M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour explication de vote.
M. Philippe Kaltenbach. Le groupe socialiste a toujours défendu l’idée que le droit d’option devait être le plus souple possible. En première lecture, nous avions même soutenu qu’une majorité simple pourrait suffire.
Le débat m’a amené à me rallier au principe d’une majorité qualifiée de 60 %. Je continue à penser que la région de départ doit disposer d’un droit de veto, sans qu’un vote en faveur de l’exercice du droit d’option soit nécessaire. Selon moi, une telle solution irait dans le sens d’une plus grande souplesse. Le Gouvernement semble fermer la porte, mais je crois que nous aurions intérêt à en rester à la position arrêtée par la commission, afin d’être plus forts devant l’Assemblée nationale. Nous pouvons espérer aboutir à un compromis, mais encore faut-il rester raisonnables.
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.
M. Yannick Botrel. J’ai écouté avec beaucoup d’attention les arguments de mes collègues, même si, comme en attestent les propos que j’ai tenus tout à l’heure lors de la discussion générale, je n’avais pas besoin d’être convaincu.
Un certain nombre d’entre nous ont exprimé leur insatisfaction à l’égard du redécoupage des régions proposé par le Gouvernement. Je n’y reviendrai pas, sauf pour souligner que nous sommes globalement d’accord. Néanmoins, quelques points, peu nombreux, font débat. Ronan Dantec a raison de dire qu’il faut s’extraire du débat breton, ancien et passionné, et aborder la problématique dans sa globalité, à l’échelle du territoire national.
Pour ma part, je suis profondément convaincu que le droit d’option, tel qu’il est conçu, ne sera pas opérationnel, hélas ! En effet, on trouvera toujours une majorité pour voter contre l’exercice du droit d’option.
Telles sont les raisons qui me conduisent à soutenir ces amendements. Je fais confiance à la sagesse des territoires, à la démocratie territoriale. Laissons la possibilité à ceux qui le souhaitent de s’emparer de cette faculté, qui d’ailleurs ne prospérera peut-être pas.
En conclusion, ma position ne sera donc pas celle qu’a exprimée mon collègue et ami Philippe Kaltenbach au nom du groupe socialiste : à titre personnel, je voterai ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Finalement, M. le secrétaire d’État nous avoue que le droit d’option ne concerne qu’un département limitrophe de la Bretagne… (M. le secrétaire d’État fait un signe de dénégation.)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission spéciale. Pas du tout !
M. Jacques Mézard. La réalité est tout autre ! Nous comprenons que vous rencontrez des difficultés avec d’éminents élus d’une partie du nord-ouest de la France, mais, quant à moi, je vous dis que le droit d’option concerne tout le territoire national. Certains départements vont se retrouver complètement exilés aux confins des très grandes régions nouvellement créées : je pense au Gard ou à la Lozère par rapport à Toulouse, au Cantal par rapport à Lyon. Il est naturel que ces départements, désormais coupés de leur bassin de vie naturel, se posent la question de l’exercice du droit d’option.
Or exiger une majorité des trois cinquièmes, cela revient à tout bloquer, même si certaines régions ont peut-être envie de se débarrasser des pauvres… Pour cette raison, il sera aussi plus difficile que vous ne le pensez de trouver des territoires d’accueil.
En tout cas, il n’est pas normal de s’opposer à un exercice démocratique, au travers d’un texte dont l’élaboration n’a rien de démocratique. On ne citera aucun nom, mais on sait bien qui bloque l’exercice du droit d’option. Ce ne sont pas des méthodes pour élaborer un texte de la République.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État. Monsieur Mézard, ce que j’ai dit vaut évidemment pour tous les territoires et les départements de la République. Chacun pense à la Loire-Atlantique, certes, mais on peut également évoquer le Gard, le Cantal, la Lozère,…
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission spéciale. Et l’Oise !
M. André Vallini, secrétaire d'État. … d’autres départements encore, qui ne sont toutefois pas si nombreux, puisqu’ils se comptent aisément sur les doigts des deux mains.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral. Nous avons tous défendu la possibilité, pour les départements, d’exercer le droit d’option. En deuxième lecture, nous nous étions mis d’accord pour que ce droit puisse jouer à la condition que l’organe délibérant de la région d’origine ne s’y oppose pas à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés : ce n’est pas du tout la même chose que devoir recueillir une approbation à la majorité des trois cinquièmes !
Le Sénat avait adopté cette position dans la perspective d’un rapprochement éventuel avec l’Assemblée nationale, qui n’a pas eu lieu. Pour ma part, je demande que nous en restions à la solution retenue par le Sénat en deuxième lecture. Si nous changeons une nouvelle fois de point de vue, nos interlocuteurs considéreront que le Sénat n’a pas une position ferme sur le sujet. Il y va de la cohérence de notre propos !
Mme Catherine Troendlé. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Article 3 bis
(Suppression maintenue)
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Chapitre II
Dispositions relatives aux élections régionales
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Article 6
Le tableau n° 7 annexé au code électoral est remplacé par un tableau ainsi rédigé :
«
Région |
Effectif du conseil régional |
Département |
Nombre de candidats par section départementale |
|
Alsace |
47 |
Bas-Rhin |
29 |
|
Haut-Rhin |
22 |
|||
Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes |
165 |
Charente |
12 |
|
Charente-Maritime |
20 |
|||
Corrèze |
9 |
|||
Creuse |
6 |
|||
Dordogne |
14 |
|||
Gironde |
43 |
|||
Landes |
13 |
|||
Lot-et-Garonne |
11 |
|||
Pyrénées-Atlantiques |
21 |
|||
Deux-Sèvres |
13 |
|||
Vienne |
14 |
|||
Haute-Vienne |
13 |
|||
Auvergne et Rhône-Alpes |
184 |
Ain |
17 |
|
Allier |
10 |
|||
Ardèche |
10 |
|||
Cantal |
6 |
|||
Drôme |
14 |
|||
Isère |
31 |
|||
Loire |
20 |
|||
Haute-Loire |
8 |
|||
Métropole de Lyon |
33 |
|||
Puy-de-Dôme |
17 |
|||
Rhône |
12 |
|||
Savoie |
12 |
|||
Haute-Savoie |
20 |
|||
Bourgogne et Franche-Comté |
100 |
Côte-d’Or |
21 |
|
Doubs |
21 |
|||
Jura |
11 |
|||
Nièvre |
10 |
|||
Haute-Saône |
10 |
|||
Saône-et-Loire |
22 |
|||
Yonne |
14 |
|||
Territoire de Belfort |
7 |
|||
Bretagne |
83 |
Côtes-d’Armor |
17 |
|
Finistère |
25 |
|||
Ille-et-Vilaine |
28 |
|||
Morbihan |
21 |
|||
Centre |
77 |
Cher |
11 |
|
Eure-et-Loir |
15 |
|||
Indre |
9 |
|||
Indre-et-Loire |
20 |
|||
Loir-et-Cher |
12 |
|||
Loiret |
22 |
|||
Champagne-Ardenne et Lorraine |
122 |
Ardennes |
11 |
|
Aube |
12 |
|||
Marne |
21 |
|||
Haute-Marne |
8 |
|||
Meurthe-et-Moselle |
26 |
|||
Meuse |
9 |
|||
Moselle |
36 |
|||
Vosges |
15 |
|||
Guadeloupe |
41 |
Guadeloupe |
43 |
|
Île-de-France |
209 |
Paris |
42 |
|
Seine-et-Marne |
25 |
|||
Yvelines |
27 |
|||
Essonne |
24 |
|||
Hauts-de-Seine |
30 |
|||
Seine-Saint-Denis |
29 |
|||
Val-de-Marne |
25 |
|||
Val-d’Oise |
23 |
|||
Languedoc-Roussillon |
67 |
Aude |
12 |
|
Gard |
20 |
|||
Hérault |
26 |
|||
Lozère |
5 |
|||
Pyrénées-Orientales |
14 |
|||
Midi-Pyrénées |
91 |
Ariège |
8 |
|
Aveyron |
12 |
|||
Haute-Garonne |
34 |
|||
Gers |
9 |
|||
Lot |
8 |
|||
Hautes-Pyrénées |
11 |
|||
Tarn |
15 |
|||
Tarn-et-Garonne |
10 |
|||
Nord-Pas-de-Calais et Picardie |
153 |
Aisne |
16 |
|
Nord |
68 |
|||
Oise |
23 |
|||
Pas-de-Calais |
39 |
|||
Somme |
17 |
|||
Basse-Normandie et Haute-Normandie |
102 |
Calvados |
23 |
|
Eure |
20 |
|||
Manche |
17 |
|||
Orne |
11 |
|||
Seine-Maritime |
41 |
|||
Pays de la Loire |
93 |
Loire-Atlantique |
35 |
|
Maine-et-Loire |
22 |
|||
Mayenne |
10 |
|||
Sarthe |
17 |
|||
Vendée |
19 |
|||
Provence-Alpes-Côte d’Azur |
123 |
Alpes-de-Haute-Provence |
6 |
|
Hautes-Alpes |
6 |
|||
Alpes-Maritimes |
29 |
|||
Bouches-du-Rhône |
51 |
|||
Var |
27 |
|||
Vaucluse |
16 |
|||
La Réunion |
45 |
La Réunion |
47 |
» |
M. le président. Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 6 bis
(Suppression maintenue)
Article 7
(Non modifié)
Le code électoral est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° L’article L. 338-1 est ainsi modifié :
a) Après le deuxième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Si, après la répartition des sièges prévue au premier alinéa, un département dont la population est inférieure à 100 000 habitants ne compte pas au moins deux conseillers régionaux, un ou plusieurs sièges attribués à la liste arrivée en tête au niveau régional sont réattribués à la ou aux sections départementales de cette liste afin que chaque département dispose de deux sièges au moins.
« Si, après la répartition des sièges prévue au premier alinéa, un département dont la population est égale ou supérieure à 100 000 habitants ne compte pas au moins quatre conseillers régionaux, un ou plusieurs sièges attribués à la liste arrivée en tête au niveau régional sont réattribués à la ou aux sections départementales de cette liste afin que chaque département dispose de quatre sièges au moins.
« Le ou les sièges ainsi réattribués correspondent au dernier siège ou aux derniers sièges attribués à la liste arrivée en tête au niveau régional et répartis entre les sections départementales en application du premier alinéa, sous réserve du cas où les départements prélevés seraient attributaires d’un seul ou de deux sièges si le département compte une population de moins de 100 000 habitants, ou de moins de cinq sièges si le département compte au moins 100 000 habitants. » ;
b) Après les mots : « selon les », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « règles prévues aux deux premiers alinéas. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 5, présenté par M. Mézard, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - L’article L. 338 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque section départementale compte au moins cinq conseillers régionaux. »
II. - Après le deuxième alinéa de l’article L. 338-1 du même code, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Si, après répartition des sièges en application de l’article L. 338 et du présent article, ont été élus moins de cinq conseillers régionaux issus des sections départementales correspondant à un département, des sièges supplémentaires sont ajoutés à l’effectif du conseil régional afin d’atteindre le seuil de cinq conseillers régionaux au titre du ou des départements concernés.
« Le nombre total ainsi majoré des sièges du conseil régional est réparti selon les règles prévues aux deuxième à avant-dernier alinéas de l’article L. 338.
« Les sièges supplémentaires résultant de cette nouvelle répartition sont attribués aux candidats des listes bénéficiaires, dans l’ordre de leur présentation dans la ou les sections départementales correspondant aux départements dont la représentation doit être complétée. »
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Je suis tenace… Je demande encore une fois à la Haute Assemblée d’être logique avec elle-même en confirmant son vote de première lecture, par lequel elle avait adopté par scrutin public, en juillet dernier, par 334 voix contre 1, un amendement identique à celui-ci.
Tout à l’heure, j’ai remercié le rapporteur de s’être beaucoup battu pour arracher une meilleure représentation des petits départements. Je lui en donne acte, car je sais que sa tâche a été difficile. Pour autant, je persiste à considérer qu’il faut assurer un minimum de cinq conseillers régionaux à chaque département.
L’argument que nous oppose le Gouvernement est à mes yeux à la fois totalement fallacieux et dangereux. Selon lui, ce serait le Conseil constitutionnel qui s’opposerait à la fixation de ce seuil. Or prenons un exemple que je connais bien, celui du Cantal : il y a une liste de six candidats pour la section départementale ; il peut donc y avoir six élus. C’est ainsi dans la quasi-totalité des départements. Si la loi permet que le département compte six représentants au conseil régional, comment ma proposition de garantir un minimum de cinq conseillers pourrait-elle contrevenir à la position du Conseil constitutionnel ? Telle est la réalité, et vous n’avez aucun argument à y opposer, malgré tous les efforts de vos collaborateurs de la direction générale des collectivités locales, la DGCL !
Votre but, c’est que les petits départements soient sous-représentés. Cela, nous ne pouvons l’accepter. Je sais bien que mon argument gêne la DGCL, mais il serait bon que, un jour, ce soient les élus qui commandent dans ce pays !
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Mézard, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - L’article L. 338 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque section départementale compte au moins quatre conseillers régionaux. »
II. - Après le deuxième alinéa de l’article L. 338-1 du même code, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Si, après répartition des sièges en application de l’article L. 338 et du présent article, ont été élus moins de quatre conseillers régionaux issus des sections départementales correspondant à un département, des sièges supplémentaires sont ajoutés à l’effectif du conseil régional afin d’atteindre le seuil de quatre conseillers régionaux au titre du ou des départements concernés.
« Le nombre total ainsi majoré des sièges du conseil régional est réparti selon les règles prévues aux deuxième à avant-dernier alinéas de l’article L. 338.
« Les sièges supplémentaires résultant de cette nouvelle répartition sont attribués aux candidats des listes bénéficiaires, dans l’ordre de leur présentation dans la ou les sections départementales correspondant aux départements dont la représentation doit être complétée. »
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Il s’agit d’un amendement de repli.
Au terme de la négociation menée avec l’Assemblée nationale et le ministre de l’intérieur – qui lui au moins a fait un effort… –, nous avons obtenu que les départements de plus de 100 000 habitants comptent au moins quatre conseillers régionaux. Par cet amendement, nous demandons que ce seuil minimal de représentation vaille pour tous les départements : on ne peut pas accepter qu’un unique département français soit marginalisé ! Est-ce ainsi que vous récompensez notre excellent collègue Alain Bertrand de la confiance qu’il a toujours témoignée au Gouvernement ? Cela étant, vous avez pour habitude de trahir la fidélité…
Adopter cet amendement ne changera pas la face de l’organisation territoriale, ne changera rien au fonctionnement de la très grande région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon, mais ce sera faire œuvre de justice.
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par MM. Bertrand et Mézard, est ainsi libellé :
Alinéas 5 à 7
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
« Si, après la répartition des sièges prévue au premier alinéa, chaque département ne compte pas au moins deux conseillers régionaux, un ou plusieurs sièges attribués à la liste arrivée en tête au niveau régional sont réattribués à la ou aux sections départementales de cette liste afin que chaque département dispose de quatre sièges au moins.
« Le ou les sièges ainsi réattribués correspondent au dernier siège ou aux derniers sièges attribués à la liste arrivée en tête au niveau régional et répartis entre les sections départementales en application du premier alinéa, sous réserve du cas où les départements prélevés seraient attributaires de moins de cinq sièges.
La parole est à M. Alain Bertrand.
M. Alain Bertrand. La chose est grave.
À l’Assemblée nationale et maintenant au Sénat un accord semble être intervenu pour assurer un minimum de quatre conseillers régionaux aux départements de plus de 100 000 habitants. Seule restera à l’écart du dispositif la Lozère, ce département sous-républicain peuplé de gueux, de bouseux qu’on ne connaît pas bien…
Agir ainsi, c’est s’en prendre aux plus faibles, et c’est contraire à l’esprit républicain ! On invoque l’opposition du Conseil constitutionnel, alors même que celui-ci avait accepté, lors de la création du conseiller territorial, qu’un traitement particulier soit réservé aux territoires peu peuplés, à seule fin d’équité républicaine.
On me dit que le groupe socialiste serait d’accord pour fixer le seuil à quatre conseillers régionaux au-dessus de 100 000 habitants parce que cela convient à tel ou tel élu qu’il s’agit de ne pas mécontenter… Mais c’est scandaleux pour la Lozère, et déshonorant pour les parlementaires qui acceptent de tels arrangements ! Je sais, monsieur Vallini, que vous êtes attaché à la Lozère et que vous connaissez la ruralité et l’hyper-ruralité. Que diriez-vous, monsieur Kaltenbach, si je m’autoproclamais compétent pour organiser la métropole parisienne ? C’est surréaliste !
Il faut revenir au bon sens, à une République qui ait les pieds sur terre, qui ne soit pas façonnée par des élus en plastique. C’est ainsi que nous pourrons lutter pour l’emploi, pour le développement économique.
Il s’agit donc d’un amendement d’équité extrêmement important pour le plus petit département de France, qui ne saurait être considéré comme un territoire sous-républicain peuplé de sous-citoyens !
M. le président. L’amendement n° 8, présenté par MM. Bertrand et Mézard, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer (deux fois) le mot :
deux
par le mot :
trois
II. – Alinéa 7
Remplacer les mots :
d’un seul ou de deux
par les mots :
d’au moins trois
La parole est à M. Alain Bertrand.
M. Alain Bertrand. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport au précédent, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
M. le président de la commission spéciale et moi-même ne sommes pas en plastique, monsieur Bertrand.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission spéciale. Ni en plastique, ni trop plastiques, d’ailleurs !
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous sommes comme nous sommes, mais nous essayons de livrer nos convictions, sachant que la commission spéciale ne saurait se départir d’un raisonnement juridique.
Nous comprenons tous, ici au Sénat, que s’en tenir au seul critère démographique n’est pas une position acceptable. En effet, cela aboutit à mettre peu à peu le monde rural à l’écart, ce qui est extrêmement dangereux. C’est un principe qui nous anime depuis le début.
Par ailleurs, nous avons a minima la responsabilité institutionnelle de veiller à ne pas faire encourir aux travaux de la Haute Assemblée une censure certaine du Conseil constitutionnel.
À cet égard, je voudrais préciser que les écarts de représentation évoqués pour certains petits départements ne correspondent plus à la situation actuelle. Ils étaient possibles avec l’ancien découpage cantonal, mais le nouveau ne les permet plus. Les simulations que nous avons effectuées sont bien sûr fondées sur les nouvelles circonscriptions régionales.
Nous avons cherché à préserver les choses. La solution qui a d’abord été proposée était d’assurer un minimum de deux représentants régionaux aux départements de moins de 100 000 habitants,…
M. Alain Bertrand. Il n’en existe qu’un !
M. François-Noël Buffet, rapporteur. … puis on est passé à quatre.
M. Alain Bertrand. C’est faux !
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je ne sais, mon cher collègue, si on peut l’affirmer avec autant de certitude que vous le faites !
M. Alain Bertrand. Mais si !
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je peux vous dire que les services de Gouvernement, ceux de l’Assemblée nationale et les nôtres y ont travaillé. C’est la réalité !
Si nous n’arrivons pas à faire prospérer cet accord entre les deux assemblées, que se passera-t-il ? Le Sénat se fera peut-être plaisir en votant une représentation minimale de cinq conseillers, mais l’Assemblée nationale reviendra à son texte d’origine, c’est-à-dire à deux conseillers !
M. Alain Bertrand. Allons-y !
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous aurons alors tout perdu !
Il se trouve que nous avons là une piste d’accord avec l’Assemblée nationale. Il n’y en a pas beaucoup sur ce texte, pour les mille raisons que nous avons évoquées ensemble.
M. Alain Bertrand. Et la Lozère ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. C’est cela ou rien, mon cher collègue ! Dès lors, il nous faut aller vers cet accord, qui permettra d’assurer un minimum de quatre sièges au conseil régional.
M. Alain Bertrand. Mais non !
M. François-Noël Buffet, rapporteur. C’est en tout cas la position qu’a défendue la commission spéciale. C’est la raison pour laquelle son avis est défavorable sur les quatre amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. Dès le début de l’examen de ce projet de loi, le Sénat a appelé l’attention du Gouvernement sur ce sujet difficile de la représentation minimale que l’on doit garantir aux départements les moins peuplés.
Lors de la dernière lecture du projet de loi à l’Assemblée nationale, le 9 décembre dernier, les députés ont introduit des garanties de représentation supplémentaires, en prévoyant que les départements de moins de 100 000 habitants seraient représentés par au moins deux conseillers régionaux, tandis que les départements de 100 000 habitants et plus seraient représentés par au moins quatre conseillers régionaux.
Ces règles de représentation minimale sont conformes au principe d’égalité démographique. Elles ne conduiront pas à une surreprésentation de certains départements par rapport à d’autres au sein d’une même région. Elles respectent le fameux « tunnel » démographique de plus ou moins 20 %, qui suppose qu’aucun département ne soit systématiquement surreprésenté en ayant un nombre d’habitants par élu inférieur de plus de 20 % à la moyenne régionale.
L’ensemble de ces dispositions, soutenues par le Gouvernement, a été repris à son compte par la commission. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je suis un peu étonné que, comme l’a dit en substance Jacques Mézard, ce soient le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État qui fassent la loi.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission spéciale. Ils l’interprètent.
M. Pierre-Yves Collombat. D’où sort cette règle des 20 % ? J’ai cherché dans la Constitution, mais en vain !
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il existe une jurisprudence en la matière.
M. Pierre-Yves Collombat. Ensuite, je trouve étrange que l’on anticipe les décisions du Conseil constitutionnel. La loi créant le conseiller territorial prévoyait un minimum de quinze représentants par département. Le Conseil constitutionnel avait alors « chipoté à la marge », en se livrant à des contorsions arithmétiques assez extraordinaires, tout en admettant que prévoir une représentation minimale incompressible pour tout département n’était absolument pas scandaleux.
Par conséquent, cette fameuse règle, qui nous vient apparemment des dieux, semble tout de même être à géométrie largement variable. Mais cela, on l’a oublié !
Enfin, il convient aussi de faire le lien entre ce texte et le projet de loi NOTRe à venir, qui confère aux régions des pouvoirs très importants, notamment en matière d’aménagement et de développement. Je veux bien que l’on saucissonne tout et que, la tête dans le guidon, on ne voie que ce qui est devant soi, mais il faudrait tout de même essayer d’élargir le propos !
Je ne trouve donc pas ces propositions scandaleuses. Au contraire, cela me paraît être le minimum du minimum, et je trouve vraiment très étonnant que l’on en soit encore à chipoter un représentant de plus à la Lozère.
Mme Éliane Assassi. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Je m’efforce d’être cartésien. Les « petits départements » peuvent, en fonction du résultat des élections, avoir autant d’élus que de candidats. C’est le cas du mien : six candidats figurent sur la liste de section départementale. Cela signifie que, en fonction des suffrages exprimés et de la liste arrivée en tête, mon département peut obtenir six élus. Je défie quiconque de me prouver juridiquement le contraire ! D’ailleurs, un éminent représentant du groupe socialiste qui a fait des simulations m’a indiqué que, dans la plupart des cas de figure, mon département aurait cinq élus.
Or vous continuez à prétendre que le Conseil constitutionnel serait opposé à ce que l’on fixe à ce niveau la représentation minimale assurée à chaque département, alors qu’il ressort de la loi, eu égard au nombre de candidats, que ce nombre d’élus pourra être atteint. Quand on m’aura démontré le contraire, je changerai peut-être d’avis, mais pour l’heure j’attends toujours !
Nous avons déposé un amendement de repli fixant le minimum à quatre conseillers régionaux : dès lors que, dans l’immense majorité des cas, le résultat des élections donnera un nombre d’élus supérieur ou égal à quatre, je ne vois vraiment pas quel effort cela représente de l’adopter. Je le redis : nous sommes face à une position de principe !
Il a fallu batailler pour arriver à un minimum de quatre représentants pour les départements comptant plus de 100 000 habitants, et je remercie encore une fois M. le rapporteur de ses efforts. Je rappelle que la position initiale du Gouvernement était de garantir un conseiller par département, ce qui n’avait aucun sens, sinon celui d’envoyer un message d’humiliation aux petits départements. Or de tels messages, nous en avons suffisamment reçus depuis deux ans…