Sommaire
Présidence de M. Jean-Léonce Dupont
Secrétaires :
MM. Jean Boyer, Alain Dufaut.
3. Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité
4. Refondation de l’école de la République. – Suite de la discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission
Discussion générale (suite) : Mmes Marie-Annick Duchêne, Dominique Gillot, MM. Michel Savin, David Assouline, Serge Dassault, Mme Claudine Lepage, M. Raymond Couderc, Mme Françoise Laurent-Perrigot, MM. Maurice Antiste, Jean-Étienne Antoinette.
M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale.
Clôture de la discussion générale.
Motion no 165 de M. Jacques Legendre. – Mme Sophie Primas.
PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud
Mmes Françoise Laborde, Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture ; MM. Vincent Peillon, ministre ; Jacques-Bernard Magner, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, Corinne Bouchoux, Catherine Morin-Desailly. – Rejet, par scrutin public, de la motion.
PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume
Demande de renvoi à la commission
Motion no 166 de M. Jacques Legendre. – Mmes Colette Mélot, Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture ; la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet par scrutin public.
Article 1er et rapport annexé (réservés jusqu’à la fin de la discussion des articles)
Article additionnel avant l’article 3 A
Amendement n° 35 rectifié de M. Jean-Claude Carle. – M. Jean-Claude Carle, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Michel Le Scouarnec, Roland Courteau, Vincent Peillon, ministre ; Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée chargée de la réussite éducative.
Amendement n° 288 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Adoption.
Amendement n° 81 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – M. Michel Le Scouarnec, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.
MM. Gérard Longuet, Vincent Peillon, ministre.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (suppression maintenue)
Articles additionnels après l'article 3 bis
Amendement n° 381 du Gouvernement. – M. Vincent Peillon, ministre ; Mmes la rapporteur, Sophie Primas, M. Gérard Longuet, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jacques Legendre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 289 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.
Amendement n° 144 rectifié de Mme Marie-Annick Duchêne. – M. Jean-Pierre Chauveau, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre ; Mme Sophie Primas, M. Gérard Longuet. – Rejet.
Adoption de l'article.
Article 4 bis A (nouveau). – Adoption
Article additionnel après l'article 4 bis A
Amendement n° 325 de Mme Dominique Gillot. – Mmes Dominique Gillot, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.
MM. Georges Labazée, Christian Favier.
Amendement n° 188 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre ; Mme Maryvonne Blondin, M. Michel Savin. – Retrait.
Amendement n° 83 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Adoption.
Amendement n° 355 rectifié de Mme Maryvonne Blondin. – Mme Maryvonne Blondin.
Amendement n° 528 de la commission. – Mme la rapporteur.
Mmes la rapporteur, George Pau-Langevin, ministre déléguée ; Maryvonne Blondin. – Rectification de l’amendement n° 355 rectifié ; adoption de l’amendement n° 355 rectifié bis, l’amendement n° 528 devenant sans objet.
Amendement n° 354 de Mme Maryvonne Blondin. – Mmes Maryvonne Blondin, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Adoption.
Amendement n° 376 du Gouvernement. – M. Vincent Peillon, ministre ; Mme la rapporteur. – Adoption.
Amendement n° 189 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 4 ter
Amendement n° 323 rectifié de Mme Dominique Gillot. – Mmes Dominique Gillot, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.
Amendement n° 324 rectifié de Mme Dominique Gillot. – Mmes Dominique Gillot, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Retrait.
Amendement n° 12 de Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis. – Mmes Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; René-Paul Savary, Mmes Annie David, présidente de la commission des affaires sociales ; Catherine Morin-Desailly. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
5. Mise au point au sujet d'un vote
MM. Maurice Antiste, le président.
7. Candidature à un organisme extraparlementaire
8. Communication relative à une commission mixte paritaire
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Raffarin
10. Nomination à un organisme extraparlementaire
11. Refondation de l’école de la République. – Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
MM. Roland Courteau, Pierre Martin, Georges Patient, Michel Le Scouarnec, Mme Catherine Morin-Desailly.
Amendement n° 190 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre.
Amendement n° 22 rectifié de M. Michel Savin. – M. Michel Savin.
Amendement n° 377 du Gouvernement. – M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale.
Mme Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture ; MM. Jean-Claude Lenoir, Jacques Legendre, Jacques-Bernard Magner, Vincent Peillon, ministre. – Rejet des amendements nos 190 et 22 rectifié ; adoption de l’amendement n° 377.
M. Claude Haut, rapporteur pour avis de la commission des finances. – Retrait de l’amendement n° 30.
Amendement n° 85 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – M. Michel Le Scouarnec, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre ; Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Retrait.
Amendement n° 340 du Gouvernement. – M. Vincent Peillon, ministre ; Mme la rapporteur. – Adoption.
Amendement n° 84 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – M. Michel Le Scouarnec, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.
Amendement n° 181 de M. Ronan Dantec. – M. Joël Labbé, Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre ; Mme Sophie Primas. – Rejet.
Amendement n° 191 rectifié de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre, Mme la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; Dominique de Legge, Pierre Martin, Mme Dominique Gillot, M. Joël Guerriau. – Adoption.
Amendement n° 532 de la commission. – Mme la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 5
Amendement n° 266 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Mme Françoise Laborde.
Amendement n° 454 de M. Jacques Legendre. – M. Jacques Legendre.
Mme la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; Michel Savin, Jean-Claude Lenoir, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jacques Legendre, Mme Annie David. – Rectification de l’amendement n° 266 rectifié ; adoption de l’amendement n° 266 rectifié bis insérant un article additionnel. , l’amendement n° 454 devenant sans objet.
Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jean-Étienne Antoinette, Mme Annie David, M. Jacques-Bernard Magner.
Amendement n° 306 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Mmes Françoise Laborde, la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; Jean-Claude Lenoir, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Joël Guerriau, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. – Rejet.
Amendement n° 57 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Catherine Morin-Desailly, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.
Amendement n° 86 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Mmes Annie David, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jacques-Bernard Magner, Mmes Sophie Primas, la présidente de la commission, M. Jacques Legendre. – Adoption par scrutin public.
Amendement n° 59 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Catherine Morin-Desailly, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.
Amendement n° 58 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Catherine Morin-Desailly, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.
Amendement n° 395 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Catherine Morin-Desailly, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Rejet.
Amendement n° 169 de Mme Corinne Bouchoux. – Mmes Corinne Bouchoux, la rapporteur, M. Vincent Peillon, ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 192 de M. Jacques Legendre. – M. Michel Savin.
Amendement n° 356 rectifié de M. Jean-Jacques Lozach. – M. Jacques-Bernard Magner.
Amendement n° 60 rectifié de Mme Françoise Férat. – Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme la rapporteur, MM. Vincent Peillon, ministre ; Michel Savin, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jacques Legendre. – Rectification de l’amendement n° 192 ; rejet de l’amendement n° 192 rectifié ; adoption de l’amendement n° 356 rectifié rédigeant l’article, l’amendement n° 60 rectifié devenant sans objet.
Renvoi de la suite de la discussion.
12. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
Secrétaires :
M. Jean Boyer,
M. Alain Dufaut.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Dépôt d'un document
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, l’avenant n° 1 à la convention financière du 14 juillet 2010 entre l’État et l’Agence nationale de l’habitat relative au programme d’investissements d’avenir – action « Rénovation thermique des logements privés ».
Acte est donné du dépôt de ce document.
Il a été transmis à la commission des finances ainsi qu’à la commission des affaires économiques.
Il est disponible au bureau de la distribution.
3
Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité
M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 22 mai 2013, les décisions du Conseil sur deux questions prioritaires de constitutionnalité portant sur :
- l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (carte de séjour temporaire) (n° 2013-312 QPC) ;
- l’article L. 5312-7 du code des transports (grands ports maritimes) (n° 2013-313 QPC).
Acte est donné de ces communications.
4
Refondation de l’école de la République
Suite de la discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (projet n° 441, texte de la commission n° 569, rapport n° 568, avis nos 537 et 570).
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Marie-Annick Duchêne. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Marie-Annick Duchêne. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si je peux partager les idées d’ordre général qui sont formulées dans l’exposé des motifs du projet de loi, je suis en revanche déçue par ce texte, trop souvent imprécis, qui n’apporte pas de vraie réponse, à mon sens, aux maux principaux dont souffre notre système scolaire.
J’ai lu en effet attentivement le texte de loi et le rapport annexé, et je ne retrouve ni les éléments traduisant une vision réaliste des problèmes ni la refondation évoquée dans le titre du projet de loi.
Ce texte s’articule autour de cinq grands axes.
Le premier concerne la création, aux articles 49, 50, 51 et suivants, des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, qui ressemblent fort aux IUFM.
Je vous ai entendu affirmer hier, monsieur le ministre, que les ESPE n’étaient pas la copie des IUFM. J’espère vraiment que vous avez raison, car je connais bien ces instituts, pour avoir siégé régulièrement pendant six ans au conseil d’administration de l’un d’eux. Je serai donc très vigilante quant au devenir de ces écoles nouvelles, qui vont s’occuper également, ce qui est à la fois nouveau et très positif, des métiers de l’éducation.
J’en profite, monsieur le ministre, pour appeler votre attention sur le statut du directeur d’école. Ce dernier n’a pas d’autorité directe sur les professeurs des écoles ; pourtant, il doit assurer la cohésion pédagogique entre eux, ce qui, vous l’imaginez bien, crée souvent des tensions. C’est donc un sujet dont pourraient s’emparer les ESPE.
Le second axe du projet de loi vise à faire entrer l’école dans l’ère du numérique.
Or, dans les Yvelines comme dans bien d’autres départements, les écoles sont déjà entrées dans cette ère. Il s’agit donc d’une continuité, et je ne doute pas que le numérique, qui n’en est en effet qu’à ses débuts, sera un excellent outil pédagogique.
Le troisième axe du projet de loi est intitulé « mettre le contenu des enseignements et la progressivité des apprentissages au cœur de la refondation ». Cette phrase est dense et ambitieuse, mais, quand nous voulons en savoir davantage, il est écrit que nous devons attendre les décrets...
Mme Marie-Annick Duchêne. ... pour le contenu du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, comme pour la refonte des cycles. Et quand ce ne sont pas des décrets, ce sont des créations : celle du Conseil supérieur des programmes, qui doit donner son avis sur tout ou presque tout,...
Mme Marie-Annick Duchêne. ... celle du Conseil national d’évaluation du système éducatif, qui s’accompagne, par voie de conséquence, de la suppression du Haut Conseil de l’éducation. Ce troisième point étant au cœur de la refondation, il est fondamental ; mais notre ignorance, elle, est grande.
Les articles traitant du quatrième axe, concernant le système d’orientation et l’insertion professionnelle, sont très peu nombreux. Nous ne pouvons qu’être d’accord pour rénover le système d’orientation, dont on a pu constater les limites.
S’agissant de l’insertion professionnelle, le texte est également pauvre. Pourquoi abroger l’article L. 337-3 du code de l’éducation relatif au dispositif d’initiation aux métiers en alternance, le fameux DIMA introduit par la loi Cherpion de 2011 ? De nombreux élèves comptent actuellement sur ce dispositif.
Vous avez semblé surpris, hier, de cette suppression, monsieur le ministre. Il serait souhaitable que vous puissiez vous concerter avec la commission, qui n’a pas souhaité rétablir ce dispositif malgré les nombreux amendements déposés sur ce sujet, notamment sur mon initiative, et que vous nous rassuriez sur ce point qui nous inquiète particulièrement. À titre personnel, j’ai reçu de nombreux appels d’élus de mon département chargés de l’enseignement.
J’en viens enfin au cinquième point : « Redynamiser le dialogue avec les partenaires de l’école, ainsi que ses instances d’évaluation ». Je dois vous avouer, monsieur le ministre, que je n’ai pu m’empêcher, en découvrant cet axe du projet de loi, de sourire à la pensée de la mise en place laborieuse des rythmes scolaires ; mais cela reste entre nous... (Sourires sur les travées de l'UMP.)
Monsieur le ministre, les communes ne sont pas écoutées dans les réunions de concertation et elles souffrent, dans cette période économique si difficile, d’être considérées trop souvent comme de simples guichets de ressources.
Nous savons tous aussi qu’un autre maillon faible de l’institution scolaire est le collège. Est-ce pour pallier les problèmes qui s’y posent que l’on procède à des recrutements de nouveaux professeurs ?
Le décrochage scolaire est perceptible dès le CE2, et l’on retrouve au collège ces mêmes élèves fragiles. En attendant que la progressivité des apprentissages fasse ses preuves, qu’allons-nous donc faire pour ces élèves ? Il est urgent que des décisions soient prises.
Vous l’avez bien compris, monsieur le ministre, du fait de ma longue expérience du terrain, ma conception de la refondation de l’école n’est pas en adéquation avec la vôtre. Je vous remercie néanmoins, ainsi que mes collègues, de l’attention que vous m’avez accordée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot.
Mme Dominique Gillot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette grande loi, qui porte l’ambition de la gauche au service de la Nation, postule que nous puissions, autour de l’école et de nos enfants, nous rassembler et nous dépasser.
Elle révèle une conviction : celle que le redressement éducatif et le redressement productif participent d’une même dynamique et préparent la société de demain.
Invoquant Alain – notre maître, ministre le ministre ! –, qui nous encourage à lutter contre les idées reçues, ces déterminismes qui paralysent l’élan de certains élèves plombés par le regard et les jugements a priori qui les entourent, vous engagez à construire une école de la confiance et de la générosité, une école inclusive, ambitieuse pour tous, une école ouverte et bienveillante.
Tout enfant est perméable à l’éducation ; il a en lui, quelquefois très enfouis, les moyens de construire sa réussite, pour peu qu’on lui fasse confiance et qu’on l’accompagne.
Selon la priorité affirmée du Président de la République, après une réflexion longuement mûrie, et les conclusions de la concertation pour la refondation de l’école, vous voulez pour demain une école de l’exigence et de la bienveillance.
L’exigence est la marque de respect due aux enfants à éduquer et à enseigner, pour les préparer à la citoyenneté et leur donner les atouts d’une bonne insertion sociale et professionnelle.
La bienveillance est l’attitude due à chacun de ces enfants, qui ont tous droit à leur place dans le système scolaire, pour y rencontrer les conditions de leur épanouissement et de leur réussite.
Nous ne pouvons accepter que ces conditions ne soient réservées qu’aux plus favorisés, rejetant les autres à la marge, au déplaisir et à la déscolarisation, facteurs de violence et de relégation.
« Ce n’est pas parce que j’ai réussi que je suis content », disait Alain, que vous citiez, monsieur le ministre, « c’est parce que j’étais content que j’ai réussi. » L’expérience en atteste : l’estime de soi, la confiance, la curiosité, le plaisir de coopérer sont autant d’aptitudes psychosociales indispensables à l’acquisition des connaissances.
L’objectif pédagogique républicain est d’élever les enfants du peuple. L’élève, c’est bien celui qu’on élève par la connaissance, qu’on émancipe par l’exigence bienveillante et dont on forme l’esprit critique. Il a besoin de maîtres et d’exemples. Ainsi, la loi prévoit de multiples évolutions qui concourent au même objectif : faire de l’école un lieu de réussite, d’éveil, de socialisation pour tous les enfants, la matrice des valeurs de la République.
La réforme des rythmes scolaires, qui a débuté dès le mois de septembre 2013 et qui s’achèvera à la rentrée 2014, les différentes mesures de recrutement et de formation des maîtres, la révision des programmes et l’évaluation des dispositifs d’enseignement sont les éléments essentiels de cette refondation, tout comme l’inscription dans la modernité par l’entrée du numérique et dans le numérique.
Après tant d’années de dénigrement et de déstructuration, il faut reconstruire la place de l’école publique, permettre à cette dernière d’inspirer de nouveau confiance. Cependant, si elle est centrale, l’école n’est pas seule dans l’éducation d’un enfant.
Pour garantir l’ouverture de l’école et sa meilleure intégration dans son environnement, un très bel outil existe, le projet éducatif territorial. Ce que vous avez qualifié de « révolution pédagogique », monsieur le ministre, associera éducation nationale, communauté éducative – les parents et le mouvement d’éducation populaire, notamment – et collectivités territoriales, au premier rang desquelles se trouvent les maires.
Cette nouvelle école permettra à tous les élèves de bénéficier, grâce à cinq matinées au lieu de quatre, d’un temps d’apprentissage plus important, utile et efficient.
L’allégement des journées permettra de libérer chaque jour du temps, que les partenaires éducatifs investiront, pour offrir aux enfants des activités éducatives complémentaires. Il s’agira, non pas de proposer un simulacre de classe ou un enseignement bis, mais d’accompagner tous les enfants vers des découvertes qui les rendront heureux d’apprendre, plus agiles, plus vifs, plus aptes à la vie collective, mieux disposés aux apprentissages scolaires.
Monsieur le ministre, avec ce texte, vous proposez une approche plus large que l’enseignement, car l’école, c’est l’éducation. Le projet éducatif territorial ouvre l’école, l’enrichit, la complète.
Comme ce fut le cas avec les projets éducatifs locaux, le dialogue est le maître mot pour co-construire ce projet d’avenir, qui repose sur un diagnostic partagé. C’est un viatique dans le temps, un projet progressif qui balisera les nouvelles pratiques, mais aussi les entraînera. C’est un puissant levier de changement des conditions d’exercice de la fonction éducative, qui évitera la trop grande normalisation et encouragera les innovations.
Dans ce processus, les collectivités territoriales sont reconnues dans leur compétence éducative pour créer un contexte favorable à la réussite des élèves, comme dans leur contribution à la transmission et à la consolidation des valeurs de la République.
Certains esprits chagrins voudraient que cela aille plus vite, plus loin. Les moyens mobilisés sur cinq ans, en création de postes comme en formation initiale et continue, la précision des nouveaux cadres, la considération des enseignants et la revalorisation de leur métier, l’accessibilité totale de l’école de la Nation, le respect des choix des parents notamment pour le parcours scolaire de leur enfant handicapé, la recherche des meilleurs outils pédagogiques pour assurer la transmission des savoirs constituent la meilleure réponse à leur pessimisme.
Refondons l’école. Rendons-la attractive, heureuse. C’est une belle mission qui porte un projet de société ambitieux, éminemment républicain, recréant du commun avec tous les jeunes de France et leurs familles, au cœur de la justice sociale et de l’émancipation.
Voilà qui donne force et vigueur au redressement de la Nation ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’axerai mon intervention sur deux aspects du projet de loi.
Le premier sujet porte sur l’accueil des enfants dès l’âge de deux ans dans les classes ou les écoles maternelles.
Ce texte prévoit d’ouvrir la possibilité d’accueillir des enfants âgés de deux ans révolus en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, qu’il s’agisse des zones urbaines, rurales ou de montagne ou des départements, collectivités et territoires ultramarins.
J’attire tout d’abord votre attention sur le terme retenu, « priorité », et les dérives auxquelles il pourrait donner lieu. En effet, une interprétation trop peu limitative de ce terme peut être source de confusions, mais surtout être à l’origine de demandes illégitimes de la part de familles à la recherche d’une structure d’accueil pour leurs jeunes enfants.
La question se pose : à qui appartiendra-t-il d’accepter ou de refuser l’inscription d’un enfant de deux ans ? En d’autres termes, qui sera capable de définir les priorités et l’ordre des admissions à l’école ?
Il conviendrait donc de limiter cette mesure uniquement, et non pas prioritairement, aux écoles situées dans un environnement social défavorisé, afin d’éviter toute confusion et de limiter le risque de dérives du dispositif. Je pense que l’objectif de cette disposition n’est pas de transformer l’école en garderie ; les 3 000 postes qu’il est prévu de créer sur cinq ans à cet effet n’y suffiraient pas... C’est d’ailleurs l’objet de l’amendement que j’ai déposé et que j’aurai à cœur de défendre lors de la discussion des articles.
Cette mesure de scolarisation à deux ans ne doit pas être une réponse ou une demi-réponse à la pénurie des structures de garde des jeunes enfants. Aujourd'hui, c’est dans les départements les moins dotés en structures d’accueil de la petite enfance que l’on constate la plus forte demande de scolarisation des enfants de moins de trois ans.
Ensuite, cette scolarisation précoce fait l’objet d’un débat et d’avis très controversés. Les partisans de cette solution y voient une meilleure scolarisation et une socialisation facilitée de l’enfant, alors que de nombreux pédopsychiatres et psychologues y sont opposés, au regard des conditions actuelles de scolarisation, par exemple le nombre important d’enfants par classe, de 25 à 30.
À deux ans, pour se sentir en sécurité et se développer, les enfants ont besoin de leurs parents ou d’une autre personne avec laquelle ils peuvent créer des liens, par exemple le professionnel d’une crèche qui encadre des groupes de six ou huit enfants ou une assistante maternelle.
Toutefois, et je viens de le rappeler, réserver cet accueil en milieu scolaire aux enfants de moins de trois ans issus de milieux sociaux défavorisés peut certainement être bénéfique. Ce peut être un gage de réussite, notamment, pour les enfants dont les parents ne parlent pas le français à la maison, grâce à un meilleur apprentissage de notre langue.
C’est pour cette raison qu’il semble important, puisque vous souhaitez développer l’accueil scolaire des enfants de moins de trois ans, monsieur le ministre, de limiter dans un premier temps cette mesure aux zones d’éducation prioritaires.
Enfin, monsieur le ministre, j’attire votre attention sur les conséquences de cette disposition. Assurément, elle exigera une nouvelle fois des communes des moyens supplémentaires en termes de personnel et de locaux, au moment où l’État va réduire ses dotations en direction des collectivités.
Le second sujet que je souhaite aborder concerne les enfants séjournant dans des structures d’accueil d’urgence durant la période hivernale. De plus en plus nombreux, ces derniers ont d’énormes lacunes scolaires, d’autant que la plupart d’entre eux n’ont que de très vagues notions de la langue française. La scolarisation qui leur est actuellement proposée s’apparente davantage à de la garde d’enfants.
Afin que ces mois passés à l’école soient bénéfiques, notamment en ce qui concerne l’apprentissage des enseignements fondamentaux, il conviendrait d’organiser pour ces élèves issus essentiellement de populations migrantes une scolarisation individualisée avec l’aide de professeurs détachés en tout ou partie. Cette proposition vise un double objectif : apporter un enseignement adapté à des enfants en grandes difficultés et réduire dans les classes les perturbations inhérentes à cette cohabitation, qui montre très vite ses limites et ses inconvénients.
C’est pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à affecter à cette prise en charge pédagogique une partie des 7 000 postes prévus au titre du renforcement de l’encadrement pédagogique dans les zones difficiles. Les enseignants y verraient un réel soutien et les communes qui acceptent l’ouverture d’un centre d’accueil d’urgence se sentiraient soutenues pour faire face aux remarques et aux réticences manifestes de parents d’élèves qui ne voient pas toujours d’un bon œil l’arrivée de ces enfants.
L'amendement que j’ai déposé ayant été rejeté au motif, infondé à mes yeux, que son adoption créerait une charge financière supplémentaire, il est regrettable que ce débat ne puisse avoir lieu au cours de l’examen de ce projet de loi.
Monsieur le ministre, je souhaite que, sur ces sujets importants, vous preniez en considération nos propositions, très largement motivées par l’intérêt de l’enfant, qu’il nous faut savoir ne pas perdre de vue. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cette loi, la gauche est là !
La gauche est là, non pas pour elle, mais pour la République tout entière, dont le socle est, depuis un siècle et demi, son école publique et laïque. Elle est là comme à chaque fois qu’il a fallu démocratiser encore plus l’école ou la défendre parce qu’elle était attaquée par la droite.
Aujourd’hui, la gauche est là de nouveau, non pas seulement pour défendre ou améliorer l’école, mais pour la refonder.
Mme Françoise Férat. Le changement, c’est maintenant ! (Sourires.)
M. David Assouline. Il s’agit non pas de refonder ses valeurs, ni même son objet, mais de lui donner de nouvelles fondations pour lui permettre, dans le monde d’aujourd’hui, de faire face à ses missions d’origine et de les accomplir, de porter ses valeurs. Oui, il faut le dire franchement : en continuant comme avant, avec au mieux des pansements posés de temps en temps, l’école n’était structurellement plus en mesure de le faire.
Monsieur le ministre, vous l’avez rappelé avec force, plus encore que le taux de reproduction des inégalités d’origine sociale, comme on le dit communément, c’est le taux d’approfondissement de ces inégalités qui est devenu le symbole d’une faillite et l’acte d’accusation implacable d’un système tout entier. Or notre modèle éducatif repose sur l’égalité, valeur fondamentale gravée au fronton de chaque école.
Refonder, c’est d’abord tout reprendre par le début, là où tout commence pour l’élève, c'est-à-dire à l’école primaire. C’est clairement une priorité, et pas seulement dans les mots ! Je vous remercie de l’avoir pensée et de l’avoir inscrite au cœur de ce texte.
Refonder, c’est aussi – et c’est le b.a.-ba – la formation des professeurs : il s’agit d’apprendre à apprendre à celles et ceux dont ce sera le métier. Cette évidence, longtemps sous-estimée par tout le monde malgré des dispositifs qui avaient le mérite d’exister, fut ensuite niée et combattue, avant d’être détruite ces dernières années par la droite au pouvoir.
Refonder, c’est s’ouvrir vraiment, pour les comprendre, les maîtriser et les utiliser, d’un point de vue tant technique que pédagogique, aux innovations, aux potentialités nouvelles qui, de plus en plus, seront incontournables à nos enfants tant pour l’exercice de leur citoyenneté que dans leur vie professionnelle, mais aussi et surtout aux usages qu’ils en font. Je veux parler de la révolution numérique, de son indispensable maîtrise technique, de ses contenus pédagogiques et du développement de l’esprit critique, d’analyse et de formation d’une pensée autonome face à ces techniques et contenus.
Ce que contient ce projet de loi amorce une révolution structurelle pour cette vieille maison de l’éducation nationale. En effet, la révolution numérique en cours n’est pas une énième innovation technologique, elle est une révolution civilisationnelle, ouvrant des perspectives infinies d’échanges des informations, des connaissances, des savoirs et même des savoir-faire.
L’article 10 crée un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance. Je forme d’ailleurs le vœu qu’une véritable direction centrale du ministère lui soit dédiée, condition de sa mise en place effective, de sa cohérence et de son efficacité.
L’article 26 met en place une formation à l’utilisation des ressources numériques à tous les niveaux de la scolarité.
L’article 35 instaure une éducation aux médias obligatoire au collège, comme je l’ai longtemps préconisé, en particulier dans un rapport de la commission de la culture. Il faudra cependant faire en sorte qu’elle soit présente dès le primaire, qu’elle perdure au lycée et que les conditions d’évaluation de cette éducation au collège soient précisées.
En ce qui concerne le numérique, la droite admet parfois que c’est bien, mais que cela n’est pas à la hauteur d’une refondation : elle ose même dire que ce n’est pas suffisant. Dans ces conditions, pourquoi n’a-t-elle pas même commencé à faire le dixième dans ce domaine, pendant les dix ans au cours desquelles elle a exercé le pouvoir ? (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – Mme Françoise Férat s’exclame.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La droite a déconstruit le service public !
M. David Assouline. Pourquoi a-t-elle même affaibli ce qui existait déjà trop marginalement en matière d’éducation aux médias ?
À l’inverse, je considère que, si une raison majeure nous autorise à parler de refondation, c’est bien parce que l’ambition de la révolution numérique est au cœur de ce projet de loi.
Enfin, la gauche est là, parce que les moyens sont présents pour réaliser cette ambition républicaine, contre le dogme passé de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, d’une baisse de moyens uniforme et généralisée, et sans céder aux bons apôtres du « tout austérité » qui asphyxie nombre de peuples en Europe.
Ainsi, 60 000 postes seront créés afin de refonder l’école, au service d’un contenu et de projets. Il ne s’agit pas juste de créer des postes en plus, comme si ce n’était qu’une question de moyens.
Messieurs de droite,…
Mme Françoise Férat. Et les femmes ?
M. David Assouline. … il vous faudra ranger vos vieux arguments éculés. Ce projet de loi prévoit les moyens nécessaires pour que bien des choses, que vous avez du reste vous-mêmes défendues ici, soient possibles.
À gauche également, on évoque souvent l’austérité, comme devant être combattue. En Europe, le moindre projet est souvent jugé uniquement à partir de cette grille de lecture.
Mme Éliane Assassi. Vous mélangez tout !
Mme Françoise Férat. C’est n’importe quoi !
M. David Assouline. Faut-il rappeler à cet égard que là où il y a austérité, on ne recrute pas. Au contraire, on débauche. On ne maintient pas à niveau les salaires, on les baisse. On ne crée pas une formation pour les professeurs, on la supprime. On ne prévoit pas plus de professeurs que de classes, mais moins de professeurs et de classes.
J’ai souvent entendu dire ici que les contenus affichés étaient bons, mais que, faute de moyens, ce n’était pas acceptable. Il ne faudrait donc pas dire l’inverse aujourd’hui, car le présent projet de loi prévoit les moyens.
Oui, la gauche est là ! Toute la gauche dans sa diversité doit être là, fière et fidèle (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)…
Mme Éliane Assassi. Fidèle ? Encore faudrait-il que tout le monde le soit !
M. David Assouline. … à son histoire commune, pour porter cette grande loi en faveur de l’école de la République.
Mme Éliane Assassi. Et l’amnistie ?
M. David Assouline. Oui, mesdames, messieurs de droite, nous voulons rassembler autour de cette cause au-delà de la gauche. C’est pourquoi ce projet de loi est le résultat d’une large concertation, laquelle aura duré plusieurs mois. C’est pourquoi, messieurs de droite (Mme Françoise Férat s’exclame.), dix-sept de vos amendements ont été intégrés en commission. En comparaison, faut-il vous rappeler que seuls deux amendements du groupe socialiste avaient été retenus dans la loi Fillon ?
M. Pierre Bordier. C’est parce que nos amendements étaient meilleurs ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. David Assouline. Oui, mes chers collègues, ce projet de loi porte bien son nom : il s’agit de refonder l’école de la République. Nous refondons et nous fécondons (Mme Françoise Férat s’exclame de nouveau.), au-delà d’une prochaine élection ou des péripéties de la vie politique.
C’est maintenant, mais pour demain. C’est pour nos enfants, pour la République, et donc pour la France. Et donc la gauche est là ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, non, la gauche n’est pas là avec ce projet de loi !
Vous souhaitez former les jeunes à tous points de vue, mais les solutions que vous proposez ont déjà échoué ou nécessitent des moyens financiers considérables, alors que vous ne disposez pas du moindre euro, monsieur Assouline.
Ce projet de loi est invraisemblable au moment où le Gouvernement devrait faire des économies afin de diminuer le déficit budgétaire de 2013, lequel est déjà hors normes, à la demande des financiers européens et de notre Cour des comptes, institution dont vous refusez de suivre les avis – elle vient d’ailleurs de critiquer ce texte – et alors que les agences de notation nous surveillent.
Vous proposez sans aucun complexe un projet de loi qui va coûter des milliards d’euros, sans vous préoccuper de son financement et sans nous dire ce qu’il coûtera. L’article 40 de la Constitution, qui rend irrecevables les amendements non financés déposés par les parlementaires, devrait aussi être applicable aux textes du Gouvernement.
Vous proposez la suppression des notes, monsieur le ministre, que vous considérez comme des sanctions lorsqu’elles sont mauvaises, mais c’est oublier que les bonnes notes sont, elles, des récompenses, qu’elles sont motivantes et qu’elles sont indispensables pour mesurer la valeur des élèves. Vous souhaitez les remplacer par des évaluations destinées à mesurer le degré d’acquisition des connaissances. Or de telles évaluations n’auront aucune valeur pédagogique.
Pour compléter la suppression des sanctions et des récompenses, vous proposez des examens non notés, lesquels n’auront aucun intérêt ni aucune signification. C’est là un énorme gâchis, que votre projet de loi ne pourra certainement pas corriger. Les redoublements, dont « l’efficacité pédagogique n’est pas probante », selon vous, monsieur le ministre, sont pourtant dans certains cas très utiles.
Vous faites de ces enfants des enfants perdus et de futurs délinquants. Voilà ce à quoi conduira votre projet de loi ! Vous êtes animés des meilleures intentions, monsieur le ministre, chers collègues, mais vous vous trompez de méthode.
Vous constatez que 150 000 jeunes quittent chaque année le système scolaire sans formation professionnelle, monsieur le ministre. C’est vrai, mais ce constat, que tous vos prédécesseurs, y compris ceux de droite, font depuis vingt ans ne débouche sur aucune proposition. L’absence de notation et le collège unique sont responsables de cette situation.
Vous proposez de poursuivre une politique mise en œuvre par la droite et qui a toujours échoué. C’est invraisemblable !
Vous ne remettez pas en cause le collège unique, qui ne forme pas à des métiers et condamne 150 000 jeunes à l’échec scolaire. Vous continuez à imposer le socle commun de connaissances et de compétences. Or certains collégiens n’en veulent plus, car ils préféreraient scier du bois plutôt que d’étudier la guerre des Gaules.
Vous prévoyez de dépenser des milliards d’euros pour embaucher des formateurs – vous évoquez le chiffre de 150 000 –, autant de fonctionnaires que nous paierons pendant cinquante ans !
Votre volonté d’obtenir un taux de 80 % de réussite au baccalauréat est aussi une erreur, car le baccalauréat, que nombre de jeunes, poussés par leurs parents, se donnent beaucoup de mal pour obtenir, ne leur servira à rien s’ils ne poursuivent pas des études supérieures. Ils feront alors partie des 150 000 jeunes ne trouvant pas d’emploi.
Par ailleurs, où trouverez-vous les moyens nécessaires pour accueillir les enfants de moins de trois ans – encore une invention ! – dans toutes les maternelles, avec le personnel nécessaire ? Je ne pense pas que vous puissiez compter sur les communes pour financer cette mesure.
En revanche, la suppression des internats d’excellence est une grave erreur (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), parce que vous supprimez ainsi le moyen de remettre à niveau les élèves défaillants. En outre, je ne vois pas la Commission de Bruxelles applaudir ces nouvelles dépenses alors qu’elle attend des économies et présente des demandes dont vous ne faites jamais cas.
Pour réussir une refondation de l’école, il faudrait en revenir à ce qui existait avant 1976, année où a été mis en place le collège unique, sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing (Rires sur les travées du groupe socialiste.),…
Un sénateur du groupe socialiste. Voilà un modèle !
M. Serge Dassault. … comme le font la plupart des pays.
Il faut corriger l’erreur qu’a constituée l’instauration du collège unique et rendre au certificat d’étude et au brevet leur valeur de sélection. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) C’est important, mais vous le ne faites pas.
Il faut rétablir les sanctions, les récompenses et les prix et ne pas supprimer les notes, ce qui serait une ânerie. Il faut supprimer le collège unique et le socle commun de connaissances et de compétences, qui ne conviennent pas à tous les jeunes, certains préférant apprendre un métier. Il faut créer deux filières de collège, comme en Allemagne, l’une pour former à des métiers, dont on a bien besoin, l’autre pour préparer au bachot et aux études supérieures.
Il faudrait également former, après sélection, et ce dès la quatrième, les jeunes à l’apprentissage des métiers, valoriser les métiers manuels et l’alternance dès quatorze ans, et non à quinze ans.
Il vaudrait mieux produire des artisans, des boulangers, des cuisiniers, des bouchers, qui sont très utiles dans les communes, au lieu d’inculquer à des jeunes qui n’en ont rien à faire un socle commun de connaissances et de compétences.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Un tel discours est scandaleux !
M. Serge Dassault. Enfin, sachez que de nombreux élèves de seconde et de première commencent à douter de leur avenir en France, car il leur paraît incertain, et pour des raisons fiscales. En outre, ils s’orientent vers les universités étrangères, au Royaume-Uni et au Canada, pour la poursuite de leurs études. C’est grave, car ces jeunes cerveaux qui vont nous quitter pour apprendre ailleurs, qui représentent tout notre potentiel de développement économique et de croissance futurs, ne reviendront jamais. Et ce n’est pas le projet de loi qui nous est aujourd'hui soumis et la politique fiscale du Gouvernement qui permettront d’endiguer la perte dramatique de notre potentiel futur.
Monsieur le ministre, dans l’intérêt de tous, pour que votre projet de refondation de l’école soit une réussite et pour économiser beaucoup d’argent, vous n’avez qu’à refaire ce qui se faisait avant 1976. Ce sera très bien. Et n’oubliez pas la formation professionnelle ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous l’avez rappelé encore récemment, monsieur le ministre, « L’école est la France de demain ». C’est bien cette vision d’espérance qu’a souhaité donner le Président de la République en plaçant la jeunesse et l’éducation au cœur de son action et en affirmant sa volonté de rendre à l’école de la République sa place prioritaire, qu’elle a perdue depuis de nombreuses années.
Je ne reviendrai pas sur les objectifs et les enjeux du texte, déjà développés par mes collègues et parfaitement soulignés par Mme la rapporteur, Françoise Cartron. J’évoquerai simplement un sujet qui me tient à cœur : l’enseignement obligatoire d’une langue vivante dès le CP.
On nous répète à l’envi que les Français sont mauvais en langues étrangères. Les derniers résultats de l’European survey on language competences le confirment. Nous sommes face à un problème préoccupant, mais surtout face à un formidable défi.
L’apprentissage des langues étrangères non seulement est essentiel aujourd’hui pour l’insertion professionnelle de la jeunesse, mais il constitue un outil important pour l’ouverture à l’altérité par l’appréhension d’une culture et d’un système de pensée différents.
Ce n’est pas aux deux millions de nos concitoyens qui résident à l’étranger que nous l’apprendrons : la maîtrise d’une autre langue, voire le plurilinguisme, constitue un indéniable enrichissement personnel et collectif. À cet égard, je me félicite de l’adoption en commission d’un amendement visant à valoriser le plurilinguisme à l’école et à favoriser ainsi la préservation de la diversité linguistique, donc, par ricochet, la francophonie.
M. Jacques Legendre. C’est vrai.
Mme Claudine Lepage. Dans ce cadre, et concernant la disposition adoptée par l’Assemblée nationale visant à favoriser les langues des pays avec lesquels se déploie une coopération régionale, la clause de réciprocité imposée aux pays partenaires est également bienvenue.
Toutefois, la mise en œuvre de cette politique nécessite des moyens importants, notamment en termes de ressources humaines. Comme l’a rappelé Mme la rapporteur, la formation initiale et continue en langues des enseignants du premier degré doit être repensée.
Au-delà, les échanges d’enseignants seraient très profitables. Le programme de mobilité internationale Jules Verne est un outil privilégié pour satisfaire cette demande : il ouvre aux enseignants titulaires du premier et du second degré la possibilité d’exercer dans un établissement étranger pendant une année, une durée que certains établissements, satisfaits du système, jugent d’ailleurs trop courte. Cette mobilité est de surcroît encouragée par l’alinéa 218 du rapport annexé présentant les objectifs de la politique d’éducation.
J’aborderai maintenant la question de l’enseignement français à l’étranger.
Monsieur le ministre, votre ministère n’assure pas de cotutelle sur l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE. C’est pourtant bien elle qui assure les missions de service public relatives à l’éducation en faveur des enfants français résidant hors de nos frontières. Chacun des établissements du réseau a bien reçu une homologation du ministère de l’éducation nationale. Et ce sont 10 000 enseignants titulaires français qui sont actuellement détachés pour des missions d’enseignement à l’étranger. Je suis certaine que nous aurions tous à gagner au développement d’un plus grand partenariat entre le réseau à l’étranger et l’éducation nationale.
Ce réseau de 480 établissements constitue un véritable laboratoire d’idées et d’expériences en matière d’apprentissage des langues, bien sûr, mais pas uniquement. Je rentre d’un déplacement aux États-Unis et je peux témoigner de l’usage fantastique que font les enseignants des nouvelles technologies dans nos établissements homologués. J’ai notamment en mémoire un exercice permettant, grâce à l’utilisation de Twitter et à son nombre limité de caractères, de synthétiser des règles grammaticales. Les riches expériences de ces professeurs français, qui se sont frottés à d’autres cultures, représentent un atout incontestable pour l’éducation nationale, qui doit davantage en tirer profit.
Au regard de ces éléments, la refondation de l’école peut et doit trouver plus nettement sa déclinaison au sein du réseau des établissements français à l’étranger.
En conséquence, je regrette vivement que la mission de concertation et de réflexion actuellement en cours sur l’avenir de notre réseau à l’étranger n’ait pas été intégrée aux travaux ayant abouti à ce projet de loi d’orientation et de programmation.
Un certain nombre de dispositions pourraient pourtant figurer dans ce texte ou, pour le moins, dans le rapport qui y est annexé. Je pense, notamment, à l’équilibre des différentes missions dévolues à l’AEFE, à ses relations avec le ministère de l’éducation nationale, ou encore aux moyens de parvenir à une véritable réussite éducative pour tous au sein d’un réseau, certes d’excellence, mais qui doit se garder de tout élitisme. Tel est l’objet des amendements que je vous proposerai dans la suite de la discussion. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Raymond Couderc.
M. Raymond Couderc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pur produit de l’éducation nationale, puisque je suis entré à l’école normale d’instituteurs à quatorze ans…
M. Raymond Couderc. … et que j’ai pris ma retraite de professeur d’université voilà dix ans, après avoir enseigné à tous les niveaux, j’aurais pu argumenter sur l’ensemble de ce projet de loi. Cependant, mes collègues du groupe UMP, en particulier Jacques Legendre et Jean-Claude Carle, l’ont très bien fait et, dans le peu de temps qui m’est imparti, je voudrais attirer votre attention sur un aspect particulier, celui des langues régionales.
Le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, dans sa rédaction soumise au Parlement par le Gouvernement, ne faisait aucune mention des langues régionales. Cela a créé un grand émoi et une vive inquiétude parmi tous ceux, élus, familles et associations, qui défendent les langues et les cultures régionales.
Dès le mois de février 2013, je vous avais interpellé, par le biais d’une question écrite, monsieur le ministre, en vous rappelant la promesse du Président de la République de ratifier la charte européenne des langues régionales et minoritaires, afin de « définir un cadre légal clair et stable pour toutes les langues régionales ». Aussi, pourquoi ne pas inclure les langues régionales dans ce grand texte sur l’école ?
Contrairement à ce que prétendent certains, l’apprentissage des langues régionales n’entre pas en concurrence avec celui, nécessaire, des langues étrangères. On n’apprend pas une langue régionale à la place d’une langue étrangère ; ce n’est pas une soustraction, c’est au contraire une multiplication, car cet apprentissage élargit les capacités des élèves.
En outre, malgré leur reconnaissance dans la Constitution, la situation des langues régionales est très préoccupante. Elle est même catastrophique pour celles d’entre elles qui n’ont pas la chance d’avoir une part significative de leur aire de diffusion située hors de France. Tel est le cas du breton et de l’occitan, que l’ONU a déclarés « langues en grand danger ».
Notre pays, l’éducation nationale en tête, a la responsabilité, à l’égard des générations futures, de transmettre son patrimoine linguistique et culturel, de défendre la diversité culturelle comme l’on défend la biodiversité. Nous avons le devoir de préserver et de faire vivre cette partie de notre héritage.
Je ne méconnais pas les critiques des jacobins, qui pensent que les langues régionales sont des éléments centrifuges. Ils oublient que le défi, pour la République aujourd’hui, n’est plus d’unifier un pays morcelé pour le fondre dans une destinée commune, comme c’était le cas voilà un siècle et demi. Le défi, aujourd’hui, est de promouvoir la diversité, afin que chacun puisse retrouver, dans le socle commun de la nation française, les racines de son identité.
C’est pourquoi j’ai été rassuré de constater que les députés, puis la commission de la culture du Sénat, ont choisi d’amender ce projet de loi afin d’y inclure la question des langues régionales.
J’ai moi-même choisi de déposer un amendement à l’article 27 bis nouveau afin de supprimer la disposition prévoyant « l’accord [obligatoire] des représentants légaux des élèves ou des élèves eux-mêmes s’ils sont majeurs » pour que « les enseignants du premier et du second degrés [soient] autorisés à recourir aux langues régionales, dès lors qu’ils en tirent profit pour leur enseignement ». J’ai la satisfaction de voir que cette disposition a été modifiée par notre commission de la culture.
J’espère que cette modification sera maintenue lors de l’examen en séance de ce projet de loi, de manière à donner leur place aux langues régionales en tant qu’outils pédagogiques et culturels. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. – Mmes Maryvonne Blondin et Corinne Bouchoux applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laurent-Perrigot.
Mme Françoise Laurent-Perrigot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelle satisfaction aujourd’hui d’avoir un projet de loi d’une telle envergure, un texte qui porte l’ambition de transformer notre école et de la replacer au cœur de nos institutions républicaines !
On le constate tous les jours sur le terrain : notre école ne remplit plus ses missions de justice sociale et de réussite éducative pour tous les enfants.
Cette refondation rétablit la situation en réaffirmant les principes d’espoir et de confiance en l’avenir, dont nous avons tous besoin, en intégrant les valeurs d’égalité des chances, de laïcité, de justice sociale. Nous voulons que les enseignants retrouvent l’envie d’enseigner et que les élèves, dès la maternelle, retrouvent le plaisir d’apprendre.
En développant la scolarisation des enfants de moins de trois ans, notamment dans les zones urbaines, rurales et ultramarines défavorisées, l’école maternelle va aider à l’accompagnement des élèves, dès leur plus jeune âge, vers la réussite en luttant contre l’échec scolaire.
La scolarisation des enfants de moins de trois ans est une chance pour l’enfant et sa famille. C’est la toute première étape du parcours scolaire, le moment où l’enfant se construit, s’approprie le langage, apprécie la vie en collectivité.
Bien souvent, les enfants issus de milieux défavorisés n’ont pas accès aux jardins d’éveil, aux crèches ; ils découvrent bien plus tard cette vie en commun. En ouvrant l’école à tous, au plus tôt, les inégalités sociales seront d’autant plus réduites. Il s’agira d’un lieu d’accueil gratuit, mais, surtout, égalitaire.
Avec cette possibilité, la formation dispensée dans ces écoles maternelles va favoriser l’éveil de la personnalité des enfants, en leur permettant d’acquérir tous les mécanismes qui faciliteront leur passage en école élémentaire. Cette notion sera amplifiée avec la création d’un cycle unique comprenant la petite, la moyenne et la grande section. Ainsi, l’enfant sera accueilli dans de bonnes conditions, avec un enseignement englobant un vrai projet éducatif et pédagogique adapté à son âge avec des maîtres qualifiés et formés.
En effet, dans le cadre de cette refondation, les moyens sont prévus, avec le recrutement de 60 000 personnes sur cinq ans, afin d’améliorer significativement les conditions d’encadrement des élèves, qui se sont fortement dégradées au cours de ces dernières années.
Sur ces 60 000 postes, 3 000 sont prévus pour les moins de trois ans, 4 000 pour améliorer l’équité territoriale et 7 000 pour le renforcement de l’encadrement pédagogique. C’est un effort considérable.
Monsieur le ministre, en consacrant autant de créations de postes d’enseignant titulaire du premier degré pour la mise en place de ce dispositif, vous prouvez combien l’amélioration des conditions de prise en charge des élèves au sein de l’école demeure l’une des priorités du Gouvernement. Ce dispositif va permettre d’aider et de mieux accompagner les élèves, de mieux répondre à leurs besoins.
Nous voyons là, monsieur le ministre, votre volonté de donner à l’école les moyens, en mobilisant des ressources importantes, pour une réussite pour tous.
Dans le cadre de cette refondation, vous allez encore plus loin. En effet, vous souhaitez mettre en place un cours d’enseignement moral et civique. Quelle excellente idée !
Jean Jaurès le disait déjà : « Il ne peut y avoir d’enseignement civique sans morale. » (Ah ! sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-François Husson. Il nous manquait, celui-là !
Un sénateur du groupe socialiste. Ne dites pas : « celui-là » !
M. Alain Bertrand. C’était un Tarnais ! Vive le Tarn !
Mme Françoise Laurent-Perrigot. Demain, ce sera une réalité.
Cet enseignement se fera en fonction de l’âge de l’enfant. Au moment où l’enfant découvre la vie collective, on pourra lui inculquer les notions d’apprentissage de la différence, de la tolérance, de l’acceptation de l’autre. Le message évoluera en fonction des cycles scolaires.
Adapté à chaque niveau, cet enseignement privilégiera le vivre-ensemble : mieux se connaître, comprendre et accepter les différences seront les maîtres mots. Dignité, liberté, solidarité, esprit de justice et laïcité ne sont pas des sujets dénués de sens. Sensibiliser les enfants à toutes ces valeurs fait partie intégrante des enjeux de l’éducation nationale.
Monsieur le ministre, vous avez eu le courage de vous lancer dans une refondation ambitieuse, qui va permettre la reconstruction de l’école de la République telle que nous la concevons. C’est avec fierté et enthousiasme que nous soutenons ce projet de refondation de l’école basé sur les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité, trois mots symboliques que nous allons, demain, retrouver sur le fronton des écoles, rappelant ainsi à chaque élève qu’il est l’avenir de la France. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un contexte économique et politique fragilisé notamment par la crise internationale, le système éducatif français ne fait pas figure d’exception : on constate un affaiblissement de l’école républicaine dans ses missions de transmission des savoirs et d’apprentissage de la citoyenneté et dans son rôle d’ascenseur social.
En effet, les politiques éducatives qui se sont succédé ces dix dernières années ont conduit à la suppression de nombreux postes d’enseignant – 80 000 environ –, à la disparition de la carte scolaire et à la réduction des dépenses publiques en la matière. Ces politiques ont pour conséquences néfastes la progression de l’échec scolaire, le recul dans les classements internationaux, le dénigrement du personnel éducatif, l’aggravation de la violence dans certains établissements et un enseignement professionnel déprécié.
Dans ce contexte, il était primordial de réintroduire la formation initiale des enseignants, dont l’importance se vérifie surtout pour l’outre-mer, où des particularismes socioculturels doivent être compris et intégrés par l’enseignant pour permettre un épanouissement harmonieux de l’enfant.
En effet, enseigner aux enfants en Martinique, par exemple, comporte des différences avec l’enseignement en France métropolitaine et nécessite des aménagements permettant plus d’adaptation à la culture des lieux d’enseignement. Il faut, par conséquent, des enseignants ayant de solides connaissances de tous les déterminants socioculturels et qui soient formés aux problématiques sociolinguistiques et historico-culturelles locales, afin d’assurer de manière optimale les missions qui leur sont confiées auprès des enfants.
C’est d’autant plus vrai en Guyane, où la profession d’enseignant est confrontée à d’importantes contraintes. Ainsi, le français, langue de scolarisation, est parlé uniquement à l’école en certains lieux. L’usage de la langue créole ou amérindienne par les enfants nécessite le recours à un médiateur culturel bilingue. De plus, l’enseignement dans des communes éloignées et isolées accessibles seulement par pirogue n’implique qu’un très faible nombre de titulaires expérimentés, si bien que les affectations dans ces communes concernent des débutants. Dès lors, nombre d’enseignants renégocient leur affectation. C’est pour toutes ces raisons qu’il fallait rétablir la formation initiale et continue des enseignants et, ainsi, revaloriser le métier d’enseignant.
Face à ce constat, nous avons le devoir d’agir urgemment pour éduquer, former la jeunesse et la doter de savoirs indispensables à la maîtrise de son avenir. Il convient d’être attentif également à la qualité des dispositifs d’accueil – équipements pédagogiques notamment – pour réussir la scolarisation des moins de trois ans, prévue par l’article 5 de votre projet de loi, car le fort taux d’implantation de ZEP, de zones d'éducation prioritaire, en Martinique témoigne bien de l’acuité des problèmes de maîtrise de la langue.
C’est ainsi que nous pourrons redonner à l’éducation ses lettres de noblesse. Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, je vous remercie de cette réforme aussi ambitieuse que courageuse, dont l’objectif est de s’attaquer aux racines de l’échec scolaire en concentrant les efforts sur le primaire et la réorganisation des savoirs.
Ce projet de loi a le mérite de remettre l’enseignant au cœur même de la refondation de l’école, avec la création de 60 000 postes supplémentaires d’ici à 2017. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Pierre Bordier. Et le rapport de la Cour des comptes ?
M. Maurice Antiste. Oui, 60 000 postes supplémentaires d’ici à 2017 ! (Mme Catherine Tasca et M. Alain Bertrand applaudissent.)
Cela me permet d’aborder la question des agents non titulaires de droit public et de droit privé qui, en Martinique, sont employés au sein des écoles et des établissements.
Vous en conviendrez, monsieur le ministre, cette situation n’est pas normale. Par conséquent, je vous interroge sur les mesures que vous envisagez face à cette problématique. Ne faudrait-il pas permettre la titularisation des enseignants contractuels et offrir aux autres des emplois et des perspectives de carrière, au sein ou en dehors du ministère, via la délivrance d’une certification ou d’un diplôme reconnu, par exemple ?
Cependant, refaire de l’école de la République la garante de l’égalité des droits, quels que soient les origines des élèves ou les moyens de leurs familles, nécessite de comprendre que la France ne constitue pas un territoire homogène au regard de la scolarité. L’inscription des inégalités dans l’espace est un élément supplémentaire de difficulté, car les clivages territoriaux accentuent les inégalités devant l’école.
Il existe ainsi une véritable fracture entre l’outre-mer et l’Hexagone, en termes tant de besoins que de résultats. Certaines collectivités ultramarines ont une population particulièrement jeune, les conditions d’enseignement y sont difficiles – en particulier en Guyane – et les résultats des élèves aux évaluations de fin de scolarité primaire sont dramatiquement insuffisants.
En effet, les taux de réussite des élèves d’outre-mer sont loin de ceux des élèves de métropole. Ainsi, à titre d’exemple, malgré une légère baisse en primaire, les redoublements restent supérieurs à ceux des écoles de l’Hexagone. C’est dans cet esprit que je proposerai deux amendements visant à permettre un suivi personnalisé des élèves, amendements qui recueilleront sans aucun doute votre assentiment, monsieur le ministre. (Sourires.)
Ce problème est d’autant plus important que, souvent, du fait d’une crise économique plus accentuée dans nos territoires, les parents eux-mêmes sont dans des situations sociales et financières très compliquées et ne peuvent assister leurs enfants.
Je pense que ce projet de refondation de l’école est audacieux et qu’il fera grand bien à notre système éducatif malade ! Cependant, il faut, pour cela, se donner les moyens financiers nécessaires, car nous ne pouvons réformer sans moyens. Je pense, notamment, à la réforme des rythmes scolaires et au fonds d’aide qui sera alloué aux communes dans ce cadre.
J’ai pris bonne note de la mise en place d’une enveloppe de 250 millions d’euros pour accompagner les communes et, vu l’ampleur de la crise, je souhaiterais voir ce fonds pérennisé pour un accompagnement sur le long terme, afin de répondre aux enjeux d’égalité territoriale.
En effet, et pour finir, le budget des collectivités, qui assurent déjà le fonctionnement des écoles primaires, sera immédiatement affecté par les conséquences, dans un contexte de restriction budgétaire, de la modification des rythmes scolaires, telles que la mise à disposition de locaux, la gestion de personnels, les activités périscolaires, la restauration, les transports scolaires.
La place éminente reconnue par votre Gouvernement à l’éducation devrait néanmoins susciter un accompagnement soutenu du plan de développement numérique, à la faveur de la suppression des zones blanches et du renouvellement de matériels informatiques devenus obsolètes.
Je salue donc l’ambition du Gouvernement et souhaite pleine réussite à la refondation de l’école ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette.
M. Jean-Étienne Antoinette. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si « tout se joue avant six ans », si le contexte de la socialisation première de l’enfant et les apprentissages donnés très tôt à ce dernier sont d’une importance capitale, alors, je salue particulièrement l’universalité de l’article 5 votée en commission.
Néanmoins – j’en suis convaincu –, tout n’est pas perdu non plus pour les élèves après six ans. Je salue donc également l’article 8 de ce projet de loi, en regrettant seulement que cette ouverture de la « seconde chance » soit limitée au niveau V de qualification, alors que, on le sait, la réussite professionnelle augmente considérablement lorsque les élèves ont démontré leur capacité de passer du niveau V au niveau IV, c’est-à-dire le baccalauréat.
Ces deux articles portent, à mon sens, des principes et des objectifs clefs du système éducatif que nous refondons aujourd’hui. Et cela vaut davantage encore pour mon département, le plus sinistré de France en matière d’éducation, la Guyane.
Quelques chiffres illustrent ce constat : l’an dernier, le baccalauréat technologique a connu une baisse du taux de réussite de six points. Pour le baccalauréat professionnel, la baisse est de dix-sept points, ce qui creuse l’écart déjà important avec les résultats métropolitains.
En effet, 53 % de la population guyanaise des plus de 15 ans n’est pas diplômée, contre 20 % en métropole, et seuls 14 % de ceux qui ont quitté le système scolaire ont obtenu un diplôme de l’enseignement supérieur. Les difficultés d’insertion des 15-25 ans du département, dont 55 % souffrent du chômage, sont à mettre en corrélation avec ces parcours éducatifs non aboutis.
Mes chers collègues, permettez que j’insiste encore sur le cas particulier de la Guyane au regard des ambitions nationales affichées dans ce texte.
Mon département ne souffre pas d’un simple écart par rapport à la norme nationale, pas plus qu’on ne relève quelque situation particulière d’échecs dans des zones d’exclusion bien circonscrites. Le système éducatif est globalement sinistré, déconnecté de réalités sociologiques, économiques et culturelles différentes.
Lorsque 50 % de la population générale n’ont pas le français pour langue maternelle, une proportion qui atteint 100 % dans certaines parties du territoire, la question de la maîtrise de la langue française et, donc, de l’accès à la langue d’enseignement exige, à l’évidence, d’être abordée autrement que par la simple mise en cause de la grande diversité linguistique des apprenants.
Cette diversité linguistique, qui traduit aussi la diversité d’origine et de culture des élèves – 80 nationalités, 15 langues parlées – est un défi à l’école dans sa mission d’intégration.
Dès lors, ne devons-nous pas donner un sens particulier au concept de « refondation » de l’école en Guyane ? Au-delà, et surtout, n’est-ce pas un impératif républicain que de décliner les moyens nécessaires pour y mettre en œuvre l’ambition affichée ici ?
Comme dans tous les pays en mal de développement, la question des infrastructures est cruciale en Guyane, où la population scolaire a doublé en dix ans. Les conditions d’un égal accès de tous à l’école passent par la création d’établissements et de classes, ainsi que de postes, et cela dans le premier comme dans le deuxième degré.
En effet, si, chaque année, 5 000 enfants ne trouvent pas place à l’école primaire, les lycées peinent aussi à accueillir les redoublants de la terminale.
Je tiens ainsi à saluer votre action, monsieur le ministre, pour cette rupture que constitue la création des 216 postes d’enseignants de premier et second degré dans l’académie de Guyane.
Toutefois, les marges de progrès restent importantes au niveau des conditions d’accueil et d’hébergement des enseignants affectés dans les territoires isolés ou en difficulté et des conditions de scolarisation : la restauration scolaire et le transport sont encore trop insuffisants pour que les conditions matérielles de réussite des élèves soient pleinement réunies.
Cependant, au-delà des questions matérielles, la refondation de l’école ne sera qu’un mot qui sonne creux sans un changement de posture et des principes d’actions de l’éducation nationale en Guyane. L’exigence d’égalité républicaine ne saurait faire l’économie d’une approche différenciée de l’enseignement dans ce territoire d’exception. C’est même à cette condition qu’un véritable système d’égalité des chances pourra se bâtir en Guyane, à partir des réalités du territoire.
Ainsi, la formation des enseignants exerçant en Guyane doit intégrer le fait multiculturel comme une donnée de base, tout comme de vrais statuts professionnels doivent être élaborés pour les auxiliaires d’enseignement, tels que les médiateurs linguistiques ou culturels favorisant le lien direct entre l’école et l’environnement de l’enfant. Tous les spécialistes reconnaissent, en effet, que la valorisation des langues maternelles constitue le meilleur accès au français, langue de scolarisation
L’enjeu de ces efforts, sociétal autant qu’économique, c'est-à-dire le développement de la Guyane – mais n’est-ce pas vrai pour l’ensemble de notre pays ? – exige aussi bien la cohésion sociale que la formation de sa population. Ce texte est un grand mouvement, dans un sens que je soutiens pleinement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux, tout d’abord, saluer votre engagement dans cette discussion que j’ai appelée de mes vœux. Je vous remercie, ensuite, de la qualité des observations des uns et des autres. Pour y répondre, il me faudra apporter des précisions, rectifier des erreurs, des incompréhensions. Il me faudra aussi lever un certain nombre d’ « inquiétudes » – le terme a été employé – tout en acceptant des divergences, voire des controverses.
Je commencerai par saluer les nombreux amendements adoptés en commission. Sachez-le, je ne me dédis pas de l’état d’esprit qui est le mien depuis le début. Je ne cesse de le dire publiquement, j’en appelle, pour l’école, au rassemblement. Il me semblait – et cela devrait valoir encore – que la priorité accordée aux moyens du primaire, la mise en place d’une formation des enseignants, le développement d’un service public du numérique, les projets éducatifs de territoire pouvaient valoir, au-delà d’un certain nombre de réflexes conditionnés, que l’on se rassemble.
Chacun l’a compris, j’ai appelé au rassemblement. Monsieur Legendre, vous avez parlé de « bonne foi ». Je l’ai fait, en effet, de bonne foi, avec l’idée que la bonne volonté, comme on disait autrefois, est la qualité déterminante. Nous avons aussi besoin d’être précis, d’être exacts. La vertu des comportements commande de toujours agir de telle sorte que la maxime de son action puisse être érigée en loi universelle. Voilà un principe qui n’est pas inintéressant et que l’on l’apprenait autrefois dans ces écoles normales célébrées par certains ici ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Vous m’avez reproché, en dépit de mon attitude, d’être « sectaire » – ce mot, je l’ai entendu. Et vous avez avancé comme argument que vos amendements n’auraient pas été acceptés. Or, à l’inverse, trente-cinq amendements – dix-huit de l’UMP et dix-sept de l’UDI-UC – ont été acceptés au cours des débats en commission. Je reviendrai, d’ailleurs, au fil de la discussion sur certains de ceux que vous avez proposés.
Les leçons, les directeurs d’école, la revalorisation des métiers, l’accompagnement des moins de trois ans ? Lorsque la droite, alors aux responsabilités, présentait la loi dite « Fillon », au total quatorze amendements avaient été adoptés. À cette heure, alors que nos débats débutent, nous en sommes à trente-cinq !
Nous pouvons avoir des divergences, elles sont légitimes. Je considère que certaines observations méritent pleinement des réponses argumentées. Celles ne peuvent pas changer les convictions ou les points de vue, car la pédagogie n’est pas une science exacte. Néanmoins, si nous avons véritablement la volonté d’avancer, si nous considérons, ce dont la preuve n’avait pas été faite ces dix dernières années, que l’école est une priorité et que le système éducatif doit réussir, alors, on doit employer des arguments légitimes !
Vous l’aurez noté, c’est l’avenir qui m’intéresse. Le point de départ, c’est l’attitude que l’on a en entrant dans une classe. « Il faut donner d’abord », disait Alain, pour qui la liberté est un pouvoir de commencement.
Je me suis gardé d’évoquer les suppressions de postes. J’ai évité de dire que la semaine de quatre jours sans aucune concertation, la suppression de la formation des enseignants, c’était vous, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition. Cela vous prive, néanmoins, de tout droit de nous donner des leçons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Je faisais silence sur ces points parce que je considérais que vous étiez malheureux d’avoir été contraints, par les exercices de solidarité que nous connaissons, d’accompagner un mouvement qui n’était pas bon pour le pays. Toutefois, j’attendais au moins qu’un certain nombre d’entre vous soient au rendez-vous, au moment d’ailleurs où nous reprenons beaucoup de vos préconisations, sur l’accueil des petits enfants, sur la diversité des pédagogies, sur la remise en place d’une formation qui associe bien discipline, didactique et pédagogie au sens de la pratique. Ce moment, il était attendu depuis assez longtemps pour que vous puissiez nous rejoindre et faire fi des clivages politiques !
Or je constate, à ce stade, que vous n’êtes pas au rendez-vous, et je le déplore, y compris pour l’exemple que nous avons à donner, car l’école n’appartient pas à un camp contre un autre : elle appartient à tous les républicains. Je l’ai rappelé au début de la discussion, et vous avez repris cette idée.
Un certain nombre d’interrogations m’ont tout de même semblé légitimes. Quand on me parle des directeurs d’école, pour lesquels rien n’a été fait pendant dix ans, sinon supprimer toutes les aides administratives que je vais rétablir en un an, je pense que, là, le débat s’arrête ! Lorsque l’on nous dit qu’il faudrait accueillir les enfants de moins de trois ans, alors que la proportion d’accueil de cette tranche d’âge est passée de plus de 30 % à 11 % en l’espace de dix ans, le débat s’arrête ! En revanche, lorsque l’on soulève des interrogations légitimes, j’y réponds volontiers.
Monsieur Savin, les questions que vous avez soulevées me paraissent légitimes. La prise en charge et l’accompagnement des enfants de moins de trois ans doivent se faire de façon spécifique. Aucun d’entre nous ne pense – et je reviendrai, plus globalement, sur la maternelle, à propos de laquelle M. Carle, en particulier, a soulevé des questions – que l’accueil des enfants de moins de trois ans se fait comme celui des enfants de cinq ans, voire de sept ou neuf ans. C’est pourquoi nous avons indiqué qu’une formation spécifique pour l’école maternelle serait mise en place ; je remercie d'ailleurs le groupe CRC d’avoir insisté sur ce point.
Quand j’avais le bonheur d’enseigner en école normale, il y avait des modules de 70 heures pour préparer à l’enseignement en maternelle. Je vous rappelle que ces modules ont été totalement supprimés. Il y a une cohérence dans cette suppression, puisqu’elle est intervenue au moment où on « primarisait » l’école maternelle.
Monsieur Carle, nous considérons que, même du point de vue des apprentissages cognitifs, gnoséologiques et donc intellectuels, que vous appelez à juste titre de vos vœux, la préparation psychomotrice et affective est socialisante et tout à fait déterminante, comme nous l’enseignent tous les psychologues de l’enfance. En revanche, forcer des enfants à faire à cinq ans, avant la maturation nécessaire et alors que des problèmes de motricité peuvent les empêcher d’apprendre à écrire, ce qui ne peut être fait qu’à six ou sept ans, en ayant laissé mûrir l’enfance dans l’enfant, c’est provoquer nombre de difficultés scolaires, d’échecs et d’exclusions ; c’est d'ailleurs ce qui se passe aujourd'hui.
Il y a peut-être une différence entre nous, une différence noble, qui porte sur la pédagogie. Nous assumons pleinement, en accord avec les maîtres, notre choix de redonner à l’école maternelle toute son identité et sa formation, afin de préparer les apprentissages et de faire en sorte qu’ils soient couronnés de succès.
Vous avez abordé un point important : l’objectif d’avoir plus de maîtres que de classes en primaire. J’ai été très étonné que vous pensiez que ce principe pédagogique, qui permet, comme vous l’avez souhaité dans votre ouvrage, monsieur Carle, d’affecter plus de moyens au cours préparatoire et aux premiers apprentissages – le directeur général de l’enseignement scolaire et moi-même l’avons indiqué dans les circulaires d’accompagnement –, vise à traiter la difficulté scolaire.
Je continue de penser que les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, doivent être confortés, car ils ont toute leur place. Nous les ferons évoluer sur la base des rapports d’inspection. Toutefois, la pédagogie du maître surnuméraire, pratiquée dans un certain nombre de pays, que l’on cite souvent en exemple, vise non pas simplement à prendre en charge la difficulté scolaire, mais également à diversifier les pratiques pédagogiques dans la classe, afin de donner à tous les moyens de réussir.
Il existe également une incompréhension sur la question des rythmes scolaires. Vous m’avez adressé à de multiples reprises un reproche que je trouve curieux : vous m’avez reproché d’avoir commencé par mobiliser des moyens financiers pour la réforme des rythmes scolaires. Il est vrai que les intervenants ultérieurs m’ont quant à eux reproché de ne pas avoir mobilisé assez de moyens... Le principe de non-contradiction n’était donc déjà pas respecté !
Nous débattons d’une loi de programmation et d’orientation qui, pour ne prendre que cet exemple, prévoit que la Nation consacrera 800 millions d'euros à la remise en place de l’année de stage : 800 millions d'euros pour que les professeurs puissent entrer progressivement dans le métier, comme nous l’avons fait.
L’État n’a pas affecté 60 000 postes au traitement de la question des rythmes scolaires. Le fonds est doté de 250 millions d'euros, et vous savez très bien qu’il fait appel à la caisse nationale des allocations familiales, la CNAF. Votre reproche est donc injuste. En la matière, la priorité n’est pas financière. Comme l’ont rappelé plusieurs orateurs, les moyens sont mis au service d’un projet pédagogique qui passe par le rétablissement de la formation.
Je crois que, sur ce sujet, il n’y a pas de divergences entre nous. Peut-être avez-vous la volonté de ne pas voir ce que nous faisons. Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, dont certains ont salué le principe, ont précisément vocation à faire en sorte que la professionnalisation soit assurée par la présence de praticiens – professeurs, conseillers pédagogiques, maîtres formateurs, conseillers principaux d’éducation, inspecteurs – dans les établissements.
Nous récusons la division, que le système n’a d'ailleurs jusqu’à présent jamais réussi à établir, entre la théorie et la pratique. Les praticiens iront enseigner dans les écoles. Ils accueilleront, mais ils iront enseigner dans les écoles. Bien entendu – je le souligne en réaction à un amendement que je ne peux pas accepter –, les enseignements disciplinaires ne seront pas entièrement assurés par les écoles : les unités de formation et de recherche, les UFR, en assureront également.
Je rejette les accusations de pédagogisme, les reproches éternels formulés à l’encontre des instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM d’autrefois. Nous devons dépasser les problèmes, tous ensemble, car le problème français réside dans le cloisonnement. C’est pour cette raison que je veux réunir tout le monde – les universitaires, les praticiens, les éducateurs, les maîtres du primaire et les maîtres du secondaire – dans les ESPE, afin que chacun apprenne qu’il a quelque chose à apprendre des autres. En outre, comme vous nous avez permis de le préciser, il y aura un investissement important sur le terrain.
Des inquiétudes ont été exprimées. Madame Bouchoux, la pédagogie que vous appelez de vos vœux est fortement présente dans l’ensemble du projet de loi. Je l’ai toujours affirmé, la refondation de l’école de la République se doit d’être une refondation pédagogique.
Le problème que nous rencontrons – cela nous ramène à mon évocation de Michelet –, c’est que la pédagogie française républicaine est une pédagogie de la coopération, et même du mutuellisme, comme on disait autrefois, une pédagogie de l’action, de l’initiative, de la confiance. C’est bien parce qu’il existe une distorsion entre les qualités que l’on attend du citoyen, et éventuellement du travailleur, et celles que l’on enseigne à l’école, que nous sommes confrontés à une difficulté structurelle et très ancienne.
Plusieurs de mes prédécesseurs ont tenté de rectifier la situation ; Jean-Michel Baylet a cité Jean Zay, par exemple. Cependant, à chaque fois, l’inertie, la lourdeur et une certaine forme d’incompréhension des fondements mêmes de notre engagement républicain ont conduit à dévaloriser les méthodes que je viens d’évoquer. Elles sont toutefois présentes, à de nombreux points de vue.
La discussion à l’Assemblée nationale et en commission au Sénat a déjà permis d’enrichir le projet de loi : d'abord, en substituant une logique de coopération à une logique de compétition ; ensuite, en précisant, comme vous le souhaitiez, que la réforme s’inscrit dans un projet d’école tout au long de la vie ; enfin, en rappelant – vous y avez beaucoup insisté – que le numérique doit être facteur de travail en équipe, interdisciplinaire et en initiative. Il faut changer les pédagogies et les pratiques pédagogiques elles-mêmes. Tout cela est déjà dans le texte, qui a été enrichi par vos travaux.
J’en viens aux projets éducatifs de territoire. Certains se sont demandés si ce projet de loi comportait une grande réforme ; il n’en comporte pas une, mais plusieurs. Il n’y a qu’à voir les résistances qu’il suscite. Les projets éducatifs de territoire sont évidemment une nouveauté. Leur mise en œuvre sera évidemment difficile : il est difficile de s’ouvrir aux autres, de travailler avec les autres, de concevoir un projet éducatif.
Les collectivités locales financent 25 % de l’investissement éducatif en France. Il faut demander à l’État d’accepter de leur parler, car les collectivités ne sont pas seulement des carnets de chèques. Il faut également dire aux professeurs que les éducateurs sont des gens respectables, auxquels on confie d'ailleurs les enfants. C’est ce que nous avons fait, pour nous mettre au niveau des pays qui réussissent. Il est donc normal que nous rencontrions les difficultés que vous avez pu observer ces derniers temps.
Un comité de suivi, qui réunit l’ensemble des associations d’élus, des syndicats d’enseignants et bien entendu des représentants des parents, examine les projets éducatifs qui ont été mis en place cette année. Si c’est nécessaire – et ce sera sans doute nécessaire, comme pour les ESPE –, nous améliorerons le dispositif au fur et à mesure. Le comité de suivi est actuellement au travail.
Vous avez réclamé plus de liberté locale, plus de souplesse dans l’ensemble du dispositif. Je viens de faire une expérience en tant que ministre de l’éducation nationale – vous avez raison d'ailleurs de dire que je suis ministre du scolaire et non du périscolaire. J’ai décidé qu’il y aurait de nouveau école le mercredi ou le samedi matin. Au cours préparatoire, au CP, quinze heures sont consacrées aux apprentissages fondamentaux. Or je sais qu’il vaut mieux trois heures cinq matins par semaine que trois heures quatre matins par semaine, avec un complément vers seize heures. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Ma responsabilité est de faire en sorte que les enfants sachent lire, écrire et compter. C'est pourquoi je mettrai en œuvre la réforme des rythmes scolaires quelles que soient les résistances et les mauvaises fois. J’assume la responsabilité de l’État ; aux collectivités locales d’assumer leurs responsabilités, qui sont différentes. Il faut associer tout le monde à la réforme.
J’ai entendu un certain nombre d’affirmations que je souhaite rectifier. La mise en place de la réforme des rythmes scolaires, ce n’est pas une question de richesse ou de pauvreté des collectivités locales. Certaines collectivités parmi les plus pauvres de France – Roubaix ou Denain, par exemple – passeront dès cette année à la semaine de cinq jours.
M. Michel Savin. Et Lille ?
M. Vincent Peillon, ministre. Nous avons décidé – peut-être ne l’aviez-vous pas noté, mais c’est désormais inscrit dans le projet de loi grâce au Sénat – de donner plus d’argent aux communes les plus pauvres.
Madame Férat, vous vous êtes inquiétée du financement, en faisant remarquer que toutes les collectivités ne recevraient pas la même somme. Justement ! Nous avons veillé à ce que les collectivités, urbaines ou rurales, qui ont le moins de moyens reçoivent davantage que les autres : 130 euros au lieu de 50 euros.
Comme cela a été souligné dans cet hémicycle, il n’y a pas non plus de partage entre les communes urbaines et les communes rurales.
Nous connaissons de grandes villes, des villes riches, dont certaines sont dirigées par la gauche, qui ne passeront pas à la semaine de cinq jours cette année ; vous le savez bien, puisque vous avez parfois utilisé leur choix de manière polémique.
Nous connaissons également des départements extrêmement ruraux, à commencer par celui du président de votre noble assemblée ou celui de Jean-Michel Baylet, dans lesquels de nombreuses communes passeront dès 2013 à la semaine de cinq jours. La commune du président de l’Association des maires ruraux de France, M. Vanik Berberian, qui, je crois, compte 150 habitants, y passera elle aussi dès cette année.
M. Michel Savin. Et Lille ?
M. Vincent Peillon, ministre. Par conséquent, il doit y avoir autre chose que le critère de la pauvreté ou de la richesse, de la petitesse ou de la grandeur des communes, même si je ne doute pas que ces éléments soient respectables.
Monsieur Savin, vous avez évoqué la priorité donnée aux enfants de moins de trois ans. C’est un grand acquis du projet de loi ; tout le monde l’a souligné. J’ai bien compris votre argumentation, mais nous n’allons pas exclure les autres, car il n’y a aucune raison de le faire. Cependant, nous assumons notre priorité. Je mettrai d'ailleurs tous les éléments à votre disposition, car je suis favorable à la transparence de toutes les évaluations, y compris sur les internats d’excellence ; j’y reviendrai d'ailleurs dans un instant, puisque l’évaluation a eu lieu : on connaît le coût et les résultats du dispositif.
M. Serge Dassault. Combien cela coûte-t-il ?
M. Vincent Peillon, ministre. Je vous l’indiquerai dans un instant.
C’est au vu des résultats de cette évaluation que mon prédécesseur avait déjà fait évoluer très largement les internats d’excellence. Je vous en prie, ne nous livrons pas à des débats théologiques sur une affaire aussi sérieuse !
Mme Françoise Férat. Précisément !
M. Vincent Peillon, ministre. Je ne partage donc pas vos arguments, monsieur Savin, même si le fond de votre interrogation est juste. Il faudra veiller – cela relève aussi de votre responsabilité de parlementaire – à ce que nous tenions nos engagements.
Les postes doivent être accompagnés. On ne peut pas recourir à n’importe quelle pédagogie. Il faut être extrêmement vigilant sur l’accueil des enfants de moins de trois ans. Il y aura 3 000 postes, vous l’avez fort bien dit. Si on fait le calcul sur cinq ans, on se rend compte le nombre de 60 000 postes ne nous permet pas d’aller aussi loin que nous le souhaiterions. En tout cas, des postes seront réservés aux zones en difficulté.
J’en viens à la prise en charge pédagogique des enfants qui sont dans les centres d’accueil d’urgence. Je suis convaincu de la générosité de votre intention, mais je ne pense pas qu’il soit utile de séparer ces enfants des autres. Je ne crois pas aux séparations. Je crois que nous devons en permanence nous rassembler. Je crois même que c’est la mission de l’école : cesser de singulariser et d’individualiser, afin de produire du commun. C’est ce qui manque à notre société : on ne rassemble pas assez, on ne produit pas assez de commun.
Ma collègue George Pau-Langevin, actuellement retenue par les questions d’actualité au Gouvernement à l’Assemblée nationale, a émis plusieurs circulaires à ma demande. L’administration de l’éducation nationale est donc mobilisée plus qu’aucune autre. Vous pouvez juger que c’est encore insatisfaisant, mais, dans un récent avis, le Défenseur des droits, Dominique Baudis, a rendu hommage, comme je le fais moi-même, aux fonctionnaires de l’éducation nationale pour la manière dont ils ont répondu aux demandes d’accueil de ces enfants, formulées au nom de la dignité humaine et de nos principes partagés.
Même en nous mobilisant au maximum, nous nous sommes heurtés à des difficultés venant des populations qui accueillent d’autres missions, d’autres services de l’État, comme vous pouvez vous-mêmes en rencontrer dans vos activités d’élus responsables. L’éducation nationale est présente à ce rendez-vous. S’il y a des problèmes, il ne faut pas hésiter à nous les signaler, avant bien entendu que des évaluations ne soient menées.
Madame Bouchoux, la coéducation est au centre de notre projet. Vous le savez, elle doit beaucoup aux apports du groupe écologiste. Tel fut aussi le cas pour la reconnaissance des alliances avec les familles, comme avec le mouvement d’éducation populaire et le mouvement associatif.
En même temps, nous avons voulu faciliter les expérimentations pédagogiques et faire en sorte que les équipes puissent être reconnues.
S’agissant du collège unique, permettez-moi de vous dire qu’il y a un malentendu. À ce sujet, je vous recommande de relire l’article le concernant. Non, nous ne croyons pas qu’il faille séparer les enfants à l’âge de treize ou quatorze ans ; nous ne pensons pas qu’existe un destin s’imposant aux enfants. Nous considérons donc – je vous remercie d’ailleurs du travail réalisé sur la notion de socle, sur laquelle je vais revenir – qu’il faut les élever au maximum d’éducation, de connaissance et de compétences possible, ce qui, à mon sens, sous-tendait le principe de l’école obligatoire et l’idée de socle.
Non, nous n’avons pas supprimé l’apprentissage à quinze ans. Là encore, ayons la précision de ceux qui aiment l’école, qui la connaissent et lisent les textes. Nous avons seulement supprimé un premier dispositif dit « d’apprentissage junior », figurant à l’article L. 337-3 du code de l’éducation, voté en 2005, dont le Gouvernement avait d’ailleurs, dès 2007, annoncé vouloir la suppression, sans donner suite. Cet article permettait à des jeunes de quatorze ans d’entrer dans un programme les menant, dès quinze ans, à la signature d’un contrat d’apprentissage.
Ce dispositif n’a d’ailleurs concerné personne. Pourquoi ? Tout simplement parce que la difficulté est de trouver des stages d’apprenti ! Xavier Bertrand a passé des années à nous parler d’un objectif de 800 000 apprentis fixé par le président Sarkozy. Or, en cinq ans, nous avons assisté à une augmentation de 15 000 du nombre d’apprentis, qui reste bloqué à 450 000. Il faut donc s’interroger sur ce point.
Concernant l’initiation aux métiers en alternance, ce que nous supprimons en abrogeant le dispositif dit « Cherpion », qui datait de 2011, c’est uniquement la possibilité, pour ceux qui ont moins de quinze ans, d’aller en apprentissage. Ceux qui ont quinze ans le peuvent toujours, mais je souhaiterais – je pense que vous pouvez partager ce souhait, puisque vous avez l’air attachés au socle commun – qu’ils le fassent en ayant la maîtrise des connaissances fondamentales.
Ce dispositif de 2011 a concerné 7 000 jeunes pour l’ensemble du pays. À ceux qui ne comprennent pas et qui ont notamment affirmé dans deux interventions publiques inscrites au Journal officiel que j’avais supprimé un dispositif d’apprentissage à partir de quinze ans, je répète que c’est faux : le dispositif demeure à partir de quinze ans. Seul est supprimé le dispositif applicable à partir de quatorze ans, que vous aviez mis en place et qui n’a jamais concerné personne. Il s’agit donc d’un débat très idéologique.
À cet égard, je tiens à dire qu’aucune entreprise de France – vous le verrez avec le conseil économie-éducation que nous mettons en place – ne réclame ce dispositif. En effet, les entreprises ont besoin de salariés qualifiés, capables d’évoluer, ayant un niveau d’instruction suffisant. Je veux être précis sur ce point. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jacques-Bernard Magner. Évidemment. Et même chez Dassault !
M. Vincent Peillon, ministre. Madame Gonthier-Maurin, je voudrais répondre à vos inquiétudes. Sur certaines d’entre elles, je considère que nous apportons d’ores et déjà des réponses. Sur d’autres, nous allons avoir à débattre.
Au préalable, je vous remercie des appréciations positives que vous avez faites. Vous saluez la création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, donc le retour à une formation professionnelle des maîtres.
Vous vous réjouissez de la création des postes. Vous vous félicitez, en particulier, du rétablissement des moyens dédiés aux remplacements, soit 1 000 postes pour la rentrée qui vient.
Vous soulignez l’importance de l’accueil des enfants à l’école, dès deux ans, dans les zones les plus difficiles.
Vous appréciez la création d’un service public du numérique, ainsi que du parcours d’éducation artistique et culturelle.
Il est vrai que les objectifs de mixité sociale, de réussite scolaire pour tous, de capacité d’apprendre et de progresser accordée à tous les enfants ne figuraient pas dans le texte initial. Vos travaux ont permis une telle réécriture de l’article 3, en bonne intelligence, d’ailleurs, avec les autres groupes de gauche de cette assemblée. À mon avis, la loi en aura davantage de sens et de force.
Je salue aussi les précisions qui ont été apportées sur les missions de l’école maternelle. Comme je l’ai dit tout à l’heure, il s’agit pour moi d’un objet essentiel de ce projet de loi, indispensable pour mettre en œuvre nos projets dans un futur proche.
Les éléments que vous avez apportés enrichissent encore les débats qui durent depuis plus d’un an sur le socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Néanmoins, il ne s’agit pas de s’arrêter là, comme si le minimum était suffisant. Au contraire, il faut l’assurer à tous les enfants de France comme un moyen d’aller au-delà.
Monsieur Legendre, sachez que je ne prétends pas du tout le raboter. Vous en aviez débattu en 2005 dans l’hémicycle, pensant qu’il revenait à la représentation nationale de le définir. Il me semble même que vous vouliez vous attaquer aux programmes ; nous en débattrons.
Mme Catherine Morin-Desailly. Pas les programmes !
M. Vincent Peillon, ministre. Vous vous êtes rendu compte, dès l’année suivante, qu’il fallait procéder autrement, puisque, évidemment, la sérénité requise pour ce genre d’exercice n’était pas assurée dans une assemblée parlementaire. Il a donc fallu réécrire le socle.
Je considère comme tout à fait dommageable la suppression du Conseil national des programmes tel qu’il existait, même sous des majorités de votre sensibilité. Il faut un organe indépendant du ministre, des pressions partisanes ou médiatiques pour traiter des sujets aussi sérieux, bien évidemment sous le regard du Gouvernement et du Parlement. C’est ce que je ferai pour la première fois au sein du Conseil supérieur des programmes, comme je le ferai dans le conseil d’évaluation, au sein desquels les sénateurs pourront siéger.
En même temps, il fallait évidemment préciser que le socle est non pas un terme, mais un point de départ. Notre but, partagé avec les responsables des projets éducatifs de territoire, au-delà même de la priorité accordée aux apprentissages fondamentaux, est de donner la possibilité à tous les enfants, de tous les milieux, de tous les territoires, d’avoir accès au meilleur de notre culture.
Lisez ce qui est écrit dans le projet de loi à propos de l’éducation culturelle : tout y est ! Aujourd’hui, 10 % des enfants de France en bénéficient ; les collectivités locales sont très engagées pour proposer des pièces de théâtre, des séances de cinéma ou des activités diverses. Néanmoins, seuls 10 % des enfants sont concernés. L’objectif est donc que tous les enfants, à commencer, d’ailleurs, par ceux qui en bénéficient le moins chez eux, puissent profiter de cette offre culturelle. C’est ainsi que nous devons entendre le socle commun de connaissances, de compétences et de culture.
Nous avons pu préciser le retour en formation initiale pour les jeunes décrocheurs. À cet égard, je tiens à vous dire que nous avons d’ores et déjà des résultats importants.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai bien noté que vous exprimiez deux interrogations principales.
La première, que vous portez depuis longtemps, concerne le pré-recrutement des enseignants. Je vous le dis comme je le pense : cette préoccupation est légitime, et je la partage. Grâce aux emplois d’avenir professeurs, j’ai apporté un début de réponse, même s’il est évident qu’il n’est pas à la hauteur de ce que les uns et les autres pourraient souhaiter. Malheureusement, nous sommes liés par une contrainte budgétaire que certains ont rappelée ; je tiens d’ailleurs à dire à Serge Dassault que nous y dérogeons.
De plus, comme vous le savez, lors des travaux menés à l’Assemblée nationale, j’ai accepté que soit voté un amendement déposé par vos collègues communistes, menés par Marie-George Buffet, pour que soient étudiées les modalités de mise en œuvre d’un système de pré-recrutement des personnels enseignants dès la licence. À mon sens, cette question se posera avec acuité dans les années qui viennent.
Ne vous méprenez pas, madame Blandin, madame Bouchoux, je ne suis pas du tout insensible à vos propos sur le concours en fin de troisième année. Néanmoins, tout le monde, ici, connaît assez bien le sujet pour savoir que le simple fait de l’avoir ramené en fin de quatrième année, malgré la position de nombre d’acteurs, que, parfois, d’ailleurs, vous défendez, était une prise de risque. En effet, les syndicats d’enseignants, les enseignants eux-mêmes, qui souhaitent la revalorisation de leur métier, étaient attachés, pour beaucoup d’entre eux, au concours en fin de cinquième année.
Si elles ne coûtent pas davantage d’argent public et si elles assurent une meilleure formation, nous serons alors disposés, dans les années qui viennent, à envisager ces évolutions.
Notre unique objectif est de donner la meilleure formation professionnelle aux enseignants de France, parce qu’elle seule permet – le rapport de la Cour des comptes le dit encore aujourd’hui – la réussite des élèves. De ce point de vue, je pense que nous pouvons cheminer ensemble.
Votre deuxième interrogation porte sur la territorialisation. Je tiens à vous dire, même si j’ai déjà eu l’occasion de le faire, que l’État n’a pas toujours été dans notre pays la garantie absolue de l’égalité entre les uns et les autres. Si tel était le cas, cela se saurait !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La région non plus !
M. Vincent Peillon, ministre. Il arrive parfois que les collectivités locales – je le vois dans un certain nombre de cas – jouent un rôle et portent des valeurs qui peuvent être utiles à vos objectifs, lesquels sont partagés, me semble-t-il, par l’ensemble de cette assemblée.
À propos d’un certain nombre d’autres questions, des inquiétudes légitimes se manifestent.
S’agissant de l’orientation, vous devriez vous dire – peut-être est-ce le cas ? – que, au fond, quitte à prévoir un cadrage national des politiques d’orientation, autant que ce soit dans une loi d’orientation et de programmation de l’éducation nationale, plutôt que dans d’autres textes. En tout cas, les principaux acteurs étatiques de l’orientation préfèrent cette solution, car l’éducation nationale garantit qu’il y aura bien une politique d’État et que les personnels qui, au sein de mon administration, assurent ces missions continueront à le faire dans le cadre d’une politique nationale, au sein d’établissements dans lesquels l’État gardera toutes ses prérogatives.
Si nous pouvons mieux coordonner les politiques d’orientation conduites par l’État et les autres dispositifs existants, nous aurons progressé.
Vos inquiétudes portent également sur les cartes de formation professionnelle. Cette question fait maintenant l’objet d’un débat public. Notre objectif est que les régions et l’État travaillent ensemble du mieux possible, sans que quiconque impose son point de vue de façon univoque.
Il faut donc prévoir un dialogue obligatoire. Nous en cherchons encore les meilleures formules, mais je souhaite qu’il permette aux régions de s’impliquer pleinement – c’est tout à fait naturel, puisqu’il s’agit de leurs compétences – dans ces questions de formation professionnelle. Une grande réforme est d’ailleurs annoncée sur le sujet. À l’inverse, je souhaite que l’État exerce pleinement ses responsabilités et garde la maîtrise, bien entendu, de son offre d’éducation, grâce aux ouvertures et aux fermetures des formations, mais aussi à la contractualisation.
Je ne veux pas qu’apparaisse un déséquilibre tel que l’État serait alors obligé de subir une logique régionale, elle-même au service d’intérêts économiques exclusifs et de court terme. Inversement, je ne veux pas que les régions se voient imposer, comme c’est arrivé, vous le savez, dans un certain nombre de cas, un diktat de l’État, qui ne serait pas légitime au regard de l’intérêt des élèves. Nous avons donc à construire cette position d’intelligence collective. Toutefois, à aucun moment je n’ai pu imaginer – sinon il n’y aurait pas eu de projet de loi d’orientation et de programmation – que l’État abandonnerait ses responsabilités.
Un certain nombre de vos propos visaient à montrer à quel point notre projet de loi, malgré ce que certains veulent en dire, porte des réformes déterminantes pour l’avenir.
C’est vrai sur le numérique, mais aussi sur l’appréhension des projets éducatifs de territoire. C’est vrai sur la modernité de l’apprentissage d’une langue étrangère dès le CP. C’est vrai aussi de notre volonté de voir l’école transmettre les valeurs de la République – je remercie les sénateurs radicaux d’avoir insisté sur ce point –, en particulier la morale laïque, sur laquelle nous aurons l’occasion de discuter lors de l’examen de l’article correspondant.
Dans notre tradition, cette morale est tout sauf une morale d’État ! Au contraire, son enseignement vise à donner à chacun la capacité de construire sa propre liberté – une notion qui, avant même l’égalité, est la valeur première de notre République.
Monsieur Couderc, j’ai compris que vous alliez voter notre projet de loi, puisqu’il vous donne entièrement satisfaction quant à la promotion des langues régionales. Au passage, permettez-moi tout de même de vous rappeler que, de même que la suppression de l’aide aux directeurs d’école et, depuis 2010, que la suppression de l’accompagnement des enfants en situation de handicap, la suppression des postes aux CAPES de langues régionales résulte d’une décision de mes prédécesseurs.
Pour l’enseignement des langues régionales, toutes les avancées ont été dues à des ministres de gauche, de Lionel Jospin à Jack Lang. La raison de cet intérêt est simple et vous l’avez très bien exprimée à la tribune, monsieur Couderc, de même que nos amis ultramarins : le plurilinguisme contribue à une meilleure appropriation par chacun de sa propre langue…
M. Jean-Jacques Mirassou. Exactement !
M. Vincent Peillon, ministre. Je ne rouvre pas les débats d’il y a vingt ans, comme j’ai pu l’entendre dire, et je ne cherche pas non plus à opposer jacobins et girondins.
Au contraire, nous avons la volonté d’affirmer que l’universel que nous souhaitons promouvoir se construit non pas sur l’éradication des différences, mais sur la capacité à faire de ces différences l’expression de cet universel, qu’elles viennent même renforcer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Cette doctrine, commune aux républicains siégeant sur toutes ces travées, nous a toujours guidés pour la promotion des langues régionales, et nous poursuivons donc dans cette voie sans hésitation.
Madame Dominique Gillot, vous avez évoqué avec émotion la situation de l’accueil des enfants en situation de handicap dans l’école de la République. À plusieurs reprises, j’ai voulu inscrire mon action dans une continuité – je ne sais pas à quoi cela sert, d’ailleurs, puisque, dans le fond, on n’en voit jamais le retour ! Tel est le cas des plates-formes de suivi des décrocheurs, de l’enseignement de la morale et de la lutte contre le harcèlement, prévus par mon prédécesseur. De même, la loi Fillon de 2005 évoquait déjà l’accueil des enfants en situation de handicap.
Cet accueil est promu à tous les niveaux par le présent projet de loi, comme il ne l’a jamais été auparavant, avec la reconnaissance de la politique inclusive. Ce choix va nous conduire à recruter, à la rentrée prochaine, plusieurs milliers d’assistants de vie scolaire supplémentaires. Je suis prêt à demander à la Nation de faire cet effort, puisqu’elle l’a choisi. Par ailleurs, ce n’est que justice pour les enfants concernés.
Lorsque nous nous rendons dans des établissements accueillant des enfants en situation de handicap – nous l’avons fait ensemble, madame la sénatrice –, les personnels, les parents, les autres élèves reconnaissent tous qu’ils en tirent un enrichissement. Il s’agit non pas simplement de rendre service à ces enfants, mais aussi d’éduquer tous les autres et de les faire grandir. Il faut donc que nous soyons cohérents et que nous y consacrions les moyens nécessaires.
La gauche, parce qu’elle met évidemment en conformité ses actes et ses discours – nous le voyons dans le cas de l’école –, créera dès la rentrée prochaine les milliers de postes nécessaires à l’accueil des enfants en situation de handicap.
Dès notre arrivée aux responsabilités, 1 500 postes supplémentaires ont été créés. Je laisserai au Président de la République et au Premier ministre le soin d’annoncer ce que nous ferons l’année prochaine, mais l’effort sera sans commune mesure avec ce qui a pu être accompli auparavant dans ce pays ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Je profite de ma présence à cette tribune pour rappeler aussi que la situation des directeurs d’école, dans notre pays, est très difficile. Après dix ans pendant lesquels l’ancienne majorité n’a rien fait, si ce n’est supprimer leurs aides administratives, je rétablirai dans leur intégralité ces dernières dès la rentrée à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous allons aborder l’examen des articles. Je suis prêt à toutes les ouvertures, mais je ne voudrais pas que l’on profite de cette disposition d’esprit pour faire croire que tout est dans tout et qu’il n’y aurait rien de nouveau dans ce texte. Ce n’est pas vrai ! La politique que conduit la gauche – j’espère qu’elle sera rassemblée dans cet hémicycle – tranche radicalement avec celle des gouvernements précédents.
Lorsque nous affirmons donner la priorité à l’enseignement primaire, nous inversons un mouvement vieux d’un siècle et demi ; mais, dans le même temps, c’est pendant les dix dernières années que l’on a enregistré le plus de suppressions de postes. Lorsque nous remettons en place la formation des enseignants, nous savons qu’elle a pu parfois être insatisfaisante, certes, mais elle a bel et bien été supprimée pendant ces trois dernières années. Lorsque nous reconnaissons que l’apprentissage demande du temps et qu’il faut donc revenir sur des rythmes scolaires uniques au monde – 144 jours par an et des journées surchargées –, il faut rappeler que cette situation a été créée il y a quatre ans seulement !
Comme l’a dit M. Assouline, ce que nous faisons pour le numérique ne s’inscrit pas dans la continuité, c’est bel et bien une révolution. Les projets éducatifs de territoire, quant à eux, changent totalement la représentation de la scolarité. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
Il faut que vous conveniez que ce projet de loi est un grand texte. Il faut que vous admettiez, à un moment ou à un autre, qu’il faut savoir définir des priorités. Nous avons fait le choix d’accorder la priorité à l’école ; manifestement, la précédente majorité avait fait d’autres choix. Nous l’assumons pleinement, pour tous les enfants de France, sans esprit partisan, et je souhaite que vous puissiez nous rejoindre à l’issue de ce débat ! (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste se lèvent.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des motions.
Question préalable
M. le président. Je suis saisi, par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, d’une motion n° 165.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (n° 569, 2012-2013).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Sophie Primas, pour la motion.
Mme Sophie Primas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, au-delà des mots choisis et commentés par certains de nos collègues, nous semble décevant, car il est trop incomplet et éloigné de nombre des réalités et des causes de l’échec scolaire.
Un moment d’alternance politique est pourtant favorable pour oser engager les réformes de fond, que vous avez vous-même maintes fois appelées de vos vœux. Pourtant, avec ce projet de loi, vous tournez autour des vrais enjeux du monde de l’éducation, sans jamais oser vous lancer dans une politique globale.
Cette politique, vous auriez pu la construire en analysant encore mieux, comme l’a fait la Cour des comptes, les failles de notre système éducatif. Au lieu de cela, nous renouons avec un vocabulaire certes fourni, très riche, très généreux, mais trop souvent idéologique, et avec des objectifs – éducation à la santé, à la morale laïque, à l’égalité de genre, à la sensibilité artistique – certes extrêmement importants, mais parfois périphériques au regard des difficultés extrêmes rencontrées par certains, qui appellent d’autres priorités ; je pense aux méthodes pédagogiques, au socle commun et à sa définition, à l’orientation, au rôle de l’inspection, à l’apprentissage.
L’essentiel de votre réforme repose sur l’octroi de moyens supplémentaires à l’école. Parlons donc de ces moyens ! Nous partageons avec vous la conviction que l’école doit échapper aux logiques comptables. Sur ce point, je me permettrais de citer un ancien président de l’université d’Harvard, qui disait : « Si vous pensez que l’éducation coûte cher, essayez donc l’ignorance ! ».
Cependant, l’éducation nationale ne peut se dédouaner de la nécessité de s’assurer de la juste utilisation de chaque denier public. Notre déficit public s’élève à 4,8 % du PIB, loin de notre objectif de 3 %, et nous n’arrivons pas à sortir de la spirale des déficits records. La précédente majorité avait souhaité réduire les dépenses de l’éducation nationale – et nous l’assumons –, en appliquant la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux. Ce choix reposait sur un postulat que vous rejetez d’office, celui de l’absence de lien entre les résultats éducatifs et une augmentation des moyens.
Pourtant, ce postulat n’est pas le nôtre, mais celui de la plupart des études traitant des questions éducatives. Ainsi, dans le quatrième volume de ses résultats pour 2009, intitulé Les Clés de la réussite des établissements d’enseignements, le PISA remarquait une « corrélation faible entre les ressources pédagogiques et la performance des élèves », cette dernière étant plutôt liée, dans les nations industrialisées, à la « qualité des ressources humaines, c’est-à-dire les enseignants et les chefs d’établissement ». De fait, le seul type de ressources pour lesquelles PISA montre une corrélation formelle avec la performance des élèves est « le niveau des salaires des enseignants par rapport au revenu national ».
Cette appréciation éclairera peut-être l’actuelle majorité sur les choix de ses prédécesseurs, qui n’ont pas jugé utile d’augmenter les ressources humaines globales, pour plutôt participer à une revalorisation du traitement des enseignants et de leur formation, ce qui ne sera plus possible à l’avenir, puisque vous vous liez les mains, monsieur le ministre, en consacrant votre budget à des augmentations du nombre de postes.
Ce constat vient d’être confirmé, aujourd’hui même, par un rapport de la Cour des comptes traitant du métier d’enseignant. Selon ce document, « le ministère de l’éducation nationale ne souffre pas d’un manque de moyens ou d’un nombre trop faible d’enseignants, mais d’une utilisation défaillante des moyens existants ». La Cour des comptes souligne que les effectifs des enseignants du secondaire n’ont pas cessé d’augmenter entre 1993 et 2005, alors que ceux des élèves diminuaient parallèlement. Et entre 2009 et 2011, les effectifs d’enseignants du primaire augmentaient, quand ceux de leurs élèves stagnaient.
Par ailleurs, pour les sages qui ont rédigé ce rapport, aussi incroyable que cela puisse paraître, les décisions de recrutement sont guidées par le volume d’heures de cours et le souci d’assurer chaque année, grâce aux postes ouverts au concours, des débouchés satisfaisants aux universités. M. le Premier président Didier Migaud souligne par ailleurs la nécessité d’une redéfinition du métier d’enseignant, d’une réflexion sur les affectations et sur la régionalisation des embauches.
Autrement dit, le lien de causalité entre l’augmentation du nombre de postes et les résultats scolaires, sur lequel se fonde le Gouvernement aujourd’hui pour légiférer et pour élaborer sa nouvelle politique publique de l’éducation, est faux et clairement dénoncé comme tel par la Cour des comptes.
Le dépôt de cette question préalable nous paraît donc s’imposer, en raison de votre analyse inexacte de la situation, mais également de la déconnexion des solutions que vous envisagez avec la réalité du terrain.
L’écart se creuse, effectivement, entre les élèves performants et les élèves en très grande difficulté scolaire. Ces difficultés apparaissent dès les premières années et se répercutent sur le reste de la scolarité de l’élève si elles ne sont pas prises en compte et résolues dès leur apparition. Elles correspondent également, le plus souvent, aux inégalités sociales, vous l’avez souligné.
L’étude de la proportion d’élèves en retard à l’entrée en sixième en 2010 indique que 3,4 % des enfants de cadres et d’enseignants entrent dans cette classe avec un retard, alors que 18,3 % des enfants d’ouvriers sont dans ce cas.
D’une politique de massification des moyens que vous nous proposez aujourd’hui, nous devons passer impérativement à une politique de prise en charge diversifiée des élèves, avec une personnalisation de l’enseignement, afin de ne laisser personne au bord du chemin. Pour aider ces élèves en grande difficulté – moi qui suis élue de la partie populaire du département des Yvelines, avec ses quartiers en difficulté, je sais de quoi je parle –, il faut reconnaître la nécessité d’adopter des démarches spécifiques, ce qui ne revient en aucune façon, bien sûr, à les stigmatiser.
Cette démarche doit être engagée dès l’école élémentaire et nous approuvons, monsieur le ministre, votre choix de donner la priorité à l’enseignement primaire. Malheureusement, vous ne prévoyez pas d’enseignements ni d’accompagnements spécifiques à ce stade, ou du moins pas clairement.
Pourtant, plusieurs expérimentations mentionnées dans le livre de notre collègue Jean-Claude Carle ont démontré que l’individualisation de l’enseignement est bien plus efficace qu’un cours magistral dans les petites classes. Je pense aux exemples canadien, anglais ou finlandais. Voilà une idée qui, clairement exprimée dans ce projet de loi, aurait pu faire l’objet d’une refondation.
Par ailleurs, vous ne traitez du collège que pour vous assurer qu’il est bien monolithique, et vous omettez le lycée. Vous délaissez ainsi les conditions de l’intégration professionnelle des élèves.
Pourtant, vous le savez comme moi, il n’y a pas d’élèves en échec : il n’y a que des élèves qui ne sont pas à leur place, qui sont mal orientés, qui ont d’autres rêves, d’autres compétences à valoriser pour ne pas être sur la voie de l’échec scolaire.
La voie professionnelle doit pouvoir être proposée dès la quatrième, de manière plus spontanée, aux élèves dans le processus d’orientation, même avant quinze ans, notamment par des personnes extérieures à l’école, par exemple des chefs d’entreprise, qu’il conviendrait de faire entrer dans les collèges et les lycées.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur le fait que, tel qu’il est conçu aujourd’hui, le métier de conseiller d’orientation-psychologue n’est plus adapté aux besoins des élèves. Il faut réinventer un nouveau mode de recrutement et de gestion des carrières, rendant impérative une meilleure connaissance continue des métiers et de la réalité économique, afin de renforcer l’« approche métiers » de l’éducation à l’orientation dans l’enseignement secondaire.
En conclusion, malgré le travail important de Mme la rapporteur, travail que je tiens à saluer, nous demandons que ce projet de réforme soit réétudié. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
(M. Thierry Foucaud remplace M. Jean-Léonce Dupont au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud
vice-président
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, contre la motion.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collèges, en cette période de crise morale, économique et sociale, la jeunesse de notre pays a plus que jamais besoin d’espoir. La refondation de l’école contribuera à lui redonner cet espoir et à transformer la promesse républicaine en réalité.
L’état de notre école est alarmant et les difficultés relevées depuis vingt ans sont bien réelles. Nous partageons tous ce constat et il est nécessaire que, sur des sujets comme celui de l’école, nous nous rassemblions.
À l’issue de l’école primaire, un élève sur quatre dispose d’acquis fragiles et 15 % sont en grande difficulté, entamant leur scolarité dans le second degré avec de graves lacunes. Cette situation regrettable conduit trop souvent à une orientation subie par les jeunes, vécue comme une décision-sanction.
D’après l’enquête PISA de l’OCDE réalisée en 2009, un jeune de quinze ans sur cinq, connaît de très grandes difficultés de maîtrise de la langue écrite, ce qui correspond à une hausse de 30 % entre 2000 et 2009. Cette maîtrise est pourtant une condition sine qua non pour réussir dans l’ensemble des disciplines, pour s’intégrer dans le monde professionnel et, surtout, pour exercer ses droits et devoirs en tant que citoyen.
On relève aussi que 12 % des jeunes de dix-huit à vingt-quatre ans finissent par quitter le système scolaire sans diplôme ou avec le seul diplôme national du brevet des collèges.
Lorsque l’école publique est en difficulté, ce sont des milliers d’enfants qui, tous les ans, quittent le système scolaire sans savoir ni lire, ni écrire, ni compter correctement, sans qualification secondaire, dans un monde où celle-ci est pourtant impérieuse.
Avons-nous le droit de leur dire qu’il est trop tard ?
Cette situation s’est progressivement et rapidement dégradée, avec l’aide de la précédente majorité.
Alors que nos enfants devront affronter la crise économique, la crise de l’emploi, la crise écologique, de quels outils disposeront-ils pour supporter ces mutations ?
Depuis au moins dix ans, nous ne cessons de le répéter : l’école va mal ! Le précédent gouvernement a préféré sacrifier l’école de la République sur l’autel d’une vision libérale et mercantile du service public, au lieu de la renforcer.
Mme Catherine Morin-Desailly. C’est caricatural !
Mme Françoise Laborde. Il a fait le choix d’une logique purement comptable appliquée à la maîtrise des dépenses de l’éducation, mettant ainsi en péril l’avenir même de la France, avec comme mesure phare la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, qui a entraîné de manière mécanique, dans l’éducation, la suppression de 80 000 postes en cinq ans. Notre taux d’encadrement se situait pourtant parmi les plus bas des pays de l’OCDE, avec une moyenne de 18,7 élèves par enseignant, contre 15,8 en 2010.
On a justifié toutes ces suppressions par la nécessité de procéder à un audit des politiques publiques, de s’interroger sur leur pertinence, afin de réaliser des économies.
Or, je le répète, cette vision comptable de l’éducation était réductrice et a transformé l’école en variable d’ajustement.
À la question « faut-il créer 60 000 postes dans l’éducation, dans le contexte budgétaire actuel, malgré de faibles marges de manœuvre ? » je réponds oui, mes chers collèges, car l’élévation du niveau d’éducation de nos enfants, l’amélioration de leur insertion professionnelle et de leur capacité d’innovation participeront au redressement de la France, à la croissance, à la réduction des déficits et de la dette publics.
À la question « ces 60 000 nouveaux postes vont-ils aggraver notre situation budgétaire ? » je réponds non, car leur création a été compensée par la réduction de la dépense dans le budget de l’État.
À la question « la dépense publique pourrait-elle être mieux utilisée ? » je réponds que là n’est pas le problème. L’investissement dans l’éducation a augmenté de 36 % entre 2000 et 2009 dans les pays de l’OCDE, contre seulement 9 % dans notre pays. Si la dépense éducative de la France, avec 6,3 % du PIB, continue de se situer dans la moyenne des pays de l’OCDE, à savoir 6,4 %, doit-on considérer que cette dépense est excessive ? Je ne le crois pas.
Certains pays consacrent à leur système éducatif plus de 7 % de leur PIB : l’Islande, la Corée du Sud ou le Danemark se situent à environ 8 %, la Nouvelle-Zélande à 7,4 % et les États-Unis à 7,3 %. Tous ces pays ont bien compris que les dépenses en matière d’éducation constituent des dépenses d’avenir, des dépenses publiques utiles, efficaces, indispensables et rentables. La priorité accordée à la jeunesse de notre pays doit passer par l’investissement dans l’école de la République, non par le désinvestissement.
Les moyens prévus pour cet investissement sont considérables. Utilisés pour donner aux enseignants et aux personnels d’éducation une formation de qualité, ils auront un impact fort sur la réussite scolaire.
Après avoir constaté les effets de la suppression de l’année de formation initiale des enseignants et de leur formation professionnelle, peut-on objectivement considérer que cette réforme n’est pas urgente ?
Mes chers collègues, le rétablissement d’une formation pour les futurs enseignants, de la maternelle à l’université, et l’extension de la formation à tous les personnels d’éducation sont des mesures qui justifient à elles seules l’examen de ce texte.
La mise en place d’une année de stage permettra également aux lauréats des concours de bénéficier d’une réelle expérience pédagogique, d’apprendre à gérer une classe, d’être préparés à exercer un métier qui s’apprend.
La suppression de 80 000 postes et la fin de la formation professionnelle des enseignants ont contribué au renforcement des inégalités sociales et territoriales.
En 2009, nous étions au vingt-septième rang des trente-quatre pays de l’OCDE au regard de l’équité scolaire. De manière ironique, il se trouve que c’est une organisation internationale connue pour sa vision libérale qui nous prodigue des conseils pour réduire nos inégalités scolaires !
Hélas, les effets d’une telle politique sur l’éducation des enfants semblent presque indolores lorsqu’on possède dans son jeu la carte du privé. Peut-on stigmatiser les familles qui le peuvent d’y envoyer leurs enfants ? Non, car elles ne sont pas responsables de l’instauration d’une école à plusieurs vitesses. C’est à l’État de faire le nécessaire et de reprendre les choses en mains. Il y a aussi de ce point de vue urgence à agir.
Chers collègues de l’opposition, dans vos interventions, vous reconnaissiez vous-mêmes hier, comme vous le faites aujourd’hui, que l’école va mal, qu’elle est en crise et que le constat est alarmant. Vous avez d’ailleurs déposé un grand nombre d’amendements, montrant ainsi que vous êtes prêts à apporter votre pierre à l’édifice de l’école de la République. Dans ces conditions, pourquoi déposer et soutenir des motions de procédure ? Voudriez-vous, en vous opposant le temps d’une ou deux motions à ce texte, tenter de défendre le bilan des majorités successives depuis plus de dix ans ?
Mes chers collègues, sans céder à une lecture partisane et réductrice de la politique éducative, il faut reconnaître que bien des mesures prises par la précédente majorité ont eu pour effet d’aggraver les inégalités sociales et territoriales en matière d’éducation, et je le déplore.
Où est passé le principe de l’école publique gratuite, laïque et obligatoire proclamé par Condorcet ? Où sont passés le programme de Belleville, les lois Ferry, la loi de 1905 ou encore programme du Conseil national de la Résistance ?
En outre, la reproduction des inégalités ainsi que l’aggravation de l’échec scolaire ont été entretenues par la mise en place d’une orientation subie, résultant notamment de déterminismes sociaux et territoriaux et de la mise à mal du principe du collège unique.
Le projet de loi y remédie et le texte adopté par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication rappelle à juste titre que tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser, car toute personne a une place dans la société, un rôle à y jouer, et l’école doit pouvoir guider tout un chacun vers ce rôle.
Le texte consacre notamment le droit à la formation pour les jeunes « décrocheurs » et il rend ainsi effectif le droit à l’instruction reconnu pour tous les enfants et tous les adultes par le préambule de la Constitution de 1946, lequel a, chacun le sait, valeur constitutionnelle.
Par ailleurs, le projet de loi supprime les dispositifs d’orientation précoce, réaffirme le principe du collège unique – sans idéologie – et accorde une place essentielle à l’orientation pour que celle-ci puisse être choisie, pour qu’un large éventail de possibilités s’ouvre à tous les élèves et pour permettre de relancer le fameux ascenseur social.
Le parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel proposé à chaque élève devra tenir compte des perspectives professionnelles, mais aussi de ses propres aspirations.
Ces mesures sont d’autant plus importantes que l’orientation choisie est une orientation réussie, un passeport pour l’avenir.
La réussite passe également par la révision du contenu des programmes scolaires, qu’il convient de rendre cohérents avec le nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Le Conseil supérieur des programmes, qui comprendra désormais des membres du Parlement et du Conseil économique, social et environnemental, sera consulté et proposera des recommandations en la matière.
Le socle commun de connaissances et de compétences, tel qu’il a été instauré par la loi Fillon du 23 avril 2005, a-t-il amélioré la situation ? Non ! Les compétences de base ne sont toujours pas maîtrisées et le livret de compétences est un échec éclatant, sans compter qu’il est excessivement chronophage pour les enseignants.
Le projet de loi comporte des mesures essentielles en matière de contenus. Il institue un véritable parcours d’éducation artistique et culturelle, pour que l’accès à l’art et à la culture se démocratise, quel que soit le territoire concerné. Cette mesure, avec le renforcement de la place du sport à l’école, consolide les vecteurs de transmission de nos valeurs.
Je veux m’attarder sur le nouvel enseignement civique et moral. Cet enseignement, dénué de dogmatisme, garantira le respect des opinions, des idées, des croyances. Il permettra la tolérance, le respect de tous et l’universalité de l’instruction. Il vise l’émancipation de la personne vis-à-vis des préjugés et le développement de son esprit critique ; il vise sa liberté.
Les valeurs communes héritées de la philosophie des Lumières, comme la laïcité, ne doivent pas être détournées pour diviser. Elles doivent être considérées pour ce qu’elles sont : des outils pour rassembler.
C’est sur ces valeurs que repose l’identité française, dénaturée par des débats inutilement polémiques, créateurs de divisions et de tensions au sein de notre société, et qui ont fourni un terreau de choix aux communautarismes ainsi attisés.
Ce sont des valeurs d’apaisement. Elles doivent irriguer l’ensemble des enseignements et c’est pourquoi notre groupe les défendra avec ferveur.
Toutes ces mesures tendent à fonder une nation inclusive grâce à l’école, partageant des valeurs communes, intégrant tous les futurs citoyens, sans distinction de sexe, d’origine sociale ou de culture.
Ce sont autant de connaissances, de savoir-faire qui ne s’acquièrent que par l’application d’un rythme adapté à l’enseignement et à l’enfant.
Alors qu’en 2008 le gouvernement Fillon décidait, à l’encontre de l’intérêt de l’enfant, de concentrer les enseignements sur quatre jours hebdomadaires, le gouvernement actuel rétablit de manière courageuse la semaine de quatre jours et demi. Le projet de loi prévoit la création d’un fonds en faveur des communes afin que la mise en place de la réforme se fasse sans que se creusent les inégalités entre communes favorisées et défavorisées.
Certes, plusieurs dispositions ne pourront s’appliquer qu’après la publication de décrets. Certes, ce projet de loi ne procède pas à un changement révolutionnaire du fonctionnement de notre système éducatif – mais nous ne sommes pas là pour faire la révolution ! Néanmoins, il comporte un certain nombre de mesures indispensables qu’il est urgent d’adopter.
L’avenir de la France mérite d’être discuté au sein de la Haute Assemblée. Il mérite que l’ensemble des élus se penchent sur les orientations et la programmation des moyens que le Gouvernement entend consacrer à l’institution qui a pour mission de former des citoyens en devenir.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je vous propose de repousser la motion tendant à opposer la question préalable et de poursuivre ainsi l’examen de ce texte fondamental, indispensable, très attendu par le monde éducatif, dans l’intérêt des enfants de la République et au service du redressement de notre pays. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste, du groupe écologiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. La commission estime que cette motion tendant à opposer la question préalable n’a pas lieu d’être.
M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote au nom du groupe socialiste.
M. Jacques-Bernard Magner. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous le savez, une motion tendant à opposer la question préalable a pour objet de démontrer que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ou qu’il n’y a pas lieu à délibérer. Dès lors, je ne peux qu’être grandement surpris.
En effet, en relisant attentivement les propos que les membres du groupe UMP ont tenus en commission, je n’y ai vu aucune trace d’élément qui pourrait laisser penser que des motifs d’inconstitutionnalité figurent dans ce projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. Au contraire, dans son intervention en commission, M. Legendre a reconnu que « le présent texte [comportait] des éléments importants », même s’il a ensuite ajouté : « Mais sans plus... »
Pour être tout à fait complet sur ce point, mes chers collègues, je vous rappelle que, dans le long processus de préparation et d’élaboration de ce projet de loi, ni le secrétariat général du Gouvernement ni le Conseil d’État n’ont, à aucun moment, soulevé des problèmes d’inconstitutionnalité.
Peut-être pensez-vous, alors, qu’il n’y a pas lieu à délibérer… Mais, dans ce cas, pourquoi avoir déposé des amendements de fond sur des points essentiels afin, dites-vous, de contribuer à l’amélioration de notre système éducatif ?
Je n’ai donc entendu dans vos propos ni la moindre référence à des motifs d’inconstitutionnalité ni un argumentaire fondé sur des motifs sérieux qui empêcherait notre débat en séance publique au sujet d’un texte tant attendu par tous les acteurs du monde éducatif.
Le projet de loi, ne vous en déplaise, contient des mesures nouvelles innovantes et nécessaires, qu’il s’agisse de la création de 60 000 postes sur cinq ans, de la priorité donnée au primaire, du dispositif « plus de maîtres que de classes », de l’institution d’une vraie formation pour les enseignants, de la scolarisation des tout-petits, de l’enseignement des langues étrangères dès le cours préparatoire, ou encore du développement du numérique, de l’enseignement professionnel, de la morale laïque, etc.
Je n’ose imaginer que les sénateurs du groupe UMP, qui nous demandent de voter cette motion, soient opposés à toutes ces mesures vitales pour notre école !
Il ne faut pas renvoyer à plus tard ces avancées indispensables pour le renouveau de l’école de la République. Cela signifie qu’il faut examiner maintenant ce projet de loi et l’adopter sans tarder.
Pour toutes ces raisons, les sénatrices et les sénateurs du groupe socialiste voteront contre la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote au nom du groupe CRC.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’école a été particulièrement mise à mal lors du dernier quinquennat. Elle en sort exsangue, affaiblie, notamment par la RGPP et la suppression de près de 80 000 postes en cinq ans !
La réduction des moyens n’est pas le seul coup qui a été porté à l’école. Elle s’est accompagnée d’une succession de réformes libérales, dont la loi Fillon de 2005 n’a été que le prélude, avec la création d’un socle de connaissances et de compétences conçu comme un minimum pour des élèves en difficulté et fondé, en vertu d’une conception utilitariste, sur des compétences visant l’employabilité.
Cette loi a également mis fin au collège unique en créant la possibilité de parcours scolaires individualisés.
L’objectif de mixité sociale, qui consacre des moyens à la réussite de tous les élèves, a été abandonné pour passer à celui de « mixité des élites », qui concentre les moyens sur quelques « très bons » parmi les plus défavorisés. C’est ce que révèle, par exemple, la dichotomie entre les établissements CLAIR – collèges et lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite –, les établissements de réinsertion scolaire fondés sur un socle minimal de connaissances et de compétences pour les élèves en difficulté, et les internats d’excellence, qui individualisent le mérite.
La suppression de la carte scolaire n’a fait que renforcer la « ghettoïsation » des établissements, dénoncée à juste titre par la Cours des comptes.
L’âge de l’instruction obligatoire a été insidieusement remis en cause, ouvrant la voie à la pré-professionnalisation dès quatorze ans, par des dispositifs d’initiation précoce à l’apprentissage.
Enfin, entre autres réformes dramatiques, celle de la formation des enseignants, mise en place dans l’urgence, sans concertation ni réflexion, a eu des conséquences désastreuses pour les enseignants, pour les élèves et, partant, pour tout le système éducatif.
Enseigner est un métier qui s’apprend, mais désormais il s’apprend mal.
L’obligation imposée aux enseignants de disposer d’un master au lieu d’une licence, sans l’accompagnement d’une réflexion audacieuse articulant le disciplinaire et le professionnel, est loin d’avoir renforcé leur qualification. Elle a, au contraire, placé les futurs enseignants dans une grande difficulté.
Cette liste n’est pas exhaustive, mais l’ensemble de ces dispositifs mis en place durant les années passées a contribué à créer un système scolaire à deux vitesses.
Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que les études internationales pointent le creusement des inégalités scolaires en France, pays où l’impact socio-économique sur la performance des élèves est particulièrement élevé.
Alors que l’école doit faire réussir chacun, être fondée sur l’idée que tous les élèves sont capables d’apprendre, elle n’est aujourd’hui qu’un vecteur de reproduction des inégalités sociales, qui nourrissent les inégalités scolaires.
C’est l’école de la République qui est mise en échec, et plus que jamais, elle doit, selon nous, être repensée. Une réforme de l’école est donc nécessaire.
La question qui se pose aujourd’hui n’est pas celle de la légitimité d’une réforme de l’école ; elle est celle de son contenu et de sa capacité de réellement changer l’école.
Le projet de loi relatif à la refondation de l’école avance des priorités qui sont aussi les nôtres : l’arrêt de la RGPP et la programmation de moyens dont la mise en place est devenue urgente.
En outre, ce texte affirme la priorité donnée au primaire, particulièrement mal doté dans notre pays, pointe l’enjeu de la scolarisation précoce en maternelle, remet en chantier la formation des enseignants ou encore tente de renouer avec le collège unique. Nous partageons ces idées.
Cependant, nous l’avons dit lors de la discussion générale, le projet de loi ne remplit pas toujours les objectifs qui lui sont assignés et y font défaut certaines dispositions indispensables à une véritable rupture avec les politiques précédentes.
Le travail parlementaire nous offre donc l’occasion d’enrichir ce texte et de contribuer à porter celui-ci au niveau de l’ambition d’une refondation.
À travers nos amendements, nous formulerons des propositions et demanderons qu’on revienne sur des dispositions qui sont en contradiction avec l’objectif affiché. Je pense, entre autres, à la nouvelle définition du socle commun, ou encore à la réaffirmation nécessaire du rôle de l’État dans l’élaboration de la carte des formations professionnelles, désormais confiée à la région.
Ce n’est qu’au terme de ce travail que nous pourrons juger de la qualité et de la pertinence de ce texte, pas avant !
Nous voterons donc contre cette motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste et du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote au nom du groupe écologiste.
Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne doutons pas de l’intérêt que porte l’opposition sénatoriale à la question de l’éducation en général et de l’école en particulier. Mais il nous est apparu que le dépôt de cette motion permettait surtout à notre collègue Sophie Primas de développer un peu plus longuement son point de vue, sans doute dans un souci de respect de la parité et de la parole de chacun…
Bien entendu, nous estimons que les arguments qu’elle a développés ne sont pas recevables.
Qui n’a pas de vision pour son école n’a pas de vision de la société. C’est pourquoi, tout en réaffirmant tout notre intérêt pour la question de l’école, qui est un sujet politique structurant d’importance majeure, nous ne pourrons en aucun cas voter cette motion. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote au nom du groupe UDI-UC.
Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les différents dictionnaires définissent le terme « refondation » comme une reconstruction sur des bases et des valeurs nouvelles, ou encore comme une rénovation majeure et complète.
La refondation est donc un acte d’ampleur, un acte fondateur, bref, un acte innovant.
Or rien de tout cela ne nous est proposé dans le projet de loi qui nous est soumis.
Françoise Férat et moi-même avons auditionné un nombre très important de personnes, entendu beaucoup de propositions qui reflétaient des attentes vraiment très fortes.
Nous avons bien étudié, comme vous tous, mes chers collègues, le texte du Gouvernement. Nous nous sommes rendues sur le terrain en notre qualité d’élues locales et restons en contact permanent avec les parents d’élèves, les enseignants, la communauté éducative.
Au final, nous avons été déçues par le texte qui nous est proposé, par son caractère peu normatif, peu inventif, sauf peut-être dans la polémique politique inutile. À cet égard, je vous renvoie à certains passages du rapport annexe qui sont tout de même assez surprenants. Jamais je n’avais vu cela dans un texte de loi !
Ce projet de loi n’est pas un texte d’ampleur parce que, s’il aborde certains fondements comme la priorité à l’école primaire, que nous approuvons, il ne traite pas l’ensemble de ces principes fondateurs dont notre école a besoin. Aucune mesure sur le statut des professeurs ou celui des directeurs d’écoles, rien sur l’organisation de leur travail !
Ce texte n’envisage pas l’école à l’aune de sa gestion, jugée défaillante dans le rapport de la Cour des comptes.
Il n’appréhende pas non plus la réforme des rythmes scolaires dans sa globalité et sa complexité. On était en droit d’attendre des échanges sur la notion des temps annuels, des temps hebdomadaires et des temps quotidiens des élèves, dans la suite des réflexions menées dans le cadre de la conférence nationale sur les rythmes scolaires.
On aurait pu attendre aussi des nuances selon les cycles et les âges. Va-t-on imposer le même rythme à des petits bouts de choux de maternelle qu’aux élèves du primaire ? Certainement pas. Or cela n’a pas été étudié. Et l’on n’a pas non plus procédé à l’évaluation financière d’une telle réforme pour pouvoir l’appliquer de manière efficace.
Ce projet de loi n’est pas un texte fondateur et, si on le regarde de près, c’est même un texte destructeur. (M. Jacques-Bernard Magner s’exclame.)
Sur le socle commun, le projet de loi revient sur la définition longuement débattue en 2005.
Vous nous proposez de nous dessaisir, nous législateur, de notre capacité à définir ce socle. Il n’est pas, comme vous le pensez, l’objectif à atteindre pour les élèves ; c’est bien, pour chacun d’entre eux, le préalable à acquérir pour construire son parcours de réussite dans la vie.
Enfin, le présent texte condamne des dispositifs intéressants tels que les internats d’excellence ou encore l’aide personnalisée, alors que certaines évaluations très positives viennent d’être publiées.
Sur l’apprentissage, vous nous proposez également d’abroger les textes en vigueur, alors qu’ils permettent aux élèves qui empruntent cette voie de choisir leur orientation et non de la subir.
Bref, ce projet de loi opère un « détricotage » en bonne et due forme, au lieu d’apporter l’amélioration qui est effectivement nécessaire. Je rappelle que les centristes n’ont jamais tu leurs critiques quand certaines mesures, telles que la suppression des RASED – réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté – ou la mise en place de la semaine de quatre jours sans étude sérieuse préalable, leur paraissaient malvenues. Mais toute amélioration doit reposer sur une continuité républicaine et la reconnaissance objective des mesures précédentes qui méritent encore, avec la temporalité que requiert l’éducation, un examen attentif.
Ce texte n’est pas innovant, car il reprend d’anciennes solutions. La création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation laisse entrevoir le retour des anciens IUFM, avec tous leurs défauts. J’espère me tromper, mais je crains que la formation des enseignants ne soit pas améliorée avec une ancienne recette.
Ce texte n’est pas innovant, car il laisse de côté les collectivités territoriales, pourtant acteurs majeurs de l’éducation. Les élus ne sont pas seulement des payeurs, ils doivent aussi être des codécideurs et mieux s’impliquer afin d’assurer une véritable intégration des élèves dans la vie de la cité ; tel est bien, aussi, le rôle de l’école !
Enfin, ce texte se veut ambitieux, mais, monsieur le ministre, il laisse de côté le plus grand enjeu pour notre école : la lutte contre l’illettrisme. Si le Premier ministre a fait de cette lutte la cause nationale de l’année 2013, force est de constater que l’ensemble des mesures proposées sont insatisfaisantes.
Les pouvoirs publics, en premier lieu l’école, doivent non seulement prendre la mesure du problème, mais aussi et surtout mettre tout en œuvre pour faire reculer ce phénomène gravissime qu’est l’illettrisme. En effet, la mission première de l’école est de faire en sorte que nos enfants sachent lire et écrire.
Il y a urgence, certes, mais il s’agit d’agir dans le bon ordre, et non de manière bâclée, comme fut bâclé, je tiens à le dire, notre travail d’hier matin en commission : nous n’avons pas eu la possibilité de discuter réellement des amendements.
Pour toutes ces raisons, les sénateurs du groupe UDI-UC voteront en faveur de cette question préalable déposée par nos collègues du groupe UMP. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 165, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 228 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l’adoption | 170 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
(M. Didier Guillaume remplace M. Thierry Foucaud au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume
vice-président
Demande de renvoi à la commission
M. le président. Je suis saisi, par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, d'une motion n°166.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication le projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (n° 569, 2012-2013).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n’est admise.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour la motion.
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous demandons le renvoi en commission de ce projet de loi parce que nous estimons que les conditions d’un examen attentif et rigoureux de ce texte n’ont pas été réunies.
Au lendemain de l’examen de textes importants, qui nous ont particulièrement mobilisés ― mariage pour tous, sécurisation de l’emploi ―, nous n’avons pas disposé d’un délai raisonnable pour étudier ce texte, en raison d’un calendrier particulièrement contraint. (M. David Assouline s’exclame.)
Les dates de dépôt des amendements, puis d’examen des amendements et du rapport de Mme Cartron, ont été fixées sans aucun égard pour notre travail ni pour le sien.
Ainsi, le délai limite de dépôt de nos amendements en commission a été fixé le jour de notre retour après l’interruption parlementaire de deux semaines, c'est-à-dire le lundi 13 mai, à midi,…
M. David Assouline. À votre demande !
Mme Colette Mélot. … ce qui a rendu particulièrement difficiles le travail et les échanges au sein des groupes. Notre rapporteur n’a eu ensuite que l’après-midi du 13 mai et la matinée du 14 pour examiner nos amendements, au nombre de 426 !
Eu égard à l’importance du travail en commission depuis la révision constitutionnelle de 2008, notamment à travers le poids nouveau qui est donné au texte qui y est adopté, il est plus que regrettable que cette étape se soit déroulée dans ces conditions.
Nous avons disposé ensuite d’un délai extrêmement court pour prendre connaissance du rapport de Mme Cartron – deux jours et demi –, ce qui, vous l’admettrez, n’est pas de nature à éclairer le débat, notamment pour les sénateurs qui ne sont pas membres de la commission. Cela est également peu respectueux du travail du rapporteur, qui n’a pas pu être exploité comme il aurait dû l’être.
II a fallu étudier ses propositions et, en réponse, présenter de nouveau des amendements en seulement deux jours et demi, le jour de la Pentecôte empêchant de respecter le délai traditionnel de dépôt la veille de l’examen du texte.
Ce parcours précipité débouche finalement sur un examen nocturne des propositions de nos différents groupes politiques ! Tout cela n’est ni sérieux ni respectueux du travail parlementaire, surtout à propos d’un texte qui affiche l’ambition de refonder l’école de la République.
La seconde justification de cette motion de renvoi en commission tient à la nécessité de poursuivre l’élaboration de ce texte, que nous estimons incomplet.
II ne s’agit pas, de notre part, d’un simple positionnement politique.
M. David Assouline. Non, il n’est pas politique, il est politicien !
Mme Colette Mélot. II s’agit de dénoncer le manque d’ambition de ce projet de loi, annoncé à tort comme un texte d’envergure. Car, monsieur le ministre, nous considérons que votre texte ne s’attaque qu’à la partie émergée de l’iceberg.
M. David Assouline. Et vous, vous vous êtes attaqués à la profondeur !
Mme Colette Mélot. Ce texte, que vous annoncez avec fracas comme celui de la refondation de l’école de la République, fait l’impasse sur de nombreux sujets : la maternelle n’est traitée qu’à propos de la question de la scolarisation à deux ans et le secondaire n’est quasiment pas abordé.
M. David Assouline. Qu’est-ce qu’il ne faut pas entendre !
Mme Colette Mélot. Or les grandes lois sur l’école ont toujours couvert l’ensemble du système éducatif.
En guise de refondation, le projet de loi annule consciencieusement les dispositions adoptées sous les législatures précédentes, comme l’a indiqué mon collègue Jacques Legendre et comme vient de le rappeler Catherine Morin-Desailly.
Il remet en effet en cause le socle commun de connaissances et de compétences en le fixant par décret et en multipliant les matières enseignées.
M. David Assouline. Voilà une intervention 100 % de mauvaise foi !
Mme Colette Mélot. Il rétablit également le collège unique dans toute sa rigueur, alors même qu’il faut à l’évidence diversifier les voies et adopter d’autres méthodes pour les élèves en risque de décrochage scolaire.
Il remplace le Haut Conseil de l’éducation par deux organismes dont plus de la moitié des membres seront nommés par le Gouvernement.
Il organise le financement de la réforme des rythmes scolaires sans concertation préalable.
Quelles sont vos autres propositions ?
Vous mettez l’accent sur l’enseignement artistique, l’accès à la culture, l’éducation civique et morale, l’apprentissage des langues, l’approche des nouvelles technologies. De fait, dans votre projet de loi, tout sera prioritaire. Mais quand tout est prioritaire, c’est qu’il n’y a plus de priorité !
Mme Colette Mélot. Lorsqu’on ajoute à cela une rédaction inutilement bavarde et un rapport annexé rempli de déclarations de principe et de lieux communs, on peut considérer que le projet de loi ne traite pas de l’ensemble de notre système éducatif et n’accomplit pas la grande réforme annoncée.
Pour nous, la clef de la refondation de l’école, c’est l’apprentissage du socle fondamental, surtout de la lecture et de l’écriture. C’est parce que ce socle aura été assimilé qu’un effort pourra être accompli en termes d’éducation civique, d’initiation à l’art ou aux langues étrangères. Nous vous demandons donc de revoir vos propositions à la lumière de cet objectif.
Parce que les conditions élémentaires d’un examen approfondi de ce projet de loi n’ont pas été réunies et que celui-ci, dans sa version actuelle, ne participe en rien à la refondation de l’école que vous annonciez, nous souhaitons que ce projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République fasse l’objet d’un nouvel examen par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission, contre la motion.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame Mélot, monsieur Legendre vous avez bien raison : l’école mérite tout notre temps et toute notre attention. Or c’est précisément ce qui a guidé le travail de la commission.
Vous demandez un renvoi à la commission en arguant du temps nécessaire à l’étude d’un sujet si important et vous affirmez que, le rapport ayant été présenté le 14 mai, nous avons dû débattre le 21, après avoir été obligés de déposer les amendements le 17 au soir.
Je sais, monsieur Legendre, que comparaison ne vaut pas raison, mais je me souviens que, dans des circonstances voisines, sous votre présidence, à propos d’un texte important, déclaré d’urgence, concernant l’audiovisuel public, un rapport nous fut présenté le 6 janvier, après une interruption des travaux de quinze jours, pour un débat dans l’hémicycle… le 7 janvier (Exclamations et marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.).
Et ce texte fut, de surcroît, appliqué pour partie avant le vote du Sénat ! (Mêmes mouvements.)
M. Jean-Jacques Mirassou. C’est vrai !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Les lois de la relativité semblent s’être appliquées à votre indignation !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Vous appelez de vos vœux une refondation de l’école, que vous voulez, comme nous tous, ambitieuse et exhaustive.
Je m’abstiendrai d’un commentaire fâcheux, mais que ne l’avez-vous faite ? J’en appellerai plutôt au bon sens : il y a un début à tout, et s’attacher d’abord à requalifier l’école primaire est fondamental. Réparer les dégâts, aussi, est une urgence.
Trois circonstances pourraient toutefois nous conduire à vous suivre.
Nous aurions eu trop peu de temps pour appréhender les intentions du gouvernement… Mais ce n’est pas le cas.
Le travail de la commission aurait été insuffisant… Mais ce n’est pas le cas.
Enfin, ce projet pour l’école aurait un caractère peu urgent… Mais ce n’est pas le cas non plus.
Je vais m’attacher à vous rappeler des faits qui battent en brèche vos motivations.
Le projet du Gouvernement est connu du Parlement depuis janvier 2013. Dans sa forme modifiée par l’Assemblée nationale, il l’est du Sénat depuis le 20 mars, cela fait donc deux mois. Je salue d’ailleurs le fait qu’il ne soit pas débattu en procédure accélérée, mais soit soumis à la navette, conformément à un bon fonctionnement démocratique.
S’agissant de l’organisation de nos travaux, la commission s’est adaptée à l’inscription du texte juste après l’interruption des travaux en séance publique, que tous les groupes de notre bureau, dont vous êtes membres, madame Mélot, monsieur Legendre, ont fait le choix de ne pas perturber par des réunions de commission. Nous nous sommes concertés en bureau le 10 avril au sujet du calendrier d’examen. Chacun a pu exprimer ses préoccupations, et une majorité des groupes a souhaité disposer de davantage de temps avant la présentation du rapport plutôt qu’après. Le 17 avril, la conférence des présidents a validé cette proposition.
Il reste que, dans un souci de prise en compte des contraintes de chacun et conformément à la longue tradition de convivialité qui préside à la conduite des travaux de la commission, et que vous avez entretenue, monsieur Legendre, j’ai pris deux engagements : mettre à disposition le montage du texte sans délai, dès huit heures du matin, alors que la réunion de la commission s’était achevée la veille à vingt-deux heures trente…
M. Jean-Jacques Mirassou. Eh oui !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. … et, sur demande de l’opposition, reporter d’une demi-journée, de midi à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements fixé au vendredi 17 mai, de manière à faciliter le travail des groupes avant le week-end de la Pentecôte.
Permettez-moi de vous signaler au passage que Mme la rapporteur a mis en application une décision autrefois portée par l’opposition : elle a travaillé le lundi de la Pentecôte !
Mme Colette Mélot. Bravo !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Les débats en commission ont montré que chacun avait eu tout loisir de faire valoir son point de vue et que, au-delà des clivages politiques, une approche constructive restait possible sur de nombreuses dispositions du projet de loi et du rapport annexé.
Une véritable discussion générale, d’une durée d’une heure, a précédé l’élaboration du texte de la commission, et ce sont les groupes UMP et UDI-UC qui se sont exprimés le plus longuement, ce qui est du reste normal.
Sur les 138 amendements adoptés, un chiffre significatif, 18 l’ont été sur l’initiative ou avec l’accord du groupe UMP. J’ajoute que17 des amendements adoptés émanaient du groupe UDI-UC, 15 du groupe CRC, 14 du groupe écologiste et 8 du groupe socialiste. Voilà qui atteste la qualité des échanges !
La commission de la culture, de l’éducation et de la communication, avec tous les outils dont elle dispose, a-t-elle bien travaillé le sujet de l’école ?
Sur le fond, je veux vous prouver le sérieux du travail des membres de la commission et le sens de l’anticipation dont ils ont su faire preuve.
Avant l’examen du projet de loi, deux missions d’information, qui ont fait l’objet de longs mois de travaux internes, ont concerné la carte scolaire et l’évolution du métier d’enseignant. Elles ont chacune associé un président ou une présidente issu du groupe UMP, Pierre Martin et vous-même, madame Mélot, ainsi qu’un rapporteur du groupe socialiste, Françoise Cartron, et un du groupe CRC, Brigitte Gonthier-Maurin. Elles ont rendu leurs conclusions à la fin juin 2012.
Depuis, la commission a installé un groupe de travail sur le prérecrutement des enseignants, animé par Jacques-Bernard Magner, dont les conclusions ont été présentées en commission le 20 février dernier.
Le 25 mars, M. Vincent Peillon détaillait devant la commission le contenu de son projet, précisant les orientations qu’il avait évoquées le 9 juillet avec Mme Pau-Langevin.
La commission s’est aussi mobilisée sur le terrain, en février dernier, pour ce qui concerne la formation des encadrants, la lutte contre le décrochage, la réussite des filières professionnelles.
Mme Claudine Lepage. Exactement !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. À Poitiers, l’étude approfondie de la situation de l’ESEN, l’École supérieure de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, a abouti au constat partagé de la nécessité de réformer sans attendre et en profondeur la formation des chefs d’établissement et des inspecteurs, placés au cœur du système éducatif.
À Agen, la commission s’est intéressée au dispositif de lutte contre le décrochage scolaire mis en place par la région Aquitaine au sein d’un lycée professionnel et a ainsi pu mesurer le rôle essentiel joué par les collectivités territoriales en faveur de la réussite éducative.
À Blanquefort, la commission a aussi complété son information sur les établissements d’enseignement agricole.
Les grands axes de nos conclusions, avec la relance de la démocratisation du système scolaire, la mixité sociale comme priorité, la rénovation de la formation des cadres de l’éducation nationale, les précisions apportées aux missions des collectivités territoriales, ne constituaient donc en rien une surprise pour les membres de la commission, car elles sont le fruit d’échanges documentés.
Dernier point concernant notre travail en amont : pour mieux appréhender la notion de parcours artistique et culturel, nous avons auditionné Marie Desplechin et Jérôme Bouët, respectivement présidente et rapporteur du Comité national de pilotage sur l’accès de tous les jeunes à l’art et à la culture.
Pour avoir une vision exhaustive du regard des partenaires représentatifs de la société, nous avons entendu le rapporteur du Conseil économique, social et environnemental sur le projet de loi.
Par ailleurs, nous avons également auditionné le directeur général du CNED, le Centre national d’enseignement à distance, notamment pour mesurer l’importance et la pertinence des contenus numériques, ainsi que le rôle clarifié de chacun, entre service public et éditeurs.
De même, comme nous pensons que la violence doit être prévenue, une audition de Mme Élisabeth Maheu-Vaillant, formatrice en régulation des conflits en milieu scolaire, nous a montré comment les jeunes enseignants peuvent se préparer à la gestion des situations de conflit.
Nous avons également entendu, le 11 février dernier, Mme Najat Vallaud-Belkacem à propos des violences et discriminations à raison de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre, ainsi que, le 5 novembre 2012, Éric Debarbieux, directeur de l’Observatoire international de la violence à l’école.
Je ne vous réciterai pas tout notre programme, mais il y eut un exposé sur les devoirs à la maison, le 8 novembre, un autre du Centre d’analyse stratégique sur le bien-être des élèves, le 4 février, et même, à la demande de Mme Primas, le 25 juin, la présentation de la mission sur les espaces ludiques en milieu scolaire.
La très grande richesse des auditions menées par Mme la rapporteur Françoise Cartron, dont je salue le courage, lui a permis de répondre avec des arguments pertinents et documentés à chacun de vos amendements.
Aujourd’hui, le grand nombre des amendements déposés en séance publique témoigne de votre connaissance du sujet, mes chers collègues.
Enfin, je serai plus solennelle sur l’importance de légiférer sans attendre.
Entre réduction de postes et exacerbation de la compétition, vous avez laissé l’école, les parents, les élèves et les enseignants dans un état de stress (M. Jackie Pierre s’esclaffe.),…
M. Joël Billard. C’est faux !
M. Michel Savin. Ce n’est pas ce que dit M. Migaud !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. … non pas un stress qui stimule, mais un stress qui désespère quand il aboutit davantage à des échecs qu’à des réussites, un stress qui démobilise quand, jeune enseignant, vous vous retrouvez jeté sans formation professionnelle devant des enfants difficiles…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Absolument !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. … parce qu’un ministre a rayé d’un trait de plume l’année de mise en situation, sous couvert de mastérisation.
M. Jean-Jacques Mirassou. C’est la vérité !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Non, nous ne pouvons pas attendre pour reconstruire la formation après le trou d’air des vocations.
Non, nous ne pouvons pas attendre pour préparer les enfants à la société numérique, techniquement prête depuis 1994.
Non, l’école primaire et l’école maternelle qui la précède ne peuvent attendre une année de plus quand le taux d’élèves en difficulté est passé, en dix ans, de 16,5 % à 22,5 %.
Non, nous ne pouvons pas retarder nos décisions alors que 20 % des quinze ans sont en difficulté devant l’écrit et que la proportion d’élèves sortant du système scolaire sans qualification atteint 12 %.
Non, nous ne pouvons pas nous accommoder du verdict de l’étude PISA, qui démontre que l’école en France est devenue la plus inégalitaire d’Europe.
Comme vous, monsieur Legendre, je me réjouis des prix littéraires et des médailles Fields, mais je les trouverais encore plus brillantes si, dans le même temps, les élèves de Seine-Saint-Denis, d’un village de montagne ou d’un quartier en outre-mer, dans le creuset de la République, avaient des perspectives plus réjouissantes que le fait de subir le non-remplacement d’un maître ou de se trouver dans un établissement discriminé, et encore plus relégué en raison de l’abandon de la carte scolaire.
Les orientations du projet de loi vont dans le bon sens. La commission, avec l’aide de Mme la rapporteur et de tous ses membres, a bien travaillé. Examiner sans attendre ce projet de loi bien étudié, un examen qui se prolongera avec la navette, doit relever d’une ambition partagée : préparer l’avenir en mettant la formation de nos enfants à la première place de nos exigences.
Pour conclure, je tiens à citer Mme Duchêne, qui, à la fin de son intervention, n’a pas hésité à déclarer : « Il est urgent que des décisions soient prises. » Si même des membres de l’opposition réclament que nous nous mettions au travail, je ne peux, mes chers collègues, que vous inviter à voter contre cette motion de renvoi à la commission ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je remercie les membres de l’opposition de s’être inquiétés de la lourde charge de travail qui m’a été imposée. Je tiens à les rassurer : j’espère pouvoir tenir jusqu’à la fin de la semaine ! (Sourires.)
Travailler le lundi de la Pentecôte a été, à mes yeux, l’expression de ma solidarité, appliquée à la noble cause de l’école. (Mme Sophie Primas applaudit.)
Aussi suis-je évidemment contre cette motion tendant au renvoi à la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 166, tendant au renvoi à la commission.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 229 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l’adoption | 170 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Nous passons donc à la discussion des articles.
Article 1er et rapport annexé
M. le président. Je rappelle que l’article 1er et le rapport annexé ont été réservés, à la demande de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, jusqu’après les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 60.
TITRE IER
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Article 2
(Supprimé)
Chapitre Ier
Les principes et missions de l’éducation
Section 1
Les principes de l’éducation
Article additionnel avant l’article 3 A
M. le président. L'amendement n° 35 rectifié, présenté par M. Carle, Mme Primas, MM. Humbert et B. Fournier, Mmes Mélot et Duchêne et M. Duvernois, est ainsi libellé :
Avant l’article 3 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant l’article L. 111-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 111 ainsi rédigé :
« Art. L. 111. – Le Gouvernement présente, tous les ans, un rapport sur l’évolution du système éducatif national et sur les orientations de la politique éducative.
« Ce rapport donne lieu à un débat d’orientation de la politique éducative devant le Parlement. »
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
M. Jean-Claude Carle. Les auteurs de cet amendement souhaitent qu’un débat d’orientation de la politique éducative soit organisé chaque année devant le Parlement.
Je crois que nous sommes tous d’accord pour reconnaître que l’éducation, première ligne du budget, est un investissement stratégique, et même le meilleur que la nation puisse faire.
Comme je l’ai signalé hier dans la discussion générale, cet investissement est stratégique d’abord pour les jeunes : il doit leur permettre de réussir dans la vie en réussissant leur insertion professionnelle ; on sait que ce n’est pas toujours le cas puisque, aujourd’hui, un jeune sur quatre ne parvient pas à s’insérer dans le monde du travail.
Il est stratégique aussi pour notre économie, car nos entreprises ont besoin d’un personnel qualifié.
Surtout, il est stratégique pour la nation, car le savoir est le premier garant de la cohésion sociale : nous ne résisterons pas longtemps encore avec un taux de chômage des jeunes supérieur à 20 % !
Or le Parlement a très peu d’influence sur la politique d’éducation. Notre action se limite souvent à un débat de quelques heures lors de l’examen du projet de loi de finances ; un débat qui ne dure jamais qu’une heure de plus que celui portant sur les monnaies et médailles ! Souvent, en outre, ce débat a lieu le soir, quand ce n’est pas le week-end… Je me souviens qu’il y a quelques années nous avons débattu des crédits de l’éducation un dimanche après-midi, et cela n’avait aucun lien avec la séparation de l’Église et de l’État ! (Sourires.)
De plus, la rigidité de la structure budgétaire ne nous permet d’agir qu’à la marge. Par exemple, au sein du budget de l’enseignement secondaire, qui avoisine 30 milliards d’euros, nous ne pouvons pas même déplacer un euro !
Cette situation n’est pas satisfaisante. Je considère que le Parlement doit être un acteur majeur en matière d’éducation ; il doit pouvoir débattre des orientations que l’exécutif lui propose, et à un moment où les arbitrages budgétaires ne sont pas encore arrêtés. C’est ainsi qu’il pourra fixer des priorités, évaluer les éventuelles expérimentations et exprimer les préoccupations des élus locaux dont nous, sénateurs, sommes les représentants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cet amendement vise, d’une part, à obliger le Gouvernement à remettre au Parlement un rapport sur la politique éducative et, d’autre part, à instaurer, sur le fondement de ce rapport, un débat d’orientation en séance publique.
La première partie de l’amendement est satisfaite par l’existence des projets annuels de performance et par le débat sur la mission budgétaire « Enseignement scolaire ».
Quant à l’organisation obligatoire d’un débat d’orientation, ainsi que je l’ai signalé en commission, elle relève d’une loi organique.
En conséquence, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3 A (nouveau)
L’article L. 111-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) La dernière phrase est complétée par les mots : « et à lutter contre les inégalités sociales de réussite. » ;
b) Il est complété par cinq phrases ainsi rédigées :
« Il reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser. Il veille à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans distinction d’origine, de milieu social et de condition de santé. Il veille également à la mixité sociale des publics scolarisés au sein des établissements d’enseignement. Pour garantir la réussite de tous, l’école se construit avec la participation des parents, quelle que soit leur origine sociale. Elle s’enrichit et se conforte par le dialogue et la coopération entre tous les acteurs de la communauté éducative. » ;
2° Le deuxième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Le service public de l’éducation fait acquérir à tous les élèves le respect de l’égale dignité des êtres humains, de la liberté de conscience et de la laïcité. Par son organisation et ses méthodes, comme par la formation des maîtres qui y enseignent, il favorise la coopération entre les élèves. » ;
3° Le troisième alinéa devient l’avant-dernier alinéa.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’article 3 A, introduit par notre commission, donne un peu de chair au projet de loi, dont l’article 3 avait été très sèchement supprimé par l’Assemblée nationale. Il est issu d’un amendement présenté par mon groupe et fondé sur l’idée du « tous capables ». Je souhaite m’y arrêter quelques instants.
L’affirmation selon laquelle tous les enfants sont capables d’apprendre et de réussir, soutenue depuis très longtemps par le mouvement pédagogique du Groupe français d’éducation nouvelle, est aujourd’hui reprise par d’autres mouvements, comme ATD Quart Monde. Loin d’être une incantation, elle trouve des fondements dans les travaux menés dans le domaine des neurosciences sur la plasticité du cerveau.
Parce que les différences entre les élèves ne sont pas naturelles, mais socialement construites, et que l’échec scolaire n’est pas une fatalité, l’idée que tous les élèves sont capables d’entrer dans les apprentissages scolaires doit, selon nous, être à la base du projet éducatif.
Les travaux de notre commission ont permis d’introduire dans le projet de loi le principe selon lequel le service public de l’éducation « reconnaît que tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser ». C’est un premier pas qui, nous le savons, n’allait pas de soi.
En effet, affirmer que tous les enfants sont capables d’apprendre suppose de rompre avec une conception de l’élève qui fait reposer les différences sur des dispositions naturelles, que l’on parle d’« aptitudes » ou de « rythmes d’apprentissage propres à chacun » – deux expressions dont nous déplorons qu’elles figurent dans le projet de loi.
Pour nous, affirmer que tous les enfants sont capables d’apprendre et de réussir signifie aussi que c’est à l’éducation nationale, donc à l’État, de réunir les conditions propres à leur en donner les moyens. Pour cela, il est nécessaire de mettre en place des contenus communs et de développer une nouvelle posture professionnelle, ce qui exige une véritable formation continue des enseignants, en lien étroit avec la recherche.
À nos yeux, ce « tous capables » va donc bien au-delà de l’idée d’une l’école bienveillante à l’égard des élèves. Il s’agit d’affirmer que, derrière chaque choix pédagogique, il y a des choix politiques, même si ceux qui enseignent ou éduquent n’en sont pas toujours conscients. Refuser tous les fatalismes, qu’ils soient d’ordre économique, culturel ou social, implique de poser un autre regard sur l’échec scolaire et de s’interroger sur la nature de ce qui fait difficulté. Autrement dit, il faut interroger les implicites et les prérequis scolaires qui ne font pas sens immédiatement chez tous les élèves, au lieu de rejeter la responsabilité des problèmes sur les élèves dits « en difficulté » – comme si la difficulté était en eux – ou sur les enseignants.
C’est pourquoi l’école doit donner à tous, dès la maternelle, ce que certains ont pu commencer à acquérir au sein de leur milieu social et familial. Car devenir élève, c’est-à-dire entrer dans un rapport au monde et aux objets du monde où la réflexivité est centrale, ne se décrète pas ; c’est le fruit d’une construction qui, à nos yeux, relève de la mission première de l’école !
M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. L’article 3 A du projet de loi inscrit à l’article L. 111-1 du code de l’éducation le principe de l’école inclusive sans distinction de condition de santé. C’est une grande avancée, dont nous nous félicitons.
Nous réaffirmons que tous les enfants sont capables d’apprendre et de réussir. L’école a donc la responsabilité de s’ouvrir à tous, y compris aux enfants souffrant de handicap. L’éducation nationale et le système scolaire ont le devoir d’être réellement ouverts à tous les enfants et de permettre leur réussite. Parler d’école inclusive dans les dispositions générales d’organisation du système scolaire, c’est donner véritablement corps au droit à l’éducation pour tous.
Cependant, la prise en charge du handicap à l’école ne passe pas seulement par l’affirmation de grands principes déclaratifs parmi les dispositions touchant l’éducation en général. Ces principes sont évidemment nécessaires, mais ils doivent être accompagnés des moyens qu’exige leur mise en œuvre, sans quoi ils resteront lettre morte.
En l’occurrence, un problème important et urgent reste non résolu : celui des auxiliaires et des emplois de vie scolaire, c’est-à-dire des personnes chargées de l’accompagnement, de l’accueil et de l’intégration des élèves handicapés au sein des établissements scolaires.
En effet, ces personnels, malgré l’importance de leurs missions, disposent d’un statut extrêmement précaire. Ils sont employés sous contrat à durée déterminée de droit public ou sous contrat aidé pour des périodes allant de trois à cinq ans. Ils connaissent temps partiels ou mi-temps généralisés et leurs salaires se situent en moyenne entre 600 et 700 euros par mois.
De plus, comme les CDD ne peuvent pas être renouvelés plus d’un certain nombre de fois, ils n’ont aucune perspective professionnelle, de sorte que nous nous trouvons dans la situation paradoxale de devoir remercier des personnels compétents et qui ont acquis par l’expérience le savoir-faire et les connaissances que leur formation initiale ne leur donnait pas – et pour cause, ils n’en ont aucune, ou seulement de 48 heures. Une fois qu’ils sont remerciés, ces personnels se retrouvent sans perspective professionnelle, tandis qu’au même moment l’accompagnement des enfants handicapés est dégradé.
L’objectif affiché d’inclusion scolaire et la nécessité qui en découle d’offrir un accompagnement pérenne aux enfants en situation de handicap paraissent difficilement compatibles avec le statut de ces personnels. Aussi, il nous semble indispensable de les faire bénéficier d’une véritable formation et de professionnaliser ce métier indispensable à l’intégration des élèves handicapés à l’école. Je vous rappelle que l’État a été condamné à plusieurs reprises par les tribunaux, qui ont requalifié les contrats de ces personnels en CDI. Il est urgent de régler cette question, pour les personnels comme pour les enfants handicapés et leurs familles.
Le 16 octobre 2012, un groupe de travail sur la professionnalisation des accompagnants des enfants et adolescents en situation de handicap a été installé sous la présidence de Mme Komites. Son rapport doit être rendu bientôt. Pourquoi ne pas prévoir déjà, dans le présent projet de loi, les moyens nécessaires à la « CDisation » de ces personnels ou, mieux, à leur embauche sous statut public ?
Si l’inclusion scolaire est au cœur des missions de l’éducation nationale, celle-ci a le devoir de la financer à la hauteur de son importance ! En l’absence d’un financement suffisant, nous craignons que ce énième rapport ne se limite à des constats d’échec que nous connaissons déjà, sans ouvrir la voie à un véritable règlement des problèmes par l’État.
Mes chers collègues, les auxiliaires de vie scolaire, les AVS, méritent notre considération et, donc, un statut digne de la tâche qu’ils accomplissent !
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Je tiens à exprimer ma fierté que le Président de la République fasse de la jeunesse la priorité de son mandat.
Le présent projet de loi, issu d’une concertation poussée, va donner corps à cette promesse. Cette loi ne sera pas la première loi d’orientation sur l’école ; elle aura été précédée par la loi Jospin de 1989 et la loi Fillon de 2005. Elle ne sera pas non plus une énième loi de programmation. Ce qui, en revanche, lui donne un caractère inédit, c’est qu’elle sera à la fois une loi d’orientation et de programmation.
De fait, le projet de loi prévoit une réforme globale, une refondation complète de notre école républicaine. Pour la mener à bien, nous partons du primaire, afin d’envisager l’articulation du parcours scolaire, et nous définissons un cadre d’action qui touche aussi bien aux moyens, humains, financiers et matériels, qu’au rôle intrinsèque de l’école.
Depuis des dizaines d’années, notre système éducatif souffre parce que personne n’a osé le faire évoluer globalement pour l’adapter aux besoins ; les premiers touchés ont été les élèves !
Avec l’article 3 A, nous entendons affirmer les grands principes et les missions de l’éducation. Nous souhaitons une école qui donne la même chance à tous les enfants, à chaque élève, qu’il vive en métropole ou en outre-mer, qu’il soit fils ou fille d’ouvrier ou de cadre. L’école doit permettre de pallier les difficultés et de combler les inégalités.
Nous disons oui à cette école dont le premier mérite sera de faire en sorte que, sur la ligne de départ de la vie, les chances de nos enfants soient aussi égales que possible. Oui, aussi, à cette école dont un autre mérite consistera à combattre l’inégalité que Jules Ferry jugeait la plus redoutable : celle de l’éducation. Oui à cette école qui accueille tous les enfants, quelles que soient leurs origines sociales, géographiques ou religieuses. Oui à cette école qui, véritable creuset d’intégration, contribue à faire la République. La République a fait l’école, l’école fera la République !
M. Jean-Michel Baylet. Très bien !
M. Roland Courteau. Oui, enfin, à cette école, la meilleure de toute, celle qui apprendra le respect, en particulier le respect de la différence, la tolérance.
Aller à l’école, ce n’est pas seulement apprendre les matières scolaires enseignées. L’école doit former des enfants pour en faire les hommes et les femmes de demain, des citoyens conscients de leurs droits et, surtout, de leurs devoirs, des hommes et des femmes qui ne se résignent pas à n’être que des consommateurs de droits et de prestations. Cette école développera le sens critique et la liberté de conscience. Elle promouvra les valeurs qui nous rassemblent et que nous sommes fiers de porter : l’école publique, l’école de la République, l’école laïque.
Demain, nos enfants devront être mieux formés, mieux armés que leurs aînés ne l’ont été pour affronter l’avenir. En effet, le concurrent n’habitera plus la commune ou le département voisin, mais quelque part de l’autre côté de l’Atlantique ou sur les rives du Pacifique. C’est aussi cela, la mondialisation, avec son cortège de progrès, certes, mais aussi de dérives.
En conclusion, je souhaite rappeler les principales dispositions de l’article 23 de la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Ces dispositions, adoptées sur mon initiative, prévoient que des séances d’information doivent être organisées dans tous les établissements scolaires et à tous les stades de la scolarité, consacrées à « l’égalité entre les hommes et les femmes, à la lutte contre les préjugés sexistes et à la lutte contre les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple ».
Elles ont leur importance car, si nous voulons éradiquer à terme la violence à l’égard des femmes, il faut, dès le plus jeune âge, insister sur l’égalité entre les garçons et les filles ainsi que sur les notions de respect. Bref, il faut lutter dès le plus jeune âge contre les préjugés sexistes. Aussi, il serait souhaitable que ces dispositions fassent l’objet d’instructions précises auprès des établissements scolaires, afin que, tout simplement, la loi du 9 juillet 2010 soit enfin appliquée !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. La commission, suivant une proposition de Mme la rapporteur, a souhaité réintroduire dans le projet de loi un article auquel le Gouvernement avait renoncé. En modifiant le premier article du code de l’éducation – j’ai entendu dire tout à l’heure que ce qui ne ressort pas du rapport d’orientation est d’une lecture un peu complexe, mais ainsi le veut la codification actuelle –, cet article met en valeur les grands principes qui doivent nous guider dans notre entreprise de refondation de l’école.
L’article en question n’avait pas été réintroduit par l’Assemblée nationale parce qu’il s’agit d’une tâche un peu ardue. Je veux donc saluer le travail de la commission, qui donne plus de sens au présent projet de loi.
En effet, l’article 3 A réaffirme d’abord notre volonté de réduire le poids des déterminismes sociaux sur la réussite scolaire et, par voie de conséquence, de favoriser la mixité sociale au sein de nos établissements.
Il réaffirme aussi – idée qui vous est chère, sur laquelle vous venez d’insister – le principe fondamental selon lequel chaque élève est capable de réussir sa scolarité. Effectivement, tous les élèves ont la capacité d’apprendre et de progresser dès lors qu’on leur en donne les moyens et l’envie.
L’école doit veiller à l’inclusion de tous, sans distinction d’origine, de milieu social, de condition de santé.
Faisant écho aux propos que vous avez tenus dans la discussion générale, cet article insiste sur le rôle des parents et de l’ensemble de la communauté éducative, sur l’importance de la coopération au sein même de cette communauté comme entre les élèves C’est d’ailleurs ce que réaffirmera à la rentrée la charte de la laïcité.
Enfin, cet article donne à l’école pour mission de transmettre aux élèves un noyau essentiel de valeurs fondamentales, à savoir, madame Laborde, le respect de la liberté de conscience, de l’égale dignité des êtres humains et, bien entendu, de la laïcité. Ces trois valeurs constituent une base à la reconnaissance des autres valeurs de la République.
Le très difficile travail d’écriture législative accompli par la commission est une grande réussite pour la Haute Assemblée. Très humblement, mesdames, messieurs les sénateurs, je salue le travail que vous avez réussi à conduire ensemble.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Je voudrais apporter une précision au sujet des enfants en situation de handicap.
La loi qui résultera de nos travaux constituera une avancée remarquable. En effet, pour la première fois, nous allons faire figurer dans un texte législatif la nécessité d’avoir une école inclusive.
Vous avez très justement souligné le rôle des AVS, qui épaulent les enseignants dans la prise en considération des enfants en situation de handicap.
Ma collègue Marie-Arlette Carlotti et moi-même sommes tout à fait conscientes de l’importance de la tâche des AVS. C’est la raison pour laquelle nous avons mis sur pied un groupe de travail, piloté par Mme Pénélope Komites, qui connaît particulièrement bien ces sujets et qui nous remettra prochainement son rapport.
En liaison avec les associations, elle a élaboré des référentiels pour ce métier, afin de déterminer les compétences que doivent posséder les AVS. Elle nous fera également des propositions sur le statut de ces professionnels. Vous avez très justement souligné que nous ne souhaitions pas voir perdurer la précarité de ces personnels, dont le travail est si important.
Je le reconnais, il aurait sans doute été souhaitable que ce groupe de travail ait déjà terminé ses travaux. Je vous rappelle cependant, mesdames, messieurs les sénateurs, que, dans le courant du mois de juin, doit se tenir un comité interministériel sur le handicap au cours duquel nous allons examiner ces propositions et avancer de manière significative sur le statut des AVS, dont nous saluons la compétence, statut que nous souhaitons le plus professionnel et le moins précaire possible.
M. le président. L'amendement n° 288 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après le mot :
sociales
insérer les mots :
et territoriales
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. La refondation de l’école de la République porte en elle l’ambition de combattre les inégalités sociales et territoriales, qui auraient dû régresser au lieu de progresser ces dernières années.
La corrélation entre les origines sociales ou géographiques et la réussite scolaire demeure encore forte dans notre pays.
Dans le présent projet de loi, cet objectif, qui doit guider l’action du Gouvernement et du Parlement en matière éducative, est rappelé à plusieurs reprises. Dans l’annexe, il est prévu, notamment, que le projet de loi vise à « faire évoluer les politiques de réussite éducative comme l’éducation prioritaire et les dispositifs de lutte contre le décrochage pour lutter contre les inégalités sociales et territoriales ».
La lutte contre les inégalités sociales a été pleinement intégrée. Concernant les inégalités territoriales, un certain nombre de mesures du texte que nous examinons ou de son annexe ont pour objet d’y contribuer : priorité aux zones défavorisées, qu’elles soient rurales ou urbaines, pour le développement de la scolarisation des enfants de deux ans ; création du fonds d’accompagnement de la réforme des rythmes scolaires en faveur des communes ; réforme de la géographie prioritaire de la politique de la ville ; création au cours du quinquennat de 3 000 postes destinés aux zones géographiques qui en ont besoin, de 7 000 postes affectés aux secteurs les plus fragiles, afin de renforcer l’encadrement des élèves, et de 4 000 postes dont la répartition tiendra compte des suppressions d’emploi passées. En outre, dans le second degré, 3 000 postes viseront à améliorer l’équité territoriale interacadémique.
La suppression des postes entraînant la fermeture de classes et l’absence de péréquation des moyens attribués aux collectivités territoriales ont pénalisé les communes défavorisées, qui ont dû organiser le service public de l’éducation comme elles l’ont pu.
Pour toutes ces raisons, il me semble nécessaire d’inscrire à l’article 3 A, qui définit les missions du service public de l’éducation, que ce dernier doit contribuer à la lutte contre les inégalités tant sociales que territoriales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Ma chère collègue, vous souhaitez intégrer la lutte contre les inégalités territoriales dans les missions de service public, en complément de la lutte contre les inégalités sociales, que nous avons pointées du doigt. La commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. Guerriau, Merceron et J.L. Dupont, est ainsi libellé :
Alinéa 5, deuxième phrase
Remplacer le mot :
enfants
par les mots :
élèves, notamment ceux en situation de handicap
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 81, présenté par Mme Gonthier-Maurin et MM. Le Scouarnec et P. Laurent, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 7
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
... ° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les moyens humains et financiers affectés aux écoles et aux établissements d’enseignement sont modulés en fonction de la composition sociale du public qu’ils scolarisent. »
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. L’observation du fonctionnement du système éducatif nous amène à dresser un constat clair : les logiques de concurrence exacerbée par l’assouplissement de la carte scolaire induisent un renforcement des inégalités entre établissements scolaires.
Les établissements les plus prisés, qui se trouvent au niveau supérieur de la hiérarchie scolaire, disposent de ressources plus élevées que les autres, en termes non seulement d’effectifs, qui interviennent dans le calcul de leurs dotations, mais également d’offre d’enseignements et d’options. Dès lors, ces ressources et ces options leur permettent de sélectionner plus facilement leurs élèves, accroissant ainsi les logiques ségrégatives.
La Cour des comptes s’est elle-même récemment inquiétée de cette concentration des moyens dans les établissements déjà les mieux dotés et avait parlé d’effet de « ghettoïsation » à la suite de l’assouplissement de la carte scolaire.
Pour enrayer cette spirale des inégalités et des injustices, il paraît donc nécessaire d’introduire d’autres critères, notamment qualitatifs, pour la détermination des dotations des établissements.
De ce point de vue, il est indispensable d’encourager les établissements faisant des efforts particuliers en termes de mixité sociale et de leur allouer des moyens supplémentaires permettant simplement de compenser les inégalités dont ils sont victimes.
Quand on sait que la mixité sociale favorise la réussite des élèves les plus en difficulté, sans pénaliser les bons élèves, bien au contraire, on comprend tout l’intérêt qu’a l’institution scolaire à la promotion, par la voie financière, de ce type de politique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Comme vous le savez, mon cher collègue, la commission partage l’exigence de la mixité sociale. Ce sujet a d’ailleurs fait l’objet d’un rapport adopté à l’unanimité par notre assemblée. Cependant, il ne paraît pas nécessaire d’inscrire la modulation des dotations dans la loi, car le code de l’éducation prévoit déjà une différenciation des moyens selon les situations. Il appartient au ministère de se doter des outils nécessaires pour améliorer l’affectation des moyens au service de la mixité sociale.
Pensant que le ministre partage totalement cet objectif, je me permets de vous demander, au nom de la commission, de bien vouloir retirer votre amendement, qui, selon moi, est satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Le Scouarnec, l'amendement n° 81 est-il maintenu ?
M. Michel Le Scouarnec. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 81 est retiré.
La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur l'article.
M. Gérard Longuet. L’amendement n° 81 me paraissait extrêmement pertinent. Or son retrait me met dans l’embarras et me conduira à m’abstenir lors du vote du présent article.
En effet, ayant été rapporteur du budget de l’enseignement scolaire pendant de nombreuses années, j’ai pu constater, à l’instar de la Cour des comptes, que les efforts budgétaires consentis par l’éducation nationale en faveur des établissements situés dans des zones difficiles sont inférieurs à ceux qui sont alloués aux établissements confirmés, et ce pour une raison très simple, indépendante de toute volonté.
En fait, les enseignants les plus anciens, confirmés, chevronnés, dont le coût salarial est, à juste titre, le plus élevé, choisissent en fin de carrière les établissements dans lesquels ils estiment pouvoir s’épanouir au mieux, eu égard à une motivation, une cohésion, un engagement des élèves et des enseignants plus importants. Aussi, dans les secteurs les plus difficiles sont affectés les enseignants les plus jeunes, qui coûtent moins cher.
Cet état de fait aboutit au paradoxe suivant : la dépense globale par élève est, dans les secteurs difficiles, inférieure à celle qui est engagée dans les secteurs les plus aisés.
Les auteurs de l’amendement n° 81 ont soulevé un vrai problème. Il avait l’immense mérite de pointer du doigt une réalité que l’on se refuse à prendre en considération, mais qui est une évidence. Cela étant, je ne maîtrise pas la solution ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Monsieur Longuet, vous avez raison d’attirer l’attention sur l’intérêt de cet amendement, qui était toutefois satisfait par une disposition de la loi Fillon ; son adoption aurait donc entraîné une redondance.
Vous vous demandez toutefois comment passer des principes posés dans les textes à l’application. Eh bien, je vais vous le dire.
Comme le soulignait la Cour des comptes dans son rapport voilà deux ans, il faut accorder dans la durée plus de moyens aux établissements en difficulté, et non pas les rogner année après année. À titre d’exemple, dans le département de Seine-Saint-Denis, seulement 1 % des enfants âgés de moins de trois ans sont accueillis à l’école et, après des années de suppressions de postes, le service public de l’éducation ne peut pas être assuré.
La politique que le Gouvernement conduit dans les territoires en difficulté, qu’ils soient ruraux ou urbains, métropolitains ou ultramarins, en particulier pour ce qui concerne les affectations de postes, va au contraire dans le sens de l’action continue qui est souhaitable.
Le projet de loi d’orientation et de programmation qu’il vous présente, mesdames, messieurs les sénateurs, est transparent et permet de passer du principe que nous affirmons, autrement dit la priorité à l’éducation, à sa mise en œuvre.
M. Gérard Longuet. Acceptons-en l’augure !
M. le président. Je mets aux voix l'article 3 A, modifié.
(L'article 3 A est adopté.)
Article 3
(Suppression maintenue)
Article 3 bis
(Supprimé)
Articles additionnels après l'article 3 bis
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Après l'article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le septième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Dans les écoles, les communes sont encouragées à développer les dispositifs de réussite scolaire, en particulier ceux visant à faciliter l'apprentissage de la lecture et de l'écriture en cours préparatoire. Le représentant de l'État veille à ce que l'action de l'État soit menée à travers ces différents outils en cohérence avec ces objectifs. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 381, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 111-1, il est inséré un article L. 111-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 111-1-1. - La devise de la République et le drapeau tricolore sont apposés sur la façade des écoles et des établissements d’enseignement du second degré publics et privés sous contrat. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 est affichée de manière visible dans les locaux des mêmes écoles et établissements. »
La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. L'Assemblée nationale a souhaité réaffirmer l’attachement de la République à son école et contribuer à l’appropriation par les élèves des fondements de la Constitution. Elle a donc proposé d’imposer que le drapeau français et la devise de la République soient apposés au fronton de toutes les écoles et de tous les établissements d’enseignement du second degré, qu’ils soient publics ou privés sous contrat.
L’Assemblée nationale a également souhaité que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 soit affichée de manière visible à l’intérieur des locaux des établissements scolaires.
Le Gouvernement se félicite de cette initiative parlementaire. Les symboles de la République portent nos valeurs communes. Nous savons que nos textes fondateurs donnent mission à l’éducation de transmettre les valeurs de la République. Par conséquent, rendre ces symboles visibles à l’ensemble des élèves de notre pays participera nécessairement à l’accomplissement de cette mission.
Aussi, afin de garantir l’effectivité de cette mesure, inscrite aujourd’hui simplement dans le rapport annexé, nous vous proposons que les conditions du pavoisement des écoles, collèges et lycées soient inscrites dans le code de l’éducation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Favorable.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Pour ma part, je voterai cet amendement, qui me semble juste et de bon aloi. L’adoption de cette disposition permettra de rappeler les lois et les valeurs républicaines au sein de l’école. Je regrette d’ailleurs de ne pas avoir eu l’idée de déposer un amendement visant à compléter le pavoisement en question par le drapeau européen. Mais peut-être pourrons-nous apporter ce complément en deuxième lecture.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. J’aime beaucoup cet amendement du Gouvernement, mais je rejoins l’observation de ma collègue Sophie Primas.
Je rappelle en outre que les établissements du deuxième cycle du second degré, c'est-à-dire les lycées, relèvent de la compétence de la région. Or la tradition veut que le drapeau régional orne également ces établissements. Même si je m’apprête à voter cet amendement, je souhaiterais que nous n’excluions du pavoisement des établissements scolaires ni le drapeau européen, ni les insignes des régions, ni, si les conseils généraux le souhaitent, ceux des départements.
M. François Rebsamen. Et pourquoi pas des villes ? (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous voterons bien sûr cet amendement, d’autant que l’initiative de l’inscription de cette mesure dans le rapport annexé revient à notre collègue député Rudi Salles, membre du groupe UDI.
Pour autant, nous saluons la proposition du Gouvernement, qui souhaite renforcer cette disposition en l’inscrivant dans le code de l’éducation.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Je pense que nous voterons tous cet amendement. Mais, au-delà des symboles que nous allons faire ainsi figurer au fronton des écoles de la République, je voudrais redire l’importance qui s’attache à l’enseignement de l’histoire de notre pays et, j’y insiste, de sa chronologie, car je crois que l’un ne va pas sans l’autre.
M. François Rebsamen. Qu’en pensent ceux qui voulaient supprimer l’enseignement obligatoire de l’histoire en terminale S ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3 bis.
Article 4
(Non modifié)
Le deuxième alinéa de l’article L. 111-2 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase est ainsi rédigée :
« Elle prépare à l’éducation et la formation tout au long de la vie. » ;
2° Après la deuxième phrase, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Elle développe les connaissances, les compétences et la culture nécessaires à l’exercice de la citoyenneté dans la société contemporaine de l’information et de la communication. Elle favorise l’esprit d’initiative. »
M. le président. L'amendement n° 289 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 5, seconde phrase
Après le mot :
favorise
insérer les mots :
l'esprit critique et
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. L’article L. 111-2 du code de l’éducation définit les objectifs de la formation scolaire à laquelle tout enfant a droit.
Le présent projet de loi tend à compléter la rédaction de cet article en précisant notamment que la formation dispensée favorise l’esprit d’initiative, lequel, nous le savons, participe à l’innovation et donc au redressement de notre pays.
Cependant, il nous semble que manque à cet article la référence à la notion d’esprit critique.
En effet, les mutations de notre société, qu’elles soient économiques, sociales, écologiques ou technologiques, impliquent que les enfants, citoyens en devenir, disposent des outils nécessaires à leur compréhension, afin de permettre leur émancipation au profit de leur liberté individuelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je vous demande, ma chère collègue, de bien vouloir retirer cet amendement, que la commission estime satisfait par l’article 9 du projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 289 rectifié est-il maintenu, madame Laborde ?
Mme Françoise Laborde. Il s’agissait pour nous d’un amendement de coordination avec l’article 9. Si cette coordination est automatique, comme l’affirme Mme la rapporteur, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 289 rectifié est retiré.
L'amendement n° 144 rectifié, présenté par Mme Duchêne, M. Carle, Mmes Primas et Mélot et MM. B. Fournier et Chauveau, est ainsi libellé :
Alinéa 5, dernière phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et d'entreprise
La parole est à M. Jean-Pierre Chauveau.
M. Jean-Pierre Chauveau. Dans leur vie professionnelle future, les élèves devront faire preuve d’esprit d’initiative et d’entreprise. Il est donc souhaitable que l’école les prépare au mieux à acquérir cette double qualité, indispensable à la vie professionnelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous considérons que la formule « esprit d’initiative » est plus large et recouvre la notion d’« esprit d’entreprise ». La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Pour compléter les propos de mon collègue, je souligne que les enfants sont extrêmement attachés à l’esprit d’entreprise. Ils aiment oser et prendre des risques, pas seulement dans une perspective mercantile, mais aussi lorsqu’il s’agit de projets humanitaires, d’intérêt général ou sportifs.
Le mot « entreprise » ayant été largement utilisé par M. le Premier ministre dans les premières déclarations, je pense que cet amendement a toute sa place dans ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je considère l’explication de Mme le rapporteur comme très intéressante. Le fait qu’elle estime que l’esprit d’initiative englobe l’esprit d’entreprise figurera dans les comptes rendus des travaux de notre assemblée, de telle sorte que nous pourrons nous appuyer, lorsque nous aurons à réfléchir sur les programmes, sur cette conception, soutenue à la fois par le rapporteur et, semble-t-il, par le ministre.
Je remercie donc nos collègues d’avoir présenté cet amendement, qui permet de clarifier la conviction de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Il est vrai que l’expression « esprit d’initiative » est suffisamment large. Toutefois, je ne voudrais pas qu’on ressuscite des débats qui ne sont pas d’actualité et qui sont étrangers à l’intérêt des élèves.
Le projet de loi porte l’idée d’un parcours d’orientation et d’information professionnelle à partir de la classe de sixième. Bien entendu, les acteurs du monde économique auront la possibilité de venir expliquer aux élèves leur profession – c’est la première fois qu’une telle mesure est prévue –, afin de les aider à définir leur choix d’orientation.
J’ajoute que, avec le Premier ministre, nous allons installer au mois de juin un conseil éducation-économie. En effet, l’un des grands problèmes français, je n’ai cessé de le répéter, est le mauvais ajustement des formations aux métiers.
Nous avons pris en considération ce problème dès notre arrivée aux affaires, ce qui explique d’ailleurs les résultats que nous avons déjà obtenus s’agissant des décrocheurs, et nous poursuivrons dans cette voie.
Selon moi, les oppositions que vous tentez de faire renaître entre nous sont obsolètes et il n’y a aucune raison de poursuivre dans cette voie. Bien sûr, on peut tout inscrire dans le marbre de la loi et, en tout état de cause, dans le compte rendu de nos débats, mais il faudra surtout concrétiser notre volonté sur le terrain.
M. le président. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article 4 bis A (nouveau)
Au second alinéa de l’article L. 111-3 du code de l’éducation, après le mot : « territoriales », sont insérés les mots : «, les associations éducatives complémentaires de l’enseignement public ». – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 4 bis A
M. le président. L'amendement n° 325, présenté par Mme D. Gillot, est ainsi libellé :
Après l'article 4 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 111-4 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils contribuent à l’élaboration et à la mise en œuvre du projet éducatif territorial. »
La parole est à Mme Dominique Gillot.
Mme Dominique Gillot. Les parents d’élèves sont les premiers éducateurs de leurs enfants, on l’a dit à plusieurs reprises.
Pour la qualité du contexte éducatif qu’ils organisent autour des enfants, il est indispensable que l’ensemble des acteurs de l’éducation développent véritablement un esprit commun, poursuivent le même objectif et coopèrent. Le projet de loi prévoir d’ailleurs un outil de coopération et de co-construction du projet éducatif autour des enfants : c’est le projet éducatif territorial.
Il importe donc, de mon point de vue, de préciser dans le code de l’éducation la place des parents d’élèves, qui doivent véritablement contribuer à la co-construction d’un projet éducatif et, plus précisément, à l’élaboration ainsi qu’à la mise en œuvre du projet éducatif territorial.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous comprenons l’esprit qui a présidé à la rédaction de cet amendement, lequel prévoit que les parents sont pleinement associés à l’élaboration du projet éducatif territorial. Toutefois, la commission y est défavorable, car sa formulation tend à remettre en cause la libre administration des collectivités territoriales pour ce qui concerne la mise en œuvre du projet éducatif territorial.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Je précise que, dans la circulaire interministérielle du 20 mars 2013, j’ai recommandé que les représentants des parents soient associés systématiquement à l’élaboration du projet éducatif territorial.
Je vous demande donc également, madame Gillot, de bien vouloir retirer votre amendement dans la mesure où les dispositions qu’il prévoit non seulement figurent d’ores et déjà dans cette circulaire, mais encore vont à l’encontre de la libre administration des collectivités territoriales.
M. le président. L’amendement n° 325 est-il maintenu, madame Gillot ?
Mme Dominique Gillot. Je le retire, tout en persistant à penser qu’il nous faut progresser régulièrement vers l’association effective des parents.
Certains parents seront co-éducateurs et co-organisateurs de la mise en œuvre des projets éducatifs territoriaux. Bien sûr, ce sont les collectivités locales qui décident, en collaboration avec l’éducation nationale. En effet, je n’imagine pas qu’elles puissent imposer un projet éducatif territorial en dehors d’un vrai dialogue avec l’éducation nationale et les équipes éducatives qui ont en charge les enfants durant les vingt-quatre heures d’enseignement.
Il me semble donc important que la place des parents soit bien précisée. Nos bonnes intentions, aussi bien que la circulaire évoquée par M le ministre, peuvent très vite être battues en brèche, certaines organisations territoriales considérant les parents comme des gêneurs. (M. André Gattolin applaudit.)
M. le président. L’amendement n° 325 est retiré.
Article 4 bis
I. – L’article L. 541-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Au début, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les actions de promotion de la santé des élèves font partie des missions de l’éducation nationale. Elles sont en priorité assurées par les médecins et infirmiers de l’éducation nationale. À ce titre, les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d’actions de prévention et d’information, de visites médicales et de dépistages obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire. Ces actions favorisent notamment leur réussite scolaire et la réduction des inégalités en matière de santé. L’éducation nationale concourt au dépistage précoce des difficultés cognitives et physiques des élèves » ;
2° Au deuxième alinéa, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
3° Après le mot : « concours », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « de l’infirmier et, dans les établissements du second degré, d’un service social. »
II. – L’article L. 2325-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les actions de promotion de la santé des élèves font partie des missions de l’éducation nationale. Elles sont en priorité assurées par les médecins et infirmiers de l’éducation nationale. À ce titre, les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d’actions de prévention et d’information, de visites médicales et de dépistages obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire. Ces actions favorisent notamment leur réussite scolaire et la réduction des inégalités en matière de santé. » ;
2° Au troisième alinéa, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « deuxième » ;
3° Après le mot : « concours », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « de l’infirmier et, dans les établissements du second degré, d’un service social. »
M. le président. La parole est à M. Georges Labazée, sur l'article.
M. Georges Labazée. Il y a quelques semaines, nous avons eu ici même un débat sur les politiques vaccinales en France, qui faisait suite à un rapport commandé par la commission des affaires sociales à la Cour des comptes, lui-même complété par le rapport de la commission que j’avais eu l’honneur de présenter.
Ce débat s’est déroulé en présence de Mme la ministre Marisol Touraine, qui a répondu très favorablement, au nom du Gouvernement, à notre préoccupation relative aux vaccinations, lesquelles doivent être remises au cœur de la politique de santé menée en faveur des enfants. À cet égard, il convient non seulement de prendre en compte les vaccins obligatoires, mais aussi de garantir un suivi permanent de nos enfants, pour assurer la protection de leur santé.
Au cours de ce débat, nous avons en outre souhaité que, dans le nouveau cursus de formation des enseignants au sein des écoles supérieures du professorat et de l’éducation – ESPE –, les enseignants soient sensibilisés aux politiques vaccinales.
Nous avions déposé un amendement sur ce sujet. Finalement, désireux de ne pas surcharger les débats, nous l’avons retiré. Je profite toutefois de l’occasion qui m’est donnée pour attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité de rappeler les obligations vaccinales à l’école. Nous constatons en effet dans notre pays une désaffection de plus en plus importante à leur égard, Internet étant aujourd’hui devenu, de fait, l’ennemi des politiques vaccinales menées dans notre pays eu égard au nombre de sites qui prêchent l’hostilité à la vaccination, au point de créer des phénomènes de rejet, ce qui est grave pour la santé future de nos enfants.
Monsieur le ministre, je souhaitais simplement, à l’occasion de l’examen de cet article 4 bis, comme je le ferai à propos de l’article 51, relatif aux ESPE, attirer votre attention sur cet élément majeur de la santé dans notre pays.
M. le président. La parole est à M. Christian Favier, sur l’article.
M. Christian Favier. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 4 bis, introduit par la commission à l’Assemblée nationale, inscrit les actions de promotion de la santé des élèves au cœur des missions de l’éducation nationale. Nous ne pouvons évidemment qu’y être favorables.
Cet article dispose que les élèves bénéficient au cours de leur scolarité d’actions de prévention et d’information, ainsi que de visites médicales. Fort bien ! Vous me permettrez néanmoins d’émettre quelques réserves.
Cet article reste, somme toute, largement déclaratif et risque fort, au final, de n’avoir aucune conséquence. C’est d’autant plus vrai qu’il n’introduit pas de grandes nouveautés par rapport au code de l’éducation actuel, qui prévoit d’ores et déjà des visites médicales ainsi que des actions de prévention et d’éducation à la santé.
La Cour des comptes, dans son rapport sur l’évaluation de la médecine scolaire de 2011, pointait la nécessité de clarifier les missions de cette dernière. Les termes très généraux de cet article y suffiront-ils ?
La Cour parlait d’un écart profond « entre les objectifs ambitieux de la médecine scolaire et la réalité de ses résultats ». Mais que fait cet article, à part réaffirmer des objectifs ? Le projet de loi ne doit pas se contenter de reprendre de grands principes en matière de médecine scolaire, il doit aussi faire en sorte que ces principes soient effectivement mis en œuvre.
Ainsi convient-il d’aborder le traitement des personnels de la médecine scolaire.
Nous avons présenté en commission un amendement visant à réaffirmer l’importance de ces personnels. La question de la santé en milieu scolaire doit principalement relever de leur compétence et ne doit en aucun cas être externalisée, sous peine de contredire cet article, lequel dispose qu’il s’agit d’une mission fondamentale de l’éducation nationale.
La Cour des comptes affirmait déjà en 2011 que « l’avenir des métiers de la médecine scolaire est très préoccupant, au regard des prévisions de départs massifs à la retraite au cours de la prochaine décennie [...] et au manque d’attractivité des carrières ». Aussi faut-il absolument poser les questions suivantes : quelle place envisagez-vous d’attribuer à ces personnels de l’éducation nationale, monsieur le ministre ? Comment comptez-vous revaloriser leur carrière ? Quelles sont les perspectives budgétaires pour la médecine scolaire ? Combien de postes prévoyez-vous de créer pour que la médecine scolaire puisse effectivement faire partie des grandes missions de l’éducation nationale ?
Autant de questions auxquelles il convient de répondre pour donner du sens à ce nouvel article !
M. le président. L’amendement n° 188, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première à quatrième phrases
Remplacer ces phrases par deux phrases ainsi rédigées :
« Les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d’actions de prévention et d’information, de visites médicales et de dépistages obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire. Ces actions, assurées en priorité par les médecins et infirmiers de l’éducation nationale, favorisent notamment leur réussite scolaire et la réduction des inégalités en matière de santé » ;
La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Nous avons souhaité réécrire cet article en supprimant notamment une phrase qui nous semblait pour le moins curieuse, en tout cas ambiguë : celle qui mentionne « les actions de promotion de la santé des élèves ».
L’éducation nationale a-t-elle vraiment pour mission d’assurer la « promotion de la santé des élèves » ? Et que recouvre exactement cette notion ? La rédaction que nous proposons nous paraît plus précise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Vous souhaitez, mon cher collègue, supprimer la référence à la promotion de la santé, que vous remplacez par une série de préconisations et d’actions d’ores et déjà inscrites dans les phrases suivantes.
La commission étant très attachée à cette notion de promotion de la santé, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Je ne comprends pas pourquoi la commission rejette cet amendement.
Je vous ai entendu vous plaindre, monsieur le ministre, du sectarisme de l’opposition. Pourtant, en présentant des amendements tels que celui-ci, nous nous efforçons seulement de concourir à la rédaction de la loi, nous ne faisons preuve ni de volonté d’obstruction ni de mauvais esprit.
Nous ne sommes évidemment pas des adversaires de la promotion de la santé des élèves ! Nous souhaitons au contraire que les élèves soient en parfaite santé. Nous avons simplement voulu rédiger l’article de façon plus précise.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. L’expression « promotion de la santé », loin d’être floue, est issue de la charte d’Ottawa de l’Organisation mondiale de la santé, adoptée en 1986, et elle a un contenu technique précis. C’est pourquoi nous y sommes attachés.
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour explication de vote.
Mme Maryvonne Blondin. Je souhaite ajouter aux arguments de Mme la rapporteur que l’OMS définit la promotion de la santé comme l’une des composantes importantes de la santé publique, qui se situe dans le domaine de la prévention. Elle permet ainsi d’agir sur les déterminants de santé liés à l’épanouissement et au bien-être des individus dans un environnement sain. Nous retrouvons là les propos que nous avons tenus lors de la discussion générale.
M. Jacques Legendre. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 188 est retiré.
L’amendement n° 83, présenté par Mme Gonthier-Maurin et MM. Le Scouarnec et P. Laurent, est ainsi libellé :
Alinéa 3, dernière phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Notre amendement tend à supprimer la phrase suivante, introduite en commission sur l’initiative de nos collègues de l’UMP : « L’éducation nationale concourt au dépistage précoce des difficultés cognitives et physiques des élèves ». Cette phrase présente en effet, selon nous, plusieurs imperfections.
Tout d’abord, la notion de « difficultés physiques » ne fait pas particulièrement sens ; elle est pour le moins évasive, floue.
En outre, le traitement de la difficulté cognitive relève non des médecins, mais des psychologues. Il paraît donc inapproprié d’y faire référence dans un article concernant spécifiquement la santé.
Enfin, nous ne comprenons pas l’utilité qu’il y a à mentionner un dépistage « précoce » pour ces deux seules difficultés.
Les dépistages de santé concernent tous les problèmes et toutes les difficultés, et ce dès le plus jeune âge. Il n’y a pas lieu d’établir de hiérarchie entre ces dernières, a fortiori quand elles sont aussi imprécises.
Surtout, nous jugeons bon de rappeler que le dépistage existe déjà au sein de l’institution scolaire. Il est d’ailleurs rappelé dans le même alinéa de l’article 4 bis du projet de loi : « les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d’actions de prévention et d’information, de visites médicales et de dépistages obligatoires ».
S’il existe bien un problème quant au dépistage, il tient au fait que celui-ci n’est pas effectivement pratiqué, et non à son absence de la loi.
Mieux vaut donc se préoccuper de la mise en œuvre réelle du dépistage prévu par la loi que de l’inscrire une énième fois dans le code pour ne pas l’appliquer au final.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 355 rectifié, présenté par Mme Blondin, M. Magner, Mmes D. Michel, D. Gillot, Laurent-Perrigot, Lepage et Khiari, MM. Lozach, Assouline, Chiron, D. Bailly, Antiste, Eblé, Domeizel, Vincent, Madrelle, Antoinette, Percheron, Andreoni, Rainaud, Germain et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les visites médicales et de dépistages obligatoires ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. »
II. – Après l’alinéa 4
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Au troisième alinéa, les mots : « de la sixième année » sont remplacés par les mots : « entre la quatrième et la sixième année » ;
…° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Les ministres chargés de l’éducation nationale et de la santé déterminent conjointement, par voie réglementaire, pour chacune des visites médicales et de dépistages obligatoires, la périodicité et le contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage. »
III. – Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le sixième alinéa est supprimé.
IV. – Après l’alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Les visites médicales et de dépistages obligatoires ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. »
V. – Après l’alinéa 9
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Au quatrième alinéa, les mots : « de la sixième année » sont remplacés par les mots : « entre la quatrième et la sixième année » ;
…° Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« Les ministres chargés de l’éducation nationale et de la santé déterminent conjointement, par voie réglementaire, pour chacune des visites médicales et de dépistages obligatoires, la périodicité, le contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage, ainsi que les éventuelles populations prioritaires. »
VI. – Alinéa 10
Remplacer le mot :
cinquième
par le mot :
sixième
VII. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…° Le septième alinéa est supprimé.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. La Cour des comptes mais aussi le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale ont mis en évidence la multiplication des tâches dévolues, au fil du temps, à la santé scolaire, sans que sa mission soit pour autant clairement redéfinie. Force est donc de constater que, sur le terrain, les personnels de santé scolaire sont dans l’incapacité de remplir la totalité des tâches leur incombant, ce qui les oblige bien souvent à hiérarchiser les urgences.
Si le bilan portant sur les enfants de six ans scolarisés est globalement à peu près réalisé, mais de manière très variable selon les académies, avec un taux de couverture en baisse, tel n’est pas le cas de tous les autres bilans systématiques obligatoires.
S’ajoutent à cela les doutes exprimés par les personnels de santé sur l’intérêt même de ces dépistages, notamment au regard des repérages « remontés » par les enseignants et des dépistages à la demande.
En matière de suivi des adolescents, par exemple, les personnels de santé scolaire sont confrontés à l’accroissement des situations de souffrance psychique des jeunes. Or la détection de cette souffrance n’a pas à relever de la systématicité.
La situation de crise profonde que connaît la santé scolaire nous oblige à adopter une démarche réaliste prenant en compte les moyens effectivement à disposition, pour mettre en priorité l’accent sur les actions de santé publique les plus pertinentes et les plus efficaces. Force est de reconnaître qu’en organisant le suivi sanitaire des enfants et des adolescents autour de visites systématiques tous les trois ans à partir de l’âge de la scolarité obligatoire, sans avoir donné parallèlement à la médecine scolaire les moyens qui lui sont nécessaires, il sera difficile d’atteindre cet objectif.
Je le rappelle, le précédent gouvernement n’a pris aucune mesure d’application pour rendre cet objectif tangible dans le délai prévu.
Par ailleurs, il n’existe pas, à ce jour, d’accord entre le ministère de l’éducation nationale et celui de la santé sur la pertinence de certaines visites médicales obligatoires, alors qu’il s’agit tout de même d’une question majeure. Nous ne pouvons faire l’impasse sur une réévaluation de l’intérêt de ces bilans systématiques au regard des besoins et des objectifs de santé publique, ainsi que des moyens disponibles.
Nous proposons donc de revenir aux fondements et d’introduire une définition conjointe, par le ministère de l’éducation nationale et celui de la santé, du contenu et de la périodicité des bilans de dépistages obligatoires.
Cet amendement permet en outre de créer les conditions d’un rééquilibrage, pour mieux concilier la double vocation de la santé scolaire : assurer un suivi de tous les jeunes scolarisés et celui des enfants confrontés à des situations particulières, pour des raisons de santé ou de handicap, et qui ont besoin d’une prise en charge adaptée au sein du système scolaire.
M. le président. L’amendement n° 528, présenté par Mme Cartron, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer le mot :
cinquième
par le mot :
sixième
La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 355 rectifié.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. L’amendement n° 528 de la commission tend à corriger une erreur d’imputation dans le code de la santé publique.
Quant à l’amendement n° 355 rectifié, il vise à organiser des examens médicaux de prévention et de dépistage conjoints aux ministères de l’éducation nationale et de la santé.
La commission étant favorable à cette proposition, je retire l’amendement n° 528.
M. le président. L'amendement n° 528 est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 355 rectifié ?
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée. Madame la sénatrice, la question des examens médicaux obligatoires dont doivent bénéficier les enfants est importante. Toutefois, le mieux peut être l'ennemi du bien : la loi prévoit déjà un grand nombre d'examens, alors que les moyens manquent. Par conséquent, il me semble préférable de diminuer le nombre d'examens obligatoires afin de permettre qu’ils soient réellement pratiqués.
Le Gouvernement est favorable à la mesure que vous préconisez, sous réserve que vous acceptiez de la rectifier.
Vous souhaitez que ces examens soient prévus entre la quatrième et la sixième année, ce qui peut entraîner une confusion avec les missions de la protection maternelle et infantile.
Nous préférons pour notre part conserver la rédaction du troisième alinéa de l’article L. 541-1 du code de l’éducation, à savoir que ces examens doivent avoir lieu au cours de la sixième année.
M. le président. Madame Blondin, que pensez-vous de la suggestion de Mme la ministre ?
Mme Maryvonne Blondin. Madame la ministre, j'entends votre argument. La mesure que je préconise peut participer du travail coordonné qu’il faut mettre en place entre les différents professionnels de santé.
Je rappelle que les enfants ne se développent pas tous au même rythme. Il est donc important de prévoir des dépistages ciblés.
M. Michel Savin. Il y a les services de PMI !
Mme Maryvonne Blondin. Cependant, puisqu'il faut trouver un compromis, j'accepte de rectifier mon amendement dans le sens suggéré par le Gouvernement.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 355 rectifié bis, présenté par Mme Blondin, M. Magner, Mmes D. Michel, D. Gillot, Laurent-Perrigot, Lepage et Khiari, MM. Lozach, Assouline, Chiron, D. Bailly, Antiste, Eblé, Domeizel, Vincent, Madrelle, Antoinette, Percheron, Andreoni, Rainaud, Germain et les membres du groupe socialiste et apparentés, et ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les visites médicales et de dépistages obligatoires ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. »
II. – Après l’alinéa 4
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Les ministres chargés de l’éducation nationale et de la santé déterminent conjointement, par voie réglementaire, pour chacune des visites médicales et de dépistages obligatoires, la périodicité et le contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage. »
III. – Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le sixième alinéa est supprimé.
IV. – Après l’alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Les visites médicales et de dépistages obligatoires ne donnent pas lieu à contribution pécuniaire de la part des familles. »
V. – Après l’alinéa 9
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« Les ministres chargés de l’éducation nationale et de la santé déterminent conjointement, par voie réglementaire, pour chacune des visites médicales et de dépistages obligatoires, la périodicité, le contenu de l’examen médical de prévention et de dépistage, ainsi que les éventuelles populations prioritaires. »
VI. – Alinéa 10
Remplacer le mot :
cinquième
par le mot :
sixième
VII. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…° Le septième alinéa est supprimé.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 354, présenté par Mme Blondin, M. Magner, Mmes D. Michel, D. Gillot, Laurent-Perrigot, Lepage et Khiari, MM. Lozach, Assouline, Chiron, D. Bailly, Antiste, Eblé, Domeizel, Vincent, Madrelle, Antoinette, Percheron, Andreoni, Rainaud, Germain et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
2° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Les mots : « que le bilan mentionné au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « qu’un bilan de leur état de santé physique et psychologique » ;
b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« La rémunération versée par l’employeur aux parents ou tuteurs qui accompagnent les enfants à ces visites peut être maintenue pendant la durée consacrée à cet accompagnement. » ;
II. - Alinéa 9
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés ;
2° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) Les mots : « que le bilan mentionné au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « qu’un bilan de leur état de santé physique et psychologique » ;
b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« La rémunération versée par l’employeur aux parents ou tuteurs qui accompagnent les enfants à ces visites peut être maintenue pendant la durée consacrée à cet accompagnement. » ;
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Un grand nombre de dépistages positifs réalisés dans le cadre de la santé scolaire ne sont malheureusement pas suivis de soins en raison d’incompréhension sur la nature des suites médicales à donner et de difficultés d’accès aux soins. Je rappelle que les médecins formulent des préconisations, mais qu’il revient ensuite à la famille de prendre les rendez-vous médicaux et d'assurer le suivi. Faciliter la présence parentale lors des visites médicales dans le cadre scolaire serait un moyen de remédier à cette première cause de non-suivi. Nombre de parents ne peuvent se permettre de s’absenter durant leur temps de travail pour accompagner leur enfant, du fait des conséquences financières d’une telle absence.
Aussi le bilan de la sixième année s’effectue-t-il de moins en moins souvent en présence des parents. Pourtant, l’entretien avec les parents permet de répondre à leurs interrogations ou préoccupations, d’entrer dans l’histoire de l’enfant et d’aborder sa vie quotidienne. En outre, dans les zones très défavorisées, les médecins scolaires constituent pour certaines familles les seuls interlocuteurs médicaux.
C’est pourquoi nous vous proposons, sur le modèle de ce qui existe pour le don du sang, de rendre possible, sur justificatif, le maintien du salaire pour le temps d’absence induit par ces visites médicales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 376, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 5 et 10
Remplacer les mots :
d’un service social
par les mots :
d’un assistant de service social
La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Il s'agit d'un amendement de précision de nature juridique.
En cherchant à lever toute ambiguïté sur les missions des infirmières scolaires, la commission a répondu à une préoccupation du Gouvernement. Cela étant, dans la rédaction actuelle du projet de loi, il est question de « service social ». Or, cela n'existe qu'à l'échelon du département et non à celui d’un établissement. Il convient donc de parler d’« assistants de service social » qui, comme vous le savez, ont un secteur d’intervention comprenant un ou plusieurs établissements du second degré.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
M. le président. L'amendement n° 189, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Les élèves bénéficient, au cours de leur scolarité, d'actions de prévention et d'information, de visites médicales et de dépistages obligatoires, qui constituent leur parcours de santé dans le système scolaire. Ces actions, assurées en priorité par les médecins et infirmiers de l'éducation nationale, favorisent notamment leur réussite scolaire et la réduction des inégalités en matière de santé. L'éducation nationale concourt au dépistage précoce des difficultés cognitives et physiques des élèves. » ;
La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 188. Il convient d'ajouter la précision introduite en commission pour l'article L. 541-1 du code de l’éducation, concernant le dépistage précoce des difficultés cognitives et physiques des élèves.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur le sénateur, vous avez souligné qu'il s'agissait d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 188 que vous avez retiré. Par conséquent, par parallélisme des formes, la commission demande le retrait de l'amendement n° 189.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Legendre, l'amendement n° 189 est-il maintenu ?
M. Jacques Legendre. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 189 est retiré.
Je mets aux voix l'article 4 bis, modifié.
(L'article 4 bis est adopté.)
Article 4 ter
(Supprimé)
Articles additionnels après l'article 4 ter
M. le président. L'amendement n° 323 rectifié, présenté par Mme D. Gillot, est ainsi libellé :
Après l'article 4 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase de l’article L. 112-3 du code de l’éducation, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cas du choix d’une communication bilingue, les mesures dérogatoires prévues au troisième alinéa de l’article L. 112-1 s’appliquent de plein droit sur le seul choix des parents.
« Le projet personnalisé de scolarisation des jeunes sourds prend en compte l’évaluation mentionnée à l’article L. 112-2 du présent code et le choix de communication de leur famille. »
La parole est à Mme Dominique Gillot.
Mme Dominique Gillot. Cet amendement vise à rendre effective la liberté de choix du mode de scolarisation pour les parents d’enfants sourds.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, afin que nous comprenions l’enjeu de cet amendement, dont l’objet semble en contradiction avec les droits demandés par les parents d'enfants qui souffrent d'un autre handicap, et pour que nous ayons tous bien conscience de la particularité que représente la surdité profonde pour les jeunes enfants, je sollicite votre attention quelques instants.
Pour les enfants sourds nés de parents entendants ou les enfants devenus sourds très précocement avant l’âge de la motricité socialisée, le problème majeur est que la fonction symbolique continuellement en activité chez l’être humain à l’état de veille n’a pas d’éléments sémiotiques pour s’alimenter lorsqu’ils se trouvent au milieu d’enfants et d’adultes dans un cadre extra-familial.
Le langage gestuel, qu’il s’agisse de la langue des signes ou du langage parlé complété, avec ses codifications discriminatives, est le seul accès que peut avoir l’enfant sourd à la symbolisation utilisable dans ses relations, à partir de sa relation privilégiée à sa mère, à son père et à ses familiers.
La langue des signes ou le langage parlé complété est l’indispensable préparation au langage parlé et écrit qui pourra être enseigné à cet enfant, au plus tôt après ses trois ans. Elle alimente et suscite la fonction symbolique, elle permet à l’enfant de communiquer avec tous ceux qui ont connaissance des rudiments de cette langue, encore plus avec ceux qui la parlent parfaitement.
Il est vrai que l’apprentissage du langage oral et écrit apporte aux sourds le moyen de communiquer avec tous les entendants – tel est l’objectif de la scolarisation. Mais si, dès la plus petite enfance, l'enfant n'a que ce repérage flou du sens par les mouvements des lèvres de ses mère et père pour recevoir d’eux des messages, il est soumis à l'inflation, la survalorisation du masque dans le visage et de la bouche dans ce visage. Il n'a donc pas de communication symbolique avec les autres.
La langue des signes dûment codée ou le langage parlé complété, enseigné aux enfants sourds, est le garant de l'assurance de la sécurité de l'enfant dans son identité, le garant de sa puissance émettrice et réceptrice de langage ; c'est la vitalité entretenue avec et pour les autres de sa fonction symbolique et de sa fonction imaginaire.
Voilà ce qui plaide pour l'apprentissage précoce de la langue des signes et aussi pour la conservation de cette langue pour les sourds alors qu'ils sont initiés à la compréhension et à l'émission de la langue orale, laquelle les introduit à la culture par l'écriture et la lecture de la langue orale.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai pris la peine de lire cet extrait d'une définition extrêmement scientifique pour préciser la volonté des parents d'enfants sourds et des sourds eux-mêmes.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Dominique Gillot. Monsieur le président, ce sujet est important, et je souhaite pouvoir m’exprimer jusqu’au bout.
Il est important de garantir aux enfants sourds la possibilité d'apprendre la langue des signes quand leurs parents le souhaitent. Certains parents préfèrent que leurs enfants accèdent au langage oral, avec toutes les difficultés que cela peut entraîner : c'est un choix d'éducation tout à fait respectable, qui est d'ailleurs proposé et garanti aux familles.
Les parents d'enfants handicapés souhaitent que leurs enfants soient intégrés en milieu ordinaire, dans l'école de proximité. Les parents d'enfants sourds n’ont pas cette exigence : ils demandent au contraire que leurs enfants puissent être scolarisés par petits groupes dans une école qui leur garantira un enseignement en langue des signes ou en langue française parlée complétée, et non qu’ils soient seulement accompagnés par des assistants de vie scolaire en langue des signes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Face à la complexité du sujet, la commission s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Madame Gillot, le sujet que vous abordez est très important et ne peut laisser indifférent. Cependant, à ce stade, ce n'est pas un problème législatif.
En effet, l'article L. 112-3 du code de l'éducation prévoit que, « dans l’éducation et le parcours scolaire des jeunes sourds, la liberté de choix entre une communication bilingue, langue des signes et langue française, et une communication en langue française est de droit ». Cet article renvoie par ailleurs à un décret en conseil d'État qui n'a jamais été publié.
Par conséquent, je prends devant vous l'engagement de permettre la mise en œuvre de ce texte, qu'il n'est pas nécessaire de réécrire, afin que soient levées les difficultés que rencontrent les enfants sourds et leurs familles.
Pour cette raison, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Madame Gillot, l'amendement n° 323 rectifié est-il maintenu ?
Mme Dominique Gillot. Non, je le retire, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir pris la peine d’étudier précisément les textes. Jusqu’à présent, chaque fois que j'abordais ce sujet, on me répondait que ma demande était satisfaite et qu'un décret avait déjà été pris précisant la mise en œuvre de cet article. Or, comme vous l'avez confirmé, ce décret n'a jamais été publié.
Monsieur le ministre, je vous serais reconnaissante de faire diligence pour que ce décret soit publié et que cesse l'angoisse des parents face à la possibilité d'exercer leur choix d'éducation pour leurs enfants.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 323 rectifié est retiré.
L'amendement n° 324 rectifié, présenté par Mme D. Gillot, est ainsi libellé :
Après l'article 4 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 112–4 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les jeunes sourds, ces aménagements peuvent prévoir, en tant que de besoin, la reformulation en langue des signes française des intitulés de ces épreuves. »
La parole est à Mme Dominique Gillot.
Mme Dominique Gillot. Là encore, l’objectif est de permettre aux jeunes sourds, qu’ils soient écoliers, lycéens ou étudiants, et même s'ils sont parfaitement lettrés, de mieux comprendre la formulation de certains textes écrits. En effet, il leur est parfois difficile d’appréhender des termes techniques peu courants. C’est pourquoi je préconise qu’ils puissent bénéficier, dans la préparation de leurs examens, d'une médiation en langue des signes de manière à s'assurer qu'ils ont bien compris l'énoncé du sujet qui leur est soumis.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cet amendement ayant été rectifié conformément aux vœux de la commission, celle-ci émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Là encore, je suis bien embarrassé. De fait, l'article L. 112–4 du code de l’éducation dispose déjà que « ces aménagements peuvent inclure notamment […] la présence d’un assistant, un dispositif de communication adapté […] ». Les textes existent donc, il s’agit simplement de faire en sorte qu’ils soient appliqués. Là est le problème, malheureusement.
Aussi, je prends une nouvelle fois l’engagement de veiller à mieux faire appliquer les textes en vigueur et vous invite en parallèle à retirer votre amendement, madame la sénatrice, afin de ne pas inscrire dans le code de l’éducation une disposition qui y est déjà contenue.
M. le président. Madame Gillot, l'amendement n° 324 rectifié est-il maintenu ?
Mme Dominique Gillot. Non, je le retire, monsieur le président.
Je le signale néanmoins, les statistiques indiquent que, depuis 2006 ou 2007, depuis que cette procédure ne leur est plus assurée, les résultats obtenus par les élèves sourds à leurs examens ont connu une régression. C’est pourquoi je demande que cette faculté qui leur est offerte dans le code soit réaffirmée, et qu’elle puisse être effective.
M. le président. L'amendement n° 324 rectifié est retiré.
L'amendement n° 12, présenté par Mme Campion, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 4 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 351–1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 351–1–... Ainsi rédigé :
« Art. L. 351–1–... – La coopération entre les établissements mentionnés à l’article L. 351–1 du présent code et les établissements et services mentionnés aux 2° et 3° du I de l’article L. 312–1 du code de l’action sociale et des familles est organisée par des conventions passées entre ces établissements et services afin d’assurer la continuité du parcours de scolarisation des élèves en situation de handicap.
« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret. »
La parole est à Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis.
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis. La commission des affaires culturelles propose d'insérer cet article additionnel afin de relancer le chantier de la coopération entre l'éducation nationale et le secteur médico-social.
En effet, l’une des conditions de réussite de la loi du 11 février 2005 en matière de scolarisation des enfants en situation de handicap résidait dans la coopération renforcée entre l’éducation nationale et le secteur médico-social, de manière à rompre la logique de filières, permettre la fluidité des parcours de ces enfants et, ainsi, améliorer la qualité de leur prise en charge.
Le cadre de cette coopération a été défini par le décret du 2 avril 2009, qui prévoit notamment la signature de conventions entre les établissements scolaires et spécialisés ainsi que les modalités d’intervention des personnels médico-sociaux en milieu ordinaire.
Isabelle Debré et moi-même dressions le constat, dans notre rapport sur la loi de février 2005, rendu en juillet 2012, au nom de la commission pour le contrôle de l’application des lois, que le bilan de cette coopération « est très négatif ». En effet, une part importante des acteurs locaux, notamment dans les établissements, n’a pas connaissance de ce texte ; de fait, très peu de conventions ont été signées et, lorsqu’elles l’ont été, celles-ci ne couvrent qu’une part infime du champ de la coopération prévue par le décret.
Il nous semble indispensable de relancer ce chantier en inscrivant dans la loi le principe de la coopération entre les établissements scolaires et les établissements et services médico-sociaux.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Sur le fond, la commission est tout à fait favorable à l’objectif affiché par les auteurs de cet amendement. Nous l’avons dit, la coopération est un axe fort de la réussite de tous les élèves, en particulier des élèves en situation de handicap. Cela étant, les dispositions visées dans cet amendement sont d’ores et déjà inscrites dans le code de l’éducation.
Pour cette raison, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Ce débat sur l’application des normes en vigueur est tout à fait passionnant. Toutefois, force est de constater que les auteurs de cet amendement se contentent d’énoncer que la coopération entre les établissements médico-sociaux et les établissements scolaires est organisée par convention.
Cette obligation est issue des principes généraux du droit et n’est donc pas, en tant que telle, normative. Les articles D. 351-17 à D. 351-20 du code de l'éducation prévoient déjà des modalités de coopération spécifique sous la forme de ce qu'on appelle les unités d'enseignement. L’article D. 312-10-6 du code de l'action sociale et des familles dispose quant à lui, de manière similaire, que « la coopération entre les établissements scolaires et les établissements et services du secteur médico-social est organisée par des conventions passées entre ces établissements et services ».
Encore une fois, il faut être attentif et veiller à ce que ces éléments de droit soient réellement appliqués, mais le fait est que ces dispositions sont déjà inscrites dans nos codes.
Aussi, le Gouvernement demande à son auteur de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Madame la rapporteur pour avis, l'amendement n° 12 est-il maintenu ?
Mme Claire-Lise Campion, rapporteur pour avis. J'ai bien entendu les arguments avancés par M. le ministre, et je l'en remercie ; mais il importe avant tout à la commission des affaires sociales que les dispositions visées dans son amendement soient inscrites dans la loi. C’est essentiel pour elle et c’est la raison pour laquelle elle a déposé cet amendement.
Aussi, Monsieur le ministre, je maintiens, au nom de la commission des affaires sociales, cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. L’examen de cet article 4 ter a été l’occasion, pour la commission des affaires sociales, de débattre notamment de l'accompagnement des enfants durant le temps scolaire par les assistants de vie scolaire, les AVS, mais également durant le temps périscolaire. En effet, il est important de faire le lien entre ces deux temps. Dans un certain nombre de départements, des expériences ont été tentées consistant à la fois pour le conseil général et pour l'éducation nationale à apporter un soutien à des associations œuvrant en faveur des élèves en situation de handicap non seulement durant le temps scolaire, mais également dans leur vie quotidienne.
Monsieur le ministre, vous avez proposé la création de postes d’AVS. La loi de 2005 contient déjà des dispositions à cet égard, et ces mesures que vous entendez mettre en œuvre sont un élément supplémentaire. Mais de quelle façon entendez-vous prendre en compte le temps périscolaire et les différents acteurs qu’il réunit ?
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Je remercie Claire-Lise Campion de ne pas avoir retiré cet amendement, issu du rapport qu’elle-même et Isabelle Debré avaient rédigé sur l’application de la loi de février 2005. Nous avons eu un débat en commission des affaires sociales. S’agissant de l'accessibilité des enfants à l'école ordinaire, monsieur le ministre, il est de règle – ou, à tout le moins, c’est une convention – que des collaborations se mettent en place entre l’éducation nationale et le secteur médico-social dans le but de permettre une meilleure scolarisation des enfants handicapés. Or, dans les faits, comme cela est très bien expliqué dans le rapport de nos deux collègues, tel n’est pas véritablement le cas.
C’est pourquoi la commission des affaires sociales tient, par cet amendement, à inscrire dans la loi une disposition qui n’est à ce jour que d’ordre réglementaire afin de rendre plus effective cette collaboration entre les établissements, pour que celle-ci prenne vraiment corps, dans le but de favoriser la scolarisation des enfants handicapés.
Je le répète, cet amendement est le fruit du travail de réflexion que nous avions confié à nos deux collègues de la commission des affaires sociales.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je n'appartiens pas à la commission des affaires sociales, mais j'ai été extrêmement sensible aux amendements qu’a déposés notre collègue Claire-Lise Campion, fruit du travail qu’elle a mené conjointement avec Isabelle Debré sur le suivi de l'application de la loi de 2005.
Je crois pouvoir le dire, l'ensemble des membres du groupe UDI-UC sont extrêmement attachés à cette loi et accordent une grande importance à l’intégration de tous les enfants en situation de handicap, tant au temps scolaire qu’au temps périscolaire. Quand on sait avec quelle difficulté les familles concernées doivent gérer ces situations humaines, quand on sait à quel point notre société a encore du mal à accepter les handicapés, moteurs ou cérébraux – il faut le reconnaître –, alors nos textes législatifs ne seront jamais trop bavards pour garantir que toutes les mesures seront bien prises en compte pour s’assurer que la loi de 2005 sera réellement appliquée, loi récente, certes, mais également suffisamment ancienne pour qu'on ait pu mesurer à quel point il pouvait être difficile de la faire respecter.
Je me réjouis également que chacun des groupes politiques du Sénat ait déposé des amendements de suppression de l’article 4 ter, qui tendait à exclure les parents du processus de décision visant au retrait d'un enfant handicapé de l'école, article introduit par l’Assemblée nationale à la suite de l’adoption d’un amendement déposé par quelques députés socialistes, alors qu’il était précisé par ailleurs que tout enfant a droit à une formation scolaire… Les associations étaient extrêmement inquiètes de cette régression, et le Sénat peut s’honorer de sa position.
Monsieur le ministre, je vous l’ai dit en commission, notre groupe est prêt à soutenir toute mesure permettant d’améliorer les conditions d’accueil des enfants handicapés. Je pense aux AVS, dont il convient d’assurer la formation et de pérenniser les emplois. Voilà pourquoi, lors de la discussion générale d’hier, j’ai été très attentive à la question du statut du personnel éducatif, que j'aurais aimé voir figurer au cœur de ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Mesdames les sénatrices, vous avez été très convaincantes : le Gouvernement accepte de conférer une valeur législative à cette disposition d’ordre réglementaire.
Puisqu’il a été question des AVS, je tiens à faire une remarque très claire. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, après avoir supprimé des postes d'auxiliaire de vie scolaire pendant des années, alors que nous en créons de nouveaux, je vous invite à aller au bout de cette démarche et à ne pas tenir dans le même temps le discours selon lequel nous dépenserions trop pour l'éducation nationale. Si vous voulez êtes cohérents avec vos intentions généreuses, vous verrez que cela a un certain coût. C’est la raison pour laquelle vous avez massivement détruit des postes d'auxiliaire de vie scolaire et précarisé ces personnels.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4 ter.
5
Mise au point au sujet d'un vote
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Monsieur le président, cette mise au point concerne la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.
Ne pouvant être présent en séance publique, j’avais annoncé par écrit mon intention de m’abstenir sur les articles 1er, 1er bis A, 2, 3 et 4 du texte issu des travaux de la commission des lois du Sénat. Or, dans l’analyse des scrutins publics auxquels a donné lieu la mise aux voix de ces articles – respectivement les scrutins nos 148, 151, 153, 155 et 159 –, il est indiqué que j’ai voté pour. Je tiens donc à ce qu’une rectification soit apportée, d’autant que le Journal officiel relève explicitement mon abstention sur l’ensemble du texte.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
6
Décès d'un ancien sénateur
M. le président. Mes chers collègues, j’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Pierre Bastié, qui fut sénateur de l’Aude de 1981 à 1986.
7
Candidature à un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger, comme membre suppléant, au sein du conseil d’administration de l’Agence nationale de l’habitat.
La candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.
8
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Raffarin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
9
Conférence des présidents
M. le président. La conférence des présidents, qui s’est réunie ce soir, mercredi 22 mai 2013, a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
SEMAINES RÉSERVÉES PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT (suite)
Jeudi 23 mai 2013
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Suite du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (texte de la commission, n° 569, 2012-2013)
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures.)
À 16 heures 15 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin
Vendredi 24 mai 2013
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République
Samedi 25 mai 2013
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République
Lundi 27 mai 2013
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 15 heures :
1°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France (texte de la commission, n° 597, 2012-2013)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de dix minutes à la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ;
- fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 24 mai, dix-sept heures ;
- fixé au vendredi 24 mai, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le lundi 27 mai, à 14 heures.)
Le soir :
2°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable (texte de la commission, n° 600, 2012-2013)
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 24 mai, dix-sept heures ;
- au vendredi 24 mai, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission du développement durable se réunira pour examiner les amendements le lundi 27 mai après-midi.)
Mardi 28 mai 2013
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 et le soir :
1°) Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, en application de l’article 50-1 de la Constitution, sur le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale
(La conférence des présidents a :
- fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, après la déclaration du Gouvernement, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 27 mai, dix-sept heures ;
- attribué un temps d’intervention de trente minutes à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.)
2°) Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement (n° 559, 2012-2013)
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 27 mai, dix-sept heures ;
- au lundi 27 mai, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des affaires sociales se réunira pour examiner les amendements le mardi 2 mai, à quatorze heures.)
Mercredi 29 mai 2013
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 et le soir :
1°) Projet de loi autorisant la ratification de la convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du terrorisme (texte de la commission, n° 565, 2012-2013)
2°) Projet de loi autorisant la ratification de l’accord-cadre global de partenariat et de coopération entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et la République d’Indonésie, d’autre part (texte de la commission, n° 563, 2012-2013)
3°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand Duché de Luxembourg pour le développement de la coopération et de l’entraide administrative en matière de sécurité sociale (texte de la commission, n° 561, 2012-2013)
4°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’entente entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec relative à l’Office franco-québécois pour la jeunesse (texte de la commission, n° 576, 2012-2013)
5°) Projet de loi autorisant la ratification du traité d’extradition entre la République française et la République populaire de Chine (texte de la commission, n° 588, 2012-2013)
6°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’arrangement concernant les services postaux de paiement (texte de la commission, n° 590, 2012-2013)
(Pour ces six projets de loi, la conférence des présidents a décidé de recourir à la procédure simplifiée. Selon cette procédure, les projets de loi sont directement mis aux voix par le président de séance. Toutefois, un groupe politique peut demander, au plus tard le lundi 27 mai, à dix-sept heures, qu’un projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle.)
7°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, habilitant le Gouvernement à légiférer pour accélérer les projets de construction (n° 604, 2012-2013)
(La commission des affaires économiques se réunira pour le rapport le jeudi 23 mai, à neuf heures trente.
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 28 mai, dix-sept heures ;
- au mardi 28 mai, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des affaires économiques se réunira pour examiner les amendements le mercredi 29 mai matin.)
Jeudi 30 mai 2013
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (texte de la commission, n° 581, 2012 2013)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de dix minutes à la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation ;
- fixé à trois heures trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 29 mai, dix-sept heures ;
- fixé au vendredi 24 mai, à dix-huit heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mercredi 29 mai matin.)
De 15 heures à 15 heures 45 :
2°) Questions cribles thématiques sur le budget européen
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures.)
À 16 heures et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin
Vendredi 31 mai 2013
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles
SEMAINE SÉNATORIALE
Lundi 3 juin 2013
Ordre du jour fixé par le Sénat :
À 16 heures et le soir :
- Suite du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (demande de la commission des lois)
Mardi 4 juin 2013
À 9 heures 30 :
1°) Questions orales
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 57 de M. Michel Houel à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Exploitation des gaz et huiles de schiste)
- n° 105 de M. Philippe Bas transmise à Mme la ministre chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion
(Pouvoir de subrogation des départements pour indemniser des personnes en situation de handicap)
- n° 353 de M. Roger Madec à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
(Expérimentation d'une salle de consommation à moindres risques à Paris)
- n° 359 de M. Claude Haut à Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative
(Statut de bénévole associatif)
- n° 374 de M. Jean Bizet à Mme la ministre de la culture et de la communication
(Réception de la télévision numérique terrestre dans le département de la Manche)
- n° 393 de M. Michel Savin à M. le ministre de l’éducation nationale
(Calendrier scolaire et son impact sur l'activité touristique en France)
- n° 396 de M. Jean-Paul Amoudry à M. le ministre de l’économie et des finances
(Dispositions fiscales en faveur de la construction de logements sociaux)
- n° 397 de M. Antoine Lefèvre à M. le ministre de l’intérieur
(Difficultés d'obtention de passeport pour les français nés à l'étranger)
- n° 403 de M. Rémy Pointereau à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice
(Carte judiciaire)
- n° 416 de M. Pierre-Yves Collombat à M. le Premier ministre
(Retraite, au titre des travaux insalubres, des ouvriers d'État du ministère de la défense)
- n° 420 de M. Robert Navarro transmise à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Classement des aires de lavage collectives des pulvérisateurs agricoles)
- n° 421 de Mme Catherine Procaccia à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
(Certificats de décès établis à domicile lors de la permanence des soins)
- n° 424 de M. Jean-Claude Leroy à M. le ministre chargé des transports, de la mer et de la pêche
(Finalisation de l'aménagement de la route nationale 42, dans le Pas-de-Calais)
- n° 431 de M. Philippe Kaltenbach à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
(Avenir de l'hôpital Beaujon de Clichy-la-Garenne)
- n° 433 de M. Stéphane Mazars à M. le ministre de l’intérieur
(Moyens financiers attribués aux groupes d'opposition dans les conseils généraux)
- n° 434 de Mme Patricia Schillinger à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Déstockage des déchets du site de Stocamine)
- n° 435 de M. Robert Tropeano à M. le ministre de l’intérieur
(Carte des sous-préfectures)
- n° 439 de M. Richard Yung à Mme la ministre chargée des Français de l’étranger
(Évolution du réseau consulaire à Madagascar)
- n° 440 de M. Jean Louis Masson à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice
(Affaires judiciaires concernant des responsables politiques)
- n° 442 de Mme Françoise Férat à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt
(Inquiétudes de la filière viticole de Champagne quant au programme de réduction de la pollution des eaux par les nitrates d'origine agricole)
À 14 heures 30 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
2°) Suite du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (demande de la commission des lois)
Mercredi 5 juin 2013
Ordre du jour fixé par le Sénat :
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (demande de la commission des lois)
Jeudi 6 juin 2013
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
1°) Suite du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (demande de la commission des lois)
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures.)
À 16 heures 15 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin
Vendredi 7 juin 2013
Ordre du jour fixé par le Sénat :
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (demande de la commission des lois)
SEMAINE SÉNATORIALE DE CONTRÔLE
Mardi 11 juin 2013
Ordre du jour fixé par le Sénat :
À 14 heures 30 :
1°) Débat sur les déserts médicaux (demande de la commission du développement durable)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de trente minutes à la commission du développement durable ;
- fixé à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 10 juin, dix-sept heures.)
À 17 heures :
2°) Débat sur le bilan d’application de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dite « loi LRU » (demande de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de trente minutes à la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois ;
- fixé à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 10 juin, dix-sept heures.)
À 21 heures 30 :
3°) Débat sur les conclusions de la commission d’enquête sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé (demandes de la commission d’enquête et du groupe RDSE)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de trente minutes à la commission d’enquête ;
- fixé à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 10 juin, dix-sept heures.)
Mercredi 12 juin 2013
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe UMP :
1°) Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, de simplification du fonctionnement des collectivités territoriales (n° 387, 2012-2013)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 5 juin matin (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 3 juin, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 11 juin, dix-sept heures ;
- au lundi 10 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mercredi 12 juin matin.)
2°) Deuxième lecture du projet de loi organique, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, portant application de l’article 11 de la Constitution (n° 551, 2012-2013) et du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, portant application de l’article 11 de la Constitution (n° 552, 2012-2013)
(La conférence des présidents a décidé que ces deux textes feraient l’objet d’une discussion générale commune.
La commission des lois se réunira pour le rapport et les deux textes le mercredi 5 juin matin (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 3 juin, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale commune, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 11 juin, dix-sept heures ;
- au lundi 10 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mercredi 12 juin matin.)
À 18 heures 30 et, éventuellement, le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
3°) Débat sur la pollution en Méditerranée : état et perspectives à l’horizon 2030 (demandes de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques et du groupe socialiste)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de quinze minutes à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques ainsi qu’au groupe socialiste ;
- fixé à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 11 juin, dix-sept heures.)
Jeudi 13 juin 2013
De 9 heures à 13 heures :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste :
1°) Projet de loi relatif à l’élection des sénateurs (n° 377, 2012-2013)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de dix minutes à la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ;
- fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 12 juin, dix-sept heures ;
- fixé au jeudi 6 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mercredi 12 juin matin.)
2°) Proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales, présentée par M. Jean-Pierre Sueur (n° 554, 2012-2013)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 5 juin matin (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 3 juin, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 12 juin, dix-sept heures ;
- au lundi 10 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mercredi 12 juin matin.)
De 15 heures à 15 heures 45 :
3°) Questions cribles thématiques sur l’avenir des retraites
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures.)
De 16 heures à 20 heures :
Ordre du jour réservé au groupe UDI-UC :
4°) Suite de la proposition de loi autorisant l’expérimentation des maisons de naissance (texte de la commission, n° 369, 2012-2013)
5°) Proposition de loi visant à instituer une évaluation médicale à la conduite pour les conducteurs de 70 ans et plus, présentée par M. Yves Détraigne et plusieurs de ses collègues (n° 605, 2011-2012)
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mercredi 5 juin matin (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 3 juin, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 12 juin, dix-sept heures ;
- au lundi 10 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements le mercredi 12 juin matin.)
SEMAINES RÉSERVÉES PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Mardi 18 juin 2013
À 9 heures 30 :
1°) Questions orales
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 50 de M. Roland Courteau à M. le ministre de l’intérieur
(Malaise chez les policiers)
- n° 95 de M. Hilarion Vendegou à M. le ministre de l’économie et des finances
(Défiscalisation en Nouvelle-Calédonie)
- n° 168 de M. Michel Teston à M. le ministre de l’éducation nationale
(Situation des élèves en situation de handicap)
- n° 229 de M. Yves Détraigne à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
(Développement des réseaux de soins et accès à la santé pour tous)
- n° 270 de M. André Vallini à M. le ministre de l’économie et des finances
(Pôles de compétitivité)
- n° 398 de M. Michel Boutant à Mme la ministre chargée de la famille
(Statut des aidants familiaux)
- n° 399 de M. Yves Krattinger à M. le ministre de l’économie et des finances
(Situation du secteur de la construction métallique)
- n° 401 de M. Dominique Bailly à Mme la ministre chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique
(Développement de la finance participative)
- n° 405 de M. Daniel Laurent à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Publication des décrets sur l'intégration des ouvriers des parcs et ateliers)
- n° 406 de M. Vincent Eblé à Mme la ministre de la culture et de la communication
(Situation des patrimoines en période de guerre. Cas de Tombouctou.)
- n° 410 de M. Robert Hue à M. le ministre de la défense
(Objectif de « civilianisation » des postes de soutien au sein du ministère de la défense)
- n° 419 de M. Jean-Luc Fichet transmise à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Innovation, éco-matériaux et filière ouate de cellulose)
- n° 423 de Mme Muguette Dini à Mme la ministre chargée de la famille
(Maisons d'assistantes maternelles et application des normes d'accessibilité aux personnes handicapées)
- n° 426 de M. André Reichardt à M. le ministre de l’économie et des finances
(Extension du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi aux entreprises individuelles sans salarié)
- n° 432 de M. Dominique Watrin à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie
(Exploitation du gaz de mines dans la région Nord-Pas-de-Calais)
- n° 436 de M. René Beaumont à M. le ministre chargé des transports, de la mer et de la pêche
(Mise à deux fois deux voies de la route Centre-Europe Atlantique)
- n° 445 de M. Michel Le Scouarnec à M. le ministre de l’intérieur
(Accueil des gens du voyage et scolarisation des enfants)
- n° 450 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
(Menace de fermeture de l'hôpital Beaujon)
- n° 452 de M. Roland Ries à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
(Fermeture des établissements thermaux de Niederbronn-les-Bains et Morsbronn-les Bains)
- n° 454 de M. Philippe Leroy à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé
(Médicament dit générique)
À 14 heures 30 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
2°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche (Procédure accélérée) (A.N., n° 835)
(La commission de la culture se réunira pour le rapport le mercredi 12 juin matin et après-midi (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : jeudi 6 juin, à douze heures).
La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de dix minutes à la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ;
- fixé à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 17 juin, dix-sept heures ;
- fixé au lundi 17 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission de la culture se réunira pour examiner les amendements le mardi 18 juin matin.)
Mercredi 19 juin 2013
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche
À 21 heures 30 :
2°) Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 27 et 28 juin 2013
(La conférence des présidents a décidé d’attribuer, à la suite de l’intervention liminaire du Gouvernement de dix minutes, un temps d’intervention de huit minutes à la commission des affaires européennes, à la commission des affaires économiques, à la commission des finances, ainsi qu’à chaque groupe (cinq minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe) ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mardi 18 juin, dix-sept heures.
À la suite de la réponse du Gouvernement, les sénateurs pourront, pendant une heure, prendre la parole (deux minutes maximum) dans le cadre d’un débat spontané et interactif comprenant la possibilité d’une réponse du Gouvernement ou de la commission des affaires européennes.)
Jeudi 20 juin 2013
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Suite du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures.)
À 16 heures 15 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin
Éventuellement, vendredi 21 juin 2013
(Jour supplémentaire de séance)
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche.
J’informe le Sénat que le jeudi 20 juin, nous aurons atteint le plafond constitutionnel indicatif de 120 jours, tel qu’il est fixé par le deuxième alinéa de l’article 28 de la Constitution.
En application du troisième alinéa de cet article, M. le Premier ministre, après consultation du M. le président du Sénat a décidé la tenue de jours supplémentaires de séance à compter du vendredi 21 juin jusqu’au terme de la session ordinaire.
Mardi 25 juin 2013
(Jour supplémentaire de séance)
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 :
1°) Projet de loi portant application du protocole additionnel à l’accord entre la France, la Communauté européenne de l’énergie atomique et l’Agence internationale de l’énergie atomique relatif à l’application de garanties en France, signé à Vienne le 22 septembre 1998 (n° 328, 2006-2007)
(La commission des affaires étrangères se réunira pour le rapport le mardi 4 juin après-midi (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 3 juin, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 24 juin, dix-sept heures ;
- au lundi 24 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des affaires étrangères se réunira pour examiner les amendements le mardi 25 juin, à quatorze heures.)
2°) Projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie (n° 493, 2011-2012)
3°) Projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie (n° 494, 2011-2012)
4°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation du protocole d’amendement de la Convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative à l’extension en territoire français du domaine de l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire conclue le 13 septembre 1965 (n° 505, 2012-2013)
5°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française, le Conseil fédéral suisse et l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire sur le droit applicable aux entreprises intervenant sur le domaine de l’Organisation afin d’y réaliser des prestations de services revêtant un caractère transnational (n° 506, 2012-2013)
6°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif à la prise en charge sur le territoire français de déchets radioactifs monégasques (n° 507, 2012-2013)
7°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège sur l’enseignement dispensé en France aux élèves norvégiens et le fonctionnement des sections norvégiennes établies dans les académies de Rouen, Caen et Lyon (n° 508, 2012-2013)
8°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord de sécurité sociale sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale pour l’énergie de fusion en vue de la mise en œuvre conjointe du projet ITER (n° 509, 2012-2013)
(Pour ces sept projets de loi, la conférence des présidents a décidé de recourir à la procédure simplifiée. Selon cette procédure, les projets de loi sont directement mis aux voix par le président de séance. Toutefois, un groupe politique peut demander, au plus tard le vendredi 21 juin, à dix-sept heures, qu’un projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle.)
9°) Projet de loi autorisant l’approbation des amendements des annexes II et III à la convention OSPAR pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est relatifs au stockage des flux de dioxyde de carbone dans des structures géologiques (texte de la commission, n° 471, 2012-2013)
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 24 juin, dix-sept heures.)
10°) Sous réserve de sa transmission, deuxième lecture du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République
(La commission de la culture se réunira pour le rapport le mercredi 19 juin matin (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : jeudi 13 juin, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 24 juin, dix-sept heures ;
- au lundi 24 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission de la culture se réunira pour examiner les amendements le mardi 25 juin matin.)
À 21 heures 30 :
11°) Débat sur le bilan annuel de l’application des lois (demande de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois)
(La conférence des présidents a :
- attribué un temps d’intervention de quinze minutes au président de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois et de huit minutes à chacun des présidents des sept commissions permanentes ;
- fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 24 juin, dix-sept heures.)
Mercredi 26 juin 2013
(Jour supplémentaire de séance)
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite de la deuxième lecture du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République
Jeudi 27 juin 2013
(Jour supplémentaire de séance)
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Sous réserve de sa transmission, deuxième lecture du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires (A.N., n° 838)
(La commission des finances se réunira pour le rapport le mercredi 19 juin, à seize heures quinze (délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 17 juin, à douze heures).
La Conférence des présidents a fixé :
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 26 juin, dix-sept heures ;
- au lundi 24 juin, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des finances se réunira pour examiner les amendements le mercredi 26 juin.)
De 15 heures à 15 heures 45 :
2°) Questions cribles thématiques sur la situation des caisses d’allocations familiales
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures.)
À 16 heures et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin
Par ailleurs, la conférence des présidents a adopté le principe de l’inscription à l’ordre du jour du Sénat de la proposition de résolution européenne sur les normes européennes en matière de détachement des travailleurs, présentée en application de l’article 73 quinquies du règlement, par M. Éric Bocquet (n° 528, 2012-2013). La date d’examen et les modalités d’organisation du débat seront fixées ultérieurement.
Y a-t-il des observations sur les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui résultant des inscriptions prioritaires du Gouvernement ?...
Ces propositions sont adoptées.
10
Nomination à un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que la commission des affaires économiques a proposé une candidature pour le conseil d’administration de l’Agence nationale de l’habitat.
La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Claude Dilain membre suppléant de cet organisme.
11
Refondation de l’école de la République
Suite de la discussion d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 5.
Article 5
L’article L. 113-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Dans les classes enfantines ou les écoles maternelles, les enfants peuvent être accueillis dès l’âge de deux ans révolus dans des conditions éducatives et pédagogiques adaptées à leur âge visant leur développement moteur, sensoriel et cognitif, précisées par le ministre chargé de l’éducation nationale. Cet accueil donne lieu à un dialogue avec les familles. Il est organisé en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les départements, collectivités et territoires ultramarins. » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les écoles qui les scolarisent, les enfants de moins de trois ans sont comptabilisés dans les prévisions d’effectifs d’élèves pour la rentrée. »
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’article 5, le Gouvernement entend donner à la petite enfance une place prédominante dans le dispositif d’éducation et de formation des enfants.
Jusqu’à présent, la préscolarisation ne cessait de baisser dans notre pays, en partie à cause du manque de moyens et de la diminution des effectifs enseignants. Or il convient de ne pas négliger les enfants de deux à trois ans. En effet, de nombreuses études ont démontré que 50 % de l’intelligence d’un enfant se construisait pendant ses premières années de vie. C’est à ce titre que, tout en tenant compte des besoins propres à cet âge, l’article 5 entend valoriser le développement des enfants.
Cette préscolarisation des enfants de moins de trois ans permettra de favoriser sur le long terme le processus d’acquisition du savoir et de détecter au plus tôt les problèmes langagiers, de communication orale ou liés au développement cognitif de l’enfant. La préscolarisation sera aussi le moyen de poursuivre la socialisation de l’enfant avec les autres enfants mais aussi avec des adultes en dehors de sa famille.
Comme le souligne la commission, les enfants de deux à trois ans ont des besoins spécifiques. Ils doivent être sécurisés émotionnellement et stimulés cognitivement afin de préparer leur épanouissement et la suite de leur scolarité dans les meilleures conditions. La construction de l’enfant par rapport au monde qui l’entoure et son intégration dans ce monde se font très tôt. C’est pourquoi il est de notre responsabilité de lui assurer une évolution optimale.
Dans certains milieux, la préscolarisation précoce des enfants leur permettrait d’entrer dans la vie avec les mêmes chances de réussite que les autres. De plus, cette préscolarisation serait adaptée aux besoins de l’enfant et à sa maturité, l’accueil pouvant intervenir à tout moment dans l’année, après un dialogue entre la famille et le personnel enseignant et d’encadrement.
Il ne s’agit pas ici d’élèves mais d’enfants, de leurs constructions personnelles, de leurs apprentissages et de leurs besoins propres, qui se différencient de ceux des enfants plus âgés. Cet article 5 est la preuve de notre engagement et de notre volonté sans faille de lutter contre l’échec scolaire et de donner à tous les enfants, et en priorité à ceux qui sont issus de milieux défavorisés, les moyens de progresser dans la vie.
M. le président. La parole est à M. Pierre Martin, sur l'article.
M. Pierre Martin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 5 mérite une attention toute particulière. En modifiant l’article L. 113-1 du code de l’éducation, vous énoncez que, « dans les classes enfantines ou les écoles maternelles, les enfants peuvent être accueillis dès l’âge de deux ans révolus ». Or c’est déjà le cas aujourd’hui : cette possibilité figure dans la loi.
Vous précisez également que cet accueil sera « organisé en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les départements, collectivités et territoires ultramarins ». Or cette priorité est, elle aussi, déjà inscrite dans la loi.
Je ne comprends donc pas la rédaction de l’article 5. Elle donne l’impression qu’il s’agit de réguler l’accueil des enfants âgés de deux ans révolus, alors que, si l’on suit l’exposé des motifs de votre projet de loi, l’objectif est de « généraliser la possibilité d’accueil en maternelle des enfants de moins de trois ans dans des conditions particulières et adaptées à cette scolarisation précoce ». C’est comme si votre ambition d’acter cette généralisation n’était pas assumée.
Vous semblez vouloir définir le cadre dans lequel les enfants seront accueillis. Cela me paraît assez flou. Il est précisé que l’accueil des enfants se fera « dans des conditions éducatives et pédagogiques adaptées à leur âge visant leur développement moteur, sensoriel et cognitif », mais ces conditions ne sont pas encore définies. On a presque le sentiment que la nouvelle rédaction ne figure dans le projet de loi que par souci d’affichage.
Au-delà de ce problème, nous nous opposons à l’adoption de l’article 5 pour des raisons de fond. Tout d’abord, depuis la création par la loi Jospin de 1989 de zones prioritaires pour un accueil précoce, cet accueil n’a pas progressé. Le taux de scolarisation des enfants de moins de trois ans sur le territoire national, qui fut longtemps de 35 %, n’est plus que de 13,6 % aujourd'hui, avec bien entendu des différences assez importantes entre les régions. En outre, cette scolarisation n’a pas contribué à un rééquilibrage en faveur des zones défavorisées. En effet, sa mise en œuvre n’a pu progresser que dans les départements en perte de vitesse démographique.
Mais, surtout, je crois que les dispositions de l’article 5 sont dangereuses, car elles participent à la diffusion de l’idée selon laquelle la lutte contre la grande difficulté scolaire et les inégalités scolaires passe nécessairement par la scolarisation dès l’âge de deux ans.
Les enquêtes les plus récentes conduites par les services du ministère de l’éducation nationale, dans le cadre du panel d’élèves entrés en CP en 1997, le démontrent.
Certes, les enfants ayant accédé à deux ans à l’école maternelle parviennent en CP avec un niveau de compétences supérieur en moyenne à celui des autres élèves. C’est incontestable, mais cela ne dure pas, car, dès l’entrée en sixième, on ne constate plus de différence.
Je n’en suis pas étonné, cette absence de lien entre l’accueil des enfants de moins de trois ans et les résultats scolaires ayant été soulignée dans un rapport d’information remis en 2008 par Mme Papon et moi-même. Celui-ci montrait que l’école maternelle n’était pas le cadre le plus favorable à l’accueil des très jeunes enfants de deux ans.
M. Roland Courteau. Incroyable !
M. Pierre Martin. Ce lieu devait d’abord être celui du passage de la famille à l’école.
Lors des auditions préparatoires à ce rapport, divers intervenants de la communauté éducative ou spécialistes de la petite enfance nous avaient expliqué que l’enfant était peu capable d’une attention prolongée à cet âge et qu’il souffrait, à l’école, de longues périodes d’attente qui ne lui étaient pas adaptées.
Il est à l’âge de la recherche de contacts, de sociabilisation, de développement des liens affectifs, ce qu’il trouvera davantage dans le cadre d’une crèche, si elle existe. Ainsi, le milieu scolaire ne favorise pas l’acquisition du langage pour les tout-petits, qui ont besoin d’une relation privilégiée avec un adulte pour entrer dans ce champ d’apprentissage.
À cela s’ajoutent les difficultés matérielles d’un tel accueil : coût pour les communes, formation inadaptée des enseignants, locaux peu compatibles et absence de matériel disponible. Il faut savoir qu’un enfant de deux ans n’a pas toujours acquis la propreté. Or ce n’est pas précisément la fonction d’un enseignant de s’en occuper.
D’ailleurs, à l’heure actuelle, les écoles maternelles n’acceptent que les enfants qui sont propres.
M. Roland Courteau. Il y a les ATSEM !
M. Pierre Martin. L’acquisition de la propreté peut alors se transformer en contrainte psychologique.
Pour toutes ces raisons, et parce que l’accueil à deux ans est avant tout une solution pour pallier l’insuffisance du nombre de structures de garde, nous recommandions le développement d’une structure intermédiaire : le jardin d’éveil.
M. Roland Courteau. Pourquoi pas les précepteurs ?
M. Pierre Martin. Je pense que l’encadrement des enfants de deux ans relève en effet des structures d’accueil de la petite enfance, donc de la politique familiale, et non de l’éducation nationale. Cet espace entre éducation familiale et éducation scolaire doit déjà permettre de dépister les handicaps et de compenser les inégalités.
Notre rapport concluait : « L’enfant de deux ans, c’est en quelque sorte un individualiste auquel il faut laisser le temps d’évoluer, de mûrir pour être en capacité, un peu plus tard, de devenir élève ».
Je pense qu’il n’était pas inutile de le rappeler, alors que nous risquons de faire un pas, ce soir, en tout cas dans les esprits, vers la scolarisation à deux ans.
M. le président. La parole est à M. Georges Patient, sur l’article.
M. Georges Patient. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la Guyane est-elle vouée à demeurer l’académie des « plus mauvais résultats de France sur tous les plans », pour reprendre les propos tenus par le recteur Frédéric Wacheux, en 2009, lors de son audition par une mission sénatoriale, ou bien encore celle « des pires élèves, donc des pires profs », comme on ne cesse de le répéter dans le film Les Profs, qui passe actuellement dans les plus grandes salles de cinéma ?
Plus grave encore, cette phrase terrible d’un enseignant en poste : « On est une machine à fabriquer de l’échec et de l’exclusion. »
Échec scolaire et échec social sont liés. Exclus d’un système éducatif inadapté, des milliers de Guyanais, enfants français ou étrangers vivant en Guyane, se sont retrouvés au fil des années au ban d’une société qui n’a pas su comprendre et encore moins prendre en charge de façon efficace les besoins d’instruction et d’éducation.
Un chiffre saisissant illustre bien cela : plus de 6 000 enfants de trois à six ans ne sont pas scolarisés en Guyane. Pourtant, nos sociétés démocratiques ont depuis longtemps intégré dans leur discours et leurs pratiques socio-éducatives la notion d’égalité des chances.
Qu’est-ce qui rend si difficile l’atteinte de ces objectifs en Guyane ?
Je n’ai pas de réponse simple à cette question, bien sûr ; ce serait trop facile !
Pour qui veut parler d’école et de système d’éducation, la Guyane n’est comparable, dans le contexte français, à rien : la croissance démographique scolaire y est importante, de l’ordre de 3 %, voire de 8 % par an pour certains établissements, comme ceux situés dans l’Ouest guyanais. Elle serait la contrainte majeure de l’académie.
S’y pose aussi le problème du multilinguisme et du multiculturalisme : beaucoup d’enfants arrivent à l’école monolingue en parlant une langue amérindienne ou bushinenge, le hmong, mais aussi le créole haïtien ou même le brésilien.
On y recense également des disparités territoriales fortes, puisque coexistent une Guyane du littoral, avec un pôle centre littoral, assez bien développée, et le reste moins bien pourvu.
Le taux de non-scolarisation y est trois fois supérieur à celui de la France métropolitaine, avec une accentuation à partir du niveau collège, contrairement à la situation qui prévaut en métropole.
Monsieur le ministre, pourquoi n’essaierions-nous pas de voir ces difficultés, que l’on appelle plus souvent chez nous des spécificités, comme des richesses, des défis à relever, des atouts à valoriser ?
Vos orientations dans le rapport annexé au projet de loi évoquent l’innovation et l’expérimentation pour contribuer à refonder l’éducation. Si l’on veut effectivement créer pour tous les conditions de la réussite scolaire en Guyane, il faut engager dans l’aventure des forces considérables, et ce sur plusieurs fronts, simultanément et sans retard.
Il faudra participer davantage, à côté des collectivités, au financement d’investissements trop lourds pour elles seules.
La qualité d’un système éducatif tenant d’abord à celle de ses enseignants, il est nécessaire de reconsidérer la formation des enseignants amenés à exercer en Guyane, de leur faire acquérir des compétences linguistiques solides, de les spécialiser, d’une certaine manière, pour enseigner dans le contexte particulier du multilinguisme et du multiculturalisme guyanais.
Il importe de poursuivre et de développer le recrutement et la formation des médiateurs culturels bilingues et, c’est impératif, de pérenniser ces emplois. Parallèlement, nous devrons créer, multiplier et diffuser les supports et les outils d’une pédagogie renouvelée.
Nous aurons à bousculer certaines certitudes, tout en nous accordant sur des objectifs concrets et en faisant ensuite preuve de pragmatisme contre le dogmatisme des grosses machines construites sur des théories trop abstraites.
Monsieur le ministre, il nous faut du volontarisme, de l’audace, de l’ambition pour permettre la réussite des élèves de Guyane, ce qui est un devoir de la République ! Je ne doute point de votre volonté de vous atteler à ce beau défi ! (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l’article.
M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, nous sommes particulièrement attachés à la scolarisation des enfants de moins de trois ans, dont traite cet article.
Force est de constater que tout le monde ne partage pas cet avis.
Dès avril 2011, nous avons déposé une proposition de loi visant à garantir un véritable droit à la scolarisation des enfants dans les écoles maternelles dès l’âge de deux ans pour les familles en exprimant la demande.
La scolarisation des enfants de deux à trois ans a été étudiée à de nombreuses reprises et son incidence positive sur la réussite scolaire a été établie, a fortiori pour les enfants issus des milieux défavorisés. En effet, elle a des impacts positifs avérés en termes d’acquisition du langage, de compréhension orale, de familiarité avec l’écrit, de concept d’espace et de temps.
Les avantages de la scolarisation dès deux ans sont surtout significatifs dans les milieux populaires. Cette scolarisation est donc particulièrement efficace en matière de réduction des inégalités sociales et elle doit, à cet égard, être développée.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Michel Le Scouarnec. Le gouvernement précédent s’était appuyé sur l’article L. 131-1 du code de l’éducation pour se prévaloir du caractère facultatif de la scolarisation des moins de trois ans et la réduire très largement.
L’inspecteur d’académie, selon la volonté du ministère, ne prenait pas en compte les enfants de moins de trois ans dans le calcul des effectifs des enseignants des écoles maternelles, ce qui permettait également d’arguer d’un recul effectif de leur scolarisation. L’objectif était évidemment économique, puisqu’il s’agissait de justifier la diminution des effectifs enseignants, et ce même en zone prioritaire, rendant de facto impossible la scolarisation des deux-trois ans, conditionnée par la limite des places disponibles.
Une rupture avec les politiques dévastatrices précédentes était donc particulièrement nécessaire et attendue.
L’annonce de la création des 3 000 postes supplémentaires pour l’accueil des enfants de moins de trois ans à l’école maternelle est un signal que nous accueillons de manière positive, de même que la volonté de développement de la scolarisation des moins de trois ans contenue dans cet article.
Enfin, l’introduction dans le code de l’éducation de la notion de « conditions d’accueil éducatives et pédagogiques spécifiques visant le développement moteur sensoriel et cognitif » est une avancée que nous avons demandée et dont nous nous félicitons.
Pour autant, au-delà de la volonté affichée, force est de constater que l’article 5 du projet de loi n’opère pas de modifications suffisantes sur la scolarisation des deux-trois ans, laquelle est limitée, comme vous l’avez indiqué, aux zones défavorisées.
Pour notre part, nous souhaitons, ainsi que nous l’avions développé dans notre proposition de loi, que soit affirmée la possibilité de scolarisation à partir de deux ans pour tous les enfants qui sont prêts et dont les familles en font la demande.
Il faut permettre à tous les parents qui le souhaitent d’inscrire leur enfant, quels que soient leur lieu d’habitation et leur milieu social. Ainsi serait encouragée la mixité sociale dès la petite école, ce que cette loi n’autorisera pas : en effet, les 3 000 postes supplémentaires correspondent à la création d’une classe par école classée en zone d’éducation prioritaire ou de revitalisation rurale. La priorité donnée aux zones défavorisées est très positive, mais il faudrait aller au-delà.
Enfin, je regrette que le Gouvernement ne profite pas d’une loi de refondation de l’école pour rendre l’instruction obligatoire dès trois ans, au lieu de six ans actuellement. C’est également une disposition de notre proposition de loi.
Je rappelle que le constat partagé du rôle fondamental de l’école maternelle avait conduit notre collègue Françoise Cartron, aujourd’hui rapporteur du projet de loi, à déposer une proposition de loi en ce sens, et que cette dernière avait reçu le soutien de l’ensemble de la majorité de gauche du Sénat.
Nous souhaitons protéger l’école maternelle et affirmer son importance, en traduisant dans la loi ce qui est aujourd’hui une réalité : la quasi-totalité, à savoir plus de 99 % des enfants de trois à six ans, sont effectivement scolarisés en maternelle.
Cela permet donc de reconnaître à sa juste valeur les apports fondamentaux de la maternelle au sein de notre système scolaire sans grever les finances de l’État.
Cette institution joue un rôle décisif dans la diminution de l’échec scolaire et dans la lutte contre les inégalités, particulièrement pour les enfants issus d’un milieu social défavorisé. Elle a un impact positif sur le niveau de compétence comme sur la probabilité de redoublement. Son utilité n’est plus à démontrer et, si une réflexion doit être engagée, elle doit davantage porter sur les moyens à mettre en œuvre pour faire perdurer ses effets positifs tout au long de la scolarité.
Au passage, je signale que la Bretagne scolarisait les petits à 50 % et que les résultats de cette région au baccalauréat sont parmi les meilleurs de France. (Sourires sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Une telle avancée constituerait un acte fort donnant tout son sens à la refondation de l’école.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l’article.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je voudrais juste souligner deux ou trois points, dans le prolongement de ce que j’ai dit au nom du groupe UDI-UC lors de la discussion générale.
Certes, nous sommes favorables à la scolarisation des enfants de moins de trois ans, en tout cas à la mise en œuvre d’un accueil prioritaire de ceux d’entre eux qui vivent dans des conditions et des contextes particuliers, notamment dans les secteurs d’éducation prioritaire et les secteurs ruraux isolés. En matière d’apprentissage, il faut pouvoir donner aux enfants qui vivent dans les conditions les moins favorables à l’apprentissage de leur langue maternelle une forme de compensation en les prenant très vite en charge.
En même temps, je ne peux que m’interroger sur une scolarité systématique telle que nous l’a décrite Michel Le Scouarnec.
M. Pierre Martin. Bien sûr !
Mme Catherine Morin-Desailly. Il me semble paradoxal, au moment où l’on réfléchit aux rythmes scolaires et à l’aménagement du temps de l’enfant, de vouloir à tout prix scolariser les tout-petits, alors qu’il y a peut-être des formules plus satisfaisantes, leur convenant mieux.
À cet égard, il revient aux acteurs des politiques locales de réfléchir aux systèmes de crèches, de garderies, en tout cas à des lieux plus adaptés à ce temps particulier qu’est la très petite enfance.
M. Michel Savin. Très bien !
Mme Catherine Morin-Desailly. Cela nous renvoie à une réflexion plus large, notamment sur les rythmes scolaires.
J’y vois un autre paradoxe : on veut scolariser les moins de trois ans qui vivent dans des contextes familiaux et sociaux difficiles, en tout cas peu favorables, alors qu’on est en train de supprimer les internats d’excellence, lesquels visent aussi, à un autre âge, dans une autre tranche de vie, à donner à des enfants un cadre plus propice à la poursuite de leur apprentissage et de leur formation.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 190, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L'accueil des enfants de deux ans révolus est organisé en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne, et dans les collectivités et territoires ultramarins. Cet accueil donne lieu à un dialogue avec les familles. » ;
La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Cet amendement tend simplement à réécrire et à rendre plus clair le texte proposé pour le dernier alinéa de l’article L. 113-1 du code de l’éducation, en le rapprochant de sa rédaction initiale.
M. le président. L’amendement n° 22 rectifié, présenté par M. Savin, Mme Primas, MM. Bordier, Carle et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot et MM. Nachbar, Soilihi et Vendegou, est ainsi libellé :
Alinéa 3, dernière phrase
Supprimer les mots :
en priorité
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Cet amendement vise à supprimer les mots « en priorité », pour trois raisons.
Il s’agit d’abord d’éviter toute dérive de la part des familles en recherche de structure de garde de jeunes enfants. Notre collègue vient de le préciser, il existe aujourd’hui d’autres structures d’accueil de la petite enfance qu’il faudrait peut-être développer.
Ensuite, il conviendrait de limiter l’accueil des enfants de moins de trois ans aux zones d’éducation prioritaire, où il faut faire un effort, car il peut effectivement s’avérer bénéfique.
Enfin, il faut à tout prix limiter l’accueil des enfants de deux ans à ces zones prioritaires, parce que les 3 000 postes que M. le ministre souhaite créer en cinq ans – soit une moyenne de 600 postes par an – ne permettront pas de répondre à la demande si l’on ouvre la maternelle à tous les enfants de deux ans. Nous risquons de susciter l’incompréhension des parents qui voudraient inscrire leur enfant de deux ans, si les communes ou les directrices d’école se trouvent dans l’obligation de refuser des inscriptions. Afin d’éviter l’incompréhension, la frustration, voire la colère, il faut donc une limite à cette possibilité.
M. Pierre Martin. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 377, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 3, dernière phrase
Remplacer les mots :
dans les départements, collectivités et territoires ultramarins
par les mots :
dans les régions d’outre-mer
La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Cet amendement vise à modifier la rédaction de l’article 5 du projet de loi adopté par l’Assemblée nationale, afin de revenir à la rédaction prévue par le projet de loi initial.
En effet, les termes « départements, collectivités et territoires ultramarins » ne correspondent à aucune catégorie juridique existante et ne peuvent donc être retenus dans une loi. Surtout, l’ensemble des collectivités d’outre-mer ne peut se voir appliquer cet alinéa de la même manière, ne serait-ce que parce que certaines d’entre elles sont pleinement compétentes en matière d’enseignement.
Certains d’entre vous ont évoqué la belle notion de paradoxe. Rousseau disait : « J’aime mieux être un homme à paradoxes qu’un homme à préjugés. » J’ai l’impression, dans le cas présent, que beaucoup de paradoxes résultent d’une accumulation de préjugés ! Je souhaite donc rétablir une forme de cohérence, afin que nous comprenions bien de quoi nous parlons.
Si j’ai bien compris, au sein du groupe UMP, certains sont favorables à l’accueil précoce des enfants de moins de trois ans, mais ils soulignent que celui-ci doit être assuré en priorité dans un certain nombre de zones, voire uniquement dans certaines zones en difficulté.
D’autres contestent l’utilité de cet accueil, comme M. Pierre Martin, et vont jusqu’à nous faire croire que les écoles devraient accueillir des enfants qui ne seraient pas propres. Ce type de réflexion a coûté très cher à un excellent ministre de l’éducation nationale issu de votre majorité – je crois d’ailleurs que ces propos ont été tenus lors d’une audition au Sénat…
Sur ce point, je rappelle donc que, si nous décidons d’accueillir des enfants de moins de trois ans, en particulier dans les zones d’éducation prioritaire, nous y consacrerons 3 000 postes. Nous prévoyons une formation spécifique et nous offrons des conditions d’accueil adaptées, grâce à l’implication des collectivités locales et à la coopération avec le ministère de la famille – nous n’avons pas évoqué les classes passerelles, ni les expériences tout à fait passionnantes réalisées outre-mer.
Enfin, l’amendement défendu par M. Legendre tend à supprimer les conditions pédagogiques spécifiques pour l’accueil des enfants de moins de trois ans.
Voilà donc trois positions totalement contradictoires issues du même groupe politique !
M. Michel Savin. C’est ça, le pluralisme !
M. Vincent Peillon, ministre. Vous comprendrez que j’aie du mal à comprendre votre position !
Le choix que nous avons retenu me paraît raisonnable. Il tient compte de nombre de vos exigences, puisque nous ciblons les zones qui en ont le plus besoin, même si nous ne les ciblons pas exclusivement ; nous fixons des conditions spécifiques, comme le réclament certains d’entre vous ; nous ne rendons pas la scolarité obligatoire à partir de deux ans et nous ne disposons que de 3 000 postes, malgré les reproches qui nous sont adressés.
Nous donnons ainsi un signal important, en particulier si nous sommes nombreux à penser qu’il est prioritaire de résoudre les difficultés scolaires dès les premières années de la vie, là où elles prennent corps. En même temps, un des signes qui ont alerté la Nation sur les difficultés du système scolaire est bien l’accroissement – et pas seulement la reproduction – des inégalités qui touchent les milieux les plus défavorisés. Nous sommes certains que cet accueil sera utile s’il est bien fait – et nous nous donnons les moyens de bien le faire.
Je souhaite donc que vous puissiez adopter, entre vous, une position commune et soutenir cette orientation intéressante. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je ne vais pas paraphraser ce que M. le ministre a si bien exprimé, mais je souhaite rappeler quelques éléments.
M. Legendre nous dit qu’il n’est pas utile d’inscrire ces précisions dans la loi, puisque tout figure déjà dans le code de l’éducation ; mais le code est si bien respecté que la scolarisation des enfants de moins de trois ans a diminué de façon spectaculaire ces dernières années ! Tout cela parce que l’on a prétendu qu’il n’était pas possible d’accueillir au sein des écoles maternelles les enfants âgés de deux à trois ans comme les autres enfants.
Les dispositions qui vous sont proposées sont donc très importantes, mes chers collègues. Nous fixons une priorité pour un certain nombre de zones défavorisées, où les parents, qui rencontrent souvent des difficultés financières et sont parfois sans emploi, n’ont pas accès aux crèches ni aux structures d’accueil payantes. L’école publique est donc le seul lieu qui puisse accueillir ces enfants pour leur apporter ce surcroît de culture, ce bain de langage, et leur permettre de partir du même pied que les autres enfants.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Oui, il faut développer la scolarisation des enfants de deux à trois ans dans les zones prioritaires ! Nous passerons plus tard à la deuxième étape. Agissons en gardant à l’esprit l’exigence d’une école maternelle de qualité, selon les règles établies dans le texte qui vous est proposé.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 190 et 22 rectifié. En revanche, la commission est favorable à l’amendement n° 377 du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 190 et 22 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote sur l’amendement n° 190.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, vous avez pris un risque en mettant en évidence des différences d’appréciation entre les sénateurs du groupe UMP. Ce débat va être assez long et nous aurons l’occasion de vous interroger, à notre tour, sur la cohérence des positions de la majorité sénatoriale sur un certain nombre de points essentiels de ce projet de loi.
Mes chers collègues, nous discutions d’un sujet qui a déjà fait l’objet d’une décision du ministre, puisqu’il a adressé à ses services, dès décembre 2012, une circulaire mettant en application les dispositions dont nous débattons maintenant. D’habitude, la circulaire suit la loi, aujourd’hui, c’est le contraire !
Sur le fond, l’appréciation que nous pouvons porter dépend beaucoup des régions que nous représentons. Comme l’a relevé Michel Le Scouarnec, dans l’ouest ou dans la région Nord-Pas-de-Calais, la scolarisation précoce est beaucoup plus affirmée que dans d’autres régions, notamment la région parisienne ou Paris même.
L’Union nationale des associations familiales, l’UNAF, dès le mois de janvier 2013, a adopté une position intéressante que l’on retrouve dans l’amendement de Jacques Legendre. Cet amendement, tout à fait concis et modéré, développe l’idée simple que la scolarisation des enfants de moins de trois ans doit s’adresser en priorité aux enfants des familles défavorisées, notamment dans les zones d’éducation prioritaire – on a aussi évoqué les territoires ultramarins.
Il faut également reconnaître que, dans nos régions, un accueil est organisé par les collectivités territoriales. Sur ce point, l’UNAF souligne la nécessité de développer la scolarisation des très jeunes enfants en accord avec les collectivités locales et les parents. Ces derniers doivent être étroitement associés à la démarche qui conduit des enfants de moins de trois ans à l’école, pour des raisons évidentes et auxquelles vous souscrivez tous, j’en suis sûr.
J’ajoute une dernière observation. Qu’en est-il de la scolarisation des enfants dans le monde ? Je dois attirer l’attention du Sénat sur le fait que l’accueil des enfants de moins de trois ans n’est organisé que dans quatre autre pays : la Norvège, le Danemark, l’Islande et la Belgique. Nous sommes donc une exception. Dans la plupart des pays, l’âge de scolarisation est fixé à quatre ans ou à cinq ans.
Je ne dis pas qu’ils ont raison – c’est leur affaire ! –, mais n’avançons pas l’idée que plus tôt les enfants sont scolarisés, mieux ils réussissent…
M. Roland Courteau. Mais si !
M. Jean-Claude Lenoir. Malheureusement, le taux de réussite scolaire n’est pas très probant en France. Les résultats observés tendraient à prouver l’inverse de ce que prétendent ceux qui voudraient scolariser les enfants beaucoup plus tôt !
Il s’agit d’une question lourde. Pour la plupart d’entre nous, nous nous la posons en tant que parents ou qu’élus locaux ; nous allons aussi nous la poser maintenant parce qu’elle figure dans la loi. En conclusion, l’amendement de notre collègue Jacques Legendre, que j’ai cosigné, me semble exprimer une forme de sagesse qui devrait nous réunir.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. La question de savoir quelle est actuellement la manière la plus efficace d’utiliser nos moyens en faveur des jeunes devrait pouvoir nous rassembler.
Monsieur le ministre, vous avez placé beaucoup d’espoirs dans la scolarisation précoce, dans l’ouverture d’écoles maternelles accessibles dès l’âge de deux ans. Certains départements sont traditionnellement attachés à l’idée de démocratiser l’enseignement en y recevant très tôt les jeunes. Ainsi, dans le département du Nord, le taux de scolarisation des enfants de deux ans est encore relativement élevé. Pour autant, les résultats de l’académie de Lille ont-ils fortement progressé ? Avons-nous compensé par ce biais les difficultés sociales spécifiques de notre département ? Très honnêtement, nous n’en sommes pas sûrs.
Faut-il alors renoncer à la scolarisation dès deux ans ? Comme je l’ai dit, dans ce département, le taux de scolarisation est élevé et, après tout, si l’on n’est pas sûr que la scolarité précoce fasse du bien aux jeunes issus des milieux défavorisés, il n’est pas sûr non plus qu’elle leur fasse du mal. Par conséquent, s’ils peuvent être admis à l’école dès deux ans, pourquoi pas ?
Il n’y a donc pas de contradiction, monsieur le ministre, entre l’idée que, s’il faut scolariser les enfants dès deux ans, il vaut mieux s’adresser en priorité aux milieux défavorisés et l’idée qu’il faut s’interroger sur la forme d’accueil la plus adaptée aux enfants âgés de deux ans à trois ans et la forme d’école maternelle la plus efficace possible.
Enfin, j’ai bien écouté Mme Cartron. J’ai du mal à saisir, ma chère collègue, la divergence qui nous sépare. L’amendement que je présente est ainsi libellé : « L’accueil des enfants de deux ans révolus est organisé en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé », etc. Le texte de l’article 5 qui nous est soumis dispose : « Dans les classes enfantines ou les écoles maternelles, les enfants peuvent être accueillis dès l’âge de deux ans révolus », etc. Pour nous, il s’agit d’une priorité, pour vous d’une possibilité, mais pas d’une obligation. Pourrait-on m’expliquer quelle est la différence fondamentale sur ce point, s’il y en a une ?
Nous avons déposé un amendement n° 191 rectifié tendant à ce qu’une grande enquête sérieuse soit menée sur ce point difficile, pour savoir s’il est essentiel de faire porter l’effort national sur l’accueil en maternelle des enfants de deux ans ou s’il ne serait pas plus utile de le faire porter sur la fin de l’école maternelle ou le début de l’école élémentaire. (M. Michel Savin applaudit.)
M. Jean-Claude Lenoir. C’est la bonne question !
M. Jacques Legendre. Nous posons ces questions de bonne foi. Si on nous démontre le contraire, eh bien, nous en tirerons les conséquences et nous nous rallierons à cette analyse ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.
M. Jacques-Bernard Magner. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est un bon débat que celui que nous sommes en train d’avoir. Monsieur Legendre, vous citez un rapport sénatorial de 2008 commis par Mme Papon et M. Martin. Ce rapport était quelque peu orienté puisqu’il était destiné à préparer les esprits au projet des jardins d’éveil, lequel s’opposait à l’école maternelle. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Je dis bien « contre l’école maternelle », car l’objectif, messieurs de l’opposition, était d’essayer de privatiser l’accueil des enfants de moins de trois ans !
Nous, nous citons des faits : alors que seulement 4,3 % des enfants scolarisés à deux ans redoublent la classe de CP, ce pourcentage atteint 11,1 % des enfants quand la scolarisation intervient après quatre ans. Rappelons que seuls 8 % de ceux qui redoublent à ce niveau obtiennent le bac par la suite. Oui, la scolarisation précoce a un impact déterminant sur l’ensemble du parcours scolaire de l’élève et constitue un moyen préventif de lutte contre l’échec scolaire ! C’est bien ce dont nous essayons de parler dans ce projet de loi pour la refondation de l’école : la lutte contre l’échec scolaire, c’est d’abord cela, ne vous en déplaise !
En matière d’acquisition du langage et d’accès à la pensée abstraite, la scolarisation précoce est très bénéfique, on le sait, aux élèves les moins favorisés, au premier rang desquels se situent ceux qui connaissent un déficit dans la maîtrise du langage, car ils auront plus de difficulté à développer et à construire les outils du traitement de l’information.
Selon le Conseil d’analyse stratégique, « de nombreuses études sociologiques et des travaux de psychologie, de neurobiologie et science cognitive montrent que les inégalités s’établissent dès la petite enfance. Homogénéiser le milieu d’apprentissage dès l’âge préscolaire est une dimension essentielle des politiques d’égalité des chances ».
La scolarisation des enfants de moins de trois ans est un facteur de réduction des inégalités sociales et scolaires. C’est pourquoi, M. le ministre l’a rappelé tout à l’heure, 3 000 postes lui sont dédiés dans la programmation des 60 000 emplois supplémentaires prévus sur le quinquennat.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Legendre, vous m’avez interpellée pour me demander ce qui nous différencie. Ce qui nous différencie, monsieur Legendre, c’est ce que vous supprimez dans le troisième alinéa de l’article 5, à savoir les conditions éducatives et pédagogiques adaptées à l’âge des enfants, visant leur développement moteur, sensoriel et cognitif, précisées par le ministre chargé de l’éducation nationale.
M. Jean-Claude Lenoir. Cela va de soi !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cela va de soi, mais cela va mieux en l’écrivant ! Donc, je ne comprends pas pourquoi vous déposez un amendement tendant à supprimer cette mention.
M. Jean-Claude Lenoir. On est en train d’écrire la circulaire !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous n’avons jamais défendu une scolarisation des enfants de deux ans dans n’importe quelles conditions ! Nous savons au contraire que, si nous voulons que cette scolarisation soit favorable, il faut poser des conditions particulières. Posées par l’article 5, elles sont un gage de qualité. Et connaissant votre attachement à la qualité de l’enseignement, je m’étonne, monsieur Legendre, que vous défendiez un amendement tendant à gommer cette phrase !
Vous mentionnez le fait qu’il est prévu par le texte que l’accueil des enfants donne lieu à un dialogue avec les familles. Et je vous réponds, monsieur, que l’école maternelle à deux ou trois ans n’est absolument pas obligatoire !
Mme Annie David. Bien sûr !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Donc, quand un enfant de deux à trois ans est scolarisé, c’est le fait, bien sûr, d’une démarche des parents. Et c’est ainsi que les choses peuvent être bénéfiques.
M. Jean-Claude Lenoir. C’est dans l’amendement de M. Legendre !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. En supprimant cette exigence de qualité que constituent les conditions particulières adaptées à l’âge des enfants, il me semble qu’on affaiblit le texte. C’est la raison pour laquelle, monsieur Legendre, j’ai émis, au nom de la commission, un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Sans vouloir insister, je souhaiterais, pour la clarté de nos débats, que vous défendiez, mesdames, messieurs de l’opposition, non les textes que nous avons écrits, mais les amendements que vous avez déposés. Or votre amendement, monsieur Legendre, vise à supprimer ces conditions éducatives et pédagogiques dont d’autres demandaient, au contraire, qu’elles figurent dans le texte de loi. J’ai un respect absolu de toutes les positions, mais, en l’occurrence, si vous pouviez vous rallier à la nôtre, les discussions gagneraient en clarté.
Mon ami Pierre Martin a défendu la position qu’il avait exprimée dans un rapport. Très bien. Pour votre part, monsieur Legendre, votre demandez la suppression de ces conditions particulières tout en maintenant le reste du texte.
Je le dis par avance, car je ne reprendrai pas la parole : je suis favorable aux études. Je suis même pour un conseil d’évaluation indépendant du ministre, dans lequel siègeront, pour la première fois, des sénateurs et des sénatrices.
Dans votre amendement à venir, vous proposez que la scolarisation à partir de l’âge de deux ans révolus fasse l’objet d’une étude nationale préalable. Votre amendement ne porte pas sur l’étude. Il vise à interrompre notre projet en attendant une nouvelle étude. Ce n’est pas exactement la même chose.
Pour la clarté des débats et pour préserver l’honnêteté intellectuelle, je souhaiterais que vous défendiez vos amendements et pas autre chose.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. La phrase que M. Legendre propose de supprimer comporte un élément important. Il s’agit des conditions adaptées à l’âge des enfants. Je veux préciser que cet élément figurait dans l’amendement de Mme Duchêne, intégré par Mme la rapporteur.
M. le président. La parole est à M. Claude Haut, rapporteur pour avis.
M. Claude Haut, rapporteur pour avis de la commission des finances. J’interviens pour la coordination des débats. L’adoption de l’amendement n° 377 du Gouvernement rend caduc l’amendement n° 30, que j’ai déposé, au nom de la commission des finances, à l’article 1er. En effet, il concerne le même principe.
Par conséquent, je retire cet amendement.
M. le président L’amendement n° 30 est retiré.
L'amendement n° 85, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Des compléments spécifiques de formation sont dispensés aux enseignants qui prennent en charge les enfants accueillis dès deux ans.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Si la mention de formations spécifiques pour les enseignants de maternelle a été introduite par Mme la rapporteur à l’article 30 du projet de loi, conformément à notre demande, aucune précision n’est apportée dans ce projet de loi quant à la formation des enseignants chargés de la scolarisation des enfants de deux à trois ans.
Pourtant, la scolarisation des enfants de deux à trois ans comporte des enjeux spécifiques, car, à cet âge, il y a une très grande hétérogénéité dans le développement affectif, émotionnel, cognitif et moteur des enfants.
Cette hétérogénéité nécessite une prise en considération au niveau de la formation des enseignants afin qu’ils soient en capacité d’appréhender et de répondre aux besoins de chaque enfant.
Françoise Dolto, dans La cause des enfants, ne disait pas autre chose quand elle affirmait : « Quand on dit 2 ans et 3 ans, c’est comme si on disait 12 ans et 25 ans. À 2 ans, de trois mois en trois mois, les enfants évoluent énormément, leurs intérêts, leur mode de langage au sens large du terme sont en continuelle mutation. »
La formation des enseignants, tant initiale que continue, doit, dans ce domaine comme dans les autres, être renforcée, abordant les enjeux propres au développement du jeune enfant.
L’État doit s’assurer qu’une formation spécifique de qualité soit dispensée afin que l’accueil des enfants de 2-3 ans puisse se faire dans de bonnes conditions et apporter l’effet escompté en termes de correction des inégalités sociales et scolaires et participer ainsi à la réussite.
L’école maternelle constitue non une anticipation des apprentissages dispensés par l’école primaire, mais un temps d’apprentissage propre, spécifique, centré sur le développement de l’enfant, qui nécessite des modules spécifiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement. En effet, il est satisfait par un amendement que nous avons retenu à l’article 30 et qui prévoit, dans les ESPE, des compléments de formation pour l’enseignement à la maternelle.
M. le ministre l’a précisé dans son discours. Il a bien dit qu’il y aurait, au sein des ESPE, des modules de formation qui contribueraient à permettre cette approche spécifique de la pédagogie et de l’enseignement à l’école maternelle.
Au nom de cela, nous demandons le retrait de l’amendement n° 85.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Le Gouvernement a la même position que la commission, même si nous considérons, sur le fond, qu’il est tout à fait déterminant qu’il y ait de nouveau des modules spécifiques consacrés à l’enseignement en maternelle.
Cela me donne le plaisir de saluer dans la tribune Bernard Paquaux, maître-formateur qui m’a tout appris sur l’enseignement en maternelle à l’époque où l’on n’avait pas encore supprimé la formation.
M. le président. Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 85 est-il maintenu ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Mme la rapporteur et M. le ministre considérant qu’il est satisfait, nous allons le retirer, monsieur le président. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Nous aurons de toute façon l’occasion de revenir sur l’importante question que vous venez de poser, monsieur Legendre.
Au fond, dites-vous, même si nous avons sincèrement essayé de consacrer des moyens à l’école maternelle, nous n’en tirons peut-être pas toutes les conclusions positives que nous aurions aimé en tirer.
Cela nous renvoie, monsieur Legendre, au débat que nous avions tout à l’heure, sur un fameux plateau média, à propos des moyens supplémentaires qu’il faudrait consacrer à l’éducation nationale. De mon point de vue, ils sont nécessaires, car l’on constate les effets déstructurants des suppressions d’emplois.
Mais, je le reconnais, les moyens ne sont pas une condition suffisante de la réussite. Si nous n’arrivons pas à obtenir un résultat aussi positif que nous le souhaitons avec la scolarisation précoce, nous devrions peut-être nous interroger sur la nature des échecs rencontrés dans les apprentissages. La formation initiale et continue des enseignants est-elle l’une des clés qui nous permettrait de valoriser tous les effets positifs d’une scolarisation précoce ? C’est une voie à laquelle je crois beaucoup !
M. le président. L’amendement n° 85 est retiré.
L'amendement n° 340, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
Dans les écoles qui les scolarisent
par les mots :
Dans ces écoles
La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. La commission de la culture a souhaité préciser, dans cet article dédié à la scolarisation des enfants de moins de trois ans, que ceux-ci peuvent être comptabilisés dans les prévisions d’effectifs de toutes les écoles qui les scolarisent.
Cela crée une difficulté par rapport aux autres exigences qui sont les nôtres, que nous venons de rappeler, à savoir les 3 000 postes et la circulaire du 18 décembre 2012.
Comme vous le savez, comme nous l’avons rappelé à plusieurs reprises, nous souhaitons que cette scolarisation soit comptabilisée dans les effectifs des écoles situées dans un environnement social défavorisé. Cette priorité, nous tenons à la conserver. Sinon, on s’exposera au risque d’une dilution de la mesure, alors que les études que vous avez évoquées, qui existent depuis 1995, montrent bien qu’en réalité, s’il y a une efficacité reconnue par tous, c’est précisément pour les enfants qui connaissent des difficultés dans leur milieu d’origine. Cette scolarisation est, en effet, moins utile pour les autres, y compris pour des raisons de structuration affective et de bain langagier.
Nous souhaitons mettre en cohérence et garder cette idée des écoles situées dans un environnement social défavorisé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Favorable.
M. le président. L'amendement n° 84, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le maire établit une liste des demandes de scolarisation des enfants de moins de trois ans effectuées sur leur territoire qui n’ont pas abouti à une scolarisation effective. Cette liste est transmise à l’autorité académique. »
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. L’alinéa 5 du présent article a été introduit en commission sur notre demande, afin de prendre en compte les enfants de moins de trois ans dans les prévisions d’effectifs d’élèves pour la rentrée.
L’objectif était de rompre avec la pratique du précédent gouvernement, qui ne les prenait pas en considération afin de justifier des suppressions de postes en arguant d’une absence de demandes. Pour notre part, nous souhaitons aller plus loin en comptabilisant toutes les requêtes formulées, même si elles ne débouchent pas sur une scolarisation effective.
C’est un premier pas de dénombrer les enfants scolarisés pour prévoir les postes nécessaires à leur scolarisation. Mais il faudrait aller plus loin et comptabiliser la demande effective de scolarisation des moins de trois ans en France.
Pour ce faire, il faut prendre en compte toutes les demandes et particulièrement celles qui n’ont pu aboutir effectivement, faute de places disponibles. Ce système permettrait de prévoir les postes nécessaires pour satisfaire toutes les demandes et, donc, tous les besoins.
Nous avons bien compris que le Gouvernement n’avait pas l’intention de permettre la scolarisation de tous les enfants de deux ans sur la simple base d’une demande émise par leur famille, mais qu’il souhaitait limiter cette possibilité aux zones prioritaires, du moins pour l’instant. Nous le regrettons bien sûr. Toutefois, il n’en est pas moins intéressant de disposer de données statistiques concernant les demandes de scolarisation, que nous ne pouvons mesurer à l’heure actuelle.
Je le répète, ces éléments chiffrés permettraient de mieux adapter le système scolaire aux besoins et aux demandes des familles selon les territoires. Dans cette perspective, nous souhaitons que le maire de chaque commune établisse une liste des demandes de scolarisation des enfants de moins de trois ans enregistrées sur son territoire qui n’ont pas abouti à une scolarisation effective. Ensuite, il convient que ce document soit transmis à l’autorité académique.
M. Michel Savin. C’est ça, créons un fichier !
M. Michel Le Scouarnec. Ce dispositif s’inspire des dispositions prévues par la loi sur le service minimum à l’école, et ne contrevient donc aucunement au principe de libre administration des collectivités territoriales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cette question est liée à celle que nous venons d’évoquer : en effet, la scolarisation des enfants de deux à trois ans est décidée après un dialogue constructif avec leurs parents. À cet égard, j’évoquerai rapidement mon expérience de maire.
Dans un premier temps, sachant qu’elles disposent de cette opportunité, les familles peuvent se présenter dans le but d’inscrire leurs enfants auprès de services municipaux. Puis, le dialogue se noue, d’autres solutions peuvent se faire jour au fil de la discussion et certains choix peuvent être différés.
M. Michel Savin. Bien sûr !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Ainsi, on ne peut considérer ces demandes comme un critère unique, et les relier au seul manque de places : précisément, ce n’est pas le seul angle sous lequel il faut analyser le différentiel entre le nombre d’enfants pour lesquels les parents auraient fait une démarche préalable et le nombre d’enfants réellement scolarisés.
De plus, cette comptabilité ne permettrait pas d’obtenir une vision exacte de la situation, dans la mesure où certains parents, potentiellement concernés, ne formulent pas cette demande : dire que ce chiffre nous renverrait à un manque de places ne serait pas exact, étant donné qu’un nombre parfois important de familles n’accomplissent pas cette démarche.
En conséquence, cette comptabilité ne nous paraît pas suffisamment significative, du moins pour que des enseignements puissent en être tirés.
M. Michel Le Scouarnec. Ces chiffres seraient utiles, même si la réalité peut être difficile à évaluer !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Mon cher collègue, vous en convenez vous-même ! Vous comprendrez donc que la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Le Scouarnec, l’amendement n° 84 est-il maintenu ?
M. Michel Le Scouarnec. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 181, présenté par M. Dantec, Mmes Bouchoux et Blandin, M. Gattolin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Si la famille souhaite inscrire l'enfant dans une classe qui propose un enseignement en langue régionale, il est accueilli dans l'établissement le plus proche proposant ce type d'enseignement. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Au-delà de notre souhait de voir les enfants de moins de trois ans accueillis au sein des structures scolaires de la République, nous estimons que fournir une offre d’enseignement en langues régionales adaptée et suffisante doit être un des objectifs de ce projet de loi de refondation de l’école de la République. Cette politique doit être mise en œuvre dès le plus jeune âge, ce qui sera du reste un juste retour de l’histoire !
Comme l’a pertinemment souligné notre collègue Corinne Bouchoux lors de la discussion générale, nous ne sommes plus en 1880 : la diversité linguistique n’est plus une crainte à entretenir mais une richesse culturelle patrimoniale et, partant, un atout.
Pour mettre en œuvre ce principe, l’offre d’enseignement de langues régionales ou en langue régionale devra être progressivement généralisée dans les aires géographiques où elle est en usage. Lorsque les familles demandent que leurs enfants puissent bénéficier d’un enseignement en langue régionale, leur requête doit être satisfaite de manière appropriée, c'est-à-dire dans le respect des principes de proximité et de continuité. Aussi cet amendement tend-il à permettre aux familles ne pouvant bénéficier de cet enseignement dans leur commune de résidence de voir leurs enfants accueillis dans une commune voisine. (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Labbé, je formulerai deux remarques au sujet de cet amendement.
Premièrement, il est question des enfants des classes maternelles, auxquels vous souhaitez qu’un enseignement en langue régionale soit proposé. À mon sens, l’école maternelle doit faire l’objet d’une approche spécifique, a fortiori concernant les enfants de deux à trois ans. De fait, la sensibilisation aux langues régionales me semble plutôt destinée à l’enseignement primaire.
Deuxièmement, vous souhaitez que ces enfants puissent être inscrits dans une commune voisine de la leur. Or cette disposition pourrait ouvrir la voie à des détournements de la carte scolaire, et ce faisant au contournement d’un certain nombre d’établissements.
À mes yeux, un enfant est bien scolarisé dans sa ville, dans son quartier et en tout cas avec ses camarades. L’inscrire si jeune dans une commune voisine pourrait aller à l’encontre d’un objectif que nous visons dès l’école maternelle, à savoir la socialisation.
M. Michel Savin. Bien sûr !
Mme Françoise Cartron, rapporteur. En conséquence, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Mon avis ne sera sans doute pas approuvé par tous nos collègues siégeant sur les travées de mon groupe. Toutefois, je tiens à affirmer qu’il s’agit d’un bon amendement, allant dans le sens de la justice et de l’équité.
Certes, à l’école maternelle, l’apprentissage du langage doit être en priorité axé sur le français : notre langue est notre bien commun, c’est le lien de notre Nation. Elle est donc capitale. Mais si certains parents souhaitent inscrire leurs enfants dans des établissements dispensant deux langues, dont notamment une langue régionale, l’école de la République doit, à mon sens, leur en laisser la possibilité. Faute de quoi, seuls les parents ayant les moyens d’inscrire leurs enfants dans des établissements privés bénéficieront de ce choix, ce qui ne serait pas socialement juste.
Voilà pourquoi je voterai en faveur de cet amendement.
Mme Françoise Laborde. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 191, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La scolarisation à partir de l’âge de deux ans révolus fait l’objet d’une étude nationale préalable soumise au Parlement pour débat. »
La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Je me suis déjà exprimé il y a quelques instants sur la préoccupation que traduit le présent amendement. Il tend à ce que soit menée, une bonne fois pour toutes, une étude approfondie concernant le bénéfice supposé de la scolarisation précoce.
À nos yeux, il serait utile que nous puissions tous disposer d’éléments précis sur ce sujet, afin que, sur cette base, un véritable débat ait lieu au Parlement. Il ne s’agit pas d’entraver l’action que le Gouvernement entend mener concernant la scolarisation à deux ans : il convient simplement d’obtenir enfin des réponses permettant à chacun de juger en son âme et conscience.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Legendre, je m’étonne que vous n’ayez pas connaissance des recherches menées notamment par Mme Agnès Florin, qui travaille sur cette question depuis des dizaines d’années à Nantes, où notre commission s’est d’ailleurs rendue. Ces travaux sont connus et Mme Florin dispose d’un réel recul, pour avoir suivi plusieurs cohortes d’enfants sur une période suffisamment longue.
Je me ferai un plaisir de vous transmettre la copie du rapport que nous avons en notre possession. Ce document fait état des études menées par Mme Florin et par d’autres chercheurs. Ainsi, votre curiosité sera satisfaite.
Cela étant, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Je crains qu’il n’y ait un malentendu au sujet de plusieurs amendements et, à cet égard, je me permets de me tourner vers la Séance : en effet, une fois de plus, M. Legendre n’a pas défendu son amendement stricto sensu !
Monsieur le sénateur, tout le monde a entendu que vous suggériez l’élaboration d’une étude nationale approfondie. Or l’amendement que j’ai sous les yeux fait référence à « une étude nationale préalable ». Je vous l’ai déjà dit, ces deux termes ne sont pas synonymes. « Préalable » signifie « avant ». Je suis certes favorable aux études approfondies, mais les études préalables, c’est autre chose !
Je le répète, j’aurais souhaité que vous défendiez réellement votre amendement. Mon avis défavorable ne se fonde pas sur le terme « approfondi » mais sur le terme « préalable ».
M. le président. Monsieur le ministre, je constate que le présent amendement emploie bien le mot « préalable ». Par ailleurs, je rappelle que tout auteur d’un amendement peut défendre ses propositions à l’aide des arguments qu’il veut bien retenir lui-même.
M. Bernard Fournier. Effectivement !
M. Jacques Legendre. Bien sûr !
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. En l’occurrence, une question sémantique se pose réellement : s’agit-il, oui ou non, d’une étude préalable ?
Quoi qu’il en soit, la vérité doit être dite tôt ou tard. À cette fin, il faut mettre tous les éléments du débat sur la table, et notamment le premier d’entre eux : la condition d’accueil des enfants non seulement en milieu scolaire mais aussi dans les structures chargées de l’accueil de la petite enfance.
Cet enjeu s’étend d’ailleurs à la question des rythmes scolaires, sujet qui vous est cher, monsieur le ministre.
M. Dominique de Legge. En effet, en fonction de ce que l’on veut défendre, on n’a absolument pas la même appréhension du cadre dans lequel les enfants vont être accueillis. En matière de petite enfance, on compte un adulte pour huit enfants sachant marcher. Pour observer ce qui se passe dans nos écoles communales, à ma connaissance, nous ne sommes pas à ce niveau-là !
Par conséquent, on ne peut pas aborder la question de l’accueil des moins de trois ans dans les établissements scolaires sous un angle strictement structurel. Il faut accepter d’étudier les problèmes en profondeur. Or les mesures que vous nous proposez via le présent projet de loi ne traitent pas de questions de fond. Je le sens bien, il s’agit simplement de satisfaire une promesse électorale.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Non !
M. Claude Haut. Oh là là !
M. Dominique de Legge. À mon sens, il serait tout de même préférable de considérer l’intérêt de l’enfant !
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. Jacques-Bernard Magner. On ne fait que cela !
M. le président. La parole est à M. Pierre Martin, pour explication de vote.
M. Pierre Martin. Monsieur le ministre, nous constatons bien qu’un problème existe concernant les enfants de deux à trois ans. Nous visons tous un même objectif : améliorer la situation ! Toutefois, nous ne proposons pas les mêmes remèdes.
Pour ma part, je souhaite que cette étude « préalable » soit « approfondie ». (Sourires.)
Mme Françoise Laborde. Excellent !
M. Pierre Martin. Cela signifie que cette étude doit être préalable et approfondie en même temps. De fait, il me semble judicieux de mesurer ce qui se passe à l’heure actuelle : à ce jour, des enfants de deux à trois ans sont effectivement scolarisés. Combien coûte cette scolarisation pour ce qui concerne les enseignants, les ATSEM, etc. ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous ne parlons pas ici de questions financières !
M. Pierre Martin. Sur cette base, nous pourrons concevoir des améliorations pour l’avenir.
Mme Annie David. Voilà pour ce qui concerne l’intérêt de l’enfant !
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Monsieur le ministre, je vous serais reconnaissant de ne pas faire systématiquement la leçon aux élus qui présentent leurs amendements. (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.) Chacun a le droit de défendre un amendement comme il l’entend. Quant à vous, vous avez le droit de formuler des remarques, mais, je le répète, ce n’est pas une raison pour venir nous faire la leçon !
En répondant à mon intervention en discussion générale, j’ai été surpris de vous entendre employer le terme « sectaire ». (Mme la rapporteur manifeste son exaspération.) Je ne crois pas avoir jamais qualifié votre texte ni vos propos de sectaires. À présent, vous me reprenez par deux fois sur la manière dont je défends mes amendements. Chacun d’entre nous en a le texte entre les mains, et chacun est donc en mesure de savoir de quoi nous parlons.
Cela étant, je tiens à vous faire une proposition, car il me semble essentiel de traiter cette question au fond. Mme la rapporteur a cité les travaux d’une chercheuse ; or M. Martin, dans son rapport, a mentionné d’autres études qui n’aboutissent pas aux mêmes conclusions.
Je ne veux pas que vous puissiez seulement supposer que, par le simple mot « préalable », nous souhaitons suspendre la présence de tous les enfants de deux à trois ans dans les classes maternelles. Si vous préférez que nous remplacions le terme « préalable » par l’adjectif « approfondi », je rectifie notre amendement en ce sens. Voilà qui me semble honnête ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. Dominique de Legge. Bravo !
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 191 rectifié, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir, et qui est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La scolarisation à partir de l’âge de deux ans révolus fait l’objet d’une étude nationale approfondie soumise au Parlement pour débat. »
Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement rectifié ?
M. Vincent Peillon, ministre. Dès lors que l’amendement fait référence à une étude approfondie, et non plus à une étude préalable – vous convenez donc que ces deux notions n’ont pas le même sens –, j’y suis favorable.
Le projet de loi prévoit la création d’un conseil de l’évaluation, indépendant du ministre – ce n’est plus le prescripteur qui procédera à l’évaluation –, dans lequel siégeront des parlementaires. Dès que ce conseil sera constitué, monsieur Legendre, vous pourrez lui demander de réaliser l’étude que vous demandez dans l’amendement. Elle sera utile pour nous permettre d’ajuster au mieux dans le temps les conditions pédagogiques particulières qui doivent accompagner l’accueil des petits, que vous vouliez supprimer tout à l’heure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Favorable.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Le débat était un peu confus, mais il tend à se clarifier.
L’étude approfondie prévue dans l’amendement devra nous permettre de distinguer les services à la petite enfance du jardin d’enfants ou de la garderie.
Les services à la petite enfance accueillent des enfants pour aider les familles qui ne peuvent pas garder leurs enfants, notamment parce que les parents travaillent. Ces services sont souvent tarifés aux familles, en fonction du quotient familial.
Le jardin d’enfants, ou la garderie, est plus un mal qu’un bien, pour M. Legendre. Si l’on n’est pas sûr que pour les enfants défavorisés l’école maternelle soit un bien, en tout cas, cela ne peut pas leur faire de mal.
Notre ambition est que l’école maternelle accueille des enfants qui ont une certaine maturité, un besoin d’éducation, d’actions collectives, d’engagement vers le langage. Ce sera la preuve de la confiance qui est placée dans l’école. L’école n’est pas un désavantage. Elle apporte au contraire un avantage, que le projet de loi prévoit d’offrir en priorité aux enfants des milieux défavorisés, qui en ont le plus besoin. L’objectif final est de permettre à toutes les familles de scolariser leurs enfants de moins de trois ans dans les meilleures conditions d’épanouissement et d’apprentissage préalable.
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.
M. Joël Guerriau. J’apprécie que nous parvenions à avancer dans un débat qui tend à devenir consensuel. Je me demande néanmoins si cette étude approfondie sera faite au préalable, ou pas ? (Rires.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 532, présenté par Mme Cartron, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À l’article L. 162-2-1 du même code, les mots : « Le dernier » sont remplacés par les mots : « L’avant-dernier ».
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. C’est un amendement de coordination qui concerne Mayotte.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 266 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 121-2 du code de l’éducation est ainsi rédigé :
« La lutte contre l’illettrisme et l’innumérisme constitue une priorité nationale. Cette priorité est prise en compte par le service public de l’éducation ainsi que par les personnes publiques et privées qui assurent une mission de formation ou d’action sociale. Tous les services publics contribuent de manière coordonnée à la lutte contre l’illettrisme et l’innumérisme dans leurs domaines d’action respectifs. »
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Au sein de notre jeunesse, il est un phénomène dont on parle peu mais qui, pourtant, s’étend et menace notre pays.
Le communiqué de l’Académie des sciences, publié le 31 janvier 2012, sur l’enseignement des sciences souligne que ce problème est ancien. Il évoque la création, voilà plus de cent ans, d’une commission internationale de l’enseignement mathématique, qui devait proposer des solutions. Mais la solution idéale n’a pas été trouvée.
Pour l’Académie, « le constat est qu’on en est maintenant, avec les mathématiques, à un problème aussi grave que celui de l’illettrisme. Un nom analogue a même été trouvé pour désigner cette carence de culture : l’innumérisme. »
Mes chers collègues, l’enseignement des mathématiques, et des sciences d’une manière générale, ne doit pas faire l’objet de blocage pour les enfants. Il doit s’adapter, être vivant. Il constitue la garantie que l’on créera sur le territoire de la République des emplois à haute valeur ajoutée. La demande en matière de recherche, de technologie et d’innovation s’accélère et nous devons, face à la concurrence internationale, renforcer la place de la France dans ces domaines pour relancer la croissance.
C’est pourquoi le présent amendement vise à ce que la lutte contre l’innumérisme devienne une priorité nationale, au même titre que la lutte contre l’illettrisme. (M. Jacques-Bernard Magner applaudit.)
M. le président. L'amendement n° 454, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas, MM. Savin, Soilihi, Vendegou, Lenoir et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 121–2 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 121–2–... ainsi rédigé :
« Art. L. 121–2-... – La lutte contre l’illettrisme à l’école est la priorité nationale. Tous les élèves doivent avoir la maîtrise de la lecture avant leur entrée au collège afin de réduire l’échec scolaire. »
La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Je suis, comme tout le monde, très préoccupé par l’illettrisme. Nous avons tous manifesté notre inquiétude sur ce sujet. C’est pourquoi nous avons présenté cet amendement, qui se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. La commission est favorable à l’amendement n° 266 rectifié.
L’amendement n° 454 appelle deux observations.
En premier lieu, la lutte contre l’illettrisme concerne non seulement l’école, mais aussi les services sociaux, qui s’occupent des adultes.
En second lieu, la garantie de l’apprentissage de la langue française est déjà inscrite dans le code de l’éducation. Je ne voudrais pas que l’amendement ouvre la porte à un contrôle de la maîtrise du français en CM2, qui pourrait ensuite conditionner l’entrée au collège.
Ces réticences me conduisent à émettre un avis défavorable sur l’amendement n° 454.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Je suis moi aussi favorable à l’amendement n° 266 rectifié, parce que l’innumérisme ne figure pas en tant que tel dans le code de l’éducation, même s’il est compris par l’Académie comme inclus dans l’illettrisme. Cet amendement apporte donc une clarification.
En revanche, je suis, pour les mêmes raisons que Mme la rapporteur, défavorable à l’amendement n° 454. Les reproches qui nous ont été faits tout à l’heure sur l’absence d’une lutte contre l’illettrisme dans notre texte ne sont pas fondés.
D’abord, vous le savez, le Premier ministre a décidé de désigner l’illettrisme Grande cause nationale pour 2013. Et cette cause nous permettra de tous nous réunir.
Par ailleurs, la lutte contre l’illettrisme figure plusieurs fois dans le code de l’éducation. Nous ne faisons que la préciser en faisant référence à l’innumérisme.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Monsieur le ministre, permettez-moi de revenir sur un point que j’avais abordé tout à l’heure et sur lequel j’avais déposé un amendement concernant les difficultés d’encadrement que rencontrent les enseignants lorsqu’ils accueillent des enfants qui sont logés dans des structures d’urgence.
Vous avez tout à l’heure évoqué la séparation des enfants. Il n’y a pas aujourd’hui de séparation. Ces enfants sont accueillis dans des classes. Mon amendement visait à chercher les moyens de renforcer le corps enseignant dans ces classes spécifiques.
Je crains en effet que l’on ne se heurte à une double difficulté à la prochaine rentrée scolaire. D’une part, les enseignants risquent de se montrer plus réticents à ouvrir leur classe aux enfants qui sont accueillis dans des structures d’urgence hivernale. D’autre part, les parents peuvent craindre que la présence dans une classe de quatre, cinq ou six élèves ne maîtrisant absolument pas la langue française ne pénalise leur enfant dans sa scolarité.
Afin d’éviter que ne s’aggrave une fracture déjà assez importante, il aurait été intéressant de renforcer l’équipe enseignante. Je ne pensais pas à une séparation. Il m’avait semblé que certains des postes que vous créez pourraient renforcer le contingent d’enseignants. Je me suis vu opposer l’article 40 de la Constitution. Je le regrette, car l’objet de mon amendement était d’améliorer l’accueil en milieu scolaire des enfants hébergés dans ces structures d’urgence.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, l’amendement n° 266 rectifié de Mme Laborde prévoyant une dépense supplémentaire, il est gagé, par une taxe, prévue au second alinéa.
L’habitude veut, me semble-t-il, que lorsqu’un ministre accepte un amendement il lève le gage. Or vous ne l’avez pas fait. Je me demande donc si vous avez l’intention de lever le gage ou, au contraire, de laisser s’appliquer le second alinéa de l’amendement de Mme Laborde.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. L’amendement n° 266 rectifié de Mme Laborde apporte une précision très utile. S’il est adopté, une notion nouvelle sera inscrite dans le code de l’éducation.
L’amendement n° 454 de M. Legendre mérite d’être défendu. En effet, il rappelle de façon très claire les objectifs que doit atteindre l’éducation nationale.
Certes, monsieur le ministre, la lutte contre l’illettrisme est inscrite dans le code de l’éducation. Je m’étonne toutefois, alors qu’il s’agit de la Grande cause nationale pour 2013, qu’elle ne figure pas dans le rapport annexé au projet de loi. Ce rapport, est pourtant très bavard. Il rappelle tous les objectifs essentiels de notre éducation.
Il s’agit sans doute d’un oubli fâcheux, que nous proposerons au Sénat de corriger par voie d’amendement. Il n’est pas inutile de rappeler, dans le texte même du projet de loi, un objectif qui constitue la priorité des priorités.
Madame le rapporteur, je considère que la maîtrise de la lecture est primordiale pour l’entrée en sixième. Vous avez rappelé les chiffres en commission et ils ont de nouveau été évoqués ici même. Nous devons nous attacher à atteindre cet objectif. C’est notre devoir et une impérieuse nécessité. Il faut que les enfants sachent lire, écrire et compter lors de leur entrée en sixième.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Tout d’abord, je lève le gage de l’amendement n° 266 rectifié et je remercie M. Lenoir d’avoir appelé mon attention sur ce point.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 266 rectifié bis.
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. On me dit que la lutte contre l’illettrisme ne figure pas dans le rapport annexé au projet de loi.
Permettez-moi de vous répondre que l’on trouve, dans ce rapport, un alinéa 256 intitulé « Lutter contre l’illettrisme ». Et la première phrase de l’alinéa 257 précise que « 3,1 millions de personnes sont en situation d’illettrisme en France ». Je pourrais continuer, car plusieurs alinéas sont consacrés à cette question.
Pouvez-vous imaginer que, constatant cet oubli, vos collègues parlementaires auraient omis de me rappeler à l’ordre alors que le Premier ministre a déclaré la lutte contre l’illettrisme Grande cause nationale pour 2013 ? Je vous renvoie donc au rapport annexé.
Monsieur Savin, je vous répondrai sur le fond, car je suis convaincu que vous voulez faire ce qui est le mieux pour les enfants concernés. Il y a un aspect sur lequel nous sommes d’accord et un point de désaccord. D’ailleurs, vous avez mal interprété la réponse que je vous ai apportée tout à l’heure.
Nous sommes d’accord sur le fait que l’éducation nationale doit consacrer plus d’humanité et de moyens à l’accueil de ces enfants.
M. Michel Savin. Ce n’est pas le cas !
M. Vincent Peillon, ministre. Nous le faisons et c’est pourquoi je vous rappelais – je rends hommage à ma collègue George Pau-Langevin – les circulaires que, très tôt, nous avons prises.
Dans une déclaration récente, le Défenseur des droits, Dominique Baudis, rend d’ailleurs hommage à notre action, qui n’est sans doute pas parfaite et qui ne s’étend pas sur tout le territoire. Il précise que l’administration qui s’est mobilisée pour accueillir au mieux ces enfants, c’est l’éducation nationale. J’en suis fier, avec tous les agents de l’éducation nationale, et je veux partager cette fierté avec vous. Ce sont nos valeurs.
Notre point de désaccord est traduit par ce que nous portons dans ce projet. Lorsque l’on a évoqué l’innumérisme, voilà quelques instants, j’ai pensé à Georges Charpak. J’ai eu le grand bonheur de le connaître et je peux même dire qu’il m’a presque élevé. Il me disait qu’à son arrivée en France, venant de sa Pologne natale, il ne parlait pas notre langue, mais qu’il l’avait apprise très vite parce qu’il a été en immersion dans notre pays, accueilli par un certain nombre de ceux qui portaient notre tradition.
Je veux que, partout sur notre territoire, on réunisse tous les enfants. Je ne veux pas qu’on les sépare, qu’on les éloigne, qu’on les différencie. Le creuset français, le creuset national, consiste précisément à les réunir. Je sais que vous défendez votre point de vue avec cœur. Mais dans l’intérêt de ces enfants – nous avons une divergence sur ce point –, il faut les accueillir dans les mêmes écoles…
M. Michel Savin. Oui !
M. Vincent Peillon, ministre. … et faire front.
Tous les jours des élus – au-delà des clivages politiques, qui s’effacent quand on est dans la réalité des événements – me disent que les familles et certains professeurs le vivent mal. Nous devons néanmoins résister. C’est ainsi que nous permettrons à ces enfants une meilleure intégration.
M. Michel Savin. Avec des moyens !
M. Vincent Peillon, ministre. Cette ouverture, que vous appelez les uns et les autres de vos vœux, sera un enrichissement pour tous les enfants.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Mon amendement a deux aspects.
Le premier tient à une affirmation forte de la nécessité de vaincre l’illettrisme. Dans la mesure où cette préoccupation est aussi celle de Françoise Laborde, je me serais volontiers rallié à son amendement, qui dispose que la lutte contre l’illettrisme et l’innumérisme constitue une priorité nationale. Il n’est pas inutile de rappeler l’innumérisme.
Le second est la maîtrise de la lecture avant l’entrée au collège. Selon Mme la rapporteur, cet objectif risque d’être un barrage pour l’entrée en sixième. Nous ne souhaitons évidemment pas recréer un examen d’entrée en sixième ; il a disparu depuis trente ou quarante ans. Mais nous savons aussi qu’un élève sur six entre en classe de sixième sans savoir lire couramment, ce qui constitue un facteur très important d’échec au collège, et éventuellement un élément de perturbation pour ses camarades de classe.
Par conséquent, assigner aux enseignants l’objectif que tous les élèves maîtrisent la langue française avant d’entrer en sixième, ce n’est pas, je tiens à le dire, madame la rapporteur, la volonté d’empêcher l’accès à cette classe ! Mais si un enfant de sept ans ne sait pas lire, il aura du mal à rattraper son retard après. Il faut donc mettre à profit la marge qui existe avant le collège.
Nous voulons inscrire dans le texte une ardente obligation très claire : faites que les enfants que nous amenons au collège aient toutes les conditions pour réussir au collège. (MM. Jean-Claude Lenoir et Bernard Fournier applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je souhaite réagir aux propos de M. Legendre.
Mon cher collègue, j’entends bien que votre volonté n’est pas d’empêcher des enfants d’entrer au collège. Mais cette réalité existera pourtant.
Imaginons une famille expatriée qui viendrait travailler en France et dont les enfants ne maîtrisent pas le français. Comment leur scolarisation peut-elle être effectuée dans les écoles françaises ? De fait, s’il est écrit dans la loi que, pour entrer au collège, il faut maîtriser le français, ces enfants seront exclus.
Cet exemple est sans doute extrême, mais il existe dans les écoles primaires des enfants qui ont des difficultés pour apprendre le français, l’écrire et le parler. Je suis d’accord pour faire porter à notre école une exigence forte, afin que ces enfants puissent acquérir une bonne maîtrise de la langue française au fur et à mesure de leur scolarité. Mais bloquer leur passage en sixième s’ils n’ont pas réussi à acquérir cette maîtrise reviendrait à les exclure. Je ne peux pas vous suivre sur ce point, car trop d’enfants seraient laissés sur le bord du chemin, puisque, comme nous l’avons tous constaté dans nos écoles, ils sont de plus en plus nombreux à avoir du mal à acquérir la maîtrise du français.
S’il faut se poser la question de l’apprentissage et de la maîtrise de la langue française, il ne faut pas empêcher ces enfants de poursuivre leur scolarité. Sinon, toute possibilité d’évolution au sein de notre système scolaire leur serait retirée. Ce serait dommage. De plus, cela irait à l’encontre de votre souhait pour l’ensemble de nos enfants, à savoir la réussite de leur scolarité.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5, et l’amendement n° 454 n’a plus d’objet.
Section 2
L’éducation artistique et culturelle
Article 6
I. – (Non modifié) Au début de la septième phrase de l’article L. 121-1 du code de l’éducation, les mots : « Les enseignements artistiques » sont remplacés par les mots : « L’éducation artistique et culturelle ».
II. – L’article L. 121-6 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase, les mots : « Les enseignements artistiques contribuent » sont remplacés par les mots : « L’éducation artistique et culturelle contribue » ;
b) La seconde phrase est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :
« Elle favorise la connaissance du patrimoine culturel et de la création contemporaine et participe au développement de la créativité et des pratiques artistiques. L’éducation artistique et culturelle comprend un parcours pour tous les élèves tout au long de leur scolarité dont les modalités sont fixées par les ministres chargés de l’éducation nationale et de la culture. Ce parcours est mis en œuvre localement ; des acteurs du monde culturel et artistique et du monde associatif peuvent y être associés. » ;
2° Au début du deuxième alinéa, le mot : « Ils » est remplacé par les mots : « Les enseignements artistiques » ;
3° (Suppression maintenue)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l'article.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je souhaite intervenir sur cet article 6, qui porte spécifiquement sur l’éducation artistique et culturelle à l’école. Mes chers collègues, vous connaissez mon intérêt et mon engagement, au sein de notre commission, sur ces questions depuis de nombreuses années.
L’éducation a longtemps privilégié les savoir-faire, peut-être au détriment des savoir-être. Aussi, je suis convaincue que le fait d’inscrire l’éducation artistique et culturelle dans les objectifs à atteindre pour l’école est absolument essentiel.
L’éducation au sensible, apprendre aux enfants à s’émouvoir, à admirer des œuvres, découvrir des artistes ou encore fréquenter les musées, les théâtres et le cinéma, voilà un enjeu essentiel pour donner aux élèves une formation la plus complète possible.
Bien évidemment, je ne reviendrai pas sur les bienfaits de la culture, qui non seulement construit des hommes et des citoyens, mais aussi contribue à tisser du lien social. Comme vous tous ici présents, je suis convaincue de son importance.
Avec Mme Férat, j’avais déposé un amendement lors de l’examen de la loi de 2005 afin d’intégrer au socle commun l’éducation artistique et culturelle, ainsi que les pratiques sportives. C’est vous dire notre souci que les enfants puissent avoir accès à ce type d’enseignements.
C’est pourquoi nous soutenons l’inscription, dans ce texte de loi, de l’éducation artistique et culturelle, qui viendra compléter utilement l’enseignement des arts. En effet, à titre de comparaison, il n’est pas inutile de rappeler que, même si l’on apprend les règles de la natation, si l’on ne se lance pas dans le grand bain pour nager, l’enseignement restera très incomplet.
Pour autant, si nous sommes favorables à l’éducation artistique et culturelle telle qu’elle est inscrite dans le projet de loi, nous regrettons son déficit d’ambition. Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, le texte ne clarifie ni n’articule la notion d’éducation artistique avec celle d’enseignement artistique.
Je le rappelle, l’éducation artistique, c’est la sensibilisation permanente aux arts et à la culture au travers d’un ensemble de disciplines, tandis que les enseignements artistiques, ce sont forcément des formations plus techniques et approfondies, comme l’apprentissage d’un instrument de musique. Généralement, ces enseignements sont plutôt dispensés dans les écoles de musique ou les conservatoires, qu’ils soient de rayonnement communal, départemental ou régional, ou encore les écoles d’art.
Ces deux notions sont souvent confondues, pour être ensuite diluées l’une dans l’autre. Il convient de le souligner, elles sont complémentaires et doivent être inscrites en continuité l’une de l’autre. Elles permettent aux élèves, dès le plus jeune âge, si elles sont bien articulées, d’avoir potentiellement accès à la formation la plus complète et la plus poussée, si tel est le souhait de l’enfant et de sa famille.
Notre groupe a donc déposé un amendement pour que soit permis à chaque élève d’accéder à cette formation. La pratique doit être un continuum depuis la sensibilisation jusqu’à la formation des futurs amateurs ou professionnels.
Si ce n’est pas l’école qui organise le prolongement de cette sensibilisation, qui s’en chargera ? Souvent, on le sait, ce sont les familles averties ou favorisées qui ont directement accès à ces établissements, tandis que les familles plus éloignées n’offrent pas à leurs enfants cette chance. L’école peut jouer ce rôle.
Nous avons déposé un certain nombre d’amendements pour que soit également clarifiée, dans le cadre d’une ambition globale concernant le projet éducatif de territoire, la notion d’éducation artistique et culturelle sur le temps scolaire et sa spécificité sur le temps périscolaire, ainsi que pour souligner l’importance de s’appuyer sur les contrats locaux d’éducation artistique, les CLEA, qui ont été mis en place par des collectivités en partenariat avec les services déconcentrés de l’État, à la fois les rectorats et les DRAC, les directions régionales des affaires culturelles.
Prendre appui sur ces expérimentations, c’est aussi montrer l’implication des collectivités. Comme nous le souhaitons, les collectivités doivent être également pleinement impliquées dans le processus, puisque, le plus souvent, vous le savez, ce sont elles qui financent les établissements culturels et artistiques.
M. le président. La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette, sur l'article.
M. Jean-Étienne Antoinette. Cet article 6 – il n’est pas le seul – illustre la démarche de refondation, l’esprit qui anime le Gouvernement et les parlementaires pour donner un souffle nouveau à l’éducation.
Tout d’abord, parce qu’il place dans les objectifs et missions du service public de l’enseignement non plus seulement un « enseignement » artistique, mais une « éducation » artistique et culturelle.
Le choix du vocabulaire laisse bien entendre que la formation nécessaire à la compréhension vise à une ouverture des élèves au monde de la culture davantage qu’à l’apprentissage d’une technique supplémentaire.
Les deux piliers sur lesquels cette éducation se constitue retiennent également l’attention : le local et l’ailleurs, soit une véritable ouverture sur le monde.
Avec raison, nos collègues de l’Assemblée nationale ont insisté sur le partenariat local, dont toutefois l’identification des moyens mis en synergie devra dans chaque cas être précisée.
La richesse de la vie culturelle qui entoure les établissements scolaires est un vecteur positif pour ancrer l’école et les élèves dans le monde qui les entoure et qu’ils touchent ainsi du doigt. Mais il ne faudra pas que les frontières du territoire local constituent un seuil au-delà duquel l’ouverture au monde est fermée.
Toutefois, sur les territoires à forte identité régionale, ainsi qu’à biodiversité spécifique, à l’instar de la forêt primaire amazonienne que l’on retrouve par exemple en Guyane et qui, au-delà de la nature, fonde des mythes et légendes fabuleux, les démarches de recensement, collecte, valorisation et diffusion devront être partagées entre les chercheurs, institutions locales et éducation nationale.
À ce titre, sans formuler de proposition, je souhaite mentionner le frein que constitue dans ce cas de figure pour les cultures régionales le caractère facultatif des enseignements devant mener aux diplômes comme le baccalauréat. Leur formation continue ciblée semble pouvoir être une première voie.
C’est également pourquoi je salue encore les travaux de la commission qui ont laissé une ouverture à la culture autre qu’artistique.
Certes, l’article L. 121–6 du code de l’éducation mentionne particulièrement certains aspects de la vie culturelle : la musique instrumentale et vocale, les arts plastiques, l’architecture, le théâtre, le cinéma, l’expression audiovisuelle, les arts du cirque, les arts du spectacle, la danse et les arts appliqués.
Mais cette ouverture au monde comprend également la culture scientifique et technique – dans le sens des sciences expérimentales, et j’en confirme le caractère opérationnel avec le programme du Centre spatial guyanais qui accompagne chaque classe d’âge dans la découverte de l’espace et du transport spatial –, la culture littéraire – écrite ou orale, et les départements ultramarins, comme ceux du sud de la France, connaissent une tradition importante de ce support immatériel –, architecturale et historique.
L’éducation culturelle réside non pas seulement dans un cours d’art plastique ou dans un enseignement d’histoire de l’art, mais dans l’ensemble des enseignements proposés, qui offrent davantage que des connaissances, au demeurant indispensables.
C’est ainsi que le service public de l’enseignement, tel qu’il est envisagé dans ce projet de loi, dépasse les apprentissages techniques pour garantir la responsabilité première de l’État en la matière, la vigilance quant aux diverses dérives élitistes pour, en définitive, s’élever à une formation en humanité.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l’article.
Mme Annie David. Cet article entend mettre en place une éducation artistique et culturelle plus large que le seul enseignement artistique actuellement prévu par la loi.
Nous sommes évidemment favorables à la valorisation de l’art et de la culture au sein de l’école, dont nous avons toujours souhaité le développement au sein de l’éducation nationale. Mon ami et ancien collègue Jack Ralite, s’il avait encore été avec nous ce soir, aurait pu défendre avec talent cette éducation artistique et culturelle élargie par rapport à l’enseignement artistique inscrit aujourd’hui dans la loi.
Néanmoins, la mise en place de l’éducation artistique et culturelle que vous proposez, monsieur le ministre, n’est pas s’en soulever des questions et poser des problèmes, et reste à bien des égards entourée d’un grand flou.
En effet, l’éducation artistique et culturelle semble être composée des enseignements artistiques tels qu’ils existent actuellement, et d’un parcours qui sera mis en œuvre localement, auquel des actrices et des acteurs du monde culturel et artistique comme du monde associatif peuvent être associés.
J’ai bien entendu notre collègue M. Antoinette évoquer les spécificités de la Guyane. On ne peut qu’être d’accord avec cette volonté d’associer les acteurs et actrices culturels locaux, mais il n’en demeure pas moins que l’enseignement artistique, qui porte sur l’histoire de l’art, la théorie et la pratique des disciplines artistiques, restera, seul, partie intégrante de la formation scolaire primaire et secondaire.
L’objectif de ce parcours d’éducation artistique et culturelle est de remédier à l’inégal accès des élèves à l’éducation artistique et culturelle, qui dépend actuellement des politiques académiques et de l’offre culturelle des territoires qui sont profondément inégalitaires, nous en conviendrons.
Inscrit dans la loi, ce parcours serait donc obligatoire et, par conséquent, moins inégalitaire. C’est en tout cas ce qu’affirme le Gouvernement avec ce texte. Cependant, monsieur le ministre, nous ne voyons pas comment l’obligation pour chaque école de s’inscrire dans un parcours culturel local permettrait de remédier aux inégalités territoriales d’accès à la culture.
Des comités d’organisation et de pilotage régional de l’éducation artistique et culturelle au niveau académique seront chargés de définir des axes stratégiques, censés favoriser l’égal accès de toutes et de tous à l’éducation artistique et culturelle par un pilotage territorial dans une logique d’aménagement du territoire. Ce faisant, nous ne voyons guère comment les inégalités dans l’accès à l’éducation artistique et culturelle à l’école, dénoncées à juste titre, pourraient être corrigées.
La circulaire évoque le numérique comme solution. Mais, comme élue d’un département de plaines et de montagnes, je sais bien que le numérique est inégalement réparti sur notre territoire. Avec cette circulaire, vous comptez donc répondre à une inégalité en convoquant le numérique, domaine où les inégalités sont également criantes.
Si votre ambition en matière de culture et d’égalité territoriale se résume à fournir un parcours culturel avec des visites numériques de musées aux territoires les plus éloignés de la culture, alors nous ne partageons ni la même vision ni la même ambition dans ce domaine.
C’est la raison pour laquelle je vous proposerai un amendement dans quelques instants.
M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, sur l’article.
M. Jacques-Bernard Magner. L’introduction d’un parcours d’éducation artistique et culturelle est une des innovations parmi les plus importantes de la refondation de l’école.
Elle porte en effet une transformation profonde de l’approche des arts et de la culture dans notre système scolaire : une vision plus globale, dans laquelle les enseignements artistiques, s’ils sont et demeurent une composante essentielle et primordiale, s’inscrivent dans un parcours cohérent et progressif, tout au long de la scolarité, dans un partenariat renouvelé entre l’école et les acteurs culturels.
Nous y voyons un cadre pour donner une plus grande place à la créativité et à l’imagination, à la démarche de projets transversaux, dans un système scolaire parfois trop académique.
Ce parcours représente également un fabuleux outil de lutte contre les inégalités d’accès à la culture et à la pratique artistique dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture que nous défendons.
M. le président. L'amendement n° 306 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le mot :
contribue
insérer les mots :
sur le temps scolaire
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. L’instauration d’un véritable parcours d’éducation artistique et culturel constitue une avancée, puisqu’il va au-delà du strict enseignement. Il met en œuvre, par ailleurs, une logique de partenariat conclu entre tous les acteurs afin que l’accès à la culture soit effectif pour l’ensemble des enfants quelle que soit leur origine sociale et culturelle et quel que soit le territoire. Vous le savez, c’est un de mes dadas !
Toutefois, afin de s’assurer que l’éducation artistique et culturelle profite bien au plus grand nombre, il est proposé ici de préciser dans la loi qu’elle se déroule sur le temps scolaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Vous avez bien dit, madame Laborde, que nous parlons précisément d’un parcours de développement artistique qui s’appuie sur un partenariat. Il s’accompagne d’une articulation entre ce qui se passe dans le temps scolaire et ce qui se passe en dehors de ce temps.
Je crois qu’il ne faut pas introduire d’étanchéité entre ces deux moments. Il faut réaffirmer qu’à l’école il y a un enseignement artistique qui est maintenu et qu’il n’est pas question de modifier de quelque manière que ce soit. Dans le primaire ou au collège, il y aura des moments consacrés à l’enseignement, précisément, de cette initiation artistique et il y aura également, hors du temps scolaire, d’autres moments consacrés, dans la complémentarité, à ces projets éducatifs territoriaux. Cette complémentarité et cette articulation peuvent produire plus de sens que la juxtaposition des temps.
Je pense donc que dans ce parcours les contributions que vous avez mentionnées se réaliseront à la fois sur le temps scolaire et hors du temps scolaire.
Aussi, je vous demande de retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Je suis d’accord avec toutes les interventions précédentes, en ce sens que ce parcours a pour vocation, évidemment, de créer des activités, pour des raisons que j’ai évoquées dans la discussion liminaire. Seuls 10 % des élèves ont aujourd’hui accès à ces activités, dont nous voyons bien qu’elles sont pédagogiquement efficaces, en particulier dans les milieux qui rencontrent le plus de difficultés.
Cela montre, d’ailleurs, que des collectivités qui ont peu d’argent sont souvent capables de se mobiliser ! Nous parvenons à faire un certain nombre de choses avec l’aide de mécénats extérieurs, c’est très répandu – vous savez que nos grands orchestres, par exemple, en bénéficient – et également avec l’aide de l’État, qui mobilise des moyens, mais cela touche trop peu d’élèves.
Or il y a une nouveauté, autour de laquelle nos débats oscillent, nous le voyons bien : il faut tracer une exigence collective et pour tous – car, bien sûr, nous élaborons la loi –, tout en permettant aux acteurs sur le terrain de disposer de l’autonomie nécessaire.
Et nous sommes au moment où nous devons articuler à la fois le temps scolaire, le temps périscolaire et le temps extrascolaire. Dans beaucoup d’autres pays, l’engagement, l‘initiative et la créativité que vous avez évoqués ne se jouent pas seulement dans le temps scolaire, mais également à côté. Le tout est d’être capable, précisément, de faire en sorte que ces forces scolaires et périscolaires se retrouvent dans le projet éducatif de l’élève.
C’est donc effectivement neuf, nous sommes interrogatifs, mais il y serait contradictoire de souhaiter cela tout en voulant le réserver au temps scolaire. Le temps scolaire ne sera pas touché, j’en ai évidemment assuré l’ensemble des 16 000 professeurs qui, dans l’éducation nationale, sont chargés de ces enseignements, et en même temps, nous travaillerons avec d’autres acteurs, à l’extérieur.
Nous verrons aussi, et vous savez que c’est un des grands problèmes que nous rencontrons, madame Laborde, que lorsqu’il faut s’initier à des œuvres, rencontrer des créateurs, pratiquer soi-même, une organisation par périodes successives – une heure, une heure, une heure… – n’est pas toujours la meilleure solution. Or nous pratiquons cela depuis très longtemps dans l’éducation nationale et, là aussi, nous devons sans doute évoluer.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement parce que, je le crois, nous sommes d’accord sur le fond. Nous verrons ensuite comment nous pouvons accompagner au mieux ce projet.
Je voudrais conclure en disant que ce projet est doublement ambitieux. Il s’agit à la fois de revenir au lire, écrire, compter, c'est-à-dire à la maîtrise du socle, qui est fondamentale, et d’offrir à tous les enfants, quels que soient leur milieu et leur territoire, ce qui, selon la conception ― qui est aussi la nôtre ― de l’enseignement élémentaire, de base, de Jules Ferry, un ancien président de cette assemblée, accompagne les apprentissages fondamentaux, c'est-à-dire ce qu’il appelait l’éducation libérale, soit l’éducation aux arts libéraux.
Notre école a toujours porté cette exigence et nous voyons, d’ailleurs, aujourd’hui que dans les milieux défavorisés, même dans les endroits où il y a de la violence, cette sensibilité, ce sentiment, cette esthétique, l’aesthesis, permet à des enfants qui ne sont pas à l’aise dans des apprentissages beaucoup plus cognitifs dès le début de se développer et de réussir.
Je crois donc qu’il faut accepter cette idée de réunir le scolaire, le périscolaire et l’extrascolaire. Nous verrons bien ensuite, car, comme toujours, le mouvement va se faire pour partie en marchant.
M. le président. Madame Françoise Laborde, l’amendement n° 306 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Je le maintiens pour deux raisons.
Tout d’abord, si je le retire, ma collègue Catherine Morin-Desailly ne pourra pas s’exprimer sur ce sujet, alors même qu’elle semblait vouloir le faire. (Sourires.)
M. le président. C’est une bonne raison ! (Nouveaux sourires.)
Mme Françoise Laborde. Effectivement.
Ensuite – et c’est peut-être plus fondamental, monsieur le président –, je pense que, dans ce texte, il faut tout de même laisser la part « enseignement » sur le temps scolaire.
Les propos de M. le ministre pourraient me convaincre, mais je sais aussi que même sans ce problème de périodes successives d’une heure, dans certaines écoles du cycle maternelle-primaire, parce que l’on doit apprendre à lire, on oublie parfois que l’on doit faire également de l’éducation culturelle et artistique.
Voilà pourquoi je maintiens cet amendement, qui est plus qu’un amendement d’appel : il est l’expression d’une conviction personnelle.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. Je félicite Mme Laborde d’avoir déposé cet amendement. L’eût-elle retiré que je l’aurais repris ! (Sourires.) Madame, vous situez le débat sur l’éducation artistique et culturelle là où il le faut.
Les propos de M. le ministre me renforcent dans mon souhait que les choses soient clarifiées. Je m’explique.
Mme Laborde propose que ce soit dans le temps scolaire que soit dispensée l’éducation artistique et culturelle. S’agissant d’un texte sur la refondation de l‘école, je redis avec clarté que ce qui relève de l'éducation appartient à l’État.
Monsieur le ministre, vous êtes en train de nous expliquer ― et on touche là au débat sur les rythmes scolaires, qui aura lieu ultérieurement ― que tout cela, ce qui relève de l’école dans le temps scolaire et ce qui est extrascolaire, fait partie du même paquet. Tout cela fait partie d’un mouvement visant à ce que nos jeunes Français aient une meilleure éducation artistique et culturelle.
Attendez ! Mes chers collègues, réveillez-vous ! On est en train de nous expliquer qu’une partie de ces tâches vont incomber aux collectivités locales ! C’est précisément le débat que nous avons eu au sujet des rythmes scolaires.
Alors, monsieur le ministre, il y a ce qui relève de l’éducation nationale et vous avez les enseignants pour le faire. Les collectivités locales ne sont pas chargées de l’éducation, mais de l’animation culturelle et artistique. C’est une énorme différence !
Ne pas voter l’amendement de Mme Laborde signifierait aller dans le sens habilement tracé par le ministre, afin que, demain, il nous explique que la loi elle-même avait mis à la charge des collectivités territoriales une tâche qui est aujourd’hui au budget du ministre de l’éducation nationale.
Mes amis (Sourires.), pardon, mes chers collègues – j’ai dit « amis » car M. le ministre a utilisé assez largement ce terme, ce qui ne me choque pas –, réveillez-vous !
J’ai envie de convoquer quelqu’un qui fut notre collègue, bien que nous ne l’ayons pas connu, Victor Hugo. Je pense à lui parce qu’il est décédé le 22 mai, certes en 1885 ; c’est donc l’anniversaire de sa mort. En 1850, il avait tenu devant l’Assemblée nationale un discours retentissant sur ces questions-là. Bien sûr, nous n’avons pas le temps de lire le fleuve qui s’était alors épanché, mais, je vous l’assure, ce sujet est beaucoup plus important qu’il n’y paraît.
Merci encore, madame Laborde !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je comprends l’amendement de Mme Laborde, parce qu’il souligne ce que j’ai voulu dire dans mon intervention préalable sur cet article 6.
Il y a aujourd’hui une confusion entre le temps scolaire et le temps périscolaire tels qu’ils s’organisent dans la réforme des rythmes. D’où cette crainte que l’éducation artistique et culturelle, qui est une véritable ambition, ne puisse pas pleinement être mise en œuvre. Je m’explique.
La fameuse heure libérée, de 15 heures 45 à 16 heures 30, est censée être dédiée aux pratiques culturelles et/ou sportives.
Cette idée émane de la conférence nationale sur les rythmes scolaires qui s’est tenue pendant un an et à laquelle j’ai participé avec d’autres collègues, tels que Pierre Martin ou encore Serge Lagauche, qui ne siège plus parmi nous. L’objectif était de mieux équilibrer la journée, les apprentissages, en intégrant l’éducation artistique et culturelle, mais celle-ci devait bel et bien être confiée aux enseignants, en liaison, bien sûr, avec des intervenants extérieurs, des artistes confirmés ou encore des acteurs professionnels reconnus.
L’ambiguïté vient du fait que l’on ne sait pas sous la responsabilité de qui est placée cette fameuse heure, ni quelle sera son ambition.
D’ailleurs, actuellement, les maires nous alertent souvent sur le fait qu’ils n’auront pas les moyens d’assurer ce temps culturel ou sportif, n’ayant, pour ce faire, ni les locaux, ni les intervenants, ni les ressources. Se pose donc une véritable question d’égalité face à l’éducation artistique et culturelle.
C’est la raison pour laquelle nous tenons à souligner que la mise en œuvre des rythmes scolaires est précipitée : on n’a pas eu le temps de mesurer tous les enjeux, ni toutes les articulations nécessaires.
Monsieur le ministre, vous avez eu raison de le rappeler, l’idéal est que l’ensemble des temps consacrés à l’enfant se conjuguent pour donner à nos jeunes la formation la plus complète possible. Mais encore faut-il que celle-ci comprenne les enseignements artistiques, qui n’ont rien à voir avec l’éducation artistique, les premiers étant dispensés dans les écoles d’art, les conservatoires et les écoles de musique. C’est un véritable projet de territoire qu’il convient d’organiser à une échelle relativement pertinente, afin de donner à un enfant toutes les clefs pour réussir, quel que soit son choix.
Voilà pourquoi je comprends l’amendement de Mme Laborde, même si je défendrai tout à l’heure un amendement un peu différent, visant à réaffirmer la nécessité d’articuler tous les temps que nous avons évoqués.
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.
M. Joël Guerriau. Pour ma part, j’aurais regretté que Mme Laborde retire son amendement. En effet, j’estime que l’éducation artistique et culturelle est ô combien importante et qu’elle doit être, de fait, du ressort de l’État.
Notre collègue Jean-Claude Lenoir a évoqué l’intervention retentissante de Victor Hugo sur ce sujet en 1850. Permettez-moi de citer ses propos : « instruction gratuite et obligatoire [...] ; un immense enseignement public donné et réglé par l’État, partant de l’école de village, et montant de degré en degré jusqu’au collège de France, plus haut encore, jusqu’à l’Institut de France ; les portes de la science toutes grandes ouvertes à toutes les intelligences. Partout où il y a un esprit, partout où il y a un champ, qu’il y ait un livre ! »
Pour ce faire, l’État doit prendre toutes ses responsabilités. On ne peut pas considérer que l’éducation artistique et culturelle est importante sans que l’État, à son niveau, fasse en sorte que cet enseignement soit délivré de la même manière sur tout le territoire, qui est unique et indivisible.
Il n’est pas possible de dire que chaque commune fera comme elle pourra, en fonction des équipements dont elle dispose. Il est bien évident que l’éducation musicale sera facilitée si un conservatoire se trouve à proximité.
M. Jean-Claude Lenoir. Eh oui !
M. Joël Guerriau. De même, si la commune a un centre d’initiation au théâtre, comme c’est le cas dans la mienne, l’éducation au théâtre pourra bien sûr être intégrée dans le temps périscolaire. Elle ne manquera pas non plus d’étudiants en capacité d’intervenir si une université est située sur son territoire. Je pourrais multiplier les exemples.
Autrement dit, on crée une inégalité dans l’accès à la culture selon les territoires (MM. Pierre Martin et Michel Savin opinent.) et selon l’engagement que pourraient prendre les collectivités. Si l’on y ajoute que l’éducation artistique et culturelle peut être optionnelle, payante ou gratuite, le système devient de fait totalement inégalitaire, ce qui est inacceptable.
Cela trahit l’engagement de ceux qui, dans le courant du XIXe siècle, avaient voulu rendre l’école accessible à tous, afin de gommer les inégalités sociales telles qu’elles existent dans notre société. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous soutiendrons l’amendement de Mme Laborde.
Nous avions d’ailleurs fait la même proposition en commission il y a quelques jours, en précisant alors que nous n’étions absolument pas hostiles à l’idée de parcours. Il est de la responsabilité de l’État…
M. Jean-Claude Lenoir. Effectivement !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … d’organiser un égal accès à l’éducation artistique et culturelle sur tout le territoire.
Il s’agit d’une dimension essentielle du concept de culture commune – que nous défendons –, c'est-à-dire d’intelligence partagée parce que construite ensemble. L’éducation artistique et culturelle peut beaucoup y participer. Cela n’exclut nullement l’intervention des territoires et une articulation avec eux.
C’est pourquoi nous soutiendrons cet amendement.
M. Michel Savin. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Je comprends parfaitement les intentions de Françoise Laborde et des membres de son groupe, de même que j’ai bien entendu les interventions des membres de l’UC-UDI et du groupe CRC. Toutefois, je souhaite vous mettre en garde.
J’étais la première aux côtés de Marie Desplechin, que nous avons auditionnée, pour bien réaffirmer que les parcours artistiques et culturels ne pouvaient en aucun cas être une évacuation vers le facultatif ou vers l’unique support des collectivités et que ces matières restaient au cœur de l’école et de la classe, dans l’enseignement obligatoire.
D’ailleurs, la demande que vous portez très fortement est déjà inscrite dans le code de l’éducation. En effet, l’article L. 312–6, que personne ne remet en cause, prévoit que les enseignements obligatoires sont dispensés dans les écoles élémentaires et les collèges et qu’ils comportent un enseignement de la musique et des arts plastiques. De plus, elle sera réaffirmée à l’article 31 du projet de loi, aux termes duquel la formation primaire offre une éducation aux arts plastiques et musicaux dans la partie relative aux programmes obligatoires.
M. Jacques-Bernard Magner. Voilà !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. C’est pourquoi vous n’avez pas besoin, pour protéger, de porter votre rédaction. Toutefois, si vous la portez pour répéter cette obligation, nous vous accompagnerions si votre rédaction ne risquait de fermer les portes de l’école et de condamner la continuité du parcours.
Excusez mon expertise d’usage, mais si vous enfermez l’éducation artistique et culturelle dans l’école, nous allons nous retrouver confrontés à des problèmes similaires à ceux que j’ai connus pour les classes d’environnement : se mettre à genoux devant le conseil d’administration, désormais appelé conseil d’école, qui se réunit au moins une fois par trimestre, pour demander l’autorisation d’organiser une sortie, présenter les trente et un papiers d’assurance, sans parler des témoins de Jéhovah qui ne veulent pas laisser partir leur enfant de crainte qu’il ne soit hospitalisé en cas d’accident, bref toutes les tracasseries inimaginables.
Or, avec ce texte, nous voulions créer une fluidité avec les artistes, les intermittents, les jeunesses musicales et les intervenants extérieurs. À vouloir sécuriser quelque chose qui l’est déjà,…
M. Jacques-Bernard Magner. Absolument !
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. … je crains que vous ne finissiez par cloisonner, fermer, emmurer l’école et rompre ainsi avec le souffle que nous espérions donner.
J’en profite, madame Morin-Desailly, pour évoquer un amendement que vous allez bientôt défendre, relatif à la connaissance du patrimoine artistique local. Si cet amendement était adopté, les élèves ne seront pas prêts d’aller voir ce patrimoine ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste et sur de nombreuses travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Je vois bien où est l’inquiétude qui est la vôtre et quel est le malentendu.
S’il s’agit de dire que les enseignements artistiques tels qu’ils existent actuellement sont et demeurent, c’est une évidence, et nous l’avons constamment réaffirmé.
Je suis comptable, je vous l’ai dit et j’ai fait de même devant toutes les associations de professeurs, de ces milliers de professeurs qui, dans notre institution, font vivre ces enseignements. Il s’agit non pas d’enlever des enseignements, mais d’en ajouter et de coordonner ce qui existe et qui aujourd’hui ne l’est pas.
Si vous adoptez cet amendement, vous tuez le parcours d’éducation artistique et culturelle…
M. Jean-Claude Lenoir. Non !
M. Vincent Peillon, ministre. Tout le travail que nous avons mené avec les DRAC, le ministère de la culture, le patrimoine, les collectivités locales et les associations d’élus, pour essayer précisément de construire des synergies, s’arrêtera. Nous reviendrons à ce qui existe déjà, et que personne ne mettait en cause.
Aujourd'hui, nous garantissons – c’est une évidence – les enseignements artistiques tels qu’ils existent, tout en demandant un suivi, pris dans sa globalité, de tout le parcours scolaire du jeune afin d’articuler, sous la responsabilité des professeurs – c’est un parcours scolaire que nous introduisons dans le code de l’éducation –, ce qui se fait dans l’école et ce qui peut se faire en dehors d’elle.
Si votre inquiétude portait sur une remise en cause des enseignements artistiques, sachez que tel n’a jamais été le cas. Si vous voulez les faire cesser, c’est votre responsabilité ! Mais il faut que vous mesuriez ce que vous faites : il n’y aura plus de parcours d’éducation artistique !
M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’est pas vrai !
M. Jean-Claude Lenoir. Vous exagérez !
Mme Catherine Morin-Desailly. Je demande la parole, monsieur le président.
M. le président. Ma chère collègue, vous vous êtes déjà exprimée.
Mme Catherine Morin-Desailly. Certes, mais il s’agit d’un débat important, monsieur le président.
Je souhaite simplement revenir brièvement sur les propos de Mme la présidente de notre commission. Elle s’est référée au texte en vigueur, qui ne vise que les arts plastiques et la musique. Vous en conviendrez, c’est tout à fait restrictif. Le théâtre, le cinéma et bien d’autres disciplines encore font partie de l’ensemble des disciplines qui concernent les arts et la culture à l’école.
Je le répète, notre collègue Françoise Laborde propose une mesure de prudence : nous voulons être assurés que l’éducation artistique et culturelle proposée sera dispensée sur le temps scolaire. Voilà la véritable question !
M. le président. Nous avons bien compris avec cette intervention renforcée. (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 306 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 6, première phrase
Remplacer le mot :
favorise
par les mots :
vise à
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement tend à donner une véritable ambition à l’éducation artistique et culturelle. Les termes « vise à » marquent une plus grande volonté dans l’objectif à atteindre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. J’entends bien que vous vouliez donner un peu plus de force au texte. Mais les mots ont un sens. Les termes « vise à » impliquent une autre démarche, et peuvent être de nature à entraîner une dérive.
Je ne veux pas que l’on transforme cette sensibilisation à l’éducation artistique et culturelle, qui favorise précisément l’épanouissement et la sensibilité des enfants, en quelque chose qui s’apparenterait à un apprentissage exhaustif. Cela reviendrait à demander aux enfants d’atteindre un niveau, par exemple, établir un inventaire ou en réciter un, pour ce qui concerne la connaissance du patrimoine.
Pour ma part, je préfère de beaucoup le mot « favorise » ; je ne l’associe nullement à une ambition moindre, mais à des pratiques différentes.
En conséquence, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Scouarnec, P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 6
1° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
L’éducation artistique et culturelle est principalement fondée sur les enseignements artistiques.
2° Deuxième phrase
a) Remplacer les mots :
L’éducation artistique et culturelle
par le mot :
Elle
b) Après le mot :
comprend
insérer le mot :
également
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement fait écho au débat qui a eu lieu sur l’amendement n° 306 rectifié. Nous souhaitons réaffirmer la responsabilité de l’État pour assurer un accès égalitaire à l’éducation culturelle sur l’ensemble de notre territoire.
Marie Desplechin, que Mme la présidente de la commission a déjà citée il y a quelques instants, dresse ce constat : « il est certain que les ressources – artistes, établissements culturels – sont elles-mêmes inégalement réparties sur le territoire national et que leur mobilisation au service de la généralisation de l’éducation artistique et culturelle demandera un effort important et surtout une action volontaire et durable ». Elle ajoute : « c’est bien sûr l’État qui est attendu pour engager une action de rééquilibrage ».
Partant, nous entendons nous assurer que l’éducation artistique et culturelle sera la plus égalitaire possible pour tous nos élèves. Nous sommes conscients que l’expérience locale et périscolaire est utile et que les actrices et les acteurs locaux doivent avoir la possibilité de participer à l’éducation artistique et culturelle des enfants, comme M. le ministre l’a suggéré voilà quelques instants. Seulement, comme Marie Desplechin, nous sommes conscients aussi que la notion de parcours est par essence inégalitaire. Toutefois, nous n’en proposons pas la suppression.
Nous voulons réaffirmer que l’éducation artistique et culturelle comprend, en plus du parcours local, des enseignements artistiques qui font partie intégrante de la formation scolaire primaire et secondaire et qui constituent la base de cette éducation. Le parcours local doit être considéré comme un complément – indispensable, mais un complément.
Cette conception de l’éducation artistique et culturelle n’exclut pas, bien au contraire, l’association d’actrices et d’acteurs locaux extérieurs à l’école. Notre intention est simplement d’éviter que cette éducation ne soit pour l’essentiel renvoyée aux temps extrascolaire et périscolaire.
Mes chers collègues, je vous rappelle que l’éducation artistique est mentionnée dans des articles fondamentaux du code de l’éducation. Ce projet de loi la place au nombre des principes généraux de l’éducation et affirme qu’elle remplit des missions générales du service public de l’enseignement. Dès lors, comment comprendre que des missions fondamentales de l’éducation nationale soient assurées principalement en dehors du temps scolaire, c’est-à-dire de manière inégalitaire selon le territoire et selon l’établissement ?
En définitive, notre amendement apporte une réponse à la question soulevée par l’amendement précédent, que nous n’avons pas pu adopter.
Monsieur le président, nous demandons un vote par scrutin public sur l’amendement n° 86.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Madame David, votre amendement me convient davantage que le précédent.
Votre formulation me semble meilleure parce qu’elle correspond au principe que j’ai exposé et que M. le ministre a confirmé : il est hors de question d’enlever du temps scolaire les enseignements artistiques, qui y ont toute leur place. Du reste, nous savons qu’à l’école primaire c’est souvent par l’intermédiaire des enseignements artistiques que les enfants peuvent entrer dans les apprentissages. Ce principe est affirmé et il n’est absolument pas question de le remettre en cause.
Les auteurs de l’amendement n° 86 prennent en compte le parcours artistique et soulignent sa complémentarité avec les enseignements, ce qui correspond totalement à notre position.
Nous partageons vraiment davantage leur point de vue que celui des auteurs de l’amendement précédent. Compte tenu de l’avis que j’ai donné il y a quelques instants, j’émets sur l’amendement n° 86 un avis de sagesse. (Murmures sur les travées de l’UMP.)
M. Jacques-Bernard Magner. Très bien !
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas ce qui a été décidé en commission !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cet amendement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Avec cet amendement, la situation n’est pas la même que précédemment. En effet, ses auteurs veulent conforter les enseignements artistiques et réaffirmer que l’éducation nationale est à la base de l’éducation artistique et culturelle, mais sans fermer la porte au reste. Cette proposition ne me pose pas de problème et je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Permettez-moi d’attirer votre attention un instant sur les propos qui ont été tenus. L’école est le lieu de l’égalité car les élèves y reçoivent les mêmes enseignements. Les fonctionnaires de l’État assurent une égalité parfaite et, sur ce plan, il n’y a pas de progrès à faire : le temps scolaire est le même pour tous. Les inégalités, elles sont dans le temps périscolaire et extrascolaire, précisément celui que nous essayons organiser.
Par conséquent, ce n’est pas en insistant uniquement sur le temps scolaire que vous lutterez contre les inégalités. Dans ce domaine, c’est déjà fait ! En revanche, toute notre ambition consiste à regagner du temps public sur le temps privé. Il n’y a qu’en France que l’on considère que, en dehors du temps scolaire, c’est chacun chez soi !
Il y a là une erreur philosophique fondamentale. Si nous déclinons à ce point dans les classements internationaux et dans l’ouverture et la réussite de notre jeunesse, c’est parce que nous restons figés sur ces positions et que nous ne faisons même pas confiance aux acteurs locaux autour de l’école. Pourtant, ces acteurs, on fait parfois appel à eux ; mais, tout à coup, on n’en parle plus !
Je crois qu’on se trompe profondément. Je souhaite que l’égalité progresse et je pense que, pour cela, il faut associer au temps scolaire obligatoire, qui est le même pour tous, le temps autour de l’école. Songez que nous sommes le pays qui donne le moins de temps public à ses enfants, non pas seulement dans l’OCDE, mais dans le monde ! Ce sont les fameux 144 jours.
Je tenais à rectifier cette erreur philosophique fondamentale. L’égalité est dans l’école, l’inégalité à l’extérieur de l’école. C’est en articulant les deux temps, bien sûr, sous la responsabilité des enseignants, qu’on fera reculer les inégalités !
En définitive, l’amendement n° 86 ne me pose aucun problème, mais je pense que les arguments employés pour le soutenir sont exactement contraires aux arguments justes.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention sur la confusion sémantique permanente entre « éducation artistique et culturelle » et « enseignements artistiques ». Je vais tenter de distinguer précisément ces deux notions.
L’éducation artistique et culturelle, telle qu’elle est ambitionnée dans le projet de loi, est une sensibilisation permanente aux arts et à la culture à travers l’ensemble des disciplines. En français, en histoire et en géographie, mais aussi dans les autres matières, des possibilités existent d’aborder les arts et la culture, de recevoir un artiste, de le mettre en résidence au sein de l’école ou de se rendre dans un musée. Cette sensibilisation aux arts et à la culture, il est extrêmement important de l’instaurer sur le temps scolaire ; je comprends nos collègues qui insistent sur ce point.
Quant aux enseignements artistiques, ils correspondent à l’apprentissage d’une discipline, par exemple d’un instrument de musique, de manière technique et approfondie. Ils sont assurés dans certains collèges ou dans les établissements spécialisés, que les collectivités territoriales financent très largement. On ne peut pas demander que l’ensemble de ces enseignements soient dispensés à l’école. Ce n’est pas forcément à l’école qu’on apprendra la harpe, l’accordéon ou les percussions. Certes, dans certains établissements scolaires, des instruments de musique sont enseignés ; mais tous les enseignements artistiques n’ont pas lieu à l’école !
Dans ces conditions, l’affirmation que « l’éducation artistique et culturelle est principalement fondée sur les enseignements artistiques » ne me paraît pas exacte. Je comprends l’ambition défendue par Mme David, mais elle ne correspond pas à la réalité.
Si nous voulons défendre collectivement une grande ambition de démocratisation culturelle pour nos jeunes, il faut réaffirmer un projet global qui intègre bien entendu le temps scolaire, comportant une éducation artistique et culturelle obligatoire, mais aussi le temps périscolaire dégagé pour les rythmes, sur lequel il faut favoriser un complément de sensibilisation.
Nous devons aussi nous assurer que la décentralisation des enseignements artistiques mise en œuvre en 2004 soit définitivement débloquée. Aujourd’hui, ce n’est toujours pas le cas, de sorte que l’accès de nos plus jeunes concitoyens aux enseignements artistiques est totalement inégalitaire.
Telle est, mes chers collègues, l’ambition que nous devrions promouvoir. En ce qui concerne l’amendement n° 86, je ne peux le voter en l’état, même si j’en comprends le sens, parce qu’il n’utilise pas des mots justes et conformes aux réalités.
M. Michel Savin. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.
M. Jacques-Bernard Magner. Nous avons bien entendu les explications de Mme la rapporteur et de M. le ministre. Chers collègues du groupe CRC, le groupe socialiste votera votre amendement, ce qui devrait nous permettre de faire l’économie d’un scrutin public…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous en avons fait la demande !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, je souhaite vous répondre. Je suis tout à fait d’accord avec ce que vous avez dit au sujet des inégalités. Notre intention est de nous assurer qu’au sein de l’éducation nationale l’enseignement artistique sera un vrai enseignement de qualité portant sur la culture et le patrimoine.
En effet, il ne faudrait pas que cet enseignement intégré au cursus scolaire soit un enseignement, je ne dis pas au rabais – je n’aime pas l’expression –, mais minimaliste, et que la plus grande partie de l’enseignement artistique soit assurée pendant le temps extrascolaire. Car, monsieur le ministre, je suis bien d’accord avec vous : c’est dans le temps extrascolaire que les inégalités sont les plus nombreuses.
J’entends bien que vous voulez, en mettant en place le parcours culturel, redonner du temps public à nos enfants pour permettre un meilleur apprentissage au sein de notre école publique, dans le domaine culturel mais aussi de façon globale. Seulement, ce temps extrascolaire, qui va le prendre en charge financièrement ?
M. Jean-Claude Lenoir. Voilà ! C’est bien le débat !
Mme Annie David. À un moment ou à un autre, l’aspect financier entre toujours en compte !
En fonction des territoires et des moyens des collectivités territoriales, selon qu’il y a un conservatoire, une école de théâtre, comme sur la commune de M. Guerriau, ou un musée, le parcours extrascolaire de nos enfants ne sera pas égalitaire s’il n’y a pas un pilotage global assuré par l’éducation nationale pour définir l’enseignement minimal devant être reçu pendant le temps extrascolaire.
Peut-être, madame Morin-Desailly, les termes de notre amendement ne sont-ils pas tout à fait exacts. En tout cas, notre intention est de permettre un véritable enseignement culturel dans le temps scolaire et dans le temps extrasolaire.
En même temps, la différence territoriale a aussi son importance. Chaque territoire est différent…
Mme Annie David. … et les cultures territoriales doivent être incluses dans ce parcours. Il faut seulement qu’il y en ait dans tous les territoires !
Telles sont, monsieur le président, les explications complémentaires que je souhaitais donner au Sénat ; il est vrai qu’en trois minutes on n’a pas toujours le temps de tout dire !
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je tiens à formuler une remarque de forme. Madame la rapporteur, voilà trois fois, sauf erreur de ma part, que vous donnez un avis différent de celui qui a été émis en commission.
M. Michel Savin. Oui !
Mme Sophie Primas. C’est le cas notamment à propos de l’amendement n° 86.
Bien sûr, la réflexion peut faire changer d’avis.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. C’est évident.
Mme Sophie Primas. Néanmoins, il serait bon que le Sénat ait connaissance de la décision de la commission. (MM. Jacques Legendre et Michel Savin acquiescent.)
Nous avons eu cette discussion avec Mme la présidente de la commission, puisque nous avons examiné les amendements très rapidement. Certes, la pensée peut évoluer. Reste que, pour la forme, il serait utile que le Sénat connaisse la décision prise par la commission.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. Michel Savin. Sinon, ça ne sert à rien !
Mme Sophie Primas. En ce qui concerne l’amendement n° 86, je signale à nos collègues que l’avis de la commission était défavorable.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Oui, mais seulement pour celui-là !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Vous avez raison, madame Primas, de rappeler la décision prise en commission. Mais vous avez bien vu ce qui s’est passé : sur l’amendement de Mme Laborde, un avis défavorable a été émis en commission. Cependant, ses explications nous ont conduits à préciser les raisons de ce rejet : les garanties existaient ; nous ne voulons pas fermer la porte. Du coup, l’amendement suivant, qui, dans la foulée, n’avait pas reçu un avis favorable, est devenu une espèce de repli intelligent, parce qu’il portait les garanties sans fermer la porte.
Vous avez raison, ma chère collègue, il est nécessaire que nous soyons précis. La commission a décidé, et l’évolution du débat amène Mme la rapporteur à vous proposer un autre avis que celui qui avait été émis en commission.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Il s’agit tout de même d’une question importante pour notre assemblée : le rapporteur doit transmettre l’avis émis par la commission.
Si, au cours de la discussion, l’avis est amené à évoluer, le rapporteur doit préciser qu’il adopte une nouvelle position à titre personnel, tout en rappelant que la commission avait émis un avis différent. Telles sont, selon moi, les bonnes pratiques parlementaires.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Legendre, vous aviez, me semble-t-il, fait état de l’impression désagréable que M. le ministre distribuait les bons points et les mauvais points.
Pour ma part, j’accepte le mauvais point que vous m’attribuez. Désormais, lorsque la discussion au sein de notre assemblée m’amènera, à titre personnel, à évoluer par rapport à ma réflexion initiale, je mentionnerai l’avis de la commission, tel qu’il a été émis. Je me permettrai ensuite de donner mon avis personnel, pour tenir compte de l’enrichissement de nos débats. (Très bien ! sur plusieurs travées de l'UMP.)
M. le président. Voilà qui est clair !
Je mets aux voix l'amendement n° 86.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que Mme la rapporteur, à titre personnel, ainsi que le Gouvernement s’en remettent à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 230 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l’adoption | 176 |
Contre | 169 |
Le Sénat a adopté.
L'amendement n° 59, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC, est ainsi libellé :
Alinéa 6, dernière phrase
Après le mot :
localement
insérer les mots :
et s'appuie sur les expérimentations menées par les contrats locaux d'éducation artistique
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Il s’agit d’un amendement relativement simple, visant à préciser que les parcours d’éducation artistique et culturelle s’appuient sur les expérimentations menées par les contrats locaux d’éducation artistique, les CLEA, qui sont de bons outils ayant fait leur preuve. Ils associent à la fois les collectivités territoriales, l’école et les services déconcentrés du ministère de la culture et du ministère de l’éducation nationale, au travers des rectorats, et portent un certain nombre d’ambitions et d’objectifs liés à la sensibilisation aux arts et à la culture, s’appuyant sur des thématiques particulières.
L’intérêt des CLEA, c’est qu’ils offrent à un ensemble de classes un parcours collectif, permettant à la fois de partager un apprentissage et, par la suite, de construire une culture commune.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 58, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les collectivités territoriales concernées doivent être associées à la mise en œuvre de ce parcours.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement vise à repréciser que les collectivités territoriales concernées doivent être associées à la mise en œuvre du parcours d’éducation artistique et culturelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Il s’agit d’une évidence : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable, car une telle disposition figure d’ores et déjà dans le projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 395, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il est mis en place dans les différents temps éducatifs, scolaire, périscolaire et extrascolaire.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la rapporteur, il nous serait tout de même agréable de connaître les raisons ayant conduit la commission à rejeter un amendement ! S’entendre répondre « Défavorable » sans autre explication n’est pas très satisfaisant intellectuellement. Je n’ai pas compris pourquoi vous refusiez de prendre en compte les expérimentations menées par les CLEA dans les parcours d’éducation artistique et culturelle.
L’amendement n° 395 vise à réaffirmer l’importance d’une éducation artistique et culturelle mise en œuvre prioritairement sur le temps scolaire, conformément à l’amendement défendu tout à l’heure par Mme Laborde. Mais il tend également à offrir la possibilité de la mettre en œuvre sur les temps périscolaire et extrascolaire. Il s’agit bien, en effet, d’un tout et d’une ambition la plus large possible pour les plus jeunes.
Cet amendement est presque un amendement d’appel. Dans ces temps quelque peu compliqués où la réforme des rythmes scolaires n’a pas encore été clarifiée, il paraît difficile d’imposer aux collectivités la manière dont celles-ci s’empareront de ce « complément d’âme », si je puis dire, que constituent les activités culturelles complémentaires au temps scolaire.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cet amendement est en contradiction avec l’amendement n° 306 rectifié, en faveur duquel vous avez voté, défendu par Mme Laborde, qui visait à restreindre le parcours culturel et artistique au temps scolaire. Votre amendement tend au contraire à ne pas les limiter au seul temps scolaire, conformément à ce que nous avons souhaité et à ce qui est prévu par la rédaction actuelle.
Cet amendement étant satisfait, je vous demande donc, ma chère collègue, de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 395 est-il maintenu, madame Morin-Desailly ?
Mme Catherine Morin-Desailly. Je le maintiens, monsieur le président, m’en remettant à la sagesse de notre assemblée.
L’amendement n° 306 rectifié de Mme Laborde ne spécifiait pas que l’éducation artistique et culturelle se déroulait exclusivement sur le temps scolaire.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Mais si !
Mme Catherine Morin-Desailly. Par ailleurs, mon collègue Joël Guerriau me rappelle à l’instant qu’il n’a pas été adopté.
Je propose donc, mes chers collègues, de suivre l’avis exprimé par M. le ministre, qui a bien expliqué tout à l’heure l’ambition de l’ensemble de la réforme pour l’éducation artistique et culturelle, ambition qui correspond, me semble-t-il, aux dispositions prévues par cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 169, présenté par Mmes Bouchoux et Blandin, M. Gattolin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…° Au deuxième alinéa, après le mot : « plastiques », sont insérés les mots : « et visuels, ».
La parole est à Mme Corinne Bouchoux.
Mme Corinne Bouchoux. Nous référant aux précisions apportées précédemment au cours de la discussion, nous estimons que les parcours culturels et artistiques pour l’éducation artistique et culturelle sont une bonne chose.
Ce dispositif englobe plusieurs composantes, ce parcours s’effectuant dans le cadre d’une suite articulée d’expériences dans les divers domaines de l’art. Elle doit permettre à l’enfant de s’exprimer, d’éprouver et de réfléchir. Il s’agit d’intégrer la dimension artistique, sous ses diverses formes : pratiques personnelles et collectives, découverte des œuvres du patrimoine et de la création contemporaine, partenariat avec des artistes, histoire des arts, etc. L’objectif, nous l’avons dit, est de favoriser l’émergence d’une école imaginative alliant savoir et créativité, que réclament les mutations du monde contemporain.
Outre l’indispensable coordination évoquée tout à l’heure avec les collectivités territoriales, et afin que la palette des activités offertes à la jeunesse soit en variété et en qualité, il convient de mieux spécifier les objets sur lesquels porte non seulement l’éducation artistique et culturelle, mais aussi les parcours.
Aussi, cet amendement vise à prévoir l’enseignement des arts visuels, qu’il convient de ne pas oublier, en complément de celui des arts plastiques. C’est d’ailleurs un usage de la commission de la culture que de parler des « arts plastiques et visuels ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 6 bis
(Non modifié)
À l’article L. 121-5 du code de l’éducation, après les mots : « l’échec scolaire », sont insérés les mots : « , à l’éducation à la santé ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 192, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 121-5 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 121–5. -L'éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire contribuent à la rénovation du système éducatif, à la lutte contre l'échec scolaire, à la réduction des inégalités sociales et culturelles, et à l'éducation et à la santé. »
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Il s’agit d’un amendement rédactionnel concernant l’éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire qui contribuent à la rénovation du système éducatif.
M. le président. L'amendement n° 356 rectifié, présenté par MM. Lozach, Magner, Assouline, Chiron, D. Bailly, Antiste, Eblé, Domeizel, Vincent, Madrelle, Antoinette, Percheron, Andreoni, Rainaud et Germain, Mmes Blondin, D. Gillot, D. Michel, Laurent-Perrigot, Lepage, Khiari et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 121–5 du code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Les mots : « et le sport scolaire et universitaire » sont remplacés par les mots : « le sport scolaire et universitaire, et la contribution apportée par le sport aux apprentissages » ;
2° Après les mots : « l’échec scolaire », sont insérés les mots : « , à l’éducation à la santé et à la citoyenneté » ;
3° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Leur mise en œuvre vise la complémentarité entre les pratiques sportives scolaires, périscolaires et extrascolaires, dans le cadre des projets éducatifs territoriaux et de partenariats avec le mouvement sportif associatif. »
La parole est à M. Jacques-Bernard Magner.
M. Jacques-Bernard Magner. En introduisant l’article 6 bis dans le présent projet de loi, nos collègues députés ont souhaité compléter l’article L. 121-5 du code de l’éducation et préciser que l’éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire, qui contribuent à la rénovation du système éducatif, à la lutte contre l’échec scolaire et à la réduction des inégalités sociales et culturelles, jouent également un rôle en matière d’éducation et de santé. Néanmoins, bien que tout à fait opportun, cet ajout n’est pas suffisant.
En effet, le sport va bien au-delà du seul aspect physique ; il est, notamment, un vecteur d’apprentissage pour les autres matières étudiées par les élèves. Il permet d’apporter un éclairage à certaines disciplines. Ainsi, qu’il s’agisse de l’étude du corps humain en biologie, de la découverte d’un pays en géographie, ou de l’enseignement d’une langue étrangère, les possibilités offertes sont nombreuses. Les récents jeux Olympiques de Londres ont à cet égard donné l’opportunité à des enseignants d’étudier la langue et la culture anglaises.
De la même façon, les valeurs traditionnelles du sport, qu’il s’agisse du respect de l’autre ou de l’esprit d’équipe, transcendent largement le seul domaine sportif et peuvent s’appliquer, au quotidien, à la vie en société. On a coutume de dire que c’est sur un terrain de sport que peut se révéler un enfant.
N’en restons donc pas à une dimension « sportivo-sportive », si vous me permettez cette expression, mes chers collègues, de l’éducation physique et sportive. Aussi, il paraissait nécessaire d’apporter à l’article 6 bis les quelques précisions que nous vous soumettons.
Le groupe socialiste a également souhaité ajouter une phrase mettant en évidence le caractère primordial de la complémentarité entre les pratiques scolaires, périscolaires et extrascolaires. Cette complémentarité peut s’exprimer au moyen de projets éducatifs territoriaux et de partenariats avec le mouvement sportif associatif. Je rappellerai que ces projets éducatifs visent à proposer aux enfants un parcours éducatif cohérent et de qualité avant, pendant et après l’école. L’ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de l’éducation peut ainsi être sollicité ; il peut s’agir, par exemple, dans le cas qui nous intéresse, du ministère des sports ou d’associations à vocation sportive.
Le partenariat passé entre l’État et les collectivités doit permettre de soutenir des actions répondant à des besoins précis sur chaque territoire. Les activités proposées peuvent s’articuler avec les projets conçus sur le temps extrascolaire en matière, notamment, d’activités physiques et sportives.
Ces précisions nous semblaient nécessaires, mes chers collègues, afin de souligner l’objectif de cohérence que nous poursuivons : les temps scolaire, périscolaire et extrascolaire de l’enfant doivent être autant complémentaires que possible. Le rôle joué par le sport nous paraît, à cet égard, absolument fondamental.
M. le président. L'amendement n° 60 rectifié, présenté par Mmes Morin-Desailly, Férat et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC, est ainsi libellé :
I. - Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 121–5 du code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Après les mots : « l'échec scolaire », sont insérés les mots : « , à l'éducation à la santé » ;
2° Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le sport scolaire joue un rôle fondamental dans l'accès des jeunes aux sports et à la vie associative, créant une dynamique et une cohésion au sein des communautés éducatives et entre les écoles et les établissements. Il contribue à l'éducation à la citoyenneté.
« L'éducation physique et sportive contribue également à promouvoir le respect de l'éthique et des valeurs éducatives et humanistes du sport. Elle favorise l'égalité des chances des jeunes. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
Section 2 bis A
L'éducation physique et sportive
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. En commission, j’avais souligné que le sport avait été oublié dans le projet de loi, alors qu’il figurait dans le rapport annexé. Depuis, des amendements ont fleuri pour rattraper ce malheureux oubli.
Par le biais de l’amendement n° 60 rectifié, les membres du groupe UDI-UC entendent que la future loi indique formellement que, de la même manière que pour l’éducation artistique et culturelle, il est essentiel de mettre en avant le sport scolaire et d’affirmer son rôle dans le développement de l’élève et dans sa sociabilisation. L’article 6 bis ainsi rédigé complète le code de l’éducation. La soirée étant déjà bien avancée, je ne développerai pas davantage. Les explications que je viens de donner sont suffisantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Pour ce qui concerne l’amendement n° 192, la suppression de la notion d’« éducation à la santé » ne nous paraît pas pertinente. En effet, nous pensons que fixer pour objectif à l’éducation physique et sportive la contribution à cette notion est important.
En revanche, la commission est favorable à l’amendement n° 356 rectifié, puisque les modifications nécessaires ont été apportées.
Enfin, comme je l’avais indiqué en commission, l’amendement n° 60 rectifié semble moins précis que l’amendement n° 356 rectifié. Par conséquent, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote sur l’amendement n° 192.
M. Michel Savin. Madame le rapporteur, permettez-moi de vous donner lecture de l’amendement n° 192 : « L’éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire contribuent à la rénovation du système éducatif, à la lutte contre l’échec scolaire, à la réduction des inégalités sociales et culturelles, et à l’éducation et à la santé. » Pouvez-vous m’expliquer en quoi il exclut la santé ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je suis assez surprise par la différence entre les explications fournies en commission et celles qui sont apportées en séance plénière.
En commission, notre amendement n° 60 rectifié avait été retoqué d’emblée au motif que tout figurait déjà dans le code de l’éducation. Ce soir, madame le rapporteur, vous me dites formuler la même remarque quant aux dispositions ajoutées. Je veux bien convenir que la rédaction de l’amendement n° 356 rectifié soit meilleure. Je serais même prête à m’y rallier si toutefois elle était complétée et comportait la précision suivante, qui nous semble importante, à savoir que « le sport scolaire joue un rôle fondamental dans l’accès des jeunes aux sports et à la vie associative, créant une dynamique et une cohésion au sein des communautés éducatives et entre les écoles et les établissements. Il contribue à l’éducation à la citoyenneté. »
Nous avons été plusieurs à réagir à l’absence de mention du sport dans le présent projet de loi. Nous avons voulu compléter ce qui figurait déjà dans le code de l’éducation.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Monsieur Savin, dans la rédaction de l’article L. 121-5 du code de l’éducation que vous proposez, vous visez la contribution de l’éducation physique et sportive et du sport « à l’éducation et à la santé », alors que nous, nous visons la contribution « à l’éducation à la santé ». Ce n’est pas la même chose.
Madame Morin-Desailly, en commission – et je prends à témoin les participants à notre réunion –, j’avais indiqué que votre amendement n’était pas suffisamment normatif. Tout à l’heure, en donnant l’avis de la commission, j’ai transformé mes propos et dit que l’amendement n° 356 rectifié me paraît plus précis. Je reprends les mots que j’ai employés en commission : votre amendement n’est pas assez normatif.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Comme à notre habitude, nous avons écouté attentivement Mme Cartron. C’est pourquoi nous allons modifier notre amendement, de manière à tenir compte de ses remarques. Je laisse à notre collègue Savin le soin d’exposer la teneur de cette modification
M. le président. La parole est donc à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Monsieur le président, nous supprimons le dernier « et » figurant dans la rédaction actuelle de notre amendement, dont les derniers mots sont dorénavant « des inégalités sociales et culturelles, et à l’éducation à la santé. »
M. le président. Je suis donc saisi de l'amendement n° 192 rectifié, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir, et qui est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 121–5 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 121–5. -L'éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire contribuent à la rénovation du système éducatif, à la lutte contre l'échec scolaire, à la réduction des inégalités sociales et culturelles, et à l'éducation à la santé. »
Quel est l’avis de la commission sur cet amendement rectifié ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Cette modification change l’avis de la commission, car on en revient au texte du Gouvernement, ce qui nous convient.
M. le président. En conséquence, l’article 6 bis est ainsi rédigé et l'amendement n° 60 rectifié n'a plus d'objet.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
12
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 23 mai 2013 :
À neuf heures trente :
1. Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (n° 441, 2012-2013) ;
Rapport de Mme Françoise Cartron, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 568, 2012-2013) ;
Texte de la commission (n° 569, 2012-2013) ;
Avis de Mme Claire-Lise Campion, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 570, 2012-2013) ;
Avis de M. Claude Haut, fait au nom de la commission des finances (n° 537, 2012-2013).
À quinze heures :
2. Questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures quinze et le soir :
3. Suite de l’ordre du jour du matin.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 23 mai 2013, à zéro heure vingt-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART