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Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d'un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen (projet n° 733, résultat des travaux de la commission n° 833, rapport n° 832).
Nous en sommes parvenus à la discussion des articles.
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 18 rectifié, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 46-1 du code électoral, les mots : « conseiller municipal » sont remplacés par les mots : « maire, adjoint au maire, conseiller municipal bénéficiant d’une délégation, ou président, vice-président, délégué communautaire bénéficiant d’une délégation, d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 30 000 habitants ».
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Lorsque que l’on interroge l’opinion sur le sujet du cumul, réagit-elle seulement sur celui qui est pratiqué par les parlementaires ? Évidemment non : il faut songer également au cumul entre mandats locaux. Et là, étrangement, ce qui est inadmissible pour un parlementaire, du moins aux yeux du Gouvernement, devient acceptable pour un élu local.
Nous avons déposé un amendement de bon sens, me semble-t-il. Comme nous souhaitons faire progresser de manière cohérente la législation sur les incompatibilités, nous vous proposons, mes chers collègues, de faire évoluer aussi les règles applicables en matière de cumul horizontal, en intégrant les fonctions exécutives au sein d’un établissement public de coopération intercommunale de plus de 30 000 habitants, c’est-à-dire les fonctions de président, de vice-président ou de conseiller délégué.
Le renforcement du rôle des structures intercommunales nécessite en effet, dans un souci de réalisme et d’efficacité, que celles-ci soient prises en compte dans le cumul des mandats.
A contrario, seraient exclus du dispositif les mandats des conseillers municipaux qui ne sont ni maire, ni adjoint, ni conseiller municipal délégué. En effet, chacun s’accorde à reconnaître que leurs fonctions sont largement moins prenantes que les fonctions exécutives au sein d’un EPCI.
Cet amendement est dans le droit fil des dispositions que nous avons défendues hier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Simon Sutour, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L’avis de la commission sur l’amendement n° 18 rectifié vaudra également pour les amendements nos 7 rectifié, 10, 11, 5 rectifié, 8 rectifié et 9 rectifié : toutes ces propositions ont pour objet de limiter le cumul entre mandats et fonctions locales, comme cela a été souligné pendant notre réunion de commission.
À titre personnel, je considère que ce sujet, dont je ne minore pas l’importance, mériterait une proposition de loi spécifique, avec un débat approfondi : la pluralité des solutions proposées, parfois contradictoires, en est la meilleure preuve.
Aussi, tout en comprenant sur le fond certains de ces amendements, je solliciterai leur retrait afin de débattre du projet de loi selon le périmètre retenu par le Gouvernement et l’Assemblée nationale, à savoir l’incompatibilité entre le mandat de représentant au Parlement européen et une fonction exécutive locale.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle y serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Cet amendement tend à élargir considérablement le champ de nos réflexions, puisque, à propos d’un texte qui traite du cumul entre un mandat de représentant au Parlement européen et des fonctions exécutives locales, nous en venons à parler du cumul transversal.
Nous avons beaucoup entendu dire depuis hier que nous n’avions pas pris assez de temps pour traiter de la première question ; il serait assez singulier qu’en si peu de temps et subrepticement, à l’occasion de la discussion d’un amendement, nous traitions de la seconde, même si je n’en nie pas l’intérêt !
Ce problème n’est pas totalement étranger au débat que nous venons d’avoir, mais probablement pas dans le sens que vous pensez, monsieur Détraigne. En réalité, au moment où il y aura interdiction du cumul, malgré nos désaccords, la question du cumul horizontal pourra se poser d’une autre manière.
Le Gouvernement n’est pas jusqu’au-boutiste sur le sujet, car il peut y avoir des réalités locales différentes. En tout cas, cela supposerait un débat. C’est pourquoi nous avons la même position que la commission : élargir de cette façon le périmètre de ce texte ne nous paraît pas raisonnable aujourd’hui.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Monsieur Détraigne, l'amendement n° 18 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. J’ai bien noté que, selon M. le ministre, il ne serait pas « raisonnable » de voter cet amendement. Pourtant, hier, nous avons proposé, voire voté, des dispositions bien plus déraisonnables.
Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. M. le ministre nous a affirmé qu’il n’y avait pas d’urgence et que nous avions eu le temps de réfléchir. Toutefois, nous sommes bien dans l’urgence, puisque vous nous proposez deux textes que nous n’avons même pas eu le temps d’examiner. Je suis désolé, mais c’est la vérité, notamment pour les sénateurs qui ne font pas partie de la commission des lois, laquelle a dû travailler de nuit en raison des délais très courts pour rendre le rapport. J’en félicite d’ailleurs M. le rapporteur !
Cet amendement est donc également discuté dans l’urgence, mais il me semble nécessaire de l’adopter.
Comme souvent, le Gouvernement nous propose de renvoyer l’examen de ces dispositions à plus tard. Depuis le temps que nous sommes parlementaires et que nous cumulons des mandats, nous avons très souvent entendu cette formule. Nous savons ce qu’elle veut dire : l’amendement est enterré et on ne le reverra jamais !
J’accompagnerai donc bien volontiers la plupart des amendements présentés aujourd’hui, car je connais par cœur le fond du problème qui nous est présenté par nos collègues. Je suis donc tout à fait partisan de cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le sixième alinéa de l’article L. 5211-9 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La fonction de président d’une communauté urbaine, d’une communauté d’agglomération ou d’une métropole est incompatible avec la fonction de maire d’une des communes membres de cet établissement public de coopération intercommunale. »
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Mme Hélène Lipietz. Je souhaite tout d’abord faire une remarque d’ordre général : comme nous allons encore avoir à discuter du projet de loi sur les métropoles, lequel tend à créer de nouvelles fonctions, il faudra faire en sorte d’éviter toute possibilité de cumul. Les limitations dont nous parlons doivent aussi valoir pour les lois à venir.
S’agissant de la situation actuelle, nous proposons qu’il y ait incompatibilité entre la fonction de président d’une communauté urbaine, d’une communauté d’agglomération ou d’une métropole et la fonction de maire de l’une des communes membres de cet EPCI.
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 46-1 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le mandat de maire d’une commune de plus de 30 000 habitants est incompatible avec celui de président d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants. »
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Tout d'abord, pour répondre gentiment aux propos de M. Sueur de tout à l'heure, je dirais que, s’il y a eu au moins un bon moment au cours de nos débats, c’est lorsqu’il a parlé à mon sujet d’emphase. Je crois que, en la matière, il est un véritable spécialiste ! (Rires.)
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je ne cultive pas l’emphase, mais votre discours restera dans les annales du genre !
M. Jacques Mézard. Ce qui nous sépare, surtout, monsieur le président de la commission, c’est que je considère que le meilleur moyen d’aller d’un point à un autre, c’est la ligne droite – et je vous le dis gentiment et sans emphase.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je ne crois pas. Cette affirmation est gratuite.
M. Jacques Mézard. Notre amendement est en cohérence avec le projet de loi initial, comme cela vient d’être rappelé. Nous avons assez dit qu’il était curieux d’interdire tout cumul vertical – nous avons heureusement rétabli la situation à cet égard – mais de ne pas le faire pour l’accumulation des mandats horizontaux. On en connaît les raisons ; je me suis plusieurs fois exprimé sur ce point.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, en nous répondant que vous n’avez pas eu le temps de réfléchir, vous renversez les arguments. En effet, vous n’avez eu de cesse de répéter pendant deux jours que les positions des uns et des autres étaient connues depuis longtemps. En l’occurrence, c’est la même chose : notre opinion est connue depuis longtemps.
Vous regrettez qu’il n’y ait pas eu de réflexion, mais, pour ma part, je déplore que vous soyez toujours dans la contradiction et dans l’incohérence.
Nous proposons donc d’empêcher les maires de communes de plus de 30 000 habitants de présider un EPCI à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants. En deçà de ce dernier seuil, le cumul resterait possible. Une telle solution, mesurée, est tout à fait acceptable, me semble-t-il.
M. le président. M. le rapporteur a déjà donné l’avis de la commission sur ces deux amendements.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je ne vais pas reprendre toute l’argumentation : la démarche commune de M. Mézard et de Mme Lipietz…
M. François Rebsamen. C’est assez rare ! (Sourires.)
M. Alain Vidalies, ministre délégué. … étant la même que celle de M. Détraigne, il n’y a pas lieu de les traiter différemment.
Ma réponse précédente vaut donc pour ces deux amendements, dont je vois bien les conséquences qu’entraînerait leur adoption.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous me reprochez les conditions de discussion de cette réforme, mais il faut savoir que ce projet de loi a été examiné en conseil des ministres le 3 avril 2013 ; il a été voté par l’Assemblée nationale et déposé sur le bureau du Sénat le 4 juillet dernier ; les travaux en séance ont commencé le 18 septembre. Je puis vous dire que le ministre des relations avec le Parlement que je suis souhaiterait, sur de nombreux textes, bénéficier d’un calendrier avec de tels délais, compte tenu des exigences posées par la Constitution.
M. Éric Doligé. Sur les retraites, par exemple !
M. Alain Vidalies, ministre délégué. Oui, entre autres sujets, monsieur Doligé.
Vous savez que la procédure accélérée a deux conséquences : raccourcir les délais et convoquer plus rapidement une CMP. Vous conviendrez avec moi que, pour cette réforme, bien que la procédure accélérée ait été décidée, nous n’avons pas tiré les conséquences de cette possibilité de réduction des délais. En réalité, nous avons plutôt respecté les procédures ordinaires.
Peut-être avez-vous d’autres griefs à nous faire à ce titre, mais, en tout cas, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Monsieur le ministre, vous avez été assez longtemps député pour avoir une bonne connaissance des travaux parlementaires. Aussi, vous ne devriez pas tenir de tels propos.
Ce n’est pas parce qu’un texte a été adopté en conseil des ministres en avril de cette année ou à n’importe quelle date auparavant que les délais ont été longs pour l’examiner ! Vous le savez très bien, l’examen d’un texte commence à partir du moment où la commission est libérée pour pouvoir s’en occuper.
Depuis le mois d’avril dernier, il ne vous aura pas échappé que nous avons été très occupés par beaucoup d’autres textes, que nous avons examinés de manière approfondie. Nous avons eu de très longs débats, auxquels vous avez d'ailleurs participé.
Par conséquent, vous ne pouvez pas tirer argument de ce que le texte soit passé en conseil des ministres au mois d’avril pour affirmer que nous avons largement eu le temps d’y réfléchir et nous dénier le droit de nous plaindre de la procédure accélérée !
Nos travaux ont tout de même été très acrobatiques : M. le rapporteur a été soumis à une forte pression pour commencer les auditions avant même l’ouverture officielle de la session extraordinaire, pour les terminer le lendemain. Il a dû passer la nuit sur son rapport afin que celui-ci puisse être examiné par des commissaires qui n’avaient pas eu le temps matériel, depuis l’ouverture de la session, de réfléchir à ce texte.
On peut nous faire bien des reproches, mais nous sommes tolérants. Nous acceptons un certain rythme de travail, qui est parfois un peu forcé.
Toutefois, affirmer que la procédure accélérée s’imposait pour un texte dont l’application – en témoigne le dernier article du projet de loi ! – est fixée au premier renouvellement de chacune des assemblées à compter de mars 2017, c’est tout simplement se moquer du monde ! Veuillez m’en excuser, monsieur le ministre – je ne suis pas sûr que vous ayez agi ainsi consciemment –, mais cette expression est celle qui me vient le plus naturellement à l’esprit. C'est la raison pour laquelle je tenais à ne pas laisser votre intervention sans réponse.
Pour ma part, je vois avant tout dans la procédure accélérée une menace que vous avez voulu faire peser sur les travaux du Sénat, en l’assortissant de la possibilité d’un passage en force de l'Assemblée nationale, après l’échec d’une commission mixte paritaire.
Pour en revenir aux deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune, je voterai contre l’amendement n° 7 rectifié et pour l’amendement n° 10.
En effet, le champ d’application du premier amendement me paraît trop large. On ne peut mesurer toutes les conséquences qui s’ensuivront. Aussi, je ne veux pas voter en sa faveur à l’aveugle.
Quant au second, il me semble pouvoir être adopté par notre assemblée, dans la mesure où il est raisonnable.
M. le président. La parole est à M. Raymond Vall, pour explication de vote.
M. Raymond Vall. Je ne veux pas revenir sur les polémiques relatives aux délais de l’examen de ce texte. Dans cette enceinte, certains ont fait preuve d’un tel talent que je ne saurais minimiser celui de quiconque !
À cet égard, je tiens à remercier le président Sueur d’avoir contribué à rendre espoir à la ruralité lors de l’examen du texte sur les métropoles.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Merci !
M. Raymond Vall. Du reste, pourquoi les territoires ruraux et périurbains éprouvent-ils ce sentiment de catastrophe ? Depuis près de dix ans, notre pays n’a pas de véritable ministère de l’aménagement du territoire. De ce fait, nous nous bousculons tous pour savoir qui nous allons missionner à Paris afin de rencontrer un ministre ou des fonctionnaires ayant le pouvoir de nous aider, parce que nous sommes confrontés à la centralisation. On ne sait toujours pas qui fait quoi dans ce pays !
Il nous faut donc aussi considérer ce projet de loi dans son actualité : aujourd'hui, dans le contexte que nous connaissons, le texte qui nous est proposé pourrait être catastrophique pour un certain nombre de territoires.
J’en reviens à l’amendement n° 10. Actuellement, dans le domaine de l’aménagement du territoire, il existe deux étages décisionnels. Les régions, que nous avons désignées comme chefs de file, ont des compétences essentielles pour ce qui concerne le développement économique, les transports, les infrastructures. Ce n’est plus le maire qui décide ! Concernant ces compétences essentielles, nous fléchons d’ailleurs dans nos bulletins de vote l’élu qui aura le véritable pouvoir. C’est pour cette raison que le seuil de moins de 50 000 habitants me paraît très important.
Je vous rappelle qu’un certain nombre de départements comptent moins de 200 000 habitants. Combien de temps faudra-t-il pour réunir une intercommunalité de 50 000 habitants, soit le quart ou le tiers d’un département comme le Gers, par exemple ? C’est pratiquement impossible.
Qui ira porter l’espoir de ce territoire ? Le président de cette intercommunalité, qui frisera les 50 000 ou les 30 000 habitants, mandaté par nos électeurs – à nous qui revendiquons la représentation de ces territoires –, sera véritablement le plus compétent pour engager les démarches nécessaires, qui sont parfois décourageantes.
M. le président. La parole est à M. François Rebsamen, pour explication de vote.
M. François Rebsamen. Je ne sais pas de quelle manière considérer l’amendement n° 7 rectifié de Mme Lipietz.
N’y voyez aucune agression verbale, ma chère collègue, mais c’est franchement mal connaître la vie locale que d’imaginer a priori qu’on ne puisse pas être président d’un EPCI et maire de l’une de ses communes membres !
Mme Éliane Assassi. C’est sûr !
M. François Rebsamen. L’EPCI est, en réalité, la communauté des maires. Comment peut-on donc tenir de tels propos ?
Pour ma part, j’ai voté en faveur du maintien d’une fonction exécutive locale avec un mandat de parlementaire, car je considère que c’est une mesure juste. Toutefois, ce n’est pas notre rôle de légiférer pour empêcher les élus locaux de bien gérer leur territoire.
On ne peut pas tout à la fois se réclamer du fait urbain ou de la ruralité et intervenir pour empêcher des maires de gérer correctement leur territoire ! Tout le monde ici, sur toutes les travées, me semble-t-il, a poussé à la création des établissements publics de coopération intercommunale. On sait bien que c’est par ce niveau que passe l’avenir de l’investissement au niveau local.
En conséquence, je voterai contre l’amendement n° 7 rectifié.
Concernant l’amendement n° 10, ma réflexion est légèrement différente de la vôtre, monsieur Mézard. Là encore, la bonne gestion dont jouissent aujourd'hui nombre d’EPCI, quelle que soit leur taille, tient à la mutualisation des moyens des communes, avec des services communs d’information ou un service financier à leur disposition de l’ensemble des communes. Aussi, je ne vois pas pourquoi on imposerait une limite démographique.
C'est la raison pour laquelle je voterai contre ces deux amendements. On porte là atteinte à la liberté communale. Pour avoir défendu avec certains d’entre vous la liberté des communes, à laquelle nous sommes attachés, nous ne pouvons interdire à un maire d’être président d’un établissement public de coopération intercommunale, alors même que nous avons obligé quasiment toutes les communes sur l’ensemble du territoire à créer des EPCI.
Les sénateurs demandent à être respectés ; respectons les élus locaux !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je souscris entièrement aux propos de M. Rebsamen.
On le voit bien dans les territoires, les intercommunalités qui ne sont pas présidées par un maire posent un certain nombre de difficultés, surtout quand une commune bourg-centre représente la majorité des recettes qui doivent être déléguées, au sein de l’intercommunalité, à d’autres communes, lesquelles ne peuvent assumer les mêmes responsabilités. Ce système reviendrait à pénaliser la coopération intercommunale.
Cependant, il nous faut réfléchir, comme nous l’avons fait en proposant le cumul du mandat de sénateur avec une seule fonction exécutive locale, au cumul des indemnités. Cette réalité est insoutenable pour nos concitoyens. Il y a cumul des indemnités de maire, de président d’une intercommunalité et, parfois, je le répète, de vice-président ou président d’un syndicat ou d’autres organismes intercommunaux – parc naturel régional, syndicat mixte d’aménagement, et j’en passe.
Le Gouvernement doit véritablement se pencher sur cette question pour fixer un plafond des indemnités en fonction de la complémentarité des mandats. C’est ainsi que l’on répondra aux préoccupations de nos concitoyens. En effet, il s’agit d’argent public.
Le Sénat a montré l’exemple au travers de ses différents amendements visant à ne pas cumuler les indemnités. Il s'agit d’une réelle volonté d’assumer deux mandats. Il faudra décliner cette position pour les structures intercommunales. Cette question mérite donc une réflexion approfondie.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir rappelé le calendrier précis de ce projet de loi.
Le Gouvernement a transmis le texte au Sénat le 4 juillet dernier ; cette précision m’avait d’ailleurs été apportée par le Premier ministre en personne. Dès lors, pourquoi avoir attendu le 24 juillet, soit la veille de la fin de la session extraordinaire, pour désigner un rapporteur ? Nous connaissons tous la réponse – point n’est besoin d’en dire davantage… Je le dis sans emphase aucune, ce choix politique n’est pas d’un très haut niveau.
Pour ma part, je ne voterai pas l’amendement n° 7 rectifié, car le champ d’application de la mesure proposée est bien trop large.
Concernant le cumul du mandat de maire avec la fonction de président d’une intercommunalité, on ne peut pas dire à la fois qu’un parlementaire ne peut être adjoint au maire d’une commune de 30 habitants et considérer qu’un maire peut être président d’une intercommunalité importante – j’ai souvent cité l’exemple des métropoles et des communautés urbaines. C’est une évidence.
Pour ce qui me concerne, je préside une agglomération. Si j’étais en même temps maire de la ville-centre, cela me donnerait, je le sais, deux fois plus de travail. Il faut donc que vous teniez un discours logique et cohérent.
Vous nous objectez que cette question devra être réexaminée ultérieurement parce qu’elle mérite réflexion. Mais c’est tout réfléchi ! On sait parfaitement que vous ne la traiterez pas, pour des raisons que l’on connaît tous !
Pourtant, il importe de poser ce débat et de dire les choses. Tel est aussi l’objet de cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 46-2 du code électoral, il est inséré un article L. 46-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 46-3 - Le mandat de maire, de président d'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de président de conseil départemental, de président de conseil régional, de président de l'assemblée de Corse, de président de l'assemblée de Guyane et de président de l'assemblée de Martinique est incompatible avec les fonctions ci-après énumérées : président ou vice-président du conseil d'administration d'un établissement public local à l'exception du centre communal ou intercommunal d'action sociale, du centre national de la fonction publique territoriale, d'un centre départemental ou interdépartemental de gestion de la fonction publique territoriale, du conseil d'administration ou du conseil de surveillance d'une société d'économie mixte locale. »
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. La cohérence du projet de loi aurait dû imposer d’aller au bout de la logique qui le sous-tend en s’attaquant à la question cruciale, pour la démocratie locale, du cumul horizontal.
Au travers de cet amendement, nous proposons que le mandat de maire, de président d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de président de conseil départemental, de président de conseil régional soit incompatible avec les fonctions de président ou vice-président du conseil d’administration d’un établissement public local à l’exception – nous connaissons la réalité du travail de terrain – du centre communal ou intercommunal d’action sociale, du centre national de la fonction publique territoriale, d’un centre départemental ou interdépartemental de gestion de la fonction publique territoriale, du conseil d’administration ou du conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Simon Sutour, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 5 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
I. – Le premier alinéa de l’article L. 3122-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3122-3. – Les fonctions de président d’un conseil général et de vice-président d’un conseil général sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d’un conseil régional, vice-président d’un conseil régional, maire, président d’un établissement public de coopération intercommunale, vice-président d’un établissement public de coopération intercommunale. »
II. – Le premier alinéa de l’article L. 4133-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 4133-3. – Les fonctions de président d’un conseil régional ou de vice-président d’un conseil régional sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d’un conseil général, vice-président d’un conseil général, maire, président d’un établissement public de coopération intercommunale, vice-président d’un établissement public de coopération intercommunale. »
La parole est à Mme Hélène Lipietz.