de lutter contre des comportements jugés dangereux ne doit pas aboutir à imposer des normes corporelles. L'introduction d'une norme dans un domaine est la porte ouverte à de nombreuses dérives.
Par ailleurs, il est essentiel d'impliquer les décideurs, c'est-à-dire les donneurs d'ordre tels que les créateurs, les photographes, les réalisateurs de films publicitaires, les agences de communication, car ce sont eux qui décident du profil exact du mannequin qu'ils souhaitent pour représenter leur marque. Ils demandent aux agences de mannequins de trouver des mannequins avec des critères physiques très précis.
Nous ne devons pas oublier que la France est le seul pays où l'activité d'agence de mannequins est réglementée ; le Syndicat national des agences de mannequins – SYNAM – a d’ailleurs signé en 2011 avec ses partenaires CFDT-FO et CGC un accord santé pour les mannequins. Malheureusement, cet accord n'est pas encore applicable car il est bloqué au ministère du travail.
Je vous propose donc dans un premier temps de voter cet amendement ; et dans un second temps d'organiser une rencontre avec le ministère du travail pour faire avancer cet accord.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l’amendement n° 373 rectifié bis.
Mme Corinne Imbert. Je considère que l’amendement a été défendu par notre collègue Alain Vasselle.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 899 rectifié.
M. Gilbert Barbier. Vu l’heure tardive, je ne vais pas trop rajouter à ce qui vient d’être justement dit.
L’IMC est un indice aujourd’hui très contesté sur le plan international, car il varie en fonction de la morphologie de la personne, de son âge, de son groupe ethnique. Prendre ce critère comme seule référence pour accepter ou non une personne dans le mannequinat n’est pas satisfaisant.
Que cherche-t-on au fond ? Il s’agit essentiellement d’éviter de voir des personnes dans un état de maigreur lié à une pathologie, comme vient de le dire Mme Schillinger. L’anorexie mentale est une maladie, qu’il faut dépister, mais on ne peut décider de l’engagement d’une personne sur un indice très contestable, sans l’avis d’un médecin. À mon sens, il faut que cette personne soit au moins examinée. La médecine du travail doit intervenir, en s’appuyant peut-être sur l’IMC, mais il reviendra au médecin de juger s’il est en présence d’une anorexie mentale.
M. le président. L'amendement n° 321, présenté par Mme Schillinger, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 7123-2 – 1. – L’exercice d’une activité de mannequin est interdit à toute personne qui n’aura pas fait l’objet d’un examen approfondi pratiqué par un médecin du travail au moins tous les vingt-quatre mois.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Le présent amendement a pour objet de permettre à la médecine du travail de jouer pleinement son rôle dans la prévention et dans le constat d’un risque pour la santé du mannequin.
Comme je l’ai déjà mentionné, l’anorexie mentale est un fléau, qui doit être fermement combattu, mais elle ne peut pas être réduite à un simple calcul mathématique, l’IMC.
L’anorexie mentale est une maladie psychique complexe, qui doit être appréhendée de manière globale par la médecine et non par un simple chiffre, l’IMC, qui n’est qu’un indicateur. De plus, les limites des seuils IMC recommandés par l’OMS ne varient pas selon la morphologie d’une personne, son sexe, son âge. Il faut donc les interpréter avec prudence.
Par ailleurs, l’IMC introduit une discrimination forte à l’embauche, « l’apparence physique » ou « l’état de santé » faisant partie des discriminations mentionnées à l’article L. 1132–1 du code du travail.
Cet amendement répond également aux interrogations légitimes de la commission des affaires sociales du Sénat, qui regrettait que l’accord du 1er juin 2012 relatif à la santé au travail des mannequins, lequel prévoyait une visite du médecin du travail au moins tous les vingt-quatre mois, n’ait toujours pas été étendu.
M. le président. L'amendement n° 900 rectifié, présenté par MM. Amiel, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mme Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
toute personne
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
qui n’a pas fait l’objet d’un examen approfondi pratiqué par un médecin du travail au moins tous les vingt-quatre mois et qui s’appuie notamment sur le calcul d’un indice de masse corporelle.
La parole est à M. Michel Amiel.
M. Michel Amiel. Il s’agit d’un simple amendement de repli. Tout a été dit, mais je le répète, l’IMC est un critère parmi d’autres, qui mérite d’être analysé par un médecin dans le cadre d’un suivi approfondi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Les amendements identiques visent à remplacer le seuil d’IMC pour la profession de mannequin par un rappel des obligations des employeurs et du rôle de la médecine du travail. Lorsqu’on a évoqué la nécessité de lutter contre la maigreur excessive des mannequins, dont l’état physique peut parfois être choquant, l’IMC a été mis en avant comme critère possible. On a alors émis l’idée que la HAS pouvait définir avec discernement le seuil minimal pour l’exercice de la profession de mannequin.
Or les amendements proposés tendent à nous démontrer que l’IMC est un instrument trop imprécis pour être réellement adapté à la diversité des morphologies. La commission s’est donc rangée à l’idée visant à remplacer le seuil d’IMC par un rappel des obligations des employeurs et du rôle de la médecine du travail.
Comme Patricia Schillinger l’a rappelé, il est important que l’action des médecins du travail soit vraiment effective et efficiente pour assurer un véritable suivi des mannequins d’agence. L’accord qui avait été trouvé doit donc se traduire dans les faits.
L’avis est par conséquent favorable sur les amendements nos 230, 320, 373 rectifié bis et 899 rectifié.
L’obligation d’une consultation du médecin tous les vingt-quatre mois, prévue par l’amendement n° 321, peut sembler un compromis raisonnable entre le droit existant et les dispositions de l’article 5 quinquies D, à condition que cette obligation soit possible en pratique, compte tenu des difficultés de la médecine du travail que nous connaissons. J’émets donc un avis de sagesse, pour le cas où les amendements précédents ne seraient pas adoptés.
L’amendement n° 900 rectifié présenté par M. Amiel tend à prévoir une visite régulière obligatoire de la médecine du travail et une évaluation tenant compte de l’IMC pour l’exercice de la profession de mannequin. Il s’agit donc d’un amendement mixte, qui n’est pas sans poser quelques difficultés rédactionnelles. J’en sollicite donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. J’ai bien entendu les arguments exposés, je veux toutefois préciser que l’article en question vise non pas l’anorexie ou l’anorexie mentale, mais la maigreur excessive, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, la santé des mannequins, qui doit nous préoccuper. À ce sujet, nous avons eu l’occasion, les uns et les autres, de lire des témoignages de mannequins révélant les pressions dont ils ou elles, surtout, étaient l’objet de la part de ceux qui les faisaient défiler et qui leur demandaient de s’alimenter à peine pour correspondre aux normes attendues.
Ensuite, il s’agit d’être attentif aux images envoyées en direction, en particulier, des jeunes filles, mais pas uniquement, puisque des jeunes femmes peuvent être concernées, et qui sont susceptibles d’avoir un côté normatif.
Sur ce problème, j’entends dire que l’IMC n’est pas un indice satisfaisant, car il est trop rigide au regard de la diversité des situations que l’on peut rencontrer. Or l’article prévoit différents niveaux d’IMC, puisqu’il précise que la HAS détermine les niveaux d’IMC à prendre en considération pour tenir compte de la diversité des cas. Le modèle proposé n’est donc pas rigide.
Par ailleurs, il est proposé de remplacer ce dispositif par une modification du code du travail renforçant le rôle de la médecine du travail. Sur ce point, je dois dire que je suis un peu étonnée par vos propositions, madame Schillinger. Dans votre premier amendement, vous proposez purement et simplement de reprendre ce qui est déjà le droit en matière de médecine du travail vis-à-vis des mannequins. En effet, des visites avant l’embauche, même si celle-ci est de courte durée, sont déjà prévues. Il s’agit donc uniquement d’une réaffirmation du droit existant. Dans votre second amendement, vous proposez de passer à un contrôle par les médecins du travail au moins tous les vingt-quatre mois, alors que le droit existant le rend obligatoire au moins une fois par an.
Mme Patricia Schillinger. Ce n’est pas la même chose !
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Schillinger, dire que vous proposez une amélioration de la situation, alors que vous dégradez ce qui est aujourd’hui le code du travail, est difficile à entendre. Je ne suis pas certaine – je suis même certaine du contraire – que le ministère du travail se reconnaisse dans des dispositions aboutissant à écrire noir sur blanc que l’on passe d’une périodicité de douze à vingt-quatre mois s’agissant des contrôles de la médecine du travail.
Pour l’ensemble de ces raisons, je donne un avis défavorable sur l’ensemble des amendements présentés.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 230, 320, 373 rectifié bis et 899 rectifié.
Mme Patricia Schillinger. Dans ce cas, je ne vois pas pourquoi la représentante des syndicats de mannequins nous a interpellés en disant qu’il fallait avancer sur la prévention et que la médecine du travail ne fonctionnait pas ! Le ministère du travail n’avance pas sur ce dossier.
Je vous entends, madame la ministre, mais je voterai ces amendements.
De plus, j’avais fait un rapport, au nom de la commission affaires sociales du Sénat, sur une proposition de loi qui permettait d’avancer dans le domaine de la prévention de l’anorexie, en prévoyant notamment de pénaliser les incitations à la maigreur extrême. Pourtant, nous n’avons pas avancé sur le sujet, car n’avons jamais réussi à faire discuter ce texte, qui est en stand by.
Je veux bien que l’on revienne tous les ans sur l’anorexie extrême, avec toujours les mêmes arguments, mais, pour ma part, je souhaiterais que nous tenions tout de même compte de la position des syndicats, qui trouvent que les mannequins ne bénéficient pas de la protection nécessaire.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 230, 320, 373 rectifié bis et 899 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 321 et 900 rectifié n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 5 quinquies D, modifié.
(L'article 5 quinquies D est adopté.)
Article 5 quinquies E
I (Non modifié). – Le présent article est applicable aux appareils émettant des rayonnements ultraviolets destinés à exercer une action sur la peau à des fins esthétiques, dénommés « appareils de bronzage ».
II. – Il est interdit de mettre un appareil de bronzage à la disposition d’une personne âgée de moins de dix-huit ans. La personne mettant à la disposition du public un appareil de bronzage exige que l’intéressé établisse la preuve de sa majorité, notamment par la production d’une pièce d’identité.
III (Non modifié). – La publicité pour la vente d’un appareil de bronzage ou pour l’offre d’une prestation de service incluant l’utilisation, à titre onéreux ou gratuit, d’un appareil de bronzage est interdite.
IV (Non modifié). – La vente ou la cession, y compris à titre gratuit, d’un appareil de bronzage pour un usage autre que professionnel est interdite.
V (Non modifié). – Un décret en Conseil d’État, pris en application des articles L. 221-1 et L. 221-3 du code de la consommation, fixe notamment :
1° Les catégories d’appareils de bronzage qui peuvent être utilisés à des fins esthétiques et leurs spécifications techniques ;
2° Les conditions de mise à la disposition du public d’un appareil de bronzage, notamment le régime d’autorisation ou de déclaration des appareils ou des établissements qui les mettent à disposition ;
3° Les modalités d’information et d’avertissement de l’utilisateur d’un appareil de bronzage sur les dangers liés à son utilisation ;
4° Les modalités de contrôle de l’appareil et de l’établissement dans lequel il est mis à la disposition du public.
Un arrêté des ministres chargés de la santé et de la consommation définit la formation exigée de tout professionnel qui met à la disposition du public un appareil de bronzage ou participe à cette mise à disposition.
Un arrêté du ministre chargé de l’environnement fixe les conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils de bronzage mentionnés au présent article.
VI. – Le IV entre en vigueur le premier jour du second mois suivant la promulgation de la présente loi.
VII. – A. – Le non-respect de l’interdiction prévue au II est puni d’une amende de 7 500 €.
Le fait de se rendre coupable de l’infraction prévue au II en ayant été condamné depuis moins de cinq ans pour une telle infraction est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
Les personnes morales coupables de l’infraction prévue au II encourent les peines complémentaires prévues aux 2°, 4°, 8° et 9° de l’article 131-39 du code pénal.
B. – Le non-respect de l’interdiction prévue au III est puni d’une amende de 100 000 €.
Le maximum de l’amende peut être porté à 50 % du montant des dépenses consacrées à l’opération illégale.
En cas de récidive, le tribunal peut interdire pendant une durée de un à cinq ans la vente des produits qui ont fait l’objet de l’opération illégale.
Le tribunal ordonne, s’il y a lieu, la suppression, l’enlèvement ou la confiscation de la publicité interdite aux frais des délinquants.
Le tribunal peut, compte tenu des circonstances, décider que les personnes morales sont en totalité ou en partie solidairement responsables du paiement des amendes et des frais de justice mis à la charge de leurs dirigeants ou de leurs préposés.
La cessation de la publicité peut être ordonnée soit sur réquisition du ministère public, soit d’office par le tribunal saisi des poursuites. La mesure ainsi prise est exécutoire nonobstant toutes voies de recours. Mainlevée peut en être donnée par la juridiction qui l’a ordonnée ou qui est saisie du dossier. La mesure cesse d’avoir effet en cas de décision de relaxe.
Les décisions statuant sur les demandes de mainlevée peuvent faire l’objet d’un recours devant la cour d’appel.
La chambre de l’instruction ou la cour d’appel statue dans un délai de dix jours à compter de la réception des pièces.
C. – Le non-respect de l’interdiction prévue au IV est puni d’une amende de 100 000 €.
Le maximum de l’amende peut être porté à 50 % du montant des dépenses consacrées à l’opération illégale.
En cas de récidive, le tribunal peut interdire pendant une durée de un à cinq ans la vente des appareils qui ont fait l’objet de l’opération illégale.
Le tribunal peut, compte tenu des circonstances, décider que les personnes morales sont en totalité ou en partie solidairement responsables du paiement des amendes et des frais de justice mis à la charge de leurs dirigeants ou de leurs préposés.
VIII. – Les agents mentionnés au 1° du I de l’article L. 215-1 du code de la consommation ont qualité pour rechercher et constater les infractions aux II, III et IV et à l’avant-dernier alinéa du V du présent article ainsi qu’aux mesures prises pour leur application. À cet effet, ils disposent des pouvoirs prévus au livre II du code de la consommation.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 15 rectifié, présenté par M. Longeot, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - La vente, la mise à disposition à titre gratuit ou onéreux et l'utilisation d'appareils de bronzage, définis comme les appareils émettant des rayonnements ultraviolets destinés à exercer une action sur la peau à des fins esthétiques, sont interdites.
II. - Le non-respect de l'interdiction prévue au I est puni d'une amende de 100 000 €.
III. - Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État.
La parole est à M. Jean-François Longeot, rapporteur pour avis.
M. Jean-François Longeot, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Cet amendement vise à interdire la vente, la mise à disposition, à titre onéreux ou gratuit, ainsi que l’utilisation des cabines UV.
Ne sont visés dans le texte que les appareils utilisés à des fins esthétiques : ce dispositif ne concerne donc pas les médecins, notamment les dermatologues, qui utilisent ces techniques dans le cadre du traitement de certaines pathologies.
Le sous-amendement déposé par M. Daudigny, qui souhaite préciser que l’interdiction s’applique « hors usage médical », est donc en réalité satisfait sur ce point, mais peut-être permet-il d’être plus précis.
Le paragraphe II tend à prévoir la sanction en cas d’infraction à cette interdiction, à savoir une amende de 100 000 euros. Cette sanction est alignée sur celle que le projet de loi prévoit à ce stade pour l’interdiction de vente des cabines à des particuliers.
Lors de la présentation de cet amendement en commission des affaires sociales, un débat a eu lieu sur les modalités d’entrée en vigueur d’une telle interdiction des cabines UV. L’amendement que je vous propose en tient compte en renvoyant les modalités d’application de l’article au pouvoir réglementaire. Cela qui signifie qu’une certaine marge de manœuvre, pour répondre aux inquiétudes des professionnels, pourra être ménagée dans les modalités de mise en œuvre de l’interdiction.
Je ne suis pas certain qu’il faille aller jusqu’à repousser dans le temps l’entrée en vigueur de cette interdiction, car l’urgence sanitaire est réelle. Il nous faut inscrire cette interdiction dès aujourd’hui dans la loi.
Encore une fois, les preuves scientifiques de la dangerosité de ces appareils sont établies. Les ultraviolets artificiels ont été classés dans la catégorie des « cancérogènes certains » pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer.
On sait que le nombre de cancers de la peau va doubler tous les dix ans. Face à ces risques, la réglementation existante est mal appliquée. Une enquête récente du magazine 60 millions de consommateurs, réalisée dans cinquante centres de bronzage en France, a montré que de nombreux professionnels préfèrent passer sous silence la dangerosité des ultraviolets artificiels.
Or l’utilisation de ces équipements augmente et se banalise dangereusement pour les consommateurs.
Voilà donc pourquoi je vous propose aujourd’hui d’adopter cet amendement. Les données scientifiques sont irréfutables et nous avons toute l’expertise nécessaire pour agir. Saisissons donc l’occasion que constitue l’examen de ce projet de loi de modernisation du système de santé pour prévenir un futur scandale sanitaire.
M. le président. Le sous-amendement n° 615 rectifié bis, présenté par MM. Daudigny et Anziani, Mme Bataille, M. Berson, Mmes Bonnefoy et Campion, MM. Cazeau, Courteau, Labazée, Madrelle, Manable et F. Marc, Mmes Monier et Schillinger, MM. Sueur et Vincent, Mme Yonnet et M. Durain, est ainsi libellé :
Amendement n° 15 rect
I. - Au début de l'alinéa 2
Insérer les mots :
Hors usage médical,
II. - Après l'alinéa 2
Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :
I bis. – Un arrêté du ministre chargé de l’environnement fixe les conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils de bronzage mentionnés au I.
I ter.- Les I et I bis entrent en vigueur dans le délai de deux ans suivant la promulgation de la présente loi.
III. – Après l'alinéa 3
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les agents mentionnés au 1° du I de l’article L. 215–1 du code de la consommation ont qualité pour rechercher et constater les infractions au I du présent article, ainsi qu’aux mesures prises pour leur application. À cet effet, ils disposent des pouvoirs prévus au livre II du code de la consommation.
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Au regard des avis rendus sur les cabines de bronzage par l’Académie nationale de médecine, le Centre international de recherche sur le cancer et l’INVS, mais aussi d’un encadrement réglementaire de leur usage qui reste, bien que constamment renforcé, mal appliqué ou inappliqué, nous soutenons l’amendement présenté par notre collègue Jean-François Longeot, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
À travers ce sous-amendement, nous vous proposons également de tenir compte de la situation des exploitants de cabines de bronzage, qui ont développé une activité autorisée et se sont encore récemment conformés aux nouvelles prescriptions des décrets publiés en 2014.
Il y a là une question de prévisibilité qui justifie un délai d’application. La responsabilité de l’État ne risquerait-elle pas en effet d’être engagée du fait de la loi ? C’est pourquoi nous vous proposons que cette interdiction s’applique deux ans après la promulgation de la loi.
Nous proposons également, à l’identique du texte adopté par notre commission, d’une part, de donner compétence aux agents mentionnés au 1° du I de l’article L. 215–1 du code de la consommation et, d’autre part, de prévoir un arrêté pour fixer les conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils de bronzage.
Sur ce dernier point, madame la ministre, une compensation pourrait être envisagée au bénéfice des exploitants faisant une application anticipée de l’interdiction. Nous ne pouvions le proposer compte tenu du risque d’irrecevabilité financière. Je fais donc cette suggestion de vive voix au Gouvernement.
Mes chers collègues, l’amendement de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, complété de cette manière par notre sous-amendement, permettra de satisfaire à la fois un impératif de santé publique et une mise en œuvre effective et responsable.
M. le président. L'amendement n° 604 rectifié, présenté par Mme Jouanno, M. Médevielle et Mme Billon, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 614 rectifié bis, présenté par MM. Daudigny et Anziani, Mme Bataille, M. Berson, Mmes Bonnefoy et Campion, MM. Cazeau, Courteau, Labazée, Madrelle, Manable et F. Marc, Mmes Monier et Schillinger, MM. Sueur et Vincent, Mme Yonnet et M. Durain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Hors usage médical, la vente, la mise à disposition à titre gratuit ou onéreux et l’utilisation d’appareils de bronzage, définis comme les appareils émettant des rayonnements ultraviolets destinés à exercer une action sur la peau à des fins esthétiques, sont interdites.
II. - Un arrêté du ministre chargé de l’environnement fixe les conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils de bronzage mentionnés au I.
III. - Les I et II entrent en vigueur dans le délai de deux ans suivant la promulgation de la présente loi.
IV. - Le non-respect de l’interdiction prévue au I est puni d’une amende de 100 000 euros.
V. - Les agents mentionnés au 1° du I de l’article L. 215–1 du code de la consommation ont qualité pour rechercher et constater les infractions au I du présent article, ainsi qu’aux mesures prises pour leur application. À cet effet, ils disposent des pouvoirs prévus au livre II du code de la consommation.
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Personne ne contestera que nous attendons des mesures législatives que nous votons qu’elles soient très concrètement applicables et qu’elles tiennent compte du contexte dans lequel elles seront mises en œuvre.
Nous sommes ici face à un double constat : d’une part, la dangerosité aujourd’hui amplement avérée des cabines de bronzage ; d’autre part, la poursuite du développement des centres de bronzage artificiel et de l’activité commerciale qui s’y attache, dans le cadre d’une réglementation pourtant constamment renforcée.
Les avis scientifiques sont sans appel : dès 2003, puis à nouveau en 2009 et 2010, l’Académie de médecine alerte sur les risques liés à l’exposition aux UV artificiels. En 2009, le Centre national de recherche sur le cancer classe cette pratique dans le groupe des agents cancérogènes certains pour l’homme. En 2011, l’Institut national de veille sanitaire, l’INVS, constate que le nombre de mélanomes a plus que triplé entre 1980 et 2005 en France. Dans son dernier avis publié le 2 février 2015, l’Académie de médecine est catégorique : « hors usage médical, il faut interdire totalement les cabines de bronzage ».
Ainsi, porter au niveau législatif un encadrement, même rendu plus strict encore, risque de n’y rien changer. L’interdiction de mise à disposition des appareils de bronzage aux mineurs de dix-huit ans, prévue par le texte qui nous est soumis, figure d’ailleurs déjà dans le décret du 27 décembre 2013. En tout état de cause, le risque est avéré, quel que soit l’âge.
Si l’interdiction des cabines de bronzage s’impose donc, le moins est aussi qu’elle s’applique avec un minimum de prévisibilité à l’égard des exploitants qui ont développé leur activité dans le cadre de la réglementation existante.
C’est pourquoi nous vous proposons que cette interdiction entre en vigueur deux ans à compter de la promulgation de la loi.
Par ailleurs, notre sous-amendement reprend deux mentions du texte adopté par notre commission, s’agissant des conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils, d’une part ; de la compétence des agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, d’autre part.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. C’est vrai que, en juillet, nous n’avions pas émis un avis favorable sur l’amendement de la commission du développement durable présenté par M. Longeot, qui visait à interdire les cabines UV. Nous considérions en effet que l’interdiction des appareils du jour au lendemain, y compris à domicile et sans mesure transitoire, poserait un problème de sécurité juridique. Nous avions donc préconisé plutôt des mesures transitoires.
La nocivité des cabines de bronzage à laquelle l’Académie de médecine fait référence depuis de nombreuses années me paraît largement établie.
La commission a souhaité que des mesures transitoires soient prises, que le caractère hors usage médical soit vraiment bien défini. Tel est le sens du sous-amendement n° 615 rectifié bis présenté par le sénateur Daudigny. La commission donne un avis favorable sur ce sous-amendement, de même qu’à l’amendement n° 15 rectifié sous réserve de l’adoption du sous-amendement. L’amendement n° 614 rectifié bis est une version consolidée des deux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Tout d’abord, je veux dire que la nocivité de l’exposition aux rayons UV est évidemment avérée. Nous sommes, en France, comme dans d’autres pays, confrontés à une augmentation très importante du nombre de cancers de la peau, de mélanomes. Ce phénomène doit nous amener à prendre un certain nombre de mesures.
Faut-il que ces mesures soient l’interdiction ? Contrairement à ce que certains d’entre vous semblent penser, la logique du projet de loi n’est pas celle de l’interdiction. La logique du projet de loi en termes de santé publique est celle de l’information, de la régulation, de l’encadrement, qu’il s’agisse de l’alcool, du tabac. Si les méfaits du tabac sur la santé sont avérés, le projet de loi ne prévoit pas d’interdire le tabac. Il prévoit d’encadrer, de réguler notamment les mécanismes ou les procédés de publicité. Des mesures de régulation ont été engagées dès 1997 pour ce qui est des cabines de bronzage et ces règles ont été renforcées en 2013.
Le présent projet de loi porte des mesures d’encadrement renforcées, en interdisant la publicité pour la vente des appareils de bronzage ou pour l’offre d’une prestation de service, en interdisant la vente ou la cession d’appareils de bronzage aux particuliers pour éviter que l’on ne s’en serve n’importe comment à domicile puisqu’on ne peut d’ores et déjà pas acheter sur internet, en interdisant les forfaits illimités, qui constituent un encouragement à des pratiques extrêmement dangereuses. Le projet de loi introduit une obligation de formation de ceux qui sont amenés à proposer cette pratique.
Telle est la démarche retenue par le projet de loi. J’entends très bien la volonté qui s’exprime. Toutefois, ce n’est pas la perspective dans laquelle nous nous situons, d’autant moins que nous avons été un certain nombre de ministres en charge de la santé à saisir la Commission européenne pour voir quel type d’harmonisation des pratiques pourrait se faire. Un groupe de travail s’est mis en place au niveau européen. Il doit proposer, au premier semestre de l’année 2016, d’après ce qui m’a été dit, des orientations dont je ne connais pas actuellement la teneur. À ce stade, le Gouvernement entend en rester là.
À défaut de retrait des amendements prévoyant l’interdiction complète des cabines de bronzage, j’émets un avis défavorable.
Pour le reste, je veux dire à M. Daudigny que les appareils en cause ne concernent que des visées esthétiques. Ce sont des modèles qui n’ont pas de visées médicales. Il me semble donc que le sous-amendement proposé pour éviter que les appareils à visée médicale ne soient concernés dans la perspective de votre propre amendement d’interdiction n’a pas lieu d’être parce que ce ne sont pas du tout les mêmes matériels.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour explication de vote.
Mme Chantal Deseyne. Madame la ministre, je vous remercie pour vos propos. Je ne conteste pas les dangers d’une surexposition aux rayonnements UV, en particulier le risque de développer un cancer de la peau. On sait par ailleurs que cela concerne seulement une partie de la population, estimée entre 5 % et 7 %. Cette population est parfaitement identifiée : ce sont généralement les personnes à peau claire ou qui présentent de nombreux grains de beauté.
Vous disiez tout à l’heure que les mélanomes avaient triplé. Pour autant, la fréquentation des cabines de bronzage a-t-elle triplé ? Je ne le crois pas. Les mélanomes sont aussi développés par l’exposition aux rayonnements naturels, aux UV solaires.
Supprimer les cabines, c’est aussi mettre en danger toute une filière. Dans cet hémicycle, on n’a pas toujours eu autant de scrupules. Je pense en particulier à l’amendement présenté pour demander la suppression de la publicité dans les programmes télévisés destinés à la jeunesse. Cela nous a valu de nous entendre expliquer que pour protéger toute une filière et une production on pouvait maintenir à destination des jeunes publics des messages qui ne sont pas forcément des messages sanitaires !
De plus, nous sommes sur deux logiques très différentes. Alors que je défends l’information, l’éducation et l’encadrement, laissant chacun responsable de ses choix, vous êtes, monsieur Longeot, beaucoup plus radical dans votre positionnement et vous proposez une interdiction stricte.
Pour toutes ces raisons je ne voterai pas ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Je tenais à remercier Mme la ministre pour avoir dit qu’il faut une harmonisation au niveau européen. Elle sait très bien que j’habite une région frontalière où il y a la Suisse et l’Allemagne. Pour faire une meilleure prévention, il faut vraiment que dans différents domaines il y ait une harmonisation. Cela me rassure beaucoup. Aussi, je suivrai Mme la ministre.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 615 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’article 5 quinquies E est ainsi rédigé, et l’amendement n° 614 rectifié bis ainsi que les amendements nos 1156 rectifié bis et 1159 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces deux derniers amendements.
L'amendement n° 1156 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, M. Cornu, Mmes Deromedi et Morhet-Richaud et MM. Lefèvre et Cambon, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
III. – Les offres par abonnement de mise à disposition au public d'un appareil de bronzage sont interdites, de même que les publicités pour ce type d’offres.
L'amendement n° 1159 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, M. Cornu, Mmes Deromedi et Morhet-Richaud et MM. Lefèvre et Cambon, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 2° Les conditions de mise à la disposition du public d’un appareil de bronzage, notamment le régime de déclaration des appareils ou des établissements qui les mettent à disposition ;
Mes chers collègues, nous avons examiné 87 amendements au cours de la journée ; il en reste 929.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
13
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 16 septembre 2015 :
À quatorze heures trente :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé (n° 406, 2014-2015) ;
Rapport de M. Alain Milon, Mmes Catherine Deroche et Élisabeth Doineau, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 653, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 654, 2014-2015) ;
Avis de M. Jean-François Longeot, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 627, 2014-2015) ;
Avis de M. André Reichardt, fait au nom de la commission des lois (n° 628, 2014-2015).
À vingt et une heures trente et la nuit :
Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur l’accueil des réfugiés en France et en Europe, en application de l’article 50-1 de la Constitution.
Suite de l’ordre du jour de l’après-midi.
En outre, de quatorze heures trente à quinze heures :
Scrutin pour l’élection d’un membre titulaire représentant la France à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, en remplacement de M. Jean-Marie Bockel.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 16 septembre 2015, à une heure trente.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART