M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Charles Guené.)
PRÉSIDENCE DE M. Charles Guené
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Refondation de l’école de la République
Suite de la discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’examen des amendements déposés à l’article 11.
Article 11 (suite)
M. le président. L’amendement n° 93, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à supprimer l’article 11, qui, nous l’avons déjà souligné, est un article de coordination avec les changements introduits à l’article 18.
L’article 11 modifie l’article L. 211-2 du code de l’éducation, qui concerne les compétences de l’État.
Dans la rédaction proposée, c’est toujours l’État qui arrête la structure pédagogique générale des établissements d’enseignement du second degré en tenant compte du schéma prévisionnel des formations adopté par le conseil régional. Voici où réside la nouveauté : en plus, l’État devra tenir compte de la carte des formations professionnelles initiales dont la création est prévue dans le projet de loi, l’article 18 précisant qu’elle sera déterminée par la région.
En outre, l’arrêté relatif à la structure pédagogique générale devra désormais être pris en concertation avec la région, après que son avis aura été recueilli.
Aux termes de la rédaction actuelle de l’article L. 211-2 du code de l’éducation, l’État arrête une liste des opérations de construction et d’extension des établissements qu’il s’engage à doter de postes.
Autre nouveauté introduite par l’article 11, l’État devra dorénavant tenir compte des engagements conclus dans le cadre du contrat de plan régional de développement des formations professionnelles, qui est élaboré par la région. Par ailleurs, la convention annuelle État-région devra également être prise en compte. Or l’article 17 du projet de loi prévoit que l’État n’aura plus le dernier mot en cas de désaccord. Ainsi, il ne pourra plus veiller à la continuité du service public de la formation professionnelle.
Il est donc fait maintes fois mention des régions dans un article relatif à la compétence des autorités de l’État sur la structure pédagogique, jusqu’à les rendre omniprésentes. Tout passera désormais par la région, soit pour simple consultation ou avis, soit parce que les décisions de l’État seront liées à des dispositifs au sein desquels la région décide déjà ou est rendue décisionnaire par le projet de loi.
Nous nous opposons donc à l’adoption de l’article 11, qui tend à amoindrir le rôle de l’État au profit de celui de la région. Le rôle de l’État n’y est plus mentionné qu’à propos de la mise en œuvre de la carte des formations, encore est-il subordonné à la région. Selon nous, cela est révélateur de l’orientation de cette réforme : l’État ne définira pas la carte des formations et n’en aura pas la maîtrise ; en fait, il appliquera des décisions régionales.
Pour notre part, nous sommes partisans d’un équilibre entre l’État et la région en matière décisionnaire. Nous estimons que la rédaction actuelle de l’article L. 211-2 du code de l’éducation garantit bien mieux un tel équilibre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Cette question sera abordée lors de l’examen de l’article 18. En attendant, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
J’ai écouté Mme Brigitte Gonthier-Maurin avec beaucoup d’attention, et je me réjouis de constater que nous avons le même objectif : trouver un équilibre entre le rôle de l’État et celui de la région. Je pense que nous pourrons l’atteindre au travers du dispositif de l’article 18.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 95, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 94.
M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 94, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, dans le respect du principe de continuité du service public de l’éducation en matière de formation professionnelle
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ces deux amendements de repli s’inscrivent dans la même logique que le précédent.
L’amendement n° 95 vise à supprimer la phrase suivante : « Cet arrêté est pris après concertation avec la région et recueil de son avis. » En effet, cette phrase confère à la région un rôle plus large encore que les autres dispositions contenues dans cet article et dans les suivants. Nous contestons déjà la compétence accordée à la région en matière de formation professionnelle ; si cette phrase est maintenue, le rôle de la région s’étendra à la définition de la structure pédagogique générale de tous les établissements du second degré.
S’il ne s’agit que de prévoir une concertation avec la région, l’État conservant pour une fois son pouvoir décisionnaire, il ne nous paraît pas opportun, compte tenu du rôle par ailleurs conféré aux régions en matière de formation professionnelle, de faire une nouvelle fois intervenir cette collectivité à un niveau plus large, fût-ce à titre consultatif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements, pour la raison avancée précédemment.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 11.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
I. – Le 5° de l’article L. 211-8 du code de l’éducation est ainsi rédigé :
« 5° Des dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique dans les collèges, les lycées et les établissements d’éducation spéciale dont celles afférentes aux ressources numériques, incluant les contenus et les services, spécifiquement conçues pour un usage pédagogique, ainsi que de la fourniture des manuels scolaires dans les collèges, les établissements d’enseignement agricole mentionnés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime et les établissements d’éducation spéciale et des documents à caractère pédagogique à usage collectif dans les lycées professionnels ; ».
II. – Au dernier alinéa de l’article L. 442-9 du code de l’éducation, les mots : « dépenses pédagogiques » sont remplacés par les mots : « dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique ».
M. le président. L'amendement n° 199, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J. C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à supprimer l’article 12, tendant à récrire l’article L. 211-8 du code de l’éducation en faisant référence à des « dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique ».
L'État prend en charge les dépenses pédagogiques des collèges, des lycées et des établissements d'éducation spéciale dont la liste est arrêtée par décret.
Le fait que ces dépenses pourront viser des outils numériques ne doit pas entraîner une modification de rédaction de cet article, qui supprimerait sans aucun fondement l’écriture de cette liste par décret.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Le Conseil d’État, dans un avis de 1999, a estimé que la liste fixée par décret ne recouvrait pas nécessairement l’ensemble des dépenses pédagogiques à la charge de l’État. Il revient donc au législateur de consolider la répartition existante des compétences, en l’actualisant pour tenir compte du numérique.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. À travers l’examen des articles 12, 13 et 14 du projet de loi, nous poursuivons une discussion qui a été abordée ce matin, notamment par le rapporteur pour avis de la commission des finances, M. Claude Haut.
J’ai souhaité que le projet de loi d’orientation et de programmation – ce point était demandé depuis longtemps – marque une étape décisive dans le renforcement du partenariat qui lie l’éducation nationale avec les collectivités territoriales. Les régions, les départements et les communes sont aujourd'hui totalement investis dans la réussite des élèves – c’est tant mieux ! – et jouent un rôle essentiel dans la vie des établissements.
Lors de la concertation sur la refondation de l’école qui a eu lieu pour préparer ce projet de loi – elle a duré plusieurs mois et a permis d’impliquer tous les acteurs –, chacun est convenu qu’il n’était plus possible de distinguer infrastructures matérielles et immatérielles d’accueil de l’enseignement. Il n’y a donc pas de raison que l’informatique ait un statut différent des autres charges d’investissement supportées par les collectivités territoriales. En ce sens, l’article vise à préciser que la maintenance est liée à l’achat des matériels et des logiciels. Elle devra donc être intégrée dans les marchés d’acquisition ; à cet effet, nous prévoirons des facilités pour les petites communes.
Il convenait de préciser que la maintenance doit être répartie suivant les compétences de chacune des parties. Ce n’était pas le cas auparavant, ce qui a conduit à beaucoup d’équivoques, de querelles de territoires, voire parfois à des abandons. Régions et départements auront à charge les matériels et leur maintenance, l’État les contenus et les services numériques à caractère directement pédagogique.
Cette clarification nécessaire permettra une plus grande cohérence et améliorera la capacité d’action, en particulier des régions. Elle tire en outre les conséquences d’un certain nombre d’évolutions qui ont déjà eu lieu.
Je comprends le souci des collectivités, qui a été exprimé à plusieurs reprises, mais la prise en charge de la maintenance n’appelle pas, par rapport au texte actuellement en vigueur, de transfert de compétences au sens juridique du terme. D’ailleurs, vous le savez, le Conseil d’État, n’a pas émis d’objection quant à cette analyse.
Cela étant, nous restons attentifs à cette question. Je précise également que l’éducation nationale n’envisage de supprimer aucun poste consacré à des activités d’assistance. Nous assumerons totalement, là encore, nos responsabilités.
L’assistance informatique est une responsabilité qui doit être partagée. C’est un point essentiel dans la nouvelle façon de conduire vers le succès, ensemble, l’école de la République. En clarifiant et en précisant les relations entre l’État et les collectivités locales, nous rendons service à tous les acteurs de terrain.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Il était utile d’obtenir ces précisions que tous les élus locaux attendaient. Je le dis sans aucun esprit de polémique, si nous avions eu ces éléments de réponse lors de l’examen du texte en commission, nous n’aurions peut-être pas déposé cet amendement en séance publique.
Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, vos propos sont éclairants. À l’avenir, nous n’hésiterons pas à vous les rappeler en cas de besoin.
Sous le bénéfice de ces précisions, nous retirons notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 199 est retiré.
Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article 12 bis (nouveau)
Le deuxième alinéa de l’article L. 213-1 du code de l’éducation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Un même secteur de recrutement peut être partagé par plusieurs collèges publics situés à l’intérieur d’un même périmètre de transports urbains. »
M. le président. L'amendement n° 353, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Au début de cet alinéa, insérer les mots :
Lorsque cela favorise la mixité sociale,
La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Je profite de l’occasion pour saluer à nouveau le travail accompli par le Sénat, qui a considérablement enrichi le texte. Il est rare qu’un travail parlementaire d’une telle qualité s’effectue à la fois en commission et en séance, qui plus est sur des sujets qui ne sont pas toujours simples.
L’article 12 bis, conformément au souhait qui a été le vôtre, madame la rapporteur, vise à introduire dans le projet de loi une disposition permettant à plusieurs collèges de partager un même secteur de recrutement. Cette mesure fait d’ailleurs suite à un rapport sénatorial que vous aviez piloté.
Le Gouvernement se félicite de cet ajout qui va dans le sens que nous souhaitons : améliorer la réussite de tous les élèves. Il convient cependant de préciser la rédaction de l’article pour que cette possibilité nouvelle de regroupement serve bien à des fins de mixité sociale. En effet, il ne faudrait pas que votre intention louable entraîne des effets pervers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission a émis un avis favorable.
Je me félicite de cette précision rédactionnelle et de la coconstruction du texte autour d’un objectif qui nous tient à cœur : la mixité sociale.
M. le président. Je mets aux voix l'article 12 bis, modifié.
(L'article 12 bis est adopté.)
Article 13
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article L. 213-2 du code de l’éducation est ainsi rédigé :
« Le département a la charge des collèges. Il en assure la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement. À ce titre, l’acquisition et la maintenance des infrastructures et des équipements, dont les matériels informatiques et les logiciels prévus pour leur mise en service, nécessaires à l’enseignement et aux échanges entre les membres de la communauté éducative sont à la charge du département. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 13, présenté par Mme Campion, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 2, deuxième phrase
Remplacer les mots :
et le fonctionnement
par les mots :
, le fonctionnement et l’accessibilité
La parole est à Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis.
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Depuis les lois de décentralisation de 1982 et de 1983, les départements sont chargés de la construction, de l’équipement et du fonctionnement des collèges.
Comme tous les établissements recevant du public, les collèges sont soumis à l’obligation d’accessibilité prévue par la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Les travaux de mise en accessibilité incombent aux départements en tant que collectivités gestionnaires de ces établissements scolaires. Cet amendement entend le rappeler à l’occasion de l’article 13 du présent projet de loi, qui énumère les compétences des départements s’agissant des collèges.
M. le président. L'amendement n° 48 rectifié, présenté par MM. Guerriau, J.L. Dupont et Merceron, est ainsi libellé :
Alinéa 2, deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, dans une logique d’accessibilité universelle
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 13 ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Comme vous l’avez indiqué, madame la rapporteur pour avis, les collèges sont soumis à l’obligation d’accessibilité. Il était bon de le rappeler, mais, dans la mesure où votre amendement est satisfait par le droit en vigueur, la commission vous demande de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Les établissements scolaires sont bien évidemment soumis au code de la construction et de l’habitation, qui, depuis la loi de 2005, prévoit que les établissements recevant du public doivent être « accessibles à tous, et notamment aux personnes handicapées ».
L’obligation posée par la loi du 11 février 2005 s’impose depuis le 1er janvier 2007 pour la construction de tous les nouveaux bâtiments scolaires. Les bâtiments existants, quant à eux, devront être mis en conformité avec cette obligation avant le 1er janvier 2015. En l’occurrence, nous constatons les problèmes de mise en œuvre et le retard pris, et je sais que les charges qui incombent aux collectivités locales sont souvent soulignées dans cette assemblée.
Quoi qu’il en soit, nous sommes pleinement mobilisés, en particulier avec la ministre déléguée chargée de la réussite éducative, pour que l’école inclusive ne soit pas une simple déclaration d’intention.
M. le président. Madame la rapporteur pour avis, l’amendement n° 13 est-il maintenu ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis. Je remercie M. le ministre des précisions qu’il a bien voulu apporter, ainsi que de la volonté forte qu’il a manifestée en faveur de l'école inclusive. Nous attendons en effet tous qu’elle soit davantage mise en œuvre à l'occasion de ce texte.
La loi de 2005 prévoit effectivement l’obligation d’accessibilité. Il ne me paraît cependant pas inutile de rappeler à l’article 13 les obligations qui incombent aux départements dans la mesure où celles qui sont énumérées dans cet article figurent déjà dans d'autres textes de loi, votés et appliqués depuis longtemps. Je maintiens donc mon amendement afin que l’exigence d’accessibilité soit également inscrite dans le code de l’éducation via l'article 13 de ce projet de loi important.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. J’évoquerai à nouveau la mémoire de Rousseau : la loi part de tous et s’applique à tous.
L'éducation nationale n'est pas un empire dans un empire. Elle se soumet aux lois. Or il est problématique d’inscrire plusieurs fois la même obligation dans différents textes de loi.
Certains groupes, qui sont favorables à l'école inclusive, pourraient être amenés à rejeter cet amendement pour des raisons purement techniques et juridiques. Ce n’est pas souhaitable ! Voilà pourquoi, madame la rapporteur pour avis, je vous demande à nouveau de bien vouloir le retirer.
M. le président. Madame la rapporteur pour avis, que décidez-vous ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis. Je vais répondre à votre attente, monsieur le ministre, en retirant cet amendement, car je connais la volonté très forte du Gouvernement et du Premier ministre, à qui j’ai remis il y a quelques mois un rapport dans le cadre de la mission temporaire qu’il m’avait confiée sur l’accessibilité des personnes handicapées. Je n’ignore pas ses convictions et combien il se préoccupe de ces questions. Reste que nous devrions aller plus loin.
M. le président. L'amendement n° 13 est retiré.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l'article.
M. René-Paul Savary. Que l’obligation de mise aux normes pour les départements figure ou non dans l’article ne nous pose pas un énorme problème. En tout cas, je remercie Mme Campion d’avoir rappelé que les départements se soumettent naturellement à cette obligation lors de la rénovation des collèges.
Les départements ont d’ailleurs fait des efforts considérables pour la rénovation des collèges. Tant mieux pour ceux d’entre eux qui l’ont fait lorsqu'ils en avaient la possibilité financière ; je plains ceux qui n'ont pas suffisamment rénové à temps leurs collèges : ils ont pris un retard considérable, qui les handicapera. Ils sont quelques-uns dans ce cas…
Je voudrais également insister sur les charges supplémentaires liées au numérique.
Dans les collèges, les départements n'ont pas attendu la loi pour investir, car ils sont particulièrement conscients de l'intérêt des nouvelles technologies pour les élèves. Reste qu’il ne s’agira plus dorénavant d’une action volontaire, mais d’une obligation. Or c’est sans compensation que cette charge supplémentaire est officiellement confiée au département. J'appelle votre attention sur ce point, car nous ne pouvons pas toujours équiper nos collèges comme nous le souhaiterions. J’en veux pour preuve le département de la Marne – je parle sous l’autorité de Mme Férat, qui en est l’un des conseillers généraux –, où nous essayons d’équiper en tableaux numériques le maximum de collèges, mais, faute de moyens, nous devons prévoir des plans pluriannuels. Cette situation est navrante !
Sachez que nous sommes obligés de lisser dans le temps la rénovation des collèges. Dans mon département, il en reste sept à rénover : cela prendra deux fois plus de temps que prévu initialement, car je ne peux plus faire rénover un collège par an comme avant. Je rappelle que, pour un établissement de 600 élèves, le coût est de l’ordre de 15 à 20 millions d’euros.
On le voit, il reste un travail considérable à réaliser. Les collectivités locales sont prêtes à participer, mais encore faudrait-il leur en donner les moyens. Sinon nous serons tous déçus des résultats obtenus au regard de l’avancée que vous proposez dans votre projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’article 13 et son pendant pour les lycées, l’article 14, touchent à l’ossature même du service public du numérique éducatif évoqué à l’article 10. Nous abordons ici la question de l’équipement informatique des collèges et des lycées.
Faire entrer l’école dans l’ère du numérique est un objectif partagé par nombre de collectivités territoriales, départements comme régions. Ces collectivités ont d’ailleurs œuvré, parfois de concert, pour proposer aux communautés éducatives des collèges et des lycées des outils et des équipements leur permettant de développer les usages du numérique, et ce sans que la loi les y oblige. En effet, la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales pour l’acquisition et la maintenance des matériels informatiques est pour le moins ambiguë. La Cour des comptes relevait ainsi en 2003 qu’« aucune règle ne fixe précisément les compétences des services académiques, des collectivités et des établissements eux-mêmes en matière de maintenance et surtout de renouvellement des équipements ».
Les articles 13 et 14 remédient à cette ambiguïté en inscrivant dans la loi la compétence des départements et des régions, et donc leur responsabilité financière, pour « l’acquisition et la maintenance des infrastructures et des équipements, dont les matériels informatiques et les logiciels prévus pour leur mise en service ».
La mise en place de ces nouvelles dispositions doit permettre de faire entrer l’école dans l’ère du numérique, à condition que les collectivités disposent des ressources suffisantes pour s’emparer de cette compétence. Or ce transfert, et plus singulièrement celui qui concerne la maintenance, se fait sans transfert effectif des ressources associées.
Je sais que les associations d’élus que sont l’Assemblée des départements de France et l’Association des régions de France vous ont interpellé, monsieur le ministre, sur cette question : elles voient dans cette situation un transfert de compétences non compensé là où vous avancez l’idée d’une simple clarification.
Pour autant, se pose la question des modalités techniques et financières permettant de garantir le respect du principe d’égalité, qui est un principe fondateur de notre école de la République, pour chaque établissement, chaque élève et chaque famille, et ce avec d’autant plus d’acuité que les collectivités sont confrontées, elles aussi, à l’austérité budgétaire. Je ne rappellerai pas ici une fois encore la coupe claire que l’on s’apprête à leur faire subir d’ici à 2015.
Les précédents mouvements de décentralisation l’ont montré : l’absence d’attribution claire des responsabilités et de moyens suffisants accroît les inégalités territoriales et est source d’inefficacité, d’incompréhensions et de coûts de gestion inutiles. C’est pourquoi la définition du périmètre d’intervention que recouvre la notion de maintenance doit être clairement établie, d’autant que la prise en charge de cette mission varie d’un établissement à l’autre : elle peut relever d’enseignants bénévoles, de personnels techniques de l’État comme les TEPETA – les techniciens des établissements publics de l’enseignement technique agricole – dans les lycées agricoles, de personnels TOS – techniciens, ouvriers et de service –, de contractuels,...
Si la circulaire de rentrée place les collectivités aux côtés des académies comme « partenaires de la réussite d’une ambition numérique », elle ne dit rien sur ce point spécifique. Il faudrait pourtant que les collectivités soient pleinement associées à l’élaboration d’un référentiel technique et fonctionnel national qui permettrait d’assurer l’articulation harmonieuse des actions de chacun. En effet, dans cette affaire, on ne peut ignorer que tout le monde n’aura pas la même force de frappe !