M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° 24.
Mme Isabelle Pasquet. Je vais poursuivre nos explications concernant les conventions collectives.
Le monde agricole traverse une crise économique et sociale qui pèse lourdement sur les travailleurs du secteur et qui hypothèque gravement la mise en œuvre d’une agriculture respectueuse des hommes et des milieux et garantissant la sécurité alimentaire.
Des paysans en nombre croissant connaissent des situations de précarité et de désespoir et voient leurs conditions de travail, ainsi que la vie de leurs familles, se détériorer.
Il importe aussi de rendre les métiers de l’agriculture plus attractifs, notamment auprès des jeunes. Vous n’ignorez pas que ce secteur souffre d’un manque de main-d’œuvre qualifiée et de cette idée reçue que les métiers agricoles sont moins respectables.
Depuis 1945, le monde agricole en France a vu la diminution considérable de la petite paysannerie de subsistance et l’avènement des fermes modernes gérées par les paysans- agriculteurs, cultivateurs, éleveurs que l’administration française nomme les exploitants agricoles.
En à peine plus d’un demi-siècle, la population française a connu de profondes mutations économiques, démographiques, sociologiques. C’est particulièrement vrai dans le monde agricole : aujourd’hui, il n’y a guère plus d’un million d’exploitants agricoles en France, représentant à peine 4 % de la population active, alors que les actifs agricoles étaient dix millions en 1945.
Aucun autre secteur économique n’a connu une régression d’emplois aussi massive. Celle-ci est directement liée à la révolution verte, à la mécanisation et à l’emploi d’engrais de synthèse dans l’agriculture, qui ont conduit à une hausse importante de la productivité et à une concentration des terres au sein de quelques grandes fermes et exploitations agricoles.
Le danger de la volatilité des cours est aussi une grande difficulté pour le monde agricole en général et pour les coopératives en particulier. Non seulement les prix des matières premières agricoles subissent des variations de grande ampleur d’une saison à l’autre, mais, de plus, les cours sont d’une grande « volatilité » et oscillent fortement dans des périodes brèves. C’est un casse-tête pour des coopératives qui doivent gérer et vendre des stocks.
Il faut aussi tenir compte de la pénibilité de ce travail, qui est reconnue, je le disais déjà tout à l’heure en défendant cet amendement, sur la base de nombreux critères : la position normale de travail, le risque de maladie, les tâches particulièrement salissantes, pénibles, dangereuses ou insalubres.
Il y a là matière à décider d’une prise en compte financière intégrale de la complémentaire santé des salariés par l’employeur, qui, par la nature même des emplois et des lieux dans lesquels s’exercent ces emplois, connaît les risques auxquels s’exposent les personnels.
Aussi, monsieur le président, mes chers collègues, par cet amendement, nous souhaitons, sinon rendre ce dispositif efficace pour les salariés dans leur face à face avec leurs employeurs, au moins nous rapprocher, en y incluant des éléments de justice sociale, de l’esprit gagnant-gagnant, tant vanté par les signataires de cet accord.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Je voudrais profiter de cette explication de vote pour donner quelques éléments sur la nécessité d’une concurrence bien organisée dans le monde agricole, comme elle existait auparavant, par exemple au travers de la loi de 1966 instituant l’obligation d’assurance des personnes non salariées contre les accidents et les maladies professionnelles dans l’agriculture.
Lorsque, par cette loi, a été organisé, entre tous les prestataires – sociétés d’assurance, mutuelles… –, le système de couverture des risques, il en est résulté une offre diverse et des coûts très faibles pour les exploitants agricoles. Or le législateur a décidé, pour je ne sais quelle raison, de faire entrer tous ces dispositifs dans un système assurantiel unique, sous l’autorité de l’État. Globalement, le coût moyen de la cotisation a connu une inflation, puisqu’il a au minimum triplé, voire quintuplé.
Monsieur le ministre, même si nous n’aborderons certainement pas cette question ce soir, mais plutôt demain, je tiens à dire qu’il est nécessaire de laisser ouverte la concurrence entre les intermédiaires, quels que soient leur forme et leur statut – institutions de prévoyance, mutuelles, avec les différents dispositifs du code de la mutualité auquel elles peuvent être rattachées, et sociétés d’assurance.
Chère collègue, puisque vous avez également évoqué la question de la santé, sachez que les salariés des professions agricoles et des industries agro-alimentaires sont en général plutôt moins malades que ceux du régime général. C'est la raison pour laquelle, là aussi, à niveau égal de remboursement et de prestations, leurs cotisations sont inférieures.
Il en va de même pour la prévoyance, de nombreux métiers du monde agricole n’étant pas, contrairement à ce que vous avez dit, très exposés, mis à part les salariés travaillant notamment dans les exploitations agricoles. Dans ces cas, les salariés courent un risque, qui est aussi le plus élevé, celui de l’invalidité, couvert par la prévoyance et non par l’assurance santé.
Je tenais à le dire, car je suis tout de même assez surpris d’entendre affirmer depuis maintenant plusieurs heures que ce monde est proche de la fin. Même si je sais bien que nous connaissons des difficultés et que nous traversons une crise, il faut, me semble-t-il, regarder la situation avec lucidité et optimisme.
Offrir aux salariés, qui ont des revenus plutôt faibles, la chance d’avoir une complémentaire santé groupe qui serait obligatoire représente de toute façon un avantage, dès lors que l’entreprise participe au moins à hauteur de 50 %. Par ailleurs, la part de la cotisation de mutuelle payée par le salarié est également défiscalisée. Mes chers collègues, essayons de travailler utilement ensemble et gagnons du temps pour faire avancer le schmilblick !
M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote sur l'amendement n° 25.
M. Christian Favier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais commencer par m’associer complètement aux propos de ma collègue Éliane Assassi quant au triste spectacle que représente l’absence quasi-généralisée des élus de l’opposition ce soir dans notre assemblée sur un débat d’une telle importance. Il s’agit là, évidemment, d’un acte de mépris à l’égard du monde salarié qui ne me surprend pas venant de la droite. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-François Humbert. Cessez les agressions !
M. Christian Favier. Sans doute nombre d’entre nos collègues de l’opposition sont-ils plus occupés à préparer leurs déclarations de patrimoine qu’à venir travailler ici sur un projet comme celui-ci ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-François Husson. Vous n’êtes pas les mieux placés pour donner des leçons sur ce sujet !
Mme Éliane Assassi. Sur les questions de patrimoine, si !
M. le président. Mes chers collègues, je vous demande de vous en tenir au sujet qui nous occupe.
M. Jean Desessard. Le patrimoine ? (Sourires.)
M. Christian Favier. Nous vous proposons, avec cet amendement, de ne pas nous en remettre à des négociations de branche pour couvrir à 100 % le régime complémentaire de la complémentaire santé des assurés relevant de la convention collective des grands magasins et des magasins populaires.
Nous souhaitons en effet donner force de loi au financement intégral par l’employeur de la couverture complémentaire des salariés de cette branche, et ce pour diverses raisons.
Je pense notamment à la réalité des activités des personnels de cette branche et à leurs conditions de travail précaires : flexibilité, temps partiel, contraintes de travail lorsque la tâche est répétitive ou physiquement difficile, pression du chiffre, exigence de polyvalence.
On le sait, ces personnels sont soumis au quotidien à des contraintes très particulières qui exigent de leur part un investissement individuel continu. Les métiers du commerce et de l’habillement évoluent en permanence, notamment avec le développement de nouvelles technologies – gestion des stocks, informatique, commerce en ligne –, mais aussi avec les mutations des modes de consommation.
La particularité de ces travailleurs tient au fait qu’ils cumulent différentes formes de pénibilité : leur travail est physiquement difficile ; ils sont confrontés à des comportements parfois agressifs de la part de certains clients ; ils sont en permanence sous pression, en particulier de leur employeur.
Par conséquent, ils souffrent de nombreuses douleurs physiques et de pathologies, telles que les troubles musculo-squelettiques, voire, quand la pression est trop forte, de troubles psychologiques, comme des dépressions.
À la pénibilité pathologique, s’ajoute la répétitivité des tâches, en particulier pour les caissières, dont le travail se rapproche, dans une certaine mesure, de celui des travailleurs à la chaîne.
Les travailleurs se plaignent régulièrement de souffrir de problèmes de santé récurrents. Mis à part la fatigue, ils évoquant des douleurs multiples au niveau des poignets, des épaules, du dos et de la nuque, qui mènent régulièrement à l’apparition de tendinites.
Ils sont également confrontés à des formes de pénibilité temporelle. Leur vitesse de pointage est généralement chronométrée. Ce contrôle permanent les pousse à accélérer au maximum.
Par ailleurs, difficultés supplémentaires, leurs horaires fluctuent énormément et ils doivent régulièrement travailler le samedi, parfois même le dimanche. Ils sont engagés en général sur un contrat de 18 heures. Quand l’employeur a besoin de personnel supplémentaire, ce qui est fréquemment le cas, il leur demande de venir plus souvent. Étant en CDD et ayant un temps partiel, la plupart d’entre eux n’auront d’autre choix que d’accepter et de se plier aux injonctions de leur employeur.
Dès lors, le temps partiel, qui, a priori, devrait permettre de mieux concilier la vie privée et la vie professionnelle, devient plutôt contraint et pénalisant, car les travailleurs doivent véritablement s’adapter à une seule exigence : le temps de l’entreprise.
Dans cette branche, il y a 89 % de contrats à durée indéterminée et 32 % de salariés à temps partiel. Il y a là, me semble-t-il, matière à décider d’une prise en compte financière intégrale de la complémentaire santé des salariés par l’employeur.
Ainsi, par cet amendement, nous souhaitons sinon rendre ce dispositif efficace pour les salariés dans leur face à face avec leurs employeurs, au moins nous rapprocher, en y incluant des éléments de justice sociale, de l’esprit gagnant-gagnant vanté par le Gouvernement et les organisations syndicales signataires.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 180 :
Nombre de votants | 175 |
Nombre de suffrages exprimés | 161 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 81 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 141 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l'amendement n° 26.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaitais revenir à l’occasion de cette explication de vote sur quelques raisons justifiant la nécessité d’un financement intégral par l’employeur de la couverture complémentaire des salariés de l’hospitalisation privée.
La première raison tient au caractère même des métiers exercés par les professionnels de santé et par celles et ceux qui apportent par leur activité leur concours au fonctionnement des structures d’hospitalisation privée.
À l’évidence, l’exposition de ces personnels à de multiples risques sanitaires n’est pas à démontrer. Elle l’est d’autant moins que les conditions d’exercice de ces professions ne cessent de se détériorer, tant la gestion comptable de notre système de soins a fini par prendre le pas sur toute autre considération.
L’impossibilité constante et incontestable pour ces personnels de prendre librement leurs journées de repos, que ce soit dans le cadre des congés payés ou dans celui de l’aménagement et la réduction du temps de travail depuis les lois Aubry, renforce significativement les facteurs de risques en ajoutant la fatigue aux risques pathogènes.
Il y a là matière à décider d’une prise en compte financière intégrale de la complémentaire santé des salariés par l’employeur. En effet, par la nature même des emplois et des lieux dans lesquels ils sont exercés, l’employeur connaît les risques auxquels sont exposés les personnels, et cela quelles que soient par ailleurs sa vigilance et son implication dans la prise en compte des questions d’hygiène et de sécurité au sein de son établissement.
La seconde raison tient à la précarité de plus en plus grande des salariés de ce secteur. Nous savons bien que cette précarité n’est pas une invention quand se multiplient les réorganisations de services, opérées sur fond de rentabilité, les fusions-acquisitions au nom d’un actionnariat déconnecté des besoins territoriaux en matière de soins, les concentrations et les fermetures pures et simples d’établissements sous l’égide des agences régionales de santé, dont la mission est très clairement l’apurement, à n’importe quel prix, des comptes de la sécurité sociale.
Je crois donc utile que ces salariés puissent au moins bénéficier d’une prise en charge intégrale par leurs employeurs de leur couverture complémentaire, y compris en termes de portabilité, pour faire face à la maladie pendant le temps de transition précédant le retour à l’emploi, dans l’hypothèse d’une rupture de contrat de travail.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° 29. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme Isabelle Pasquet. Cette explication de vote est très importante, mes chers collègues, car l’industrie pharmaceutique est le secteur économique qui regroupe les activités de recherche, de fabrication et de commercialisation des médicaments pour la médecine humaine ou vétérinaire. C’est l’une des industries les plus rentables et importantes économiquement au monde.
Comme vous le savez, cette activité est exercée par les laboratoires pharmaceutiques et les sociétés de biotechnologie.
Si la droite s'est pleinement occupée, ces dernières années, de remplir les caisses des laboratoires pharmaceutiques, comme l'a démontré le rapport de la commission d'enquête présidée par notre ancien collègue François Autain, nous souhaitons, quant à nous, nous occuper des travailleurs du secteur, surtout au vu du contexte économique.
En effet, la casse industrielle bat son plein dans notre pays et l’industrie pharmaceutique n'est pas en reste. On peut même dire que l'industrie pharmaceutique est l'une des branches professionnelles qui, ces dernières années, a détruit le plus d'emplois. Qu’il s’agisse de la production, de la recherche, des métiers de la promotion, du tertiaire ou de la logistique, aucun métier de cette branche n'a été épargné.
Toutefois, pour ceux qui ont la chance de conserver leur emploi, les conditions de travail sont particulièrement difficiles. Je ne parlerai pas des risques évidents que présente la manipulation de produits chimiques. En revanche, un aspect des conditions de travail des salariés du secteur pharmaceutique est peu connu : le bruit.
En effet, dans les installations de production pharmaceutique, les équipements et les procédés utilisés émettent des bruits perturbants. En outre, les surfaces sont dures et lisses, de sorte que le son rebondit sur elles et se diffuse dans la pièce. Or le son affecte les travailleurs de nombreuses manières. Cette perturbation sonore est source de fatigue, de stress et de problèmes de communication. Elle a des répercussions non seulement sur la productivité et sur la sécurité, mais aussi sur la santé des travailleurs.
Les absences pour maladie et une rotation importante du personnel sont des conséquences objectives de ces conditions de travail dégradées.
C'est pourquoi, compte tenu des éléments dont je viens de vous faire part, le groupe CRC votera cet amendement, qui tend à mettre à la charge de l'employeur le financement de la couverture complémentaire pour ces salariés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 181 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 30.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement est très important ; c’est pourquoi je tiens à le justifier. Il vise, en effet, une meilleure prise en charge des pathologies liées à l'activité du secteur de l'habillement.
Les employeurs ont en effet le devoir et l'obligation de protéger leurs salariés. En finançant intégralement les frais relatifs à leur couverture complémentaire, ils enverront un signal fort à ces derniers. Ils leur permettront de bénéficier d’un suivi médical qu'ils peuvent avoir négligé – je pense à ceux qui sont les moins rémunérés –, en renonçant aux soins, comme de nombreux salariés le font déjà aujourd'hui.
La prévention médicale devrait être une priorité, ce qui passe notamment par le financement intégral de la couverture complémentaire pour les salariés de certaines branches particulièrement exposées, comme c'est le cas dans les industries de l'habillement.
En effet, cet amendement vise à prendre en compte la pénibilité des conditions de travail dans les industries de l'habillement – cela a été plusieurs fois répété et je ne m’étendrai donc pas sur ce point. Une priorité doit être accordée à une meilleure prise en charge des pathologies liées aux conditions de travail difficiles.
La bonne santé des salariés est profitable à tous, y compris aux employeurs. En effet, en assurant une couverture totale de santé aux salariés de ce secteur, les employeurs leur permettront un meilleur accès aux soins ainsi qu’une meilleure prévention des maladies musculo-squelettiques et des pathologies liées au stress en particulier.
Par ailleurs, ce suivi médical régulier permettrait d'améliorer les conditions de travail pour ces salariés qui bénéficieraient ainsi d'une meilleure prévention et d'une prise en charge au plus tôt des pathologies les plus graves, ce qui diminuerait d'autant le taux d'absentéisme.
Il est donc de l'intérêt de tous de financer intégralement cette couverture et de permettre ainsi un accord gagnant-gagnant.
Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que le secteur textile emploie majoritairement des femmes qui, comme vous le savez, mes chers collègues, connaissent, en leur défaveur, un écart salarial de 24 % par rapport aux hommes. Elles sont également plus touchées que ces derniers par les maladies musculo-squelettiques, comme l’a rappelé mon collègue Christian Favier.
Ainsi, une meilleure couverture maladie permettrait une meilleure prévention des maladies chez ces femmes qui ne disposent, pour certaines d'entre elles, que d'un SMIC ou de salaires assez faibles.
L'égal accès aux soins de nos concitoyens est une priorité dans les politiques publiques, et il est donc nécessaire d'aider au financement de la couverture maladie dans le secteur de l'habillement.
Je vous rappelle que, actuellement, 52 % des salariés bénéficient déjà d'une prise en charge de leur complémentaire santé. Ce sont aux autres salariés, les 48 % restant, que doivent s'adresser ces nouvelles dispositions. Elles doivent en effet concerner les salariés des industries de l'habillement, pour qu’il y ait un signal fort. Le financement intégral de la couverture complémentaire par leur employeur en est un. Il faut garder à l'esprit que, pour de nombreux salariés, ce texte ne comportera aucune avancée sociale si l'employeur ne finance qu'à hauteur de 50 % leur couverture complémentaire, puisque c'est déjà le cas pour eux.
Pour toutes ces raisons, le groupe communiste, républicain et citoyen auquel j'appartiens votera cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l'amendement n° 31.
Mme Éliane Assassi. L’article qui nous occupe semble constituer une véritable avancée, mais il ne règle pas le problème de la prise en charge par la société, au nom de la solidarité, de l’ensemble des personnes actives ou non.
D'ailleurs, pour la Mutualité française, le projet d'accord conclu entre les partenaires sociaux, qui ne concerne que les salariés, constitue une première étape dans cette voie.
Pour le collectif interassociatif sur la santé – le CISS –, que je cite, « nombre d'étudiants, de retraités, de professions indépendantes, de personnes sans emploi […] resteront confrontés aux difficultés d'accès aux contrats individuels de complémentaire santé ».
Dès lors, le président de la Mutualité française, Etienne Caniard, souligne qu’il faudra éviter de « consolider un système dual avec une couverture complémentaire facilement accessible pour les salariés et des contrats individuels inabordables pour ceux qui en ont le plus besoin ».
C'est bien là ce qui nous préoccupe. Il serait préférable – nous ne cessons de le dire – d'opter pour un modèle de société dans lequel la sécurité sociale assure une prise en charge à 100 %.
Comme le note le rapport de l'IRDES, l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé, de juillet 2012, « aujourd'hui, dans un contexte de baisse de la participation de l'assurance maladie aux dépenses de santé, les enjeux autour de la couverture complémentaire santé et de la prévoyance sont au cœur du débat public. En effet, bénéficier d'une complémentaire santé permet d'accéder plus facilement à des soins et d'y renoncer moins souvent pour des raisons financières ».
Ce constat a conduit les pouvoirs publics à mettre en place plusieurs dispositifs destinés à pallier les défaillances de notre système de sécurité sociale en facilitant l'accès à une complémentaire santé individuelle et la diffusion des complémentaires santés collectives.
Je pense ici, notamment, à l'exonération – bien entendu sous certaines conditions – de charges sociales des contributions employeur au financement de la complémentaire santé d'entreprise en 1985, à la loi Évin de 1989 prévoyant une portabilité des contrats de complémentaire santé d'entreprise lors du passage à la retraite ou de la perte d'emploi, à la loi Madelin de 1994 favorisant l'accès des travailleurs indépendants à la complémentaire santé, à la mise en place de la couverture maladie universelle complémentaire offrant un accès gratuit à la complémentaire santé aux ménages les plus pauvres en 1999, à la loi Fillon de 2003 réservant les exonérations de charges aux complémentaires santé collectives obligatoires et, enfin, à l'instauration de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé prévoyant une aide financière à la souscription d'une complémentaire santé sous condition de ressources en 2004.
Malgré cette abondante législation, nous constatons aujourd'hui que le problème de la couverture de nos concitoyens est d’une actualité inquiétante.
Mes chers collègues, vous comprendrez que face à ce constat social inacceptable d'un pays qui ne sait plus soigner ses citoyens, l'amendement que nous vous proposons est une goutte d'eau dans un océan. Cependant nous y tenons particulièrement, au nom de la défense des droits des salariés à qui vous allez imposer ce projet de loi.
C'est pourquoi nous voterons cet amendement qui, par dérogation à l'alinéa 20, tend à ce que l'employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983.
M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote sur l'amendement n° 32.
M. Christian Favier. Cette explication de vote concerne la prise en charge de la complémentaire santé des travailleurs du BTP. Vous le savez, le Haut Conseil du financement de la protection sociale a rappelé que le financement de la protection sociale était assuré à 77 % par les revenus du travail et à seulement 2 % par le capital.
Nous sommes d'ailleurs farouchement opposés aux formes de rémunération – participation, intéressement, actionnariat – qui échappent à toutes les cotisations sociales et donnent droit à des avantages fiscaux considérables pour les employeurs.
Selon les technocrates de Bercy et les idéologues du libéralisme, le grand responsable de la crise de l'emploi serait le coût du travail. Pour les entreprises qui délocalisent leurs activités ou qui exploitent, grâce à une Europe de régression sociale, des travailleurs à bas coûts, notre pays ne serait pas suffisamment attractif. C'est souvent le cas des entreprises du secteur du BTP, où le statut des salariés détachés permet un véritable dumping social.
Ainsi, pour le sujet qui nous intéresse, un rapport d'information très intéressant de notre collègue Francis Grignon, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 18 octobre 2006, a mis en exergue de graves problèmes.
Il indique que le détachement de travailleurs peut s’accompagner du maintien du rattachement des salariés au régime de protection sociale de leur pays d’origine. Cela signifie que le salaire d’un ouvrier étranger intervenant sur un chantier français continue d’être affecté des cotisations de son pays d’origine, dont le niveau est souvent beaucoup plus bas que celui des cotisations françaises. Il peut en résultat un différentiel de l’ordre de 30 % du salaire brut, comme c’est le cas entre la France et la Pologne.
C’est pourquoi, avant de parler d’attractivité du territoire, parlons d’abord de l’attractivité du BTP. À cet égard, il faut effectivement s’interroger sur les raisons qui conduisent malheureusement beaucoup de jeunes à se détourner de ce secteur qui, pourtant, embauche. Ce n’est pas sans lien, évidemment, avec la pratique de bas salaires, de conditions de travail difficiles et du manque de reconnaissance de la pénibilité. En outre, arrivés à la retraite, ce ne sont plus des travailleurs pauvres mais de pauvres retraités.
Vous nous proposez un accord qui va prétendument améliorer le sort des salariés. Nous vous répondons qu’il faudrait d’abord commencer par porter l’exigence d’une Europe sociale forte qui ne se fasse pas au détriment des travailleurs.
Quand vous leur imposez l’ANI, les travailleurs du secteur revendiquent une protection sociale innovante à dimension humaine au service de tous les salariés. Je pense, par exemple, au fait de porter la rente, la pension ou le complément de salaire à 100 % du salaire brut à la suite d’un accident quel qu’il soit, de prendre en charge la totalité du coût des consultations et des frais de santé – optiques, dentaires, pharmaceutiques, hospitaliers –, d’attribuer un capital décès ou d’autres mesures concernant le congé de paternité.
L’amendement que nous vous proposons d’adopter constitue un minimum pour ces ouvriers. Son adoption permettrait à ceux qui sont exposés à des conditions de travail particulièrement difficiles dans le bâtiment et les travaux publics, aux effets dévastateurs pour la santé, de pouvoir prétendre à une couverture complémentaire intégralement prise en charge par l’employeur.