M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. David Assouline, vice-président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Nous sommes souvent tentés d’inscrire des garanties dans les textes. Ce peut être utile, mais, en l’occurrence, les explications du ministre devraient suffire. Brigitte Gonthier-Maurin, à ce titre, conforte le réflexe premier de la commission et agit dans un souci de protection.

Certes, si ajouter cette précision ne mangeait pas de pain et rassurait, ce qui est votre objectif, nous pourrions, dans un esprit de concorde et de rassemblement, répondre : pourquoi pas ? Mais le ministre affirme – et c’est un élément tout à fait nouveau par rapport au débat que nous avons eu en commission – que cette mention pourrait compromettre certaines collaborations – c’est le terme qu’il a employé – et permettre à des collectivités de se désengager. Il n’est qu’à voir l’esprit de certains...

Si c’est le cas, il y a là un vrai sujet.

La rédaction actuelle de l'article 10 n’exonère en rien l’État des missions qui lui incombent. L’État ne se défausse pas : n’est-il pas en train d’accomplir ce qui n'a pas jamais été fait jusqu'à présent ? (M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.)

Mme Françoise Férat. Il faut arrêter avec cela !

Mme Catherine Morin-Desailly. C'est caricatural !

M. David Assouline, vice-président de la commission de la culture. Aujourd'hui, sur le numérique, il ne s'agit pas simplement de faire mieux qu'avant ! C'est le seul domaine où, en matière de connaissances comme d’apprentissages, les enfants se forment sans le truchement de l'éducation nationale ou de la famille, car les parents sont dépassés ! En d’autres termes, les connaissances, les savoirs que les enfants acquièrent, les mauvaises influences qu’ils subissent, tout cela se fait hors de tout contrôle, parce que les enfants maîtrisent un outil que ceux-là mêmes qui doivent éduquer ne se sont pas approprié.

L'éducation nationale en a conscience et « met le paquet » : le fonds Gallois, les fonds européens sont mobilisés, une direction centrale du ministère est créée, une unification est prévue, et pour revenir au texte, une loi de refondation qui consacre un article au numérique éducatif.

La question n’est donc pas de savoir si l’État cherche à se défausser sur les collectivités territoriales. C’est tout le contraire que prévoit cet article ! L’État assume ce qui lui incombe, parce que les collectivités territoriales ont commencé à s’engager.

M. Bruno Sido. On verra !

M. David Assouline, vice-président de la commission de la culture. Nous sommes assurément sur la bonne voie.

Il faut soutenir le ministre quand il défend sa vision du numérique éducatif et qu’il avance l’argument du danger que ferait courir cette précision : elle risquerait de compromettre des projets de collaboration, notamment avec les musées.

M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.

Mme Colette Mélot. Nous en sommes tous persuadés, et moi la première, le numérique est une véritable révolution.

Monsieur le ministre, nous prenons acte de votre engagement. Nous devons nous mettre d'accord et travailler tous ensemble. Mais, de grâce, nous ne sommes tout de même pas passés de l'obscurité à la lumière ! D’aucuns prétendent qu'il ne se passait rien et que, tout à coup, le problème est pris à bras-le-corps. Non !

M. David Assouline, vice-président de la commission de la culture. Je n’ai pas dit cela : on a changé de dimension...

Mme Colette Mélot. Il faut reconnaître que les progrès sont flagrants, mais nous sommes au début d'une nouvelle ère et il faut que les choses se mettent en place.

Toutes les communes de France n'ont du reste pas les mêmes équipements, certaines n'ont pas encore le haut débit, petit à petit la fibre optique est installée. Par conséquent, des disparités entre communes demeurent qui se retrouvent aussi dans les écoles.

Nous savons tous que les collectivités territoriales – communes, départements, régions – ont beaucoup investi et veulent avancer. Il faut saluer tous les efforts qui sont accomplis et qui continueront à l’être. La confiance doit primer. Ce projet, nous pouvons le porter tous ensemble : ce n'est pas une question de couleur politique. Nous avons confiance dans l'avenir du numérique.

Monsieur le ministre, dans quelque temps, nous dresserons un premier bilan et nous saurons si ce grand service public du numérique éducatif aura permis des avancées.

M. Vincent Peillon, ministre. Oui, nous évaluerons !

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. En vérité, nous sommes en train de faire en séance publique un travail de commission ! Tel qu’il est rédigé, l'article 10 comporte une ambiguïté profonde.

Il est incontestable que l'enseignement à distance est une charge exclusive de l'État. Sur ce sujet, je soutiens tout à fait l'analyse du groupe CRC. En effet, l’isolement des élèves et leur dispersion sur le territoire et au-delà entraînent deux conséquences pratiques : d’une part, ils ne sont rattachés à aucune collectivité locale ; d'autre part, ils ont besoin d'une pédagogie adaptée à leur isolement, j'allais dire à leur solitude.

Monsieur le ministre, vous proposez dans le même syntagme « un service public du numérique éducatif et de l'enseignement à distance », alors qu’il s'agit de deux objectifs totalement différents.

L’enseignement à distance est spécifique. Quant à l'enseignement éducatif numérique, il est évidemment nécessaire, nous sommes tous d'accord. Nous connaissons tous les efforts qui sont consentis et les difficultés auxquelles nous devons faire face. Nous savons tous que l'État doit s’impliquer pour promouvoir les bonnes pratiques, confronter les expériences et négocier – j'insiste sur ce mot – avec les collectivités et leurs associations, l'Association des régions de France, l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France, mais aussi l'Assemblée des communautés de France, puisque, de plus en plus, l'enseignement élémentaire est pris en charge par des intercommunalités.

Or cette négociation ne figure pas dans l'article 10. Au contraire, la confusion demeure entre ce qui est incontestablement à la charge exclusive de l'État, à savoir l’enseignement à distance, et ce que l'État partage avec les collectivités, à savoir l'enseignement numérique pour tous les élèves scolarisés dans des classes, qui n’obéit pas aux mêmes règles.

C'est la raison pour laquelle ce malentendu et ce malaise ne se dissipent pas. Nous avons le sentiment que, au nom de l'un, on fait passer l'autre. Tant que cette conférence, cette rencontre nationale n'aura pas été organisée, nous garderons cette attitude de défiance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Claude Haut, pour explication de vote.

M. Claude Haut. Au cours de la discussion générale, j’ai, au nom de la commission des finances, pointé certaines ambiguïtés dans la répartition des compétences entre l'État et les collectivités. Le débat que nous avons sur l'article 10 est très intéressant et nous a permis de répondre à certaines interrogations. Certains doutent encore, d'autres sont rassurés.

Monsieur le ministre, lorsque vous avez parlé de coopération avec les collectivités locales, vous avez pris un certain nombre d’engagements qui me semblent particulièrement encourageants et permettent déjà, pour peu que l’on vous fasse confiance, de clarifier la répartition des compétences.

Notre souci majeur sera désormais de poursuivre dans cette voie, car il faut que l'État continue à apporter les éclaircissements nécessaires sur certains points de droit. La Cour des comptes a déjà relevé qu'aucune règle ne fixait précisément les compétences des services académiques, des collectivités et des établissements eux-mêmes en matière de maintenance et de renouvellement des équipements. Sur ce sujet, une mise au point sera bienvenue et, à l'avenir, le ministère aura tout son rôle à jouer.

M. Bruno Sido. Absolument !

M. Claude Haut. Contrairement à d'autres, monsieur le ministre, je trouve vos engagements rassurants.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. La discussion qui a lieu me conforte dans l’idée qu’il est nécessaire, comme je le propose dans mon amendement, de substituer aux mots « service public » l’expression « mission de service public ».

Nous partageons l'ambition du ministre : le numérique est un enjeu majeur et l’outil doit absolument être introduit à l'école. Cependant, les choses ne sont pas encore mûres et n'ont pas été pleinement discutées pour que nous ayons l’assurance que les collectivités, en partenariat avec l'État, s'impliqueront dans ce vaste chantier.

On peut faire le rapprochement avec ce qui s'est passé pour les rythmes scolaires ! Il faut prendre le temps de mesurer comment les différents acteurs pourront s'engager avant de prendre une quelconque décision. L’inquiétude de nos collègues qui représentent ici les territoires persiste, malgré les éclaircissements que vous avez apportés, monsieur le ministre.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 386.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 385, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 3 et 4

Rédiger ainsi ces alinéas :

« 1° Mettre à disposition des écoles et des établissements scolaires des services numériques permettant de prolonger l’offre des cours qui y sont dispensés, d’enrichir les modalités d’enseignement et de faciliter la mise en œuvre d’une aide personnalisée à tous les élèves ;

« 2° Proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques, des contenus et des services, contribuant à leur formation ainsi que des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec les familles ;

II. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa

« 4° Contribue au développement de projets innovants et à des expérimentations pédagogiques favorisant les usages du numérique à l’école et la coopération.

La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Cet amendement vise à améliorer la rédaction de l'article 10 à la suite des nombreux apports de la commission.

Il s’agit à la fois d’éviter les répétitions, trop nombreuses dans l’actuelle version des alinéas 3 et 4, et de regrouper ce qui relève de l’innovation et de l'expérimentation.

Pour davantage de cohérence, nous proposons de déplacer la mention de l’innovation et des expérimentations pédagogiques favorisant la coopération – il ne serait pas inutile, d’ailleurs, que les collectivités locales puissent participer à cette innovation, mais je ne reviens pas sur le débat quelque peu absurde auquel a donné lieu l'amendement précédent ! – à l’alinéa 6, consacré au « développement de projets innovants favorisant les usages pédagogiques du numérique ».

M. le président. L'amendement n° 64, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

Proposer aux enseignants

par les mots :

Inciter les enseignants à avoir recours à

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement s’inscrit dans le droit fil de celui que nous avons déposé à l'article 6 sur l'éducation artistique et culturelle. Il a pour objet de montrer notre volontarisme sur les missions confiées à l'école en matière d'introduction du numérique.

La substitution du mot : « inciter » au mot : « proposer » témoignerait du réel engagement de l’État dans la formation initiale et continue des enseignants au numérique, formation aujourd’hui très incomplète, voire inexistante. Si l’on met en place ces outils, c’est bien dans le but d’inciter les enseignants – et non pas de les y obliger – à recourir à cette offre diversifiée de ressources pédagogiques. Cette démarche, mesurée, nous apparaît comme plus volontariste.

M. le président. L'amendement n° 198, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot :

pédagogiques

insérer les mots :

, respectant leur liberté de choix,

La parole est à M. Jacques Legendre.

M. Jacques Legendre. La promotion du numérique éducatif va conduire à proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques. Cela ne doit pas remettre en cause leur liberté pédagogique. S’agissant des manuels scolaires, la règle a toujours été que les enseignants disposent d’une liberté de choix ; il est utile de rappeler qu’ils doivent conserver cette même liberté dans le choix des ressources pédagogiques utilisées pour promouvoir le numérique éducatif.

Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 385 du Gouvernement, qui est un amendement rédactionnel. Cependant, il lui paraîtrait préférable de mentionner, à l’alinéa 3, « l’offre des enseignements » en lieu et place de « l’offre des cours ».

S’agissant de l’amendement n° 64, la commission considère que le rôle du service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance dans ce domaine est bien de proposer des ressources numériques aux enseignants. Aussi, la commission émet un avis défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 198, la liberté des enseignants pour le choix de leurs supports pédagogiques, qui existe depuis 1880, n’est en aucune manière remise en cause s’agissant des ressources numériques. La précision proposée alourdirait donc inutilement la rédaction de l’article.

Je rappelle également que, sur l’initiative de la commission, cette précision a été introduite à l’alinéa 165 du rapport annexé.

Aussi, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Monsieur le ministre, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même si cette rectification n’est pas très heureuse sur le plan stylistique, car elle introduit une répétition, j’accède à la demande de la commission, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 385 rectifié, présenté par le Gouvernement, et qui est ainsi libellé :

I. – Alinéas 3 et 4

Rédiger ainsi ces alinéas :

« 1° Mettre à disposition des écoles et des établissements scolaires des services numériques permettant de prolonger l’offre des enseignements qui y sont dispensés, d’enrichir les modalités d’enseignement et de faciliter la mise en œuvre d’une aide personnalisée à tous les élèves ;

« 2° Proposer aux enseignants une offre diversifiée de ressources pédagogiques, des contenus et des services, contribuant à leur formation ainsi que des outils de suivi de leurs élèves et de communication avec les familles ;

II. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa

« 4° Contribue au développement de projets innovants et à des expérimentations pédagogiques favorisant les usages du numérique à l’école et la coopération.

Monsieur le ministre, quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 64 et 198 ?

M. Vincent Peillon, ministre. Avis défavorable !

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Monsieur le ministre, fort heureusement, la liberté pédagogique est la règle, et depuis très longtemps. Mais là, nous sommes confrontés à une situation nouvelle : l’enseignant devra choisir entre les nouveaux instruments proposés par l’État et d’autres instruments disponibles par ailleurs. Le risque existe donc bien d’une remise en cause de la liberté pédagogique des enseignants. C’est pourquoi il n’est ni inutile ni redondant que cette liberté de choix soit rappelée dans la loi.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 385 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 64 et 198 n'ont plus d'objet.

L'amendement n° 65 rectifié, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :

, notamment ceux à besoins éducatifs particuliers. Des supports numériques adaptés peuvent être fournis en fonction des besoins spécifiques de l’élève ;

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Nous sommes tous d’accord pour considérer que cette nouvelle mission du service public du numérique éducatif confiée à l’éducation nationale doit permettre l’inclusion de tous les élèves.

Au-delà de la révolution technologique qui nous touche tous, qui touche toutes les familles, de nombreux nouveaux outils spécifiques peuvent être utilisés pour l’intégration des enfants en situation de handicap. Le groupe UDI-UC a déposé un certain nombre d’amendements ayant pour objet d’améliorer encore et toujours la prise en compte du handicap à l’école.

Le présent amendement vise à mobiliser l’outil numérique pour l’éducation des enfants éloignés des bancs de l’école qui connaissent en outre des difficultés d’apprentissage. Il vise bien sûr essentiellement à garantir à ces enfants une mobilisation optimale de l’outil numérique.

Il existe d’ores et déjà des outils qui permettent par exemple à des enfants dyslexiques ou ayant des difficultés d’audition de lire des documents numériques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Du fait de la nature même des missions qui lui sont confiées, le service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance répond à l’exigence formulée dans le présent amendement. C’est également le sens de la réforme ambitieuse entreprise par la direction du CNED à la faveur du développement de ses supports éducatifs numériques.

La commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Je vais finir par croire que la commission est de parti pris sur les amendements qu’a déposés mon groupe !

Il n’est pas inutile, bien au contraire, que la loi précise une nouvelle fois quelles sont les exigences et les ambitions en matière d’inclusion à l’école des enfants porteurs de handicap, qu’ils soient scolarisés en établissement ou qu’ils bénéficient d’un enseignement à distance. Ces nouveaux outils numériques s’inscrivent dans une mutation majeure.

Hier, nous avons eu des débats importants au cours desquels Mme Campion a rappelé combien il était difficile de faire appliquer la loi de 2005, combien il était difficile d’intégrer ces enfants de manière satisfaisante. Je le répète, madame le rapporteur, il est essentiel de rappeler dans la loi l’exigence d’intégration de ces enfants.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Françoise Cartron, rapporteur. Madame Morin-Desailly, l’article 3 A, que nous avons adopté, dispose que le système éducatif a comme objectif majeur « l’inclusion scolaire de tous les enfants ». C’est ce principe fondateur que nous avons voté. C’est dit, c’est écrit, c’est voté ! Par conséquent, vous ne pouvez pas nous reprocher d’adopter une attitude sectaire. Tout simplement, la disposition que vous proposez d’introduire est redondante ; il n’est pas utile d’y revenir à chaque instant.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 65 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Article 10
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République
Articles additionnels avant l'article 11

Articles additionnels après l'article 10

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 91, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les articles L. 133-1, L. 133-2, L. 133-3, L. 133-4, L. 133-5, L. 133-6, L. 133-7, L. 133-8, L. 133-9, L. 133-10, L. 133-11 et L. 133-12 du code de l’éducation sont abrogés.

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Cet amendement vise à abroger les dispositions issues de la loi de 20 août 2008 instituant « un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire ».

Brigitte Gonthier-Maurin avait défendu, au nom de mon groupe, dans cet hémicycle, en janvier 2009, une proposition de loi abrogeant le service minimum d’accueil en cas de grève, soutenue à l’époque par l’ensemble de l’opposition de gauche.

Ce texte faisait suite à l’adoption, dès l’été 2007, de la loi relative au « service minimum » dans les transports terrestres.

Ces deux textes, puis la proposition de loi relative au « service minimum » dans les transports aériens, votée en mars 2012, en fin de législature, ont été autant de symboles du mépris du Président Sarkozy envers les corps intermédiaires, dont les syndicats, et de la volonté de casser toute action collective. D’où cette attaque contre le droit de grève, moyen d’expression ultime des salariés.

La gauche, alors dans l’opposition, était convenue que, loin de renforcer le dialogue social et le service public, ces lois constituaient une atteinte inadmissible au droit de grève.

Concernant le service minimum d’accueil, nous avions également tous pointé les multiples difficultés d’application et d’organisation matérielle pour les communes, notamment celles de moins de 2 000 habitants, confrontées à un vivier insuffisant de personnes capables de participer au service minimum d’accueil, soit un adulte pour garder vingt enfants, à l’impossibilité de recenser les compétences professionnelles des personnes requises par les maires, à l’impossibilité aussi, dans beaucoup de cas, d’assurer le service de restauration des enfants, autant de problèmes concrets qui subsistent aujourd’hui ! Et nous avions dénoncé le fait que la loi n’exigeait au final ni taux d’encadrement ni qualification particulière.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi, une jurisprudence administrative semble se dégager : un refus de principe d’appliquer le service minimum d’accueil pourra être, en urgence, suspendu et la commune enjointe de l’organiser en lien avec l’État. Cependant, les maires rencontrant des difficultés d’organisation ponctuelles et matérielles, dûment établies, pourront se permettre de ne pas l’organiser.

C’est donc bien le règne du flou et de l’inégalité, pour ce qui avait été présenté aux parents comme un « droit d’accueil » de leurs enfants.

Si le Gouvernement a dit vouloir faire du dialogue social sa marque de fabrique, il nous semble au préalable important de rétablir la confiance, une confiance indispensable pour mener à bien les réformes, ce qui est d’autant plus nécessaire dans le cas de l’école.

La restauration de cette confiance avec les personnels de l’éducation nationale nous semble donc prendre toute sa place dans un projet de refondation de l’école.

M. le président. L'amendement n° 92, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre III du titre III du livre Ier de la première partie du code de l'éducation est complétée par un article L. 133–... ainsi rédigé :

« Art. L. 133–... Le Gouvernement établit un rapport évaluant l’impact des dispositions de la loi n° 2008–790 instituant un service minimum à l’école. Ce rapport est remis au plus tard le 31 décembre 2013 aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il donne lieu à un débat en séance publique. »

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Cet amendement de repli vise à ce que, à défaut d’une suppression des dispositions de la loi instituant un service minimum à l’école en cas de grève, nous puissions en évaluer l’impact.

Nous demandons qu’un rapport à cette fin soit remis au plus tard le 31 décembre 2013 aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat et qu’il donne lieu à un débat en séance publique.

Pour mémoire, l’article 14 de la loi prévoyait que le Gouvernement déposerait, avant le 1er septembre 2009, sur le bureau des assemblées, un rapport retraçant notamment les difficultés matérielles rencontrées par les communes pour l’organisation du service d’accueil. Ce rapport a tout simplement été oublié !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Françoise Cartron, rapporteur. En présentant son amendement n° 91, M. Billout a pointé les difficultés qui lui ont été signalées auxquelles donne lieu l’application du service minimum d’accueil. Avant une éventuelle abrogation, nous souhaitons disposer d’une évaluation précise de ces difficultés, recenser les charges supportées par les collectivités. Aussi, la commission émet un avis défavorable.

Par l’amendement n° 92, cher collègue, vous souhaitez que le Gouvernement établisse un rapport d’évaluation de la loi instituant un service minimum d’accueil. En commission, nous vous avions demandé d’apporter deux rectifications : d’une part, reporter au 31 décembre 2014 la date ultime pour la remise de ce rapport ; d’autre part, supprimer les mots : « il donne lieu à un débat en séance publique », puisque cette disposition relève d’une loi organique.

Sous réserve de cette double rectification, à laquelle il n’a pas encore été procédé, je le constate, la commission émet un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Nous avons demandé le rapport visé à l’amendement n° 92. Ce rapport, qui a été rédigé conjointement par l’Inspection générale de l’administration et l’Inspection générale de l’éducation nationale, a été remis très récemment et il sera rendu public. Il s’agit d’évaluer la mise en place du service d’accueil minimum.

La mission conjointe des deux inspections générales conclut qu’il n’est pas nécessaire de revenir sur ce dispositif, qui, malgré des difficultés d’application, a permis de soulager un certain nombre d’usagers du service public, sans pénaliser gravement les personnels en termes d’exercice du droit de retrait ou du droit de grève.

Les deux inspections générales formulent quelques recommandations visant à améliorer le service d’accueil minimum. Nous allons bien entendu y donner suite. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable aux deux amendements. Il communiquera le rapport en question aux deux assemblées le plus rapidement possible.