M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. J’ignore quelles sont les mesures envisagées par la commission spéciale, mais j’ai au moins une certitude : les hautes juridictions, en particulier le Conseil d’État, sont confrontées à un problème d’encombrement. D’ailleurs, ce n’est pas nouveau ; les étudiants en droit assistaient déjà voilà une quarantaine d’années à des colloques sur le thème : « La justice administrative, victime de son succès » ! Il est vrai qu’un travail de régulation est effectué.
Je ne vois pas bien ce qui justifierait en l’occurrence l’intervention de l’Autorité de la concurrence, même pour émettre un avis. Les autorités administratives indépendantes sont utiles dans les domaines où elles ont une expertise réelle. Or je ne suis pas convaincu de l’expertise de l’Autorité de la concurrence en l’espèce. Mieux vaudrait qu’elle se cantonne à ce à quoi elle apporte une véritable valeur ajoutée.
Je voterai donc en faveur de l’amendement n° 583 rectifié.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Je souscris à l’argumentation de M. le corapporteur.
Cet amendement concerne l’organisation juridique de la profession d’avocat au Conseil d’État ou à la Cour de cassation, et non la réforme en elle-même. Il serait donc plus pertinent d’en débattre lors de l’examen de l'article 20 ter et des articles suivants, qui traitent de l’interprofessionnalité des professions juridiques.
En tout état de cause, l’amendement ne peut pas être satisfait à ce stade de la discussion. J’en sollicite donc le retrait, au bénéfice des dispositions qui seront évoquées dans quelques instants. (M. François Pillet, corapporteur, acquiesce.)
Par ailleurs, M. Longuet, qui a été ministre, connaît par cœur le principe de la solidarité gouvernementale : le ministre au banc représente la position du Gouvernement dans son ensemble. C’est le cas en ce qui me concerne. D’ailleurs, des membres du cabinet de ma collègue garde des sceaux sont présents aujourd’hui à mes côtés, comme ils l’avaient été à l’Assemblée nationale.
Monsieur Karoutchi, vous avez également été membre d’un gouvernement ; vous savez bien que cela fonctionne ainsi. À défaut, il faudrait que l’ensemble du Gouvernement soit présent sur chaque texte. Peut-être votre gourmandise irait-elle jusque-là ? (Sourires.)
M. Roger Karoutchi. Je ne suis pas très gourmand de ce gouvernement…
M. Emmanuel Macron, ministre. Je tiens à lever tout malentendu éventuel. Mme la garde des sceaux a été longuement auditionnée par la commission spéciale sur ce texte.
Tous les projets de loi font l’objet d’un arbitrage interministériel, et ils sont défendus par le ministre compétent ou, le cas échéant, par l’un de ses collègues qui le remplace. J’espère que ces précisions figureront bien au compte rendu intégral, afin qu’il ne reste aucune équivoque.
Ma collègue garde des sceaux fait œuvre non de silence, mais bien de solidarité.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je voterai l’amendement n° 583 rectifié.
Monsieur Longuet, l’absence de Mme la garde des sceaux traduit sans doute certaines des interrogations qui sous-tendent le projet de loi, du moins s’agissant des professions réglementées.
Pour ma part, je conteste la logique de primauté du principe de concurrence sur l’organisation des professions de droit. Dans ce texte, la plupart des arbitrages relèvent de l’Autorité de la concurrence, et non d’organes liés au ministère de la justice.
Certes, il est nécessaire de dépoussiérer, de mieux encadrer, de mieux réguler et de permettre et l’arrivée de nouvelles générations de professionnels dans les territoires où les besoins ne sont pas satisfaits.
Néanmoins, nous sommes sur un secteur du droit où la tradition française fait appel, au-delà de l’équilibre entre les parties, à un troisième acteur, celui qui représente l’intérêt général et la République. C’est ce qui a conduit à accepter que les professions soient réglementées. Il s’agit de faire en sorte que l’intérêt général puisse s’exprimer, le principe de la concurrence étant, lui, fondé sur un équilibre des parties.
Monsieur Bouvard, c’est cette philosophie libérale qui amène à tout transférer à l’Autorité de la concurrence. Or cette dernière n’est pas compétente sur tout. En plus, cela fait entrer dans une pure logique de financiarisation, en permettant qu’un certain nombre de structures soient détenues par du capital. Il est donc nécessaire que des personnes défendent l’intérêt général au sein de leur travail.
L’amendement n° 583 rectifié vise précisément à combattre la financiarisation. Nous sommes, me semble-t-il, sur un débat fondamental.
Pour ma part, je suis pour une économie de marché – le débat sur l’existence de l’économie de marché me semble aujourd’hui dépassé –, mais pour une économie de marché régulée, et non pour une société de marché qui s’étendrait à tous les secteurs de l’activité publique et humaine, où le principe de la concurrence deviendrait la référence.
À l’instar de Lionel Jospin, je suis pour l’économie de marché, contre la société de marché !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. M. le ministre a évoqué la solidarité gouvernementale.
Un jour, j’ai posé une question à M. Rebsamen, qui ne pouvait pas être là. Il s’est donc fait remplacer par l’une de ses collègues, qui s’est contentée de lire machinalement une fiche. Manifestement, elle n’avait aucun intérêt pour le sujet et était en service commandé. Je ne suis même pas certain qu’elle ait ensuite fait part du contenu de notre échange à M. Rebsamen…
Affirmer que chaque ministre peut se substituer à un autre, ce n’est pas sérieux. Chacun s’implique dans un secteur ; il y prend des décisions, répond à des questions. C’est un peu grave de tenir de tels propos ! En tout cas, ce n’est pas conforme à l’esprit d’élaboration collective de la loi avec le Parlement.
Certes, monsieur le ministre, on peut difficilement vous faire le reproche de vous être substitué à l’un de vos collègues sans vous intéresser au sujet. Au contraire ! Vous souhaitez ardemment la réussite de votre projet de loi.
À cet égard, je rejoins les arguments de Mme Lienemann. Votre ambition n’est pas de réformer la justice ; vous voulez introduire de la concurrence dans les professions réglementées ! Et qui pourrait s’en charger mieux que le ministre de l’économie lui-même ? (Exclamations.) Le ministre chargé de la justice aurait tendance à voir les choses sous un autre angle…
En réalité, monsieur le ministre, le fait que vous soyez impliqué sur autant des dossiers confirme ce que j’avais indiqué lors de la discussion générale. Il s’agit d’un projet de loi « fourre-tout », mais avec une logique et un fil conducteur – en l’occurrence, il serait pour le moins inapproprié de parler de « fil rouge » ! (Sourires.) –, en l’occurrence la « modernisation », ce qui signifie pour vous le libéralisme et l’introduction de la concurrence !
Mme Bricq a demandé tout à l’heure un rapport. Quels sont les effets de ce vent de libéralisme dans les professions réglementées ? On ne peut pas encore les connaître.
La présence de M. le ministre de l’économie et l’absence de Mme la garde des sceaux démontrent bien que l’objectif est d’introduire de la concurrence au sein des professions réglementées, donc de les libéraliser !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je tiens simplement à souligner que le groupe socialiste ne se trompe pas d’enceinte : nous élaborons la loi ; nous ne faisons pas le congrès du parti socialiste ! (Exclamations.)
Nous voterons donc contre cet amendement. Nous aurons peut-être le débat de fond à l’article 20 ter.
M. le président. La parole est à M. François Pillet, corapporteur.
M. François Pillet, corapporteur. Comme je l’ai déjà indiqué, je suis parfaitement d’accord avec notre collègue Jean-Claude Requier.
C’est la raison pour laquelle la commission spéciale a prévu à l’article 21 – nous l’examinerons bientôt – que les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation ne pourront pas être dans une société interprofessionnelle. L’objectif sera donc atteint.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement, dont l’adoption ne ferait qu’ajouter de la confusion.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Les collègues qui ne font pas partie de la commission spéciale peuvent se reporter au compte rendu de nos auditions.
Mme la garde des sceaux s’était exprimée devant nous, et son intervention avait été très éclairante. Elle a insisté sur un élément : la justice et le droit ne peuvent pas être déconnectés de l’économie, mais il faut préserver la spécificité des professions juridiques. Elle a aussi évoqué un « réflexe sublime » – l’expression nous a bien plu – conduisant à se dire en toutes circonstances qu’un arbitrage rendu aurait pu être moins bon…
Le travail de M. le corapporteur et, plus généralement, de la commission permet d’ajouter des éléments de principe juridique et de prise en compte des préoccupations des professions réglementées au texte proposé par l’Assemblée nationale. Il faudra en tenir compte, quel que soit le talent, d’ailleurs très grand, de M. le ministre.
M. Longuet a souligné avec son talent habituel que la commission était parvenue à un équilibre. Nous devons préserver cet équilibre dans nos débats.
Je rejoins donc la suggestion de M. le corapporteur. Il paraît préférable de retirer cet amendement et d’avoir ce débat lors de l’examen des articles 20 ter, 21 et 22.
M. le président. Monsieur Requier, l'amendement n° 583 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Requier. Non, je le retire, monsieur le président.
J’ai bien entendu les propos de M. le ministre, de M. le président de la commission spéciale et de M. le corapporteur. Je serai au rendez-vous lors de l’examen des articles qui ont été mentionnés !
M. le président. L'amendement n° 583 rectifié est retiré.
L’amendement n° 1471 n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 17 bis.
(L'article 17 bis est adopté.)
Article 17 ter
I. – L’article 15 de l’ordonnance du 10 septembre 1817 qui réunit, sous la dénomination d’Ordre des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation, l’ordre des avocats aux conseils et le collège des avocats à la Cour de cassation, fixe irrévocablement, le nombre des titulaires, et contient des dispositions pour la discipline intérieure de l’Ordre est ainsi rétabli :
« Art. 15. – Les honoraires de consultation, d’assistance, de conseil, de rédaction d’actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.
« Sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale, l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
« Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.
« Toute fixation d’honoraires qui ne le serait qu’en fonction du résultat judiciaire est interdite. Est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d’un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu. »
II. – (Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 1626, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. – Le III de l’article L. 141-1 du code de la consommation est complété par un 17° ainsi rédigé :
« 17° Du deuxième alinéa de l’article 15 de l’ordonnance du 10 septembre 1817 qui réunit, sous la dénomination d’Ordre des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation, l’ordre des avocats aux conseils et le collège des avocats à la Cour de cassation, fixe irrévocablement, le nombre des titulaires, et contient des dispositions pour la discipline intérieure de l’Ordre, dans le respect du secret professionnel qui, en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, couvre les consultations adressées par un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation et son client, entre l’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation et ses confrères, à l’exception pour ces dernières de celles portant la mention “officielle”, les notes d’entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier. »
La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Cet amendement vise à habiliter les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ou DGCCRF, à contrôler l’existence des conventions d’honoraires entre les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation et leurs clients, dans le respect du secret professionnel.
Ces agents assermentés ont l’habitude d’exercer de tels contrôles. Les procédures anonymisées existent aujourd’hui pour le contrôle des honoraires : le nom des clients n’étant pas connu, le secret professionnel de ces professions est respecté.
La mise en place d’un tel contrôle est l’une des conditions qui permettent de s’assurer du respect des contraintes pesant sur ces conventions d’honoraires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. La semaine dernière, nous avons refusé d’accorder à la DGCCRF de tels pouvoirs de contrôle pour les avocats. Par souci de cohérence, il n’y a pas lieu de les accorder aujourd’hui pour les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation. J’avais offert à M. le ministre la possibilité de nous expliquer en quoi consistait exactement ce contrôle.
La commission spéciale est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Un client mécontent des honoraires que lui réclame son avocat peut toujours saisir le bâtonnier. Mais quelle est la discipline professionnelle pour les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation ? Faute de le savoir, je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Le groupe socialiste soutient la position du Gouvernement.
La DGCCRF ne plaît pas à certains, parce qu’elle dépend du ministère de l’économie et des finances, mais il s’agit bien d’un service public.
Au moment de la création de l’Autorité de la concurrence, dans le cadre de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, les services de la DGCCRF ont craint d’être dépossédés de leur pouvoir de contrôle. Quand on fait le bilan de la loi cinq ans après, on s’aperçoit que la DGCCRF et l’Autorité de la concurrence ont très bien su coopérer. L’argument selon lequel on introduirait le loup dans la bergerie n’a donc plus lieu d’être.
Il me semble normal de permettre aux services de l’État de vérifier que les clients, consommateurs finaux, ne sont pas victimes d’honoraires excessifs. Je ne comprends pas l’opposition à un tel dispositif, sinon à vouloir défendre une profession qui compte vraiment peu de membres, sous prétexte que les avocats ne sont pas concernés...
Au début de cette discussion, nous avions indiqué que les professions du droit participaient au mouvement de l’économie par les conventions, les contrats conclus entre professionnels et consommateurs.
Je ne comprends pas votre argumentation. Vous exprimez une défiance envers le ministère de l’économie. Ainsi, Gérard Longuet a déploré l’absence de Mme la garde des sceaux, qui a pourtant répondu à toutes nos questions – le président de la commission spéciale l’a rappelé à l’instant – lors d’une audition publique dont le compte rendu est disponible.
Le Gouvernement et les services de l’État sont à la disposition des consommateurs.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. Je veux ici lever une ambiguïté qui a opposé jusqu’à présent le Gouvernement à la commission spéciale. Cela devrait me permettre de répondre à M. Longuet.
Aujourd’hui, il n’existe pas de conventions d’honoraires obligatoires – elles seront mises en place à travers ce texte –, mais seulement des honoraires. Or la DGCCRF est déjà compétente pour contrôler ces honoraires. En effet, l’instance ordinale est chargée du contrôle disciplinaire, du respect des règles de l’Ordre, mais pas du droit consumériste ; Dieu merci pour elle ! Mes services sont donc d'ores et déjà compétents pour contrôler les notes d’honoraires litigieuses, dans le respect du secret professionnel.
Il s’agit ici d’étendre ce contrôle aux conventions d’honoraires des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation que crée ce texte, de manière anonymisée.
Je ne comprends pas les réticences de votre commission spéciale. Si personne ne contrôle ces conventions – il s’agit d’une question purement consumériste qui ne relève pas du président de l’Ordre –, nous allons créer un vide. Pourquoi la DGCCRF ne pourrait-elle faire pour les conventions d’honoraires ce qu’elle fait déjà pour les honoraires ? Il s’agit simplement de protéger un peu plus les consommateurs.
M. le président. La parole est à M. François Pillet, corapporteur.
M. François Pillet, corapporteur. Monsieur le ministre, les précisions que vous apportez m’inquiètent et ne font que me conforter dans mon opinion.
Vous opérez une confusion : la validité de la convention d’honoraires, qui va être rendue obligatoire, au regard du mandat, au regard de l’évaluation du service rendu par l'avocat, relève de la compétence exclusive du bâtonnier.
Or vous venez de dire que la DGCCRF – c’est justement ce qui m’inquiète –, vérifiant l’existence d’une convention d’honoraires, contrôlera également sa conformité à l’idée que vous vous faites de l’honoraire dû à l’avocat. Non !
Comme je vous l’ai déjà indiqué, nous pouvons entendre que la DGCCRF vérifie l’existence formelle d’une convention, mais pas qu’elle en contrôle le texte !
Cela se heurte au secret professionnel de l’avocat. Certes, je veux bien que les agents de la DGCCRF soient soumis au secret professionnel, comme l’administration fiscale, le préfet ou les fonctionnaires. Un jour, nous aurons 60 millions de Français qui seront soumis au secret professionnel ! (Sourires.)
Au demeurant, la DGCCRF, en exerçant ce contrôle, pourra procéder à une perquisition. Quelle est la convention que vous allez anonymiser ? Et même si vous anonymisez, on ne peut plus savoir si la convention d’honoraires est passée entre deux parties.
Nos positions ne sont pas forcément très éloignées l’une de l’autre. Ce qui nous sépare, c’est la limite du contrôle de la DGCRF : s’il s’agit de vérifier qu’il existe une convention d’honoraires, on peut discuter ; s’il s’agit de descendre dans texte de la convention, nous ne pouvons plus nous accorder.
Je maintiens donc ma position, et j’invite mon collègue Gérard Longuet non plus à s’abstenir, mais à rejoindre l’avis de la commission spéciale. (M. Gérard Longuet acquiesce.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 17 ter.
(L'article 17 ter est adopté.)
Article 18
I. – L’article 1er ter de l’ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toute clause de non-concurrence est réputée non écrite. »
II (Non modifié). – L’article 3 ter de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « plus », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « de deux huissiers de justice salariés. » ;
b) À la seconde phrase, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au double de » ;
2° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toute clause de non-concurrence est réputée non écrite. »
III (Non modifié). – L’article 3 de l’ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945 relative au statut des commissaires-priseurs est ainsi modifié :
1° Le second alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « plus », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « de deux commissaires-priseurs judiciaires salariés. » ;
b) À la seconde phrase, les mots : « à celui des commissaires-priseurs judiciaires associés y exerçant » sont remplacés par les mots : « au double de celui des commissaires-priseurs judiciaires associés qui y exercent » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Toute clause de non-concurrence entre le titulaire de l’office et le commissaire-priseur judiciaire salarié est réputée non écrite. »
IV (Non modifié). – Le premier alinéa de l’article L. 743-12-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Après le mot : « plus », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « de deux greffiers de tribunal de commerce salariés. » ;
2° À la seconde phrase, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au double de ».
V. – (Supprimé)
VI (nouveau). – La section 1 du chapitre 2 du titre 4 du livre 6 du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 642-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 642-4-1. – La nomination en qualité de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce et d’huissier de justice, l’inscription sur la liste des administrateurs judiciaires ou sur celle des mandataires judiciaires, ainsi que la déclaration en tant que commissaire-priseur de ventes volontaires, comportent l’obligation de cotiser au régime complémentaire institué, en application de l’article L. 644-1, au profit de ces professions, même en cas d’affiliation au régime général de sécurité sociale.
« Un décret fixe la répartition des cotisations entre la personne physique ou morale employeur et le professionnel lorsque celui-ci est affilié au régime général de sécurité sociale. »
VII (nouveau). – Les cotisations versées au régime complémentaire institué en application de l’article L. 644-1 du code de la sécurité sociale, au profit des professions mentionnées à l’article L. 642-4-1 du même code, dans sa rédaction résultant du présent article, par les salariés affiliés au régime général de sécurité sociale, n’ouvrent pas droit à prestations auprès de ce régime complémentaire.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1629, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Rétablir le 1° dans la rédaction suivante :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « quatre » ;
b) À la seconde phrase, les mots : « double de celui des notaires associés y exerçant » sont remplacés par les mots : « quadruple de celui des notaires associés qui y exercent » ;
c) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« À compter du 1er janvier 2020, le nombre de recrutement de notaires salariés est limité à deux pour une personne physique titulaire d’un office notarial et au double de celui des notaires associés y exerçant la profession pour les personnes morales titulaires d’un office de notaire. » ;
II. – Alinéa 20
Rétablir le V dans la rédaction suivante :
V. – Dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur l’évolution du nombre de notaires, d’huissiers de justice, de commissaires-priseurs judiciaires et de greffiers des tribunaux de commerce salariés depuis la promulgation de la présente loi et sur l’évolution de la proportion de jeunes et de femmes parmi ces salariés.
III. – Alinéas 21 à 24
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le ministre.
M. Emmanuel Macron, ministre. La commission spéciale a retenu la majeure partie des dispositions de l’article 18 voté à l’Assemblée nationale. Je tenais à le préciser, car cela participe de l’esprit dans lequel nous travaillons depuis le début de semaine dernière. Je souhaiterais toutefois réintroduire deux dispositions.
Il s’agit tout d’abord de la disposition transitoire permettant aux notaires de recruter jusqu’en 2020 quatre notaires salariés pour un notaire titulaire. La limite est aujourd’hui fixée à deux. Cette disposition vise à permettre à la profession d’adapter l’évolution de ses effectifs, afin d’arriver à un nombre optimum.
En effet, certaines études commanditées par les notaires aboutissent à la conclusion que la profession devrait perdre, du fait de sa pyramide des âges, jusqu’à 1 700 notaires d’ici à 2020. Le recrutement d’un plus grand nombre de salariés – quatre pour un au lieu de la règle des deux pour un que j’évoquais – devrait permettre à la profession de compenser une baisse de près de 18 % de ses effectifs.
Si nous avons retenu la date de 2020, c’est que cette échéance nous permet d’absorber les modifications que nous introduisons par ailleurs. De nouveaux offices vont s’ouvrir, ce qui va permettre à certains notaires salariés d’accéder à de nouvelles perspectives et de renouveler la profession.
Nous souhaitons ensuite rétablir la remise au Gouvernement, dans un délai de deux ans après la promulgation de la loi, d’un rapport sur l’évolution du nombre de professionnels concernés et sur la proportion de jeunes et de femmes.
Je sais que la commission spéciale a voulu imposer une discipline en matière de rapports. Mais il me semble important de pouvoir mesurer, d’ici à deux ans, les effets des modifications que nous introduisons. Nous pouvons ne pas partager certaines conceptions a priori, mais je pense que vous comprenez l’importance d’évaluer les effets de la loi dans le temps.
Par ailleurs, la commission spéciale du Sénat a introduit une disposition nouvelle visant à obliger les nouveaux professionnels salariés à cotiser au régime complémentaire de retraite des ordres professionnels concernés, sans que ces cotisations leur ouvrent des droits à prestation auprès du régime complémentaire.
Cette disposition, qui relève du code de la sécurité sociale, devrait plutôt être décidée en concertation, me semble-t-il, avec l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales et les ordres spécifiques des professions concernées.
De plus, il apparaît quelque peu paradoxal que des cotisations obligatoires à un régime de protection sociale n’ouvrent aucun droit à ceux qui les versent, alors même que les régimes de sécurité sociale ont été instaurés pour protéger ceux qui y sont rattachés.
Cette troisième modification, qui me semble importante, fait que cet amendement n’est pas de pur rétablissement.