M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne sais pas si je suis une experte, mais je fais partie de la commission du développement durable…
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Merci d’être là !
Mme Évelyne Didier. La convention OSPAR, signée par la France en 2004, a pour objet la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est. Elle a été ratifiée par tous les pays riverains et, plus généralement, l’ensemble de la Communauté européenne.
Cette convention a ainsi permis utilement de fédérer les moyens de connaissance et les actions de ces pays, afin d’assurer la meilleure conservation possible de cet espace marin unique et précieux, dans une perspective de développement durable. Les sénateurs du groupe CRC soutiennent pleinement cet objectif.
Cependant, il est question aujourd’hui d’amender cette convention afin de garantir la possibilité de mise en œuvre de procédés de captage-stockage de CO2, qui n’était pas autorisée initialement lors de la signature de cette convention.
Pour tout dire, nous sommes extrêmement réservés sur une telle possibilité. Nous sommes tout d’abord dubitatifs sur la forme, parce que ce projet, qui émane du précédent gouvernement, n’a pas, depuis, fait l’objet d’une nouvelle expertise approfondie, au regard, notamment, de l’évolution des savoirs dans ce domaine.
De plus, l’adoption d’un tel texte intervient dans une actualité particulière, voire sensible, en ce qui concerne la gestion des ressources du sous-sol. En effet, alors que la pression des lobbies autour de la reprise de l’exploitation des hydrocarbures de roche bat son plein, nous attendons la réforme annoncée du code minier, censée assurer une meilleure préservation de notre sous-sol.
Il semble donc, même si son objet est spécifique et relève de conventions internationales, que le présent projet de loi s’insère dans une problématique plus large, extrêmement sensible. Nous aurions ainsi souhaité que l’ensemble de ces questions fassent l’objet d’un examen concomitant permettant d’avoir une vision globale et cohérente.
Enfin, sur le contenu même de ces amendements à la convention OSPAR, nous ne pouvons qu’exprimer une grande réserve.
La méthode suscite, en effet, un certain nombre de questions, comme en témoignent les prises de positions diverses des experts, des écologues ainsi que des ONG. Notons également que l’ADEME a rendu, le 19 mars dernier, un avis particulièrement réservé, dans lequel elle fait part des incertitudes concernant les risques et les impacts environnementaux et sanitaires à maîtriser, et s’interroge sur les capacités réelles de stockage géologique.
Nos interrogations sont de trois ordres.
Tout d’abord, cette technique est récente.
M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. C’est vrai !
Mme Évelyne Didier. Il est donc difficile d’avoir le recul nécessaire quant à son apport réel aux objectifs définis par les conventions environnementales. Vous avez d’ailleurs fait état, monsieur le président Carrère, des doutes existant dans ce domaine. (M. le président de la commission des affaires étrangères acquiesce.)
De fait, cette technologie de captage-stockage ne sera disponible à grande échelle qu’en 2030, au plus tôt.
En attendant, que se passe-t-il ? Pour nous, cet horizon est bien trop lointain, au regard de l’urgence climatique. Nos émissions de gaz à effet de serre doivent en effet baisser à partir de 2015. Si nous voulons limiter à deux degrés le réchauffement du climat, cela implique, selon les experts du GIEC, une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre à partir de 2015, suivie d’une réduction de 50 % d’ici à 2050. Dans ce cadre, le stockage n’apparaît pas comme une véritable solution prometteuse.
D’abord, cette technologie est trop énergivore. Le captage et le stockage du carbone consomment en effet une quantité importante d’énergie. Pour compenser ces pertes, il faudrait, par exemple, construire de nouvelles centrales thermiques. (M. André Gattolin opine.) Nous nous trouvons donc dans une spirale qui, sous couvert d’objectifs louables, contribue en réalité à produire des émissions de gaz carbonique.
Ensuite, le captage et le stockage sont trop coûteux. Force est de constater que les sommes colossales investies dans la recherche sur le développement de ces nouvelles technologies seraient en réalité plus utiles si elles étaient consacrées au développement des énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique.
Il est particulièrement révélateur, à ce titre, que les pétroliers préfèrent investir dans les projets de recherche concernant ces techniques, plutôt que dans le développement de nouvelles énergies propres. Il ne faudrait pas que le captage-stockage de CO2 contribue, en réalité, à rendre plus acceptable sur le plan environnemental des activités industrielles polluantes.
M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. Nous sommes d’accord !
Mme Évelyne Didier. Enfin, cette technologie est trop risquée. Ce n’est pas un point mineur, il est impossible de garantir un stockage sûr et permanent du CO2. Les risques de fuites existent, même si personne ne peut les quantifier avec précision aujourd’hui.
Il est certain que toute fuite, y compris en milieu marin, aura des conséquences sur l’environnement, le climat et la santé humaine. Certains évoquent des destructions d’écosystèmes, d’autres une accélération de l’acidification des océans... (M. le président de la commission des affaires étrangères hoche la tête en signe de dénégation.) En tout cas, cette technique est simplement contraire à l’idée même de la convention OSPAR, dont l’objectif est la protection des milieux marins.
Plusieurs rapports ont estimé que le développement d’une filière de captage et stockage du carbone ralentissait la transition énergétique dans la mesure où cette méthode « conforte aussi l’utilisation des énergies carbonées dans les pays qui les importent ».
Une fois de plus, nous laissons faire et ensuite nous tenterons de réparer. Prévenir plutôt que réparer, telle devrait être notre conduite en toute circonstance, singulièrement dans une démarche de développement durable.
Pour toutes ces raisons, les sénateurs du groupe CRC s’abstiendront sur ce projet de loi. (M. André Gattolin applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la lutte contre le réchauffement climatique, et donc contre les émissions de CO2, est et doit demeurer une priorité nationale et internationale. Personne ici, je crois, ne dira le contraire.
C’est pourquoi, en complément du développement des énergies non carbonées et des efforts en matière d’efficacité énergétique, les techniques de captage et de stockage du dioxyde de carbone peuvent jouer un rôle important et ne doivent pas être négligées.
Aussi, dans le prolongement des accords internationaux conclus dans ce domaine, et en cohérence avec eux, des initiatives visant à soutenir la filière de captage et de stockage de CO2 ont vu le jour au niveau européen et en France.
La convention OSPAR, pour Oslo Paris – il m’a fallu du temps pour résoudre cette énigme ! (Sourires.) –, dont la France est signataire, avec quinze pays européens, a pour but de protéger le milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est.
Ratifiée le 22 septembre 1992 et entrée en vigueur le 25 mars 1998, elle a été l’objet d’une adaptation progressive visant à prendre en compte les nouveaux enjeux de la lutte pour la protection de l’environnement.
La commission OSPAR a souhaité rendre possible l’enfouissement des flux de CO2 d’origine anthropique dans les importantes capacités qu’offrent les sous-sols de l’Atlantique du Nord-Est. Les modifications apportées au texte initial, et adoptées par consensus par la commission OSPAR, autorisent donc leur stockage sûr et permanent dans les structures géologiques du sous-sol marin.
C’est sur les deux amendements relatifs aux annexes II et III de la convention OSPAR que nous sommes amenés à nous prononcer aujourd’hui.
Il s’agit d’une avancée importante, qui offre une solution durable aux problèmes de stockage des gaz à effet de serre. En effet, les études menées par le gouvernement écossais et des industriels norvégiens font état de très larges capacités de stockage, permettant d’accueillir les émissions de CO2 sur plusieurs décennies. En Europe, les projets Snøhvit et Sleipner sont déjà opérationnels dans la mer du Nord et permettent de stocker annuellement environ une mégatonne de CO2.
À l’heure actuelle, la France ne fait pas partie des pays disposant des ressources de stockage les plus importantes et accessibles. Elle ne sera donc probablement pas la première bénéficiaire des retombées de ces projets. Pour autant, les enjeux économiques n’en sont pas moins importants. Car nombre d’entreprises françaises sont considérées comme des partenaires incontournables dans le domaine de la fabrication des procédés de captage du CO2 ou de l’expertise géologique. Elles ne doivent pas être oubliées.
Par ailleurs, au regard des considérations écologiques d’acidification des océans en cas de fuite, le projet de loi n’offre pas un « chèque en blanc » aux industriels. Il prévoit des garde-fous : toute autorisation d’injection s’accompagne d’un programme de surveillance mis en place par l’opérateur et contrôlé par une autorité administrative indépendante. Le stockage doit préalablement faire l’objet d’un permis pour une formation géologique précise et pour une qualité de flux de CO2 clairement identifiée. Cette qualité doit répondre à la contrainte réglementaire selon laquelle le flux doit être majoritairement composé de dioxyde de carbone : aucun déchet, ni aucune autre matière ne peut y être ajouté en vue de son élimination. Ce texte est donc créateur d’un cadre juridique strict et protecteur en matière de stockage offshore du CO2.
Néanmoins, il faut le reconnaître, le projet de loi ouvre une possibilité supplémentaire de stockage qui demeure peu intéressante, économiquement parlant, à l’heure actuelle. Malgré des coûts difficilement évaluables, le surcoût d’une chaîne complètement offshore serait, selon une étude menée par la Zero Emissions Platform, de l’ordre de quarante et un euros par tonne de CO2, quand l’émission d’une tonne se facture environ cinq euros sur le marché du carbone. Le différentiel est important. Cependant, tout laisse à penser que le prix de la tonne de CO2 sur le marché augmentera dans les années à venir. (M. le président de la commission des affaires étrangères opine.) On va donc ouvrir les possibilités de stockage sous-marin, permettant de créer un cadre juridique stable, ce qui est nécessaire pour engager les projets de recherche et développement, bref pour préparer l’avenir, anticiper et rester compétitifs dans le futur.
Dans ces conditions, sortons de l’orthodoxie, qui nous paralyse, nous tétanise et, surtout, nous fait prendre un retard considérable que nous paierons – cher, très cher – le moment venu.
Mes chers collègues, nos sous-sols offrent des solutions énergétiques nombreuses, qui – il ne s’agit évidemment pas de nier les risques que peuvent présenter certaines techniques – méritent de faire l’objet d’un débat dépassionné concernant leur utilisation, a fortiori si l’indépendance énergétique demeure un enjeu stratégique pour notre pays.
C’est bien dans une telle perspective que se situe la question présente du traitement des gaz à effet de serre. C’est pourquoi les membres du RDSE apporteront leur soutien au projet de loi. (Applaudissements au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, en tant qu’écologiste, je ne vous étonnerai pas en vous disant que la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la planète sont des enjeux fondamentaux devant guider toutes les grandes décisions que nous avons à prendre.
Le texte qui nous est soumis aujourd’hui a trait à la convention OSPAR, dont l’objet est la préservation de l’environnement marin dans l’Atlantique du Nord-Est. Il est à noter que le champ d’application géographique de la convention englobe la majeure partie de l’Atlantique du Nord-Est et donc une partie de la zone Arctique, un milieu particulièrement fragile, qu’il convient de protéger prioritairement. Plus de 13 millions de kilomètres carrés, soit 25 fois la surface de la France, sont concernés.
Dans sa version initiale, la convention interdisait l’immersion en mer des déchets et autres matières. Or, comme cela a été rappelé, les développements technologiques en matière de stockage, notamment géologique, de CO2 ont poussé la commission OSPAR à autoriser, sous certaines conditions, « le stockage sûr et permanent des flux de CO2 d’origine anthropique dans les structures géologiques du sous-sol marin ».
L’enjeu du vote de ce soir est donc d’autoriser ou pas le captage et le stockage du carbone – CSC– dans le sous-sol de la mer du Nord à partir d’exploitations offshore.
Concrètement, cela signifie qu’il faudra capter le CO2 sortant des cheminées des centrales installées sur terre, en faire un flux concentré, qui sera ensuite transporté, via des gazoducs ou d’autres équipements divers, jusqu’à des sites de stockage en profondeur dans l’espace maritime.
Si la lutte contre le changement climatique justifie que soient sérieusement étudiées les potentialités de cette technologie, il faut aussi relever que l’industrie minière prône activement la généralisation d’une telle technologie pour justifier la construction de nouvelles centrales thermiques au charbon.
Soyons donc prudents et accordons-nous pour reconnaître que cette technologie est encore très immature.
Trop peu d’études existent sur les effets de chacune des quatre étapes nécessaires, à savoir le captage, le transport, l’injection et le stockage.
Certes, et M. le président Carrère l’a rappelé, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC, estime que plusieurs tonnes de CO2 pourraient être épargnées à l’atmosphère grâce à cette technique : cela représenterait potentiellement jusqu’à 30 % à 40 % des émissions globales de CO2. Pour sa part, l’Agence internationale de l’énergie parle, et ce n’est pas contradictoire, d’un potentiel de captation de 20 % des émissions de dioxyde de carbone mondiales d’ici à 2050.
Cependant, ce que ces études n’évoquent pas, ce sont les risques, pourtant bien réels, que la technologie comporte. En l’état, ils nous semblent peu acceptables.
Géologiquement, la taille particulièrement vaste des cavités qui seraient employées pour le stockage, notamment des anciennes cavités de forage pétrolier ou gazier sous-marins, ne permet pas de garantir leur étanchéité. Une fuite massive de CO2 entraînerait l’acidification des eaux et une destruction de la faune marine intégrée à l’écosystème.
Dans un tel cadre, il serait impossible de garantir un stockage sûr et permanent du CO2. Un taux de fuite, même relativement peu élevé, pourrait remettre en question tous les efforts faits en vue d’atténuer les causes anthropiques du changement climatique.
De plus, une telle technologie consomme entre 10 % et 40 % de l’énergie produite par une centrale dont on parviendrait à capter les émissions de CO2.
L’adoption du captage et stockage du carbone à grande échelle risquerait donc d’annuler les gains acquis par les efforts d’efficacité énergétique et d’accroître la consommation de matières fossiles.
Autre conséquence, et non des moindres, le coût de fonctionnement des centrales augmenterait sensiblement, faisant ainsi augmenter celui de l’électricité. Comme cela a été rappelé, le prix du carbone et du stockage carbone est particulièrement élevé.
De plus, même avec des investissements très importants, la technologie ne sera disponible à grande échelle, au plus tôt, qu’en 2030. (M. le président de la commission des affaires étrangères le conteste.) Au vu de l’urgence environnementale à laquelle nous devons faire face, nous ne pouvons pas nous permettre de tergiverser encore pendant près de vingt ans, période durant laquelle les sommes consacrées au captage et au stockage du carbone réduiront d’autant les investissements pour des solutions durables aux changements climatiques.
Le développement d’une filière de captage et de stockage du carbone risque ainsi de ralentir la transition énergétique que nous devons mener, en confortant l’utilisation des énergies carbonées.
En réalité, les véritables solutions pour limiter les conséquences des changements climatiques sont l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables.
Il est possible de réduire de manière importante la demande énergétique par le biais de mesures d’économies drastiques de notre consommation d’énergie.
En outre, les potentialités des énergies renouvelables, comme le vent, les marées, la biomasse ou encore l’énergie solaire, sont loin d’avoir été pleinement exploitées à ce jour.
Vous l’aurez compris, les écologistes sont réservés quant à l’idée d’investir massivement dans une telle technologie au détriment – compte tenu du contexte budgétaire, le problème se pose en ces termes – d’une véritable lutte contre l’accroissement des émissions de CO2 résultant de l’activité humaine.
Aussi, et je tiens à le rappeler, si les écologistes ne sont pas hostiles au développement d’une recherche technologique permettant d’atténuer les effets des énergies carbonées, notre préférence va très nettement à une action réduisant celles-ci en amont, plutôt qu’à une action visant à en limiter les conséquences a posteriori. Si j’étais facétieux, je dirais qu’il ne faudrait pas qu’OSPAR devienne « OSCOUR » ! (Sourires.)
M. Robert del Picchia. Ça, c’est bon !
M. André Gattolin. C’est la raison pour laquelle le groupe écologiste s’abstiendra sur ce texte. (Mme Évelyne Didier applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie du soutien apporté par, je l’espère, la majorité d’entre vous.
Je voudrais répondre à certaines interrogations et aux doutes qui ont été exprimés sur la pertinence de la technique de captage et stockage de CO2 prévue dans les amendements de la convention OSPAR.
Comme je l’ai indiqué dans mon propos liminaire, la convention, qui est dédiée à la prévention de la pollution marine, répond à un impératif de développement durable et de lutte contre le réchauffement climatique. Elle s’inscrit dans une politique globale, défendue à l’échelle européenne. Je vous rappelle d’ailleurs que l’Union européenne et de nombreux voisins de la France ont déjà ratifié ces amendements. Nous souhaitons donc – j’espère que ce souhait est partagé sur toutes les travées – que la France demeure à la pointe lors des négociations internationales sur le climat, auxquelles elle prend toute sa part. C’est pourquoi elle propose notamment la vingt et unième Conférence des parties à la convention-cadre des Nations-unies sur les changements climatiques, en 2015.
Dans ce contexte, il ne serait pas pertinent d’opposer le développement de nouvelles technologies, comme le captage et le stockage de CO2, et la priorité accordée aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique. À mon sens, ces trois éléments font partie de la même politique. Le Gouvernement, sous l’impulsion du ministère de l’écologie, poursuit sans relâche l’objectif d’un déploiement constant des énergies non carbonées.
M. André Gattolin. Oui, mais il faut avoir le budget pour cela…
Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée. Certains orateurs ont relevé que ces technologies n’étaient pas sans risque, en évoquant notamment les risques de fuite dans le milieu marin. La question est, je le crois, tout à fait légitime.
Cependant, plusieurs mesures contenues dans les amendements à la convention OSPAR eux-mêmes concourent à la prévention de tels risques.
D’abord, il y a une sélection du site géologique de stockage, qui repose sur des études géologiques très poussées. Ensuite, l’opérateur est tenu de faire un suivi pendant la durée des opérations de stockage, puis, au-delà de cette période, pendant des décennies, afin de s’assurer de sa stabilité ; il doit aussi constituer une garantie financière avant le début des injections. Enfin, l’État suit ces activités et peut effectuer des contrôles.
Sélection du site de stockage, surveillance permanente par l’opérateur, suivi des activités par les services de l’État et garantie financière sont des éléments clés pour prévenir les risques de fuite et, le cas échéant, en traiter les conséquences, tout en veillant à ce que les coûts incombent effectivement à l’opérateur.
Madame Garriaud-Maylam, pour la France, le dossier de demande d’autorisation est instruit par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement. L’autorisation est délivrée après avis du préfet maritime par le préfet désigné par le ministre chargé des mines pour l’examen de la demande de titres. Ce préfet en assure également la surveillance administrative.
Par conséquent, au terme de la phase d’injection, qui peut durer plusieurs décennies, il y a également une période de surveillance de l’évolution de l’environnement et de la formation géologique sur plusieurs décennies. Elle est à la charge financière de l’opérateur, ce qui peut apporter une garantie supplémentaire.
Pour terminer, je vous précise qu’il n’existe à ce jour aucun projet français de stockage de CO2, même si le droit national le prévoit et le permet. En Europe, les projets de stockage offshore concernent essentiellement la mer du Nord ; M. le président Carrère a d’ailleurs fait référence à un projet opérationnel en Norvège. Le Royaume-Uni ou encore les Pays-Bas développent des initiatives en ce sens. Mais l’heure n’est pas au déploiement industriel de ces technologies ; elle est à l’évaluation et à la démonstration.
Aussi il convient que ces étapes soient menées afin d’apporter tous les éclairages techniques, économiques et sociaux sur la base desquels le recours éventuel au captage et stockage du carbone, le CSC, comme outil de lutte contre le changement climatique pourrait être organisé.
En autorisant l’approbation de ces amendements, mesdames, messieurs les sénateurs, vous ferez en sorte que la France prenne place dans cette réflexion. (Applaudissements au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères. Je remercie l’ensemble des orateurs de leurs interventions, longues et intéressantes.
Madame Garriaud-Maylam, je vous le demande avec gentillesse et courtoisie : qui était premier ministre, qui était Président de la République au moment de la négociation des modifications à la convention OSPAR, à Ostende, en 2007 ? Faut-il vous le rappeler ? Je ne le pense pas, pas plus que je ne dois sans doute vous rappeler que le coup d’envoi – j’ai le document sous les yeux, je le tiens à votre disposition – a été donné à Paris le 18 avril 2012… Il s’agissait du même Premier ministre et l’un de mes proches était alors ministre d’État, ministre des affaires étrangères, je veux parler d’Alain Juppé.
Tout cela pour vous dire que l’on aurait pu y réfléchir ensemble auparavant et apporter certaines modifications de bon sens, notamment celles que vous avez suggérées dans votre excellente intervention, à laquelle je souscris.
De plus, je sais pour l’avoir appris – car il m’a fallu apprendre tout cela - que le droit européen prime le droit national. Dès lors que les États membres avaient décidé de modifier la convention OSPAR, il n’était plus possible d’amender au-delà de ce qui avait déjà été admis. Nous avions donc cette difficulté.
Enfin, chère collègue, pour moi, le courage consiste à chercher la vérité et à la dire. Je vous rappelle donc, toujours avec beaucoup de courtoisie, que tous les commissaires UMP ont voté ce texte, en commission ! (Mme Joëlle Garriaud-Maylam s’exclame.)
Je me reconnais beaucoup dans l’excellente intervention de Mme Didier, et je n’en suis pas le moins du monde chagriné. (Sourires.) Je souhaite néanmoins revenir sur un argument : il est faux de penser que nous ne serons pas prêts avant 2030.
Bien sûr, les négociations ont pris beaucoup de temps de 2007 à 2012, puis il a fallu attendre les ratifications, mais certains pays vont entrer rapidement dans la phase d’expérimentation, ce qui nous permettra d’avancer.
Notre excellent ami Jean-Claude Requier a raison lorsqu’il évoque les coûts : 5 euros pour produire une tonne de CO2, contre 41 euros pour neutraliser cette même tonne de CO2. Bien évidemment, ces tarifs devront évoluer, notamment en matière de neutralisation, grâce à une rationalisation des procédés. Pour ma part, je suis favorable, je le dis très clairement à Jean-Claude Requier, à ce que l’on fasse payer davantage les pollueurs, à qui il n’en coûte que ces 5 euros aujourd'hui.
En répondant à Évelyne Didier sur l’échéance de 2030, j’ai également répondu à André Gattolin, dont j’apprécie l’intervention mesurée, même si je connais la sensibilité et le tropisme de notre collègue. (M. André Gattolin sourit.)
Cela étant dit, mes chers collègues, bien évidemment, la commission des affaires étrangères vous demande d’autoriser l’approbation des amendements à cette convention.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Article unique
Est autorisée l'approbation des amendements des annexes II et III à la convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est relatifs au stockage des flux de dioxyde de carbone dans des structures géologiques, adoptés à Ostende le 27 juin 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, dans le texte de la commission.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures trente-cinq, est reprise à vingt-deux heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.