M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission est tout à fait sensible à ces arguments : au regard des taux d’intérêt pratiqués actuellement, un taux mensuel de 0,4 % est pour ainsi dire usuraire ou confiscatoire. Évidemment, lui substituer le taux d’intérêt légal appliqué aux retards de paiement en droit civil est tout à fait indiqué.
Aussi, la commission des affaires économiques sera pleinement satisfaite par l’article 30 sexies du projet de loi de finances rectificative, qui contient précisément cette disposition. Nous allons l’examiner dans quelques jours, ce qui nous permettra de revenir sur ce sujet.
Madame Primas, je peux vous indiquer d’ores et déjà que j’émettrai un avis très favorable sur cet article. Toutefois, dans l’immédiat, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Madame Primas, vos collègues députés ont adopté hier, sur proposition du Gouvernement, une disposition répondant exactement à la préoccupation que vous exprimez. Certes, l’Assemblée nationale n’a pas encore voté le projet de loi de finances rectificative, dans lequel cette mesure a été inscrite. Ce texte fera l’objet d’un vote solennel mardi prochain.
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Et il sera voté !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. De nombreux éléments laissent penser que cette disposition vous satisfera. Si tel n’est pas le cas, nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir. Cela étant, compte tenu de ces éléments, il serait à mon sens opportun de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame Primas, l’amendement n° II-123 est-il maintenu ?
Mme Sophie Primas, au nom de la commission des affaires économiques. Si cet hémicycle n’était pas laïque, je dirais alléluia ! (Sourires. – Mme Cécile Cukierman rit.) Donc, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-123 est retiré.
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Inscription à l'ordre du jour d'une proposition de résolution
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que, par courrier en date du 4 décembre 2014, M. Didier Guillaume, président du groupe socialiste et apparentés, a demandé l’inscription à l’ordre du jour de l’espace réservé à son groupe du jeudi 11 décembre 2014 au matin de la proposition de résolution relative à la reconnaissance de l’État de Palestine, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution.
Le délai de quarante-huit heures prévu à l’article 50 ter du règlement étant expiré, cette proposition de résolution peut être inscrite à l’ordre du jour du jeudi 11 décembre au matin, avant l’examen de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant.
Il est proposé d’attribuer un temps d’intervention de vingt minutes à l’auteur de la proposition de résolution, d’attribuer un temps d’intervention de dix minutes à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et de fixer à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 10 décembre 2014, à dix-sept heures.
Les interventions des orateurs vaudront explications de vote.
Compte tenu de l’importance de ce texte et des conditions particulières de son inscription à l’ordre du jour, qui ne sauraient faire précédent, les modalités d’organisation du débat seront à confirmer par la conférence des présidents lors de sa réunion du 10 décembre 2014.
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Loi de finances pour 2015
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2015, adopté par l’Assemblée nationale.
Nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 42.
Articles additionnels après l’article 42 (suite)
M. le président. L'amendement n° II-153 rectifié, présenté par MM. Savary, Bouvard, Cambon, Cardoux et César, Mme Deroche, M. Détraigne, Mme Estrosi Sassone, MM. Gremillet, Laménie, Lefèvre, Mayet, Milon, de Nicolaÿ et Perrin, Mme Primas et MM. Raison, Revet et D. Robert, est ainsi libellé :
Après l’article 42
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l’article 200 undecies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le crédit d’impôt maximum dont peuvent bénéficier les groupements agricoles d’exploitation en commun est égal au crédit d’impôt dont bénéficient les exploitants individuels, multiplié par le nombre d’associés que compte le groupement, dans la limite de trois. »
II. - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Mes chers collègues, cet amendement tend à harmoniser, pour les agriculteurs membres d’un groupement agricole d’exploitation en commun, ou GAEC, le droit au crédit d’impôt existant pour les congés des exploitants agricoles.
Vous le savez, soit les agriculteurs membres d’un même GAEC se remplacent mutuellement, soit ils ont recours aux services de remplacement, qui sont désormais assez généralisés. Or, à ce jour, les membres d’un GAEC ne peuvent bénéficier des dispositions prévues pour les exploitants agricoles. Dans un souci de cohérence, il est proposé de limiter cet avantage aux GAEC constitués d’au maximum trois agriculteurs : au-delà, des formes de mutualisation permettraient une organisation quelque peu différente.
Ainsi, cette disposition traduit un souci d’harmonisation fiscale exprimé par la Commission européenne lors de la réforme de la politique agricole commune, sur le principe de la transparence fiscale dont bénéficient les GAEC.
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit là d’un véritable sujet.
M. Michel Bouvard. Eh oui !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. En effet, dans le domaine de l’élevage et dans un certain nombre de métiers agricoles, il est extrêmement difficile de se faire remplacer pour prendre des congés. Voilà pourquoi a été créé ce crédit d’impôt pour congé, dont les exploitants agricoles bénéficient.
Étendre ce crédit d’impôt aux petits GAEC, qui existent notamment dans les régions d’élevage,…
M. Michel Bouvard. Effectivement !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. … serait possible pour un coût fiscal extrêmement faible. Par ailleurs, cette mesure présenterait un réel intérêt dans la mesure où elle permettrait aux exploitants agricoles de prendre des congés.
Néanmoins, ne pouvant établir le coût précis de cette extension du crédit d’impôt,…
M. Michel Bouvard. Ce n’est pas cher !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. … la commission n’a pas été jusqu’à émettre un avis favorable. Elle s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur Bouvard, les normes en vigueur permettent déjà la souplesse à laquelle vous aspirez. Au sein des GAEC comme dans tout autre groupement agricole, on peut compter autant de crédits d’impôt que d’associés, si ces derniers prennent des congés et se font remplacer par une personne autre qu’un associé, dans la limite de quatorze jours de remplacement par an. En effet, toutes les exploitations agricoles doivent pouvoir bénéficier du même nombre de jours pris en charge, quelle que soit leur forme. C’est bien ce que permet le dispositif actuel.
En tout état de cause, je vous rappelle qu’un texte de loi relatif à la fiscalité agricole devrait être examiné au premier ou au deuxième trimestre de l’année prochaine. Le Gouvernement renvoie donc en général à cette discussion les points qui lui sont soumis à ce titre. Dans la perspective de ce débat, l’Assemblée nationale a déjà réuni une mission d’information. J’ignore si le Sénat en a fait de même. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement accueillera toutes les questions – elles sont nombreuses et légitimes – susceptibles d’être posées sur ce sujet. Son but est de regrouper l’ensemble des dispositions qui en découleront au sein d’un même texte.
Cela étant, je le répète, cet amendement me semble déjà satisfait.
M. le président. Monsieur Bouvard, l’amendement n° II-153 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Bouvard. Monsieur le secrétaire d’État, les précisions que vous venez d’apporter me laissent supposer que les textes en vigueur connaissent des problèmes d’interprétation. J’ai discuté de ces questions avec un certain nombre d’agriculteurs directement concernés, et je n’ai pas l’impression que la situation soit aussi claire que cela.
Vous nous annoncez qu’un texte consacré à la fiscalité agricole sera prochainement soumis au Parlement. La disposition que je propose peut parfaitement s’y inscrire.
Je précise néanmoins que, par penchant naturel, je préfère voir les mesures fiscales figurer en loi de finances. Je m’étonne même qu’un tel texte, consacré à la fiscalité agricole, puisse être établi ainsi à part. Il aurait mieux valu que ces dispositions soient examinées dans le cadre du budget. Cette méthode est toujours préférable : elle permet une appréciation globale des coûts et, surtout, elle garantit une cohérence, une vision d’ensemble.
Cela étant, je suis prêt à attendre l’examen de ce texte de loi et je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-153 rectifié est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° II-2 rectifié bis est présenté par M. Chiron.
L'amendement n° II-37 rectifié sexies est présenté par MM. Marseille, Bonnecarrère, Luche et V. Dubois, Mme Joissains, MM. Cadic, Bockel, Tandonnet, Guerriau, Kern et J.L. Dupont, Mme Jouanno, M. D. Dubois et Mme Billon.
L'amendement n° II-102 rectifié bis est présenté par MM. Lefèvre, Cambon, Bizet, Gilles, D. Laurent, Longuet et Mandelli, Mmes Gruny et Imbert, MM. Pellevat, Savary et Trillard, Mme Micouleau, MM. B. Fournier, Revet, G. Bailly, Raison et Perrin, Mmes Hummel, Estrosi Sassone et Giudicelli, MM. Saugey et Kennel, Mme Deroche, MM. Charon, Doligé, Genest et Darnaud et Mmes Cayeux et Troendlé.
L'amendement n° II-411 rectifié est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 42
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la fin de la seconde phrase du V de l’article 210 E du code général des impôts, les mots « jusqu’au 31 décembre 2010 » sont remplacés par les mots : « entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2018 ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Les amendements nos II-2 rectifié bis et II-37 rectifié sexies ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Cyril Pellevat, pour présenter l’amendement n° II-102 rectifié bis.
M. Cyril Pellevat. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° II-411 rectifié.
M. Thierry Foucaud. J’avais l’intention de me féliciter des explications de mes autres collègues ! (Sourires.)
Cet amendement a pour objet de favoriser la réalisation de logements sociaux en garantissant une marge d’autofinancement assise sur le réemploi des plus-values de cession d’actifs. Nous avons déjà discuté de cette question, je n’y reviendrai donc pas en détails.
De manière générale, et de sorte à rendre notre fiscalité plus intelligente encore sur le plan économique, il faudrait poser comme condition à l’exonération de la taxation de quelque plus-value que ce soit le réemploi vertueux de celle-ci. Ainsi pourrait-on drainer plus sûrement vers des dépenses utiles à la collectivité certaines sommes qui en demeurent aujourd’hui distraites.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a pour objet de réactiver entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2018, soit pour trois ans, l’application du taux réduit d’impôt sur les sociétés pour les plus-values de cessions immobilières réalisées par les bailleurs sociaux pour d’autres biens que des logements sociaux.
Ce dispositif existait donc par le passé.
Par principe, la commission n’est pas favorable à l’idée de réactiver d’anciennes niches fiscales ou d’autres réductions d’impôt éteintes. Deux éléments pourtant tempèrent son avis et la conduisent à s’en remettre à la sagesse de notre assemblée : tout d’abord, la situation de la construction, qui est extrêmement difficile et tous les dispositifs de soutien doivent être encouragés ; ensuite, l’annexe « Voies et moyens » indique que la dépense liée à cet avantage fiscal est faible, de l’ordre de 1 million d’euros.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement ne souhaite pas rouvrir un dispositif fermé. Il s’agit d’une disposition qui pourrait paraître séduisante mais qui est susceptible de présenter un coût largement supérieur à celui que vient d’évoquer M. le rapporteur général, dont le chiffre, extrapolé d'un dispositif fermé, ne prend sans doute en compte que des queues de programme. Je dispose d’évaluations qui évoquent plus de 100 millions d’euros. Le Gouvernement n’y est donc pas favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-102 rectifié bis et II-411 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° II-4 rectifié bis est présenté par MM. Chiron et Lalande.
L'amendement n° II-38 rectifié quinquies est présenté par MM. Marseille, Bonnecarrère, Luche et V. Dubois, Mme Joissains, MM. Cadic, Bockel, Guerriau, Kern et J.L. Dupont et Mme Billon.
L'amendement n° II-104 rectifié bis est présenté par MM. Lefèvre, Cambon, Bizet, Gilles, D. Laurent, Longuet et Mandelli, Mmes Gruny et Imbert, MM. Pellevat, Savary et Trillard, Mme Micouleau, MM. B. Fournier, Revet, Raison et Perrin, Mmes Hummel et Giudicelli, M. Saugey, Mme Deroche, MM. Charon, Doligé, Genest et Darnaud et Mme Cayeux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 42
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le neuvième alinéa de l’article 238 bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« e) quinquies - De sociétés publiques locales définies à l’article L. 1531-1 du code général des collectivités territoriales et agissant dans le secteur de la culture ou du tourisme et qui ont notamment pour mission la présentation au public d’œuvres artistiques, musicales, chorégraphiques, théâtrales, dramatiques, lyriques, cinématographiques et de cirque ou l’organisation d’expositions et à la condition que les versements soient affectés à cette activité ; ».
II. – Le I est applicable à compter du 1er janvier 2016.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Les amendements nos II-4 rectifié bis et II-38 rectifié quinquies ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Cyril Pellevat, pour présenter l’amendement n° II-104 rectifié bis.
M. Cyril Pellevat. De nombreuses collectivités territoriales ont créé des sociétés publiques locales, ou SPL, agissant dans le domaine culturel.
Ces sociétés publiques locales agissant dans le domaine culturel ou touristique répondent aux critères ouvrant droit à une réduction d’impôts de 60 %, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, la SPL intervient au bénéfice exclusif des collectivités actionnaires. Ensuite, l’objet social de la SPL agissant dans le domaine de la culture ou du tourisme répond à un besoin d’intérêt général. En outre, la SPL engendre des emplois qui ne sont pas délocalisables. Elle s’inscrit dans la stratégie territoriale. Sa valeur ajoutée, dans le cadre de ses missions culturelles ou touristiques, participe au rayonnement du territoire. De plus, la SPL travaille uniquement pour ses actionnaires, sans mise en concurrence, dans le cadre d’une relation in house. Enfin, la SPL participe à la rénovation des instruments juridiques des services culturels locaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est un vrai sujet : comment encourager le mécénat dans un certain nombre de sites ou d’activités culturelles ou touristiques, comme l’abbaye de Fontevraud ou le mémorial de Caen, gérés par des sociétés publiques locales, ou SPL ?
Il semble en effet tout à fait intéressant de mobiliser le mécénat en permettant aux entreprises de bénéficier de la réduction d’impôt de 60 % sur leurs versements effectués au profit d’œuvres ou d’organismes d’intérêt général.
Toutefois, plutôt que d’étendre la niche relative aux dons aux œuvres ou organismes d’intérêt général, la solution réside peut-être dans la création par les SPL concernées d’un fonds de dotation. Elles peuvent soit créer une fondation d’utilité publique, soit créer un fonds de dotation puisqu’un tel fonds peut être créé à l’initiative d’une personne publique.
Nous préférons donc nous en tenir au droit existant. Si les collectivités veulent bénéficier du mécénat, des dispositifs existent déjà, qui produisent le même résultat que ce que propose cet amendement. J’en demande donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le régime du mécénat est en principe réservé aux seuls organismes sans but lucratif. Il est vrai toutefois que le dispositif actuel prévoit une dérogation expresse. Sont éligibles certaines sociétés de capitaux dont les actionnaires sont l’État ou un établissement public national et une ou des collectivités territoriales, dont la gestion est désintéressée, et qui ont pour activité principale la présentation au public de spectacles vivants, à la condition que les versements soient affectés à cette activité.
Il s’agit d’une dérogation au principe général, qui n’a pas vocation à être étendue. Votre proposition vise à ouvrir le dispositif aux SPL, qui sont des sociétés de capitaux dont les actionnaires sont les collectivités ou leurs groupements, et ne prévoit pas qu’elles soient soumises aux mêmes conditions, à savoir la nécessité d’une gestion désintéressée et l’exercice à titre principal des activités éligibles au mécénat.
Je vous rappelle que le coût du dispositif de réduction d’impôt en faveur du mécénat des entreprises devrait atteindre 635 millions d’euros en 2014. Votre proposition, qui n’est pas chiffrée, va à l’encontre de l’objectif de réduction des dépenses fiscales et le rapporteur général vient à l’instant de proposer une solution permettant de concourir au même objectif au travers de dispositions qu’il a parfaitement décrites.
Le Gouvernement partage la position de votre commission et suggère le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. Cyril Pellevat. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° II-104 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° II-128 rectifié, présenté par M. Percheron et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 42
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 285 septies du code des douanes, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. …. - À compter du 1er janvier 2015, il est institué une taxe de sûreté portuaire au profit des ports maritimes de commerce.
« La taxe est due par toute entreprise de commerce maritime et s’ajoute au prix acquitté par le client.
« La taxe est assise sur le nombre de passagers et le volume de fret embarqués par l’entreprise de commerce maritime dans le port maritime.
« Son produit est arrêté chaque année par l’autorité portuaire après avis du concessionnaire, dans la limite d’un plafond fixé à la somme des dépenses liées aux installations et services de sécurité ainsi que des mesures prises dans le cadre des contrôles aux frontières de l’espace Schengen en application des engagements internationaux de la France constatés l’année précédente auxquelles s’ajoutent 2 %.
« Le produit de la taxe est affecté dans chaque port au financement des installations et services de sûreté ainsi que des mesures prises dans le cadre des contrôles aux frontières de l’espace Schengen en application des engagements internationaux de la France.
« La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée par le service des douanes sous les mêmes règles, garanties, sanctions et privilèges qu’en matière de droit de douane.
« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Daniel Percheron.
M. Daniel Percheron. Cet amendement concerne l’Europe et l’espace Schengen, mais également le traité du Touquet, signé en 2003 entre la France et la Grande-Bretagne. Il concerne les autorités portuaires et les ports transmanche, principalement le port de Calais.
Le port de Calais est non seulement un des plus grands ports de voyageurs du monde, c’est également, depuis plus d’une décennie, l’une des portes du monde.
La ville de Calais et son port, et à travers eux la République elle-même, accueillent des milliers, des dizaines de milliers de migrants, avec la patience et la dignité nécessaires.
Le traité du Touquet permet à nos obstinés amis britanniques de surveiller, à partir du sol français, principalement dans les ports transmanche, mais également dans la gare du Nord pour l’Eurostar, la traque des migrants et des clandestins.
Car ces milliers de migrants et de clandestins ne souhaitent pas s’installer en France, ils n’ont qu’un but : gagner le paradis britannique. C’est pourquoi, sous l’autorité des Britanniques, dans le port de Calais, 250 personnes traquent le moindre battement de cœur. Celles et ceux d’entre vous qui ont vu le remarquable film Welcome savent de quoi il s’agit.
Cette traque mobilise énormément de monde, je l’ai dit, et elle coûte très cher au port régional depuis 2007 : entre 10 millions d’euros et 15 millions d’euros.
Il n’est pas indifférent non plus de savoir et de rappeler que l’arrondissement de Calais – cela s’appelle la désindustrialisation – est l’arrondissement de France qui compte le plus fort taux de chômage, plus de 16 %.
L’État, jusqu’à présent, a toujours refusé d’assurer le coût de cette surveillance, de cette traque des migrants qui, je le répète, par dizaines de milliers, campent aux portes de la ville, parfois même à l’intérieur du port.
C’est pourquoi cet amendement prévoit qu’une taxe soit possible, à la demande de l’autorité portuaire – il s’agit ici de la Région, mais dans les autres ports le statut est peut-être différent –, pour faire face à cette obligation qui coûte, je le répète, entre 10 millions d’euros et 15 millions d’euros.
La taxe, bien entendu, serait légère, les millions de passagers, les millions de poids lourds indiquent que l’assiette serait très large. Une taxe supplémentaire ? me direz-vous. Non ! puisque cette taxe concernant le raccourci transmanche, le trafic transmanche pèserait à plus de 80 % sur les usagers britanniques du Transmanche et des ports transmanche. Par conséquent, elle ne pénaliserait pas notre pays et elle ne pénaliserait pas l’économie de la région ni de l’arrondissement.
Nous espérons, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous soutiendrez ; nous espérons que le Gouvernement sera à nos côtés. Le port de Calais a de grands désirs de développement. L’État a mis sur pied une mission, humanitaire, qui nous demande de nous associer à la dignité de la République et à l’accueil correct, humain de ces milliers et milliers de citoyens de la planète déstabilisés par les guerres actuelles. (Mmes Sophie Primas et Marie-Annick Duchêne applaudissent.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission s’est interrogée sur cet amendement. Nous sommes tous sensibles aux considérables problèmes de sécurité que rencontrent malheureusement certains ports, en particulier le port de Calais.
Pour les collectivités gestionnaires, cette charge représente des montants importants. On ne peut donc que souscrire à l’analyse qui vient de nous être présentée.
Cet amendement soulève toutefois deux questions.
Première question : cela ne relève-t-il pas des missions régaliennes de l’État, ainsi que semble l’indiquer une jurisprudence citée dans l’objet de l’amendement ? Si c’est le cas, celui-ci doit en assumer le coût au titre de son budget général. Il faudrait, à défaut, instaurer une taxe affectée.
La rédaction de cet amendement est en outre trop imprécise pour être opérationnelle : on ne peut pas renvoyer à un décret en Conseil d’État, donc au pouvoir réglementaire, la fixation de la taxe dès lors que les bases de celle-ci ne sont pas définies dans la loi.
Cela étant dit, nous aimerions entendre le Gouvernement puisque, s’agissant de la sûreté et la sécurité, nous sommes typiquement dans l’exercice d’une mission régalienne de l’État.
Seconde question : pourquoi l’État n’affecte pas les budgets nécessaires ?
Nous souhaitons donc connaître l’avis du Gouvernement sur ce délicat problème.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Il serait quelque peu curieux de faire financer des missions de sécurité liées à l’arrivée intempestive de personnes sur le site de Calais au moyen d’une taxation sur les usagers de l’infrastructure maritime. Je ne vois d’ailleurs pas comment on peut faire. La réponse se trouverait plutôt du côté de l’État. C’est pourquoi cet amendement ne me paraît pas opportun.
Les problèmes spécifiques que vous avez évoqués, monsieur le sénateur, sont connus. Je suis prêt à en discuter avec vous, et un certain nombre de mes collègues ministres pourront aussi vous rencontrer. Je le répète, le dispositif proposé ne me paraît pas adapté et nuirait bien sûr à la compétitivité, même si ce n’est pas le principal argument.
Prélever une taxe sur des usagers réguliers pour contrebalancer les effets induits par les utilisateurs irréguliers – ne voyez aucune agression dans mes propos – me paraît contradictoire.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, s’il était maintenu.