M. Claude Kern. L’article 38 ter A, introduit par l’Assemblée nationale, a été supprimé au Sénat par la commission, qui a considéré qu'il était redondant avec la transposition d'une directive devant intervenir d'ici à septembre 2015. Cette directive prévoit la prise en compte de critères environnementaux dans les marchés publics, relatifs notamment à l'origine et à la qualité des produits.
Toutefois, le dispositif de l’article répondait à la préoccupation de développer des produits biosourcés dans le cadre d’une croissance verte. En effet, en incitant les collectivités et les établissements publics à tenir compte de la performance environnementale des produits qui seront soumis à la commande publique, l’État permettrait le développement économique d’une filière innovante qui pourrait s’appuyer sur la force agricole et forestière française.
L’incitation qui serait donnée par la commande publique permettrait l’ouverture de nouveaux débouchés pour les produits agricoles et la création de nouveaux emplois. De plus, le développement de produits à plus fort bénéfice environnemental permettrait de prévenir d’éventuelles incidences environnementales et sanitaires.
Le présent amendement vise donc à rétablir cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. J’ai une bonne nouvelle et une mauvaise pour les auteurs de ces amendements : la mauvaise nouvelle est que l’avis de la commission est défavorable ; la bonne est que les amendements sont déjà satisfaits.
Sur la forme, je rappelle que les mesures visant la performance environnementale de la commande publique n’ont pas vocation à figurer dans le titre du code de l’environnement consacré à l’air et à l’atmosphère.
Sur le fond, l’article tend à améliorer la prise en compte, par la commande publique, de la performance environnementale des produits, en particulier de leur caractère biosourcé. C’est selon nous une bonne chose, mais la directive du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux prévoit déjà la prise en compte de critères environnementaux dans les marchés publics, relatifs notamment à l’origine et à la qualité des produits.
L’article 42 de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises prévoit la transposition de cette directive d’ici à septembre 2015. Les auteurs des amendements ont donc déjà pleinement satisfaction.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. René Vandierendonck.
M. René Vandierendonck. La filière des produits biosourcés est très présente dans la région Nord-Pas-de-Calais, notamment grâce au pôle de compétitivité IAR – industrie et agro-ressources –, qui regroupe plusieurs entreprises.
Ce pôle de compétitivité a créé une base de données référençant, dans notre pays, plus de 230 produits biosourcés, fabriqués par plus de quatre-vingts entreprises. À titre de comparaison, aux États-Unis, cette base recense plus de 20 000 produits biosourcés, et il existe un programme d’achats publics préférentiels de produits de ce type : cela situe le retard de la France.
Il est donc nécessaire que les pouvoirs publics et le Parlement apportent un soutien fort au développement de cette filière.
Cédant à la perfide séduction qui caractérise l’intelligence de notre collègue Louis Nègre (Exclamations amusées.),…
M. Roger Karoutchi. Pas de flatterie !
M. René Vandierendonck. … j’ai d’abord cru que les amendements sont effectivement satisfaits par l’article 42 de la loi relative à la simplification de la vie des entreprises, qui prévoit la transposition de la directive du 26 février 2014 précitée, comme il nous l’a dit.
Cependant, il apparaît qu’ils vont en fait plus loin que cette directive, qui se contente d’évoquer, en annexe, des « exigences environnementales ».
Je pense donc que, à travers la commande publique, l’État et les collectivités ont un rôle important à jouer pour faire émerger de nouveaux marchés. Les enjeux économiques sont extrêmement importants, puisque l’on dénombre aujourd’hui dix-huit filières vertes ayant un potentiel de développement économique élevé.
S’il est fondamental de diminuer notre consommation d’énergie fossile, il est tout aussi fondamental de favoriser l’essor des pôles de compétitivité de régions en pleine reconversion.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.
M. Claude Kern. L’échéance de septembre 2015 est trop lointaine. Il faut voter ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Louis Nègre, rapporteur pour avis.
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Que l’on me permette de lire un extrait du texte de la directive :
« Les entités adjudicatrices [sont] autorisées à appliquer des critères d’attribution ou des conditions d’exécution de marché liés aux travaux, fournitures ou services à fournir en vertu du marché public sous tous leurs aspects et à n’importe quel stade de leur cycle de vie, depuis l’extraction des matières premières utilisées pour le produit jusqu’au stade de l’élimination de celui-ci, y compris les facteurs intervenant dans le processus spécifique de production, de fourniture ou de commercialisation et ses conditions, desdits travaux, fournitures ou services, ou dans un processus spécifique lié à un stade ultérieur de leur cycle de vie, même lorsque ces facteurs ne font pas partie de leur contenu matériel. »
Il s’agit là, clairement et nettement, de critères environnementaux. Encore une fois, mes chers collègues, sous réserve de la confirmation que la transposition de cette directive se fera in extenso, vos amendements sont entièrement satisfaits.
Mme la présidente. Monsieur Kern, l'amendement n° 69 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Claude Kern. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Monsieur Vandierendonck, l'amendement n° 615 rectifié est-il maintenu ?
M. René Vandierendonck. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 69 rectifié bis et 615 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 38 ter A est rétabli dans cette rédaction.
Article 38 ter
I. – L’ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 précitée est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi modifié :
a) Après le mot : « environnement », la fin du I est supprimée ;
b) Le 4° du II est abrogé ;
2° L’article 20 est complété par les mots : « et le premier jour du troisième mois à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à la transition énergétique pour la croissance verte sur le territoire des régions Alsace, Aquitaine, Auvergne, Bourgogne, Centre, Corse, Guadeloupe, Guyane, Haute-Normandie, Île-de-France, La Réunion, Languedoc-Roussillon, Limousin, Lorraine, Martinique, Mayotte, Pays de la Loire, Poitou-Charentes, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Rhône-Alpes ».
II. – L’ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 relative à l’expérimentation d’une autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de l’article L. 214-3 du code de l’environnement est ratifiée.
III. – La même ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 est ainsi modifiée :
1° L’article 1er est ainsi modifié :
a) Après le mot : « environnement », la fin du I est supprimée ;
b) Le troisième alinéa du II est supprimé ;
2° (nouveau) Après le 5° du II de l’article 2, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° Permis de construire au titre de l’article L. 421-1 du code de l’urbanisme, pour les projets d’installations de production d’électricité hydraulique soumis à l’autorisation prévue à l’article L. 214-3 du code de l’environnement ».
Mme la présidente. L'amendement n° 990, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Avant l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
IA. - L'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 précitée est ratifiée.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. L’article 38 ter est très important, parce qu’il généralise l’expérimentation du permis unique pour les installations éoliennes et de méthanisation. Comme vous le savez sans doute, les délais de réalisation des installations éoliennes ou de méthanisation sont très longs. Par exemple, il a fallu attendre quatre ou cinq ans la mise en œuvre du projet TIPER Méthanisation, dans le nord des Deux-Sèvres, que vous connaissez bien, monsieur Mouiller.
Dans les pays limitrophes, notamment l’Allemagne, les délais de réalisation sont parfois moitié moins longs. Je vous propose donc de créer le permis unique, qui recouvrira toutes les autorisations environnementales requises pour le lancement d’un projet, par exemple les autorisations prévues par la loi sur l’eau et les milieux aquatiques et celles relatives aux espèces protégées et à la déforestation, sans pour autant que l’on en rabatte sur l’exigence de protection de l’environnement. Cela permettra de raccourcir les délais.
Comme nous le disions hier, il vaut mieux arrêter tout de suite un projet qui sera de toute façon incompatible avec la fragilité des espaces plutôt que de laisser des entreprises s’engager, préparer des marchés, embaucher pour ensuite se voir refuser l’autorisation de construire. En revanche, il faut accélérer les projets qui réconcilient développement économique et protection de l’environnement.
L’article généralise aussi l’autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques. Cette autorisation unique s’appliquera notamment aux installations hydroélectriques autorisées. Un ajout de la commission prévoit d’adjoindre à cette autorisation unique le permis de construire, ce qui nécessiterait des travaux complémentaires. Le Gouvernement est favorable à cette proposition de la commission lorsque le permis de construire est délivré par l’État, puisque, je le rappelle, c’est l’État qui délivre toutes les autorisations que j’évoquais à l’instant.
L’amendement n° 990 vise à inscrire dans l’article 38 ter la ratification de l’ordonnance relative à l’expérimentation du permis unique. Un recours contre cette ordonnance a déjà été formé, c’est pourquoi il est absolument nécessaire de la ratifier afin que l’expérimentation puisse se poursuivre.
L’amendement n° 991 est un amendement rédactionnel visant à tirer les conséquences de l’adoption éventuelle du présent amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. L’avis est favorable : il s’agit de donner force législative à l’ordonnance en question, afin de sécuriser juridiquement les autorisations uniques déjà délivrées.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. La délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation approuve pleinement cet amendement de simplification administrative.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 697 rectifié, présenté par M. Husson, Mmes Deseyne, Garriaud-Maylam, Canayer et Deromedi, MM. Laménie et Houel et Mmes Deroche et Mélot, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-François Husson.
M. Jean-François Husson. Nous proposons de ne pas ratifier l’ordonnance du 12 juin 2014. Cela a été dit, des contentieux sont déjà en cours, et le décret d’application comporte des dispositions à la fois compliquées à mettre en œuvre et limitatives.
Je rappelle également que, contrairement à ce qui a été dit cette nuit, les collectivités territoriales n’émettant qu’un avis simple, cela permet au préfet d’autoriser l’implantation d’éoliennes sur le territoire d’une commune même en cas de délibération contraire de celle-ci. Je tenais à appeler l’attention de tous sur ce point.
Mme la présidente. L’amendement n° 991, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 11 et 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. L’amendement n° 697 rectifié tend à supprimer l’extension de l’autorisation unique pour les installations, ouvrages, travaux et activités soumis à la loi sur l’eau.
L’autorisation unique est vécue comme une simplification bienvenue par les entreprises. Je rappelle qu’il s’agit d’un système de guichet unique qui simplifie, à droit constant, le dépôt et la gestion du dossier de demandes pour l’entreprise, en matière d’implantation d’ouvrages de production électrique. J’ajoute que l’autorisation unique ne réduit pas la portée des actes qu’elle regroupe.
Dans l’ensemble, les premiers retours d’expérimentation sont positifs et de nombreuses régions souhaiteraient participer : cet article a précisément pour objet d’étendre l’expérimentation à l’ensemble du territoire. Si les problèmes évoqués par les auteurs de cet amendement sont identifiés et constatés, l’expérimentation ne sera pas généralisée dans quelques années.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 697 rectifié.
L’amendement n° 991 vise à supprimer une précision ajoutée par la commission du développement durable, sur l’initiative de Charles Revet. Il s’agissait d’inclure le permis de construire dans le périmètre de l’autorisation unique prévue pour les projets soumis à la loi sur l’eau, dans une optique de simplification des démarches.
Pour autant, si le Gouvernement prend l’engagement que cet apport de la commission sera bien repris et amélioré, d’un point de vue technique, au travers de l’ordonnance prévue à l’article 26 du projet de loi dit « Macron », la commission est prête à en accepter la suppression dans le texte du présent projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 697 rectifié ?
Mme Ségolène Royal, ministre. L’avis est défavorable, madame la présidente.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur pour avis, je prends l’engagement que vous sollicitez. Je l’ai dit au cours du débat, la rédaction des ordonnances sera soumise à la commission du développement durable et à la commission des affaires économiques. Il faut néanmoins affiner les choses, car il y a une différence entre les permis de construire délivrés par l’État, auxquels sont liées toutes les autorisations que j’ai évoquées il y a un instant, notamment celles qui sont prévues par la loi sur l’eau, et les permis de construire donnés par le maire, qui n’emportent pas ces autorisations.
M. Charles Revet. D’accord !
Mme Ségolène Royal, ministre. Il ne faudrait donc pas que les entreprises puissent penser qu’un permis de construire délivré par un maire les dispense automatiquement d’obtenir les autorisations prévues dans la loi sur l’eau.
Cela étant, nous intégrerons la simplification administrative prévue, y compris pour les permis de construire donnés par les maires, dans le projet d’ordonnance.
M. Charles Revet. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote sur l’amendement n° 697 rectifié.
M. Jean-François Husson. Je fais confiance à M. le rapporteur pour avis et retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 697 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 991.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 38 ter, modifié.
(L’article 38 ter est adopté.)
Articles additionnels après l’article 38 ter
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les amendements nos 369 rectifié, 671 rectifié et 764 sont identiques.
L’amendement n° 369 rectifié est présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.
L’amendement n° 671 rectifié est présenté par Mme Jouanno et M. Guerriau.
L’amendement n° 764 est présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 38 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code minier est ainsi modifié :
1° L’article L. 124-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’avis d’enquête publique réalisée lors de l’instruction d’une demande d’autorisation de recherches de gîtes géothermiques à basse température est adressé aux propriétaires des habitations dans le rayon de 50 mètres mentionné à l’article L. 153-2. » ;
2° À l’article L. 153-2, après le mot : « galeries », sont insérés les mots : « , à l’exception de ceux visant des gîtes géothermiques à basse température, ».
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 369 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement vise à simplifier les procédures pour faciliter le développement des réseaux de chaleur géothermique.
En effet, l’article L. 153-2 du code minier exige le consentement des propriétaires d’habitations dans un rayon de 50 mètres autour d’une opération de géothermie d’une profondeur supérieure à 100 mètres. Dans la pratique, cette exigence se traduit par une interdiction pure et simple des projets de géothermie basse température à moins de 50 mètres des zones résidentielles.
Initialement rédigée pour encadrer l’extraction de minerais, cette disposition semble aujourd’hui parfaitement superflue pour la géothermie basse température, car celle-ci ne cause aucune nuisance une fois les travaux d’installation terminés.
Or les réseaux de chaleur géothermique ont un fort potentiel, qu’il convient de valoriser et de développer. En milieu urbain, cette contrainte provoque souvent un blocage, qui finit par aboutir à un abandon des projets situés dans une zone résidentielle, car il suffit qu’une seule personne ne réponde pas pour que le projet ne puisse pas se réaliser.
Les procédures encadrant les demandes de permis minier, telles que la réalisation d’une étude d’impact et l’organisation d’une enquête publique au cours de laquelle les riverains sont invités à s’exprimer sur le projet, permettent déjà de prémunir ces derniers contre les différents risques et nuisances afférents au chantier.
Le présent amendement tend par conséquent à remplacer l’exigence du consentement des propriétaires riverains par l’invitation systématique de ces derniers à participer à l’enquête publique, au cours de laquelle leurs avis seront pris en compte.
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour présenter l’amendement n° 671 rectifié.
Mme Chantal Jouanno. Il vient d’être brillamment défendu par Jean-Claude Requier.
J’ajouterai qu’il est paradoxal que les exigences soient supérieures pour les opérations de géothermie profonde que pour les implantations d’éoliennes.
En outre, le verrou actuel entrave gravement les opérations alors que l’Île-de-France, notamment, est riche d’un énorme potentiel en matière de géothermie.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 764.
M. Ronan Dantec. Entre les éoliennes et la géothermie, il y a vraiment « deux poids deux mesures »…
Mme la présidente. L’amendement n° 344 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 38 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 153-2 du code minier est complété par les mots : « , hormis pour les opérations de géothermie basse et très basse d’énergie ».
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement tend à simplifier les procédures afin de faciliter et de démocratiser le développement de la géothermie basse et très basse énergie.
L’article L. 153-2 du code minier, qui vise d’abord la construction de puits de mine, dispose que « les puits, sondages de plus de 100 mètres et les galeries ne peuvent être ouverts dans un rayon de 50 mètres des habitations et des terrains compris dans les clôtures murées y attenantes, sans le consentement des propriétaires de ces habitations ».
Cette disposition est un frein au développement de la géothermie basse et très basse énergie, puisqu’elle induit une contrainte supplémentaire dans le choix du site d’implantation, déjà rendu complexe en raison du déploiement de ces technologies en milieu urbain.
L’autorisation de recherche minière et le permis d’exploitation pour la géothermie basse et très basse énergie sont accordés par arrêté préfectoral, selon les modalités définies par le décret n° 78-498 du 28 mars 1978, qui prévoit la réalisation d’une étude d’impact et d’une enquête publique. Par ailleurs, les travaux de recherche et d’exploitation pour ce type d’opérations relèvent du régime de l’autorisation en application du décret n° 2006-649 du 6 juin 2006.
Ces procédures permettent à la fois d’intégrer dans le projet de géothermie l’ensemble des contraintes environnementales et de se prémunir contre tout risque ou nuisance afférent au chantier pour les riverains, comme la chute d’un mât.
En outre, des référés préventifs avant travaux sont réalisés afin de dresser un état des lieux exhaustif des habitations voisines et de quantifier, en fin de travaux, tout dommage éventuel.
Cet amendement a donc pour objet d’exclure de ces procédures les opérations de géothermie basse et très basse énergie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Les amendements nos 369 rectifié, 671 rectifié et 764 tendent à lever une contrainte qui entrave la réalisation des projets de géothermie basse température en milieu urbain.
En effet, le code minier impose d’obtenir le consentement de l’ensemble des propriétaires dans un rayon de 50 mètres. Cette disposition a été initialement prise pour encadrer l’extraction de minerai. Elle n’est plus adaptée aujourd’hui.
Une fois les travaux d’installation terminés, la géothermie basse température n’entraîne guère de nuisances pour les riverains. Or, comme l’a indiqué Jean-Claude Requier, il suffit qu’une seule personne ne réponde pas pour qu’un projet soit bloqué.
La commission du développement durable, partisane des énergies renouvelables, a donc un émis un avis favorable à l’allégement de cette contrainte.
Toutefois, elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur cette question, dans la mesure où une réforme du code minier, annoncée depuis longtemps mais que l’on ne voit toujours pas venir, devrait entraîner une refonte globale des procédures.
Le dispositif des amendements nos 369 rectifié, 671 rectifié et 764 me paraît équilibré. Son adoption permettrait d’aller de l’avant en matière de géothermie.
La commission est donc favorable à ces amendements, ainsi qu’à l’amendement n° 344 rectifié bis.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. Dans un premier temps, le Gouvernement pensait renvoyer la discussion sur ces dispositifs à la réforme du code minier, mais, eu égard aux débats menés par le Sénat en commission, il émet un avis favorable sur ces amendements.
M. Marc Daunis. Très bien !
Mme Ségolène Royal, ministre. Il existe de vrais freins au développement de la géothermie, alors qu’il s’agit d’une énergie renouvelable au fort potentiel, notamment dans les outre-mer, où le sous-sol est souvent riche en roches volcaniques. L’exploitation pourrait se faire à prix très compétitifs, et serait moins perturbante pour l’environnement que l’implantation d’éoliennes sur des îles, par exemple.
À la lumière de vos débats, le Gouvernement émet un avis favorable sur ces différents amendements.
M. Marc Daunis. Bravo !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 369 rectifié, 671 rectifié et 764.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 38 ter, et l’amendement n° 344 rectifié bis n’a plus d’objet.
Article 38 quater (nouveau)
L’article L. 511-6 du code de l’énergie est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « une fois » sont supprimés ;
b) À la seconde phrase, après le mot : « porter » sont insérés les mots : « pour la première fois » ;
2° Au dernier alinéa, les mots : «, une fois, d’au plus 20 %, » sont supprimés et sont ajoutés les mots : « , dans la limite de 20 % de sa puissance initiale ». – (Adopté.)
Chapitre II
Régulation des réseaux et des marchés
Article 39
(Non modifié)
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 321-7 du code de l’énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les méthodes de calcul de ce coût prévisionnel sont soumises à l’approbation de la Commission de régulation de l’énergie par les gestionnaires du réseau public de transport et des réseaux publics de distribution. »
II. – Au 2° de l’article L. 342-5 du même code, les mots : « producteurs, les installations des consommateurs » sont remplacés par les mots : « utilisateurs de réseau ».
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, sur l'article.
M. Jean-Pierre Vial. Je souhaite en fait m’exprimer sur le chapitre II dans son ensemble.
Mme la ministre a raison de ne pas opposer le nucléaire aux énergies renouvelables et de parler de « changement de paradigme » : le développement de l’intermittence mettra l’harmonisation de la production et de la consommation au cœur du débat.
Avec l’appui du président de la commission des affaires économiques du Sénat, j’avais demandé que les industriels gros consommateurs d’électricité puissent être associés aux réflexions préparatoires à l’élaboration de ce texte. Cette requête, qui est restée lettre morte, avait deux motifs.
D’une part, les industriels avancent bien souvent beaucoup plus vite que la loi et les règlements, pour des raisons économiques et technologiques. Il est donc utile de bénéficier de leur éclairage.
D’autre part, les industriels électro-intensifs sont confrontés à la disparition, d’ici à 2017, des tarifs dont ils bénéficient aujourd’hui. Je le rappelle, leur activité représente 100 000 emplois directs et 400 000 emplois indirects.
Comment mettre une énergie à bas coût à la disposition des industriels ? Au risque de vous surprendre, madame la ministre, je dois dire que je ne crois pas au dispositif qui a été évoqué hier lors du débat sur l’hydraulique.
D’abord, même en mobilisant des sociétés d’économie mixte, voire des fonds d’État – l’idée est, certes, intéressante –, je ne vois pas comment l’objectif de fournir une énergie peu chère aux industriels pourrait être atteint.
Ensuite, il y a un problème de calendrier. Le dispositif sera mis en place dans le cadre du renouvellement des concessions. Or les tarifs applicables aux entreprises disparaîtront dans les dix à vingt-quatre mois à venir ; certains industriels – je peux en fournir la liste – en auront perdu le bénéfice d’ici à la fin de l’année.
Enfin, l’Europe n’autorisera pas la mise en œuvre d’un tel dispositif, qu’elle considère comme une aide directe.
Je reste attentif aux précisions que le Gouvernement pourra nous apporter sur ce point, mais, je le dis avec calme et inquiétude à la fois, je doute que le dispositif dont nous avons longuement débattu hier soir puisse profiter aux industriels électro-intensifs.
Concernant l’effacement, l’interruptibilité et le marché capacitaire, le Sénat a une attitude particulièrement ouverte. Ainsi, lors de l’examen du projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l’électricité, dit « NOME », il avait adopté le dispositif, alors que l’Assemblée nationale l’avait supprimé.
Nous avons peut-être la meilleure législation au monde dans ce domaine, une réglementation complémentaire – je pense aux mesures de la loi Brottes – et un outil parfait, Réseau de transport d’électricité, ou RTE : nous avons, en somme, une Rolls-Royce, mais elle a besoin de carburant pour fonctionner ! Or nous ne consacrons que 20 millions d’euros à l’interruptibilité – seulement trois entreprises en profitent ! – et 20 millions d’euros à l’effacement et au marché capacitaire, quand nos voisins Allemands, Italiens ou Espagnols mobilisent entre 300 millions et 700 millions d’euros par an. Il y a même un pays africain qui fait mieux que nous !
Le Gouvernement est-il prêt à prendre les mesures qui s’imposent ? Je ne vous adresse pas de reproches, madame la ministre, car les gouvernements successifs n’ont rien fait depuis l’adoption de la loi NOME. Mais maintenant qu’il n’y a plus d’argent dans les caisses, comment faire ?
Le problème est réel. À titre indicatif, il y va, pour les industriels électro-intensifs, d’un montant compris entre 300 millions et 500 millions d’euros. Je défendrai donc des amendements tendant à assurer la fourniture d’une énergie à bas coût à ces industriels, fortement mobilisés sur cette question. En particulier, je présenterai un dispositif relatif à la flexibilité, dont la mise en œuvre ne coûterait rien à l’État.