Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 27.
L'amendement n° 213 rectifié bis, présenté par Mme Gatel et MM. Kern, Bonnecarrère, Guerriau, de Montesquiou, Bockel, Médevielle, Luche, Canevet, Gabouty, Jarlier et D. Dubois, est ainsi libellé :
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er juin 2015, le Gouvernement remet au Parlement un rapport faisant état des possibilités de transfert à la région du pilotage de la politique de déploiement du haut débit sur le territoire dont les intercommunalités seraient les opérateurs.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Chapitre IV
Compétences partagées dans le domaine de la culture, du sport, du tourisme, de l’action extérieure et de la coopération internationale et guichets uniques
Article additionnel avant l’article 28
Mme la présidente. L'amendement n° 614, présenté par Mmes Blandin et Bouchoux, M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Avant l’article 28
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Sur chaque territoire, les droits culturels des citoyens sont garantis par l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture, par l’État et les collectivités territoriales.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Le chapitre IV dont nous entamons l’examen autorise au partage, de façon réitérée, des champs de compétences copilotés et cofinancés, dont la culture. Le présent amendement, dont la première signataire est Mme Blandin, répond à une double nécessité : rassurer en affirmant la place de l’État et qualifier en précisant la légitimité d’une action conjointe.
Affirmer la place de l’État, c’est montrer qu’il ne se désengage pas, mais qu’il reste présent dans le cadre d’un partage de compétence. Je rappelle que 70 % du budget global de la culture provient des collectivités territoriales ; la baisse de leurs ressources est inquiétante, car la culture doit rester une priorité.
Qualifier ce partage, c’est affirmer que la culture n’est pas un engagement « circonstanciel et aléatoire », selon les termes de Jean-Michel Lucas, ou une somme d’arrangements entre les acteurs les plus visibles et les aspirations de rayonnement des collectivités, dans l’esprit de ce que Vilar nommait « le mariage cruel » entre politiques et artistes.
Pour le qualifier, quoi de plus légitime que de préciser notre engagement collectif de respecter les principes de politique culturelle que la France a ratifiés au niveau international et déclinés dans les conventions de l’UNESCO sur la diversité culturelle.
Les principes fondamentaux que nous avons ratifiés doivent vivre sur nos territoires. Ce sont les droits culturels de chacun à être reconnu dans son égale dignité au travers de politiques inclusives, co-construites et attentives. Ces principes sont un guide pour faire humanité ensemble et utiliser au mieux l’argent public pour l’émancipation et l’épanouissement de chacun, où qu’il soit et d’où qu’il vienne.
Je terminerai en citant Zola : « Savoir où l’on veut aller, c’est très bien ; mais il faut encore montrer qu’on y va. »
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est une belle déclaration de principe, mais elle n’a aucune portée normative. L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. Pour ma part, je voterai cet amendement, parce qu'il s'inscrit dans la philosophie de la compétence partagée que porte le texte. Je regrette que l’aspect normatif soit toujours mis en avant quand on parle de culture,…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est à ça que servent les lois !
Mme Sylvie Robert. … il est aussi très important de rappeler certaines valeurs pour faire progresser notre réflexion collective.
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pour ça, il y a les discours !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Monsieur le rapporteur, je n’oublie pas la définition que Portalis donne de la loi, mais je dois faire connaître la position de Mme Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture.
Mme Morin-Desailly rappelle que la commission des lois a adopté deux amendements de la commission de la culture, enrichissant le texte dont nous débattons de deux dispositions précisant les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales exerceront la compétence partagée notamment en matière de culture.
La « CTAP culture » doit ainsi être le cadre privilégié de l’exercice concerté d’une responsabilité partagée en matière culturelle. Elle doit également veiller à la continuité des politiques publiques en matière de culture et à leur mise en œuvre équilibrée dans l’ensemble des territoires, afin que les territoires ruraux et périurbains ne soient ni négligés ni pénalisés. Avec la CTAP culture, les collectivités territoriales disposeront désormais d’un outil de dialogue qui leur permettra de concilier liberté d’administration et responsabilité collective dans la conduite des politiques culturelles, dans un contexte budgétaire sans précédent. Ces deux amendements sont donc déjà des outils au service de l’égal accès à la culture.
Mme Morin-Desailly comprend l’intention des auteurs de l’amendement n° 614 : remettre le public – ou plutôt « les publics » – au cœur des politiques publiques culturelles, qu’elles soient nationales ou locales, dans la diversité des territoires et desdits publics, notamment ceux dits « empêchés ». Il s’agit des personnes ayant un handicap physique ou mental, des personnes hospitalisées ou désocialisées aux ressources économiques faibles, des familles avec enfants qui ne peuvent pas financer leurs loisirs culturels et sportifs, ainsi que des jeunes et des adultes isolés. Ces publics doivent être au cœur des mesures prises par l’État et les collectivités en matière d’accès et de diffusion de la culture, véritable ciment de notre société qui participe de l’émancipation des individus.
Toutefois, Mme Morin-Desailly nous alerte sur le risque que la reconnaissance par la loi de ces droits culturels devienne un facteur d’aggravation de la situation des collectivités, notamment les plus petites. Ces dernières, déjà mises à mal par le contexte budgétaire, font le plus souvent le maximum pour que l’accès à la culture soit effectif et de qualité pour tous les publics.
Cela étant, Mme Morin-Desailly est favorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 614.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 28.
Article 28
Après le premier alinéa de l’article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les compétences en matière de culture, de sport, de tourisme, d’action extérieure et de coopération internationale sont partagées entre les communes, leurs groupements, les départements, les régions et les collectivités territoriales à statut particulier. »
La conférence territoriale de l’action publique définie à l’article L. 1111-9-1 comprend une commission de la culture, une commission du sport et une commission du tourisme.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, sur l'article.
Mme Sylvie Robert. Je ne reviendrai pas sur les événements qui ont bouleversé notre pays la semaine dernière. Le temps de l’analyse et des propositions est désormais venu – le chef de l’État et le Gouvernement s'y sont attelés. Je souhaiterais simplement dire, en tant que membre de la commission de la culture, que notre commission me semble avoir un rôle à jouer et un message à délivrer.
Si les événements qui se sont déroulés ont des causes multifactorielles, la culture et l’éducation sont au cœur de la réflexion. Ainsi que l’exprime Pierre Nora, elles agissent sur le « temps long ». Elles sont évidemment un rempart contre l’ignorance et le déterminisme social ; elles favorisent l’émancipation de l’individu et l’intégration de certaines valeurs telles que la liberté d’expression. Figure notamment parmi ces valeurs le droit de croire ou de ne pas croire. Surtout, la culture et l’éducation éveillent l’esprit critique, qui permet la mise à distance nécessaire pour comprendre la complexité du monde.
Il est essentiel de le marteler aujourd’hui : l’école est le premier lieu de sociabilisation et de connaissance, et la culture est le premier vecteur de tolérance et de sensibilité. Reste que nous ne pouvons pas, d’un côté, affirmer que la culture et l’éducation sont importantes – nous l’avons dit collectivement – et, de l’autre, assister à leur affaiblissement sans réagir. C’est pourquoi, tout comme Mme Morin-Desailly, je voudrais souligner que nous assistons aujourd'hui à une tendance inquiétante avec la diminution, voire la suppression de certaines subventions, ce qui fragilise malheureusement les projets artistiques et culturels.
S'il est opportun que la culture, au même titre que le sport, reste une compétence partagée, je pense vraiment que ce texte doit aller plus loin – je ferai tout à l'heure certaines propositions d’amendements à cet effet – et être l’occasion de garantir et même de pérenniser ses réseaux culturels sur l’ensemble des territoires. Il ne s’agit pas seulement de défendre l’exercice partagé de la compétence, il faut l’organiser dans un cadre et travailler à des politiques conjointes, cohérentes et surtout articulées afin que la culture ne disparaisse pas de territoires entiers, ce qui, malheureusement, est parfois le cas. Il convient donc de se saisir du cadre de la négociation entre tous les acteurs, les collectivités territoriales et l’État – ce sont les CTAP –, mais il faut également tendre à ce que l’action publique soit mieux organisée et articulée, donc plus complémentaire et cohérente sur les territoires.
Il y va de même pour le sport. Ce secteur nécessite l’intervention de l’ensemble des acteurs publics, qui participent à son développement et à sa structuration sur nos territoires.
Je présenterai donc un certain nombre d'amendements, tous animés par cet objectif d’améliorer l’esprit du texte et, surtout, de garantir, voire de sécuriser un accompagnement plus effectif des artistes et des projets culturels, tant sur le fond que sur la méthode, par les acteurs publics.
Mme la présidente. L'amendement n° 382, présenté par MM. Doligé, Cardoux, Magras, Milon, Laménie et Houel, Mme Deroche et MM. Calvet, Lefèvre, Houpert et Kennel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ce n’est pas une raison pour ralentir !
M. Éric Doligé. À ce rythme exceptionnel, nous devrions avoir terminé avant le dîner. Voilà quand même une bonne nouvelle !
Mme la présidente. Cela dépend de vous, mes chers collègues…
M. Éric Doligé. Je vais contribuer à accélérer le débat, madame la présidente, vous allez voir. Auparavant, j’aimerais dire que, si le chef de l’État et le Premier ministre ont fait des propositions à la suite des événements qu’a connus notre pays, comme l’a indiqué Mme Robert, l’opposition aussi.
J’en viens à l’amendement n° 382. En accord avec mon collègue Laménie, cosignataire de cet amendement, je le retire pour ne pas allonger les débats. Je pense qu’un travail partagé est préférable.
Mme la présidente. L'amendement n° 382 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 62 rectifié est présenté par MM. Kern et Lasserre, Mme Goy-Chavent, MM. Longeot et Médevielle, Mme Loisier, MM. Bockel et Luche, Mmes Gatel et Férat, MM. Jarlier et Guerriau, Mme Joissains et MM. Gabouty, Canevet et Lemoyne.
L'amendement n° 400 est présenté par Mmes Blondin, S. Robert et Espagnac, M. F. Marc, Mme Monier, M. Botrel, Mme Herviaux, MM. Tourenne et Bérit-Débat, Mme Schillinger, M. Courteau, Mme Jourda, M. Labazée, Mmes Cartron, D. Michel et Ghali et MM. Carrère et Manable.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Après le mot :
de culture,
insérer les mots :
de langues régionales,
La parole est à M. Claude Kern, pour présenter l’amendement n° 62 rectifié.
M. Claude Kern. Le présent amendement vise à inclure les langues régionales parmi les compétences partagées entre les différents échelons territoriaux, à l’instar de la culture, du sport ou encore du tourisme. En effet, cette compétence est aujourd'hui assumée par une multiplicité d’acteurs locaux, avec des financements importants de la part des différents échelons, dans la mesure où les langues régionales participent directement au dynamisme des territoires.
Nous sommes nombreux ici à mesurer combien les langues régionales sont devenues un facteur de développement culturel, économique et de préservation de la diversité. Pour poursuivre dans cette voie et affirmer l’identité culturelle de nos régions, il est impératif de laisser la possibilité à tous les acteurs locaux d’intervenir dans ce domaine, en lien avec l’État.
À titre d’illustration, l’Office public de la langue bretonne, qui est un établissement public de coopération culturelle à caractère administratif, a permis, au travers de la mise en œuvre d’une politique linguistique en faveur du breton, une structuration des démarches visant à sauver, enrichir et promouvoir la langue bretonne sur son territoire.
À cet égard, je tiens à noter que l’engagement n° 56 du candidat socialiste à l’élection présidentielle était la ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Dans l’attente de cette ratification, l’adoption du présent amendement donnerait un cadre normatif et un outil au service des collectivités territoriales pour pérenniser l’existence de ces langues.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour présenter l’amendement n° 400.
Mme Sylvie Robert. Beaucoup de collectivités se sont emparées de cette question. Dans ma région, la Bretagne, se trouve ainsi un Office public de la langue bretonne. Cet établissement public de coopération culturelle à caractère administratif contribue à la richesse linguistique et culturelle de notre pays.
Dans le cadre du pacte d’avenir, une convention spécifique, actuellement en cours d’élaboration, sera bientôt signée entre l’État et la région Bretagne. À cet égard, il est très important que les autres niveaux de collectivités territoriales y participent puisque celles-ci interviennent en termes de politique publique sur ce secteur, ce qui n’est ni politiquement ni financièrement négligeable.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Le français fait-il encore partie du patrimoine culturel et de la culture ? On peut s’interroger…
M. Philippe Dallier. C’est une bonne question !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission des lois estime que la culture comporte bien entendu la dimension linguistique.
Ma chère collègue, le fait qu’une compétence soit partagée ne signifie pas que toute collectivité est obligée de participer. Nous avons essayé de clarifier les compétences, mais nous nous sommes aperçus que c'était impossible dans certains domaines en raison des initiatives prises au niveau de la commune, des intercommunalités, des départements, de la région et même de l’État. N’oublions pas que l’État a une clause de compétence générale, même s’il demande en quelque sorte à d’autres de s’occuper de ce qu’il ne peut plus faire…
Si l’on devait préciser les domaines de la culture, je pourrais trouver encore beaucoup d’autres sujets que les langues régionales. Songez à la musique ! La musique bretonne est très importante et elle connaît un développement considérable.
La commission pense, comme Portalis, que la loi doit être générale. Cela étant, je ne le citerai plus, car je ne veux pas être taxé de pédantisme législatif.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. Les langues régionales, notamment en Bretagne, font partie intégrante de la compétence culturelle que le Gouvernement tient à maintenir parmi les compétences partagées entre les différents niveaux de collectivités territoriales.
Les dispositions prévues par votre amendement, madame Robert, n’apportent rien de plus juridiquement, mais, vous avez raison, nous sommes là pour énoncer des valeurs, des principes et des convictions. C’est ce que vous avez fait en défendant l’amendement n° 400.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Le groupe écologiste soutiendra les amendements identiques défendus par M. Kern et Mme Robert.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 62 rectifié et 400.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° 94 rectifié est présenté par MM. Revet, César, G. Bailly, Pierre, Portelli et Mayet.
L'amendement n° 624 est présenté par MM. Darnaud et Genest.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Après les mots :
de sport
insérer les mots :
, d’infrastructures numériques
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 615, présenté par Mmes Blandin et Bouchoux, M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après les mots :
de sport,
insérer les mots :
de vie associative,
II. – Alinéa 3
Après les mots :
du sport,
insérer les mots :
une commission de la vie associative
III. – En conséquence, intitulé du chapitre IV
Après les mots :
du sport,
insérer les mots :
de la vie associative,
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Les associations sont fortement concernées par les évolutions qui résulteront de l’adoption de ce projet de loi.
Sur l’ensemble du territoire et à tous les échelons, les associations apportent des réponses aux besoins de la population, que ce soit en matière d’éducation populaire, de défense des droits ou d’insertion professionnelle. Elles sont l’expression de la démocratie au service de l’intérêt général. Or la suppression de la clause de compétence générale est susceptible d’avoir un impact sur les budgets de certaines associations. Certes, de nombreuses associations sportives ou culturelles pourront toujours bénéficier de l’intervention des communes ou de leurs groupements, des régions ou des départements du fait de l’existence d’une compétence partagée dans ces domaines. En revanche, celles qui n’ont pas ce type d’objet ne pourront vraisemblablement plus bénéficier de financements croisés.
Cet amendement, dont Mme Blandin est la première signataire, tend donc à faire de la vie associative une compétence partagée entre les différents niveaux de collectivités territoriales, afin de permettre le financement des associations par le niveau territorial correspondant à leurs actions.
La commission des lois n’a pas retenu cette proposition, en indiquant qu’il ne s’agit pas d’une « compétence » en tant que telle. Ayant voulu m’affranchir de mes ignorances concernant la définition de ce mot, j’ai découvert une dense littérature juridique. Je vous rappelle, mes chers collègues, que cet amendement du groupe écologiste a été déposé par Mme Blandin et que je me contente de restituer l’argumentaire de ma collègue.
La notion de compétence est à rapprocher de celle de responsabilité, ces deux notions pouvant se superposer. Par exemple, une collectivité bénéficiant d’une compétence est chargée de conduire une action relevant de cette compétence, mais peut voir sa responsabilité engagée au sens contentieux – je pense par exemple à un bâtiment dangereux –, tout comme au sens politique, puisque les citoyens peuvent penser : « c’est son devoir, mais elle ne joue pas son rôle. »
Le professeur Jean-Marie Pontier, qui a beaucoup écrit sur la décentralisation et les collectivités locales, explique que « la notion de compétences est relativisée par le recours à la notion de responsabilité », même si ces deux notions ne se situent pas sur le même plan.
Les compétences peuvent définir une habilitation à agir, une capacité à agir, à prendre des décisions dans le domaine concerné. Elles concerneraient ici les aides à la structuration de la vie associative et de ses réseaux, la contribution des associations au développement social et économique des territoires et le soutien plus global de l’action associative dans ses projets et son fonctionnement, par exemple sur des thèmes d’actualité comme la citoyenneté ou la laïcité, qui méritent bien nos efforts conjoints.
J’ajoute que le rapport de la commission d’enquête chargée d’étudier les difficultés du monde associatif préconisait la création de cette compétence partagée pour les raisons que je viens d’évoquer.
Enfin, la charte d’engagements réciproques entre l’État, le mouvement associatif et les collectivités territoriales, signée en février 2014, donne toute sa place, à la différence de la précédente charte signée en 2001, aux collectivités territoriales. Cette charte ayant ouvert un véritable espace, il nous faut continuer à soutenir cette dynamique collective.
Mme la présidente. L'amendement n° 926, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
de sport
insérer les mots :
, de vie associative
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Cet amendement de repli va dans le même sens que celui qui vient d’être présenté.
Vous le savez, nous sommes opposés à la suppression de la clause de compétence générale. Celle-ci, supprimée par l’ancien gouvernement, à peine rétablie depuis un an, est déjà remise en cause.
Certes, cet article limite les dégâts en maintenant des secteurs particulièrement fragiles au sein des compétences partagées entre les collectivités territoriales, à savoir la culture, le sport et le tourisme. Pour autant, certains secteurs non mentionnés mériteraient également de s’y trouver. Tel est bien le risque d’une entreprise consistant à supprimer le principe de compétences partagées pour le réduire à une exception limitée aux seuls cas énumérés par la loi. Il convient dès lors d’être exhaustif, sous peine de détruire l’action des collectivités dans certains secteurs.
Par cet amendement, nous souhaitons inscrire, au sein de l’article 28, la mention de la vie associative en tant que compétence partagée entre les collectivités. Nous pensons en effet que chaque niveau de collectivité territoriale doit pouvoir intervenir dans ce domaine, car les départements sont aujourd'hui les premiers financeurs du mouvement associatif. En ne maintenant pas cette compétence à chaque niveau, le risque est grand que des pans entiers de ce mouvement, notamment dans le secteur social, disparaissent ou soient mis en difficulté, faute de moyens.
Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 29 rectifié est présenté par MM. Buffet, Courtois, Frassa, Grosdidier et Darnaud.
L'amendement n° 289 est présenté par M. Collombat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 615 et 926 ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur Desessard, j’ai du mal à comprendre votre conception de la conférence territoriale de l’action publique. Vous proposez de créer en son sein une commission de la vie associative. Or la CTAP, c’est une instance de coordination, dans le respect des compétences de chaque échelon de collectivité. On a accepté, parce que c’est une compétence partagée, qu’il y ait une CTAP culture, mais nous n’avons pas décidé la création d’une commission spéciale des affaires sociales. Pourtant, dans ce domaine, les compétences sont partagées entre la commune ou l’intercommunalité, par le biais des centres communaux d’action sociale, et le département.
Ne chargeons pas la barque ! Il faudra d’ailleurs que je relise de manière approfondie vos propos concernant les compétences et les responsabilités. Veuillez m’excuser, mais il s’agit de tout à fait autre chose !
Quand on parle de vie associative, on parle de sport ou de culture, qui sont des compétences partagées, tout comme le tourisme. Si on accepte votre machinerie, les CTAP ne se réuniront plus. Or elles doivent constituer un outil efficace entre le département et la région.
Les conférences territoriales de l’action publique, je vous le rappelle, ont été créées par la loi de 2014, avec beaucoup de difficultés au Sénat, il faut bien le reconnaître. Cependant, à partir du moment où elles existent, il faut leur laisser leur compétence et ne pas les transformer en forum d’associations. Il ne peut pas y avoir une commission de la vie associative au sein de la CTAP ! Il peut y avoir une réflexion sur la culture et le sport, et on aidera peut-être une association dans le cadre d’un orchestre régional ou départemental.
Je vous demande donc, mon cher collègue, de retirer l’amendement n° 615, qui ne correspond pas du tout à la position de la commission. À défaut, celle-ci se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.
Par l’amendement n° 926, monsieur Favier, vous souhaitez non pas créer une commission au sein de la CTAP, mais faire de la vie associative une compétence partagée. Or la vie associative est une modalité d’exercice d’une compétence et non pas une compétence.
La compétence des collectivités, c’est, par exemple, le sport ou la culture. Pour ce qui concerne les associations citoyennes, on sait très bien comment cela se passe : chaque collectivité aide à son niveau. Les départements et les communes ont toujours soutenu les associations – je pense, par exemple, aux associations d’anciens combattants. Tout cela n’est absolument pas interdit par les nouvelles dispositions visant à supprimer la clause de compétence générale.
D’ailleurs, l’existence de cette clause n’avait pas permis de résoudre une difficulté – je le rappelle à ceux qui sont là depuis quelques années – en matière de coopération internationale. En effet, il a fallu adopter une loi spécifique pour autoriser les communes et les départements à soutenir des opérations associatives de coopération internationale. Auparavant, certains tribunaux administratifs avaient interdit de tels soutiens, sous prétexte que ces opérations n’étaient pas d’intérêt départemental ou communal. Notre ancien collègue Michel Thiollière avait donc dû déposer une proposition loi relative au renforcement de la coopération décentralisée en matière de solidarité internationale.
La commission est donc défavorable à l’amendement n° 926.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?