M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 193 tend à préciser dans le code de la sécurité sociale que la dissolution du régime minier est subordonnée à l’expiration du dernier affilié de cette corporation.
Pour conclure cette troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous abordons une série de quatre amendements du groupe CRC relatifs à l’avenir du régime des mines.
Je tiens à rassurer nos collègues à ce sujet.
Le Gouvernement s’est mobilisé, dès son arrivée aux responsabilités, pour faire en sorte que ce régime voie ses perspectives garanties, alors même que la précédente majorité avait prévu sa disparition pure et simple.
Il s’est engagé, par la voix de Mme Marisol Touraine, à maintenir ce régime spécifique pour les mineurs et leurs ayants droit jusqu’au dernier affilié, conformément aux engagements du candidat François Hollande et de Jean-Marc Ayrault pendant la campagne préalable à l’élection présidentielle et aux élections législatives.
Cet engagement traduit la reconnaissance de la Nation à l’endroit non seulement de la corporation minière, qui a contribué à l’essor économique de notre pays, mais aussi des mineurs, qui ont connu, faut-il le rappeler, les taux d’accidents du travail, de maladies professionnelles, d’invalidité et de mortalité les plus importants du pays.
Une instance de coordination stratégique associant l’ensemble des acteurs de la corporation minière a par ailleurs été mise en place afin de préparer les nécessaires évolutions du régime, qui trouveront leur concrétisation dans une convention d’objectifs et de gestion de la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines.
Pour compléter ce bref état des lieux, la commission souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement sur ces quatre amendements.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Comme j’ai eu l’occasion de le rappeler tant devant les organisations syndicales que devant les parlementaires élus de ces territoires ou impliqués sur ces questions, le Gouvernement s’est fortement engagé en faveur du régime minier.
M. Alain Milon. Moins que le précédent !
Mme Marisol Touraine, ministre. Ainsi, l’article 80 du décret du 30 août 2011 qui prévoyait le transfert de la gestion de la CANSSM au régime général, a été abrogé par le décret du 28 mars 2013.
Afin de réfléchir sur la manière dont ce régime doit s’adapter et engager des évolutions à l’évidence indispensables, j’ai installé une instance de coordination stratégique présidée par le préfet Philippe Ritter et réunissant l’ensemble des acteurs concernés, en particulier des représentants des organisations syndicales et des parlementaires.
Cet article prévoit qu’une convention d’objectifs et de gestion sera élaborée d’ici à la fin de l’année pour fixer les objectifs assignés au régime dans ce nouveau contexte pour la période 2014-2017. L’objectif est de conforter ce régime sur le long terme en l’inscrivant dans une durée de quatre années – généralement, les COG sont conclues pour des durées plus courtes.
Par ailleurs, afin également de conforter ce régime dans un contexte de raréfaction des concours bancaires, il est proposé de prolonger pour quatre ans la possibilité pour la CANSSM de recourir à des avances de trésorerie auprès de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, pour un montant maximal de 250 millions d’euros. Cette mesure - dérogatoire, je tiens à le souligner -, permettra de compléter le financement du régime jusqu’à la fin de 2017, en complément des avances et prêts obtenus auprès de la Caisse des dépôts et consignations ainsi que des autres partenaires bancaires.
Par ailleurs, l’Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement créant un droit d’option pour les personnels de la CANSSM, qui pourront choisir, en cas de transfert d’activité, entre le maintien de leur ancien statut ou le transfert de leurs contrats vers le statut de leur nouvel employeur.
Quel est l’objectif ? Puisque certains établissements de santé seront amenés à connaître d’inévitables évolutions, le statut de leur personnel devra lui aussi évoluer, voire changer. Concrètement, si certains salariés doivent changer d’établissement, il leur sera proposé de choisir entre le transfert de leur contrat de travail dans le statut ou la convention du nouvel employeur ou, à l’inverse, le maintien de leur contrat de travail en cours.
Notre volonté, on le voit, est bien de conforter le régime des mines jusqu’au dernier affilié, monsieur Watrin. Le Gouvernement maintient cet engagement, mais, pour autant, il n’entend pas prolonger un régime appelé à s’éteindre. Par exemple, un salarié proche de la retraite peut, par intérêt ou tout simplement par attachement affectif, vouloir son maintien dans son régime actuel, cependant qu’un salarié en début de carrière peut, lui, considérer qu’il lui sera plus avantageux d’opter pour son rattachement au régime de l’établissement qui l’emploie désormais. En tout état de cause, ce choix lui appartiendra ; c’est là un aspect essentiel des propositions que fait le Gouvernement.
J’en viens maintenant à vos différents amendements, monsieur Watrin.
L’adoption de l’amendement n° 193 n’apporterait, me semble-t-il, aucune garantie supplémentaire au régime des mines. La loi prévoit déjà le maintien de ce régime, qui est par ailleurs conforté, comme je viens de l’expliquer, par les mesures que le Gouvernement a prises. Par conséquent, j’émets un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 194, le Gouvernement a décidé non pas de maintenir sa totale autonomie à la CANSSM, ni, a contrario, de la fusionner avec la CNAMTS, mais de lui permettre de confier à cette dernière un mandat de gestion, de manière que le régime minier conserve son identité en même temps que la Caisse bénéficiera, grâce à ce mandat de gestion, de conditions plus favorables, sources d’économies.
Là encore, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Par l’amendement n° 195, vous proposez de créer une conférence territoriale chargée d’analyser les perspectives financières du régime minier, reprenant là une idée émise par certaines organisations syndicales. Dans le cadre de la concertation en cours, il a été proposé que ce soit le conseil d’administration de la CANSSM qui assume la responsabilité de ce suivi de territoire. C’est sur cette voie que le Gouvernement entend s’engager. Aussi, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Enfin, par l’amendement n° 196, vous proposez d’ouvrir les pharmacies du régime minier aux ressortissants du régime général. Parmi les évolutions que nous considérons comme inévitables, certaines portent sur l’offre de soins. Celle-ci doit être appréciée par les agences régionales de santé, comme c’est déjà le cas dans les autres territoires pour l’ensemble de l’offre de soins. Ce sont donc les ARS qui apprécieront la nécessité de maintenir tels ou tels établissements de santé, qu’ils appartiennent ou non au régime des mines. Le cas échéant, ils seront confortés dans l’offre de soins locale, cependant que d’autres établissements seront appelés à évoluer.
Aussi, il ne paraît pas souhaitable d’ouvrir les pharmacies du régime minier à un public plus large.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Watrin, les amendements sont-ils maintenus ?
M. Dominique Watrin. Tout d’abord, je vous remercie, madame la ministre, de vos explications. Il s’agit là d’un sujet complexe, qui intéresse plus particulièrement les parlementaires des anciens bassins miniers, et je ne voudrais pas trop m’y attarder.
Vous nous indiquez qu’une convention d’objectifs et de gestion sera élaborée avant la fin de l’année pour couvrir la période 2014-2017 et, ainsi, programmer l’avenir. Cependant, le maintien du décret du 30 août 2011 nous inquiète dans la mesure où celui-ci prévoit la liquidation du régime minier.
Si j’ai bien compris vos propos, nous n’avons aucune crainte à avoir dans l’immédiat, car ce régime sera maintenu jusqu’en 2017. Mais qu’en sera-t-il au-delà ? Pour notre part, nous demandons que l’on garantisse formellement son maintien. Vous nous dites que cette garantie figure dans la loi. Cette réponse ne peut nous satisfaire et c’est pourquoi nous proposons d’inscrire dans la loi que la dissolution du régime minier est subordonnée à l’expiration du dernier affilié.
De même, le contenu de cette convention d’objectifs et de gestion nous inquiète. J’ai lu celle qui avait été signée entre Xavier Bertrand et la CANSSM. Certains de ses articles interdisent manifestement tout projet de développement. Ainsi, en région Nord – Pas-de-Calais, région dont le taux d’équipement en la matière est le plus faible de France, deux projets d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, si ce n’est trois, sont bloqués du fait d’une de ces clauses de la COG.
Pareillement, la région compte 115 centres de santé, lesquels ont besoin d’être redynamisés et rénovés, et nécessitent donc des investissements. Dès lors que la COG interdira tout projet de développement, donc tout investissement, la situation de ces centres de santé ne pourra que se détériorer, ce qui conduira à leur fermeture.
J’espère que les parlementaires seront associés et auront leur mot à dire sur le contenu de cette COG, qui sera déterminant.
Nous ne pouvons pas plus nous satisfaire de la réponse que vous nous avez faite au sujet de l’amendement n° 195. Plutôt que de renvoyer au conseil d’administration de la CANSSM le soin d’assurer le suivi territorial, il serait plus ambitieux et, surtout, plus efficace de mettre en place une structure territoriale par bassin minier, structure dont on pourrait débattre, par la suite, du rôle précis ou de la composition.
C’est que les situations sont différentes d’une région à l’autre : ainsi, le Nord – Pas-de-Calais compte encore des centres de santé, alors qu’il n’y en a presque plus en Lorraine. Je ne nie pas qu’il faille un cadre de coordination national, mais on ne peut pas mener une réflexion uniquement à ce niveau-là.
S’agissant de l’amendement n° 196, je connaissais d’avance votre réponse, madame la ministre. La pression des pharmaciens libéraux, celle de leurs représentants syndicaux, est forte. Il est tout de même injuste que les pharmacies du régime minier ne puissent pas servir les ressortissants du régime général, alors que les officines libérales peuvent, elles, servir les ressortissants du régime minier.
La question qui se pose est celle du financement de ces centres de santé, celle de leur consolidation. Qui va décider finalement de cette offre de soins de proximité, dont on sait qu’elle peut jouer un rôle tout à fait utile en s’inscrivant dans les objectifs fixés par le Gouvernement en termes de maillage territorial et d’accès aux soins ?
Je le répète, le sujet est complexe. Les explications qui nous ont été données nous permettront de rebondir et d’avancer d’autres propositions. Pour l’heure, nous maintenons ces amendements, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 193.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 25.
(L'article 25 est adopté.)
Article 26
Sont habilités en 2014 à recourir à des ressources non permanentes afin de couvrir leurs besoins de trésorerie les organismes mentionnés dans le tableau ci-dessous, dans les limites indiquées :
(En millions d’euros) |
|
Montants limites |
|
Agence centrale des organismes de sécurité sociale |
34 500 |
Caisse centrale de la mutualité sociale agricole |
3 500 |
Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales |
950 |
Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines |
900 |
Caisse nationale des industries électriques et gazières |
440 |
Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français |
450 |
Caisse de retraite du personnel de la Régie autonome des transports parisiens |
15 |
M. le président. Je mets aux voix l'article 26.
M. le président. Nous avons terminé l’examen des articles de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.
Seconde délibération
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le président, en application de l’article 47 bis-1A du règlement du Sénat, le Gouvernement demande au Sénat qu’il soit procédé à une seconde délibération des articles 8 A, 8, 9, 10, 10 bis, 12 ter, 12 quater, 15, 15 bis A, 15 ter, 17 bis, 18, 19, 20, 21, 22, 23 et 24 de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
En outre, en application de l’article 44, alinéa 3, de la Constitution, le Gouvernement demande au Sénat de se prononcer par un seul vote sur les amendements qu’il présente et les articles soumis à la seconde délibération, ainsi que sur l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. (Murmures sur les mêmes travées.)
M. le président. En application de l’article 47 bis-1A de notre règlement, le Gouvernement demande donc au Sénat qu’il soit procédé à une seconde délibération des articles 8 A, 8, 9, 10, 10 bis, 12 ter, 12 quater, 15, 15 bis A, 15 ter, 17 bis, 18, 19, 20, 21, 22, 23 et 24.
La seconde délibération est de droit lorsqu’elle est demandée par le Gouvernement.
Conformément à l’article 43, alinéa 5, de notre règlement, « lorsqu’il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui doit présenter un nouveau rapport ».
Madame la présidente, de combien de temps la commission des affaires sociales souhaite-t-elle disposer ? (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l’UDI-UC.)
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, nous allons avoir besoin d’un certain temps (Sourires.) pour examiner les nombreux amendements du Gouvernement – je pensais qu’il y en aurait moins, mais je constate que la liasse est assez épaisse.
Puisque Mme la ministre a demandé un vote bloqué, le rapporteur général ne donnera pas forcément un avis sur chacun des amendements, mais il nous faut au moins le temps de nous réunir. Et je ne suis pas certaine que tous les amendements soient déjà à notre disposition.
M. Alain Milon. Ce n’est pas normal !
M. Gérard Dériot. C’est un caprice !
Mme Catherine Procaccia. De toute façon, nous sommes contre !
M. Jean-Pierre Caffet. Un quart d’heure !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur Caffet, la commission des affaires sociales entend prendre le temps nécessaire pour examiner l’ensemble des amendements. Une demi-heure est un minimum pour un travail satisfaisant.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 du règlement.
Monsieur le président, mes chers collègues, les bras nous en tombent ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. Charles Revet. À nous aussi !
M. Dominique Watrin. Le Gouvernement avait déjà eu recours à la procédure du vote bloqué lors de la discussion du texte transposant l’ANI, voilà quelques mois. À l’époque, il avait pris le prétexte fallacieux d’une trop grande activité des parlementaires, et notamment des sénatrices et sénateurs du groupe CRC : trop de défenses d’amendement, trop d’explications de vote, trop de scrutins publics, nous avait-on dit… En réalité, à ce moment-là, déjà, c’est bien le travail parlementaire qui n’avait pas été respecté.
Aujourd’hui, madame la ministre, alors que le débat a suivi son cours démocratique, vous voulez, en un seul vote, rétablir, par des amendements présentés en seconde délibération, le texte d’origine et faire se prononcer le Sénat sur l’ensemble du texte ainsi modifié.
Ce recours à la procédure du vote bloqué est violent, antidémocratique. Il fait fi du droit d’amendement des parlementaires puisque le Gouvernement s’apprête à rayer en un seul vote trois jours de débats. (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.)
Nous avons vraiment le sentiment, au groupe CRC, que le Gouvernement est acculé à une position défensive, qu’il est désemparé par la remise en cause de son texte.
Néanmoins, ce qui nous semble plus grave, c’est qu’en recourant au vote bloqué pour sauver les apparences, madame la ministre, vous bafouez la Constitution à des fins partisanes. Nous protestons avec la plus grande énergie contre cette procédure détournée, qui ne respecte pas la Haute Assemblée. On ne peut pas se jouer de la Constitution aussi facilement !
Sur le fond, et d’un point de vue politique, cette procédure est aussi un constat d’échec, l’échec d’un gouvernement qui, à force de ne rien vouloir entendre, se retrouve tout seul, ou presque.
Mme Catherine Deroche. Très bien !
M. Charles Revet. Oui !
M. Dominique Watrin. Pourtant, le groupe CRC a multiplié pendant les débats les propositions alternatives de financement de la sécurité sociale et de notre système de santé. Mais vous vous êtes réfugiée dans une posture de déni, vous avez fait le dos rond, et voilà où nous en sommes ce matin !
Quelles que soient les travées sur lesquelles elle s’exprime, la représentation parlementaire ne se sent pas aujourd’hui respectée, et elle ne peut pas l’accepter ! Ce sont trois jours de travail parlementaire, trois jours d’efforts que vous mettez à bas, en balayant d’un revers de main le texte que, majoritairement, les sénatrices et les sénateurs ont voté.
L’obstination du Gouvernement à poursuivre une politique qui, par bien des aspects, ne rompt pas avec celle d’hier, le prive aujourd’hui de la majorité de gauche dont il aurait besoin au Sénat.
Quant à la droite, qui porte une immense responsabilité dans le déficit de la sécurité sociale,…
M. Gérard Dériot. Mais bien sûr !...
M. Dominique Watrin. … elle n’a qu’un projet : la réduction des dépenses sociales.
Il est donc vraiment temps que le Gouvernement se ressaisisse et change de cap ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Mes chers collègues, nous pourrions parfaitement souscrire aux propos de notre collègue Dominique Watrin, à l’exception toutefois de son avant-dernière phrase… (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Madame la ministre, on ne peut pas reprocher au Gouvernement de demander une seconde délibération, les gouvernements précédents l’ont fait avant lui. Cependant, quand ils en faisaient la demande, c’était habituellement soit pour défaire, grâce à la majorité des absents, ce qui avait été adopté par une majorité de présents, soit pour revenir sur une disposition qu’ils estimaient ne pas avoir suffisamment expliquée, soit pour rectifier des tableaux afin de tenir compte des mesures adoptées.
Aujourd'hui, la demande de seconde délibération que vous formulez, madame la ministre, signe le constat que, dans notre assemblée, il n’y a pas de majorité présidentielle,…
M. Jean-Pierre Caffet. On s’en est aperçu !
M. Alain Milon. … même s’il y a une majorité de gauche. Ce n’est pas le premier texte sur lequel vous vous retrouvez largement minoritaire, mais vous ne voulez pas, à l’évidence, retomber dans le piège du texte sur les retraites, qui a été rejeté à l’unanimité.
M. Jean-Pierre Caffet. On ne peut rien vous cacher !
M. Alain Milon. Si le texte qui a été adopté par notre assemblée était maintenant mis aux voix, il est évident que la gauche ne pourrait pas le voter, puisque nous avons fait supprimer de nombreux articles, et que nous ne le pourrions pas non plus, puisque des articles dont nous ne voulons pas ont tout de même été adoptés. Il y aurait donc 346 voix contre, comme pour la dernière réforme des retraites.
Pour éviter de donner de nouveau cette terrible image au pays, vous souhaitez rétablir votre texte par cette seconde délibération. Mais, madame la présidente de la commission, est-il bien nécessaire de suspendre nos travaux pendant une demi-heure ? Nous sommes contre, vous êtes contre, ils sont contre et ils sont pour (L’orateur désigne tour à tour les différents groupes représentés dans l’hémicycle.)… Cela va aller vite !
Quand nous reviendrons de la réunion de commission, nous voterons en une seule fois et nous compterons les votes : ceux qui sont opposés au texte seront majoritaires, et ceux qui y sont favorables pourront s’exprimer et permettront cette fois au Gouvernement de recueillir au moins quelques voix « pour ». Voilà la vérité de la demande de seconde délibération !
M. Jean-Pierre Caffet. On ne peut rien vous cacher !
M. Alain Milon. Inutile de faire semblant, dites-le franchement : vous voulez que, cette fois-ci, le parti socialiste puisse voter votre texte. Alors, passons directement au vote, cela sera plus facile ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno.
Mme Chantal Jouanno. Madame la ministre, c'est à la représentante du Gouvernement que je m’adresse, et non à vous personnellement.
Alain Milon a très clairement expliqué comment la procédure législative avait été utilisée aux seules fins de communication.
Étant nouvelle dans cette assemblée, je n’ai guère l’habitude de cette procédure du vote bloqué, d’autant que je ne l’ai jamais utilisée en tant que ministre, ni Jean-Louis Borloo, d’ailleurs, soucieux que nous étions au contraire de toujours respecter le Sénat.
Utiliser ce procédé pour rétablir le texte que vous souhaitez, madame la ministre, est absolument méprisant pour le Sénat, méprisant pour l’ensemble des sénatrices et des sénateurs présents, méprisant aussi pour les administratrices, les administrateurs et les collaborateurs, qui ont travaillé sur ce texte pendant des heures afin de préparer les amendements, dont certains ont suscité ici de longues discussions.
Vous vous apprêtez donc à ignorer nos votes. Ce faisant, c’est chacun d’entre nous, c’est l’institution sénatoriale elle-même que vous méprisez ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Si vous êtes contraints d’en arriver là, chers collègues socialistes, nous sommes, pour notre part, libres de nous exprimer !
Je le redis, c’est le Sénat qui est méprisé aujourd’hui.
J’ai bien compris que vous ne vouliez pas retrouver à l’issue du vote du présent PLFSS le score de 346 à zéro que vous avez dû constater lors de la mise aux voix du texte relatif à la réforme des retraites. Mais je vous ai surtout entendue dire, à l’issue de nos débats, que tout cela n’était pas très grave et qu’un « travail responsable » serait conduit à l’Assemblée nationale. Le travail du Sénat serait-il donc irresponsable ?
C'est un problème de légitimité démocratique qui se pose aujourd’hui. Ce vote bloqué soulève effectivement la question de la légitimité du Sénat et des rapports du Gouvernement avec le Sénat, une fois de plus, mais une fois de trop ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le président de notre groupe n’a pu être présent aujourd’hui, mais il m’a dit sa surprise de voir de quelle façon la représentation nationale était utilisée dans cette affaire. Le président Mézard vous a adressé un courrier, madame la ministre, pour s’étonner – c’est le terme qu’il a employé – du recours à la présente procédure.
Dans cette affaire, tout a été dit : il s’agit d’une manœuvre politique, et la majorité du groupe du RDSE ne tombera pas dans ce piège ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
Mme Catherine Procaccia. Très bien !
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour permettre à la commission des affaires sociales de se réunir.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à douze heures vingt.)
M. le président. En application de l’article 44, alinéa 3, de la Constitution, le Gouvernement a demandé au Sénat de se prononcer par un seul vote sur les amendements qu’il présente et sur les articles soumis à la seconde délibération, ainsi que sur l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.
Nous allons tout d’abord procéder à la seconde délibération.
Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 6, du règlement :
« Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements. »
Conformément à l’article 42, alinéa 7, du règlement, nous procéderons de la manière suivante : je demanderai au Gouvernement de présenter ses amendements, puis je solliciterai l’avis de la commission des affaires sociales. Le vote sera ensuite réservé sur chaque amendement et sur chaque article soumis à la seconde délibération.
J’appelle maintenant les dix-huit articles faisant l’objet de la seconde délibération, assortis des amendements émanant tous du Gouvernement.
Article 8 A
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 8 A dans cette rédaction :
I. – À la seconde phrase du septième alinéa du I de l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique, les mots : « qui ne peut excéder 1,8 p. 100, est fixé par décret » sont remplacés par les mots : « est fixé à 0,9 % ».
II. – La perte de recettes résultant du I pour le fonds institué par l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° A-1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Article 8 (supprimé)
M. le président. L’article 8 a été supprimé par le Sénat.
L'amendement n° A-2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
A. – L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– la seconde occurrence des mots : « du code général des impôts » est supprimée ;
– après la référence : « III bis de l’article 125 A », est insérée la référence : « et au I de l’article 125 D » ;
– les mots : « au I du même article 125 A et ceux mentionnés au I de l’article 125-0 A » sont remplacés par les références : « au I des articles 125 A et 125-0 A » ;
b) À la première phrase du 1°, après le mot : « impôts, », sont insérés les mots : « les revenus distribués sur lesquels est opéré le prélèvement prévu à l’article 117 quater du même code, ainsi que » ;
1° bis Après la première occurrence du mot : « montant », la fin du premier alinéa du 1 du III bis est ainsi rédigée : « de l’assiette déterminée en application du b du même 3° est négatif, un excédent est reversé au contrat, correspondant à la contribution calculée sur la base de ce montant, sans pouvoir excéder le montant de la contribution déjà acquittée dans les conditions du a dudit 3°. » ;
2° Le second alinéa du 1 du IV est ainsi modifié :
a) Les deux premières phrases sont ainsi rédigées :
« Ce versement est égal à 90 % du produit de l’assiette de référence ainsi déterminée par le taux de la contribution fixé par l’article L. 136-8. Son paiement intervient le 15 octobre au plus tard. » ;
b) À la dernière phrase, les mots : « ces dates » sont remplacés par les mots : « cette date ».
B. – Le chapitre VIII bis du titre III du livre Ier est ainsi modifié :
1° L’intitulé est complété par les mots : « et par l’administration fiscale » ;
2° Il est rétabli un article L. 138-21 ainsi rédigé :
« Art. L. 138-21. – Les contributions et prélèvements sociaux définis aux articles L. 136-7 et L. 245-15 du présent code, au 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles pour son renvoi à l’article L. 245-15 du présent code, au 2° du I de l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale pour son renvoi à l’article L. 136-7 du présent code sont déclarés et versés simultanément par les établissements payeurs.
« Les acomptes dus en application du IV de l’article L. 136-7 en ce qu’il s’applique aux contributions et prélèvements mentionnés au précédent alinéa autres que la contribution définie à l’article L. 136-7 sont déterminés sur la base de l’assiette de cette contribution et font l’objet d’un versement global. »
II. – À la fin du second alinéa du 1 du II de l’article 1678 quater du code général des impôts, la date : « 25 novembre » est remplacée par la date : « 15 octobre ».
III. – L’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifié :
1° Au II, les mots : « placements visés aux 3° à 9° du même II » sont remplacés par les mots : « placements visés aux a du 3° et 4° à 9°, et à compter du 1er janvier 1997 pour les placements visés au b du 3° du même II » ;
2° Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« III. – Les III à VI dudit article sont applicables à la contribution mentionnée au I du présent article. »
IV. – Pour les produits définis au b du 3° du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale :
1° L’assiette des contributions et prélèvements sociaux définis aux articles L. 136-7 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale, au 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles pour son renvoi à l’article L. 245-15 du code de la sécurité sociale, au 2° du I de l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale pour son renvoi à l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, est celle définie au II du même article L. 136-7 ;
2° Les taux mentionnés au 2° du I de l’article L. 136-8 et au I de l’article L. 245-16 du code de la sécurité sociale s’appliquent à la totalité de l’assiette définie au II de l’article L. 136-7 du même code.
V. – A. – Le I, le II et le 2° du III du présent article, en tant qu’il rend le IV de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale applicable à la contribution mentionnée au I de l’article 16 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, entrent en vigueur le 1er janvier 2014.
B. – Sous réserve du A du présent V en tant qu’il concerne le 2° du III du présent article, le 1° du III et le IV du présent article s’appliquent aux faits générateurs intervenant à compter du 26 septembre 2013, nonobstant les articles 5 et 9 de la loi n° 97-1164 du 19 décembre 1997 de financement de la sécurité sociale pour 1998, l’article 19 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, l’article 72 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, l’article 28 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, l’article 6 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, l’article 10 de la loi n° 2011-1117 du 19 septembre 2011 de finances rectificative pour 2011, l’article 2 de la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 et l’article 3 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.
C. – Pour l’application du B, pour les faits générateurs intervenus entre le 26 septembre 2013 et le 30 avril 2014 inclus, les établissements payeurs procèdent à titre provisoire à la liquidation, au précompte et à la déclaration des contributions et prélèvements sociaux dus, selon les règles et sous les conditions applicables avant l’entrée en vigueur du présent article.
La différence entre le montant total dû en application du présent article et le montant liquidé et précompté à titre provisoire dans les conditions prévues au premier alinéa du présent C donne lieu à une régularisation en 2015. Cette régularisation est opérée selon les règles prévues au III de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale et sur le même article de rôle que l’impôt sur le revenu dû au titre de 2014.
Pour l’application des deux alinéas précédents, les établissements payeurs informent, avant le 31 mai 2014, les personnes physiques assujetties, par écrit ou par voie dématérialisée, du caractère provisoire de la liquidation des contributions et prélèvements sociaux et des modalités de régularisation définies au deuxième alinéa. Ils indiquent sur la déclaration prévue à l’article 242 ter du code général des impôts déposée en 2015, pour les faits générateurs intervenus, d’une part, entre le 26 septembre 2013 et le 31 décembre 2013 inclus et, d’autre part, entre le 1er janvier 2014 et le 30 avril 2014 inclus, l’assiette déterminée selon les modalités prévues au b du 3° du II de l’article L. 136-7, le montant des contributions et prélèvements déjà précomptés en application du a du même II et le montant des contributions et prélèvements déjà précomptés, ou le cas échéant restitués, à titre provisoire.
VI. – A. – Sont applicables à Mayotte, à compter de l’imposition des revenus perçus au cours de l’année 2013, la contribution prévue à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale et les autres contributions et prélèvements assis, contrôlés et recouvrés selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions.
B. – Sont applicables à Mayotte, à compter du 1er janvier 2014, la contribution prévue à l’article L. 136-7 du même code et les autres contributions et prélèvements assis, contrôlés et recouvrés selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions.
C. – Le 3° du I de l’article 28-3 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est abrogé pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 2014.
Article 9 (supprimé)