M. le président. La parole est à M. René Danesi.
M. René Danesi. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions très intéressantes et des informations que vous me communiquez, au sujet de l’application ADS 2007 comme des conditions de transfert volontaire des personnels de l’État vers les collectivités territoriales.
Cela étant, permettez-moi une remarque générale. Ce transfert met une fois de plus en lumière un problème qui me paraît essentiel : l’État prendra-t-il un jour son courage à deux mains pour se donner les moyens juridiques d’inciter fortement, voire, tout simplement, de transférer d’office ses fonctionnaires vers les collectivités territoriales, dès lors que les compétences ou les missions qu’ils exercent sont reprises par les collectivités ?
À mon sens, cela vaudrait mieux, pour l’État, que de conserver ces personnels à son service, au prix de sureffectifs plus ou moins marqués.
J’ajoute enfin que ces fonctionnaires sont parfois tentés de justifier leur existence et leur présence en compliquant le travail des fonctionnaires territoriaux et celui des élus locaux par des contrôles tatillons !
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 1071, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Philippe Mouiller. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et porte sur l’une des conséquences de la loi du 17 mai 2013, pour les communes chefs-lieux de canton et les communes dont la population représente au moins 15 % de celle de leur canton.
Madame la secrétaire d’État, cette loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, aura des conséquences financières pour les communes anciennement chef-lieu de canton.
En vertu de l’article L.2334-21 du code général des collectivités territoriales, les communes chefs-lieux de canton comme les communes dont la population représente au moins 15 % de celle de leur canton se voient attribuer une première fraction, dite « bourg-centre », de la dotation de solidarité rurale, la DSR. Un peu plus de 4 000 communes sont concernées en France.
La division par deux du nombre des cantons, opérée via le texte, pose la question de l’éligibilité des communes qui perdent leur qualité de chef-lieu de canton à cette fraction « bourg-centre » de la dotation de solidarité rurale.
Certes, la réforme n’aura d’impact qu’à compter de 2017 sur la fraction « bourg-centre » de la DSR, mais il n’en demeure pas moins que les maires desdites communes sont particulièrement inquiets, d’autant que la perte de cette dotation viendra s’ajouter à la régression de la dotation globale de fonctionnement, la DGF.
Cette réforme aura des conséquences financières considérables : en termes d’investissement, les marges de manœuvre de ces communes seront amputées d’autant.
Aussi, je vous demande de bien vouloir me préciser les modalités d’attribution de la fraction « bourg-centre » applicables à compter de 2017.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur Philippe Mouiller, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur.
L’article L. 2334-21 du code général des collectivités territoriales prévoit que la première fraction, dite « bourg-centre », de la dotation de solidarité rurale est notamment attribuée aux communes chefs-lieux de canton ainsi qu’aux communes dont la population représente au moins 15 % de celle de leur canton.
La loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral a prévu un redécoupage de la carte cantonale à l’échelle nationale dans le cadre de la mise en place des conseillers départementaux.
La réduction du nombre de cantons posait donc la question de l’éligibilité des communes perdant leur qualité de chef-lieu de canton aux termes de cette réforme comme de celles qui ne rempliraient plus le critère de la part de la population communale dans la population cantonale.
À droit constant, la réforme de la carte cantonale n’aurait pas eu d’impact sur la répartition de la DSR « bourg-centre » avant l’année 2017.
En effet, l’éligibilité aux trois fractions de la DSR est appréciée sur la base des données connues au 1er janvier de l’année précédant celle de la répartition, en application de l’article R. 2334-6 du code général des collectivités territoriales.
Afin de sécuriser d’ores et déjà les collectivités préoccupées par les incidences financières du redécoupage cantonal, le Gouvernement a souhaité leur apporter des garanties dès la fin d’année 2014 et avant la mise en œuvre du nouveau découpage.
Aussi des mesures législatives ont-elles été adoptées par le Parlement, à l’initiative du Gouvernement, pour neutraliser les effets de cette réforme, que ce soit en matière de régime indemnitaire des élus ou en matière de dotations.
L’article L.2334-21 du code général des collectivités territoriales, modifié par la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 prévoit ainsi que les limites territoriales à partir desquelles seront appréciés les seuils de population seront celles qui étaient en vigueur au 1er janvier 2014.
De plus, les anciens chefs-lieux de canton conserveront, aux côtés des bureaux centralisateurs, le bénéfice de l’éligibilité à la fraction « bourg-centre » de la DSR, sans préjudice des autres conditions d’éligibilité requises.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. Je souhaite remercier Mme la secrétaire d’État de ces précisions. Les informations disponibles semblant diverger, il était important de bien clarifier la situation.
Rappelons qu’aujourd’hui les maires sont avant tout inquiets d’un risque de « double peine », l’évolution de la DSR s’ajoutant à la baisse de la DGF. Dès lors que des garanties sont précisément apportées, les communes se sentiront sans doute plus en sécurité.
baisse programmée des dotations horaires de collèges en côte-d’or
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, auteur de la question n° 1056, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la secrétaire d'État, supprimer les inégalités scolaires semble être une priorité de votre gouvernement. J’attire donc votre attention sur la baisse programmée des dotations horaires qui frappera des collèges des zones rurales, plus particulièrement ceux de Haute Côte-d’Or, à la rentrée 2015. Ces restrictions sont injustes, car elles se fondent sur des baisses minimes d’effectifs, de quelques élèves. En regard, leurs conséquences seront disproportionnées et lourdes pour le quotidien des élèves, des établissements, des enseignants et, finalement, des territoires.
Si elles s’appliquent, ces restrictions seront préjudiciables à la qualité de l’enseignement dispensé aux élèves et mettront en péril l’avenir des petits collèges ruraux de proximité. En effet, ces établissements ruraux de Haute Côte-d’Or sont présents sur des territoires fragilisés par un contexte économique et social difficile ainsi que par une situation géographique excentrée, qui les rend moins attractifs pour les enseignants. Cela isole un peu plus des élèves qui connaissent déjà une offre culturelle moindre.
Il serait équitable de prendre en compte les problématiques de ces établissements ruraux isolés dans le calcul et la répartition de la dotation horaire globale afin de ne pas accentuer les fragilités apparentes par des diminutions disproportionnées. Celles-ci entraîneraient la suppression de deux, voire de trois divisions et perturberaient la cohésion des équipes pédagogiques, pour seulement quelques élèves de moins.
De tels choix du ministère mettent en péril la qualité des enseignements obligatoires, la stabilité et le dynamisme des équipes pédagogiques ainsi que la pérennité du dispositif d’accompagnement éducatif, au seul bénéfice des zones urbaines sensibles et des réseaux d’éducation prioritaire, les ZUS et les REP.
Pour toutes ces raisons, il est urgent que l’administration de l’éducation nationale tienne compte, à leur juste mesure, des spécificités des établissements ruraux isolés, dont l’équilibre et le bon fonctionnement ne peuvent et ne doivent répondre à une lecture uniquement comptable et financière.
Je compte sur la connaissance de ces réalités par Mme la ministre pour qu’elle préserve des conditions acceptables d’enseignement et ne condamne pas les collégiens des zones rurales.
Dans la plupart des cas, il suffirait de quelques heures de dotation horaire globale supplémentaires pour préserver la pérennité de l’équipe pédagogique et sa cohésion, et donc la qualité de l’enseignement dans un environnement de projets.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame Loisier, pour commencer, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de la ministre de l’éducation nationale.
La priorité donnée par le Président de la République à la jeunesse se traduit en actes. C’est pourquoi notre gouvernement s’est engagé à créer, d’ici à 2017, 60 000 nouveaux moyens d’enseignement. Ces créations, entamées dès 2012, se poursuivent aujourd’hui, avec 5 061 créations de postes prévues pour la rentrée 2015.
La répartition de ces emplois se fait de manière transparente et équitable entre les académies. Elle découle de l’analyse de l’évolution démographique et de la prise en compte des difficultés sociales et scolaires.
La ventilation par département est ensuite effectuée par les rectorats en fonction de l’évolution des effectifs, qui constitue une donnée objective et pertinente. La répartition prend également en compte nos priorités éducatives, telles que la mise en œuvre de la nouvelle carte de l’éducation prioritaire et du dispositif « plus de maîtres que de classes », le renforcement de la scolarisation des enfants de moins de trois ans et l’amélioration du soutien aux enfants ayant des besoins éducatifs particuliers.
S’agissant plus particulièrement du département de la Côte-d’Or, les arbitrages rendus ont vocation à accompagner les évolutions démographiques des collèges et des lycées. Je vous rappelle qu’à la rentrée scolaire 2014, malgré une baisse significative de 228 élèves dans les collèges, aucun moyen d’enseignement n’a été retiré.
Le retrait d’un certain nombre d’heures pour la rentrée scolaire 2015 est justifié par une nouvelle baisse prévisionnelle de 277 élèves. Ces prévisions seront stabilisées en juin. Comme chaque année, les situations qui le nécessiteront feront l’objet d’ajustements.
Nous avons conscience qu’en Côte-d’Or, où 34 % des collèges accueillent moins de 300 élèves, la répartition est délicate et nous savons que les effets de seuils sont plus importants dans les petites structures. Néanmoins, la situation de ces établissements ruraux, et particulièrement ceux qui scolarisent des populations en difficulté, a été prise en compte.
Vous le voyez, madame la sénatrice, c’est avec le souci de la réussite de tous les élèves que le ministère de l’éducation nationale conduit la démarche de répartition des moyens, dont l’ambition première est le traitement équitable de tous les établissements scolaires.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.
Mme Anne-Catherine Loisier. J’insiste, madame la secrétaire d’État : à ma connaissance, la dotation n’a pas été revalorisée à ce jour.
Les établissements ruraux ne doivent pas être considérés et traités comme les autres établissements. En raison de leur isolement, ils ne bénéficient pas du même environnement que les collèges urbains ou périurbains. En particulier, ils n’ont presque aucun accès aux associations complémentaires de l’éducation nationale.
Leur environnement socio-éducatif est bien souvent déficient, malgré l’engagement important des collectivités locales, communes ou communautés de communes.
Un nombre significatif d’enfants relevant de dispositifs particuliers, comme les sections d’enseignement général et professionnel adapté, les SEGPA, ou les unités localisées pour l’inclusion scolaire, les ULIS, n’y ont pas accès en raison de l’importance des déplacements requis. Ils sont donc régulièrement scolarisés dans le cursus normal, à la demande de leurs parents, ce qui n’est pas sans poser des problèmes d’adaptation que les équipes pédagogiques traitent comme elles peuvent.
En résumé, en prenant en compte le coût réel d’un élève, incluant les coûts annexes non supportés par l’éducation nationale, nous pourrions aisément constater que, loin des clichés habituels, les élèves ruraux sont nettement moins bien traités à ce jour que les élèves urbains et périurbains.
C’est pourquoi je compte sur la ministre de l’éducation nationale pour étudier avec attention le sujet de la dotation horaire globale dans les collèges ruraux
fermeture de l’agence de la caisse primaire d’assurance maladie de bondy
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 1076, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
M. Gilbert Roger. J’attire l’attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la fermeture, depuis le mois de janvier 2015, de l’agence de la caisse primaire d’assurance maladie de Bondy, sans aucune explication ni concertation préalable avec les partenaires du territoire.
Seule une affichette placardée sur le local informe que l’espace d’accueil est exceptionnellement fermé. Les assurés sociaux doivent, depuis cette date, se déplacer dans les centres d’accueil de la CPAM des petites communes voisines, Noisy-le-Sec, Le Raincy ou Bobigny.
À la suite du lancement sur internet d’une pétition pour réclamer la réouverture de cet espace d’accueil, le directeur de la gestion du réseau de la CPAM a indiqué que l’agence de Bondy serait en mesure de rouvrir ses portes à compter du 17 mars 2015, mais seulement deux jours par semaine et que, les autres jours, les assurés pouvaient se rendre sur le site internet de la CPAM.
Par ailleurs, le directeur a depuis présenté aux maires du département la carte du nouveau maillage territorial validant la fermeture de plusieurs centres d’accueil, dont celui de Bondy.
Cette réponse n’est pas acceptable pour Bondy, chef-lieu de canton dont les 53 000 habitants sont très touchés par la précarité, puisque le taux de chômage atteint 19 %.
Les personnes âgées, modestes, précaires ou en situation de handicap, qui rencontrent des difficultés d’accès aux soins, ont besoin d’un accueil physique de proximité pour effectuer leurs démarches administratives. Beaucoup d’entre elles n’ont pas internet à leur domicile.
Par conséquent, je demande à Mme la ministre si elle compte intervenir rapidement afin que la permanence de la CPAM de Bondy ouvre de nouveau ses portes aux jours et aux plages horaires habituels pour garantir le principe d’égalité des droits de tous les assurés sociaux sur le territoire national.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, pour commencer, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
En 2014, en Seine-Saint-Denis, l’assurance maladie a reçu plus de 1,3 million de visites dans ses agences d’accueil.
Constatant malheureusement des temps d’attente trop longs, une continuité de service insuffisante entraînant par endroits des fermetures inopinées, et des problèmes de sécurité des personnels comme des assurés, la caisse primaire a engagé une réorganisation de l’accueil physique.
Ainsi, les agences recevant majoritairement une population fragile seront renforcées en nombre de jours d’ouverture et en personnel ; de nouvelles modalités d’accueil seront mises en place, avec un accueil sur rendez-vous afin de délivrer un accompagnement préparé et personnalisé et la mise en œuvre de visites au domicile, dans des cas spécifiques.
Ce projet doit ensuite se traduire par un ajustement des implantations des espaces d’accueil au regard de critères tels que la fréquentation, l’accessibilité ou le degré de précarité des populations des différentes communes.
Précisément, les habitants de Bondy auront la possibilité de se rendre dans les agences limitrophes de Bobigny ou de Noisy-le-Sec, situées à moins de trente minutes de leur lieu de résidence, où ils pourront bénéficier d’un accueil sur rendez-vous leur garantissant la bonne prise en charge de leurs besoins sans attente à l’accueil.
De plus, faisant suite aux demandes des élus locaux, la CPAM a maintenu un accueil à temps partiel à Bondy, ouvert deux jours par semaine, en complément des autres points de contact sur le territoire de la communauté de communes.
La direction de la caisse primaire va engager, dans les prochains jours, une phase de concertation avec les élus locaux et rencontrer, à ce titre, l’ensemble des maires du département. Ces échanges doivent permettre de présenter précisément la stratégie poursuivie et les avantages qu’elle présente en matière de qualité de service pour les assurés sociaux.
Tels sont les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Roger.
M. Gilbert Roger. Je pourrais regretter que le ministère se fasse le porte-plume de la CPAM et se limite, dans ses indications, à ce que le directeur a bien voulu communiquer !
Si je comprends bien les explications qui viennent d’être données, il y a 1,3 million de visites, donc on ferme la moitié des sites… C’est incompréhensible, pour ne pas dire stupide !
Il ne s’agit en rien du résultat d’une concertation, mais bien d’un diktat. Le même directeur a d’ailleurs décidé de diminuer le nombre de lieux d’ouverture, au motif que le ministère lui aurait supprimé quelques crédits.
J’ajoute que les 53 000 habitants de Bondy vont être contraints de faire trente minutes de déplacement vers des petites communes proches, qui, elles, ont 15 000 ou 17 000 habitants. Il n’y a pas de logique dans tout cela, sinon celle du chiffre, et la stupidité d’économies de bouts de chandelle !
M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)
PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher
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Réforme de l’asile
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à la réforme de l’asile (projet n° 193, texte de la commission n° 426, rapport n° 425, avis n° 394).
Avant de passer au vote, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits pour expliquer leur vote.
J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé, à raison d’un orateur par groupe, à sept minutes le temps attribué à chaque groupe politique, les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.
Je vous inviterai ensuite, mes chers collègues, à vous rendre en salle des conférences pour voter et je suspendrai la séance pendant la durée du scrutin, prévue pour une demi-heure.
Je proclamerai enfin le résultat à l’issue du dépouillement, aux alentours de quinze heures quarante-cinq, puis je donnerai la parole au Gouvernement.
Explications de vote sur l’ensemble
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’asile et ses malheureux damnés sont au cœur de bien des discussions et débats, ici comme ailleurs. En Asie, 8 000 personnes se trouvaient encore récemment à la dérive sur la mer, abandonnées de leurs passeurs ; elles se sont vues repousser hors des eaux territoriales par les autorités indonésiennes. Le problème est insoluble, la nationalité étant un facteur d’exclusion dirimant – mais non totalement opérant – entre ceux qui peuvent avoir des droits et les autres.
La question de l’afflux massif de réfugiés sur nos rivages se pose à l’échelon européen, comme en témoigne la proposition de la Commission européenne d’instaurer des quotas de réfugiés par État membre. Nous ne nous attarderons ni sur ce qui est déjà connu ni sur la réalité vécue à Lampedusa ou à Calais.
Le plan d’action pour l’immigration et l’asile de la Commission européenne prévoit notamment des quotas obligatoires par État membre, pour assurer une distribution équitable des réfugiés, et un transfert des demandeurs d’asile entre États de l’Union européenne en cas de crise, donc d’afflux massif inhabituel et temporaire de migrants. En 2014, plus de 360 000 demandes d’asile ont été traitées ; la moitié seulement ont été acceptées et six pays, les plus attractifs, ont assumé l’essentiel de l’effort : l’Allemagne, la Suède, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Néanmoins, les États ne participant pas à la politique migratoire commune – comme le Royaume-Uni, l’Irlande ou le Danemark – ne seraient pas concernés par l’obligation découlant de ce plan.
À l’instar du Président de la République, le groupe du RDSE a fait connaître son opposition de principe à l’instauration de tels quotas en matière d’asile. Vous nous avez rassurés à ce sujet ici même jeudi dernier, monsieur le ministre, en précisant avec clarté la position de la France sur ce plan d’action.
À l’échelon national, nous considérons comme souhaitable la rationalisation visée par le projet de loi initial et nous soutenons l’esprit de la réforme engagée. En matière d’asile, comme en d’autres matières, la France n’a cessé d’osciller entre l’amour des grandes idées et la réalité, très empirique, des petits arrangements, dont témoigne clairement la sous-budgétisation constante de la mission « Immigration, asile et intégration ».
Ce projet de loi se fixe deux objectifs difficilement conciliables : l’inconditionnalité de l’accueil et le bon traitement des demandeurs d’asile, la France traitant près de 65 000 demandes par an, soit 15 % de l’ensemble des demandes à l’échelon européen.
Ainsi, nous saluons tout d’abord certaines avancées particulièrement significatives en matière de garanties octroyées aux demandeurs d’asile, conformément aux directives européennes : le réexamen des demandes formulées auprès de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides, l’OFPRA, et de la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, l’établissement d’une liste de pays sûrs, le droit au maintien sur le territoire de tous les demandeurs d’asile, l’instauration d’un entretien personnel et en présence d’un avocat, la prise en compte systématique de la vulnérabilité des demandeurs, la possibilité du huis clos pour les audiences devant la CNDA, la possibilité d’utiliser la vidéoconférence pour les entretiens conduits par l’OFPRA, mesure ajoutée par le Sénat lors de ses travaux en séance publique.
Nous saluons ensuite les avancées destinées à réformer un système d’asile à bout de souffle, notamment en matière de réduction des délais d’instruction. Ceux-ci sont désormais inscrits dans la loi : trois mois pour la procédure normale et quatre-vingt-seize heures lorsque le demandeur est placé en rétention. En 2014, l’OFPRA a recruté soixante-dix nouveaux agents, ce qui a déjà permis de réduire les délais. Nous examinerons en outre les résultats de l’expérimentation, votée par le Sénat, de la déconcentration de l’OFPRA par la création d’antennes locales dans certains départements. Nous le savons, les difficultés liées à la centralisation de l’Office sont réelles et nombreuses.
Toutefois, comme l’a souligné Pierre-Yves Collombat lors de la discussion générale, certaines des solutions élaborées en commission ou en séance publique ne nous paraissent pas conformes aux engagements internationaux de la France.
Bien que ce projet de loi soit un texte procédural traitant de la gestion administrative du droit d’asile, il n’en élude pas moins les questions politiques de fond : la gestion des flux migratoires à l’échelon européen ou l’impossibilité de faire exécuter les obligations de quitter le territoire français, par exemple. En effet, que faire une fois le demandeur d’asile définitivement débouté ? Celui-ci vient grossir les rangs des sans-papiers, tout comme sa famille, alors même que le texte permet au demandeur d’asile d’accéder au marché du travail lorsqu’aucune décision n’a été prononcée dans un délai de neuf mois. Le texte ne contient donc pas de solutions à ce problème, même s’il est vrai que celles-ci seraient avant tout politiques et administratives.
Le Sénat a en outre voté le principe selon lequel la décision définitive de rejet de la demande vaut obligation de quitter le territoire français, ce qui n’est pas sans poser des questions de conformité au principe international du droit à une vie familiale. En effet, l’étranger débouté ne pourra bénéficier d’un titre de séjour pour réunification familiale ou pour état de santé.
Et que dire des difficultés administratives très concrètes qu’a mises en lumière le « non-rapport » de la Cour des comptes, à commencer par les procédures parallèles ? Cette disposition pose un réel problème, soulevé par le directeur général de l’OFPRA, tant sur le plan juridique qu’en raison du changement de nature de la mission des officiers de protection que cela entraînerait.
Ainsi, si les constats sont évidents, il n’en est pas de même pour les solutions, qui ont malheureusement tendance à être le plus souvent purement incantatoires.
Pour toutes ces raisons, bien que le Sénat ait accepté à l’unanimité de modifier l’intitulé de ce texte – il s’agit désormais…
M. Jean-Claude Requier. … du projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile et non plus du projet de loi relatif à la réforme de l’asile, qui évoquait trop les asiles d’aliénés –, le groupe du RDSE s’abstiendra de façon unanime.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.