Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

M. Olivier Cadic. L’article 10 A adopté par l’Assemblée nationale et soutenu par le Gouvernement contient plusieurs types de grandes dispositions. Les articles L. 341-1, L. 341-2 et L. 341-3, dont l’introduction est proposée dans le code de commerce, établissent l’obligation de formaliser un contrat entre tout commerçant indépendant et une personne physique ou morale mettant à sa disposition une enseigne et des services, pour une durée maximale de neuf ans. Ce contrat ne peut être renouvelé par tacite reconduction.

Cette institution d’un contrat plus ou moins unique, sur la durée duquel devraient s’aligner tous les autres contrats établis entre les parties, porte en elle une discrimination à l’égard du commerce intégré. En effet, la contrainte nouvellement créée par cet article n’affecte que très partiellement la distribution intégrée, alors qu’elle concerne la totalité des réseaux de commerçants indépendants. François Marc vient de nous lire une note, établie par un broker, qui explique cela très bien.

Si les réseaux intégrés font bien exploiter des points de vente en franchise, la part d’activité représentée par ce type d’exploitation est très minoritaire dans l’ensemble de leur chiffre d’affaires et son évolution n’a pas d’incidence notable sur le fonctionnement de leurs outils centralisés, lesquels disposent, quant à eux, de la pérennité de ce type de structure.

À l’inverse, tous les réseaux de commerçants associés, principalement des distributeurs alimentaires, mais également tous les réseaux du commerce associé – enseignes de bricolage, opticiens, pharmaciens, magasins d’articles de sport, architectes, parfumeurs... – sont concernés par cet article.

Fragiliser, voire condamner, les sociétés collectives des indépendants reviendrait à instaurer un déséquilibre flagrant au bénéfice des sociétés intégrées, qui auraient la capacité de garder intactes leurs structures, tout en s’emparant progressivement de la majeure partie des magasins indépendants, privés des éléments les plus importants de leur compétitivité. Cela nous renvoie, encore une fois, à la note précitée.

Les dispositions de l’article 10 A, outre qu’elles posent un problème de constitutionnalité, anéantiraient le travail des législateurs qui, depuis des décennies et jusqu’à l’année dernière avec la loi Hamon, ont patiemment adapté et renforcé les règles régissant l’organisation des systèmes coopératifs. C’est la raison pour laquelle cet article ne peut trouver d’aménagement partiel. Tant que les mesures qu’il comporte continueront de concerner le commerce associé, l’efficacité économique du système coopératif sera menacée. La solution ne peut donc passer que par la suppression de l’article 10 A, ou par la limitation de sa portée aux seuls cas du commerce franchisé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Au vu de ces échanges, monsieur le ministre, je pense sincèrement que rétablir la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale serait une fausse bonne idée et ne vous rendrait pas forcément service. Cela vous ôterait, en effet, toute possibilité d’avancer sur ce sujet, ô combien délicat et important, et donc toute marge de manœuvre.

Si la commission spéciale a décidé de supprimer l’article 10 A, c’est parce qu’elle a considéré que ses inconvénients étaient plus nombreux que ses avantages.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Je souhaite apporter trois clarifications.

La première est relative aux notes des analystes financiers.

Je veux vous rassurer, monsieur Marc : les évaluations rédigées par Merrill Lynch ne sont ni neutres ni indépendantes. De surcroît, elles ne tiennent pas compte des études d’impact du Gouvernement. Il faut d’ailleurs toujours se demander pour qui ces notes sont rédigées : elles le sont pour les sociétés qui sont d’ores et déjà cotées ou font l’objet d’échanges de papiers d’investisseurs, c’est-à-dire plutôt les réseaux privés franchisés, comme Carrefour, par exemple. Par conséquent, méfiez-vous de ce genre d’analyses !

Ma deuxième clarification s’adresse à Mme Lienemann.

Je suis absolument conscient des réalités et de ce qui structure le monde associatif, en particulier le commerce associé, c’est-à-dire les règles de l’affectio societatis.

Je connais aussi la différence juridique, que vous avez rappelée, madame la sénatrice, entre des franchisés simples et des franchisés organisés sous forme de coopération qui sont donc coactionnaires.

Vous conviendrez néanmoins avec moi que la réalité quotidienne d’un franchisé de l’un de ces réseaux n’est pas tout à fait celle d’un codécideur. Il est donc vertueux d’aménager le système en vigueur.

Tout comme vous, je suis particulièrement attaché aux caractéristiques du modèle coopératif, à la stabilité qu’il apporte en termes de fonctionnement, aux rapports entre les coopérants, aux valeurs portées par ceux-ci et à la relation qu’ils entretiennent avec leur territoire. Il ne s’agit nullement, ici, de les remettre en cause ! J’ai d’ailleurs reconnu qu’il convenait de corriger les mesures initialement retenues, compte tenu de l’incidence qu’elles pouvaient avoir sur les statuts en vigueur dans ce secteur.

Nous constatons toutefois, dans le secteur coopératif, des pratiques, en termes d’engagements financiers et commerciaux, qui ne sont pas souhaitables et manifestent une volonté d’optimisation.

J’ai noté, madame la corapporteur, et ce sera mon troisième point, que vous aviez salué la puissance du mécanisme d’injonction structurelle que le Gouvernement a proposé. Vous êtes même allée plus loin puisque vous avez reconnu la notion de position dominante. J’en suis heureux : ainsi pourrons-nous défendre, dans la suite du débat, la puissance de cette notion pour ne pas en revenir à celle de simple abus de position dominante, laquelle n’a jusqu’à présent pas porté ses fruits.

L’injonction structurelle ne vaut que dans le cas d’une position dominante avec des prises ou des marges excessives. Un franchisé, qu’il appartienne ou non au secteur du commerce associé, peut ainsi se retrouver dans l’impossibilité de changer d’enseigne, alors même qu’il le souhaiterait, en raison de l’enchevêtrement de ces contrats et de leur durée.

Il y a donc un problème réel, bien identifié. La volonté du Gouvernement, au travers du dispositif proposé, n’est pas de déstabiliser le commerce associé, pas plus que l’ensemble des modes de la coopération.

Le dialogue est en cours. Mon cabinet et moi-même avons reçu à plusieurs reprises la FCA. La négociation continue sur ce point. Quel que soit le vote du Sénat, je m’engage à ce que vos préoccupations soient prises en compte. Le dispositif adopté in fine sera corrigé en ce sens, afin de préserver l’essence du modèle coopératif.

Mme la présidente. Monsieur Vaugrenard, le sous-amendement n° 1700 est-il maintenu ?

M. Yannick Vaugrenard. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1700.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du président de la commission spéciale.

Je rappelle que la commission spéciale s’en est remise à la sagesse du Sénat et que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 131 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 324
Pour l’adoption 128
Contre 196

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Nicole Bricq. C’est dommage !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1646.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.

Je rappelle que l'avis de la commission spéciale est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 132 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 324
Pour l’adoption 0
Contre 324

Le Sénat n'a pas adopté. (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Roger Karoutchi. Quel succès, monsieur le ministre !

M. Dominique de Legge. La solitude du pouvoir !

Mme la présidente. En conséquence, l'article 10 A demeure supprimé.

Article 10 A (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques
Articles additionnels après l'article 10 B

Article 10 B

(Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 192 rectifié bis, présenté par MM. Raison, César, Morisset, de Nicolaÿ, Vasselle et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Kennel, Delattre, Lefèvre, Nougein, Pointereau, Milon, Vaspart, B. Fournier, Grosperrin, Calvet, Béchu, Trillard, Joyandet et Revet, Mme Bouchart et MM. Chaize, Laménie, Perrin et Gremillet, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L’article L. 441-7 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, au 2°, au 3° et à la première phrase du neuvième alinéa, les mots : « ou le prestataire de services » sont remplacés par les mots : « de commerce de détail » ;

b) Au huitième alinéa, les mots : « ou prestataire de services » sont remplacés par les mots : « de commerce de détail » ;

2° Après le I, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Au sens du I, la notion de distributeur de commerce de détail s’entend du distributeur effectuant pour plus de la moitié de son chiffre d’affaires de la vente de marchandises à des consommateurs pour un usage domestique, ou de la centrale d’achat ou de référencement d’entreprises de ce distributeur. »

La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Cet amendement vise à rétablir l'article 10 B, qui modifie l’article L. 441-7 du code de commerce introduit par la loi de modernisation de l’économie de 2008. Il s’agit d’exclure les entreprises de l’approvisionnement professionnel du champ de cet article du code précité et d’indiquer que cette disposition ne s’applique qu’aux relations entre la grande distribution et ses fournisseurs.

En outre est précisée la notion de grande distribution en référence à la définition proposée par l’Autorité de la concurrence du commerce de détail dans ses lignes directrices relatives au contrôle des concentrations.

Mme la présidente. L'amendement n° 848 rectifié, présenté par MM. Bizet et G. Bailly, Mme Bouchart, M. Calvet, Mme Cayeux, MM. César, Commeinhes, de Nicolaÿ et Delattre, Mme Deromedi, MM. Doligé, Houel, L. Hervé, Laménie, Lefèvre, Longuet et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon, Morisset, Perrin et Pierre, Mme Primas et MM. Raison, Trillard et Vogel, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° L II de l’article L. 441-7 est abrogé ;

2° Après l’article L. 441-7, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art.  L. 441-7-1. – I. – L’article L. 441-7 n’est pas applicable entre un fournisseur et un grossiste.

« Une convention écrite conclue entre le fournisseur et le grossiste indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation commerciale. Établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre annuel et des contrats d’application, elle fixe :

« 1° Les conditions de l’opération de vente des produits ou des prestations de services telles qu’elles résultent de la négociation commerciale dans le respect de l’article L. 441-6 ;

« 2° Les conditions dans lesquelles le grossiste s’oblige à rendre au fournisseur, en vue de la revente de ses produits aux professionnels, tout service propre à favoriser leur commercialisation ne relevant pas des obligations d’achat et de vente, en précisant l’objet, la date prévue, les modalités d’exécution, la rémunération des obligations ainsi que les produits ou services auxquels elles se rapportent ;

« 3° Les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le grossiste, en précisant pour chacune l’objet, la date prévue et les modalités d’exécution, ainsi que la rémunération ou la réduction de prix globale afférente à ces obligations.

« Les obligations relevant des 1° et 3° concourent à la détermination du prix convenu.

« La convention unique ou le contrat-cadre annuel est conclu avant le 1er mars ou dans les deux mois suivant le point de départ de la période de commercialisation des produits ou des services soumis à un cycle de commercialisation particulier.

« « Le présent I n’est pas applicable aux produits mentionnés au premier alinéa de l’article L. 441-2-1.

« II. – Au sens du I, la notion de grossiste s’entend de toute personne physique ou morale qui, à titre professionnel, achète des produits à un ou plusieurs fournisseurs et les revend, à titre principal, à d’autres commerçants, grossistes ou détaillants, à des transformateurs, ou à tout autre professionnel qui s’approvisionne pour les besoins de son activité.

« Sont assimilées à des grossistes au sens du premier alinéa du présent II, les centrales d’achat ou de référencement de grossistes, à l’exception de celles agissant également pour le compte de détaillants.

« Art. L. 441-7-2. – Le fait de ne pas pouvoir justifier avoir conclu dans les délais prévus une convention satisfaisant aux exigences de l’article L. 441-7 ou du I de l’article L. 441-7-1 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. L’amende est prononcée dans les conditions prévues à l’article L. 465-2. Le maximum de l’amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »

La parole est à Mme Sophie Primas.

Mme Sophie Primas. Cet amendement vise à lever les graves difficultés que pose aux entreprises spécialisées dans l'approvisionnement professionnel le cadre légal en vigueur en matière de formalisation de la négociation commerciale.

Rappelons que la loi Hamon a renforcé une nouvelle fois les contraintes de formalisme pesant sur les relations commerciales. Les raisons de ce renforcement sont connues et portent sur le déséquilibre particulier qui caractérise la relation entre la grande distribution et ses fournisseurs. Ce déséquilibre, les entreprises fournisseurs, qui sont à 95 % des PME, ne le connaissent pas. Elles se voient pourtant imposer les mêmes contraintes du code de commerce.

Aujourd'hui, le cadre légal est devenu quasiment impraticable, car il est totalement inadapté à la réalité des affaires. En outre, il place ces PME dans une situation d'insécurité juridique caractérisée.

Pour les dizaines de milliers d'entreprises concernées, l'adoption de cet amendement constituerait une avancée considérable. Elle mettrait un terme au cercle vicieux qui, loi après loi, impose à l'ensemble de l'économie française des contraintes qui n'ont de raison d'être que dans le cas particulier de la relation entre fournisseurs et grande distribution.

Mme la présidente. L'amendement n° 1053, présenté par Mme Assassi, M. Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport portant, dans les départements et régions d’outre-mer, sur les modalités de création et de fonctionnement de centrales d’approvisionnement et de stockage régionales qui, par mutualisation des moyens, réduiraient les coûts et permettraient aux distributeurs de mieux faire jouer la concurrence entre fabricants et intermédiaires.

La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Il s’agit de favoriser la création de centrales d’approvisionnement régional, revendication que les outre-mer brandissent depuis longtemps, notamment à travers une mesure issue des états généraux de l’outre-mer, reprise dans les décisions du conseil interministériel de l’outre-mer... en 2009 !

Cette préconisation est aussi celle de l’Autorité de la concurrence. En 2009 toujours, cette instance a rendu un avis relatif aux mécanismes d’importation et de commercialisation des produits de grande consommation dans les outre-mer.

Dans ces derniers, les marchés sont étroits et, par le jeu de ce que l’on pourrait appeler « colbertisme », les outre-mer s’approvisionnent généralement sur les marchés français et européens. Or ceux-ci sont éloignés – jusqu’à 10 000 kilomètres pour ce qui concerne La Réunion –, ce qui entraîne obligatoirement un coût.

Pourtant, ce n’est pas la seule raison à la vie chère outre-mer. La question des marges est très significative.

L’Autorité de la concurrence a recommandé de travailler à l’amélioration des circuits logistiques entre la métropole et les territoires domiens. Cette amélioration est indispensable quand on sait que la segmentation de l’approvisionnement entre différents opérateurs et intermédiaires empêche la réalisation d’économies d’échelle et, qui plus est, permet l’accroissement des marges à chaque stade de la chaîne d’approvisionnement.

L’Autorité de la concurrence a demandé que l’État et les collectivités locales mettent en place des centrales d’approvisionnement et de stockage régionales. Celles-ci, grâce à la mutualisation des moyens, permettraient de réduire les coûts. En outre, cela garantirait une vraie concurrence entre fabricants et intermédiaires.

Les différentes études ont montré les difficultés des outre-mer à s’insérer dans leur environnement économique et à intégrer les marchés régionaux. Bien évidemment, l’approvisionnement sur ces marchés aurait pour effet induit une baisse des coûts de transport, donc des prix de revient des produits eux-mêmes. Pour l’heure, un tel approvisionnement est restreint, du fait des contraintes imposées par les réglementations et normes européennes.

Le député martiniquais Serge Letchimy proposait, dans un rapport, de mettre en place des outils de certification pour le marquage, l’agrément des matériaux et autres produits hors CE d’origine régionale. Cela permettrait de créer des passerelles de reconnaissance d’homologation dans les différents bassins géographiques.

Quant à l’idée d’une plateforme d’achat, elle a été adoptée par la chambre de commerce et d’industrie de La Réunion qui a lancé la campagne : « Le bon produit au bon endroit ».

Les initiatives prises par les acteurs ultramarins dans ce sens doivent être encouragées. Il est bien évident que les chances de succès de telles opérations seraient confortées si les pouvoirs publics accompagnaient les démarches.

On pourrait aussi suggérer de mettre en place une mission d’étude réunissant l’État et les collectivités territoriales dans chaque région d’outre-mer, pour réfléchir à ce sujet. Le Gouvernement pourrait ainsi s’appuyer sur le résultat de ces missions pour la rédaction du rapport que tend à prévoir le présent amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. L’amendement n° 192 rectifié bis vise à rétablir l’article 10 B dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, ce qui conduirait à supprimer la convention unique pour tout un pan des relations commerciales, celles qui existent entre fournisseurs et grossistes.

Comme je l’ai déjà indiqué en commission spéciale, ce dispositif est trop simpliste, car il ne contraindrait plus les parties à respecter un formalisme juridique. Pour autant, j’en conviens, le cadre légal, du fait de sa rigidité, n’est pas en phase avec le monde des affaires. Les professionnels concernés ont donc travaillé sur un aménagement du formalisme des négociations commerciales pour les entreprises n’entrant pas dans le champ du commerce de détail et proposé un dispositif, que tend à introduire l’amendement n° 848 rectifié. C’est ce système qui a eu la préférence de la commission spéciale.

Par conséquent, la commission spéciale vous prie, monsieur Laménie, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 848 rectifié vise à inscrire dans le projet de loi, comme je viens de l’indiquer, une proposition résultant du travail de concertation effectué par les entreprises de l’approvisionnement professionnel.

Le cadre légal que tend à prévoir cet amendement pour les relations entre les fournisseurs et les grossistes déroge au régime de l’article L. 441-7 du code de commerce. Il maintient toutefois l’obligation de conclure une convention écrite et définit la notion de grossiste.

La commission spéciale a émis un avis favorable sur cet amendement, tout en considérant que le dispositif proposé pourra être enrichi au cours du travail parlementaire.

L’amendement n° 1053 tendant à prévoir la remise d’un rapport, la commission spéciale y est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. L’amendement n° 192 rectifié bis vise à rétablir l’article 10 B dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale. Il existe désormais un consensus, y compris d’ailleurs parmi les acteurs concernés, pour rejeter la solution proposée par les auteurs de cet amendement, lequel tend à supprimer tout formalisme dans les relations entre grossistes et fournisseurs. Une telle suppression ne me paraît pas souhaitable. Je vous prie donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Laménie. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

La rédaction que vous proposez, madame Primas, par le biais de l’amendement n° 848 rectifié, semble plus adaptée. Si elle était retenue, elle permettrait de tenir compte des spécificités des relations entre grossistes et fournisseurs et d’introduire en l’espèce plus de transparence et de sécurité juridique. Néanmoins, elle doit encore être améliorée. À cette fin, la discussion se poursuit entre les acteurs du secteur et les services de mon ministère sur certains points essentiellement techniques, en particulier le respect du prix convenu – le non-respect de cette obligation entraînant une sanction, cette question doit être réglée.

À ce stade, je vous prie donc, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer votre amendement.

Enfin, je m’en remets à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 1053.

Mme la présidente. Monsieur Laménie, l'amendement n° 192 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Marc Laménie. Non, je le retire, madame la présidente, compte tenu des avis de Mme la corapporteur et de M. le ministre.

Mme la présidente. L'amendement n° 192 rectifié bis est retiré.

Madame Primas, l'amendement n° 848 rectifié est-il maintenu ?

Mme Sophie Primas. J’ai bien compris la position de M. le ministre, mais la commission ayant émis un avis favorable, je maintiens cet amendement. La rédaction proposée pourra être améliorée dans la suite du travail parlementaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 848 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 10 B est rétabli dans cette rédaction, et l’amendement n° 1053 n’a plus d’objet.

Article 10 B (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques
Article 10 C (Texte non modifié par la commission)

Articles additionnels après l'article 10 B

Mme la présidente. L'amendement n° 849 rectifié, présenté par MM. Bizet et G. Bailly, Mme Bouchart, M. Calvet, Mme Cayeux, MM. César, Commeinhes, de Nicolaÿ, Delattre, Doligé et Houel, Mme Gruny, MM. Laménie, Lefèvre, Longuet et Mayet, Mme Mélot, MM. Milon, Morisset, Perrin et Pierre, Mme Primas et MM. Raison, Reichardt, Trillard, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 10 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du septième alinéa du I de l’article L. 441-6 du code de commerce, après les mots : « de vente », sont insérés les mots : « , opposables dès leur date d’entrée en vigueur définie par le fournisseur, ».

La parole est à Mme Sophie Primas.

Mme Sophie Primas. Conformément au principe de la liberté des prix et de la concurrence consacré par le droit français, tout producteur ou prestataire de services doit soumettre la vente de ses produits ou de ses prestations à des conditions générales de vente, applicables à tous ses clients sans distinction, c'est-à-dire à une même date.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi de modernisation de l’économie, le tarif fournisseur, socle de la négociation commerciale, n'est pas appliqué dans la majorité des cas. En effet, les fournisseurs sont confrontés à des demandes de conditions générales de vente dérogatoires, à des reports d'application du tarif annuel, voire à des refus de respecter le tarif de l'année sur la base duquel ont été négociés et conclus les accords commerciaux. Nous le savons tous dans cette enceinte, ces pratiques sont monnaie courante.

Force est de reconnaître que l'objectif de la LME – garantir une négociation commerciale équilibrée – est détourné depuis cinq ans. Les abus en résultant créent de véritables distorsions de concurrence entre les enseignes de la distribution dès lors que le point de départ de la négociation n'est plus identique. Rappelons que la tractation doit porter sur le prix convenu après transaction commerciale, et non sur le tarif de départ.

Il est donc nécessaire de réaffirmer que la date d'entrée d'application du tarif n'est pas négociable et qu’elle s'applique de plein droit pour ouvrir les négociations commerciales.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Contrairement aux conditions particulières de vente qui varient d’un client à un autre, les conditions générales de vente constituent le socle de la négociation commerciale, aux termes de l’article L. 441-6 du code de commerce. Ces dernières conditions, qui, je le rappelle, sont un acte juridique unilatéral émanant du seul fournisseur, doivent par conséquent être identiques pour tous les clients. Si tel n’est pas le cas, le fournisseur engage sa responsabilité et est passible de sanctions.

Dans la pratique, les négociations commerciales entre l’industrie et la grande distribution sont, de l’avis de nombreux professionnels, de plus en plus difficiles : certains distributeurs refusent de négocier sur la base des conditions générales de vente et tentent d’imposer leur propre point de départ, en se référant, par exemple, aux tarifs de l’année précédente ou même à des prix inférieurs.

Je le dis avec force : on ne peut se satisfaire d’une telle situation et les pratiques abusives doivent être sévèrement sanctionnées, faute de quoi des pans entiers de nos industries de production risquent de péricliter.

Toutefois, le présent amendement va trop loin en sens inverse en faisant des conditions générales de vente non plus le socle de la négociation, mais des conditions unilatéralement opposables aux clients. En effet, inscrire dans le texte que ces conditions sont opposables dès leur date d’entrée en vigueur pourrait entraîner une confusion et apparaître comme une remise en cause de la négociabilité des prix.

Compte tenu de la liberté des prix instituée en 1986, il est difficilement envisageable que les conditions contractuelles ne puissent plus être négociées entre clients et fournisseurs. Cela reviendrait à renverser le déséquilibre des relations commerciales et non à rétablir l’équilibre.

La commission spéciale souhaite donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable