Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Raffarin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, rapporteur. Si vous le permettez, madame la présidente, je donnerai en même temps l’avis de la commission sur l’amendement suivant, n° 19, également déposé par le Gouvernement. Ces deux amendements visent en effet à supprimer la clause de sauvegarde qui serait mise en œuvre au cas où le financement budgétaire ferait défaut. L’amendement n° 18 concerne l’évolution des indices économiques et l’amendement n° 19, les cessions d’immeubles.
Nous aborderons ces questions en commission mixte paritaire. Nous avons bien entendu votre message, monsieur le ministre, mais il nous semble plus sage d’émettre un avis défavorable afin que nous puissions débattre de façon argumentée avec nos collègues députés.
Mme la présidente. L’amendement n° 19, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
Mme la présidente. La commission a déjà fait part de son avis défavorable sur cet amendement.
Je mets aux voix l’amendement n° 19.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 24, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 7 et 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Cet amendement relève du même esprit que les précédents.
Le Sénat a souhaité garantir davantage la capacité budgétaire du ministère de la défense, et donc de l’actualisation, en exonérant le ministère de la défense de sa participation au dispositif d’aide au logement social et en prévoyant que le produit des cessions immobilières serait totalement affecté audit ministère.
Nous avons procédé à l’analyse de nos recettes potentielles de manière très précise et en nous donnant beaucoup de marge. La crédibilité des recettes attendues sur la période est donc totale.
Par ailleurs, je ne souhaite pas que le ministère de la défense soit exonéré de sa contribution au dispositif d’aide au logement social. Peut-être la discussion en commission mixte paritaire permettra-t-elle de trouver une solution de compromis.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Raffarin, rapporteur. L’avis est défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
Vous le comprenez bien, monsieur le ministre, notre principal objectif est de protéger au maximum, dans la mesure du possible, le budget de la défense et d’éviter que celui-ci soit par trop sollicité.
Je pense que cette prise de position ferme du Sénat permettra de trouver les compromis nécessaires avec nos interlocuteurs de l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Reiner, pour explication de vote.
M. Daniel Reiner. Le groupe socialiste votera cet amendement.
Lorsqu’il procède à des ventes immobilières, le ministère de la défense ne peut se dispenser de proposer une décote en vue de favoriser la construction de logements sociaux. Cela nous paraît assez naturel !
On ne peut pas, en tant que maire d’une commune, demander la décote dès lors que l’on décide d’acquérir un terrain militaire et, ici, en tant que parlementaire, prétendre priver le ministère de la défense de la possibilité de décider une telle décote.
Néanmoins, je comprends que la commission cherche à garantir les recettes des cessions immobilières. Sans doute sera-t-il possible, en commission mixte paritaire, de trouver une solution de compromis consistant à limiter cette décote.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article 2 bis (nouveau)
Le premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le ministère de la défense ne contribue pas à ce financement interministériel. »
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Guerriau, sur l'article.
M. Joël Guerriau. Les opérations extérieures ont fortement mobilisé l’ensemble de nos troupes. L’efficacité opérationnelle nécessite de prendre en considération les difficultés matérielles et morales auxquelles elles sont confrontées.
Les opérations menées de front par l’armée française ne pourront se poursuivre sur le long terme sans effectifs supplémentaires, d’autant que les théâtres d’opération ont parfois des dimensions considérables. Ainsi, la zone du Sahel représente à elle seule huit fois la superficie de la France.
La France s’est investie au-delà de ses capacités. Membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, elle assume ses responsabilités. Pourrons-nous durablement maintenir toutes les opérations extérieures en cours ?
Les OPEX démontrent la nécessité d’une Europe de la défense, nécessité dont le groupe UDI-UC est absolument convaincu. (M. Jean-Marie Bockel applaudit.)
Mme la présidente. L'amendement n° 20, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Le dépassement de la dotation annuelle au titre des opérations extérieures, fixée à 450 millions d'euros en loi de finances, fait l’objet d’un financement interministériel inscrit dans le projet de loi initial. Il est donc logique que le ministère de la défense y contribue.
Sans reprendre le débat général sur le financement des OPEX, je me permets d’insister sur la solidarité interministérielle et sur la nécessité de maintenir la participation du ministère de la défense à ce partage des surcoûts. C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à supprimer la disposition visant à en exonérer le ministère de la défense, qu’a introduite la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Raffarin, rapporteur. C’est toujours la même philosophie de protection du budget du ministère de la défense qui anime la commission. Dans la mesure où le ministère de la défense finance déjà ces OPEX en loi de finances initiale, la commission estime qu’il convient de le dispenser des surcoûts.
Par conséquent, même si la commission a une position très ouverte sur la question, dans le droit fil de ses avis précédents, elle émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Reiner, pour explication de vote.
M. Daniel Reiner. Le groupe socialiste votera cet amendement. Ne pas le faire reviendrait à remettre en cause la solidarité interministérielle pour les opérations extérieures, qui constitue une tradition fort ancienne. Il serait donc assez malvenu que le ministère de la défense n’y contribue pas. (M. André Trillard s’exclame.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2 bis.
(L'article 2 bis est adopté.)
Article 2 ter (nouveau)
Après l’article 4 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 précitée, il est inséré un article 4-1 ainsi rédigé :
« Art. 4-1. – Le coût net, hors titre 5, des missions intérieures fait l’objet d’un financement interministériel.
« Les missions intérieures en cours font l’objet d’un bilan politique, opérationnel et financier communiqué par le Gouvernement aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat en même temps que le bilan mentionné au dernier alinéa de l’article 4 de la présente loi. »
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Guerriau, sur l'article.
M. Joël Guerriau. Ce projet de loi permet de conserver 18 750 postes, avec un déploiement d’effectifs sur le territoire national pour des opérations intérieures. Si nos militaires peuvent assumer cette mission ponctuellement, il ne leur revient pas de le faire de manière pérenne.
D’autres fléchages de financement sont possibles. N’avons-nous pas, au ministère de l’intérieur, de discutables suppressions d’effectifs de gendarmes et de policiers, des fermetures de gendarmeries et de commissariats ? Parfois, nos forces de police travaillent dans des conditions déplorables ou dans des locaux vétustes ou inadaptés.
Le manque d’effectifs de police et de gendarmerie, dont la sécurité intérieure est le métier, ne doit pas être compensé de manière pérenne par le déploiement de militaires. Au contraire, nous souhaitons qu’une attention particulière soit portée au renforcement des forces de sécurité intérieure.
Mme la présidente. L'amendement n° 23, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
II. - En conséquence, alinéa 3
Faire précéder cet alinéa de la mention :
« Art. 4–1. –
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Dans la même logique que précédemment, il s’agit de revenir sur des modifications apportées en commission qui suppriment un mécanisme de financement interministériel des coûts suscités par les missions intérieures, sur le modèle de celui des opérations extérieures.
Le montant des surcoûts induits en 2015 par l’opération Sentinelle, qu’il s’agisse des dépenses de rémunération, de fonctionnement ou d’investissement, sera consolidé à la fin de l’année et fera l’objet d’une discussion interministérielle permettant sa prise en compte dans les arbitrages gouvernementaux de fin de gestion de l’année 2015.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Raffarin, rapporteur. La commission veut aider le ministre dans son ultime phase de négociation à la fin de l’année 2015 et lui donner les moyens de mutualiser les opérations intérieures. Ce sujet a fait l’objet de longues discussions en commission. Ce n’est pas un point de doctrine majeur ; il s’agit surtout d’envoyer un signal.
Si les missions intérieures devaient se développer de manière très importante, il faudrait que leur coût soit partagé. C’est une position de principe que la commission souhaite affirmer, mais sur laquelle elle est évidemment prête à discuter.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Reiner, pour explication de vote.
M. Daniel Reiner. Le groupe socialiste votera cet amendement.
Chaque année, le Parlement vote le budget de la défense, qui inclut des équipements, des rémunérations, etc. Il serait tout de même surprenant, voire paradoxal que, chaque fois que des missions sont décidées, qu’elles soient extérieures ou intérieures, on fasse appel à la solidarité interministérielle et non au budget du ministère de la défense.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2 ter.
(L'article 2 ter est adopté.)
Article 3
(Non modifié)
L’article 5 de la même loi est ainsi rédigé :
« Art. 5. – La réduction nette des effectifs du ministère de la défense s’élèvera à 6 918 équivalents temps plein sur la période 2015-2019 ; les évolutions s’effectueront selon le calendrier suivant :
« « |
(En équivalents temps plein) |
||||||
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
Total 2015-2019 |
||
Évolution des effectifs |
0 |
+2 300 |
-2 600 |
-2 800 |
-3 818 |
-6 918 |
« Ces évolutions d’effectifs porteront sur les seuls emplois financés sur les crédits de personnel du ministère de la défense. Au terme de cette évolution, en 2019, les effectifs du ministère de la défense s’élèveront ainsi à 261 161 agents en équivalents temps plein.
« À ces évolutions, s’ajouteront les augmentations d’effectifs de volontaires nécessaires à l’expérimentation du service militaire volontaire, ainsi que les augmentations d’effectifs éventuelles du service industriel de l’aéronautique. »
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Guerriau, sur l'article.
M. Joël Guerriau. Monsieur le ministre, les mesures prises dans le domaine du renseignement et de la cyberdéfense constituent l’un des points forts de ce projet.
Le terrorisme international utilise tous les moyens médiatiques pour séduire, convaincre, tromper ou terroriser, notamment à partir des réseaux sociaux. Nous devons gagner la bataille du cyberespace, car la cybernétique est à la source d’une réelle menace, qui ne cesse de croître en se perfectionnant.
En 2013, la LPM soulignait que les risques et menaces restaient « élevés ». L’armée estime désormais qu’ils « augmentent ». Ce déploiement d’effectifs est une réponse objective au besoin d’un corps militaire nouveau. Nous en sommes très satisfaits.
Les imprimantes 3D et les drones civils constituent également de nouvelles menaces. La diffusion rapide de ces technologies induit des risques difficilement prévisibles.
Les drones – aériens, terrestres ou marins –, la banalisation de la biologie moléculaire, la fabrication par les technologies numériques, notamment les imprimantes 3D, impliquent un contrôle renforcé. Le conflit en Ukraine montre que ces nouvelles technologies peuvent servir à surveiller et à tuer.
Les dispositions contenues à cet article constituent de bonnes initiatives.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Nougein, sur l'article.
M. Claude Nougein. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous comprendrez que, avant de s’exprimer sur cet article, le sénateur de Corrèze que je suis ait particulièrement à cœur de rendre hommage aux soldats – aux « Bisons », puisque tel est leur nom – fiers et vaillants du 126e régiment d’infanterie de Brive-la-Gaillarde. C’est un régiment qui n’a cessé de s’illustrer sur des théâtres d’opération extrêmement difficiles. Au nom de la représentation nationale, je veux leur dire notre reconnaissance, notre respect et notre soutien.
Je souhaite à présent appeler l’attention sur les conséquences des déflations d’effectifs et des restructurations. Selon les dispositions de la loi de programmation militaire de 2013, le ministère de la défense était censé supporter 60 % des baisses totales des effectifs de l’État. C’est absolument ahurissant ! Quel autre ministère supporterait de telles compressions de personnel, alors que ses missions s’accroissent ?
Paradoxalement, nous savons que d’autres ministères peinent encore à pourvoir les créations de postes prévues par la loi de finances, dont l’utilité n’est pas toujours avérée. De fait, l’article 3 renoue avec la réalité, en réduisant l’ampleur des suppressions de postes. Cette lucidité mérite d’être saluée.
En outre, cela permet la création de nouveaux postes ciblés. Pour être plus précis, le redéploiement de personnels issus des préservations de postes profitera principalement à la force opérationnelle terrestre, dont les effectifs passeront de 66 000 à 77 000 hommes. Cette avancée répond aussi aux engagements internationaux de la France.
Cependant, il ne faut pas oublier que le ministère de la défense a connu de nombreuses réformes structurelles ayant bouleversé son organisation et son identité. Il faut lui laisser le temps d’intégrer et de « digérer » ces réformes. Si les actualisations permettent des réajustements, il ne faudrait pas que celles-ci riment à terme avec instabilité.
Des changements de cap trop fréquents pourraient fragiliser nos capacités opérationnelles. De surcroît, l’institution et les hommes ont besoin aussi d’être rassurés et de savoir où ils vont. C’est ce qu’ils demandent. Tâchons d’y veiller !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
Les articles 3 et 5 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 précitée, dans leur rédaction résultant des articles 2 et 3 de la présente loi, font l’objet d’un rapport d’évaluation remis par le Gouvernement au Parlement en 2017, au plus tard le 31 mars, en vue, le cas échéant, d’une nouvelle actualisation. – (Adopté.)
Article 4 bis
Après le deuxième alinéa de l’article 10 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport décrit la politique de gestion des ressources humaines du ministère de la défense. À ce titre, il présente les effectifs du ministère et leur répartition par armée, direction et service, ainsi que par catégorie et par grade. Il justifie l’évolution de ces effectifs et de cette répartition pour chaque année de la période 2014-2019. Il comporte une analyse de l’évolution de la masse salariale du ministère et un bilan de l’utilisation des mesures d’incitation au départ. » – (Adopté.)
Article 4 ter (nouveau)
Le Gouvernement remet, avant le 31 décembre 2015, un rapport au Parlement sur les conditions d’emploi des forces armées lorsqu’elles interviennent sur le territoire national pour protéger la population. Ce rapport fait l’objet d’un débat.
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Remplacer la date :
31 décembre 2015
par la date :
31 mars 2016
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Il s’agit de revenir à la date initiale de remise au Parlement du rapport sur les conditions d’emploi des forces armées sur le territoire national, à savoir le 31 mars 2016.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Raffarin, rapporteur. La commission a proposé la date du 31 décembre 2015, ayant en perspective l’organisation d’un débat avant l’année qui précède l’élection présidentielle, plus précisément en février ou en mars 2016. Par conséquent, si le Gouvernement acceptait la date du 31 janvier 2016 et rectifiait son amendement en ce sens, la commission émettrait un avis favorable.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 21 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
Remplacer la date :
31 décembre 2015
par la date :
31 janvier 2016
Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4 ter, modifié.
(L'article 4 ter est adopté.)
Article additionnel après l'article 4 ter
Mme la présidente. L'amendement n° 13, présenté par M. de Legge, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 4 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre Ier du livre III de la partie 2 du code de la défense est ainsi modifié :
1° Le second alinéa de l’article L. 2312-1 est complété par les mots : « ou, sur la proposition de son président, d’une commission parlementaire mentionnée aux articles 43 ou 51-2 de la Constitution » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 2312-4, après les mots : « devant elle », sont insérés les mots : « ou une commission parlementaire mentionnée aux articles 43 ou 51-2 de la Constitution sur la proposition de son président » ;
3° Après le mot : « considération », la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2312-7 est ainsi rédigée : « , d’une part les missions du service public de la justice, le respect de la présomption d’innocence et les droits de la défense, ou l’exercice du pouvoir de contrôle du Parlement, d’autre part le respect des engagements internationaux de la France ainsi que la nécessité de préserver les capacités de défense et la sécurité des personnels. » ;
4° Au premier alinéa de l’article L. 2312-8, après le mot : « juridiction », sont insérés les mots : « ou au président de la commission parlementaire ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre …
Dispositions relatives au secret de la défense nationale
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis de la commission des finances. Cet amendement vise à tirer les conséquences de la classification « secret défense » du rapport Charpin. Pour ma part, j’ai pu me procurer ce rapport, dont la presse s’est d’ailleurs largement fait l’écho. Tous ceux qui l’ont lu ont constaté qu’il n’avait rien de confidentiel, qu’il était purement technique, comme cela a été dit au cours de la discussion générale. Le problème est que, par définition, on ne peut pas exploiter publiquement un document ayant été ainsi classé.
Aujourd'hui, les juridictions peuvent saisir la Commission consultative du secret de la défense nationale et lui demander son avis sur le bien-fondé de la classification totale ou partielle d’un document. Toutefois, l’avis que rend la commission n’étant que consultatif, l’autorité ayant classé le document n’est nullement tenue d’en tenir compte et, le cas échéant, de déclassifier le document incriminé.
Le présent amendement ne vise pas à modifier la classification au titre du secret défense. Nous considérons simplement qu’il n’y a aucune raison que les commissions parlementaires ne puissent pas, contrairement aux juges, saisir cette commission.
Cet amendement tend à s’inscrire dans la continuité du travail du Sénat, lequel a adopté une disposition en ce sens lors de l’examen de la loi du 8 juillet 1998, sur l’initiative de nos anciens collègues Nicolas About et Jean-Paul Amoudry.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Même s’il comprend l’irritation du rapporteur pour avis, qui n’a pu prendre connaissance du rapport Charpin, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis. J’en ai pris connaissance, mais je n’ai pu l’exploiter publiquement !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Cet amendement vise à aligner la situation des commissions parlementaires sur celles des juridictions, en leur permettant d’exiger de l’autorité administrative qu’elle saisisse la Commission consultative du secret de la défense nationale avant de statuer sur une demande de déclassification d’une information couverte par le secret de la défense nationale.
En effet, monsieur le rapporteur, le Gouvernement ne partage pas le raisonnement, développé dans l’objet de l’amendement, selon lequel les pouvoirs de contrôle que la Constitution confère au Parlement sur l’action du Gouvernement imposeraient que la procédure applicable aux juridictions soit également ouverte aux commissions parlementaires.
Il convient de le souligner, si le Conseil constitutionnel a jugé que l’exigence constitutionnelle de préservation des intérêts fondamentaux à laquelle concourt le secret de la défense nationale devait être conciliée avec le droit à un recours juridictionnel effectif, il avait auparavant estimé à deux reprises que les pouvoirs des commissions parlementaires s’exercent sous réserve du secret de la défense nationale et que ce n’était contraire à aucune exigence constitutionnelle.
L’opposabilité du secret de la défense nationale aux commissions parlementaires doit perdurer. C'est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Raffarin, rapporteur. La commission est généralement favorable à la protection du secret défense et ses positions sont souvent voisines de celle que vient d’exposer le Gouvernement. Toutefois, sur ce sujet, elle partage la position de M. le rapporteur pour avis.
Concernant le rapport Charpin, il est vrai qu’il a été difficile pour la commission, qui a pu consulter ce document, de ne pas pouvoir y faire référence lors des débats publics. Le problème soulevé est donc réel.
Partagée entre le Gouvernement et le rapporteur pour avis, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4 ter.
Chapitre II
Dispositions relatives aux associations professionnelles nationales de militaires
Article 5
(Non modifié)
Après le troisième alinéa de l’article L. 4111-1 du code de la défense, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La condition militaire recouvre l’ensemble des obligations et des sujétions propres à l’état militaire, ainsi que les garanties et les compensations apportées par la Nation aux militaires. Elle inclut les aspects statutaires, économiques, sociaux et culturels susceptibles d’avoir une influence sur l’attractivité de la profession et des parcours professionnels, le moral et les conditions de vie des militaires et de leurs ayants droit, la situation et l’environnement professionnels des militaires, le soutien aux malades, aux blessés et aux familles, ainsi que les conditions de départ des armées et d’emploi après l’exercice du métier militaire. »
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Guerriau, sur l'article.
M. Joël Guerriau. La représentation et le droit d’expression des militaires nous semblent essentiels. Ils participent de la modernisation sociale des armées. Selon l’UDI-UC, le texte est parvenu sur ce point à un juste équilibre.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
(Non modifié)
Le titre II du livre Ier de la quatrième partie du code de la défense est ainsi modifié :
1° L’article L. 4121-4 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« L’existence de groupements professionnels militaires à caractère syndical ainsi que, sauf dans les conditions prévues au troisième alinéa, l’adhésion des militaires en activité à des groupements professionnels sont incompatibles avec les règles de la discipline militaire. » ;
b) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les militaires peuvent librement créer une association professionnelle nationale de militaires régie par le chapitre VI du présent titre, y adhérer et y exercer des responsabilités. » ;
2° L’article L. 4124-1 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « et au statut des militaires » sont remplacés par le mot : « militaire » ;
– à la fin de la seconde phrase, les mots : « textes d’application du présent livre ayant une portée statutaire » sont remplacés par les mots : « loi modifiant le présent livre et des textes d’application de ce livre ayant une portée statutaire, indiciaire ou indemnitaire » ;
b) (Supprimé)
c) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une représentation du Conseil supérieur de la fonction militaire est appelée à s’exprimer, chaque année, devant le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire. Elle peut, en outre, demander à être entendue par ce dernier sur toute question générale intéressant la condition militaire. » ;
d) Après le mot : « travail », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « . Ils peuvent également procéder à une étude des questions inscrites à l’ordre du jour du Conseil supérieur de la fonction militaire qui concernent leur armée, direction ou service. » ;
e) Au cinquième alinéa, après le mot : « sort », sont insérés les mots : « ou par élection » ;
f) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’elles sont reconnues représentatives pour siéger au Conseil supérieur de la fonction militaire, les associations professionnelles nationales de militaires et leurs unions ou fédérations y sont représentées dans la limite du tiers du total des sièges. »