Sommaire
Présidence de M. Charles Guené
Secrétaires :
MM. Jean-François Humbert, Gérard Le Cam.
2. Diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports. – Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire
Discussion générale : MM. Roland Ries, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
MM. Joël Labbé, Jean Bizet, Mme Mireille Schurch, MM. Vincent Capo-Canellas, Jacques Mézard, Michel Teston, Jean-Jacques Filleul.
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
Mme Mireille Schurch, M. le président.
Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch.
M. Michel Le Scouarnec.
Mme Isabelle Pasquet.
MM. Gérard Le Cam, Joël Labbé, Mme Laurence Cohen, MM. Michel Teston, Dominique de Legge, Vincent Capo-Canellas, Mme Mireille Schurch.
Adoption du projet de loi.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué.
3. Sécurisation de l'emploi. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Articles additionnels avant l'article 1er
Amendement n° 1 de M. Dominique Watrin. – M. Dominique Watrin, Mme Catherine Génisson, vice-présidente de la commission des affaires sociales ; M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. – Rejet.
Mme Isabelle Pasquet.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 2 de M. Dominique Watrin. – Mme Isabelle Pasquet, MM. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Michel Sapin, ministre ; Mme Catherine Procaccia. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 3 de M. Dominique Watrin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Mme Catherine Procaccia, MM. Ronan Kerdraon, François Zocchetto. – Rejet.
Amendement n° 4 de M. Dominique Watrin. – Mme Isabelle Pasquet, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Ronan Kerdraon. – Rejet.
Amendement n° 51 de M. Dominique Watrin. – Mme Laurence Cohen, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Roland Courteau, Hervé Marseille, André Reichardt, René Teulade.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel
4. Questions cribles thématiques
M. Alain Milon, Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Marisol Touraine, ministre.
M. Yves Daudigny, Mme Marisol Touraine, ministre.
Mmes Laurence Cohen, Marisol Touraine, ministre.
Mmes Aline Archimbaud, Marisol Touraine, ministre.
M. Gilbert Barbier, Mme Marisol Touraine, ministre.
M. René-Paul Savary, Mme Marisol Touraine, ministre.
M. Maurice Antiste, Mme Marisol Touraine, ministre.
M. René Teulade, Mme Marisol Touraine, ministre.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Charles Guené
5. Sécurisation de l'emploi. – Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
MM. Yves Daudigny, René-Paul Savary, Mme Isabelle Pasquet, M. Dominique Watrin, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Jean-Noël Cardoux, Mme Laurence Cohen, MM. Jean Desessard, Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social
Amendement n° 217 rectifié de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Retrait.
Reprise de l’amendement n° 217 rectifié par M. Dominique Watrin. – MM. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Michel Sapin, ministre ; Dominique Watrin, Pierre-Yves Collombat. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 217 rectifié bis.
Amendements identiques nos 6 de M. Dominique Watrin et 569 rectifié de M. Jean Desessard. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Jean-Vincent Placé, le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Jean Desessard, Pierre Laurent, Mme Catherine Procaccia. – Retrait de l’amendement n° 569 rectifié ; rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 6.
Amendement n° 5 de M. Dominique Watrin. – MM. Michel Le Scouarnec, le rapporteur, Michel Sapin, ministre. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 627 rectifié bis de Mme Catherine Procaccia. – Mme Catherine Procaccia. – Rectification de l’amendement.
Amendement n° 7 de M. Dominique Watrin. – Mme Laurence Cohen.
MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Jean Desessard. – Adoption de l’amendement n° 627 rectifié ter, l’amendement n° 7 devenant sans objet.
Amendement n° 8 de M. Dominique Watrin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Dominique Watrin. – Rejet.
Amendements nos 652 rectifié bis et 653 rectifié bis de M. Jean-François Husson. – Mme Catherine Procaccia.
Amendement n° 254 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Mme Marie-Noëlle Lienemann.
MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Mme Marie-Noëlle Lienemann, M. Dominique Watrin, Mme Catherine Procaccia. – Retrait de l’amendement n° 254 ; reprise de l’amendement n° 254 par M. Dominique Watrin ; retrait des amendements nos 652 rectifié bis et 653 rectifié bis ; rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 254 rectifié.
Amendement n° 10 de M. Dominique Watrin. – Mme Laurence Cohen, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre. – Rejet.
Amendement n° 9 de M. Dominique Watrin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 11 de M. Dominique Watrin. – MM. Michel Le Scouarnec, le rapporteur, Michel Sapin, ministre. – Rejet.
Amendement n° 531 rectifié de Mme Patricia Schillinger. – Mme Patricia Schillinger.
Amendement n° 532 rectifié de M. André Reichardt. – M. Jean-Noël Cardoux.
MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Mme Laurence Cohen. – Adoption de l’amendement n° 531 rectifié, l’amendement n° 532 rectifié devenant sans objet.
Amendement n° 570 de M. Jean-Vincent Placé. – MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre. – Rejet.
Amendement n° 256 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Mme Marie-Noëlle Lienemann, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Mme Isabelle Pasquet. – Rejet.
Amendement n° 562 de M. Jean Desessard. – MM. Jean-Vincent Placé, le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Jean-François Husson. – Rejet.
Amendement n° 13 de M. Dominique Watrin. – Mme Isabelle Pasquet, MM. le rapporteur, Michel Sapin, ministre. – Rejet par scrutin public.
Amendements identiques nos 14 rectifié de M. Dominique Watrin et 563 rectifié de M. Jean-Vincent Placé. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Jean Desessard, le rapporteur, Michel Sapin, ministre ; Jean-François Husson. – Rejet, par scrutin public, des deux amendements.
Amendement n° 560 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Pierre-Yves Collombat, le rapporteur, Michel Sapin, ministre. – Retrait.
Amendement n° 512 rectifié de M. Jean-Noël Cardoux. – M. Jean-Noël Cardoux.
Amendement n° 15 de M. Dominique Watrin. – M. Dominique Watrin.
Amendement n° 16 de M. Dominique Watrin. – M. Thierry Foucaud.
Amendement n° 17 de M. Dominique Watrin. – M. Michel Le Scouarnec.
Amendement n° 19 de M. Dominique Watrin. – M. Christian Favier.
Amendement n° 20 de M. Dominique Watrin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Amendement n° 21 de M. Dominique Watrin. – M. Dominique Watrin.
Amendement n° 22 de M. Dominique Watrin. – Mme Éliane Assassi.
Amendement n° 23 de M. Dominique Watrin. – Mme Laurence Cohen.
Amendement n° 24 de M. Dominique Watrin. – Mme Isabelle Pasquet.
Amendement n° 25 de M. Dominique Watrin. – M. Christian Favier
Amendement n° 26 de M. Dominique Watrin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Amendement n° 27 de M. Dominique Watrin. – M. Thierry Foucaud.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Raffarin
6. Saisine du Conseil constitutionnel
7. Sécurisation de l'emploi. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 28 de M. Dominique Watrin. – M. Dominique Watrin.
Amendement n° 29 de M. Dominique Watrin. – Mme Isabelle Pasquet.
Amendement n° 30 de M. Dominique Watrin. – Mme Laurence Cohen.
Amendement n° 31 de M. Dominique Watrin. – Mme Éliane Assassi.
Amendement n° 32 de M. Dominique Watrin. – M. Christian Favier.
Amendement n° 33 de M. Dominique Watrin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Amendement n° 34 de M. Dominique Watrin. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Amendement n° 35 de M. Dominique Watrin. – M. Dominique Watrin.
Amendement n° 36 de M. Dominique Watrin. – Mme Isabelle Pasquet.
Amendement n° 37 de M. Dominique Watrin.
Amendement n° 38 de M. Dominique Watrin. – Mme Laurence Cohen.
Amendement n° 39 de M. Dominique Watrin. – M. Pierre Laurent.
Amendement n° 40 de M. Dominique Watrin. – M. Christian Favier.
Amendement n° 41 de M. Dominique Watrin. – M. Thierry Foucaud.
Amendement n° 42 de M. Dominique Watrin. – M. Pierre Laurent.
MM. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement ; Jean-Noël Cardoux, Jean-François Husson, Dominique Watrin, Jean Desessard. – Rejet des amendements nos 512 rectifié et 15 ; rejet, par scrutins publics, des amendements nos 16 et 17.
M. Christian Favier. – Rejet de l’amendement n° 19.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Rejet des amendements nos 20 et 21.
Mme Éliane Assassi. – Rejet de l’amendement n° 22.
Mme Laurence Cohen. – Rejet de l’amendement n° 23.
Mme Isabelle Pasquet, M. Jean-François Husson. – Rejet de l’amendement n° 24.
M. Christian Favier. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 25.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Rejet des amendements nos 26 à 28.
Mme Isabelle Pasquet. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 29.
Mme Laurence Cohen. – Rejet de l’amendement n° 30.
Mme Éliane Assassi. – Rejet de l’amendement n° 31.
M. Christian Favier. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 32.
M. Pierre Laurent. – Rejet des amendements nos 33 et 34.
M. Dominique Watrin. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 35.
Mme Isabelle Pasquet. – Rejet des amendements nos 36 et 37.
Mme Laurence Cohen. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 38 ; rejet de l’amendement n° 39.
M. Christian Favier. – Rejet, par scrutins publics, des amendements nos 40 et 41.
M. Pierre Laurent. – Rejet de l’amendement n° 42.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Charles Guené
vice-président
Secrétaires :
M. Jean-François Humbert,
M. Gérard Le Cam.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports
Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports (texte de la commission n° 515, rapport n° 514).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Roland Ries, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, qui s’est réunie hier à l’Assemblée nationale et qui devait examiner les quarante-six articles restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports, est parvenue à un accord. Avant de vous en présenter les principaux éléments, je voudrais revenir rapidement sur les travaux du Sénat.
En première lecture, les 11 et 12 février dernier, la Haute Assemblée avait apporté plusieurs modifications.
Je commencerai par le sujet qui a concentré l’essentiel des débats, à savoir la taxe poids lourds.
Le Sénat a d’abord supprimé la prétendue « expérimentation alsacienne », qui avait perdu de sa pertinence compte tenu des retards successifs pris pour sa mise en place. Saisis par ailleurs de multiples demandes d’exonérations diverses et variées, nous avons été, me semble-t-il, raisonnables en n’en introduisant qu’une seule, sur l’initiative de plusieurs de nos groupes politiques, pour les véhicules de l’État et des collectivités territoriales affectés à l’entretien et à l’aménagement des routes. Il nous a en effet semblé quelque peu paradoxal de taxer ces véhicules alors même que la taxe est destinée à assurer en partie le financement de l’entretien des routes. Il est inutile de rappeler que les départements sont déjà très sollicités dans ce domaine, que les routes concernées relèvent de leur compétence ou non.
Le Sénat a également précisé que la liste des routes détenues par les collectivités territoriales faisant partie du réseau taxé pourrait être révisée, à leur demande, en cas d’évolution du trafic en provenance du réseau taxé.
S’agissant du mécanisme de répercussion, qui était l’objet principal de ce texte, nous avons prévu la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement afin d’en dresser le bilan, et ce pour tenir compte des incertitudes exprimées par certains acteurs concernés. Nous avons également précisé le régime applicable dans le cadre des contrats de location de véhicules avec conducteur.
Quant au reclassement dans la voirie départementale ou communale de ce que l’on appelle les « délaissés routiers », nous avons renforcé les garanties à l’égard des collectivités territoriales en précisant le mécanisme de compensation financière et en retardant l’application du dispositif, afin de laisser au Gouvernement le temps de publier la liste exhaustive des sections de routes concernées.
Dans le domaine du transport ferroviaire, nous avons introduit un nouvel article destiné à renforcer la transparence comptable de la SNCF vis-à-vis des autorités organisatrices de transport, en particulier les régions.
Nous avons également complété le volet maritime de ce texte. À l’article 22 par exemple, concernant le pouvoir de consignation du capitaine de navire, nous avons prévu le cas où le capitaine ne souhaiterait pas séparer l’enfant de ses parents consignés. Nous avons aussi ouvert à la personne consignée la possibilité de communiquer avec le procureur de la République, en plus du juge des libertés et de la détention.
L’Assemblée nationale, de son côté, a également enrichi le texte en complétant quelques dispositions, en précisant certaines formulations et en introduisant de nouveaux articles.
Lors de la commission mixte paritaire, les débats se sont à nouveau concentrés sur la taxe poids lourds, notamment du fait des votes de l’Assemblée nationale. Celle-ci a supprimé l’exonération des véhicules affectés à l’entretien et à l’aménagement des routes, mais exonéré les véhicules à citerne assurant la collecte de lait. Elle a enfin augmenté la minoration applicable aux régions dites « périphériques », en raison, précisément, de leur caractère périphérique.
Les sénateurs membres de la commission mixte paritaire ont exprimé leurs vives réserves sur ces mesures, qui diminuent les recettes de la taxe poids lourds et, partant, l’enveloppe de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, destinée à financer les infrastructures de transport.
Finalement, la commission mixte paritaire a décidé de réintroduire l’exonération pour les véhicules affectés à l’entretien des routes et de maintenir les deux autres mesures votées par l’Assemblée nationale. Je le regrette un peu, mais l’objectif de parvenir à un accord a prévalu sur nos réserves.
J’en viens aux articles introduits par l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement ; je n’irai pas jusqu’à dire qu’ils l’ont été de manière cavalière, monsieur le ministre, mais ils l’ont tout de même été de façon un peu précipitée. De fait, le Sénat n’a pas pu les examiner.
Le transfert de propriété de parcelles à Voies navigables de France, ou VNF, et les mesures relatives à l’aérodrome de Hyères sont des mesures ponctuelles qui n’appellent pas de commentaire particulier. Il n’en demeure pas moins que je m’interroge sur la présence de dispositions de ce genre dans un texte législatif.
De même, nous avons compris que le conseil portuaire introduit à l’article 21 ter, sur le modèle du conseil existant pour les grands ports maritimes, répondait à une lacune de notre droit. Une mission doit d’ailleurs prochainement en préciser les contours.
En revanche, nous avons modifié, avec l’accord des députés, l’article relatif à l’expropriation, sur lequel seule l’Assemblée nationale a été consultée, et dans des délais très courts. Après avoir saisi la commission des lois du Sénat, et à la suite d’un échange avec la Chancellerie, nous avons opté pour une nouvelle rédaction, qui paraît plus satisfaisante au regard de notre droit constitutionnel.
Enfin, nous ne sommes pas revenus sur les articles introduits au sujet du centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, ou CEREMA. Je vous avouerai que j’avais été un peu surpris, dans un premier temps, de l’ampleur du dispositif. Mais, à la lecture des documents fournis par le ministère, ce dernier apparaît comme le résultat d’un travail engagé voilà plus de deux ans, en lien avec les organisations syndicales, pour améliorer le pilotage stratégique des services techniques, regrouper une dizaine de structures et y associer davantage les collectivités. Nous avons donc fait confiance au Gouvernement sur ce point.
Pour conclure, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire me semble constituer un bon compromis entre les aspirations de nos deux assemblées. Je ne reviens pas en détail sur ses avancées principales, qu’il s’agisse de l’instauration du dispositif qui permettra – enfin ! – la mise en œuvre de l’écotaxe, de l’extension et de l’unification de l’application des conditions sociales de l’État d’accueil pour les gens de mer, qui répond à la question des conditions déloyales de concurrence, ou encore de la simplification des procédures d’expropriation des navires abandonnés. Nous avons longuement débattu de l’ensemble de ces sujets.
Aussi, mes chers collègues, je vous invite à vous prononcer en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – M. Vincent Capo-Canellas applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le président, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier M. le rapporteur de ses propos. Ce texte, qui nous a beaucoup occupés, est le fruit d’un travail de grande qualité, en particulier dans cette enceinte. Portant sur les différents modes de transport – le maritime, le fluvial, le routier et le ferroviaire –, il a vocation à promouvoir, d’une part, le développement durable, notamment grâce à sa mesure phare, l’écotaxe poids lourds, qui devient effective, d’autre part, une certaine vision du transport de demain.
Nous passons donc, s’agissant de la fiscalité écologique, du principe à la concrétisation.
Sur ce point, le dispositif que je vous ai présenté consiste à organiser le principe de répercussion sur les donneurs d’ordre. Même si celui-ci n’est pas parfait – certains d’entre vous l’ont dit –, il vise en tout cas à rassurer et à sécuriser les rapports entre les chargeurs et les transporteurs, qui, dans les faits, nous l'avons tous constaté, sont déséquilibrés. Toujours est-il que ce dispositif, qui a désormais le mérite d’exister, pourra évoluer à l’avenir. Nous en débattrons à mesure que la loi entrera en vigueur, notamment au sein de la commission du développement durable du Sénat.
Le secteur du transport routier, qui représente 40 000 entreprises et 400 000 emplois, est suffisamment sensible pour que nous prenions toute la mesure de la concertation qui a eu lieu avec l’ensemble des professionnels et mesurions la nécessité de mettre en place une législation qui soit responsable sur le plan tant économique que social.
Vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur, le Parlement a accompli un travail important. Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens une nouvelle fois à vous remercier sincèrement de la part que vous avez prise dans cette discussion, de votre investissement, de votre appréhension de ces sujets, qui ne sont pas simples. Monsieur le rapporteur, je vous remercie particulièrement pour le travail efficace conduit en commission mixte paritaire.
Après avoir été discuté et amendé par les deux assemblées, le projet de loi a donc été examiné hier en commission mixte paritaire, laquelle est parvenue à un accord sur un texte à mon sens équilibré, ce dont je remercie les membres de la commission.
Certes, vous l’avez indiqué à l’instant, monsieur le rapporteur, il a fallu faire des concessions. Mais ce sont les règles du jeu à ce stade de la procédure. Chacun a fait preuve d’une attitude constructive, ce dont je ne doutais pas. Je salue particulièrement cette volonté d’aboutir, essentielle pour garantir la pleine application du dispositif à une date précise et assurer aux professionnels du secteur routier une certaine visibilité et une forme de sécurité concernant les modalités de sa mise en œuvre.
Je crois en ce texte et en la volonté de chacun de réussir la mise en place fondatrice, dans le domaine des transports, de cette fiscalité écologique.
Je le redis devant vous, la France a beaucoup de retard dans ce domaine, et il est de notre responsabilité commune de le rattraper. Vous vous êtes engagés, notamment lors de la commission mixte paritaire, dans la droite ligne de la position qui a été adoptée à l’unanimité en 2009 lors de l’examen du projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. Je ne puis que vous en féliciter, mesdames, messieurs les sénateurs, car, en dépit de la difficulté de passer des principes à leur concrétisation, vous êtes restés fidèles aux objectifs fixés, à savoir parvenir à un texte non seulement équilibré, mais surtout opposable et supportable pour nos entreprises.
Je vous l’assure, je serai très attentif, à vos côtés, aux conclusions du rapport que le Gouvernement devra remettre au Parlement dans un an et demi sur l’application de ce dispositif. Vous l’avez demandé à juste titre, et je vous rejoins pleinement sur ce point. À partir de données objectives, nous pourrons établir un bilan pour ajuster, parfaire le dispositif en fonction de ses effets sur les acteurs de notre économie.
Je l’ai dit brièvement, nombre de secteurs de transport ont été évoqués dans ce projet de loi et plusieurs dispositions y ont été ajoutées ; il est vrai que l’engagement de la procédure accélérée aboutit à un examen rapide,…
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. … mais cette rapidité était exigée par les conséquences économiques que ces mesures devraient légitimement entraîner sur les secteurs de transport. Là encore, il fallait garantir la clarté pour chacun des acteurs économiques et sociaux.
Nous sommes donc intervenus dans différents secteurs, notamment fluvial et environnemental, afin de simplifier et de rendre opérationnelles les procédures permettant d’intervenir sur des navires abandonnés comportant des risques écologiques et environnementaux.
S’agissant du secteur maritime, ce projet de loi va dans le sens de l’action menée par le Gouvernement depuis son arrivée au pouvoir : la défense de l’économie maritime française. Nous l’avons montré à plusieurs reprises avec des batailles difficiles engagées pour la défense du pavillon français, de l’emploi maritime français dans des dossiers que vous suivez comme Sea France, Brittany Ferries et aujourd’hui My Ferry Link. Mais il en est d’autres qui sont d’actualité. Soyez assurés de ma pleine implication pour défendre ce pavillon français, notamment dans un dossier qui mobilise toute notre énergie : la Société nationale maritime Corse-Méditerranée, ou SNCM, qui est encore confrontée à des décisions concernant son avenir. J’y serai particulièrement attentif.
Je reviendrai maintenant brièvement sur l’article 23, qui a fait débat, pour préciser la position du Gouvernement et la doctrine qui guide notre action.
Au travers de cet article, nous souhaitons éviter que des navires de pavillons étrangers ne viennent opérer sur des lignes nationales dans des conditions sociales parfois inacceptables, en tout cas différentes de celles qui sont imposées au pavillon français, et selon une concurrence déloyale. C’est la raison pour laquelle je suis particulièrement attaché à cet article dont la lecture doit être la plus précise possible, afin qu’il ne lui soit pas donné une vision et une portée qui dénatureraient à la fois sa réalité, son fondement et la volonté qui le sous-tend.
J’espère, sans trop d’inquiétudes, obtenir une nouvelle fois votre confiance, avant de vous renouveler mes remerciements pour la qualité du travail effectué, qui est annonciateur d’autres échanges entre nous.
Mesdames, messieurs les sénateurs, les débats sur ce projet de loi ont été de haute teneur et se sont déroulés dans un climat serein. Je salue l’implication très forte dont vous avez fait preuve et votre grand sens des responsabilités, qui font honneur à la Haute Assemblée ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – MM. Vincent Capo-Canellas et Jacques Mézard applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les écologistes ont soutenu ce projet de loi au Sénat et à l’Assemblée nationale, parce qu’il contient non seulement des dispositions tout à fait pertinentes – certes techniques pour certaines, mais de grande importance –, mais surtout des avancées sociales et environnementales que nous tenons à saluer. Aujourd’hui, nous voterons de nouveau en faveur de ce texte, pour toutes les raisons déjà expliquées lors de la première lecture par Ronan Dantec ; notre collègue, dans l’impossibilité d’être présent aujourd’hui, vous prie de bien vouloir excuser son absence.
L’avancée sociale de ce texte à saluer – et vous l’avez souligné, monsieur le ministre – concerne le cabotage maritime qui permet de rétablir les conditions d’une concurrence loyale entre les opérateurs du secteur en élargissant à tout le personnel navigant, et non pas seulement à l’équipage, les conditions sociales et les conditions de sécurité imposées au pavillon français, et ce sur tous les navires utilisés pour fournir une prestation de service dans les eaux françaises.
Sur le plan environnemental, comment ne pas dire un mot fort sur la mise en cohérence de notre législation avec le droit international concernant la réparation des dommages causés par les marées noires qui ont trop souvent touché notre littoral ?
Le Parlement a amélioré ce texte en adoptant plusieurs mesures tout à fait pertinentes, et nous nous en réjouissons ; il en est ainsi, par exemple, de la demande de rapport sur les conséquences de l’autorisation des 44 tonnes, à propos de laquelle notre groupe a déjà exprimé à plusieurs reprises sa très grande réserve.
Saluons le travail de nos collègues écologistes à l’Assemblée nationale, qui ont vu plusieurs de leurs propositions retenues, telles la création d’un schéma national directeur de la logistique afin d’optimiser les flux de marchandises, d’accentuer la part du transport ferroviaire, fluvial et maritime, de réduire les impacts et de rendre le système économique plus fort et plus efficace, ou la création d’aires de stationnement sécurisé pour les vélos dans les nouvelles gares et les gares réaménagées. Nous nous félicitons de ces avancées.
C’est surtout l’écotaxe poids lourds, mesure phare de ce projet de loi, qui retient toute notre attention.
Le Gouvernement avait annoncé sa volonté de « tenir bon » pour ne pas introduire de nouvelles dérogations ou exonérations sur la taxe poids lourds, et nous l’avons soutenu dans sa démarche. Nous considérons en effet que cette taxe doit être aussi efficace que possible, et nous regrettons que des exonérations aient été votées à la suite de diverses pressions. Nous en avons l’habitude, mais il ne faudrait pas que la portée de ce texte soit affaiblie par des exonérations et autres dégrèvements, comme cela arrive malheureusement trop souvent dans notre pays.
Nous regrettons ainsi, pour deux raisons, la réintroduction par la commission mixte paritaire d’une exonération sur les véhicules publics d’entretien et d’exploitation des routes, adoptée par voie d’amendement au Sénat puis supprimée par l’Assemblée nationale : d’une part, ce n’est pas parce qu’un véhicule est public qu’il ne pollue pas, et il devrait donc se voir appliquer l’écotaxe ; d’autre part, nous considérons que les pouvoirs publics, État et collectivités, ont pour mission d’impulser, de « montrer la voie » de la transition écologique. Leurs pratiques doivent servir d’exemples au secteur privé.
Un problème s’est posé pour trois régions, Midi-Pyrénées, Aquitaine et Bretagne : alors que leur spécificité était déjà prise en compte dans le projet de loi initial, elles ont obtenu une minoration supplémentaire. La prise en compte de la situation périphérique de ces régions ne devra pas être un frein à la transition.
Si le texte présente de réelles avancées, il nous faudra aller plus loin encore, car notre pays est gravement en retard par rapport aux autres pays européens en matière de fiscalité écologique : il se situe à la vingt-sixième place sur les vingt-sept États membres, ce qui représente, je le rappelle, 20 milliards d’euros de recettes fiscales à prélever pour rattraper la moyenne européenne. Six États européens ont mis en place une écotaxe sur les poids lourds : la Suisse, l’Autriche, l’Allemagne, la Pologne, la République Tchèque et la Slovaquie.
Compte tenu du retard de notre pays en matière de fiscalité écologique, la mise en place de l’écotaxe est donc plus que bienvenue.
La mise en œuvre de l’écotaxe n’est d’ailleurs qu’une première étape ; de nombreuses autres réformes doivent, selon nous, intervenir désormais dans l’instauration d’un système de fiscalité écologique, essentiel pour amorcer la transition écologique dont notre pays a besoin.
Je soulignerai ici quelques pistes, s’agissant du travail qui nous attend.
Sur l’écotaxe elle-même, nous appelons à une montée en puissance progressive du dispositif. Des dérogations régionales existent, comme je l’ai indiqué, ainsi qu’un abattement de 10 % en cas de souscription au système d’abonnement.
Nous pensons ainsi que la taxe devrait progressivement s’appliquer sur les routes qui sont pour l’instant en dehors du dispositif.
Les taux de la taxe seront réévalués annuellement par arrêté ministériel. Nous serons vigilants afin que ces arrêtés traduisent un renforcement régulier de l’écotaxe, pour y intégrer les externalités liées à la route notamment. À ce propos, un projet de loi sera soumis au vote du Parlement dans les prochaines semaines, qui transposera dans notre droit les modifications apportées à la directive Eurovignette en 2011. Cette directive prévoit la possibilité pour les États membres d’intégrer dans le montant des péages dus par les poids lourds les externalités négatives telles que le bruit ou la qualité de l’air. Or le projet de loi que nous allons examiner ne prévoit pas, pour l’instant, la prise en compte de ces externalités. Nous y voyons une occasion manquée de faire appliquer le principe « pollueur-payeur ».
Nous considérons enfin qu’un moyen doit être trouvé pour affecter réellement le produit de la taxe au report modal. Actuellement, en effet, le système prévoit que le produit de l’écotaxe sera versé au budget général de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, qui finance aussi bien les routes que les alternatives à la route. Cela nous semble contraire à l’engagement du Grenelle selon lequel l’écotaxe poids lourds devait financer les politiques de report modal.
Pour conclure, je rappelle une nouvelle fois que nous, écologistes, sommes convaincus de l’absolue nécessité d’une fiscalité écologique juste et pragmatique. Par conséquent, le groupe écologiste se prononcera en faveur de ce texte, considérant qu’il s’agit d’une étape sur la route, sur la voie, et, dirai-je même, sur les voies qui mènent à la transition. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Corinne Bouchoux. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports est l’occasion de rappeler comment s’organisent aujourd’hui les rapports de force politiques autour des questions environnementales.
En effet, les considérations environnementales ont pris une place fondamentale dans l’élaboration des politiques publiques auxquelles le législateur participe. Même si les motivations de cette prise de conscience sont parfois quelque peu électoralistes, il n’en demeure pas moins que le caractère durable et respectueux de la nature est désormais un préalable indispensable à toute politique publique. Sur ce point, nous sommes d’accord, je pense.
Si, aujourd’hui, personne n’a le monopole de la conscience aiguë des questions environnementales, certaines approches diffèrent selon la place occupée dans cet hémicycle.
En d’autres termes, même si des antagonismes profonds subsistent sur certains sujets – le cas du nucléaire en est sans doute la meilleure illustration –, la prise de conscience est collective, comme en témoigne le Grenelle de l’environnement, réalisé par le précédent gouvernement.
Les lois dites « Grenelle » se sont révélées ambitieuses, même si certains les ont jugées incomplètes ; toutefois, elles ne se suffisent effectivement pas à elles-mêmes.
Pour cette raison, et comme notre groupe l’a toujours souligné, cette séquence de consultation puis de décision que furent les lois « Grenelle de l’environnement » doit se concevoir comme une étape dans la course vers une appréciation plus affinée des enjeux écologiques et des politiques publiques environnementales.
Or, bien que le texte que nous examinons ne soit pas aussi ambitieux que les lois dites « Grenelle », il doit se concevoir comme une marche, certes plus petite mais tout aussi indispensable que les précédentes lois Grenelle, dont il assure parfois la mise en application concrète.
Quelles avancées le présent projet de loi doit-il permettre de réaliser ?
Avant tout, il convient d’indiquer que la majorité des dispositions présentes dans ce texte sont de nature technique.
Ces dispositions s’attachent ainsi à apporter de nouvelles réponses juridiques à un ensemble de situations qu’en l’état actuel du droit l’État, les collectivités territoriales, les administrations et les opérateurs de l’État ont du mal à appréhender.
Ces situations concernent aussi bien le transport ferroviaire que les transports routier, fluvial et maritime, ainsi que, dans une moindre mesure, le transport aérien.
À cet égard, le présent texte répond parfois à des problématiques purement juridiques, qui – nous devons le reconnaître – se révèlent neutres sur le plan politique.
Néanmoins, si de nombreuses dispositions sont purement techniques, d’autres sont à la croisée des chemins : malgré leur caractère extérieur juridique, elles présentent en effet une dimension politique dans la mesure où elles donnent le pouvoir à des agents de l’État de constater et de verbaliser des infractions et des contrevenants. Ces mesures ont partant un fort caractère coercitif et sécuritaire, ce qui, je ne vous le cache pas, n’est pas pour me déplaire !
En termes de transport ferroviaire, il s’agit de permettre aux agents de la SNCF et de Réseau ferré de France de constater les infractions, et notamment les vols commis sur le réseau. Cette possibilité est donnée par l’article 4. À ce titre, je rappelle que ces vols se chiffrent en dizaines de millions d’euros et qu’ils sont en augmentation constante depuis plusieurs années.
Toujours en matière de lutte contre l’insécurité, et plus précisément contre l’insécurité routière, l’article 9 étend les prérogatives des contrôleurs de transports terrestres.
Ce texte comporte donc bel et bien un ensemble de dispositions à visée sécuritaire. Elles nous semblent, pour la plupart, relever du bon sens et du souci légitime d’accorder à la sécurité toute la place qu’elle mérite dans les problématiques de transports.
Le dernier ensemble de mesures que nous pouvons identifier dans ce projet de loi est, comme je l’ai indiqué précédemment, motivé par des considérations environnementales, chacune d’entre elles tentant ainsi d’apporter une réponse juridique à un problème environnemental.
Ces dispositions partent pour la plupart d’un constat d’impuissance, notamment de l’impuissance des agents de l’État à résoudre une situation qui s’éternise. Sur ce sujet, je songe aux articles 12 et 15 qui permettent, pour le premier, de déplacer d’office des bateaux en stationnement le long des voies fluviales et, pour le second, d’accélérer la déchéance de propriété pour les bateaux abandonnés.
Cela étant, comme je l’ai souligné en introduction, ces mesures s’inscrivent également dans la continuité des lois « Grenelle ».
Dans cette perspective, l’article 16, qui clarifie et distingue d’une part les procédures applicables en cas de marée noire, en vertu de la convention CLC, et d’autre part les procédures applicables dans le régime général des créances maritimes, s’inscrit dans le prolongement des travaux du Grenelle de la mer. Cette mesure permettra de mettre fin aux confusions auxquelles sont confrontés les tribunaux de commerce, qui, pour l’heure, font usage des dispositions législatives et réglementaires relatives au régime général de responsabilité, issu de la convention LLMC, malgré l’arrêt de 1987 de la Cour de cassation. Là encore, cette disposition me semble relever du bon sens.
Cependant, la mesure phare de ce texte est sans nul doute le remplacement non pas de l’écotaxe elle-même mais du dispositif de majoration qui doit répercuter cette écotaxe poids lourds des transporteurs vers leurs clients. Or c’est là que les choses se gâtent, monsieur le ministre !
En effet, l’écotaxe ne peut se concevoir sans ce dispositif de majoration qui traduit le principe du « pollueur-payeur ». Ainsi, la majoration permet de répercuter sur l’acteur économique qui choisit le mode de transport routier la taxe que payera initialement le transporteur.
Ce système se justifie par deux raisons : premièrement, les transporteurs ne sont pas responsables des choix des chargeurs, et notamment de leur choix en faveur du transport routier ; deuxièmement, ils dégagent des marges moyennes trop faibles – environ 1,5 % – pour pouvoir supporter seuls le coût de la présente taxe.
Personne ne conteste la nécessité de cette majoration, mais l’actuel dispositif qui calquait le montant de la majoration affectée aux chargeurs sur le montant de l’écotaxe devait faire l’objet d’une refonte, que les professionnels appelaient au reste de leurs vœux.
Ainsi, l’actuel système de majoration doit être remplacé par un nouveau dispositif de majoration forfaitaire obligatoire.
De fait, cette disposition est essentielle au bon fonctionnement des entreprises de transport, qui sont souvent des structures petites, voire très petites : 80 % d’entre elles comptent moins de dix salariés. Par conséquent, ces entreprises n’ont pas la possibilité de répondre à la complexité de l’actuel dispositif, dont les modalités de calcul nécessitent des relevés particulièrement précis. Elles pourraient donc se trouver dans l’incapacité de remplir une obligation légale si nous conservons l’écotaxe sous sa forme actuelle.
Le nouveau dispositif voulu par le Gouvernement est – force est de le reconnaître – plus lisible pour les professionnels du secteur, qu’ils soient transporteurs ou chargeurs. C’est déjà un avantage ! En effet, en prenant en compte un taux uniforme s’appliquant à l’intérieur de chaque région, les transports interrégionaux se voyant également fixer un taux unique calculé selon les mêmes principes, les professionnels du secteur pourront mieux anticiper les volumes de la taxe.
De plus, en gardant comme critère d’élaboration des taux les données relatives aux trafics observés et aux itinéraires, à la consistance du réseau soumis à la taxe et aux charges de gestion, ce prélèvement continuera de fonder sa légitimité sur le respect de considérations environnementales.
En conséquence, cette mesure, qui vise avant tout à rétablir la sécurité juridique et fiscale des entreprises du secteur, participera également de la prise en considération de problématiques écologiques en préservant le concept du « signal prix », qui doit permettre d’inciter les demandeurs à se détourner des modes de transport les plus polluants. Or ce n’est pas toujours facile !
Les nouvelles modalités d’application de l’écotaxe permettront également de préserver les ressources dégagées initialement pour financer les infrastructures de transport par l’intermédiaire de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF.
Je tiens à saluer l’accord atteint en CMP, permettant de réintroduire une mesure que le groupe UMP avait défendue, à savoir l’exonération des « véhicules, propriété de l’État ou d’une collectivité locale, affectés à l’entretien et à l’exploitation des routes ». Il s’agit d’une disposition de l’article 6 ter.
Je salue également le geste accompli en faveur des collecteurs de lait : en tant que sénateur du premier département laitier français, je ne peux pas être totalement insensible à cette question, monsieur le ministre ! Cela étant, vous auriez dû aller beaucoup plus loin. En effet, le lait c’est une chose, mais la prise en compte de la viande et des légumes aurait été préférable encore !
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable. Eh oui !
M. Jean Bizet. Certes, ce projet de loi apporte des réponses juridiques pratiques à des difficultés rencontrées par l’État et d’autres agents publics. Il tente de faire appliquer une fiscalité écologique élaborée sous la précédente législature – je m’en souviens ! Cependant, certaines dispositions du présent texte suscitent toujours des interrogations.
Je n’oublie pas que j’ai voté, en 2009, la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. Je n’oublie pas davantage la nécessité d’envisager l’économie avec un certain nombre d’exigences environnementales – c’est une évidence !
Toutefois, l’économie de marché est trop occultée à mon goût. Souvenons-nous de l’approche économique adoptée par nos voisins allemands depuis plus de cinquante ans : l’économie de marché autant que possible, l’État autant que nécessaire !
J’ai eu beau chercher, je n’ai pas trouvé dans la discussion de ce projet de loi la marque d’une préoccupation majeure qui devrait nous mobiliser tous : la compétitivité de l’industrie de notre pays. La baisse de l’industrialisation de la France atteint pourtant un seuil critique : l’industrie ne représente plus que 12 % du PIB de la France, soit presque 50 % de moins qu’en Allemagne, qui est notre principal partenaire.
Soyons honnêtes : cette baisse ne date pas d’hier,…
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable. Ah !
M. Jean Bizet. … mais d’avant-hier ! Elle est très antérieure à mai 2012. Reste que le différentiel de compétitivité entre la France et l’Allemagne atteint aujourd’hui un degré tel qu’il affecte jusqu’à l’équilibre du couple franco-allemand.
M. Daniel Raoul. Ah, le mariage pour tous !
M. Jean Bizet. Je pourrais ajouter un couplet très important sur l’équilibre de ce couple, car il affecte toutes nos décisions en matière européenne.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean Bizet. Certes, le Président de la République, François Hollande, souligne que le couple franco-allemand doit montrer la voie. Mais permettez-moi de me demander sans malice quelle peut être cette voie quand ce couple ne parle pas d’une seule et unique voix ? Voilà un fameux problème !
L’écotaxe proposée par le Gouvernement, appliquée sans discernement, portera directement préjudice à notre tissu de PME et de TPE. Je l’ai déjà souligné lors du précédent débat.
Je suis malheureusement contraint, faute de temps, d’écourter mon intervention. Je dirai donc que, à mon sens, l’esprit du présent texte n’est pas celui de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.
Comme je l’ai expliqué en première lecture, j’aurais souhaité une approche plus pragmatique qui tolère un certain nombre d’exemptions ; une approche éloignée de l’écologie punitive mais ouverte à une écologie incitative et réformatrice, voire réparatrice.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UMP s’abstiendra. (M. François Trucy applaudit.)
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable. C’est déjà un progrès !
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission du développement durable, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, deux mois après avoir examiné ce texte en première lecture nous débattons aujourd’hui des conclusions de la commission mixte paritaire.
Pourtant, l’Assemblée nationale a voté ce texte voilà seulement deux jours, et la commission mixte paritaire s’est tenue hier. Nous plaidons, vous le savez, pour rompre avec cette accélération du calendrier législatif qui ne nous permet pas de travailler dans d’excellentes conditions !
Au demeurant, les dispositions du présent texte doivent s’apprécier au regard d’un contexte plus global. Je songe à ce titre à la remise imminente du rapport Bianco et aux évolutions européennes attendues. En effet, les questions de séparation entre les activités de gestionnaire d’infrastructure et d’opérateur, abordées à la marge par ce projet de loi, sont d’une actualité brûlante à travers la proposition de directive dite du « quatrième paquet ferroviaire », présentée en janvier dernier par la Commission. Cette dernière semble vouloir dresser des frontières tellement importantes qu’elles reviennent en réalité à imposer une séparation totale.
Si cette directive n’invalide pas le projet français, force est de constater qu’elle ne l’encourage pas non plus.
Monsieur le ministre, nous espérons que vous prendrez en considération la résolution adoptée par le Sénat le 2 avril dernier, indiquant que la Commission européenne a outrepassé ses pouvoirs en interdisant implicitement « la création de toute entreprise ferroviaire verticalement intégrée », ainsi que la proposition de résolution déposée à l’Assemblée nationale qui va dans le même sens.
La voix de la France doit porter pour permettre de garantir la possibilité de relations poreuses entre gestionnaire d’infrastructure et opérateurs, gage de réalisation mais surtout de réussite de l’unification du système ferroviaire et du futur pôle public.
En tout état de cause, l’intérêt de ce projet de loi réside essentiellement dans l’entrée en vigueur de la taxe poids lourds.
Depuis l’instauration du principe de ce prélèvement, il est prévu que les transporteurs puissent répercuter cette taxe sur les chargeurs. Toutefois, un certain nombre de nos collègues ont estimé que ce principe portait atteinte à la compétitivité des entreprises, notamment dans les zones enclavées.
Nous considérons qu’il s’agit d’un véritable enjeu. Plus largement, la question de l’essor de nos entreprises, et notamment de nos PME, appelle prioritairement une politique d’aménagement du territoire par un maillage des services publics, par la performance de tous les réseaux – y compris le très haut débit –, par la relance du fret ferroviaire, par le dynamisme de la Banque publique d’investissement et par bien d’autres pistes.
Les modalités de répercussion de la taxe poids lourds sont simplifiées par le présent projet de loi, qui se fonde sur une majoration du coût de transport différenciée au niveau régional. Nous sommes en accord avec ce mode de répercussion plus lisible, qui ne change rien ni au volume escompté de rendement ni aux principes devant guider la définition de cette taxe, à savoir son affectation au financement du rééquilibrage modal.
Nous approuvons que cette taxe entre enfin en vigueur après de nombreuses années d’attente, pour être opérationnelle à compter du 1er octobre prochain. Nous approuvons également les évolutions du projet, à savoir une évaluation des conséquences de la mise en œuvre de cette taxe et une définition du caractère évolutif du domaine routier concerné.
Pour autant, plusieurs questions demeurent, selon nous. Alors que la taxe poids lourds devrait rapporter 1,2 milliard d’euros, son rendement pour la société Ecomouv’, à laquelle la collecte de cette taxe a été confiée par l’ancien gouvernement par la voie d’un contrat de partenariat, se situe à quelque 230 millions d’euros par an sur plus de dix ans, soit plus de 2 milliards d’euros au total, pour un investissement de 600 millions d’euros. Nous préférerions parier sur la performance du service public, en l’occurrence du service des douanes !
Huit cents millions d’euros par an issus de la mise en œuvre effective de cette taxe seront versés à l’AFITF pour le financement des infrastructures. Mais reconnaissons d’ores et déjà que cela ne suffira pas à mettre en œuvre la totalité des projets définis par le Schéma national des infrastructures de transport, le SNIT, et que cela ne dédouane donc aucunement le Gouvernement de réfléchir aux moyens de renationaliser les concessions autoroutières afin d’apporter de nouveaux financements à l’AFITF.
Il faut notamment repenser les dispositifs fiscaux existants, qui sont particulièrement favorables aux transporteurs. Ainsi, les exonérations de TIPP coûtent chaque année 330 millions d’euros au budget de l’État. Dans ce cadre, le nouvel article 11 bis, permettant l’évaluation des conséquences des autorisations de poids lourds de 44 tonnes, nous apparaît comme le début de la remise en cause de ces derniers. Vous savez que nous avons toujours soutenu qu’ils portaient atteinte au rail en organisant une concurrence déloyale, particulièrement envers les autoroutes ferroviaires.
Permettre le rééquilibrage modal doit également conduire à agir sur le niveau des conditions de travail du secteur routier, qui sont aujourd’hui déplorables. La France doit porter l’exigence d’une harmonisation sociale par le haut à l’échelle de l’Europe. Vous vous y êtes engagé, monsieur le ministre, et nous serons à vos côtés !
Concernant le secteur fluvial, il faut cesser la saignée des emplois publics, alors que la dernière loi de finances a encore supprimé 128 postes dans ce domaine. Permettre l’essor de la voie d’eau, c’est respecter l’engagement pris d’un financement à hauteur de 840 millions d’euros. Pour cela, la réponse apportée par le Gouvernement ne peut résider uniquement dans la valorisation des terrains qui seraient donnés en pleine propriété à Voies navigables de France, ou VNF, mais doit se doubler d’un effort en termes de dotation budgétaire.
Permettre le rééquilibrage modal – et nous y sommes particulièrement attachés –, c’est encore déclarer d’intérêt général le fret ferroviaire et l’activité du wagon isolé.
Toutes ces questions devront être traitées dans la réforme du système ferroviaire, puisque, au-delà des questions de gouvernance, ce sont les missions mêmes du service public qu’il nous faudra redéfinir et renforcer.
Au regard de tous ces éléments, nous voterons en faveur du présent texte, tout en renouvelant notre appel, monsieur le ministre, à être associés à la construction de la future réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission du développement durable, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen de ce projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports.
Comme je l’avais indiqué lors de la discussion ici même, ce texte arrive légitimement à bon port ! (Sourires.) Une grande partie des mesures techniques qu’il contient font consensus. Certes, la discussion a été un peu plus compliquée pour le Gouvernement à l’Assemblée nationale, nos collègues députés étant parfois plus turbulents… (Sourires.)
M. Vincent Capo-Canellas. Au final, le texte issu de l’Assemblée nationale, au-delà d’un certain nombre de modifications rédactionnelles positives, ressemble fortement au résultat des travaux du Sénat. Au titre des apports utiles, je veux évoquer les précisions bienvenues enrichissant le contenu du rapport prévu à l’article 7, sur les effets de la majoration sur les prix du transport.
Rappelons tout d’abord que nous discutons dans ce texte non pas du principe de l’écotaxe, mais bien des modalités de sa mise en œuvre et de sa répercussion sur les transporteurs. L’évaluation approfondie, prévue par ce rapport, est donc indispensable pour mesurer l’incidence économique de l’écotaxe poids lourds et les éventuels dysfonctionnements ou insuffisances du dispositif de majoration. Souhaitons que ce bilan d’étape prévu puisse rassurer les professionnels, inquiets de la mise en œuvre d’un dispositif, qui, reconnaissons-le, peut paraître complexe à bien des égards.
Depuis l’examen de ce texte par le Sénat, monsieur le ministre, vous avez annoncé deux décisions qui correspondent à nos souhaits : le report au 1er octobre de l’application de l’écotaxe et la mise en place d’une expérimentation à blanc. Nous saluons ces décisions de bon sens, dont le Sénat aurait volontiers pris acte durant les débats.
Quelques mesures nouvelles, introduites par le Gouvernement, ont curieusement fait leur apparition, mais cela n’a pas empêché la commission mixte paritaire de parvenir à un texte commun, chaque chambre faisant un pas en direction de l’autre ; à cet égard, je veux saluer ici la contribution éminente de notre rapporteur.
La commission mixte paritaire a ainsi pu rétablir dans le texte la disposition, proposée par le Sénat et à laquelle les sénateurs tenaient beaucoup, exemptant d’écotaxe les véhicules d’entretien des routes appartenant à l’État et aux collectivités territoriales.
Logiquement, le texte de la CMP conserve quelques modifications proposées par nos collègues députés. Deux sont majeures, l’une d’elles figurant d’ailleurs au nombre des suggestions émises sur de nombreuses travées de cette assemblée.
Premièrement, afin de prendre en compte la spécificité du transport de la denrée périssable qu’est le lait, les députés ont exclu les véhicules de collecte de lait de l’écotaxe poids lourds, dans la mesure où ces véhicules sont dispensés de chronotachygraphes. Cette mesure aura pour effet de conforter l’activité de la filière laitière. Elle pouvait faire craindre que l’on n’ouvre la boîte de Pandore des exemptions à l’écotaxe, et nous n’avions donc pas tranché en sa faveur. Toutefois, cette exception peut maintenant être validée, car elle se fonde sur la directive européenne Eurovignette qui permet de dispenser de l’écotaxe cette catégorie particulière de véhicules. Saluons cette subtile évolution et souhaitons qu’elle ne conduise pas à un imbroglio juridique !
Deuxièmement, nos collègues de l’Assemblée nationale ont souhaité majorer les taux de minoration de l’écotaxe pour les régions périphériques, afin de réduire l’incidence de la mesure dans ces régions. Ce sujet a donné lieu à un long débat en commission mixte paritaire. Cet aménagement de l’écotaxe pour les régions périphériques et péninsulaires, lié à leurs caractéristiques de production, est en effet discutable, car il réduit d’autant les recettes qui viendront financer l’AFITF. Mais c’est peut-être le prix à payer pour une mise en place rapide de l’écotaxe poids lourds, et c’est cet argument qui a prévalu dans nos échanges en commission mixte paritaire. Nous avions également en tête les débats au Sénat en première lecture, durant lesquels un certain nombre de nos collègues de ces régions s’étaient largement exprimés.
Quant aux autres dispositions, elles ne justifient pas d’opposition de notre part. L’organisation d’une conférence nationale de la logistique ne pourra que nous inciter à réfléchir à l’importante question de l’optimisation des chaînes du transport intermodal, et nous avons compris, monsieur le ministre, que vous aimez bien les débats et les commissions ! (Sourires.)
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable. Enfin, seulement au Sénat !
M. Vincent Capo-Canellas. Si la création du centre d’études et d’expertises sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, a été insérée par le Gouvernement de façon un peu cavalière, comme l’a aimablement souligné M. le rapporteur tout à l'heure, nous ne souhaitons pas nous opposer au regroupement et à la rationalisation de divers organismes, qui, nous l’espérons, permettront des économies et un surcroit d’efficacité. Il faudra peut-être vérifier qu’il en sera bien ainsi à l’usage.
Nous avions été favorables à l’adoption de ce texte parce qu’il apportait un certain nombre de réponses techniques attendues par le secteur des transports, et surtout parce que sa principale mesure, la mise en œuvre de l’écotaxe, résulte directement du Grenelle de l’environnement qui avait été voté à la quasi-unanimité sous la précédente majorité.
S’il n’est pas totalement satisfaisant, le système de majoration forfaitaire prévu par le projet de loi comme mécanisme de répercussion de l’écotaxe est sans doute le moins mauvais possible. Il fallait trouver une solution pour permettre l’application rapide de l’écotaxe, initialement prévue pour 2010. Nous devions prendre en compte la spécificité et la fragilité économique des entreprises de transports.
Nous estimons que les objectifs de l’écotaxe poids lourds, cohérents avec les principes du Grenelle de l’environnement, sont bons. L’écotaxe favorise en effet les modes de transport plus vertueux grâce au report modal, et vise à développer une politique des transports plus durable, en apportant un financement pérenne à l’AFITF.
Pour ces raisons, le groupe UDI-UC maintient donc son vote favorable à ce projet de loi.
Cependant, monsieur le ministre, la discussion de ce texte technique, consacré à l’ensemble des modes de transports, s’apparente pour nous à une mise en bouche, et nous avons encore beaucoup d’appétit pour ce domaine des transports (Sourires.).
Nous attendons de discuter des réformes majeures qui doivent maintenant intervenir, et ce débat sera sans doute très différent ! Il devra concerner la réforme du système ferroviaire, bien entendu, mais aussi le chantier du SNIT. Pour le moment, vous avez nommé des commissions et lancé les réflexions. Nous attendons désormais la « mise en pratique » et les réformes de fond ! (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste, du RDSE et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier M. le rapporteur de son travail consensuel et M. le ministre de cette capacité d'écoute que nous nous plaisons toujours à lui reconnaître.
Les objectifs de l’écotaxe poids lourds sont louables et légitimes – et bien sûr, nous les soutenons – pour favoriser le report modal et de financer de nouvelles infrastructures de transport. Cependant, les débats autour de l’application de cette écotaxe font apparaître certains doutes et certaines craintes concernant ses effets sur la compétitivité de notre économie, et notamment sur le secteur de l’agro-alimentaire.
Monsieur le ministre, ces préoccupations sont encore plus vives dans les territoires ruraux, pénalisés par l’absence d’alternatives efficaces à la route, comme le rappelait en première lecture mon collègue Alain Bertrand. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avions déposé un certain nombre d’amendements visant à minorer la taxe dans les territoires enclavés.
La question des territoires dans lesquels seule la route permet le désenclavement est en effet systématiquement éludée. Évidemment, dans les régions où l’on bénéficie de routes à quatre voies, d’autoroutes, d’aéroports, de trains à grande vitesse et de fret ferroviaire, on fait face à une situation tout à fait différente ! On peut alors déclamer sur la transition énergétique et sur beaucoup d’autres choses !
Mais en l’absence d’alternative à la route, l’écotaxe sera systématiquement répercutée vers le consommateur final, qui paiera pour un choix qu’il n’aura pas lui-même effectué, ce dernier relevant bien de l’entreprise qui privilégiera en toute logique la route, plus compétitive dans ces cas-là que le fret ferroviaire, trop délaissé.
Pour citer une étude commandée par la SNCF au cabinet Bain & Company, l’écart de prix en Europe entre le mode routier et le fret ferroviaire serait d’environ 25 %, et le déficit du fret ferroviaire pourrait atteindre 5 milliards d’euros en cinq ans. Le rapport prévu par le projet de loi, portant sur les effets de la majoration sur les prix de transport des produits de grande consommation, pourra nous éclairer sur ce point.
Avec ce texte, nous allons adopter des minorations et des exonérations alors qu’aucune expérimentation n’a finalement eu lieu. Les deux exonérations de véhicules, et notamment celle qui concerne les véhicules de ramassage laitier – c’est d’ailleurs une bonne chose pour les producteurs de lait –, révèlent l’absence d’alternative à la route dont vont souffrir certains secteurs de l’économie.
Je me satisfais partiellement de la possibilité de revoir ultérieurement la liste des tronçons de route taxables. J’ai entendu mon collègue Joël Labbé dire qu’il faudrait que toutes les routes le soient ! Il est facile de demander cela depuis une région desservie par tous les modes de transport, alors que, dans certaines régions, il n’existe que des routes nationales où l’on passe à 30 kilomètres à l’heure… Je pense qu’il faudrait enfin s’occuper de l’égalité territoriale ! Il me semble d’ailleurs qu’un ministère en est chargé, encore que je n’aie pas entendu jusqu’ici beaucoup de propositions. Cela étant rappelé, la révision de la liste devra se faire selon la procédure même qui a présidé à son établissement ; j’espère donc que la consultation sera réelle, car ce retour est essentiel.
Je constate, monsieur le ministre, que la région Auvergne, chère à mon cœur, ne bénéficie ni de la minoration de 30 % ni de celle de 50 %, accordées à certaines autres régions. Peut-être est-elle plus proche des autres régions européennes que la Bretagne historique, peut-être n’est-elle pas périphérique… Mais elle reste, hélas ! la région la plus enclavée et donc la plus exposée à l’application de la taxe.
Il y a malheureusement là un manque de cohérence de l’exécutif : bien que défavorable au relèvement de la minoration applicable à ces régions, il a fini par céder, alors que, si l’on en croit les travaux de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, le taux régional applicable à la Bretagne dans la répercussion de la taxe tenait bien compte de la minoration, puisqu’il a été établi à 3,3 %, au lieu de 5,5 %. Il semblerait que nous ne disposions pas des mêmes forces de persuasion – je n’ose parler de « forces de dissuasion », même si l’on peut y penser… (M. le ministre et M. le président de la commission du développement durable sourient.)
Toutefois, ce texte est indispensable pour clarifier et rendre lisibles les modalités de répercussion de la taxe auprès des chargeurs. À ce titre, il recueille un avis favorable des transporteurs routiers.
Monsieur le ministre, je veux maintenant attirer brièvement votre attention sur le financement de l'Agence de financement des infrastructures de transports de France, ou AFITF, financement qui nous préoccupe tous. Comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire, si le RDSE est le seul groupe à ne pas être représenté au sein de la commission « Mobilité 21 », ses membres se sentent particulièrement concernés par ce sujet.
Extrêmement préoccupante, la question du financement de l’AFITF nécessite une attention toute particulière de votre part – je sais que vous la lui accordez –, d'abord parce que le report de l’application de l’écotaxe constitue une perte financière pour l’Agence, mais aussi parce que nous craignons que les rentrées d’argent liées à la mise en place de cette taxe n’aboutissent non à un véritable renforcement du financement de l’AFITF, mais bien au résultat contraire. Pour nous, en effet, et nous le constatons tous les jours, le développement de l’offre de transport sans logique d’aménagement du territoire est voué à l’échec.
Par conséquent, monsieur le ministre, nous souhaitons que vous veilliez particulièrement à ce financement.
Nous savons aussi que du financement de l’AFITF dépend celui des programmes de modernisation des itinéraires routiers, les PDMI, que nous considérons comme fondamentaux, comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire.
Cela étant, monsieur le ministre, le projet de loi est louable dans son objet, et son adoption constituerait un pas en avant important. C'est la raison pour laquelle les membres du RDSE voteront très majoritairement en sa faveur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, permettez-moi d’emblée de saluer la qualité du travail accompli par notre rapporteur.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Michel Teston. Mon intervention portera sur les dispositions du projet de loi relatives aux transports ferroviaire et routier.
Quelques mots, tout d’abord, sur le volet ferroviaire.
Le Sénat a adopté un amendement faisant obligation à la SNCF de transmettre aux régions les comptes d’exploitation des lignes de TER. L’Assemblée nationale a renforcé cette obligation de transparence, en précisant que la SNCF devra fournir chaque année aux régions les comptes d’exploitation retraçant la totalité des opérations afférentes à l’exécution de la convention d’exploitation, les comptes détaillés ligne par ligne, une analyse de la qualité du service et une annexe permettant d’apprécier les conditions d’exploitation du transport régional de voyageurs.
Les députés ont aussi renforcé les dispositions de l’article 4, en étendant le champ des catégories d’agents assermentés pouvant constater des infractions sur le réseau, comme les vols de cuivre. Désormais, les personnels habilités pour constater les infractions seront non seulement ceux de la SNCF, mais aussi ceux des entreprises « agissant pour le compte de Réseau ferré de France ou ayant conclu une convention avec Réseau ferré de France. »
J’en viens au volet « routier » du projet de loi.
Les conseils généraux avaient été quelque peu échaudés par le volume et par la forme du transfert des routes nationales opéré à la suite de l’adoption de la loi du 13 août 2004. Or le présent projet de loi prévoit, en son article 5, le transfert de routes ou sections de route nationales déclassées aux communes et aux conseils généraux. En première lecture, nous avions été nombreux, tant en commission qu’en séance, à demander des précisions. Ces précisions nous ont été apportées puisque M. le ministre a communiqué la liste exhaustive des linéaires transférés : il s’agit, effectivement, principalement de délaissés.
Les dispositions principales de ce projet de loi figurent à l’article 7 et portent sur l’amélioration du mécanisme de répercussion de l’écotaxe poids lourds.
Dès l’adoption de cette dernière, il avait été prévu de répercuter son paiement sur les utilisateurs de transports de marchandises, c’est-à-dire les chargeurs et les principaux donneurs d’ordres de la filière. Or le mécanisme de répercussion de la taxe avait suscité de vives réserves de la part de l’ensemble des acteurs de la filière.
Monsieur le ministre, vous avez donc fait œuvre utile en procédant à une révision du dispositif et en faisant le choix d’une majoration forfaitaire unique, modulée par région, avec l’objectif de limiter les problèmes de perception et de faciliter les négociations commerciales, dans un cadre plus sécurisé et plus équitable.
Sensible, dans sa majorité, à cet effort de simplification, le Sénat n’avait pas ouvert la voie à des dérogations. Tout au plus avions-nous voté l’exonération pour les véhicules, propriété de l’État ou d’une collectivité locale, affectés à l’entretien et à l’exploitation des routes. Par ailleurs, nous avions décidé de supprimer l’expérimentation alsacienne, dont la pertinence ne nous semblait plus avérée.
Or, lors de l’examen du texte, les 10 et 11 avril dernier, l’Assemblée nationale a supprimé l’exonération pour les véhicules que je viens de mentionner. En outre, elle a exonéré de l’écotaxe une catégorie particulière de véhicules, à savoir les citernes destinées à la collecte du lait. Enfin, elle a fait le choix d’augmenter les minorations au titre de la périphéricité pour trois régions, faisant passer ces minorations de 25 % à 30 % pour l’Aquitaine et Midi-Pyrénées et de 40 % à 50 % pour la Bretagne.
Je veux cependant rappeler que la taxe poids lourds n’a pas été instaurée pour apporter une réponse aux problèmes économiques de telle ou telle filière touchée par la crise, même si ces difficultés sont bien réelles ! En réalité, nul ne l’ignore, la taxe a été instaurée pour contribuer au rééquilibrage concurrentiel entre les différents modes de transport de marchandises. L’importance de sa mise en œuvre est d'autant plus grande que les recettes attendues sont destinées à l’AFITF pour faire face aux très nombreux besoins dans le domaine des diverses infrastructures de transports.
Toutefois, une nouvelle lecture du projet de loi n’était pas envisageable. Les membres de la commission mixte paritaire ont donc pris acte des modifications apportées par l’Assemblée nationale aux articles 6 quater et 6 quinquies nouveaux, tandis que l’exonération pour les véhicules, propriété de l'État ou d'une collectivité locale, affectés à l'entretien et à l'exploitation des routes, a été réintroduite en CMP, ce qui paraît de bon sens.
Pour ces raisons, le groupe socialiste votera ce texte, même s’il n’apparaît pas aussi équilibré et équitable que celui que le Sénat avait voté en première lecture. Mais, ainsi, l’écotaxe, prévue depuis déjà quatre ans, pourra enfin s’appliquer.
Pour terminer, indépendamment de la mise en place de la taxe poids lourds, je reste très préoccupé par le niveau des recettes de l’AFITF. C’est pourquoi, lors de l’examen du projet de loi en première lecture, j’avais évoqué la question de l’aubaine que pourrait constituer cette taxe sur les routes nationales et sur certaines routes départementales pour les sociétés autoroutières, en favorisant un report de trafic sur leurs réseaux et en suscitant ainsi au profit de ces sociétés des recettes supplémentaires…
Ne serait-il pas opportun de tenir compte de ces probables nouvelles ressources pour faire évoluer la fiscalité applicable à ces sociétés, dont les résultats financiers – vous ne me contredirez pas – sont d'ores et déjà plus que corrects ? Je pense qu’il faudra un jour se poser cette question et y apporter une réponse. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul.
M. Jean-Jacques Filleul. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports achève aujourd’hui son parcours sénatorial.
Ce texte vient principalement nourrir le dispositif de l’écotaxe pour les poids lourds de plus de 3,5 tonnes.
Le principe de cette taxe a été voté dans le cadre de loi portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle II », et les parlementaires de toutes sensibilités ont largement souscrit à ses objectifs : participer à la transition énergétique, engager la multimodalité des transports et dégager des moyens financiers pour les infrastructures ferroviaires. Toutefois, malgré une quasi-unanimité sur le principe, le gouvernement précédent n’a pas su, n’a pas pu ou n’a pas voulu proposer un contenu.
Monsieur le ministre, le Gouvernement s’est engagé à combler ce vide, qui devenait de plus en plus préoccupant, puisque les recettes de la taxe, en année pleine, sont estimées à environ 1,2 milliard d’euros pour l’AFITF.
J’observe que, malgré vos efforts, la mise en œuvre de l’écotaxe aura lieu en octobre, et non en juillet, comme il était prévu initialement. Ce report constitue un manque à gagner qui retarde d’autant le rééquilibrage entre la route et le rail.
Monsieur le ministre, le groupe socialiste vous a soutenu quand vous vous êtes engagé dans l’opération, délicate et complexe, consistant à rechercher un dispositif compréhensible et équilibré. Vous avez su rencontrer, écouter et entendre les organisations professionnelles du transport, permettant à ce texte d’avoir aujourd'hui une bonne résonance et d’être attendu par les acteurs concernés.
Le projet de loi examiné les 11 et 12 février 2013 a globalement été bien reçu dans cet hémicycle, même si les débats ont été parfois vifs, ce qui est bien normal.
Curieusement, parmi nos collègues de l’opposition, certains avaient du mal à intégrer le mécanisme de répercussion de la taxe et son applicabilité et, en commission, d’aucuns ont même tout simplement exprimé leur regret d’avoir voté l’écotaxe sous l’ancienne majorité – chacun s’en souvient.
En janvier et en février, nous avons été interrogés par les transporteurs. Des courriers nous sont parvenus. Même si les organisations professionnelles réagissaient positivement dans les territoires, des inquiétudes émergeaient. Résultant, la plupart du temps, de la méconnaissance du principe de répercussion proposé, ces inquiétudes amenaient à des interrogations, toujours dignes, d'ailleurs, des transporteurs préoccupés. Cette préoccupation est, là encore, compréhensible, les marges étant faibles dans cette profession, et vous y avez répondu, monsieur le ministre, en reportant sur le donneur d’ordre l’essentiel de la charge de l’écotaxe.
Il est intéressant que le Sénat ait voulu éviter de prévoir trop d’exonérations, à l’exception de celle qui concerne les véhicules, propriété de l’État ou d’une collectivité territoriale, affectés à l’entretien et à l’exploitation des routes, sur laquelle nous nous étions réunis et que nous avons votée, sous la forme d’un amendement insérant un nouvel article 6 ter.
Toutefois, notre démarche a été contrariée lors des débats à l’Assemblée nationale : nos collègues députés ont souhaité introduire un article 6 quater permettant aux véhicules transportant le lait de ferme en ferme de bénéficier d’une exonération et ont supprimé l’article 6 ter.
La commission mixte paritaire s’est tenue hier matin et le débat – bien mené, d'ailleurs, par notre rapporteur, Roland Ries – m’a conduit à adhérer à la position de nos collègues de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, ceux-ci ayant accepté notre amendement portant création de l’article 6 ter.
Au cours de la réunion de la commission mixte paritaire, l’augmentation de la minoration de la taxe au titre de la périphéricité a fait débat. Nos collègues députés ont voulu aller plus loin que le 2 de l’article 275 du code des douanes, qui prévoit que les taux kilométriques de la taxe poids lourds « sont minorés de 25 % pour les régions comportant au moins un département métropolitain classé dans le décile le plus défavorisé selon leur périphéricité au sein de l’espace européen ». Ce même article porte cette minoration à 40 % pour les régions qui ne disposent pas d’autoroutes à péage.
Notre rapporteur a largement évoqué les positions défendues au Sénat et celles de nos collègues de l’Assemblée nationale. Finalement, nous nous sommes rendus aux arguments de nos collègues, en votant l’article 6 quinquies, qui augmente les minorations.
Lors de la commission mixte paritaire, j’ai également apprécié la plus grande transparence entre l’autorité organisatrice de transport et la SNCF que permettra l’article 3 bis.
Cette disposition permettra aux régions de connaître plus précisément la comptabilité des trains dont elles ont la responsabilité.
Avant le 30 juin prochain, la SNCF transmettra les comptes d’exploitation, qui retracent la totalité des opérations afférentes à l’exécution de la convention d’exploitation. Elle fournira les comptes détaillés ligne par ligne et procédera à une analyse de la qualité du service, ce qui est primordial si l’on veut que le service public ferroviaire mobilise de plus en plus l’intérêt de nos concitoyens dans les régions. Chacun le sait ici, la qualité de service, la ponctualité et le confort des voitures sont essentiels.
J’ai aussi apprécié l’initiative du président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, qui a proposé un amendement prévoyant que le Gouvernement devrait remettre au Parlement un rapport sur les conséquences de la circulation des poids lourds de 44 tonnes. Il n’est pas anodin que ce rapport intègre les effets de cette mesure sur le transport modal, au détriment probable du ferroviaire et du fluvial.
J’ajoute que nous exprimons des craintes, largement partagées par nos collègues, sur l’entretien des routes et les dégradations afférentes.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports parvient à son terme. Je me réjouis que la CMP ait abouti à un compromis, lequel, comme je l’ai indiqué précédemment, permettra d’enclencher le dispositif de l’écotaxe dans les meilleurs délais. Aussi, je voterai, avec le groupe socialiste, ce projet de loi tel que l’a présenté notre excellent rapporteur, Roland Ries. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission du développement durable.
M. Raymond Vall, président de la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je me félicite, moi aussi, du travail qui a été réalisé. J’ai été frappé par le sérieux, la volonté d’aboutir et le sens des responsabilités qui ont présidé à la réunion de la commission mixte paritaire, laquelle est parvenue à un compromis.
À cet égard, je veux, à mon tour, remercier notre rapporteur, Roland Ries, qui a, me semble-t-il, fait preuve d’un grand sens de l’intérêt général, en faisant en sorte de ne pas retarder plus encore la mise en place de l’écotaxe, car l’AFITF a grandement besoin de cette ressource.
Permettez-moi de revenir rapidement sur la question des régions périphériques.
S’il est injuste, il est vrai, que l’Auvergne – notre collègue Jacques Mézard ayant quitté l’hémicycle, je me fais son porte-parole – n’ait pas été retenue, la décision est justifiée pour les trois régions qui ont été intégrées. Le choix ne fut pas facile, mais il a fait partie des concessions opérées dans le cadre de la commission mixte paritaire.
Globalement, le résultat est équilibré, ce dont je me réjouis. Je tiens à féliciter tous les acteurs de cette marche en avant. Cette décision historique s’inscrit dans le cadre de la transition écologique puisque, pour la première fois, une taxe écologique va être mise en place.
Je veux donc saluer, monsieur le ministre, le sens de l’efficacité et du dialogue dont le Gouvernement a fait preuve pour intégrer les professionnels du transport dans cette forme raisonnable d’application de la taxe.
Par son vote, le groupe socialiste apportera son soutien pour avancer sur ce long chemin – je n’oserai dire : cette longue route ! – qui nous attend. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, aucun amendement n’est recevable, sauf accord du Gouvernement ; en outre, étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, le Sénat statue d’abord sur les éventuels amendements puis, par un seul vote, sur l’ensemble du texte.
projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX INFRASTRUCTURES ET AUX SERVICES DE TRANSPORT FERROVIAIRE OU GUIDÉ
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Article 2
L’article L. 2121-7 du code des transports est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« La région peut adhérer à un groupement européen de coopération territoriale ayant notamment pour objet l’organisation de services ferroviaires régionaux transfrontaliers de personnes, dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales et les traités en vigueur.
« Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 2121-4, une convention passée entre un groupement européen de coopération territoriale et la Société nationale des chemins de fer français fixe les conditions d’exploitation et de financement des services ferroviaires régionaux transfrontaliers de personnes organisés par le groupement pour leur part réalisée sur le territoire national. »
Article 3
L’article L. 2122-4 du code des transports est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu’une entreprise exerce des activités d’exploitation de services de transport ferroviaire et de gestion de l’infrastructure ferroviaire, elle est tenue, lors du dépôt des comptes annuels au registre du commerce et des sociétés, de déposer également les comptes de profits et pertes séparés et des bilans séparés, en distinguant dans chacun de ces documents les éléments relatifs, d’une part, aux activités d’exploitation de services de transport des entreprises ferroviaires et, d’autre part, à la gestion de l’infrastructure ferroviaire. »
Article 3 bis
L’article L. 2141-11 du code des transports est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« L’activité de transport de personnes de la Société nationale des chemins de fer français, hors région d’Île-de-France, est identifiée dans les comptes d’exploitation pour chaque convention conclue avec une autorité organisatrice de transport.
« Dans les conditions fixées par chaque convention d’exploitation, la Société nationale des chemins de fer français transmet chaque année, avant le 30 juin, à l’autorité organisatrice de transport, les comptes d’exploitation retraçant la totalité des opérations afférentes à l’exécution de la convention correspondante sur l’année civile précédente, les comptes détaillés ligne par ligne, une analyse de la qualité du service et une annexe permettant à l’autorité organisatrice d’apprécier les conditions d’exploitation du transport régional de voyageurs. »
Article 3 ter
Au 1° du II de l’article L. 1211-3 du code des transports, après le mot : « correspondances », sont insérés les mots : « , par la création d’aires de stationnement sécurisé pour les vélos dans les nouvelles gares et les réaménagements de gares existantes du réseau ferré ».
Article 4
Le dernier alinéa de l’article L. 2232-1 du code des transports est complété par les mots : « et par les agents assermentés des personnes agissant pour le compte de Réseau ferré de France ou ayant conclu une convention avec Réseau ferré de France en application de l’article L. 2111-9 ».
Article 4 bis A
À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 1241-4 du code des transports, après le mot : « installations », sont insérés les mots : « constitutifs de l’infrastructure gérée par la Régie, en application de l’article L. 2142-3 ».
Article 4 bis B
L’article L. 173-1 du code de la voirie routière est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans la région d’Île-de-France, la section 1 du chapitre Ier du présent titre est également applicable au Syndicat des transports d’Île-de-France, sur délibération de son conseil d’administration, et aux départements, sur délibération de leur assemblée, lorsqu’ils assurent la maîtrise d’ouvrage des projets d’investissement en matière de transport public de voyageurs. »
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TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX INFRASTRUCTURES ET AUX SERVICES DE TRANSPORT ROUTIER
Article 5
I. – L’article L. 123-3 du code de la voirie routière est ainsi rédigé :
« Art. L. 123-3. – Le reclassement dans la voirie départementale ou communale d’une route ou section de route nationale déclassée est prononcé par l’autorité administrative lorsque la collectivité intéressée, dûment consultée, n’a pas, dans un délai de cinq mois, donné un avis défavorable.
« Si, dans ce délai, la collectivité territoriale donne un avis défavorable, le reclassement d’une route ou section de route nationale ne répondant pas aux critères définis à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 121-1 peut être prononcé par décret en Conseil d’État.
« Le reclassement donne droit à une compensation financière correspondant aux coûts des travaux nécessaires à la remise en état de la route ou section de route nationale, hors accotements en agglomération. Ces coûts sont évalués contradictoirement à la date du reclassement entre l’État et la collectivité territoriale ou, à défaut d’accord, fixés par décret en Conseil d’État. »
II. – Le présent article entre en vigueur six mois après la promulgation de la présente loi.
Article 6
L’article L. 112-3 du code monétaire et financier est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° Les rémunérations des cocontractants de l’État et de ses établissements publics ainsi que les rémunérations des cocontractants des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements, au titre des contrats de délégation de service public, des contrats de partenariat et des concessions de travaux publics conclus dans le domaine des infrastructures et des services de transport. »
Article 6 bis
I. – L’article 285 septies du code des douanes est abrogé.
II. – Le code de la route est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 325-1, la référence : « et 285 septies » est supprimée ;
2° Le I de l’article L. 330-2 est ainsi modifié :
a) Au 11°, les mots : « des taxes sur les poids lourds prévues aux articles 269 à 283 quinquies et 285 septies » sont remplacés par les mots : « de la taxe sur les poids lourds prévue au chapitre II du titre X » et les mots : « ces taxes » sont remplacés par les mots : « cette taxe » ;
b) Au 12°, les mots : « des taxes sur les poids lourds prévues aux articles 269 à 283 quinquies et 285 septies » sont remplacés par les mots : « de la taxe sur les poids lourds prévue au chapitre II du titre X » et les mots : « ces taxes » sont remplacés, deux fois, par les mots : « cette taxe ».
III. – La perte de recettes pour l’Agence de financement des infrastructures de transport de France est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs mentionnée aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Article 6 ter
Au second alinéa de l'article 271 du code des douanes, après le mot : « prioritaires », sont insérés les mots : «, les véhicules, propriété de l'État ou d'une collectivité locale, affectés à l'entretien et à l'exploitation des routes ».
Article 6 quater
Au second alinéa de l’article 271 du code des douanes, après le mot : « réglementaire, », sont insérés les mots : « les véhicules à citerne à produits alimentaires exclusivement utilisés pour la collecte du lait dans les fermes ».
Article 6 quinquies
Le 2 de l’article 275 du code des douanes est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 25 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;
2° Au dernier alinéa, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 50 % ».
Article 7
I. – Le code des transports est ainsi modifié :
1° Le 5° de l’article L. 3221-2 est abrogé ;
2° L’article L. 3222-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3222-3. – Pour prendre en compte la taxe prévue aux articles 269 à 283 quater du code des douanes acquittée par le transporteur, le prix de la prestation de transport routier de marchandises contractuellement défini fait l’objet de plein droit, pour la partie du transport effectuée sur le territoire métropolitain, quel que soit l’itinéraire emprunté, d’une majoration résultant de l’application d’un taux qui est fonction des régions de chargement et de déchargement des marchandises transportées et, pour les transports internationaux, à défaut de régions de chargement et de déchargement, des régions où se situent les points d’entrée et de sortie du territoire métropolitain.
« Un taux uniforme est fixé, pour chaque région, pour les transports effectués à l’intérieur de cette seule région et pour les transports internationaux dont la partie effectuée sur le territoire métropolitain l’est à l’intérieur de cette seule région.
« Un taux unique est fixé pour les transports effectués entre régions et pour les transports internationaux dont la partie effectuée sur le territoire métropolitain l’est sur plusieurs régions.
« Les taux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas du présent article sont compris entre 0 % et 7 %. Ils correspondent à l’évaluation de l’incidence moyenne de la taxe mentionnée au premier alinéa sur les coûts de transport compte tenu de la consistance du réseau soumis à cette taxe, des trafics de poids lourds et des itinéraires observés ainsi que du barème de cette taxe. Ils tiennent compte également des frais de gestion afférents à cette taxe supportés par les transporteurs. Ils sont fixés par arrêté du ministre chargé des transports.
« La facture établie par le transporteur fait apparaître la majoration instituée par le premier alinéa du présent article. » ;
3° À l'article L. 3242-3, les références : « de l'article L. 3222-1, L. 3222-2 et du premier alinéa de l'article L. 3222-3 » sont remplacées par les références : « des articles L. 3222-1, L. 3222-2 et L. 3222-3 ».
II. – Le I du présent article est applicable :
1° (Supprimé)
2° À compter de la date fixée par l’arrêté prévu à la première phrase du 1 du C du II de l’article 153 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.
III. – Au plus tard le 31 décembre 2014, le Gouvernement remet au Parlement un rapport identifiant les difficultés éventuellement rencontrées par les transporteurs routiers de marchandises et les donneurs d’ordre dans la mise en œuvre de la majoration du prix du transport routier prévue au I du présent article.
Ce rapport présente également les effets de la taxe prévue aux articles 269 à 283 quater du code des douanes et les effets de la majoration prévue au I du présent article sur les prix du transport routier de marchandises, l’évolution des négociations tarifaires entre les transporteurs routiers et les donneurs d’ordre et la répartition des parts de marché des transporteurs sur les trajets internationaux.
Il évalue notamment :
1° La correspondance entre les montants obtenus par les transporteurs au moyen de cette majoration et les montants acquittés par eux au titre de la taxe prévue aux mêmes articles 269 à 283 quater, en détaillant ces éléments à l’échelle nationale, à l’échelle régionale, ainsi que par catégorie de transporteurs ;
2° Le montant des péages résultant des reports de trafics, engendrés par l’entrée en vigueur de cette taxe, sur les sections d’autoroutes et routes soumises à péages, en détaillant ces éléments à l’échelle nationale et à l’échelle régionale ;
3° Les reports de trafics constatés sur le réseau non soumis à la taxe prévue auxdits articles 269 à 283 quater, après consultation des conseils départementaux et des comités de massif concernés ;
4° L’impact de l’entrée en vigueur de la taxe prévue aux mêmes articles 269 à 283 quater et de la majoration prévue au I du présent article sur le report modal.
Il analyse les effets de la taxe prévue auxdits articles 269 à 283 quater et de la majoration prévue au I du présent article sur les prix des produits de grande consommation.
Il présente les modalités d’application des taxes nationales sur les véhicules de transport de marchandises dans les pays européens qui en ont instaurées.
Article 7 bis
L’article L. 3223-3 du code des transports est ainsi modifié :
1° La référence : « à L. 3222-3 » est remplacée par la référence : « et L. 3222-2 » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 3222-3 est applicable à ces contrats de location lorsque le loueur est le redevable destinataire des avis de paiement des taxes prévues aux articles 269 à 283 quater du code des douanes. »
Article 7 ter
Le IV de l’article 270 du code des douanes est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette liste est révisée selon la même procédure, sur demande des collectivités territoriales, en cas d’évolution du trafic en provenance du réseau taxable. »
Article 8
Le titre Ier du livre Ier de la troisième partie du code des transports est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« Chapitre V
« Droits des passagers en transport par autobus et autocar
« Section 1
« Services réguliers
« Art. L. 3115-1. – Le règlement (UE) n° 181/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, concernant les droits des passagers dans le transport par autobus et autocar et modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 s’applique aux services réguliers mentionnés au chapitre Ier du présent titre lorsque la distance prévue à parcourir dans le cadre du service est égale ou supérieure à 250 kilomètres et lorsque la montée ou la descente du passager s’effectue sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne.
« À l’exception du 2 de l’article 4, de l’article 9, du 1 de l’article 10, du b du 1 et du 2 de l’article 16, des 1 et 2 de l’article 17 et des articles 24 à 28 du règlement (UE) n° 181/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, précité, l’application des dispositions du même règlement concernant les services nationaux peut faire l’objet d’un report, selon des modalités transparentes et non discriminatoires, pour une durée maximale de quatre ans à compter du 1er mars 2013, renouvelable une fois.
« Un arrêté conjoint des ministres chargés des transports et de l’économie précise la date d’application des dispositions qui font l’objet d’un report en application du deuxième alinéa du présent article.
« Art. L. 3115-2. – Le 2 de l’article 4, l’article 9, le 1 de l’article 10, le b du 1 et le 2 de l’article 16, les 1 et 2 de l’article 17 et les articles 24 à 28 du règlement (UE) n° 181/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, précité s’appliquent aux services réguliers dont la distance prévue à parcourir dans le cadre du service est inférieure à 250 kilomètres, lorsque la montée ou la descente du passager s’effectue sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne.
« Art. L. 3115-3. – L’application du règlement (UE) n° 181/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, précité en ce qui concerne certains services réguliers peut faire l’objet d’un report pour une durée maximale de quatre ans à compter du 1er mars 2013, renouvelable une fois, selon des modalités transparentes et non discriminatoires, dès lors qu’une part importante desdits services, y compris au moins un arrêt prévu, est effectuée en dehors de l’Union européenne.
« Un arrêté conjoint des ministres chargés des transports et de l’économie précise la date d’application des dispositions qui font l’objet d’un report en application du premier alinéa du présent article.
« Section 2
« Services occasionnels
« Art. L. 3115-4. – Les articles 1er à 8 et les 1 et 2 de l’article 17 du règlement (UE) n° 181/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, précité s’appliquent aux passagers voyageant dans le cadre de services occasionnels mentionnés au chapitre II du présent titre lorsque la montée ou la descente du passager s’effectue sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne.
« Section 3
« Formation des conducteurs au handicap
« Art. L. 3115-5. – L’application du b du 1 de l’article 16 du règlement (UE) n° 181/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 2011, précité peut, pour la formation des conducteurs, faire l’objet d’un report s’agissant des services mentionnés aux articles L. 3115-1, L. 3115-2 et L. 3115-3, pour une période maximale de cinq ans à compter du 1er mars 2013.
« Un arrêté conjoint des ministres chargés des transports et de l’économie précise la date d’application de la disposition qui fait l’objet d’un report en application du premier alinéa du présent article. »
Article 9
I. – Le code de la route est ainsi modifié :
1° L’article L. 130-6 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les infractions prévues aux articles L. 233-2, L. 317-1 à L. 317-4-1, L. 324-2, L. 325-3-1 et L. 413-1 peuvent être constatées par les fonctionnaires ou agents de l’État chargés du contrôle des transports terrestres placés sous l’autorité du ministre chargé des transports lorsqu’elles sont commises au moyen de véhicules affectés au transport routier de voyageurs ou de marchandises. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Ils ont également accès au poste de conduite afin d’y effectuer les vérifications prescrites par le présent code. » ;
2° L’article L. 225-5 est complété par un 10° ainsi rédigé :
« 10° Aux fonctionnaires ou agents de l’État chargés du contrôle des transports terrestres placés sous l’autorité du ministre chargé des transports pour l’exercice des compétences en matière de contrôle du transport routier prévues au présent code. » ;
3° Le I de l’article L. 330-2 est complété par un 15° ainsi rédigé :
« 15° Aux agents mentionnés aux articles L. 2132-21 et L. 2132-23 du code général de la propriété des personnes publiques, ainsi qu’aux articles L. 2241-1, L. 4321-3, L. 4272-1, L. 5243-1 et L. 5337-2 du code des transports habilités à dresser procès-verbal de contravention de grande voirie en application de ces mêmes codes et aux personnels de Voies navigables de France mentionnés à l’article L. 4272-2 du code des transports habilités à constater les infractions définies par les règlements de police de la navigation intérieure, aux seules fins d’identifier le titulaire du certificat d’immatriculation. »
II. – La dernière phrase du second alinéa du II de l’article L. 1451-1 du code des transports est ainsi modifiée :
1° Après les mots : « aux locaux », sont insérés les mots : « des entreprises de transport terrestre, des loueurs de véhicules de transport routier avec conducteur, des commissionnaires de transport et » ;
2° Sont ajoutés les mots : « , de location de véhicules de transport routier avec conducteur ou de commission de transport ».
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Article 11 bis
Avant le 31 décembre 2014, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport analysant les conséquences de la réglementation relative à la circulation des poids lourds de 40 à 44 tonnes sur le report modal et l’état des infrastructures routières utilisées. Ce rapport établit un bilan environnemental et socio-économique, en évaluant notamment les trafics concernés, les coûts ou les gains pour la collectivité nationale, les effets sur les émissions de dioxyde de carbone et les impacts sur les chaussées.
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES AUX INFRASTRUCTURES ET AUX SERVICES DE TRANSPORT FLUVIAL
Article 12
I. – Le titre IV du livre II de la quatrième partie du code des transports est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Déplacement d’office
« Art. L. 4244-1. – I. – L’autorité administrative met en demeure le propriétaire et, le cas échéant, l’occupant d’un bateau de quitter les lieux lorsque son stationnement, en violation de la loi ou du règlement général de police de la navigation intérieure, compromet la conservation, l’utilisation normale ou la sécurité des usagers des eaux intérieures. À l’expiration d’un délai qu’elle fixe et qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures après la mise en demeure, elle procède au déplacement d’office du bateau. Le gestionnaire de la voie d’eau peut être chargé par l’autorité administrative compétente de réaliser les opérations de déplacement d’office.
« Si le bateau tient lieu d’habitation, les mises en demeure adressées au propriétaire et à l’occupant fixent un délai d’exécution qui ne peut être inférieur à sept jours à compter de leur notification. Le déplacement d’office du bateau est réalisé de façon à en permettre l’accès à ses occupants.
« Sauf en cas d’urgence, la mise en demeure ne peut intervenir qu’après que le propriétaire et, le cas échéant, l’occupant ont été mis à même de présenter leurs observations, écrites ou orales, et qu’il leur a été indiqué la possibilité de se faire assister d’un conseil.
« En cas de péril imminent, les bateaux peuvent être déplacés d’office, sans mise en demeure préalable.
« II. – Les frais liés au déplacement d’office, à l’amarrage et à la garde du bateau déplacé sont à la charge du propriétaire. Les manœuvres liées au déplacement d’office et à l’amarrage sont réalisées aux risques et périls du propriétaire. Le propriétaire reste responsable de la garde du bateau.
« Art. L. 4244-2. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent chapitre. »
II. – Au dernier alinéa de l’article L. 1127-3 du code général de la propriété des personnes publiques, après le mot : « manifesté », sont insérés les mots : « ou s’il n’a pas pris les mesures de manœuvre ou d’entretien nécessaires pour faire cesser l’état d’abandon ».
Article 13
I. – L’article L. 2132-23 du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« Ont compétence pour constater concurremment les contraventions en matière de grande voirie définies aux articles L. 2132-5 à L. 2132-10, L. 2132-16 et L. 2132-17 :
« 1° Les fonctionnaires des collectivités territoriales et de leurs groupements ;
« 2° Les adjoints au maire et les gardes champêtres ;
« 3° Les personnels de Voies navigables de France sur le domaine qui lui a été confié, assermentés à cet effet devant le tribunal de grande instance ;
« 4° Les agents des ports autonomes fluviaux sur le domaine appartenant à ces ports ou qui leur a été confié, assermentés à cet effet devant le tribunal de grande instance ;
« 5° Les agents mentionnés à l’article L. 2132-21. » ;
2° À la première phrase du dernier alinéa, la référence : « au premier alinéa » est remplacée par les références : « aux 1° à 5° ».
II. – Le livre III de la quatrième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° Au début du second alinéa de l’article L. 4313-2, le mot : « Toutefois, » est supprimé ;
2° Au début du chapitre Ier du titre II, il est ajouté une section unique intitulée : « Voies ferrées des ports fluviaux » ;
3° Au début de l’article L. 4321-1, sont ajoutés les mots : « Sous réserve des dispositions de l’article L. 4321-3, » ;
4° L’article L. 4321-3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 4321-3. – Outre les officiers et agents de police judiciaire, les agents des ports autonomes fluviaux ont compétence pour constater par procès-verbal dans la circonscription du port où ils exercent leurs fonctions :
« 1° Les atteintes aux voies ferrées portuaires et les manquements aux règlements de police qui leur sont applicables, constitutifs de contraventions de grande voirie, dès lors qu’ils sont assermentés à cet effet devant le tribunal de grande instance ;
« 2° Les infractions aux règlements de police applicables aux voies ferrées portuaires passibles de peines contraventionnelles, dès lors qu’ils ont la qualité de fonctionnaires et qu’ils sont agréés dans les conditions prévues à l’article L. 5331-15. »
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Article 14 bis
Les parcelles, parties de parcelles ou ensembles immobiliers listés ci-après, appartenant au domaine public fluvial de l’État confié à Voies navigables de France en vertu de l’article L. 4314-1 du code des transports, peuvent, après déclassement, être apportés en pleine propriété à Voies navigables de France par arrêté des ministres chargés des transports et du budget. Les ensembles immobiliers de bureaux, qui relèvent du domaine privé, sont apportés en pleine propriété dans les mêmes conditions, sans déclassement préalable.
1° Commune de Valenciennes, île Folien, entre l’écluse de Valenciennes sur l’Escaut et son bras de décharge : les ensembles immobiliers cadastrés section AP n° 34, n° 35, n° 73, n° 74, n° 76 et n° 77 et deux autres ensembles immobiliers non cadastrés situés, respectivement, entre les PK 22.094 et 22.264 et entre les PK 21.932 et 21.986 ;
2° Commune de Lille, en rive droite de la Deûle canalisée, secteur nord du port, entre la cité Vauban et le pont de Dunkerque : l’ensemble immobilier cadastré section IZ n° 016 ;
3° Commune de Rouen, quai d’Elbeuf en rive gauche de la Seine face à l’île Lacroix, entre le viaduc d’Eauplet et le pont Corneille : les ensembles immobiliers cadastrés section MO n° 001 à n° 008 et deux autres ensembles immobiliers non cadastrés entre les PK 240.500 et 241.900 ;
4° Commune de Huningue, en rive gauche du Rhin :
a) Allée des Marronniers : l’ensemble immobilier cadastré section 1 n° 12 et les parcelles section 2 n° 68 et n° 69 ;
b) Rue de France : la parcelle cadastrée section 2 n° 41 ;
5° Commune de Saint-Dizier, en bordure du canal de la Marne à la Saône :
a) Rue Berthelot, en rive gauche du canal : l’ensemble immobilier cadastré section AO n° 237 à n° 239 et n° 241 à n° 245 ;
b) Avenue de Verdun, en rive gauche du canal : l’ensemble immobilier section AO n° 240, rue de la Tambourine, en rive droite du canal : les parcelles cadastrées section AO n° 005 et n° 006 ;
6° Commune de Toulouse, en rive gauche du canal du Midi :
a) Site des Amidonniers, allée de Brienne : l’ensemble immobilier cadastré section AB n° 009 et n° 0010 ;
b) Port de l’Embouchure : les ensembles immobiliers cadastrés section AB n° 002, n° 005, n° 006, n° 135 et n° 161 ;
c) Rue des Amidonniers : les ensembles immobiliers cadastrés section AB n° 007, n° 011, n° 012 et n° 131 à n°133 ;
7° Commune de Toulouse, en rive droite du canal du Midi, site du Château, rue port Saint-Étienne : l’ensemble immobilier cadastré section AB n° 087 à n° 090 ;
8° Commune d’Agde, en rive droite du canal du Midi, avenue Raymond Pitet : l’ensemble immobilier cadastré section HK n° 008.
Le transfert de propriété est gratuit et ne donne lieu ni au versement de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts, ni à aucune indemnité ou perception d’impôts, de droits ou de taxes de quelque nature que ce soit.
Nonobstant les dispositions législatives particulières applicables à Voies navigables de France, l’article L. 3211-13-1 du code général de la propriété des personnes publiques est applicable aux terrains ainsi transférés, qu’ils fassent l’objet par Voies navigables de France de cessions ou d’apports en vue de la réalisation de programmes de constructions visés à l’article L. 3211-7 du même code.
TITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES AUX INFRASTRUCTURES ET AUX SERVICES DE TRANSPORT MARITIME
Article 15
I. – Le chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° La section 1 est ainsi modifiée :
a) L’article L. 5141-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5141-1. – Le présent chapitre s’applique à tout engin flottant ou navire en état de flottabilité, désigné ci-après par les mots “le navire”, abandonné dans les eaux territoriales, dans les eaux intérieures en aval de la limite transversale de la mer ou dans les limites administratives des ports maritimes ou sur les rivages dépendant du domaine public maritime ou sur le littoral maritime et présentant un danger ou entravant de façon prolongée l’exercice des activités maritimes, littorales ou portuaires. » ;
b) Il est ajouté un article L. 5141-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5141-2-1. – En vue de mettre fin au danger ou à l’entrave prolongée mentionnés à l’article L. 5141-1, l’autorité administrative compétente de l’État peut procéder à la réquisition des personnes et des biens. Le contentieux du droit à indemnité en cas de réquisition est attribué à l’autorité judiciaire.
« Lorsque le propriétaire, l’armateur ou l’exploitant, ou leurs représentants, dûment mis en demeure de mettre fin, dans le délai qui leur a été imparti, au danger ou à l’entrave prolongée, refusent ou s’abstiennent de prendre les mesures nécessaires, l’autorité administrative compétente de l’État ou, dans les limites administratives des ports maritimes, l’autorité portuaire mentionnée à l’article L. 5331-5 peut intervenir aux frais et risques du propriétaire, de l’armateur ou de l’exploitant.
« En cas d’urgence, les mesures d’intervention, y compris de garde et de manœuvre, peuvent être exécutées d’office et sans délai. » ;
2° La section 2 est ainsi rédigée :
« Section 2
« Déchéance des droits du propriétaire
« Art. L. 5141-3. – Lorsqu’un navire se trouve dans un état d’abandon prolongé, la déchéance des droits du propriétaire sur le navire peut être prononcée, le cas échéant après mise en œuvre des mesures prévues à l’article L. 5141-2-1, par décision de l’autorité administrative compétente de l’État, sur demande, chacune pour ce qui la concerne, de l’une des autorités mentionnées au deuxième alinéa du même article L. 5141-2-1.
« La décision de déchéance ne peut intervenir qu’après mise en demeure du propriétaire par l’autorité administrative compétente de l’État de faire cesser, dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois et supérieur à trois mois à compter de sa publicité, l’état d’abandon dans lequel se trouve son navire. Cette autorité statue dans un délai de deux mois à compter de l’expiration du délai fixé par la mise en demeure.
« La mise en demeure et la décision de déchéance font l’objet d’une publicité à l’initiative de l’autorité qui est à l’origine de la demande de déchéance.
« Une fois la déchéance prononcée, l’autorité compétente pour prendre les mesures d’intervention, y compris de garde et de manœuvre, sur le navire est celle qui est à l’origine de la demande de déchéance.
« Art. L. 5141-3-1. – Les frais engagés par l’autorité portuaire pour la mise en œuvre des mesures d’intervention, y compris de garde et de manœuvre, sont pris en charge par l’État dans le cas où la présence du navire dans le port résulte d’une décision d’une autorité administrative de l’État ou de l’autorité judiciaire de dérouter, d’arraisonner ou, s’il est en difficulté, d’accueillir ce navire.
« Art. L. 5141-4. – En cas de déchéance, le navire abandonné peut être vendu ou, le cas échéant, faire l’objet d’une cession pour démantèlement au profit de la personne publique qui est à l’origine de la demande de déchéance, à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la publicité de la décision de déchéance et sous réserve des droits des créanciers privilégiés et hypothécaires.
« Art. L. 5141-4-1. – Les créances correspondant aux droits de port non acquittés et aux frais exposés par l’autorité portuaire mentionnée à l’article L. 5331-5 ou par l’autorité administrative compétente de l’État au titre des mesures d’intervention, y compris de garde et de manœuvre, ainsi qu’aux frais liés à la vente ou à la cession pour démantèlement sont imputées en priorité sur le produit de la vente ou de la cession pour démantèlement.
« Lorsque le produit de la vente ou de la cession pour démantèlement ne permet pas de couvrir les frais mentionnés au premier alinéa, le déficit est à la charge de la personne publique qui est à l’origine de la demande de déchéance. Toutefois, le déficit est pris en charge par l’État dans le cas où la présence du navire dans le port résulte d’une décision d’une autorité administrative de l’État ou de l’autorité judiciaire de dérouter, d’arraisonner ou, s’il est en difficulté, d’accueillir ce navire.
« Art. L. 5141-4-2. – Les conditions d’application de la présente section sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
3° Le second alinéa de l’article L. 5141-6 est ainsi rédigé :
« Au terme de ce délai, les sommes pour lesquelles aucun créancier ne s’est manifesté sont acquises à la personne publique pour le compte de laquelle a été prononcée la déchéance. »
II. – Le même code est ainsi modifié :
1° L’article L. 5242-16 est abrogé ;
2° L’article L. 6132-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 6132-2. – Les règles relatives aux épaves maritimes mentionnées aux articles L. 5242-17 et L. 5242-18 s’appliquent aux épaves d’aéronefs trouvés en mer ou sur le littoral maritime. »
Article 16
I. – La section 2 du chapitre II du titre II du livre Ier de la cinquième partie du code des transports est ainsi rédigée :
« Section 2
« Responsabilité civile des propriétaires de navires pour les dommages résultant de la pollution par les hydrocarbures
« Art. L. 5122-25. – Pour l’application de la présente section, les mots : “propriétaire”, “navire”, “événement”, “dommages par pollution” et “hydrocarbures” s’entendent au sens qui leur est donné à l’article 1er de la convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, faite à Londres le 27 novembre 1992, telle que modifiée.
« Art. L. 5122-26. – Le propriétaire d’un navire transportant une cargaison d’hydrocarbures en vrac est responsable de tout dommage par pollution causé par son navire, dans les conditions et limites fixées par la convention mentionnée à l’article L. 5122-25.
« Art. L. 5122-27. – Sous réserve de l’application du paragraphe 2 de l’article V de la convention mentionnée à l’article L. 5122-25, le propriétaire du navire est en droit de bénéficier de la limitation de responsabilité s’il constitue auprès d’un tribunal un fonds de limitation pour un montant s’élevant à la limite de sa responsabilité déterminée dans les conditions fixées par la même convention.
« Art. L. 5122-28. – Après la constitution du fonds de limitation, aucun droit ne peut être exercé, pour les mêmes créances, sur d’autres biens du propriétaire, à condition que le demandeur ait accès au tribunal qui contrôle le fonds de limitation et que le fonds de limitation soit effectivement disponible au profit du demandeur.
« Art. L. 5122-29. – Le fonds de limitation est réparti entre les créanciers proportionnellement au montant des créances admises.
« Si, avant la répartition du fonds de limitation, le propriétaire du navire, son préposé ou son mandataire, ou toute personne qui lui fournit l’assurance ou une autre garantie financière, a indemnisé en tout ou partie certains créanciers, il est autorisé à prendre, à due concurrence, la place de ces créanciers dans la distribution du fonds de limitation.
« Art. L. 5122-30. – Les conditions d’application de la présente section sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – L’article L. 5123-2 du même code est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Le propriétaire d’un navire, au sens du paragraphe 3 de l’article 1er de la Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, faite à Londres le 27 novembre 1992, telle que modifiée, souscrit une assurance ou une autre garantie financière satisfaisant aux exigences de cette convention lorsque ce navire est exploité sous pavillon français, ou touche ou quitte un port français ou une installation située dans la mer territoriale française. Un certificat attestant que la garantie est en cours de validité doit se trouver à bord du navire. »
III. – Le II de l’article L. 5123-3 du même code est abrogé.
IV. – L’article L. 5123-4 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 5123-4. – Une amende administrative d’un montant maximal de 100 000 € peut être prononcée par l’autorité administrative compétente à l’encontre d’un organisme habilité à délivrer les certificats d’assurance en application de l’article L. 5123-3, si celui-ci n’exécute pas la mission de contrôle qui lui est déléguée dans les conditions normales requises pour la bonne exécution de ce service.
« En cas de manquement grave ou répété dans l’exécution du service qui lui est délégué ou en cas de non-paiement de l’amende administrative prononcée en application du premier alinéa, la délégation peut être suspendue ou abrogée par l’autorité administrative compétente, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État. »
V. – Le II de l’article L. 5123-6 du même code est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Le fait pour le propriétaire d’un navire, au sens du paragraphe 3 de l’article 1er de la Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, faite à Londres le 27 novembre 1992, telle que modifiée, de ne pas respecter les obligations prévues au III de l’article L. 5123-2. »
Article 17
La sous-section 1 de la section 1 du chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de l’environnement est abrogée.
Article 18
I. – Le 9° du I de l’article L. 215-1 du code de la consommation est ainsi rédigé :
« 9° Les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer :
« a) Dans le domaine des affaires maritimes ;
« b) Au titre de la surveillance du marché, dans les domaines de la conformité et de la sécurité des bateaux de plaisance et de leurs pièces et de leurs pièces et éléments d’équipement ; ».
II. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° A (Supprimé)
1° L’article L. 218-26 est ainsi modifié :
a) Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
b) Les 4° et 5° sont abrogés ;
c) (Supprimé)
2° À la fin du premier alinéa de l’article L. 218-27, les mots : « inspecteur des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaire de catégorie A affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
3° L’article L. 218-36 est ainsi modifié :
a) Le 5° du I est ainsi rédigé :
« 5° Les fonctionnaires de catégorie A affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
b) Au premier alinéa du II, les mots : « inspecteur des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaire de catégorie A affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
4° L’article L. 218-53 est ainsi modifié :
a) Le 1° du I est ainsi rédigé :
« 1° Les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires de catégorie A affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
b) Au premier alinéa du II, les mots : « inspecteur des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaire de catégorie A affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
5° L’article L. 218-66 est ainsi modifié :
a) Le 2° du I est ainsi rédigé :
« 2° Les fonctionnaires de catégorie A affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
b) Les 4° et 8° du I sont abrogés ;
c) (Supprimé)
d) Au premier alinéa du II, les mots : « inspecteur des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaire de catégorie A affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
6° (Supprimé)
7° Le dernier alinéa de l’article L. 713-7 est ainsi rédigé :
« – les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer, les commandants, commandants en second et officiers en second des bâtiments de l’État ainsi que les commandants de bord des aéronefs de l’État, chargés de la surveillance en mer. »
III. – Le 2° du I de l’article L. 513-2 du code minier est ainsi rédigé :
« 2° Les fonctionnaires de catégorie A affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes ; ».
IV. – L’article L. 544-8 du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° Les mots : « les inspecteurs des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
2° Les mots : « les personnels embarqués d’assistance et de surveillance des affaires maritimes, », « les contrôleurs des affaires maritimes, », « les techniciens du contrôle des établissements de pêche, » et « , les syndics des gens de mer » sont supprimés.
V. – Le 8° du II de l’article L. 50 du code des pensions civiles et militaires de retraite est ainsi rédigé :
« 8° Lorsqu’un fonctionnaire affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer est tué en service au cours d’une mission de contrôle ou de surveillance. »
VI. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa du I de l’article L. 205-1 est ainsi modifié :
a) Les mots : « inspecteurs, contrôleurs, » sont supprimés ;
b) Les mots : « syndics des gens de mer » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
2° Le 8° du I de l’article L. 231-2 est ainsi rédigé :
« 8° Les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer, pour les contrôles officiels liés à la production de coquillages vivants ; »
2° bis (nouveau) À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 631-26, la référence : « 1° et 3° à 5° » est remplacée par la référence : « 1°, 3° et 5° ».
3° Le I de l’article L. 942-1 est ainsi modifié :
a) Au 1°, les mots : « et inspecteurs » sont remplacés par les mots : « du corps technique et administratif » ;
b) Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
c) Le 4° est abrogé ;
3° bis Au dernier alinéa de l’article L. 942-4, la référence : « 4° » est supprimée ;
4° Au 1° de l’article L. 942-7, les mots : « inspecteur ou contrôleur des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaire de catégorie A ou B affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ».
VII. – Le 9° de l’article L. 1515-6 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« 9° Les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer. »
VIII. – Le code des transports est ainsi modifié :
1° L’article L. 5123-7 est ainsi modifié :
a) Le 2° est ainsi rédigé :
« 2° Les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
b) Les 5° à 7° sont abrogés ;
c) (Supprimé)
2° À la première phrase des premier, deuxième et dernier alinéas de l’article L. 5142-7, les mots : « inspecteur des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « le fonctionnaire de catégorie A affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
3° L’article L. 5222-1 est ainsi modifié :
a) Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° Les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
b) Les 5° à 7° sont abrogés ;
c) (Supprimé)
3° bis Au deuxième alinéa de l’article L. 5222-2, la référence : « 7° » est remplacée par la référence : « 4° » ;
4° L’article L. 5243-1 est ainsi modifié :
a) Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Les fonctionnaires de catégorie A affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
b) Le 4° est abrogé ;
5° Le début de l’article L. 5243-2 est ainsi rédigé : « Les fonctionnaires de catégorie B et C affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer sont habilités… (le reste sans changement). » ;
6° À l’article L. 5243-2-2, les mots : « contrôleurs des affaires maritimes, les syndics des gens de mer » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires de catégorie B et C affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
7° Le 3° de l’article L. 5243-7 est ainsi rédigé :
« 3° Les fonctionnaires de catégorie A affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; »
8° (Supprimé)
9° Au second alinéa de l’article L. 5335-5, les mots : « syndic des gens de mer » sont remplacés par les mots : « fonctionnaire de catégorie C affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
10° Au 3° de l’article L. 5336-5, les mots : « et agents assermentés du ministère chargé de la mer » sont remplacés par les mots : « affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
11° À l’article L. 5548-3, les mots : « inspecteurs des affaires maritimes et les agents assermentés des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
12° À l’article L. 5548-4, le mot : « agents » est remplacé par le mot : « fonctionnaires ».
IX. – Le 5° de l’article L. 8271-1-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« 5° Les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes et les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ; ».
X. – Au premier alinéa de l’article L. 312-5 du code du travail applicable à Mayotte, les mots : « les officiers et les agents assermentés des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ».
XI. – L’article 33 de la loi n° 68-1181 du 30 décembre 1968 relative à l’exploration du plateau continental et à l’exploitation de ses ressources naturelles est ainsi modifié :
1° Au sixième alinéa, les mots : « inspecteurs des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires de catégorie A affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer » ;
2° Au onzième alinéa, les mots : « inspecteur des affaires maritimes » sont remplacés par les mots : « fonctionnaire de catégorie A affecté dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ».
XII. – Le 5° du I de l’article 7 de la loi n° 2008-518 du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales est ainsi rédigé :
« 5° Les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires de catégories A et B affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer, les commandants des bâtiments de l’État et les commandants de bord des aéronefs de l’État chargés de la surveillance en mer. »
XIII. – Le onzième alinéa du 3° du A de l’article 14 de l’ordonnance n° 2012-34 du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« 9° Les administrateurs des affaires maritimes, les officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer, les commandants, les commandants en second et les officiers en second des bâtiments de l’État ainsi que les commandants de bord des aéronefs de l’État chargés de la surveillance en mer ; ».
Article 19
Le livre Ier de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° L’article L. 5111-2 est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « Ces dispositions sont également applicables » sont remplacés par les mots : « Le premier alinéa est également applicable » ;
b) Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Est puni de la même peine d’amende le fait pour le conducteur du bateau, tel que défini à l’article L. 4212-1, de ne pas se conformer aux prescriptions de l’article L. 4113-1 sur les marques extérieures d’identification du bateau ou d’effacer, d’altérer, de couvrir ou masquer ces marques lorsqu’il pratique la navigation maritime en aval de la limite transversale de la mer.
« Le premier alinéa est également applicable aux personnes embarquées sur un bateau muni d’un titre de navigation intérieure lorsqu’il pratique la navigation maritime en aval de la limite transversale de la mer. » ;
2° À l’article L. 5111-3, après les mots : « du navire », sont insérés, trois fois, les mots : « ou du bateau ».
Article 20
Le livre II de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 5241-7, il est inséré un article L. 5241-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5241-7-1. – Pour l’exercice de leurs missions, les fonctionnaires et personnes chargés des visites et inspections des navires en application du présent chapitre effectuent leurs contrôles à toutes heures à bord des navires. » ;
2° Au premier alinéa du I de l’article L. 5242-1, le montant : « 7 500 € » est remplacé par le montant : « 30 000 € » ;
3° Au premier alinéa du I de l’article L. 5242-2, le montant : « 3 750 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
4° Il est ajouté un titre VIII ainsi rédigé :
« Titre VIII
« L’ENQUÊTE NAUTIQUE
« Art. L. 5281-1. – Après tout événement de mer, le capitaine transmet sans délai un rapport de mer au directeur interrégional de la mer responsable du service dans le ressort duquel il se trouve.
« Art. L. 5281-2. – Le directeur interrégional de la mer peut procéder, dès qu’il a connaissance d’un événement de mer, à une enquête administrative, dite “enquête nautique”, qui comporte l’établissement d’un rapport circonstancié sur les faits, en vue notamment de prendre toute mesure administrative, y compris d’urgence.
« Pour les besoins de l’enquête nautique, le directeur interrégional de la mer et les agents qu’il désigne à cet effet ont droit d’accéder à bord du navire, de procéder à sa visite, de recueillir tous renseignements et justifications nécessaires, d’exiger la communication de tous documents, titres, certificats ou pièces utiles, quel qu’en soit le support, et d’en prendre copie.
« Les modalités d’exécution de l’enquête nautique sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Lorsque l’enquête nautique révèle la commission d’une ou plusieurs infractions pénales, y compris les infractions maritimes, le directeur interrégional de la mer en informe immédiatement le procureur de la République territorialement compétent et lui adresse le rapport d’enquête nautique dès sa clôture. »
Article 21
La sous-section 2 de la section 2 du chapitre Ier du titre III du livre III de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifiée :
1° L’article L. 5331-5 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Dans le port de Port-Cros, le directeur de l’organisme mentionné à l’article L. 5314-11. » ;
2° L’article L. 5331-6 est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Dans le port de Port-Cros, le directeur de l’organisme mentionné à l’article L. 5314-11. »
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Article 21 ter
I. – Le chapitre IV du titre Ier du livre III de la cinquième partie du code des transports est complété par un article L. 5314-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 5314-12. – Dans chaque port maritime relevant du présent chapitre, les milieux professionnels, sociaux et associatifs ainsi que les collectivités territoriales et leurs groupements où sont situées les principales installations portuaires sont représentés dans un conseil portuaire, qui est consulté sur le positionnement stratégique et la politique de développement du port, et notamment sa politique tarifaire et foncière. »
II. – L’article L. 5723-2 du même code est abrogé.
Article 22
I. – Le chapitre Ier du titre III du livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Consignation
« Art. L. 5531-19. – Le capitaine peut, avec l’accord préalable du procureur de la République près la juridiction territorialement compétente au titre de l’un des critères mentionnés au second alinéa de l’article 37 de la loi du 17 décembre 1926 portant code disciplinaire et pénal de la marine marchande, ordonner la consignation dans un lieu fermé, pendant la durée strictement nécessaire, d’une personne mettant en péril la préservation du navire, de sa cargaison ou de la sécurité des personnes se trouvant à bord, lorsque les aménagements du navire le permettent. Un mineur est séparé de toute autre personne consignée ; il peut cependant être consigné avec un ou des membres de sa famille, à condition que cette mesure ne soit pas de nature à mettre en péril la préservation du navire, de sa cargaison ou de la sécurité des personnes, y compris celle des intéressés. En cas d’urgence, la consignation est immédiatement ordonnée par le capitaine, qui en informe aussitôt le procureur de la République afin de recueillir son accord.
« Avant l’expiration d’un délai de quarante-huit heures à compter de l’ordre de consignation du capitaine, le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République, statue par ordonnance motivée insusceptible d’appel sur la prolongation de la mesure pour une durée maximale de cent vingt heures à compter de l’expiration du délai précédent. Il peut solliciter du procureur de la République tous éléments de nature à apprécier la situation matérielle et l’état de santé de la personne qui fait l’objet de la consignation.
« La consignation peut être renouvelée, selon les mêmes modalités, jusqu’à la remise de la personne faisant l’objet de la consignation à l’autorité administrative ou judiciaire compétente, à moins que le capitaine n’ordonne la levée de la mesure.
« Sauf impossibilité technique, le procureur de la République et le juge des libertés et de la détention communiquent, s’ils l’estiment utile, avec la personne faisant l’objet de la consignation. »
II. – À compter de l’entrée en vigueur de l’article 2 de l’ordonnance n° 2012-1218 du 2 novembre 2012 portant réforme pénale en matière maritime, au premier alinéa de l’article L. 5531-19 du code des transports, la référence : « au second alinéa de l’article 37 de la loi du 17 décembre 1926 portant code disciplinaire et pénal de la marine marchande » est remplacée par la référence : « au II de l’article 3 de la loi du 17 décembre 1926 relative à la répression en matière maritime ».
Article 23
I. – Le livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par un titre VI ainsi rédigé :
« TITRE VI
« LES CONDITIONS SOCIALES DU PAYS D’ACCUEIL
« CHAPITRE Ier
« Champ d’application
« Art. L. 5561-1. – Le présent titre est applicable aux navires :
« 1° Ayant accès au cabotage maritime national et assurant un service de cabotage continental et de croisière d’une jauge brute de moins de 650 ;
« 2° Ayant accès au cabotage maritime national et assurant un service de cabotage avec les îles, à l’exception des navires de transport de marchandises d’une jauge brute supérieure à 650 lorsque le voyage concerné suit ou précède un voyage à destination d’un autre État ou à partir d’un autre État ;
« 3° Utilisés pour fournir dans les eaux territoriales ou intérieures françaises des prestations de service.
« Art. L. 5561-2. – Les dispositions des articles L. 5522-1, relatives à la nationalité des équipages, et L. 5522-2, relatives aux effectifs à bord, ainsi que les règlements pris pour leur mise en œuvre, sont applicables aux navires mentionnés à l’article L. 5561-1.
« CHAPITRE II
« Droits des salariés
« Art. L. 5562-1. – Les dispositions légales et les stipulations conventionnelles applicables aux salariés employés sur les navires mentionnés à l’article L. 5561-1 du présent code sont celles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d’activité établies en France, pour les matières suivantes :
« 1° Libertés individuelles et collectives dans la relation de travail ;
« 2° Discriminations et égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
« 3° Protection de la maternité, congés de maternité, de paternité et d’accueil de l’enfant, congés pour événements familiaux ;
« 4° Conditions de mise à disposition et garanties dues aux salariés par les entreprises exerçant une activité de travail temporaire ;
« 5° Exercice du droit de grève ;
« 6° Durée du travail, repos compensateurs, jours fériés, congés annuels payés, durée du travail et travail de nuit des jeunes travailleurs ;
« 7° Salaire minimum et paiement du salaire, y compris les majorations pour les heures supplémentaires ;
« 8° Règles relatives à la santé et à la sécurité au travail, âge d’admission au travail, emploi des enfants ;
« 9° Travail illégal.
« Art. L. 5562-2. – Un contrat de travail écrit est conclu entre l’armateur et chacun des salariés relevant des gens de mer. Il mentionne :
« 1° Ses nom et prénoms, sa date et son lieu de naissance, son numéro d’identification ou toute autre référence équivalente ;
« 2° Le lieu et la date de conclusion du contrat ;
« 3° Les nom et prénoms ou raison sociale et l’adresse de l’armateur ;
« 4° Le service pour lequel le salarié est engagé ;
« 5° Les fonctions qu’exerce le salarié ;
« 6° Le montant des salaires et accessoires, ainsi que le nombre d’heures de travail auquel se rapporte la rémunération prévue ;
« 7° Les droits à congés payés ou la formule utilisée pour les calculer ;
« 8° Les prestations en matière de protection de la santé et de sécurité sociale qui doivent lui être assurées par l’armateur ;
« 9° Le droit à un rapatriement ;
« 10° L’intitulé de la convention collective nationale française étendue dont relèvent les navires battant pavillon français effectuant les mêmes navigations et la référence aux accords collectifs applicables au sein de l’entreprise ;
« 11° Le terme du contrat si celui-ci est conclu pour une durée déterminée.
« Art. L. 5562-3. – La prise des congés déterminés par le contrat de travail ne peut être remplacée par une indemnité compensatrice, sauf si la relation de travail est arrivée à son terme. L’armateur établit un document individuel mentionnant l’indemnité compensatrice perçue par chacun des gens de mer pour la fraction de congés dont il n’a pas bénéficié.
« CHAPITRE III
« Protection sociale
« Art. L. 5563-1. – Les gens de mer employés à bord d’un navire mentionné à l’article L. 5561-1 bénéficient du régime de protection sociale de l’un des États membres de l’Union européenne ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen.
« Le régime de protection sociale comprend nécessairement :
« 1° Le risque santé, qui prend en charge la maladie, l’invalidité, l’accident du travail et la maladie professionnelle ;
« 2° Le risque maternité-famille ;
« 3° Le risque emploi, qui prend en charge le chômage ;
« 4° Le risque vieillesse.
« Art. L. 5563-2. – L’armateur ou l’un de ses préposés déclare tout accident survenu à bord et dont le capitaine a eu connaissance au directeur départemental des territoires et de la mer du premier port français touché par le navire après sa survenue.
« La déclaration peut être faite par la victime ou ses représentants jusqu’à l’expiration de la deuxième année qui suit l’accident.
« CHAPITRE IV
« Dispositions particulières à certains salariés
« Art. L. 5564-1. – À bord des navires pratiquant un service de cabotage à passagers avec les îles ou de croisière, et d’une jauge brute de moins de 650, le personnel désigné pour aider les passagers en cas de situation d’urgence est aisément identifiable et possède, sur le plan de la communication, des aptitudes suffisantes pour remplir cette mission en satisfaisant aux critères fixés par le c de l’article 18 de la directive 2008/106/CE du Parlement européen et du Conseil, du 19 novembre 2008, concernant le niveau minimal de formation des gens de mer.
« CHAPITRE V
« Documents obligatoires
« Art. L. 5565-1. – La liste des documents qui sont tenus à la disposition des membres de l’équipage et affichés dans les locaux réservés à l’équipage est fixée par décret.
« Ce décret fixe notamment ceux des documents obligatoires qui sont disponibles en français et dans la langue de travail du navire.
« Art. L. 5565-2. – La liste des documents qui sont tenus à la disposition des agents mentionnés aux articles L. 5548-1 et L. 5548-3 et dont ils peuvent prendre copie, quel que soit le support, est fixée par décret.
« CHAPITRE VI
« Sanctions pénales
« Art. L. 5566-1. – Est puni d’une amende de 3 750 € le fait pour l’armateur de recruter des gens de mer :
« 1° Sans avoir établi un contrat de travail écrit ;
« 2° En ayant conclu un contrat de travail ne comportant pas les mentions prévues à l’article L. 5561-2 ou comportant ces mentions de manière volontairement inexacte.
« La récidive est punie d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 7 500 €.
« Art. L. 5566-2. – Est puni d’une amende de 3 750 € le fait pour l’armateur de méconnaître les dispositions de l’article L. 5563-1 relatives à l’obligation de faire bénéficier les gens de mer d’un régime de protection sociale de l’un des États membres de l’Union européenne ou d’un État partie à l’Espace économique européen couvrant obligatoirement les risques santé, maternité-famille, emploi et vieillesse.
« Les infractions donnent lieu à autant d’amendes qu’il y a de gens de mer indûment employés. »
II. – L’article L. 5342-3 du code des transports est abrogé.
III. – L’ordonnance n° 2012-1218 du 2 novembre 2012 portant réforme pénale en matière maritime est ratifiée.
IV. – L’ordonnance n° 2012-1218 du 2 novembre 2012 portant réforme en matière pénale maritime est ainsi modifiée :
1° Au troisième alinéa de l’article 2 et aux dixième, dix-huitième, vingtième, vingt-deuxième, vingt-cinquième, trente et unième, trente-septième et quarante-sixième alinéas de l’article 15, après la référence : « L. 5542-55, », sont insérées les références : « L. 5566-1, L. 5566-2, » ;
2° Après la première occurrence de la référence : « L. 5642-2 », la fin des trente et unième et trente-septième alinéas de l’article 15 est supprimée.
TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES À L’AVIATION CIVILE
Article 24
Le troisième alinéa de l’article L. 571-7 du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« Les deux premiers alinéas ne sont pas applicables aux aéronefs effectuant une mission de caractère sanitaire ou humanitaire, aux aéronefs effectuant une mission de protection des personnes ou des biens, aux aéronefs effectuant une mission d’État ou aux aéronefs militaires. »
Article 24 bis A
À l’échéance de l’autorisation d’occupation temporaire détenue par la chambre de commerce et d’industrie du Var sur une partie du domaine public de l’aérodrome de Hyères-Le Palyvestre, les agents publics affectés à cette exploitation sont mis, pour une durée de dix ans, à la disposition du délégataire désigné par l’État à cette date pour la concession relative à l’aérodrome de Hyères-Le Palyvestre.
Pendant la durée de cette période de mise à disposition, chaque agent est pris en charge par le nouveau délégataire aux mêmes conditions que celles dont il bénéficiait avant l’échéance de l’autorisation d’occupation temporaire mentionnée au premier alinéa et peut, à tout moment, demander que lui soit proposé par le nouveau délégataire un contrat de travail. La conclusion de ce contrat emporte radiation des cadres.
Au terme de la durée de dix ans prévue au premier alinéa, le délégataire propose à chacun des agents publics un contrat de travail, dont la conclusion emporte radiation des cadres. Les agents publics qui refusent ce contrat sont réintégrés de plein droit au sein de la chambre de commerce et d’industrie dont ils relèvent.
TITRE V bis
DISPOSITIONS RELATIVES À LA LOGISTIQUE
Article 24 bis
Avant le 31 décembre 2014, le Gouvernement prend l’initiative d’organiser une conférence nationale sur la logistique rassemblant tous les acteurs et tous les gestionnaires d’équipements permettant de gérer les flux du secteur ainsi que des experts, afin d’effectuer un diagnostic de l’offre logistique française, de déterminer les besoins pour les années à venir et d’évaluer l’opportunité de mettre en œuvre un schéma directeur national de la logistique qui pourrait constituer une annexe au schéma national des infrastructures de transport, et ainsi d’identifier les priorités d’investissement et de service dans un plan d’action national pour la compétitivité logistique de la France.
Les régions et les métropoles seraient invitées à définir et à mettre en œuvre sur leur territoire des plans d’action logistiques intégrés au plan d’action national.
Titre V ter
DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXPROPRIATION
Article 24 ter
Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :
1° L’article 15-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 15-1. - Dans le délai d'un mois, soit du paiement de l’indemnité ou, en cas d’obstacle au paiement ou de refus de recevoir, de sa consignation, soit de l'acceptation ou de la validation de l'offre d'un local de remplacement, les détenteurs sont tenus d'abandonner les lieux. Passé ce délai qui ne peut, en aucun cas, être modifié, même par autorité de justice, il peut être procédé à l’expulsion des occupants.
2° L’article 15-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 15-2. – En cas d’appel du jugement fixant l’indemnité, lorsqu’il existe des indices sérieux laissant présumer qu’en cas d’infirmation, l’expropriant ne pourrait recouvrer tout ou partie des sommes qui lui seraient dues en restitution, celui-ci peut être autorisé par le juge à consigner tout ou partie du montant de l’indemnité supérieur à ce que l’expropriant avait proposé. Cette consignation vaut paiement. La prise de possession intervient selon les modalités définies à l’article L. 15-1. »
TITRE VI
MODALITÉS D’APPLICATION AUX OUTRE-MER
Article 25
I. (Supprimé)
II. – L’article 8 entre en vigueur à Mayotte au 1er janvier 2014.
II bis. – L’article 10 n’est pas applicable à Mayotte.
II ter. – Le 1° du II de l’article 13 n’est pas applicable en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
III. – L’article 15 est applicable :
1° En Nouvelle-Calédonie, dans les conditions prévues par l’article L. 5761-1 du code des transports ;
2° En Polynésie française, dans les conditions prévues par l’article L. 5771-1 du code des transports ;
3° À Wallis-et-Futuna ;
4° Dans les Terres australes et antarctiques françaises.
IV. – Les articles 16 et 17 sont applicables à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises. Les I et II de l’article 16 sont applicables en Nouvelle-Calédonie.
V. – Aux articles L. 632-1 et L. 640-1 du code de l’environnement, la référence : « L. 218-1 » est remplacée par la référence : « L. 218-10 ».
VI. – Le III de l’article 18 n’est pas applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.
VII. – Les II à IV, les 3° à 4° du VI, les 1° à 7° du VIII et les XI et XII de l’article 18 sont applicables en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna.
VIII. – Les II à IV, les 3° à 4° du VI, les 2° à 7° du VIII et les XI et XII de l’article 18 sont applicables en Polynésie française.
IX. – Les II à IV, les 3° à 4° du VI, les 1° à 7° et 11° du VIII et les XI et XII de l’article 18 sont applicables dans les Terres australes et antarctiques françaises.
X. – Les articles 19, 20 et 22 sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
XI. – À l’article L. 5725-1 du code des transports, les mots : « du titre V » sont remplacés par les mots : « des titres V et VI ».
XI bis. – L’article L. 3551-1 du code des transports est ainsi rédigé :
« Art. L. 3551-1. – Le chapitre V du titre Ier du livre Ier de la présente partie et le deuxième alinéa de l’article L. 3122-1 ne s’applique pas à Saint-Pierre-et-Miquelon. »
XII. – Le livre VII de la cinquième partie du code des transports est ainsi modifié :
1° Le chapitre II du titre Ier est complété par un article L. 5712-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5712-2. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 en Guadeloupe, en Guyane et en Martinique, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “directeur de la mer”. À La Réunion, ces mêmes mots sont remplacés par les mots : “directeur de la mer sud océan indien”. » ;
2° Le chapitre II du titre II est complété par un article L. 5722-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5722-2. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 à Mayotte, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “directeur de la mer sud océan indien”. » ;
3° Le chapitre II du titre III est complété par un article L. 5732-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5732-2. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 à Saint-Barthélemy, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “directeur de la mer en Guadeloupe”. » ;
4° Le chapitre II du titre IV est complété par un article L. 5742-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5742-2. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 à Saint-Martin, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “directeur de la mer en Guadeloupe”. » ;
5° Le chapitre II du titre V est complété par un article L. 5752-2 ainsi rédigé :
« Art. L 5752-2. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 à Saint-Pierre-et-Miquelon, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “directeur des territoires, de l’alimentation et de la mer”. » ;
6° Le titre VI est ainsi modifié :
a) L’article L. 5761-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5761-1. – Le livre Ier est applicable en Nouvelle-Calédonie, à l’exception du chapitre II du titre Ier et du chapitre III du titre II.
« Le titre IV est applicable en Nouvelle-Calédonie sous réserve des compétences dévolues à la collectivité en matière de police et de sécurité de la circulation maritime et de sauvegarde de la vie humaine en mer. » ;
b) Le chapitre Ier est complété par un article L. 5761-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5761-2. – Pour l’application des articles L. 5141-2-1 et L. 5141-4-1 en Nouvelle-Calédonie, les mots : “l’autorité portuaire mentionnée à l’article L. 5331-5” sont remplacés par les mots : “l’autorité portuaire compétente”. » ;
c) Le chapitre II est complété par un article L. 5762-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 5762-3. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 en Nouvelle-Calédonie, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “chef du service des affaires maritimes”. » ;
7° Le titre VII est ainsi modifié :
a) Le second alinéa de l’article L. 5771-1 est complété par les mots : « , sous réserve des compétences dévolues à cette collectivité par la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française dans les eaux intérieures et en matière de sécurité des navires de moins de 160 tonneaux de jauge brute qui ne sont pas destinés au transport de passagers » ;
b) Le chapitre Ier est complété par un article L. 5771-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5771-2. – Pour l’application des articles L. 5141-2-1 et L. 5141-4-1 en Polynésie française, les mots : “l’autorité portuaire mentionnée à l’article L. 5331-5” sont remplacés par les mots : “l’autorité portuaire compétente”. » ;
c) Le chapitre II est complété par un article L. 5772-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 5772-4. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 en Polynésie française, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “chef du service des affaires maritimes”. » ;
8° Le titre VIII est ainsi modifié :
a) Le chapitre Ier est complété par un article L. 5781-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 5781-3. – Pour l’application des articles L. 5141-2-1 et L. 5141-4-1 à Wallis-et-Futuna, les mots : “l’autorité portuaire mentionnée à l’article L. 5331-5” sont remplacés par les mots : “l’autorité portuaire compétente”. » ;
b) Le chapitre II est complété par un article L. 5782-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 5782-4. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 à Wallis-et-Futuna, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “chef du service des affaires maritimes”. » ;
9° Le titre IX est ainsi modifié :
a) Le chapitre Ier est complété par un article L. 5791-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 5791-3. – Pour l’application des articles L. 5141-2-1 et L. 5141-4-1 aux Terres australes et antarctiques françaises, les mots : “l’autorité portuaire mentionnée à l’article L. 5331-5” sont remplacés par les mots : “l’autorité portuaire compétente”. » ;
b) Le chapitre II est complété par un article L. 5792-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 5792-4. – Pour l’application des articles L. 5281-1 et L. 5281-2 aux Terres australes et antarctiques françaises, les mots : “directeur interrégional de la mer” sont remplacés par les mots : “directeur de la mer sud océan indien”. »
XIII. – Le livre VII de la sixième partie du même code est ainsi modifié :
1° L’article L. 6761-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les sections 1 et 2 du chapitre II du titre III du livre Ier sont applicables en Nouvelle-Calédonie dans les conditions fixées à l’article L. 5761-1. » ;
2° L’article L. 6771-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Le chapitre II du titre III du livre Ier est également applicable en Polynésie française sous réserve, pour les sections 1 et 2, des conditions fixées à l’article L. 5771-1. »
Titre VII
CENTRE D’ÉTUDES ET D’EXPERTISE SUR LES RISQUES, L’ENVIRONNEMENT, LA MOBILITÉ ET L’AMÉNAGEMENT
Article 26
Il est créé un établissement public de l’État à caractère administratif dénommé « Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement » (Cérema). Il comprend un siège, des directions techniques et des implantations territoriales ayant une vocation nationale. L’établissement constitue un centre de ressources et d’expertises scientifiques et techniques interdisciplinaires apportant son concours à l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques en matière d’aménagement, d’égalité des territoires et de développement durable, notamment dans les domaines de l’environnement, des transports et de leurs infrastructures, de la prévention des risques, de la sécurité routière et maritime, de la mer, de l’urbanisme, de la construction, de l’habitat et du logement, de l’énergie et du climat.
L’établissement a pour missions :
1° De promouvoir et de faciliter des modes de gestion des territoires qui intègrent l’ensemble des facteurs environnementaux, économiques et sociaux ;
2° D’accompagner les acteurs publics et privés dans la transition vers une économie sobre en ressources et décarbonée, respectueuse de l’environnement et équitable ;
3° D’apporter à l’État et aux acteurs territoriaux un appui, en termes d’ingénierie et d’expertise technique sur les projets d’aménagement nécessitant notamment une approche pluridisciplinaire ou impliquant un effort de solidarité ;
4° D’assister les acteurs publics dans la gestion de leur patrimoine d’infrastructures de transport et de leur patrimoine immobilier ;
5° De renforcer la capacité des acteurs territoriaux à faire face aux risques auxquels sont soumis leurs territoires et leurs populations ;
6° De promouvoir aux échelons territorial, national, européen et international les règles de l’art et le savoir-faire développés dans le cadre de ses missions et en assurer la capitalisation.
Article 27
Pour l’accomplissement de ses missions, l’établissement assure, essentiellement à la demande de l’État, des activités de conseil, d’assistance, d’études, de contrôle, d’innovation, d’expertise, d’essais et de recherche. Il peut prêter concours, dans ses domaines de compétences, aux services déconcentrés de l’État dans leurs missions d’assistance aux collectivités territoriales, notamment pour des raisons de solidarité nationale ou pour la mise en œuvre des politiques publiques.
À ces fins, l’État peut faire appel au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement dans le cadre du 1° de l’article 3 du code des marchés publics.
À titre accessoire, l’établissement peut réaliser les prestations définies au premier alinéa du présent article directement pour le compte de tiers autres que l’État.
Article 28
Le conseil d’administration de l’établissement est composé :
1° De représentants de l’État ;
2° D’élus représentant les collectivités territoriales ;
3° De personnalités qualifiées extérieures à l’établissement choisies en raison de leur compétence, parmi lesquelles des personnes issues du monde des associations d’usagers et de protection de l’environnement ;
4° De représentants élus du personnel de l’établissement.
Le président du conseil d’administration est élu par les membres du conseil d’administration.
Le directeur général est nommé par décret, sur proposition des ministres chargés du développement durable, des transports et de l’urbanisme.
L’établissement est doté d’un conseil stratégique, qui prépare les travaux du conseil d’administration en matière de stratégie de l’établissement. Le conseil stratégique comprend, à parts égales, des représentants de l’État et des élus représentant les collectivités territoriales.
Des comités d’orientation thématiques nationaux et territoriaux sont créés. Ces comités proposent des orientations relatives aux grands enjeux de société et des programmes d’actions territoriaux. Ces instances prennent en compte les besoins des services déconcentrés de l’État en région ou dans les départements, des collectivités territoriales et des autres bénéficiaires des productions de l’établissement. La synthèse des propositions est soumise à la validation du conseil d’administration.
Article 29
Les ressources de l’établissement comprennent :
1° Les subventions de l’État, des collectivités territoriales et de toutes autres personnes publiques et privées ;
2° Le produit des opérations commerciales ;
3° Les dons et legs ;
4° Le revenu des biens meubles et immeubles ;
5° Le produit des placements ;
6° Le produit des aliénations ;
7° D’une manière générale, toute autre recette provenant de l’exercice de ses activités.
L’établissement est autorisé à placer ses fonds disponibles dans les conditions fixées par le ministre chargé des finances.
Article 30
Sans préjudice des dispositions applicables aux personnels des établissements publics administratifs de l’État :
1° Les agents non titulaires de droit public, employés à durée indéterminée, exerçant leurs fonctions dans les services ou parties de services dont les missions sont transférées au Cérema à la date d’entrée en vigueur du présent titre demeurent agents de l’État et sont affectés, à cette date, au centre ;
2° Les agents non titulaires de droit public, employés à durée déterminée, exerçant leurs fonctions dans les services ou parties de services dont les missions sont transférées au Cérema à la date d’entrée en vigueur du présent titre sont recrutés, à cette date, par le centre par des contrats de droit public reprenant les stipulations de leur contrat. Ils conservent le bénéfice de l’ancienneté acquise au titre de leurs précédents contrats ;
3° Les ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes de l’État exerçant leurs fonctions dans les services ou parties de services dont les missions sont transférées au Cérema à la date d’entrée en vigueur du présent titre sont affectés, à cette date, au centre. Ils restent soumis aux dispositions réglementaires les régissant et conservent le bénéfice du régime de pension des ouvriers d’État.
Article 31
Les fonctionnaires et agents en fonction dans l’établissement peuvent être commissionnés par le ministre chargé de la construction et de l’habitation et assermentés conformément à l’article L. 152-1 du code de la construction et de l’habitation.
Article 32
La représentation des personnels au sein du conseil d’administration, du conseil scientifique et technique, du comité technique d’établissement public et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l’établissement se fait de façon transitoire, jusqu’aux élections qui seront organisées fin 2014, au prorata des voix obtenues par chaque organisation syndicale lors des élections des comités techniques de proximité organisées en octobre 2011 dans les services constituant le Cérema et dont au moins 80 % des agents rejoignent le Cérema. Les comités techniques de proximité existant dans ces services sont maintenus en fonction pendant cette période.
Article 33
Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent titre.
Article 34
Le présent titre entre en vigueur au 1er janvier 2014.
M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je vais mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la commission mixte paritaire.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, le groupe CRC souhaiterait intervenir sur les articles 5, 6 ter, 11 bis, 16 et 23.
M. le président. Ma chère collègue, il n’est pas logique, ni d’ailleurs conforme à nos usages, que des orateurs s’expriment à ce moment du débat sur les articles.
Toutefois, la conférence des présidents n’ayant pas demandé la stricte application du règlement en la matière, je puis, en ma qualité de président de séance, accorder certaines dérogations.
Aussi, je vous propose, ainsi qu’aux quatre autres sénateurs du groupe CRC présents, d’intervenir chacun sur un article, étant rappelé que vous aurez également la possibilité de vous exprimer dans le cadre des explications de vote sur l’ensemble.
Ce compromis vous semble-t-il acceptable ?
Mme Mireille Schurch. Cela nous convient, monsieur le président.
Mme Mireille Schurch. Aujourd’hui, l’article L. 121-1 du code de la voirie routière dispose que « le domaine public routier national est constitué d’un réseau cohérent d’autoroutes et de routes d’intérêt national ou européen. Des décrets en Conseil d’État, actualisés tous les dix ans, fixent, parmi les itinéraires, ceux qui répondent aux critères précités ».
À la suite de la loi de décentralisation de 2004, les routes ne répondant pas à ce critère ont été transférées aux départements. Toutefois, il était prévu que « l’État conserve dans le domaine public routier national, jusqu’à leur déclassement, les tronçons de routes nationales n’ayant pas de vocation départementale et devant rejoindre le domaine public routier communal ».
L’article L. 123-3 du code précité indique que « le reclassement dans la voirie départementale ou communale d’une route ou section de route nationale déclassée est prononcé par l’autorité administrative lorsque la collectivité intéressée dûment consultée n’a pas, dans un délai de cinq mois, donné un avis défavorable. »
Lorsque l’avis de la collectivité est défavorable, le reclassement peut alors être prononcé par décret en Conseil d’État, mais si et seulement si, ce déclassement est motivé par l’ouverture d’une voie nouvelle ou par le changement de tracé d’une voie existante.
Le présent article prévoit de revoir ces dispositions en facilitant les procédures de déclassement par l’État de routes ou de sections de routes nationales.
L’étude d’impact mentionne de manière limpide que l’objectif de cette mesure « est d’élargir les possibilités pour déclasser des sections de route nationale dans l’hypothèse où la collectivité concernée formule un avis défavorable ».
Pour la mise en œuvre de cette disposition, le présent article prévoit, dans le cas de déclassement de la voirie, que les collectivités reçoivent une compensation financière correspondant aux coûts éventuels de remise en état, de l’ordre de 70 000 euros par kilomètre.
Même si cela concerne un patrimoine marginal, représentant près de 250 kilomètres de route, nous considérons, pour notre part, que cette nouvelle charge incombant aux communes doit être justement encadrée.
Pour ce faire, nous avions proposé en première lecture un amendement, qui avait été, malheureusement, déclaré irrecevable, aux termes duquel cette compensation financière intégrait également une provision pour les charges afférentes à l’entretien de ces routes, sur le modèle de ce qui a longtemps été le cas pour les ouvrages d’art, par le biais d’une soulte libératoire.
En effet, à défaut d’une telle provision, ce transfert de compétence pourrait être un cadeau empoisonné pour des collectivités qui devront en supporter les charges d’entretien, faute de quoi leur responsabilité pourra être engagée.
Cela est d’ailleurs clairement rappelé dans l’étude d’impact, qui indique que « les usagers et tiers devront donc se tourner vers la collectivité dans l’hypothèse de dommages de travaux publics éventuels postérieurs au déclassement ».
Je profite de cette intervention pour vous demander une nouvelle fois, monsieur le ministre – je sais que vous y êtes favorable –, d’inscrire à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée nationale la proposition de loi, adoptée à l’unanimité par la Haute Assemblée, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies, dont on sait maintenant qu’elles représentent une charge explosive pour les collectivités.
Cela étant, et pour l’ensemble des raisons que je viens d’exposer, nous continuons de regretter que les précautions que nous avions alors proposées n’aient pas été inscrites dans ce dispositif.
article 6 ter
Mme Mireille Schurch. Alors que nous avions adopté ici même un amendement, déposé par plusieurs sénateurs, dont ceux du groupe CRC, permettant d’exonérer les véhicules, propriété de l’État ou d’une collectivité locale, affectés à l’entretien et à l’exploitation des routes, l’Assemblée nationale a fait le choix de supprimer cette disposition, dès l’examen du texte en commission.
Pourtant, le rapporteur de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale avait estimé, dans son rapport, qu’il s’agissait d’un apport de bon sens, qui constituait l’application directe d’une possibilité d’exonération ouverte par la directive Eurovignette.
Il considérait également avec raison qu’il aurait été quelque peu difficile à admettre que des véhicules communaux ou départementaux soient soumis à l’écotaxe pour des travaux d’entretien des routes locales, voire nationales, dans le cas d’une convention conclue avec l’État.
Les députés ont décidé de supprimer cette exonération, au nom du devoir d’exemplarité des collectivités publiques et en raison de la discrimination qui serait sinon créée entre les collectivités locales propriétaires de véhicules d’entretien et celles qui ont recours à des véhicules appartenant à des cocontractants privés.
Nous estimons, pour notre part, que ces arguments sont difficilement recevables.
D’abord, la discrimination ainsi créée est toute relative, puisque la limitation du champ de l’exonération aux seuls véhicules publics est justifiée : l’inclusion des véhicules appartenant à des entreprises privées aurait affaibli le dispositif légal et introduit une complexité supplémentaire.
Quant à l’exemplarité de l’État, comme des collectivités, nous en avons, mes chers collègues, une vision tout à fait différente.
L’exemplarité consiste non pas à chercher uniquement la symbolique, mais à mener une politique qui permette concrètement de replacer l’intérêt général au cœur des politiques publiques et à tenir les engagements qui ont été pris dans le cadre d’une campagne qui n’est pas si lointaine. Je veux surtout parler de l’engagement n° 54 par lequel un pacte de confiance et de solidarité, garantissant le niveau des dotations à leur niveau actuel, serait conclu entre l’État et les collectivités locales.
Par ailleurs, nous sommes particulièrement satisfaits que l’article 6 ter, un article de bon sens, vous en conviendrez, mes chers collègues, ait été rétabli par la commission mixte paritaire, car cette disposition est attendue par les élus, notamment les conseillers généraux.
article 11 bis
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. François Trucy. Ce n’est plus une dérogation !
Mme Mireille Schurch. Aux termes de cet article, le Gouvernement doit transmettre au Parlement, avant le 31 décembre 2014, un rapport analysant les conséquences de la réglementation relative à la circulation des poids lourds de 40 à 44 tonnes sur le territoire.
Si nous sommes favorables à une telle évaluation, nous pensons qu’il aurait été opportun de la mener avant de généraliser cette autorisation de circulation à tous les secteurs d’activité sur tout le territoire.
En effet, alors que nous dénonçons depuis plusieurs années l’incompatibilité de la circulation des poids lourds de 44 tonnes avec les objectifs du Grenelle de l’environnement, un décret du 4 décembre 2012 signé par Mme Batho et par vous-même, monsieur le ministre, généralisant la circulation des véhicules de 44 tonnes, est entré en vigueur le 1er janvier 2013. Or le décret du 17 janvier 2011 n’autorisait la circulation de ces véhicules que pour les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire, et à partir de 2014 pour les autres secteurs.
Pourquoi ne pas avoir demandé une étude préalable afin d’évaluer l’impact environnemental et socio-économique, les coûts ou les gains pour la collectivité nationale, les effets sur les émissions de dioxyde de carbone et les impacts sur les chaussées ?
Il est vrai que, à première vue, charger un peu plus les poids lourds en leur donnant la possibilité de passer à 44 tonnes peut paraître écologiquement logique. Si l’on transporte plus de marchandises par camion, on réduit leur nombre, mais nous savons depuis de nombreuses années que c’est une fausse bonne idée ; pire, une véritable hypocrisie !
En effet, la circulation des poids lourds de 44 tonnes entraîne une détérioration plus rapide des routes. Dans un rapport de 2011, le Conseil général de l’environnement et du développement durable a estimé le surcoût lié à l’entretien des routes entre 400 et 500 millions d’euros par an, une somme d’autant plus importante que le budget consacré en 2013 à l’entretien du réseau routier national non concédé ne permet même pas d’assurer l’entretien et le maintien à niveau du réseau existant.
Notre autre motif de perplexité réside dans le fait que tous, sur quelque travée que nous siégions, nous avons affirmé la nécessité, pour répondre aux objectifs du Grenelle de l’environnement, de favoriser le report modal de la route vers le ferroviaire en développant des autoroutes ferroviaires. Or comment peut-on souscrire à ces objectifs tout en élargissant une autorisation qui est en totale contradiction avec les finalités des autoroutes ferroviaires ?
Toutes les études réalisées, y compris au plan européen, démontrent que l’augmentation de la charge des poids lourds, en conférant au transport routier un avantage compétitif supplémentaire, provoque une perte de trafic des modes alternatifs plus vertueux. La généralisation du trafic des 44 tonnes est donc bien une mesure contraire aux grandes orientations fixées par les lois « Grenelle » en matière de transports.
Enfin, les coûts externes du transport routier sont aujourd’hui estimés à plus de 80 milliards d’euros : cette somme correspond aux embouteillages, aux nuisances sonores et environnementales ainsi qu’à la dégradation des chaussées et des ouvrages d’art, dont la charge de l’entretien pèse sur l’État et, de plus en plus, sur les collectivités territoriales ; sans compter que les routes à très fort trafic de camions deviennent, comme la route Centre-Europe – Atlantique, la RCEA, que je connais très bien, particulièrement accidentogènes.
Enfin, je vous rappelle que le transport est en France le seul secteur dont les émissions de gaz à effet de serre augmentent, en raison de la croissance rapide des émissions du transport routier ; celui-ci représente encore 90 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports et plus d’un quart de ces émissions sont le fait des poids lourds.
Dans ces conditions, nous ne comprenons pas pourquoi, alors que le Gouvernement semble attaché aux enjeux environnementaux, une étude contradictoire n’a pas été commandée avant la généralisation de l’autorisation des 44 tonnes.
M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 16 du projet de loi pose le principe de la responsabilité du propriétaire du navire en cas de pollution par hydrocarbures et prévoit une sanction renforcée en cas de marée noire.
Désormais, le défaut d’assurance sera puni d’une amende de 75 000 euros, au lieu de 45 000 euros, et fera encourir une peine d’un an d’emprisonnement. L’obligation de souscrire une assurance s’imposera aux navires immatriculés dans un port français, mais aussi à tous ceux qui toucheront l’un de ces ports ou une installation offshore située dans nos eaux territoriales.
Cet article constitue sans aucun doute une avancée ; il soulève cependant deux questions.
D’une part, la question se pose de l’effectivité des contrôles dans nos eaux territoriales. Pour assurer la protection de plus de 5 000 kilomètres de frontières maritimes, la douane dispose d’un service de garde-côtes chargés de lutter contre la fraude, la contrebande et les grands trafics et de veiller à la protection du milieu marin, ainsi qu’à la sécurité des personnes et des marchandises.
En ce qui concerne plus particulièrement la protection des mers, des avions spécialisés de télédétection des pollutions marines surveillent les façades maritimes les plus exposées aux pollutions dans le cadre du plan Polmar, afin de repérer les navires qui se livrent à des rejets illicites polluant la mer.
M. Roland Courteau. C’est exact !
M. Michel Le Scouarnec. L’importance de ces missions nécessiterait de renforcer les moyens humains et financiers. Or il semblerait que le plan stratégique de la douane ne diffère pas beaucoup des anciennes orientations mises en œuvre en application de la révision générale des politiques publiques, qui ont eu pour conséquences, de sources syndicales, la suppression de 400 emplois par an et l’abandon de certaines missions, faute d’autre choix. Il est temps d’emprunter d’autres chemins ! (M. Roland Courteau acquiesce.) C’est pourquoi l’intersyndicale douanière a lancé un projet alternatif au projet stratégique de la douane.
D’autre part, la question se pose des pollutions émises hors de nos eaux territoriales, mais qui ont de lourdes conséquences à la fois sur le domaine maritime international et sur nos eaux territoriales et nos côtes. Comme le rapport présenté en première lecture le signalait, l’article 16 du projet de loi ne règle pas « le problème des navires qui sombrent dans les eaux internationales et y provoquent des marées noires, le sujet relève du droit de la mer et, dans les eaux internationales européennes, de l’Union européenne ».
Certes, les « paquets Erika » ont fait progresser les règles de sécurité en Europe, par exemple en interdisant les tankers sans double coque ; cependant, dans la répression des actes de pollution, des progrès restent à réaliser.
Nous nous souvenons tous des images apocalyptiques de décembre 1999, lorsque le pétrolier Erika s’est brisé en deux au large de la Bretagne, entraînant une marée noire catastrophique sur plus de 400 kilomètres de littoral.
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Michel Le Scouarnec. La justice française s’est heureusement déclarée compétente pour juger le naufrage de ce navire maltais qui a coulé en dehors de nos eaux territoriales, dans la zone économique exclusive où seules les conventions internationales s’appliquent, même si les conséquences sont géographiquement localisées sur les côtes françaises.
Dans le même temps, la notion de « préjudice écologique » a été retenue par la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 25 septembre 2012, soit tout de même treize ans après les faits.
L’article 4 de la Charte de l’environnement prévoit que « toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi ». Selon nous, il serait très utile d’inscrire cette notion de « préjudice écologique » dans le code civil ; monsieur le ministre, qu’en pense le Gouvernement ?
Un autre problème se pose, particulièrement dans le domaine de la pollution maritime : celui des pavillons de complaisance, qui sont d’excellents écrans pour empêcher la recherche de la responsabilité des pollueurs. Les pavillons de complaisance ne devraient plus pouvoir noyer l’irresponsabilité permanente des compagnies pétrolières, prêtes à toutes les ruses pour se défausser. (M. Jean Desessard acquiesce.)
Mes chers collègues, je vous rappelle que l’Erika, qui battait pavillon maltais, appartenait à une société libérienne dont les actions étaient nanties en Écosse ; la gestion technique du navire était assurée par une société italienne, mais, par l’intermédiaire d’une société de droit suisse, il se retrouvait affrété par une société des Bahamas… N’est-ce pas formidable ? Ce n’est d’ailleurs pas tout, puisque, par l’intermédiaire d’une société britannique, le navire était ensuite affrété par une filiale de Total, de droit panaméen !
Mme Nathalie Goulet. Est-ce bien le moment de dire tout cela ?
M. Michel Le Scouarnec. Il est temps que le préjudice écologique maritime soit mieux défini et que des contraintes soient imposées aux pollueurs pour qu’ils assument les actions nécessaires à la remise en état des sites pollués.
Nous approuvons l’article 16 du projet de loi, mais nous tenions à présenter toutes ces remarques pour qu’il ne soit pas une goutte d’eau dans l’océan ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour une dernière prise de parole sur article.
M. François Trucy. Tout de même !
Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 23 du projet de loi ne règle toujours pas la question du dumping social au sein de l’Union européenne.
Tant qu’il y aura des pavillons européens de complaisance et que l’on ne promouvra pas, au niveau européen, un pavillon d’excellence s’imposant à tous les navires, des compagnies maritimes continueront de profiter, au détriment des travailleurs et de la filière industrielle maritime, des statuts sociaux les plus bas, des impositions les plus faibles et des normes de sécurité les plus souples.
En réalité, cet article conduit à légitimer le recours à l’emploi de personnels précaires en favorisant l’embauche de travailleurs étrangers détachés en contrat à durée déterminée, dans la droite ligne de la directive Bolkestein. Or nous savons, mes chers collègues, quel est le sort de ces travailleurs ; un rapport de M. Bocquet, qui sera publié prochainement, nous en apprendra plus long sur le sujet.
Permettez-moi de vous présenter plusieurs problèmes qui existent aujourd’hui et que l’article 23 du projet de loi ne résoudra pas.
La SNCM a récemment choisi, pour remplacer l’Île de Beauté, bateau destiné à la vente, d’affréter El Venizélos, sous pavillon grec, sur des lignes régulières entre la Corse et la Tunisie. Autrement dit, des marins français vont naviguer sous pavillon étranger !
De son côté, la société Louis Dreyfus Armateurs, qui a pris le marché sur l’autoroute de la mer entre Gijón et Nantes, bat pavillon anglais et emploie des marins qui ne sont ni français ni même espagnols !
Mes chers collègues, pourrions-nous accepter qu’une entreprise étrangère s’installe en France avec ses propres salariés, soumis aux conditions de travail de leur pays d’origine ? Je ne le crois pas. Imaginez que, sous couvert d’ouverture à la concurrence, une entreprise italienne ouvre des bureaux de poste en France avec des travailleurs italiens : les Français devraient apprendre l’italien pour pouvoir acheter des timbres !
Je pourrais aussi prendre l’exemple des navettes aériennes que, mes chers collègues, vous connaissez certainement pour les emprunter entre votre circonscription et le Sénat.
M. Jean Desessard. Pas moi ! (Sourires.)
Mme Isabelle Pasquet. D’autres que vous, monsieur Desessard, les connaissent certainement ! (Nouveaux sourires.) Imaginez que, dans ces avions, le personnel de bord soit polonais et que les consignes de sécurité soient données en polonais…
Mme Nathalie Goulet. C’est créatif, ce matin !
Mme Isabelle Pasquet. Bien sûr, j’extrapole ; nous n’en sommes pas encore là. C’est pourtant ce qui pourrait arriver si nous laissons faire !
Avec les mesures qui sont prévues, les marins français vont finir, à plus ou moins long terme, par regarder les bateaux passer le long des côtes françaises.
M. Philippe Dallier. Il suffit de voir la SNCM : c’est bien parti !
Mme Isabelle Pasquet. On m’objectera que l’article 23 du projet de loi apporte un certain nombre de garanties pour améliorer les conditions de travail des marins ; on peut certes s’en féliciter, mais vous-même, monsieur le ministre, avez admis que, pour que le texte soit eurocompatible, il avait fallu limiter ces améliorations.
De même, on nous dira que vous renforcez les contrôles sur les bateaux, notamment en matière de règles sociales. Nous pourrions nous en satisfaire, si ces contrôles ne devaient pas être réalisés à moyens constants.
Or quelle est la réalité de ces moyens ? Mes chers collègues, figurez-vous qu’aujourd’hui une seule personne est affectée au contrôle des bateaux naviguant sur le bassin méditerranéen ; dans les faits, donc, aucun contrôle n’est assuré. On peut toujours sur le papier renforcer les contrôles, ils ne seront pas effectifs pour autant !
Pour le groupe CRC, le compte n’y est pas. À nos yeux, seul le pavillon français de premier registre peut garantir la survie de toute la filière maritime : celle des gens de mer et des marins, mais aussi de la construction navale. Ce qu’il faut, c’est une volonté politique d’affronter l’Europe et de s’opposer à la logique dévastatrice de la concurrence libre et non faussée. C’est ce qu’attendent les marins français, soutenus par l’ensemble des sénateurs du groupe CRC, dans le cadre du changement promis par le nouveau gouvernement ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’instauration de l’écotaxe vise à favoriser le report modal, c’est-à-dire à encourager le transfert du trafic de marchandises de la route vers le rail, la mer ou les canaux.
Il faut pourtant reconnaître que, dans certaines régions françaises, quand bien même les poids lourds seraient fortement taxés, le report modal serait impossible, tout simplement parce que l’offre de fret, et donc la possibilité d’une alternative, n’existe pas ; dans ces conditions, l’écotaxe sera un nouvel impôt sans effet. C’est à cette contradiction que le Gouvernement est aujourd’hui confronté : mener une politique de report modal efficace nécessite de renforcer l’offre de transport de marchandises par le fer, la mer et les canaux.
Pour que les chargeurs aient recours au rail, il faut également que les réseaux soient performants, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. À cet égard, je vous rappelle que nous demandons depuis plusieurs années au Gouvernement de s’engager dans la voie du désendettement de Réseau ferré de France, afin de dégager de nouvelles marges de manœuvre pour la régénération des réseaux. Nous avons suggéré de nouvelles sources de financement dans la proposition de loi visant au rétablissement de la confiance et à l’amélioration du dialogue social dans les entreprises de transports, déposée il y a peu.
Il faut aussi rappeler que, quoi que nous fassions, les derniers kilomètres seront toujours parcourus par la route.
L’intérêt de la taxe poids lourds est donc réellement conditionné au périmètre des infrastructures qui sont l’objet de son assiette. Reconnaissons-le : là où elle est pertinente, c’est sur les grands linéaires, où le report modal est pertinent.
Nous adhérons donc au principe de l’évolutivité du réseau taxé afin de tenir compte de la possibilité réelle, pour les chargeurs, de recourir à un mode de transport alternatif. À défaut, cette taxe poids lourd appliquée y compris dans les zones les plus enclavées, où nous avons du mal à dynamiser le tissu des PME, apparaîtrait comme injuste.
De plus, un certain nombre de pays ne signeront pas la charte de l’écotaxe française, de sorte que les transporteurs venant d’autres pays auront un avantage concurrentiel accru. Je vous accorde que ce phénomène ne se produira pas partout, puisqu’en définitive seulement 1 % du réseau routier sera taxé. Reste que nous ne pouvons pas nous permettre que cette taxe, juste dans son principe, se révèle injuste en certains endroits, notamment en Bretagne, ou fortement pénalisante pour certains secteurs, comme l’agriculture et l’agroalimentaire.
Sénateur costarmoricain, il m’appartient ici d’être le porte-parole, d’une part, des élus régionaux et, d’autre part, des professions agricoles et agroalimentaires, et plus particulièrement des PME, qui seront impactées par l’écotaxe.
Le conseil régional de Bretagne, se fondant sur ces constats, a formulé lors de sa session des 7 et 8 février dernier les vœux suivants : les modalités qui seront mises en œuvre devront respecter les acquis obtenus dans les textes législatifs établissant l’écotaxe poids lourds ; le dispositif devra être assorti de mesures d’encouragement pour les transporteurs qui font le choix du transfert modal en mettant leurs camions sur des navires ou sur des trains ; les ports régionaux devront être rendus éligibles aux financements d’État issus des produits de la taxe.
Des aménagements allant dans le sens de la prise en compte des vœux de l’assemblée régionale sont possibles. Ils ont fait l’objet d’échanges avec votre cabinet, monsieur le ministre, lors d’un entretien qui s’est tenu en janvier dernier avec Gérard Lahellec, vice-président du conseil régional de Bretagne chargé de la mobilité et des transports.
Les professions agricoles et agroalimentaires estiment à 2 000 emplois perdus les 40 millions d’euros de taxe envisagés. L’exonération de la RN 164, celle des transporteurs de lait et la minoration liée à la périphéricité montrent combien cette écotaxe peut être dangereuse en Bretagne, au regard de la situation géographique de la région, de la faiblesse des modes alternatifs de transport et des hinterlands.
Chez moi, à Lamballe, le directeur de la Cooperl estime à 3 millions d’euros les pertes, dans un secteur très tendu où la concurrence étrangère déloyale sévit.
Les portiques étant déjà installés - avant même le vote de ce projet de loi !-, je vous demande, monsieur le ministre, d’envisager un moratoire expérimental en Bretagne jusqu’en octobre 2014, afin que l’on puisse mesurer, pendant un an, l’impact de cette écotaxe, sans l’appliquer. Ensuite, nous verrons si une telle mesure est négative ou positive pour notre économie régionale.
L’égalité des territoires ne se décrète pas, elle se construit par des politiques ambitieuses. Nous attendons de ce gouvernement qu’il agisse pour l’intégration des coûts externes de la route et pour le report modal, par la création de l’écotaxe, sans oublier, dans le même temps, le développement du fret ferroviaire et des services publics au sein de tous les territoires de la République, afin de renforcer la présence d’un tissu économique performant et d’œuvrer concrètement pour la réindustrialisation des territoires.
Très favorable au report modal, le groupe CRC votera ce texte. Toutefois, renouvelant l’ensemble des remarques qui viennent d’être formulées par mes collègues, j’insiste sur nos inquiétudes concernant les régions. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé.
M. Jean Desessard. Soyez bref, mon cher collègue ! (Sourires.)
M. Joël Labbé. En effet, je serai bref. Convaincus de l’absolue nécessité d’une fiscalité écologique juste et pragmatique et considérant que ce texte marque une étape positive dans la transition du transport de la route vers des modes alternatifs existants, le groupe écologiste se prononcera sur ce texte par un vote favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le financement des transports, auquel les collectivités territoriales prennent une part active, est une question extrêmement importante.
Aujourd’hui, les régions consacrent en moyenne 22 % de leur budget au financement des transports ferroviaires. Il est normal qu’elles disposent de l’ensemble des éléments financiers pour évaluer la réalité des dépenses engagées par la SNCF, comme le précise d’ailleurs l’article 3 bis introduit dans ce texte. Comme l’a dit Jacques Auxiette, il s’agit d’un impératif d’autant plus incontournable qu’aujourd’hui les collectivités continuent d’être asphyxiées.
Vous l’aurez compris, nous sommes particulièrement satisfaits des dispositions prévues par ce projet de loi. Pour autant, nous souhaitons vous alerter, monsieur le ministre – vous constatez que mon groupe multiplie les alertes en la matière, j’espère que vous y serez attentif –, sur un certain nombre de points qui restent en suspens en termes de financement des transports par les autorités organisatrices, notamment les régions. Ainsi, nous nous étions émus de la volonté de confier les trains d’équilibre du territoire aux régions. Apparemment, une telle disposition a disparu des projets de loi portant acte III de la décentralisation.
Nous vous invitons, monsieur le ministre, à plaider en faveur d’un abandon pur et simple de cette mesure, qui constituerait une charge non compensée, trop lourde pour les régions dans le contexte financier que j’évoquais il y a un instant.
Je vous rappelle d’ailleurs, mes chers collègues, que la convention relative à l’exploitation des trains d’équilibre du territoire avait été signée en 2010 entre l’État et la SNCF. Il s’agissait alors de « garantir la pérennité de ces trains Corail qui irriguent la France, d’offrir aux voyageurs un service public de référence complémentaire des TGV et des TER, de s’inscrire dans les objectifs du Grenelle de l’environnement, d’aménager le territoire et d’irriguer les territoires ruraux dans un souci de cohésion nationale. »
Ces objectifs restent d’actualité.
Monsieur le ministre, je veux insister sur la nécessité d’instaurer un versement transport régional, qui s’appliquerait au-delà des périmètres de transports urbains. Le groupe CRC est particulièrement attaché à une telle mesure.
La mise en place de ce versement transport régional permettrait de doter les régions d’une ressource propre, pérenne, dynamique et provenant du secteur économique, lequel bénéficie du système des transports régionaux. Elle contribuerait, outre les dotations de l’État et les ressources de la billettique, à financer le fonctionnement et les investissements des transports régionaux de voyageurs, qu’ils soient d’ailleurs ferroviaires ou routiers, en fonction des particularités locales.
Si c’est la région qui perçoit cette recette nouvelle, nous estimons qu’il lui revient ensuite de mettre en place une structure de coordination pour l’affectation de cette nouvelle ressource. À cet égard, nous nous inspirons fortement de ce qui se passe en Île-de-France, où les départements, les intercommunalités et les communes sont régulièrement invités à investir en la matière.
En tout état de cause, et alors que de nouvelles baisses de dotations sont annoncées – de l’ordre de 5 milliards d’euros dans les trois années à venir –, nous estimons que le Gouvernement doit agir dans deux directions : maintenir sa responsabilité en termes d’aménagement du territoire au travers des TET et, comme le Président Hollande s’y était engagé, instaurer un versement transport régional.
Nous voterons donc ce texte avec satisfaction, mais en étant particulièrement attentifs aux suites qui pourront lui être apportées. Pour nous, vous l’aurez compris, ce n’est qu’une étape ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Pour les raisons exposées tant par Jean-Jacques Filleul que par moi-même au cours de la discussion générale, le groupe socialiste votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de l’examen par le Sénat de ce texte en première lecture, j’avais fait valoir que les avantages qui avaient pu être accordés aux régions périphériques ne se retrouvaient pas dans le texte qui nous était soumis, notamment à l’article 7. En son temps, d’ailleurs, M. le rapporteur avait reconnu lui-même qu’il y avait effectivement un problème.
À l’instant, mon collègue Gérard Le Cam a également relevé cette difficulté, faisant allusion à un vœu formulé par le conseil régional de Bretagne que j’avais moi-même proposé à l’assemblée régionale. Pour ma part, je ne retrouve pas dans le texte qui nous est soumis aujourd’hui ce que la région Bretagne avait exprimé de façon unanime lors du vote de ce vœu. Certes, il y a eu quelques toutes petites avancées, mais le compte n’y est pas ! Par conséquent, je voterai, à titre personnel, contre ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous pouvons d’abord saluer la combativité de nos collègues du groupe communiste, dont je perçois qu’elle est sans doute plus dirigée contre le texte suivant que contre le présent projet de loi, mais qu’importe ! C’est la règle du débat parlementaire. (Sourires.)
Hier, en commission mixte paritaire, nous avons longuement argumenté nos choix. Ce matin, dans la discussion générale, j’ai rappelé la position de mon groupe, qui votera pour ce projet de loi. Je ne développerai donc pas beaucoup plus avant.
Ce texte est une étape, une suite du Grenelle de l’environnement. Nous souhaitons que le ministre reste vigilant quant à l’application de l’écotaxe. En la matière, le rapport prévu devra permettre de mener une véritable évaluation, afin de répondre aux craintes que les professionnels peuvent parfois légitimement exprimer.
Nous attendons aussi que les différentes mesures techniques qui sont contenues dans ce texte trouvent des prolongements dans une politique des transports affirmée. Nous vous donnons rendez-vous lors des prochains débats qui porteront sur la question non seulement du ferroviaire, mais aussi du schéma national des infrastructures de transport.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’obligation de séparation comptable est d’ores et déjà inscrite dans le code des transports français. En revanche, l’obligation de publication séparée n’apparaît pas explicitement en droit national. Dans ces conditions, et afin d’éteindre les griefs déjà exprimés sur ce point par la Commission européenne et d’éviter l’engagement d’une procédure contentieuse à l’encontre de la France, vous avez souhaité, monsieur le ministre, inscrire une telle disposition dans ce projet de loi.
Pour terminer ce débat, je souhaite vous alerter sur les enjeux du quatrième paquet ferroviaire, en lien avec la réforme que vous portez, qui doit permettre la réunification de la famille ferroviaire par la création d’un pôle public ferroviaire. Sur cette question, monsieur le ministre, nous sommes vos plus fidèles alliés, tant la séparation entre RFF et la SNCF a entaché, à nos yeux, la performance du système ferroviaire national.
Cependant, la vigilance semble de mise, si l’on considère la première ébauche du quatrième paquet ferroviaire, adopté le 30 janvier dernier par la Commission européenne. Certes, la séparation totale entre entreprise ferroviaire et gestionnaire d’infrastructure a été plus ou moins sortie du jeu. Néanmoins, Bruxelles veut imposer une « muraille de Chine » entre les deux activités, si elles sont réunies dans une même structure. Il faudrait ainsi garder deux entités juridiques distinctes, sans possibilité de flux financier, et témoigner de deux logiques différentes. Il s’agit donc d’une démarche particulièrement hypocrite.
Permettez-moi de vous rappeler à cet égard les termes de la proposition de résolution européenne adoptée par le Sénat le 2 avril dernier : « la rédaction proposée par la Commission européenne […], établissant un espace ferroviaire unique européen, tend implicitement, en son alinéa 5, à interdire la création de toute entreprise ferroviaire verticalement intégrée après l’entrée en vigueur de la nouvelle directive. »
Pour cette raison, le Sénat a estimé qu’en l’état la proposition de directive ne respectait pas le principe de subsidiarité. Nous comptons donc sur le Gouvernement pour agir au niveau européen, afin de permettre une plus grande souplesse dans les relations entre les différentes structures qui pourraient constituer le futur pôle public ferroviaire.
Je dois vous dire également notre inquiétude concernant les dispositions contenues dans le troisième projet de loi portant acte III de la décentralisation, qui entacherait les principes d’unité du réseau ferré national, en permettant aux régions d’en devenir propriétaires. Ainsi, l’article 2 de ce texte prévoit la possibilité de leur transférer la propriété du domaine public ferroviaire qui serait d’intérêt régional. Nous sommes totalement opposés à une telle disposition.
Enfin, je souhaite vous faire part, monsieur le ministre, de notre opposition à l’ouverture à la concurrence, en 2019, du marché national du transport des voyageurs, ouverture qu’aucune directive, aucun règlement n’impose jusqu’à présent. D’ailleurs, il n’est pas neutre que, dans ce cadre, Bruxelles travaille à la révision du règlement européen sur les obligations de service public, dit « règlement OSP », adopté par le Parlement européen et le Conseil en 2007.
En effet, alors qu’en l’état ce règlement OSP permet de conserver le monopole aujourd’hui confié à la SNCF, la Direction générale de la concurrence souhaite retirer de ce règlement un article autorisant les compensations financières accordées par les collectivités locales aux opérateurs de transport.
Nous vous demandons une nouvelle fois de porter au niveau européen l’exigence d’un moratoire sur les trois premiers paquets ferroviaires, avant tout engagement vers une libéralisation accrue du secteur. Vous devrez également vous montrer extrêmement vigilant pour ce qui concerne la révision annoncée du règlement OSP.
Comme mes collègues vous l’ont dit, ce projet de loi est à nos yeux un premier pas dans la bonne direction. Monsieur le ministre, vous avez pris des engagements : nous vous accompagnerons ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Je remercie de leur confiance l’ensemble des sénatrices et des sénateurs des différents groupes. Ce vote vient confirmer la qualité des travaux qui ont été conduits au sein de la Haute Assemblée, qualité que j’ai moi-même saluée à l’ouverture de cette discussion.
Nous avons d’ailleurs tellement d’ambitions en commun sur ces questions de transports qu’il semble difficile que nous nous quittions ainsi ! (Sourires.) Et c’est pour le mieux, car la discussion de ce projet de loi a été l’occasion de tracer les perspectives de rencontres futures pour l’examen d’autres textes, avec votre plein soutien et portés par une vision commune de l’efficacité ferroviaire.
Vous m’avez interpellé sur l’article 23, m’enjoignant d’être le plus précis possible. Je m’en voudrais de priver de ces clarifications ceux qui nous liront, et je sais qu’ils sont nombreux sur les quais de nos ports, notamment nos grands ports nationaux, où le compte rendu intégral des débats publié au Journal officiel est toujours très lu, même s’il n’est que partiellement repris. (Sourires)
Sur l’article 23, notre volonté est claire et nous sommes fidèles à nos engagements : il s’agit d’éviter une concurrence déloyale, une détérioration des conditions sociales faites aux personnels des différentes compagnies, notamment les compagnies dont les bâtiments ne battent pas pavillon français.
Cet article, qui traduit notre volonté, a été adopté après avoir été amendé.
Nous avons voulu introduire une obligation : les mêmes conditions sociales devront être appliquées à tous les personnels, quel que soit le pavillon, notamment pour le cabotage ou l’activité dans les mers intérieures. Il est ainsi fait référence à un certain nombre de prestations ou de situations sociales.
Le groupe CRC avait déposé sur cet article 23 un amendement, que nous avons soutenu, faisant référence à un article du code du travail qui traite précisément des travailleurs détachés. Or l’article 23 ne concerne pas le statut des travailleurs détachés. Il traduit simplement notre exigence de voir appliquer de façon égalitaire certaines conditions sociales. Donc, nous rehaussons les obligations, notamment les obligations sociales. Il en est d’autres, notamment en termes de contrôle, auxquelles vous avez d'ailleurs fait référence.
Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine de l’Assemblée nationale a souhaité que l’article 23 soit réécrit. Comme nous voulions que cet article 23, qui vise à améliorer les conditions sociales dans le secteur maritime, puisse être adopté, nous avons accepté cette réécriture, d’autant que c’était la rédaction que nous avions initialement proposée. Nous n’avons pas été récompensés de cette ouverture puisque, en l’occurrence, les députés communistes n’ont pas voté la disposition qui était reprise !
Soyez en tout cas rassurés : notre objectif est de pouvoir défendre, en mettant en place un certain nombre de dispositions, le pavillon français là où il est menacé. Vous serez d'ailleurs saisis, dans le cadre de la loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, dite « loi DADUE », de cette avancée nouvelle. Le Gouvernement a beaucoup travaillé afin de permettre l’adoption de la convention maritime de l’Organisation internationale du travail de 2006 et la transposition de ses différentes dispositions. C’est à nouveau l’accent mis sur le droit social et sur un traitement égalitaire.
Vous pourriez considérer que ce n’est pas suffisant, mais c’est une avancée, comme vous l’avez d'ailleurs vous-mêmes souligné. Cela permet de préciser et de fixer une lecture de cet article 23, dont les dispositions sont protectrices pour le pavillon français et pour les marins, qui y sont tout comme nous attachés.
Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, notamment d’avoir considéré que vous étiez des représentants de la nation tout entière et non pas seulement de certaines régions, fussent-elles périphériques. Cette notion de région périphérique mérite, vous en conviendrez, une approche pragmatique, mais nous anticipons peut-être là sur la discussion du schéma national des infrastructures de transport, le SNIT, qui nous occupera prochainement. Les modes de transports ont en effet toute leur utilité en termes d’aménagement du territoire, et nous y serons attentifs.
Je sais en tout cas que le climat qui règne dans cette assemblée nous permettra d’aborder ces débats dans un esprit d’ouverture et avec le souci de l’intérêt des populations et des territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
3
Sécurisation de l'emploi
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la sécurisation de l’emploi (projet n° 489, texte de la commission n° 502, rapport n° 501 et avis n° 494).
Les motions de procédure ayant été repoussées lors de la précédente séance, nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.
Chapitre Ier
Créer de nouveaux droits pour les salariés
Section 1
De nouveaux droits individuels pour la sécurisation des parcours
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé
La Nation garantit à toutes et tous, conformément aux principes dégagés dans le programme du Conseil national de la Résistance, l’accès aux soins.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement est défendu, monsieur le président. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Génisson, vice-présidente de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à poser un principe d’accès aux soins qui est déjà inscrit dans le code de la sécurité sociale. Il n’a pas de portée normative différente ou supplémentaire par rapport aux premiers articles du code de la sécurité sociale, notamment l’article L. 111-2-1, dont je cite d’abord le troisième alinéa : « L’État, qui définit les objectifs de la politique de santé publique, garantit l’accès effectif des assurés aux soins sur l’ensemble du territoire », puis, le premier alinéa : « La Nation affirme son attachement au caractère universel, obligatoire et solidaire de l’assurance maladie ». L’article L.111-1, quant à lui, dispose que la sécurité sociale « assure […] la couverture des charges de maladie, de maternité et de paternité ».
Le code de la santé publique contient aussi des dispositions allant en ce sens, notamment en son article L. 1411-1.
Pour ces raisons, je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Même avis !
M. le président. Monsieur Watrin, l’amendement est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le président, je sollicite une suspension de cinq minutes environ, pour des raisons d’ordre purement technique. (Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)
M. Philippe Dallier. Il ne suffit pas de signer des amendements, encore faut-il être en mesure de les défendre ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme Christiane Demontès. Pour qui vous prenez-vous, monsieur Dallier ?
M. Jean-Vincent Placé. Un peu de respect ! Un peu de courtoisie !
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour cinq minutes.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
L'amendement n° 2, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le 14° de l’article 995, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« …° Les contrats d’assurance maladie relatifs à des opérations individuelles et collectives à adhésion facultative à la condition que l’organisme ne recueille pas d’informations médicales auprès de l’assuré au titre de ce contrat ou des personnes souhaitant bénéficier de cette couverture, que les cotisations ou les primes ne soient pas fixées en fonction de l’état de santé de l’assuré, que ces garanties respectent les conditions mentionnées au même article L. 871-1 ;
« …° Les contrats d’assurance maladie relatifs à des opérations collectives à adhésion obligatoire à la condition que les cotisations ou les primes ne soient pas fixées en fonction de l’état de santé de l’assuré, que ces garanties respectent les conditions mentionnées à l’article L. 871-1 précité ; »
2° L’article 1001 est ainsi modifié :
a) Le 2° bis est abrogé ;
b) Au dernier alinéa, les mots : « , à l’exception du produit de la taxe afférente aux contrats visés au 2° bis, qui est affecté, par parts égales, à la Caisse nationale des allocations familiales » sont supprimés.
II. - À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « du 13° de l'article 995 et du 2° bis de l'article 1001 du même code » sont remplacés par les mots : « et du 13° de l'article 995 du même code ».
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État des deux paragraphes précédents est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
M. André Reichardt. Défendu ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
Mme Isabelle Pasquet. Avant d’aborder l’article 1er, sans doute l’une des dispositions les plus fondamentales de ce projet de loi et sur laquelle nous aurons beaucoup de choses à dire, il nous a semblé important de proposer en préalable l’adoption d’un article additionnel.
Cet amendement devrait recueillir la majorité des voix de gauche, puisque c’est une mesure que différents groupes ont portée en 2011.
Comme vous le savez, la taxe spéciale sur les conventions d'assurance a été mise en place par l'article 21 de la loi du 31 janvier 1944.
Jusqu’en 2010, les contrats d’assurance maladie complémentaire dits « solidaires et responsables » étaient exonérés de cette taxe.
Rappelons qu’un contrat est qualifié de « solidaire » lorsque le bénéficiaire n’est pas soumis à un questionnaire médical et que les cotisations ne sont pas fixées en fonction de son état de santé. Cette exonération était donc une mesure incitative.
Le gouvernement précédent a modifié cette disposition dans la loi de finances pour 2011 et la loi de finances rectificative, en assujettissant désormais ce type de contrat à la taxe sur les conventions d’assurance, la TSCA, dont le taux a été porté à 3,5 % puis à 7 %.
Le gouvernement de l’époque, outre son obsession de rigueur budgétaire et de réduction des dépenses publiques, justifiait la fin de cette incitation par le fait que cette exonération avait produit son plein effet. En effet, 90 % des contrats d’assurance santé étaient désormais solidaires et responsables : les dispositifs dérogatoires n’avaient donc plus lieu d’être.
Les conséquences sur les patients, notamment en matière d’accès aux soins, du fait de la répercussion de cette taxe sur les tarifs pour les assurés, n’ont évidemment pas été prises en compte par la majorité de l’époque.
La gauche a, quant à elle, fortement dénoncé cette décision, tout comme celle, plus générale, du doublement de la taxe sur les mutuelles.
Jean-Marc Ayrault, alors président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, fustigeait la « double peine » dont allaient être victimes les classes moyennes et les plus modestes de nos concitoyens : « C’est le pouvoir d’achat qui va être atteint, ainsi que l’accès aux soins. »
De nombreuses questions écrites ou orales étaient également posées sur le sujet, notamment par des parlementaires socialistes, pour dénoncer l’injustice de cette mesure et pour rappeler le Président de la République à son engagement de revenir à l’exonération.
François Hollande devait rappeler et préciser cet engagement le 20 octobre 2012 lors du congrès de la Mutualité française : « La refonte de la fiscalité des assurances complémentaires se fera par le biais d’une modulation beaucoup plus forte de la taxe sur les conventions d’assurance afin de concentrer les incitations sur les contrats les plus vertueux en termes d’accès aux soins des populations les plus démunies. Il importera que ces contrats dits “responsables” le soient tous véritablement, c’est-à-dire qu’ils garantissent, sans discrimination d’âge ou de situation de santé, les patients ou les futurs patients. Il ne s’agit donc pas de mettre en place une exonération uniforme sur tous les contrats, mais de s’assurer, dans le cadre de cette révision de la fiscalité sur les contrats et d’une redéfinition des contrats “responsables”, que leur contenu soit amélioré. »
Nous saisissons donc l’occasion de la discussion de ce texte, qui est censé ouvrir de nouveaux droits à nos concitoyens, pour demander que cette exonération, une mesure de justice conforme à ce que porte la gauche depuis plusieurs années, soit de nouveau mise en œuvre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à exonérer de taxe sur les conventions d’assurance les contrats de complémentaire santé.
Cette question relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Un amendement similaire à celui présenté par Mme Pasquet avait d’ailleurs été déposé et examiné en novembre dernier dans ce cadre.
La commission a dons émis un avis défavorable sur l'amendement n° 2, qui est hors sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Cet amendement soulève une question parfaitement légitime, dont nous avons déjà débattu par le passé – un amendement similaire avait effectivement été déposé sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.
Par ailleurs, ce sujet est actuellement étudié par le Gouvernement, qui a confié une mission au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Le HCAAM formulera des propositions avant l’été sur l’ensemble du sujet.
En effet, la question doit être examinée dans sa globalité, et pas simplement sur le point particulier, d’ailleurs très important, qui est traité par cet amendement. Madame la sénatrice, vous avez d’ailleurs vous-même évoqué le sujet de manière générale dans votre intervention.
Cette question ne doit pas être abordée à l’occasion de la discussion de ce texte. Le débat parfaitement légitime qu’elle suscite devra avoir lieu, et il aura bien lieu, mais de manière approfondie et dans un cadre global. C'est la raison pour laquelle je vous propose de retirer votre amendement.
M. le président. Madame Pasquet, l'amendement n° 2 est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. Je maintiens mon amendement, qui nous permet de revenir sur une décision injuste.
Ce projet de loi se donne pour ambition, tout du moins affichée, d’ouvrir des droits nouveaux aux salariés. En toute cohérence, il serait donc indispensable de revenir sur cette taxe et de permettre aux assurés de retrouver des droits qu’ils ont aujourd’hui perdus.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Avec cet amendement, le groupe communiste républicain et citoyen met le groupe socialiste devant ses responsabilités.
Chers collègues de la majorité, je vous rappelle que, lorsque nous avions instauré la première taxe sur les contrats responsables, vous y étiez tous opposés ! Je trouve logique que le groupe communiste républicain et citoyen dépose cet amendement, mais nous laissons aux sénateurs de la même tendance le soin de régler cette question entre eux… (Sourires sur les travées de l'UMP.)
Le groupe UMP ne participera donc pas à ce scrutin.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 169 :
Nombre de votants | 209 |
Nombre de suffrages exprimés | 194 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 98 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 174 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 3, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article ainsi rédigé :
I. – L’article 995 du code général des impôts est complété par un 18° ainsi rédigé :
« 18° Les contrats d’assurance maladie complémentaire couvrant les ressortissants du régime étudiant de sécurité sociale, si ces garanties respectent les conditions définies à l’article L. 871-1 du code précité. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État des II et III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous souhaitons aborder ici la question importante de l’état de santé des étudiants qui, vous le savez, se dégrade dans notre pays.
D’après les principales conclusions d’une enquête menée par La mutuelle des étudiants et la Mutualité française auprès de plus de 8 000 étudiants et publiée en mai 2012, sont en cause le renoncement aux soins pour un étudiant sur trois et l’absence de médecin traitant pour près d’un étudiant sur cinq. Toujours selon cette étude, les étudiants subissent de plein fouet les reculs de l’assurance maladie et se reportent sur les soins de premier recours, faute de complémentaire santé.
Ainsi, depuis de nombreuses années, la situation sanitaire et sociale des étudiants se dégrade.
Pourtant, avec le passage de 3,5 % à 7 % du taux de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance, l’ensemble des taxes pesant sur les organismes complémentaires santé atteint aujourd’hui 13,27 % du montant des cotisations, dont 6,27 % au titre de la taxe CMU.
Ces taxes pèsent de la même manière sur l’ensemble des adhérents des organismes complémentaires, même lorsque ceux-ci sont déjà fragiles sur un plan sanitaire et social et alors même que l’accès à une couverture complémentaire constitue aujourd’hui un préalable à l’accès durable au système de soins.
Notre amendement vise, vous l’aurez compris, à contribuer à remédier à la situation en exonérant de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance régie par l’article 991 du code général des impôts, les contrats de complémentaire santé souscrits par les personnes ressortissant au régime étudiant de sécurité sociale.
Cette exonération serait limitée aux seuls contrats responsables régis par l’article 871-1 du code de la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cet amendement tend à exonérer de la taxe sur les contrats d’assurance les contrats de complémentaire santé des étudiants.
Comme pour l’amendement n° 2, il s’agit d’une question qui relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Là aussi, un amendement similaire avait été déposé dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. L’amendement n° 3 est hors champ de l’ANI.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. J’indique aux auteurs de l’amendement qu’ils peuvent se référer à un excellent rapport sur la sécurité sociale et la santé des étudiants signé par Ronan Kerdraon et par moi-même. Ils verront que les choses ne sont pas si simples !
Notre rapport a été fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat, et a été amplement repris par la presse. Il serait bon de commencer par se référer aux travaux de notre assemblée sur la question… (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il est facile de balayer d’un revers de main des situations auxquelles nous sommes tout de même régulièrement confrontés !
Outre les aspects que j’ai déjà évoqués, l’étude que je viens de citer révèle une forte dépendance familiale des étudiants : pour 73 % d’entre eux, la famille reste la première source de revenus ; 27 % seulement perçoivent une bourse, attribuée sur des critères sociaux, mais plus du quart sont contraints d’exercer une activité rémunérée en plus de leurs études, afin de subvenir à leurs besoins.
Ainsi, les étudiants ont de plus en plus de mal à faire face aux dépenses de santé courantes – médecine généraliste, gynécologie, notamment – et 92 % pratiquent l'automédication, ce qui devrait nous alerter.
Concernant le bien-être psychique des étudiants, la situation n'est pas plus réjouissante puisque 38 % d’entre eux déclarent avoir éprouvé un « sentiment constant de tristesse et de déprime » au cours de l'année écoulée, 12 % affirmant même avoir eu des pensées suicidaires.
Un tiers des étudiants a déjà renoncé à des soins ! Et ce renoncement concerne surtout les soins lourds mais – comme pour le reste de la population – avec un déplacement vers les soins courants.
De plus, les étudiants sont concentrés dans des villes où les dépassements d'honoraires sont plutôt plus importants que dans le reste du territoire.
Vous l’aurez compris, notre amendement visait à apporter un éclairage particulier sur cette situation qui, je crois, appelle un règlement urgent.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Le rapport d’information que ma collègue Catherine Procaccia et moi-même avons commis met en évidence ce problème. Il va même au-delà, car les préconisations que nous avons formulées dans ce cadre sont destinées au Gouvernement comme aux parlementaires en vue de l’élaboration d’un véritable plan de santé pour les étudiants.
Nous avons interrogé le Gouvernement à plusieurs reprises et, encore récemment, le cabinet de la ministre des affaires sociales. Selon ce dernier, un certain nombre de ces propositions pourraient être incluses dans un plan de santé publique qui comprendrait à la fois un volet pour la santé des jeunes et un volet destiné aux étudiants.
On s’oriente donc dans la bonne direction, même si la situation que vous décrivez, chère collègue, correspond à une réalité à laquelle nous avons été confrontés et que différents rapports mettent en lumière – l’Observatoire de la vie étudiante, par exemple, en a fait état.
Il me semble néanmoins que le texte que nous examinons n’est pas forcément le bon support pour apporter une réponse au problème. Je rejoins tout à fait, à cet égard, notre rapporteur quand il renvoie au projet de loi de financement de la sécurité sociale. C’est dans ce cadre que nous-mêmes, au groupe socialiste, avions déposé un amendement sur le sujet – cet amendement avait été retiré, car il ne correspondait pas au projet du Gouvernement, dans l’attente du plan de santé pour les étudiants.
Ainsi, le groupe socialiste ne votera pas cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Zocchetto, pour explication de vote.
M. François Zocchetto. Le problème que nous évoquons est tellement grave que les amendements proposés ne sont absolument pas à la hauteur de l’enjeu. Le sujet a été bien exposé dans le rapport d’information du Sénat, mais je voudrais, à cet instant, appeler à nouveau l’attention du Gouvernement sur ce problème de l’assurance maladie des étudiants.
Le Gouvernement doit prendre, au plus vite, des mesures pour réorganiser complètement cette assurance. J’ignore s’il faut, de même, supprimer aussi rapidement que possible les mutuelles qui en ont la charge, mais force est de constater qu’il est quasi impossible, pour un étudiant, de se faire rembourses dans des délais décents, voire de se faire rembourser tout court… Et , pour obtenir une carte vitale par l’intermédiaire d’une mutuelle étudiant, il faut attendre des mois et c’est un véritable parcours du combattant. Il en est de même pour la moindre feuille de soins envoyée à l’une quelconque de ces mutuelles.
La situation ne peut pas durer.
Ce n’est pas une question de taxe, c’est un problème d’organisation de la couverture d’assurance maladie. Faut-il que les étudiants rentrent dans le régime général de la sécurité sociale ? Je l’ignore, n’étant pas spécialiste en la matière, mais je souligne, comme beaucoup d’entre vous, qu’il est urgent de faire évoluer le dispositif.
En attendant, nous voterons contre cet amendement, qui ne résoudrait rien s’il était adopté. (Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.)
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois qui suivent la promulgation de la loi n° … du … relative à la sécurisation de l'emploi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les coûts et les conséquences d’une mesure permettant à tous les étudiants de bénéficier, de droit, d’une aide au paiement d’une assurance complémentaire santé mentionnée à l’article L. 863-1 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’amendement que nous vous proposons tend à étudier la possibilité d'étendre l'aide au paiement d'une assurance complémentaire aux étudiants.
Le présent élargissement de l’accès aux complémentaires santé est, de notre point de vue, insuffisant pour répondre aux nécessités de la jeunesse étudiante, qui ne doit pas être oubliée.
Qu'en est-il, en effet, des possibilités d'accès des étudiants à la santé ? Ils forment une population toujours plus nombreuse, mais aussi toujours plus nombreuse à renoncer aux soins pour payer ses études.
Cette population n'est pas à exclure de cette discussion sur la sécurisation de l'emploi, car si l’on oublie en effet, dans ce texte, que plus d'un étudiant sur trois complète ses ressources par une activité rémunérée, on oublie également que plus de 600 000 de ces étudiants sont boursiers – bien souvent à l'échelon maximal –, ce qui prouve qu’ils sont précisément victimes de cette crise qui frappe le peuple.
Pour beaucoup d'entre eux, le quotidien, c'est la précarité. Ainsi, selon la LMDE – La Mutuelle des étudiants –, plus de la moitié des étudiants vivent avec moins de 400 euros par mois. Quatre cents euros pour vivre ! Cela fait 400 euros pour se loger, pour manger, pour s'instruire, pour se divertir ! Et combien d'euros reste-t-il pour se soigner ?
Pourtant, nous savons que la santé est un droit pour tous et toutes. Il n'y a pas d'âge qui soit épargné par les nécessités sanitaires. Par exemple, les soins optiques participent évidemment à la réussite d'un étudiant, tout comme les soins dentaires, dont le défaut peut en revanche peser durablement sur la vie du futur salarié.
Ces étudiants qui, pour beaucoup, sont aussi salariés, ont droit à la solidarité nationale. Mais si la couverture complémentaire peut avoir des effets bénéfiques, elle est trop onéreuse pour les étudiants. Toujours selon la LMDE, 29 % d’entre eux ont déjà renoncé à des soins pour des raisons financières.
Nous devons corriger les effets néfastes du désengagement progressif de la sécurité sociale publique concernant la couverture médicale.
Quel message adressons-nous à notre jeunesse, en lui faisant comprendre que se soigner est désormais un luxe ?
Quel message adressons-nous à notre jeunesse en lui disant qu'elle doit choisir entre santé et logement ou entre santé et études ?
Pourquoi s'étonner, dès lors, du nombre croissant de ces jeunes qui quittent notre pays ?
Nous considérons que la solidarité nationale, que nous devons à notre peuple, implique que les étudiants puissent, eux aussi, bénéficier d'une aide à l'assurance complémentaire santé.
Il n'est plus acceptable que la France – cinquième puissance économique du monde – délaisse toujours plus ses jeunes au mépris de la logique la plus élémentaire. En effet, la croissance future se fera grâce à ces jeunes, bien formés et en bonne santé.
Il y va de l'avancement de la société vers la justice et l'équité. C'est le sens de cet amendement.
M. Philippe Dallier. Parlez-nous du rapport !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. L’enjeu, tel qu’il est décrit par nos collègues, mérite que nous partagions l’intérêt qu’ils lui portent. Toutefois, l’accord dont ce projet de loi est la traduction ne concerne pas les étudiants, mais seulement les salariés.
Pour cette raison, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Je dirais, comme le rapporteur, qu’il s’agit d’un sujet extrêmement important. Je pense d’ailleurs qu’il ne faut pas se limiter à la seule question des étudiants et qu’il convient de poser ici, plus généralement, la question des jeunes…
Mme Isabelle Pasquet. Tout à fait !
M. Michel Sapin, ministre. … qui ne sont pas salariés et rencontrent en particulier des problèmes de couverture complémentaire.
Ce sujet a été abordé par le Président de la République au congrès de la Mutualité, où il s’est engagé sur la couverture complémentaire pour tous au 1er janvier 2017 – on en reparlera peut-être lors de la discussion de l’article 1er. Il faut réfléchir aux conditions de cette couverture.
De nombreux travaux ont déjà été conduits et nous sommes maintenant dans une phase opérationnelle. Je pense qu’un rapport supplémentaire n’apporterait pas plus à la connaissance – vous en avez d’ailleurs apporté la preuve, madame Pasquet – de la situation parfois déplorable de ces jeunes.
Nous sommes donc dans l’action et nous vous formulerons une proposition globale au profit de l’ensemble de ceux qui, aujourd'hui, ne bénéficient pas de cette complémentaire santé.
C’est pourquoi je ne peux pas être favorable à votre amendement, madame Pasquet.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Il s’agit d’un rapport, alors parlez-nous du rapport !
Mme Isabelle Pasquet. Parfaitement, monsieur Dallier, l’amendement tend à demander un rapport,…
M. Philippe Dallier. Vous ne l’avez pas dit !
Mme Isabelle Pasquet. … ce qui nous permet aussi d’évoquer la condition des étudiants et de la jeunesse en général, c’est-à-dire de ceux qui sont les travailleurs de demain – du moins je l’espère, pour eux et pour nous, pour leur avenir et pour le nôtre.
Je profite donc de cette explication de vote pour en rajouter (M. Philippe Dallier s’esclaffe), pour revenir sur la condition des étudiants et, plus largement, sur celle de notre jeunesse.
La réalité, c'est que la crise touche nos jeunes de toutes les manières possibles : chômage de masse avec 25 % de demandeurs d'emplois parmi eux, difficultés de plus en plus grandes à trouver un emploi stable après les études...
L'âge moyen du premier CDI n'a cessé d'augmenter, passant de vingt-trois à vingt-sept ans, voire plus, selon certaines estimations. Cette difficulté est renforcée, évidemment, par l'utilisation massive de la jeunesse comme variable d'ajustement lui offrant des contrats courts, des stages – souvent non conventionnés ni rémunérés – et de l’intérim.
Oui, notre jeunesse est de plus en plus confrontée à un mur, celui de l'emploi. Les jeunes ne peuvent plus accepter – ils ont raison ! – de ne pas voir leur formation, leurs compétences, leurs expériences reconnues. La crise qui les atteint se double donc d'une crise de confiance.
Une crise de confiance que nous retrouvons dans les chiffres d'expatriation des jeunes diplômés. Pour l'année 2013, le quota de visas vacances-travail pour le Canada a été écoulé en moins d'une semaine, alors que, deux ans auparavant, il avait fallu un mois…
Cet exil massif de toute une jeunesse formée en France, mais qui ne trouve plus d'avenir dans notre pays, doit nous interpeller. Alors que la plupart de ces jeunes sont fiers d'avoir été élevés à l'école de la République, ils ne trouvent plus ici la possibilité d'exprimer leur potentiel.
Quelle est la raison de cet appel du large ? Eh bien la raison, nous la connaissons tous sur ces travées : nous n'avons plus rien à offrir à ces jeunes. Pourquoi ? Là aussi, nous le savons : la situation des étudiants, économique, sociale et sanitaire, ne cesse de se dégrader.
Elle se dégrade avec le coût des études qui enfle, notamment en raison des frais réclamés par certaines universités. Cette hausse est notamment consécutive à la réforme portée par la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, qui a asséché les finances de certaines universités et permis la création, à leurs côtés, d'universités privées ou d'écoles privées dont le seul objectif est la vente d'un diplôme et d'un réseau.
Le coût des études augmente également en raison des difficultés d'accès au logement étudiant. À cet égard, je ne peux que rappeler ici, mes chers collègues, les objectifs du plan Anciaux, qui n'ont jamais été atteints : sur les 50 000 logements nouveaux prévus entre 2004 et 2014, seuls 23 000 ont été construits.
Mais ce qui nous inquiète, mes chers collègues, c'est que cette situation est susceptible d'empirer. Le flou actuel autour de la modification des aides au logement étudiant n'aide pas, en effet, à rassurer les étudiants qui en bénéficient.
Il en va de même des revalorisations des bourses étudiantes, voire de l'instauration d'une allocation d'autonomie, tant réclamées par les associations étudiantes. Elles devraient au moins compenser le plafonnement de la demi-part fiscale.
La jeunesse, qu'elle soit étudiante ou non, a vu sa précarité se généraliser. Elle est la première victime, avec les plus âgés, de la crise économique et sociale que traverse notre pays.
Certes, le Gouvernement a annoncé des mesures et créé le contrat de génération. C’est une réponse nécessaire, bien qu'insuffisante, à la crise de confiance profonde que traverse notre jeunesse et à laquelle nous devons remédier.
Mes chers collègues, cette crise de confiance est gravissime. Elle est générale. Elle est partagée.
Cette crise explique aujourd'hui la situation sanitaire des étudiants, car les premières dépenses dans lesquelles on coupe, lorsqu'on est étudiant, sont bien celles qui concernent la santé : elle devient une dépense de trop, un luxe pour ceux qui n'ont que quelques centaines d'euros pour vivre. Quatre cents euros pour la moitié d'entre eux, nous l'avons déjà dit, c'est trop peu et c'est inacceptable. Pas en 2013 ! Pas en France !
Avec cet amendement, nous proposons d’envoyer un message, un signal, ni plus ni moins. Il est grand temps que la République montre à ses jeunes qu’ils ne sont pas abandonnés. Ils doivent enfin savoir que la solidarité nationale s'adresse également à eux et qu'ils ont leur place dans la France de demain. La solidarité n'est pas qu'un vain mot, elle doit pouvoir trouver son expression dans les faits.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Monsieur le ministre, les propos que vous avez tenus tout à l’heure sont tout à fait justes. Un certain nombre de rapports existent : le rapport Nauche de 1999, le rapport Wauquiez de 2006, celui que Catherine Procaccia et moi-même avons signé…
Par conséquent, tout le monde connaît la situation et les problèmes que peuvent rencontrer les étudiants : l’accès à la santé, mais aussi, plus largement, l’accès au logement ou l’obligation de trouver un travail pour subvenir à leurs besoins et poursuivre leurs études.
Je fais très largement confiance au Gouvernement et au Président de la République, qui a annoncé des orientations claires et précises, rappelées par M le ministre précédemment.
C’est pourquoi le groupe socialiste, confiant dans ces engagements, votera contre cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le chapitre préliminaire du code du travail devient le chapitre liminaire.
II. - Avant le chapitre liminaire du même code, il est rétabli un chapitre préliminaire ainsi rédigé :
« Chapitre préliminaire
« Utilité sociale et collective des entreprises
« Art. L1A. - L’activité économique des entreprises de production de biens ou de services, qu’elles soient privées ou publiques, à but lucratif ou non, a pour finalités le bien être des producteurs, la sécurité de l’emploi et de la formation, la satisfaction des besoins des citoyens, la préservation de l’environnement. Les choix de gestion des entreprises sont guidés par ces buts qui priment toute autre considération. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Par notre amendement, nous souhaitons rappeler quelques principes qui doivent selon nous guider l’activité économique.
D’une part, la politique économique du Gouvernement devrait se donner pour objectif le bien-être de l’ensemble des travailleurs. C’est l’un des premiers éléments de notre amendement.
On constate aujourd’hui un mal-être croissant au travail. Le travail n’est plus un épanouissement, il devient un lieu de stress pour les femmes et les hommes, et cela pour plusieurs raisons.
Les salariés constatent de plus en plus un décalage entre leurs missions et les moyens qui sont mis à leur disposition pour les accomplir ; c’est vrai dans le privé comme dans le public. Il y a également une dégradation des conditions de travail, ce qui fragilise l’ensemble des salariés.
Le recours aux contrats à durée déterminée et au temps partiel, la multiplication pour les jeunes des stages en lieu et place de véritables embauches, toutes ces pratiques ont des conséquences très inquiétantes sur la santé des salariés. Beaucoup d’entre elles, beaucoup d’entre eux acceptent en silence cette violence économique pour conserver un emploi leur permettant de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.
Cette question du mal-être ne doit pas être négligée et nous souhaitons le réaffirmer ici, car le projet de loi que nous examinons légalise la précarisation des conditions de travail. Nous souhaitons nous inscrire dans le préventif ; nous aimerions construire avec l’ensemble des forces de gauche une société dans laquelle le bien-être des personnes soit un objectif premier.
D’autre part, nous souhaitons réaffirmer par notre amendement que la sécurité de l’emploi et la formation doivent être au cœur des politiques économiques.
Le projet de loi ne permettra pas d’accéder à ces objectifs. En effet, en faisant comme si les employeurs et les employés étaient dans une situation d’égalité, alors même que les seconds sont dépendants des premiers, les auteurs du projet de loi font le jeu du MEDEF.
Certains politiques ont la mémoire courte. Le MEDEF, avec Xavier Bertrand, avait imposé la « rupture conventionnelle », dont la caractéristique principale est de n’avoir pas besoin de motif : le consentement formel de l’employé suffit. Or, depuis l’accord de janvier 2008, et la loi d’août 2008, il y a eu un million de ruptures conventionnelles et pas de relance de l’emploi ! C’est la preuve que, lorsque la rupture du contrat est facilitée, lorsque les salariés sont la variable d’ajustement, la sécurité de l’emploi passe à la trappe !
Nous vous demandons donc de voter cet amendement au nom de l’ensemble des femmes et des hommes qui travaillent et de celles et ceux qui sont en recherche d’emploi, parce qu’elles sont, ils sont l’avenir de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Par cet amendement, vous souhaitez définir les finalités de l’activité économique des entreprises autour des notions de bien-être des producteurs, de sécurité de l’emploi, de satisfaction des besoins des citoyens, de préservation de l’environnement.
Ces finalités, nous les partageons tous, mais elles n’entrent pas strictement dans le cadre juridique du texte qui nous est proposé. Pour cette raison, et pour cette raison seulement, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Cet amendement tend à poser un certain nombre de grands principes, d’ordre plus constitutionnel que législatif. Nous en trouvons d'ailleurs quelques éléments dans la Constitution, en tout cas dans le préambule de la Constitution de 1946.
Donc, cet amendement n’a pas sa place dans un ensemble de dispositions codifiées comme le code du travail. Pour cette seule raison juridique, je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Cet amendement n’est pas directement rattaché au texte, mais il en est très proche, car il est plus qu’important de rééquilibrer dans la loi l’application des principes fondamentaux que sont la liberté d’entreprendre, d’une part, et le droit pour chacun d’obtenir un emploi, d’autre part, en précisant les finalités de l’activité économique.
La multiplication des licenciements spéculatifs, abusifs, boursiers, nous rappelle chaque jour la réalité sociale écrasante que connaissent les salariés qui ont travaillé toute une partie de leur vie dans des entreprises et qui se voient remerciés du jour au lendemain. Je pense ici – mais pas seulement, car la liste serait trop longue – aux salariés de Michelin, Total, Alstom, Danone, Renault, Goodyear, PSA Peugeot Citroën, Sanofi, ArcelorMittal ; la liste est longue !
Nous souhaitons, pour notre part, rappeler avec insistance l’utilité sociale et collective des entreprises.
Le Conseil constitutionnel – M. le ministre y a fait référence – a reconnu que la liberté d’entreprendre mais également le droit à l’emploi sont deux principes à valeur constitutionnelle.
Le droit au travail a également été proclamé dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, de 1948, en ces termes : « Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage. » Ce droit est également garanti par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966, en son article 6, texte que la France a précisément approuvé et dont elle doit tenir compte, nous semble-t-il, dans son ordre juridique interne.
De même, la Constitution de 1946 pose que « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi », droit qui est d’ailleurs repris dans la Constitution de 1958 fondant les bases de la Ve République.
La loi doit donc non seulement respecter les règles internationales, mais aussi ne pas entrer en contradiction avec les règles émanant du corpus constitutionnel. Or, depuis la décision dite « Liberté d’association » du 16 juillet 1971, le Conseil constitutionnel a procédé à une extension du domaine constitutionnel, puisque s’ajoutent désormais aux articles du texte de la Constitution de 1958 stricto sensu les dix-sept articles de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen votée par l’Assemblée constituante le 26 août 1789, ainsi que le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui proclame les principes politiques, économiques et sociaux considérés comme « particulièrement nécessaires à notre temps ».
Il est vrai que le Conseil constitutionnel donne la primauté à la liberté d’entreprendre, et nous le regrettons, en préférant toujours un dispositif libéral à un dispositif social. Ainsi, dans sa décision du 12 janvier 2002, il censure la nouvelle définition du licenciement économique, considérant qu’elle porte une atteinte manifestement excessive à la liberté d’entreprendre.
A contrario, il ne censure pas, au nom du cinquième alinéa du préambule de la Constitution de 1946, pour atteinte excessive au droit de chacun d’obtenir un emploi, la liberté donnée à l’employeur de licencier, à tout moment, pendant deux ans et sans motif, un jeune de moins de vingt-cinq ans recruté par un contrat première embauche.
Enfin, dans sa décision du 6 août 2009, le Conseil refuse d’accorder une valeur constitutionnelle au principe de repos dominical en tant que principe fondamental reconnu par les lois de la République. Il reconnaît toutefois, dans cette même décision, la valeur constitutionnelle du principe de repos hebdomadaire.
Le projet de loi que vous nous présentez aujourd’hui s’inscrit dans cette tendance, ce que nous déplorons. Il méconnaît, selon nous, trop fortement ce droit à l’emploi, sans pour autant assurer une relance de l’emploi. C’est d’ailleurs en substance ce que disait l’un des membres du bureau exécutif du MEDEF, M. Patrick Bernasconi, qui, devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, se réjouissait de toutes les avancées du texte pour le patronat, tout en ne garantissant pas que celui-ci serait efficace pour créer des emplois !
Et c’est bien là tout l’enjeu : pourquoi demander aux salariés tous ces sacrifices, pourquoi renoncer à leurs droits élémentaires au travail et à la formation, pourquoi oublier leur bien-être, si les salariés restent livrés aux appétits financiers de patrons peu scrupuleux ?
Cet amendement, qui a pour objet de rappeler les principaux objectifs de l’activité économique, nous semble donc plus nécessaire que jamais !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 170 :
Nombre de votants | 210 |
Nombre de suffrages exprimés | 207 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 104 |
Pour l’adoption | 33 |
Contre | 174 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 1er
I. – A. – Avant le 1er juin 2013, les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels engagent une négociation, afin de permettre aux salariés qui ne bénéficient pas d’une couverture collective à adhésion obligatoire en matière de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident au moins aussi favorable que la couverture minimale mentionnée au II de l’article L. 911-7 du code de la sécurité sociale, au niveau de leur branche ou de leur entreprise, d’accéder à une telle couverture avant le 1er janvier 2016.
La négociation porte notamment sur :
1° La définition du contenu et du niveau des garanties ainsi que la répartition de la charge des cotisations entre employeur et salariés ;
2° Les modalités de choix de l’assureur. La négociation examine en particulier les conditions, notamment tarifaires, dans lesquelles les entreprises peuvent retenir le ou les organismes assureurs de leur choix, sans méconnaître les objectifs de couverture effective de l’ensemble des salariés des entreprises de la branche et d’accès universel à la santé ;
3° Le cas échéant, les modalités selon lesquelles des contributions peuvent être affectées au financement de l’objectif de solidarité, notamment pour l’action sociale et la constitution de droits non contributifs ;
4° Les cas dans lesquels la situation particulière de certains salariés peut justifier des dispenses d’affiliation à l’initiative du salarié ;
5° Le délai, au moins égal à dix-huit mois à compter de l’entrée en vigueur de la convention ou de l’accord et expirant au plus tard le 1er janvier 2016, laissé aux entreprises pour se conformer aux nouvelles obligations conventionnelles ;
6° Le cas échéant, les adaptations dont fait l’objet la couverture des salariés relevant du régime local d’assurance maladie complémentaire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle défini à l’article L. 325-1 du code de la sécurité sociale, en raison de la couverture garantie par ce régime.
B. – À compter du 1er juillet 2014 et jusqu’au 1er janvier 2016, dans les entreprises où a été désigné un délégué syndical et qui ne sont pas couvertes selon l’une des modalités mentionnées à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale par une couverture collective à adhésion obligatoire en matière de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident au moins aussi favorable que la couverture minimale mentionnée au II de l’article L. 911-7 du même code et applicable au plus tard le 1er janvier 2016, l’employeur engage une négociation sur ce thème.
Cette négociation se déroule dans les conditions prévues à la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II de la deuxième partie du code du travail et au deuxième alinéa de l’article L. 2242-11 du même chapitre.
II. – Le titre Ier du livre IX du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le chapitre Ier est complété par des articles L. 911-7 et L. 911-8 ainsi rédigés :
« Art. L. 911-7. – I. – Les entreprises dont les salariés ne bénéficient pas d’une couverture collective à adhésion obligatoire en matière de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident déterminée selon l’une des modalités mentionnées à l’article L. 911-1 dans des conditions au moins aussi favorables que celles mentionnées au II du présent article sont tenues de faire bénéficier leurs salariés de cette couverture minimale par décision unilatérale de l’employeur, dans le respect de l’article 11 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques. Les salariés concernés sont informés de cette décision.
« II. – La couverture minimale mentionnée au I comprend la prise en charge totale ou partielle des dépenses suivantes :
« 1° La participation de l’assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations des organismes de sécurité sociale, prévue au I de l’article L. 322-2 pour les prestations couvertes par les régimes obligatoires ;
« 2° Le forfait journalier prévu à l’article L. 174-4 ;
« 3° Les frais exposés, en sus des tarifs de responsabilité, pour les soins dentaires prothétiques ou d’orthopédie dento-faciale et pour certains dispositifs médicaux à usage individuel admis au remboursement.
« Un décret détermine le niveau de prise en charge de ces dépenses ainsi que la liste des dispositifs médicaux mentionnés au 3° entrant dans le champ de cette couverture. Il fixe les catégories de salariés pouvant être dispensés, à leur initiative, de l’obligation d’affiliation eu égard à la nature ou aux caractéristiques de leur contrat de travail ou au fait qu’ils disposent par ailleurs d’une couverture complémentaire. Il précise les adaptations dont fait l’objet la couverture des salariés relevant du régime local d’assurance maladie complémentaire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle défini à l’article L. 325-1, en raison de la couverture garantie par ce régime.
« Les contrats conclus en vue d’assurer cette couverture minimale sont conformes aux conditions prévues à l’article L. 871-1 du présent code et au 2° bis de l’article 1001 du code général des impôts.
« L’employeur assure au minimum la moitié du financement de cette couverture.
« Art. L. 911-8. – Les salariés garantis collectivement, dans les conditions prévues à l’article L. 911-1, contre le risque décès, les risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d’incapacité de travail ou d’invalidité bénéficient du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par le régime d’assurance chômage, selon les conditions suivantes :
« 1° Le maintien des garanties est applicable à compter de la date de cessation du contrat de travail et pendant une durée égale à la période d’indemnisation du chômage, dans la limite de la durée du dernier contrat de travail, appréciée en mois entiers et arrondie au nombre supérieur, et sans pouvoir excéder douze mois ;
« 2° Le bénéfice du maintien des garanties est subordonné à la condition que les droits à remboursements complémentaires aient été ouverts chez le dernier employeur ;
« 3° Les garanties maintenues au bénéfice de l’ancien salarié sont celles en vigueur dans l’entreprise ;
« 4° Le maintien des garanties ne peut conduire l’ancien salarié à percevoir des indemnités d’un montant supérieur à celui des allocations chômage qu’il aurait perçues au titre de la même période ;
« 5° L’ancien salarié justifie auprès de son organisme assureur, à l’ouverture et au cours de la période de maintien des garanties, des conditions prévues au présent article ;
« 6° L’employeur signale le maintien de ces garanties dans le certificat de travail.
« Les dispositions du présent article sont applicables dans les mêmes conditions aux ayants droit du salarié qui bénéficient effectivement des garanties mentionnées au premier alinéa à la date de la cessation du contrat de travail. »
2° L’article L. 912-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les accords professionnels ou interprofessionnels mentionnés à l’article L. 911-1 prévoient une mutualisation des risques en application du premier alinéa du présent article ou lorsqu’ils recommandent, sans valeur contraignante, aux entreprises d’adhérer pour les risques dont ils organisent la couverture à un ou plusieurs organismes, il est procédé à une mise en concurrence préalable des organismes mentionnés à l’article 1er de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, dans des conditions de transparence, d’impartialité et d’égalité de traitement entre les candidats, qui doivent notamment intégrer et préciser les éléments suivants : publicité préalable obligatoire, fixation des modalités garantissant un consentement éclairé des partenaires sociaux lors de la désignation ou de la recommandation, règles en matière de conflit d’intérêts et détermination des modalités de suivi du régime en cours de contrat, et selon des modalités prévues par décret. Cette mise en concurrence est également effectuée lors de chaque réexamen. »
II bis (nouveau). – Avant la dernière phrase du I de l’article L. 325-1 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Le cas échéant, il peut compléter une ou plusieurs de ses prestations pour qu’elles soient au plus égales aux garanties minimales prévues au II de l’article L. 911-7. »
II ter (nouveau). – Le sixième alinéa de l’article L. 761-3 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le cas échéant, il peut compléter une ou plusieurs de ses prestations pour qu’elles soient au plus égales aux garanties minimales prévues au II de l’article L. 911-7 du code de la sécurité sociale. »
III. – Le titre Ier de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques est ainsi modifié :
1° Les articles 2 et 5 sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article est également applicable au titre des anciens salariés garantis en application de l’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale. » ;
2° Le 1° de l’article 4 est ainsi modifié :
a) Sont ajoutés les mots : « ou, le cas échéant, avant l’expiration de la période durant laquelle ils bénéficient à titre temporaire du maintien de ces garanties en application de l’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« L’organisme doit avoir adressé la proposition de maintien de la couverture à ces anciens salariés au plus tard dans le délai d’un mois à compter de la date de la cessation du contrat de travail ; »
3° Le 2° du même article est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L’organisme doit avoir adressé la proposition de maintien de la couverture à ces personnes dans le délai d’un mois à compter du décès. »
IV. – À compter du 1er juillet 2014, le livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° L’intitulé de la sous-section 3 de la section 2 du chapitre II du titre IV est ainsi rédigé : « Protection sociale complémentaire des salariés » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 2242-11, le mot : « maladie » est remplacé par les mots : « et, dans des conditions au moins aussi favorables que celles prévues à l’article L. 911-7 du code de la sécurité sociale, d’un régime de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident » ;
3° Après le mot : « prévoyance », la fin du 14° du II de l’article L. 2261-22 est ainsi rédigée : « ou à un régime de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident dans des conditions au moins aussi favorables que celles prévues au II de l’article L. 911-7 du code de la sécurité sociale ; ».
V. – Avant le 1er janvier 2016, les organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels engagent une négociation en vue de permettre aux salariés qui ne bénéficient pas d’une couverture collective à adhésion obligatoire en matière de prévoyance au niveau de leur branche ou de leur entreprise d’accéder à une telle couverture.
VI. – (Supprimé)
VII. – L’article L. 113-3 du code des assurances est ainsi modifié :
a) Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la souscription d’un contrat résulte d’une obligation prévue par une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel, l’assureur ne peut faire usage des dispositions du présent article relatives à la suspension de la garantie et à la résiliation du contrat. » ;
b) (nouveau) Au dernier alinéa, la référence : « des alinéas 2 à 4 » est remplacée par la référence : « des deuxième à cinquième alinéas ».
VIII. – Après le mot : « interprofessionnel », la fin de la première phrase du III de l’article L. 221-8 du code de la mutualité est supprimée.
IX. – L’article L. 322-2-2 du code des assurances est ainsi modifié :
1° Après les mots : « code monétaire et financier », sont insérés les mots : « , en particulier la mise en œuvre d’une action sociale, » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’elle se traduit par des réalisations sociales collectives, l’action sociale mentionnée au premier alinéa doit être confiée à une ou plusieurs personnes morales distinctes de l’assureur. »
X (nouveau). – Le I de l’article L. 911-7 du code de la sécurité sociale entre en vigueur à compter du 1er janvier 2016.
XI (nouveau). – L’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale entre en vigueur :
1° Au titre des garanties liées aux risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, à compter du 1er juin 2014 ;
2° Au titre des garanties liées au risque décès ou aux risques d’incapacité de travail ou d’invalidité, à compter du 1er juin 2015.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Claude Jeannerot, rapporteur. L’article 1er, qui fut au cœur de nos débats en commission et des auditions, cristallise des exigences et des revendications souvent contradictoires.
Je voudrais d’abord rappeler quelques statistiques qui éclairent les choix faits par les partenaires sociaux : 33 % des quelque 400 000 personnes dépourvues de couverture complémentaire santé déclarent renoncer à des soins pour raisons financières, contre 15 % de celles qui sont couvertes. Ces chiffres expliquent à eux seuls toute l’importance du dispositif de l’article 1er.
Les partenaires sociaux ont choisi d’inscrire celui-ci dans l’accord national interprofessionnel : il s’agit donc d’un nouveau droit, dont bénéficieront principalement les salariés des petites entreprises, les non-cadres et les titulaires d’emplois précaires.
M. le ministre l’a rappelé tout à l'heure, la mise en place de ce dispositif est concomitante à la réforme engagée par le Gouvernement en vue de généraliser, à l’horizon 2017, une couverture complémentaire de qualité. Je rappelle que le Gouvernement a commandé un rapport sur ce sujet au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie.
En cet instant, je souhaite, monsieur le ministre, vous interroger sur un point particulier, afin que l’information puisse être complètement partagée : le texte du projet de loi n’étant pas explicite sur ce sujet, pourriez-vous nous confirmer ici que, comme la lecture du code de la sécurité sociale et du code rural semble le laisser à penser, les entreprises agricoles seront également soumises à l’obligation de fournir à leurs salariés une couverture complémentaire santé ?
Je voudrais revenir sur les réactions auxquelles a donné lieu la présentation de cet article 1er au gré des auditions et de nos rencontres avec les représentants des différentes forces vives de nos territoires.
Il faut noter que les études disponibles montrent clairement les avantages des contrats collectifs : ces derniers offrent en moyenne plus de garanties que les contrats individuels et sont moins chers. Les résultats financiers des contrats collectifs sont systématiquement inférieurs à ceux des contrats individuels, même en soustrayant les frais commerciaux de démarchage.
J’en viens maintenant à la clause de désignation, qui a été source de dissensions entre nous. Nous avons tous reçu, dans nos boîtes aux lettres et dans nos boîtes mail, de nombreux courriers à ce sujet. Une lecture approfondie de l’article 1er fait apparaître un point majeur, à l’origine de nombreux malentendus : toute liberté est laissée aux partenaires sociaux pour gérer la prévoyance et la couverture santé comme ils le souhaitent. Dans cette perspective, ils ont le choix entre trois possibilités : laisser aux entreprises le soin de choisir l’assureur, formuler une recommandation ou procéder à une désignation. Dans l’esprit, les termes de l’accord sont donc pleinement respectés ; ce sont bien les partenaires sociaux qui décident, et eux seuls.
Je voudrais également préciser que la clause de désignation n’est pas un outil de contrainte : elle est au contraire au service des partenaires, en ce qu’elle permettra une réelle mutualisation, à un niveau évidemment plus large que celui de la seule entreprise, induisant une diminution des coûts. Elle permettra en outre la mise en place d’actions sociales collectives, de politiques de prévention et de santé publique, ainsi qu’un partage du fardeau lorsqu’une entreprise ne paie plus ses cotisations, ce qui constitue, soit dit au passage, une protection essentielle pour les salariés.
Mes chers collègues, je veux insister sur le fait que ce projet de loi n’apporte à cet égard aucun changement par rapport au droit existant, si ce n’est – cela devrait pleinement rassurer une partie de notre assemblée – qu’il renforce drastiquement les conditions de transparence, d’impartialité et d’égalité de traitement entre les candidats. Autrement dit, au début du processus, tous les candidats potentiels seront sur la même ligne. Est ainsi imposée une mise en concurrence, en cas tant de recommandation que de désignation, qui a encore été renforcée par l’Assemblée nationale. Je le dis avec force, avec ces nouvelles modalités tendant à assurer l’impartialité, nous éviterons les abus qui ont pu être constatés ici ou là.
Je rappelle enfin, pour lever tout malentendu, que la clause de désignation, créée à l’origine sans base législative par les partenaires sociaux, a été jugée parfaitement licite par toutes les juridictions qui en ont été saisies ces dernières années : l’Autorité de la concurrence – lisez bien son dernier avis, en date du 29 mars dernier –, le Conseil d’État, la Cour de cassation et la Cour de justice de l’Union européenne.
Je ne doute pas que nous aurons un débat sur ces questions, mais je souhaitais, à titre liminaire, exposer dans quel cadre j’ai travaillé sur l’article 1er en préparant mon rapport.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre. Je voudrais répondre tout de suite à la question précise que m’a posée M. le rapporteur.
Le dispositif de ce projet de loi a vocation à s’appliquer à l’ensemble des salariés, donc notamment à ceux du secteur agricole, en l’absence de dispositions spécifiques dans le code rural. Les représentants de la profession, en particulier la FNSEA, le savent très bien, ce point ayant été clarifié lors d’une réunion tenue en ma présence dans le cadre de la commission nationale de la négociation collective, le 18 février dernier.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi marque un tournant en termes de méthode, avec cette innovation majeure que constitue l’engagement d’une négociation avant l’élaboration de la loi. L’accord national interprofessionnel confirme la détermination du Gouvernement à changer les pratiques et les habitudes, en instaurant le dialogue comme un préalable à la loi.
Le Président de la République avait souhaité que les forces vives de la nation soient mobilisées afin de trouver des solutions nouvelles pour l’emploi. Signé par une majorité d’organisations syndicales et patronales, l’ANI, que transcrit ce projet de loi, est le fruit d’une concertation, d’une négociation et affiche un équilibre global dans la bataille pour l’emploi et contre la précarité.
À travers l’article 1er, nous retrouvons le chemin vertueux et nécessaire de la généralisation de l’accès aux soins pour tous.
En effet, cet article prévoit à la fois la généralisation de la couverture complémentaire collective santé pour les salariés du privé et l’amélioration de la portabilité des couvertures santé et prévoyance des demandeurs d’emploi, y compris pour le secteur agricole, ce qui constitue une avancée.
Tout ce qui conduit à mieux protéger les salariés est un progrès dont nous devons nous féliciter. Que chaque personne, dans notre pays, puisse accéder aux soins dont elle a besoin, que personne n’ait à renoncer à se faire soigner par manque de moyens, voilà un objectif majeur vers lequel nous devons tendre. Ce projet de loi représente un premier pas vers une généralisation effective de la couverture complémentaire santé. Par la suite, il nous faudra étendre l’application de ce principe à d’autres catégories de la population, notamment aux jeunes qui restent encore aujourd’hui en dehors du système. Des engagements ont été pris en ce sens et des rapports ont été produits sur ce sujet.
Je souhaiterais également que nous demeurions vigilants sur certains points spécifiques découlant de cette généralisation : je pense en particulier à la clause de désignation, aux appels d’offres et à la question des ayants droit.
Malgré tout, je tiens à le redire, cet article constitue une avancée. À partir de 2016, toute entreprise, quelle que soit sa taille, devra permettre à ses salariés de bénéficier d’une couverture santé collective de qualité, conforme à la définition des contrats solidaires et responsables.
Tout cela se fera sur la base de négociations qui débuteront dès le 1er juin 2013 et ce sont 400 000 personnes qui bénéficieront de ce système. Disons-le tout net, c’est là du très bon travail. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, sur l'article.
M. Hervé Marseille. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la généralisation de la couverture santé complémentaire à tous les salariés constitue une avancée incontestable ; personne n’en disconvient.
C’est sa mise en œuvre, telle que prévue par le présent projet de loi, qui suscite des interrogations, et plus précisément la possibilité ouverte aux branches de « désigner », et non pas seulement de « recommander », un organisme complémentaire auquel toutes les entreprises de la branche devront recourir, y compris celles ayant déjà mis en place une couverture complémentaire : c’est la fameuse clause de désignation, dont vient de parler M. le rapporteur.
Il ne fait pas de doute que, sur ce point, le projet de loi est en parfaite contradiction avec l’accord national interprofessionnel, dont l’article 1er est très explicite : « Les partenaires sociaux de la branche laisseront aux entreprises la liberté de retenir le ou les organismes assureurs de leur choix. Toutefois, ils pourront, s’ils le souhaitent, recommander […]. » Recommander, et non désigner : on ne peut être plus clair. Le terme « désignation » ne figure, au sein de l’ANI, que dans une note de bas de page relative aux seules branches ayant déjà désigné leur organisme complémentaire ; rien de plus.
Or la clause de désignation introduite par le Gouvernement dans la transcription de l’accord pose problème.
D’abord, sur un plan éthique, la désignation risque de conduire à une reconfiguration brutale, et non souhaitable, de l’offre de couverture complémentaire santé dans notre pays.
On le sait, la désignation favorisera considérablement les instituts de prévoyance, les IP, au détriment des mutuelles et des sociétés d’assurance. Aujourd’hui, sur cinquante et une branches ayant eu recours à la désignation d’un organisme complémentaire, quarante-trois ont désigné un institut de prévoyance. Pourquoi ? Parce que les IP fonctionnent de manière paritaire, suivant le principe de démocratie sociale. En l’occurrence, c’est aux organisations gérant les IP qu’il reviendra de désigner l’opérateur : il y aura un évident conflit d’intérêts, les partenaires sociaux étant à la fois juges et parties.
La question est donc non pas de défendre telle ou telle catégorie d’opérateurs contre telle ou telle autre, mais de légiférer pour assurer la transparence. Le financement des organisations patronales et syndicales doit, lui aussi, être transparent. C’est d’ailleurs le thème du rapport remis voilà quelques mois par le député Nicolas Perruchot.
Ensuite, sur un plan juridique, la désignation, telle qu’organisée par le projet de loi, méconnaît selon nous les règles du droit de la concurrence.
L’avis de l’Autorité de la concurrence le confirme sans aucune ambiguïté : la liberté de choix des employeurs n’est pas totalement exclue par le projet, certes, mais le champ de cette liberté « est limité par la combinaison de deux dispositions ».
En effet, l’article 1er pose la création d’un nouvel article L. 911-7 dans le code de la sécurité sociale « en vertu duquel l’employeur est tenu de mettre en place, par décision unilatérale, une couverture minimale en matière de complémentaire santé, dès lors que, préalablement au 1er janvier 2016, les salariés n’en bénéficient pas par accord de branche ou d’entreprise.
« Par ailleurs, l’article 1er, I. – A, du présent projet de loi impose aux entreprises liées par une convention de branche ou par des accords professionnels d’engager, à compter du 1er juin 2013, une négociation afin de permettre aux salariés qui n’en bénéficient pas d’accéder à une convention collective à adhésion obligatoire en matière de complémentaire santé avant le 1er juin 2016. Ainsi, il résulte de la lecture combinée de ces dispositions que l’employeur ne pourra être amené à choisir librement l’organisme d’assurance qu’à défaut de convention ou d’accord de branche préalable. […] Le maintien des clauses de désignation par le présent projet de loi constitue une préoccupation de concurrence. »
Voilà ce que souligne l’avis émis par l’Autorité de la concurrence.
Ces dispositions défavorisent donc le soutien à une diversité de l’offre propre à promouvoir la qualité du service et à exercer une pression à la baisse sur les prix.
En outre, à nos yeux, la désignation est une aberration économique. Elle ne profitera ni aux salariés, dont les cotisations sont susceptibles d’augmenter, ni aux entreprises, qui vont subir un renchérissement de leurs coûts, et donc une perte de compétitivité. On peut craindre la destruction de nombreux emplois sur tout le territoire dans les secteurs des mutuelles et des assurances, en particulier chez les agents généraux, qui risquent d’être les premiers pénalisés.
Par ailleurs, la clause de désignation entraînera des effets pervers pour les non-salariés qui souscriront une complémentaire santé. Les premiers à en pâtir seront, sans nul doute, les retraités et futurs retraités. En effet, priver les mutuelles et les sociétés d’assurance des cotisations de personnes faiblement consommatrices de soins, en ne leur laissant, du fait de leur maillage territorial plus dense que celui des institutions de prévoyance, que la gestion du risque santé d’une population fortement consommatrice, entraînera une augmentation des primes d’assurance des non-salariés, et particulièrement des retraités, ce qui contribuera à précariser davantage la situation de nos aînés.
Mme Catherine Procaccia. C’est vrai !
M. Hervé Marseille. Alors, pourquoi adopter cette démarche, si ce n’est pour donner satisfaction à certains partenaires sociaux ?
En conclusion, ni les assurés, ni les entreprises, ni les mutuelles et sociétés d’assurance n’ont vocation à être affectés au nom de la sécurisation de l’emploi : on peut malheureusement craindre qu’il ne s’agisse, en réalité, que de sécuriser le financement de certaines institutions…
C’est là pour nous une préoccupation majeure, monsieur le ministre, et les amendements que nous allons présenter tendent à améliorer la lisibilité et la transparence du dispositif. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, sur l’article.
M. André Reichardt. Je tiens tout d’abord à remercier vivement M. Daudigny d’avoir bien voulu me céder son tour de parole.
Cela a été dit, le projet de loi que nous examinons transcrit l’accord national interprofessionnel sur l’emploi conclu le 11 janvier 2013 entre un certain nombre de partenaires sociaux. L’article 1er de ce projet de loi est la transposition des articles 1 et 2 de l’ANI.
Celui-ci institue une obligation de mise en œuvre d’un dispositif généralisé de couverture complémentaire santé pour toutes les entreprises de notre pays à compter du 1er janvier 2016. Il précise notamment le calendrier et les modalités selon lesquels les branches, puis les entreprises, seront appelées à négocier et à mettre en place ce dispositif. Permettez-moi de les rappeler, afin d’éclairer la seconde partie de mon intervention.
D’ici au 1er juin 2013, les branches professionnelles non couvertes devront lancer des négociations sur ce point. Elles porteront principalement sur la définition du contenu et du niveau des garanties accordées, sur la répartition de la charge des cotisations entre employeur et salariés, ainsi que sur les modalités de choix du ou des organismes assurant la couverture complémentaire. À défaut de la conclusion d’un accord de branche avant le 1er juillet 2014, il reviendra aux entreprises de négocier sur ces sujets. En tout état de cause, au 1er janvier 2016, toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, devront permettre à leurs salariés de bénéficier d’une couverture complémentaire santé collective.
Cette mesure constitue, de la part des employeurs, une compensation – et même « la » compensation, selon certains – de l’accord donné par les organisations syndicales signataires à diverses dispositions visant, notamment, à favoriser la flexibilité dans les entreprises.
Je voudrais formuler deux observations à cet égard.
En premier lieu, s’il convient, bien entendu, de se féliciter de la conclusion d’un accord que les partenaires sociaux signataires s’entendent à juger équilibré, permettez-moi néanmoins, monsieur le ministre, de m’interroger sur les charges supplémentaires que cette obligation d’instaurer une complémentaire santé ne manquera pas de faire peser sur les nombreuses entreprises n’en disposant pas à l’heure actuelle.
Était-ce le bon moment pour créer cette contrainte supplémentaire ? Nous le savons, les entreprises ont déjà de gros problèmes de compétitivité-coût. Pour un certain nombre d’entre elles – en particulier les TPE, les artisans, les petits commerces, voire les PME –, les coûts supplémentaires liés à l’instauration d’une complémentaire santé ne feront que dégrader plus encore leur compétitivité.
Certes, je comprends la position des organisations professionnelles de l’artisanat et des PME qui ont accepté de signer cet accord, considérant les difficultés accrues de recrutement, particulièrement de main-d’œuvre qualifiée, que les entreprises qu’elles représentent n’auraient pas manqué de connaître dans le cas contraire. Pour autant, je suis persuadé que, dans le contexte économique actuel, ces coûts supplémentaires ne seront pas sans incidence sur la trésorerie de celles-ci. Je forme le vœu que, in fine, cela ne provoque pas, pour notre pays, des difficultés sociales plus grandes que celles que ce projet de loi vise à combattre.
En second lieu, la coexistence de cet accord national interprofessionnel, a fortiori retranscrit dans une loi, avec le régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle pose problème. On me permettra, en tant qu’Alsacien, d’insister sur ce point.
Bien entendu, comme chaque fois, les partenaires sociaux n’ont pas pris en compte, dans leur accord, la spécificité de l’Alsace-Moselle. Il convient donc d’y remédier dans ce projet de loi, pour éviter que les salariés des trois départements de l’Est ne soient désavantagés par rapport à leurs collègues des autres régions, qui bénéficieront d’un pack santé meilleur que ce que prévoit à l’heure actuelle le régime local d’assurance maladie. En effet, alors que, jusqu’ici, le régime local d’assurance maladie offrait de meilleures prestations à ses ressortissants, salariés et ayants droit, que celles du régime général, la mise en œuvre de l’ANI de janvier 2013 aboutira, de fait, à inverser la situation.
Les députés, sollicités sur ce point, ont d’ores et déjà tenu compte de ce problème, en adoptant un amendement qui oblige le Gouvernement à remettre au Parlement, avant le 1er septembre 2013, un rapport sur « l’articulation du régime local d’assurance maladie complémentaire obligatoire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle et la généralisation de la complémentaire santé ». À l’article 1er, ils ont aussi mentionné, pour les négociations à l’échelon des branches, la nécessité de prendre en compte la couverture complémentaire dont sont déjà bénéficiaires les ressortissants de ce régime local.
Pour autant, la question des négociations dans les entreprises elles-mêmes, prévues dans un second temps, n’est pas réglée. Il convient donc de prévoir, pour les négociations à cet échelon, une disposition analogue à celle d’ores et déjà mise en place pour les branches.
En qualité de président de la commission d’harmonisation du droit local d’Alsace-Moselle, j’ai déposé, comme d’autres collègues, un amendement en ce sens, que je souhaite voir adopter le moment venu. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. René Teulade, sur l’article.
M. René Teulade. Un tiers des Français ont déjà renoncé à se soigner. Ce constat terrifiant témoigne de l’impérieuse nécessité de faire de l’accès aux soins une priorité politique, d’où l’importance du présent projet de loi.
Les effets délétères de la crise économique induisent des sacrifices, qui atteignent leur paroxysme quand ils touchent au bien le plus sacré de l’être humain : la santé. Je n’insisterai jamais assez, d’ailleurs, sur le fait que la santé n’est pas une charge, même si elle a un coût ; c’est un investissement, et même le meilleur des investissements, puisqu’il porte sur l’être humain, qui est aussi un producteur de richesses.
À cet égard, il n’est pas anodin de relever le retour de la malaria en Grèce ou la propagation d’épidémies de tuberculose dans plusieurs de nos territoires.
Sans surprise, le renoncement aux soins s’explique majoritairement par des raisons d’ordre pécuniaire. La question du remboursement des soins est donc fondamentale. Depuis plusieurs décennies, les complémentaires santé se sont développées, afin de compléter au mieux les prestations versées par la sécurité sociale.
Devant cette évolution, loin d’être dénuée de sens, j’appelle de mes vœux la poursuite du débat, notamment à l’échelle des départements, sur la place des organismes complémentaires, et en particulier des mutuelles, au sein de notre système de santé. Cela me paraît non seulement d’actualité, mais surtout essentiel, dans la perspective de mettre en place une régulation plus efficace de notre système de protection sociale.
Ainsi, l’article 1er, en imposant l’instauration d’une complémentaire santé collective pour tous les salariés et en améliorant la portabilité des couvertures santé et prévoyance des demandeurs d’emploi, constitue une avancée majeure dans l’amélioration de l’accès aux soins pour tous.
Pour autant, aussi primordiale soit-elle, cette avancée ne demeure, nous en sommes tous convaincus, qu’une étape en vue de la généralisation de la complémentaire santé à tous les Français. En l’occurrence, je songe aux étudiants, dont près d’un quart n’ont pas de mutuelle, et aux retraités, dont il faudra également se préoccuper. D’ici à la fin du quinquennat, il faudra veiller à instaurer des dispositifs qui permettent à tous de bénéficier d’une couverture santé de qualité.
Par ailleurs, s’agissant des appels d’offres pour la passation de marchés avec les organismes assureurs, les amendements adoptés par l’Assemblée nationale ont été bienvenus ; l’impartialité et l’égalité de traitement sont les conditions sine qua non de l’instauration d’une procédure de mise en concurrence juste et réglementaire.
Cependant, je souhaiterais appeler l’attention de M. le ministre sur deux points.
Premièrement, dans un avis en date du 29 mars, l’Autorité de la concurrence a préconisé que les clauses de désignation ou de recommandation portent « nécessairement sur plusieurs organismes ». Ainsi, sans remettre en cause la clause de désignation, dont l’énoncé, il faut le reconnaître, est un peu sibyllin dans l’accord national interprofessionnel du 11 janvier dernier, j’aimerais que le Gouvernement nous fasse connaître son avis sur cette éventualité.
Deuxièmement, en vue de renforcer l’égalité de traitement entre les compagnies d’assurance, les institutions de prévoyance et les mutuelles, il paraîtrait opportun de faire évoluer la législation ayant trait au régime de coassurance, afin de sécuriser juridiquement cette pratique, aujourd’hui interdite aux mutuelles. Surtout, il faudrait que nous évitions que ne s’instaure la pratique, qui commence pourtant à se faire jour, du bonus-malus dans le domaine de la santé. Selon ce système, ceux qui ont la chance de ne pas être malades verraient leurs cotisations de complémentaire santé diminuer, tandis que ceux qui ont la malchance de l’être les verraient augmenter ! Ce serait là une remise en cause fondamentale du principe de solidarité entre les générations. Il faudra y faire très attention, en particulier au moment de l’attribution des contrats.
Par conséquent, à titre personnel, je me réjouis de la teneur de cet article, qui pose les jalons de la mise en place d’une couverture santé de qualité pour tous.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. René Teulade. Toutefois, à l’heure où les sacrifices en matière de santé s’alourdissent, il est important de poursuivre nos efforts. Souvenons-nous du programme du Conseil national de la Résistance, qui visait notamment à « assurer à tous les citoyens des moyens d’existence », cette existence aujourd’hui dramatiquement abandonnée sur les rives du désespoir par un nombre toujours croissant de nos concitoyens. Il nous faut tous lutter énergiquement, ensemble, pour faire face à cette situation.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel
M. le président. La séance est reprise.
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Questions cribles thématiques
Situation des hôpitaux
M. le président. L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur la situation des hôpitaux.
Je rappelle que l’auteur de la question et le ministre, pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée maximale d’une minute peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe politique.
Ce débat est retransmis en direct sur la chaîne Public Sénat et sur France 3 ; il importe que chacun des orateurs respecte son temps de parole.
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Madame la ministre, ma question portera sur les enjeux de la formation des jeunes dans le domaine de la santé.
Dans le contexte budgétaire fortement tendu que connaissent les établissements de santé publics, le dispositif des emplois d’avenir n’est pas contraignant en matière d’objectifs quantitatifs de recrutement, compte tenu des tensions affectant les effectifs de la fonction publique hospitalière.
En revanche, l’objectif affiché d’offrir une véritable insertion professionnelle à des jeunes peu ou pas qualifiés suppose la construction de parcours de formation permettant l’acquisition de qualifications reconnues.
Les jeunes recrutés dans le secteur public sanitaire pourront indifféremment, à l’issue d’un parcours de formation de trois ans, être employés dans le secteur public ou le secteur privé.
Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, si le Gouvernement envisage d’ouvrir les instituts de formation d’aides-soignants, les IFAS, aux titulaires d’emplois d’avenir ayant souscrit aux obligations de recrutement de ces établissements ?
Par ailleurs, je souhaite avoir des précisions sur l’avenir des écoles de formation paramédicale qui sont aujourd’hui rattachées aux établissements publics de santé.
Je rappelle que la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a décentralisé, au profit des régions, les formations sanitaires et sociales. Mais l’État a conservé des compétences telles que la délivrance des diplômes, la définition du contenu des formations, la fixation du nombre d’étudiants par filière et la répartition des quotas par région.
La réforme dite « LMD » – licence-master-doctorat – inclut progressivement les formations paramédicales visées dans le code de la santé publique pour donner, au-delà du diplôme professionnel, une équivalence universitaire aux étudiants.
Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, si le Gouvernement envisage de conserver aux écoles de formation paramédicale le caractère d’écoles d’application professionnelle ou s’il prévoit de les intégrer aux cursus universitaires, sans lien avec les établissements publics de santé ?
M. Alain Fouché. Très bonne question !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. C’est en effet une très bonne question, comme toujours de la part de M. Milon ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
Monsieur le sénateur, l'hôpital est pleinement engagé dans l'effort de formation des jeunes. Vous l'avez souligné, nous avons besoin de personnels de diverses qualifications à l’hôpital et dans le secteur médicosocial. C'est la raison pour laquelle nous allons consentir un effort particulier en faveur des jeunes sans qualification. Ainsi, d'ici à 2015, il est prévu de créer 9 700 emplois d'avenir, 1 630 l’ayant d'ores et déjà été dans le secteur sanitaire et social.
Toutefois, pour que l’entrée de ces jeunes dans le secteur médicosocial soit réellement porteuse d’avenir, il faut leur garantir une remise ou une mise à niveau et, dans un second temps, leur permettre de s'insérer durablement.
Contrairement à ce qui se pratique dans d'autres secteurs, mon ministère a d'ores et déjà prévu de consacrer 13 millions d'euros, en 2013, à la formation initiale des jeunes concernés. Au-delà, il nous faut engager une concertation avec les partenaires sociaux pour étudier dans quelles conditions nous pourrons amener ces jeunes au niveau qui leur permettra de passer, par exemple, le concours d’aide-soignant.
Monsieur le sénateur, vous m’avez également demandé si la formation aux professions paramédicales, désormais universitaire, conserverait son caractère professionnalisant. Je vous réponds clairement par l’affirmative. Si ces formations s'inscrivent effectivement dans le cursus universitaire, elles demeurent d'application professionnelle. Il faut donc que le lien avec le secteur professionnel soit non seulement garanti, mais renforcé.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.
M. Alain Milon. La question des équivalences universitaires est un sujet d’inquiétude important pour les établissements hospitaliers. Il est nécessaire que le caractère professionnel de la formation soit maintenu, de manière que les hôpitaux n'aient pas à compléter celle-ci.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la ministre, la situation financière des hôpitaux demeure préoccupante. C’est à compter de 2006 qu’ils sont globalement devenus déficitaires. Leurs déficits, depuis lors, ne se résorbent que lentement.
Les causes de cette situation sont connues : une moindre progression des dotations de l’assurance maladie associée au doublement des investissements entre 2002 et 2008, ces investissements étant financés par l’endettement.
À ces tensions budgétaires s’ajoutent aujourd’hui des difficultés majeures en matière d’accès au crédit, notamment à la suite de l’affaire des emprunts toxiques.
Au final, alors que le déficit global avait atteint 710 millions d’euros en 2007, il était toujours, en 2010, de 488 millions d’euros.
Or, on le sait, d’importantes sources d’économies existent à l’hôpital.
En amont du système, d’abord, il conviendrait de développer des maisons médicales de garde pour désengorger les urgences. Une consultation dans une telle structure revenant à 62 euros, contre 240 euros dans un service des urgences, 1,5 milliard d’euros pourraient ainsi être économisés.
Une autre source majeure d’économies tient bien sûr à l’informatisation du système et à la mise en place du DMP, le dossier médical personnel. Une telle informatisation contribuerait à résorber les actes inutiles à l’hôpital, qui représentent 28 % du total des actes, selon l’évaluation de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale du Sénat, la MECSS, confortée par un rapport de l’Académie nationale de médecine rendu public le 10 avril. Le coût des actes inutiles atteindrait donc 12 milliards d’euros au regard de la tarification à l’activité, la T2A. Il ne faut pas non plus oublier la charge des 35 heures et des heures supplémentaires, dont le seul solde aurait coûté 500 millions d’euros à l’État l’année dernière.
Enfin, la réforme du médicament, avec la promotion du générique, profiterait également au secteur hospitalier.
Tout cela nécessite la mise en place d’un plan global pour l’hôpital, que nous réclamions déjà au gouvernement précédent. Madame la ministre, un tel plan va-t-il enfin être mis en œuvre ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, l'avenir de l'hôpital est une préoccupation majeure pour le Gouvernement. L’hôpital, dont l'excellence est reconnue, est évidemment l’un des piliers de notre système de santé. Je profite d’ailleurs de cette occasion pour rendre hommage à toutes celles et à tous ceux qui travaillent dans le secteur hospitalier, avec une exigence d'excellence à la fois professionnelle et sociale.
Des efforts importants ont d'ores et déjà été accomplis. Vous indiquez que les établissements hospitaliers sont en déficit. Néanmoins, la situation s’est globalement améliorée ; en réalité, les déficits se concentrent sur quelques établissements bien identifiés.
Par ailleurs, la stratégie d'investissements hospitaliers mise en place par le Gouvernement prévoit bien évidemment des contreparties en matière de retour à l'équilibre.
Néanmoins, des mesures s'imposent pour permettre à l'hôpital de fonctionner dans de meilleures conditions financières. D'abord, le Gouvernement lui a facilité l'accès au crédit. Ensuite, en aval, vous avez parfaitement raison de souligner, monsieur le sénateur, qu’il faut faire en sorte que des patients n’ayant pas besoin d'être traités à l'hôpital puissent être mieux soignés ou mieux pris en charge en ville. Enfin, informatiser, renforcer la mutualisation des coûts et améliorer la gestion des achats est une priorité.
Pour conclure, la difficile question des génériques doit être posée. Sa difficulté tient au fait que les médicaments prescrits à l'hôpital ne sont pas souvent substituables en ville. C’est pourquoi nous avons engagé une réflexion globale sur le médicament, qui devra également contribuer à améliorer le fonctionnement de l'hôpital.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour la réplique.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais vous n’avez rien dit sur les actes inutiles ou superfétatoires. Il est tout de même curieux que ce sujet ne soit jamais abordé, alors qu’il y a là une source évidente d’économies à terme. Je le répète, l'Académie nationale de médecine vient de confirmer l’analyse de la MECSS.
Madame la ministre, le Gouvernement a-t-il l’intention de mettre en place un plan global pour l’hôpital qui prendrait en compte cette problématique ? Vous avez évoqué une réflexion sur le médicament. Il convient d’aborder enfin cette question, qui est essentielle compte tenu de l’ampleur des économies possibles.
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Madame la ministre, en moins d’un an, vous avez engagé de nombreux changements, et ce dans une conjoncture économique extrêmement difficile, dans le cadre d’un système de santé figé par un cloisonnement devenu contre-productif sur tous les plans : économique, sanitaire et social.
L’objectif principal de décloisonnement qui était justement celui de la loi HPST du 21 juillet 2009 n’a pas été atteint. Cela n’était pas possible, en réalité, pour deux raisons : d’une part, en supprimant le service public hospitalier, cette loi a privé notre système de santé de ce qui a fait de lui l’un des meilleurs et constitue son socle, à savoir l’hôpital et les valeurs qu’il porte ; d’autre part, ses promoteurs ont cru pouvoir soumettre l’hôpital à une hiérarchie pratiquement césarienne, alors qu’il ne s’organise et ne se conduit pas sans les professionnels de santé qui le font vivre, ni a fortiori contre eux.
C’est bien pourquoi, madame la ministre, votre première préoccupation a été de revoir la politique hospitalière, tandis que vos premières décisions ont visé à réintroduire le service public hospitalier – ce qui s’est traduit, dès la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, par la suppression de la convergence tarifaire entre le privé et le public – et à rétablir la confiance par la concertation et le dialogue.
Des travaux de la mission conduite par Édouard Couty et chargée d’élaborer ce « pacte de confiance » indispensable, vous avez retenu treize engagements pour l’hôpital public, qui s’inscrivent de façon cohérente dans la stratégie nationale de santé définie par le Premier ministre.
Là réside certainement le changement profond de politique, car nous n’avions pas connu, de longue date, un projet aussi ambitieux, inscrit dans la durée et construit sur la solidarité.
Un certain nombre de mesures ont d’ores et déjà été prises s’agissant de la fin de la convergence tarifaire, du financement et de la sécurisation des personnels.
Vous vous êtes également donné pour objectif de renforcer la démocratie à l’hôpital pour associer l’ensemble des acteurs légitimes que sont les professionnels de santé, les élus locaux et les usagers et leur redonner toute leur place.
Pouvez-vous, madame la ministre, préciser aujourd’hui à la représentation nationale quel est l’état d’avancement de ces chantiers ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, je vous remercie de souligner que la reconnaissance de l’importance de la place de l’hôpital dans notre système de santé a été une priorité de mon action et de celle du Gouvernement.
Dans cet esprit, j’ai mis en place un pacte de confiance, fondé sur les conclusions du rapport rédigé par M. Couty au terme d’une longue concertation avec l’ensemble des acteurs. Il s’agit maintenant de mettre en œuvre les treize engagements que j’ai pris à l’issue de ce travail. Cela se fera selon un calendrier qui est aujourd’hui déterminé.
Dans un premier temps, une concertation, suivie d’une négociation, va s’engager avec les organisations représentatives, en vue d’améliorer les conditions de travail des personnels et de mettre en place un observatoire du dialogue social. En effet, je tiens à le redire, l’hôpital public, c’est évidemment une structure, mais ce sont aussi, et surtout, des hommes et des femmes, des médecins, des personnels soignants ou non soignants, engagés au quotidien pour faire en sorte que nos concitoyens soient accueillis dans les meilleures conditions possibles.
Dans un deuxième temps, je publierai, vers l’été, un ensemble de décrets et de circulaires visant par exemple à revoir la gouvernance à l’hôpital, c’est-à-dire l’équilibre entre les médecins et la direction, et à déterminer les schémas régionaux d’investissements en santé, qui doivent donner de la force à nos hôpitaux publics.
Enfin, viendra le temps des dispositions législatives, avec l’élaboration de la loi de financement de la sécurité sociale, qui actera la fin du « tout-T2A », et la présentation, en 2014, d’un texte relatif à l’organisation des soins.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est aujourd’hui pleinement engagé pour faire de notre hôpital public un atout au service de nos concitoyens et de nos territoires.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour la réplique.
M. Yves Daudigny. Madame la ministre, je vous remercie de vos paroles, qui ouvrent des perspectives. Votre action conjugue des mesures immédiates, pragmatiques, concrètes, et une vision d’avenir de notre système de santé, en particulier de l’hôpital public.
Même si l’aspect financier ne constituait pas le cœur de ma question, qu’il me soit permis, en tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales du Sénat, de souligner que les résultats obtenus en 2012 en matière de dépenses de santé permettent un effet de base favorable pour l’année 2013.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nombre des difficultés rencontrées par les hôpitaux sont liées à la restriction des moyens décidée par le précédent gouvernement, conformément à la sacro-sainte loi de la diminution des dépenses publiques.
Les effets négatifs de l’application de la loi HPST, dite loi Bachelot, et de la T2A ne cessent de se faire sentir, aussi bien du côté des patients que de celui des praticiens, d’où l’importance de se fixer des objectifs ambitieux et de rompre avec les logiques suivies jusqu’à présent.
L’hôpital est en souffrance, et l’onde de choc est considérable : manque flagrant de lits, nombre de médecins plus qu’insuffisant, délais d’attente inacceptables pour obtenir un rendez-vous avec un spécialiste.
Il est impossible de parler ici de tous les hôpitaux au bord de l’explosion. Je vous invite à vous rendre sur le site internet de la coordination des hôpitaux et maternités de proximité : ce qu’on y découvre est édifiant ! Je veux une nouvelle fois, madame la ministre, attirer votre attention sur ce qui se passe à l’Hôtel-Dieu, dont la situation mérite une vaste mobilisation des pouvoirs publics et rend urgente l’adoption, proposée par le groupe CRC, d’un moratoire sur toutes les restructurations et fermetures en cours.
Le désarroi des personnels hospitaliers est profond. Vous avez fait mention du rapport Couty : il comporte effectivement des pistes intéressantes, mais je ne suis pas persuadée qu’elles répondent aux inquiétudes des professionnels et des patients.
Ma question est simple : comptez-vous, madame la ministre, proposer la suppression de la taxe sur les salaires, ce qui permettrait de résoudre en partie les difficultés financières des hôpitaux et ne serait que justice, dans la mesure où le secteur privé en bénéficie déjà ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la sénatrice, le service public hospitalier fait partie du patrimoine de notre système de santé, de notre identité sociale. Il est au cœur du pacte social qui nous rassemble. À ce titre, l’hôpital public doit être non seulement préservé, mais renforcé, ce qui passe aussi, il faut le dire, par un certain nombre d’adaptations.
M. Gilbert Barbier. Il faut s’adapter !
M. Gilbert Barbier. Très bien !
Mme Marisol Touraine, ministre. Nous devons adapter l’hôpital aux réalités nouvelles de la société, de la santé, de la médecine, aux attentes des patients d’aujourd’hui.
Cela étant, le service public hospitalier est intangible et non négociable. Or la loi HPST avait bafoué l’hôpital public : il est temps de tourner la page !
M. Alain Fouché. On va voir ce que vous allez faire !
M. Alain Gournac. Oui, on va voir !
Mme Marisol Touraine, ministre. En 2014, un projet de loi visant à réaffirmer la place du service public hospitalier et à l’ancrer dans nos territoires à travers un service public territorial de santé vous sera présenté.
En ce qui concerne plus spécifiquement la taxe sur les salaires, je rappelle qu’elle permet de financer la branche famille et la branche vieillesse et qu’elle ne concerne pas que les seuls hôpitaux. La suppression de cette taxe reviendrait potentiellement à remettre en cause une part significative de notre budget, car le manque à gagner pour l’État atteindrait 3,5 milliards d’euros.
J’ajoute que les tarifs appliqués aux hôpitaux publics tiennent compte, d’ores et déjà, du surcoût que représente la taxe sur les salaires.
Madame la sénatrice, supprimer cette taxe ne me semble pas être la bonne solution. L’avenir de l’hôpital n’est pas seulement un enjeu financier ; c’est aussi une question d’adaptation, d’organisation et de prise en compte des réalités sociales d’aujourd’hui.
Cela étant, l’aspect financier est évidemment important ; nous y réfléchissons dans le cadre d’un comité sur la refonte de la T2A dont les travaux intègrent également la question des actes inutiles, évoquée précédemment par M. Vanlerenberghe.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.
Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, je vous remercie de redire ici que l’hôpital public est au cœur de notre patrimoine sanitaire. Nous ne pouvons que partager ce point de vue.
M. Alain Gournac. Allez voir à l’Hôtel-Dieu !
Mme Laurence Cohen. Il est effectivement nécessaire de mettre en œuvre des mesures marquant une rupture avec les choix du précédent gouvernement, qui ont entraîné la casse de l’hôpital public. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Fouché. Que de belles paroles ! Nous verrons les résultats…
M. Alain Gournac. Du pipeau !
Mme Laurence Cohen. Nous devons veiller à ce que tout ne repose pas sur le seul hôpital public, auquel il importe d’attribuer des moyens nouveaux. Or, pour l’instant, je n’ai pas entendu formuler de propositions de cet ordre. Pour que l’hôpital public puisse vivre, une mobilisation bien plus importante en sa faveur est nécessaire. Des choix politiques en rupture avec ceux du gouvernement précédent doivent être faits.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Les crédits relatifs aux missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation, les MIGAC, servent à financer les missions d’intérêt général remplies par les établissements de santé, telles que la permanence des soins, les missions d’enseignement, de recherche, d’innovation, la prévention, l’éducation pour la santé, la prise en charge des patients en situation de précarité ou encore la gestion des risques.
Ces crédits sont aujourd’hui en stagnation. Alors qu’une augmentation de 3,16 % avait été annoncée pour 2013, ils ne progresseront en réalité que de 0,26 %.
Le fait est que, depuis 2009, la régulation des dépenses passe notamment par la mise en réserve annuelle d’une partie des crédits des MIGAC. Mal compris par la communauté hospitalière, ce gel pèse de manière inopportune sur les établissements du secteur public. Cela se traduit par des suppressions de postes, la réduction de certaines missions de service public ou des conséquences lourdes en matière d’investissements hospitaliers.
En outre, l’année 2013 est marquée par un développement important du fonds d’intervention régional, le FIR, dont la croissance est notamment alimentée par un transfert de crédits destinés au financement des MIGAC. Or ce sont les agences régionales de santé, les ARS, qui gèrent ce fonds, souvent sans beaucoup de transparence, ce qui ne manque pas de susciter la méfiance des personnels hospitaliers.
Mes collègues sénateurs membres de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, soulignent dans leur rapport d’information de juillet 2012 que les MIGAC, regroupant près d’une centaine de missions, constituent un ensemble hétéroclite et un dispositif extrêmement complexe. Ils recommandent que celui-ci soit remis à plat et que l’on renforce largement l’évaluation de la mise en œuvre des MIGAC.
Madame la ministre, quelle action votre ministère prévoit-il de mener afin que des priorités claires soient fixées aux agences régionales de santé pour la répartition des MIGAC ? Par ailleurs, envisagez-vous de renforcer l’évaluation de l’exécution de celles-ci ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Madame la sénatrice, je partage votre volonté de conforter et de sanctuariser les ressources affectées aux MIGAC.
L’hôpital est financé de deux façons : par la rémunération de son activité et par le biais des MIGAC, ces missions d’intérêt général qui représentent l’essence même du service public.
Parce que les MIGAC constituent le cœur de l’action du service public – la formation, la recherche, l’accueil des plus fragiles –, nous devons faire en sorte que leurs financements soient confortés.
Je m’y suis employée dès mon arrivée aux responsabilités. Contrairement à la situation qui prévalait sous le gouvernement précédent, les ressources affectées aux MIGAC sont désormais totalement versées aux hôpitaux et ne font pas l’objet d’un gel en début d’année.
Par ailleurs, j’insiste sur le fait que ces fonds connaîtront une augmentation de 190 millions d’euros en 2013, soit une progression de 2,3 % par rapport à l’année dernière.
Enfin, vous avez souhaité davantage de transparence.
La transparence sur les actions menées existe, puisqu’un rapport remis au Parlement fait le point sur l’ensemble des missions conduites dans les régions.
En outre, il me paraît important que les agences régionales de santé puissent disposer d’une marge de manœuvre pour répondre aux besoins de leur territoire en termes, par exemple, de missions de solidarité.
Cela étant, madame la sénatrice, je souhaite moi aussi que la répartition soit la plus équitable possible. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé qu’un travail de remise à plat de l’ensemble de ces missions d’intérêt général soit effectué, afin d’aller vers davantage d’équité dans la prise en compte des besoins de nos concitoyens. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour la réplique.
Mme Aline Archimbaud. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse et de votre engagement en faveur des missions d’intérêt général en matière de santé.
Les MIGAC ne peuvent pas servir de variable d’ajustement pour compenser la croissance d’autres dépenses, même si le contexte financier est contraint.
Concernant la transparence dans l’affectation de la part des crédits des MIGAC qui est gérée par les agences régionales de santé, il s’agit d’une demande forte émanant non seulement des professionnels de santé, mais aussi des élus locaux, qui souhaitent savoir comment fonctionne l’hôpital public et quelles sont ses missions prioritaires.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Refonder l’hôpital, pourquoi pas ! C’est certainement lui permettre de se recentrer sur son cœur de compétences, à savoir la prise en charge des urgences vitales, le diagnostic et le traitement des pathologies aiguës. Cela suppose une réponse organisée en amont et en aval, dans une logique de parcours de soins.
Consolider l’hôpital, pourquoi pas ! C’est sans doute ajuster son mode de financement, car il est vrai que la T2A, en dépit de ses avantages indéniables, peut présenter des difficultés d’application en dehors de la médecine, chirurgie ou obstétrique et dans les petits établissements hospitaliers.
Rétablir la confiance à l’hôpital, pourquoi pas ! C’est aussi clarifier ses relations avec les autorités de régulation, l’État, les ARS et l’assurance maladie, favoriser le dialogue entre les directions administratives et les équipes médicales. J’étais d’ailleurs intervenu en ce sens lors de l’examen du projet de loi HPST.
Permettez-moi d’ajouter à ces grandes lignes un peu floues du rapport d’Édouard Couty la nécessaire restructuration de l’offre hospitalière. Lors d’un précédent débat sur l’hôpital, je vous avais interpellée, madame la ministre, sur les enjeux, potentiellement contradictoires, en matière de proximité des soins, d’une part, et de qualité des soins, d’autre part.
Vous l’avez souligné à l’instant, les progrès de la médecine imposent des adaptations en termes de ressources humaines, d’équipements, de techniques, de formation continue, l’exercice médical étant de plus en plus spécialisé. Pour certains actes ou spécialités, proximité ne peut pas rimer avec qualité et sécurité des soins.
Mme Bachelot, en son temps, avait créé une commission, dont j’étais membre, chargée de donner un avis sur la fermeture de 127 plateaux techniques considérés comme insuffisants par l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales. Croyez-moi, il y a dans nos territoires de petits établissements, dotés d’un personnel médical plus ou moins bien formé et comptant de nombreux postes vacants, dans lesquels je doute qu’aucun d’entre nous irait spontanément se faire soigner. C’est malheureux à dire, mais c’est la réalité. D’ailleurs, les patients ne s’y trompent pas : en dépit de ce qu’il peut leur en coûter, 60 % des actes programmés sont accomplis dans des cliniques privées.
Il faut poursuivre ce travail de restructuration : prenons garde à ne pas créer un hôpital à deux vitesses au nom de l’égal accès aux soins !
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Gilbert Barbier. Un récent rapport de l’IGAS a présenté des propositions sur ce point ; il préconise notamment d’affiner les analyses pour fixer un seuil minimal d’activité dans les blocs techniques. Madame la ministre, quelles suites comptez-vous donner à ces recommandations ? (MM. Jacques Mézard et Jean-Pierre Sueur applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, notre système de santé doit faire face à un double défi : la consolidation de notre service public hospitalier, d’une part, et l’intégration de l’hôpital dans l’ensemble plus vaste que constitue notre système de soins, d’autre part.
L’hôpital ne fonctionne pas seul, en apesanteur. Il doit d’ailleurs travailler davantage en lien avec les médecines de ville ou de campagne, avec l’ensemble des structures médicosociales. À cet égard, la médecine de parcours de soins que vous avez évoquée est un des thèmes importants de la stratégie nationale de santé qui est sur le point d’être mise en place.
Dans ce cadre, l’un des enjeux est de garantir la proximité, c'est-à-dire de permettre à nos concitoyens, quel que soit le lieu où ils résident, d’accéder à des soins de qualité.
Toutefois, la proximité doit aller de pair avec la sécurité. Cette exigence n’est ni négociable ni discutable : nous ne pouvons évidemment pas proposer à nos concitoyens des hôpitaux ou des plateaux techniques qui ne présenteraient pas toutes les garanties nécessaires. J’ai d’ores et déjà eu à décider la fermeture de certains services ou de certains établissements, au nom de la sécurité.
M. Alain Gournac. Et vous avez eu raison !
Mme Marisol Touraine, ministre. Cela étant, la proximité est également un élément important. La présence de petites structures hospitalières dans nos territoires permet à des médecins libéraux de s’installer : pourquoi voulez-vous que des soignants, des médecins, des kinésithérapeutes, des infirmières ou des pharmaciens viennent vivre et travailler dans nos territoires ruraux si nous, pouvoirs publics, fermons les structures hospitalières qui s’y trouvent ?
Mme Élisabeth Lamure. Très bien !
M. Jean Desessard. Bravo !
Mme Marisol Touraine, ministre. Il faut procéder à des restructurations lorsqu’elles répondent à des préoccupations en matière de santé et d’offre de soins, mais pas lorsqu’elles sont dictées par des considérations financières. Aucun modèle de rationalité ne s’impose a priori ; en revanche, il y a une exigence de sécurité et de proximité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour la réplique.
M. Gilbert Barbier. Madame la ministre, il est bien sûr difficile d’allier proximité et qualité des soins. Toutefois, vous le savez très bien, en général, c’est la première prise en charge qui est déterminante, qu’il s’agisse de chirurgie de la main, de chirurgie orthopédique ou de chirurgie cardiaque. La qualité de la première intervention influe directement sur le taux de morbidité. Les insuffisances en la matière ont un coût, non seulement pour le patient, mais aussi pour la société. (M. Jacques Mézard applaudit.)
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Madame la ministre, ma question portera également sur la notion de proximité, plus précisément sur les hôpitaux ruraux.
Le rapport de M. Couty, publié en février dernier, tend à proposer une refondation de la gouvernance de l’hôpital public pour les années qui viennent, selon des principes adaptés aux temps. Il s’agit de répondre aux attentes des patients et de centrer l’hôpital sur ses missions, à savoir les soins, le médicosocial, la santé publique, l’enseignement et la recherche.
Dans ce cadre, je consacrerai mon propos aux conseils de surveillance des groupements hospitaliers.
Il n’y a qu’un conseil de surveillance par groupement. Cette instance remplace les conseils d’administration de chaque établissement.
Prenons l’exemple des départements de la Marne et de l’Aube. Nous avons constitué le groupement hospitalier Aube-Marne, qui réunit trois établissements : celui de Sézanne, dans la Marne, et ceux de Romilly-sur-Seine et de Nogent-sur-Seine, dans l’Aube. Cette organisation permet de rationaliser les coûts et les services, qu’il s’agisse de la médecine générale, de l’accueil des urgences, de l’antenne du SMUR, des services de soins de suite et de rééducation ou de l’hébergement des personnes âgées.
Cependant, un inconvénient se dessine : l’éloignement de la structure décisionnelle.
En tant que membre du conseil de surveillance, j’ai proposé d’installer dans chaque établissement un conseil informel chargé de décliner la stratégie commune tout en prenant en compte la vie sociale, la dimension humaine et l’inclusion dans la vie locale. Aujourd’hui, la loi ne le permet pas !
Madame la ministre, pensez-vous ouvrir à l’avenir la possibilité de créer une telle structure représentative, informelle ou non, réunissant les élus locaux, les associations, les représentants des secteurs sanitaire, médicosocial et social ? Il s’agit non pas d’alourdir le dispositif existant, mais de le rendre un peu plus efficace dans la vie de tous les jours, aussi bien pour les malades que pour le personnel soignant.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, comme je l’ai indiqué il y a un instant, je suis pleinement convaincue de la nécessité de bien ancrer nos structures hospitalières dans les territoires.
Nous sommes, vous comme moi, élus locaux, et nous savons qu’un hôpital représente bien plus qu’un lieu où l’on soigne, où l’on accueille les malades ; c’est également un lieu structurant pour un ensemble de communes et de territoires.
En conséquence, il est important que tous ceux qui, à divers titres, participent à la vie d’un territoire puissent, s’ils le souhaitent, connaître des choix et des orientations de l’hôpital, ainsi que concourir à leur détermination.
Cette attente est très forte. Dans le cadre du pacte territoire-santé, que j’ai lancé au mois de décembre dernier et qui a pour objectif de lutter contre les déserts médicaux, j’ai souhaité que des rencontres territoriales soient organisées pour évoquer les enjeux et l’avenir en matière de santé dans chaque territoire. Elles donnent l’occasion à de nombreux acteurs de s’exprimer et de formuler des propositions.
Faut-il, comme vous le souhaitez, créer une structure de plus, alors même que, de l’avis général, l’organisation hospitalière est déjà quelque peu compliquée et que nous cherchons à la simplifier, ou à tout le moins à la clarifier ? Je ne suis pas certaine que cela soit opportun.
En revanche, que les ARS puissent, de façon régulière, animer, favoriser ou susciter des débats sur les enjeux de santé dans tel ou tel territoire me semble constituer une très bonne piste. Les habitants, les élus, les représentants des associations doivent pouvoir s’impliquer dans l’organisation du système de santé de leur département ou de leur territoire.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour la réplique.
M. René-Paul Savary. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je comprends que vous ne souhaitiez pas la création d’une instance supplémentaire, mais il importe que, localement, on puisse s’approprier l’hôpital. Or les liens entre les acteurs locaux et l’hôpital public se distendent progressivement à mesure que les centres de décision s’éloignent du territoire. Il peut en résulter une baisse de la fréquentation des établissements, débouchant à terme sur la fermeture de services qui apportent pourtant un réel soulagement à la population.
À mon sens, les décisions ne doivent donc pas nécessairement être prises par l’ARS. Nous devons être en mesure de prendre la situation en main localement et de procéder aux adaptations nécessaires.
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Madame la ministre, le pronostic vital de l’hôpital en Martinique est désormais engagé. Ce constat se traduit par la timide application des mesures prévues dans le plan santé outre-mer, par les problèmes liés aux créances des fournisseurs, par l’état défectueux des matériels médicaux, par la dégradation des conditions d’hygiène, par la réduction des effectifs, et j’en passe !
Aujourd’hui, je souhaite attirer à nouveau votre attention sur la situation du service des urgences de l’hôpital du Lamentin, dépendant de la cité hospitalière Mangot-Vulcin. Cet établissement est fermé depuis le 21 mars dernier, et son activité a été transférée aux hôpitaux Pierre Zobda-Quitman, à Fort-de-France, et Louis-Domergue, à Trinité.
L’agence régionale de santé a expliqué que la baisse de l’effectif des médecins urgentistes en Martinique imposait un regroupement des services des urgences. Or cette décision est symbolique d’une régression du système de soins, fondé non plus sur les besoins des patients, mais sur la recherche d’une rentabilité financière. Je reconnais là, sur le principe, votre souci de la rigueur.
De plus, cette évolution présente un caractère injuste pour les patients et la population qui en font les frais : elle entraîne des déplacements plus longs, d’une durée supérieure aux trente minutes recommandées, et compliqués, dans un territoire déjà largement frappé par les inégalités économiques et sociales.
Cette fermeture a déjà une incidence désastreuse, en raison de l’engorgement des sites d’accueil des urgences. Les patients de l’hôpital Pierre Zobda-Quitman, dont le nombre a augmenté – Mangot-Vulcin recevait en moyenne cinquante personnes par jour –, sont contraints d’attendre dans une salle qui aurait fait l’objet d’un avis défavorable de la commission de sécurité, au même titre que l’ensemble de l’établissement. En outre, les délais moyens d’attente seraient passés de six à huit heures.
Par ailleurs, la fermeture du service des urgences de Mangot-Vulcin et le transfert de son activité à l’hôpital Pierre Zobda-Quitman ne semblent pas relever d’un choix judicieux en termes de sécurité. Mangot-Vulcin, établissement plus récent, bénéficie en effet de bâtiments conformes aux normes parasismiques, ce qui n’est pas le cas de l’hôpital Pierre Zobda-Quitman. En cas de survenue d’un séisme majeur, un tel choix se traduira donc vraisemblablement par une surmortalité.
Madame la ministre, ne pensez-vous pas que la gestion des urgences doit être reconsidérée, afin de garantir la sécurité du système de soins et la rationalité de l’utilisation du potentiel des établissements, avec une répartition territoriale des services plus équilibrée ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, je comprends que vous vous interrogiez sur les raisons qui ont conduit à la fermeture du service des urgences de l’hôpital du Lamentin, dans le cadre du plan de redressement du centre hospitalier universitaire de Martinique.
Ce service est situé à sept kilomètres du CHU de Fort-de-France, qui abrite le principal centre d’urgences de l’île, en mesure d’accueillir les cas les plus lourds. La distance à parcourir n’est donc pas très grande. Or, parallèlement, il manquait des médecins – et non pas des postes, j’y insiste – au sein du service des urgences du Lamentin, ce qui compromettait la qualité de l’accueil de nos concitoyens martiniquais.
J’ajoute que la prise en charge des urgences est en cours de réorganisation et qu’une réflexion pourra être engagée sur ce sujet. Du reste, l’ARS a déjà ouvert trois maisons de garde au cours des derniers mois.
Au-delà, je puis vous assurer que je suis très attentive à la question de l’accès aux soins, en particulier à la Martinique. Je tiens à souligner l’engagement de l’État : il mobilisera 111 millions d’euros en 2013 pour soutenir les trois hôpitaux fusionnés de la Martinique, qui présentent un déficit de l’ordre de 163 millions d’euros. S’ajouteront à cette somme 40 millions d’euros d’aide exceptionnelle de l’ARS.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est très attentif à la situation en Martinique. Je veille à ce que les meilleures réponses possibles soient apportées, au quotidien, à nos concitoyens martiniquais.
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, pour la réplique.
M. Maurice Antiste. Madame la ministre, je connais votre engagement sur ces questions. Je souhaite simplement attirer l’attention sur la situation du personnel des hôpitaux, d’une manière générale. Nous devons absolument faire en sorte qu’il soit heureux d’aller au travail chaque matin : c’est peut-être là le premier pas vers la guérison des malades !
M. le président. La parole est à M. René Teulade.
M. René Teulade. Malgré la mise en œuvre du plan « urgences » entre 2004 et 2008, nous constatons que la situation des services des urgences dans les hôpitaux publics demeure particulièrement inquiétante.
Les raisons de cette situation sont amplement connues. Le manque de moyens humains contraste avec la hausse constante du nombre de passages aux urgences, qui a doublé entre 1990 et 2004, passant de 7 millions à 14 millions. Parallèlement, les urgentistes ressentent de plus en plus un sentiment d’impuissance, dans la mesure où ils ne peuvent exercer leur métier dans des conditions propices aux soins et à l’accueil des patients, notamment des publics vulnérables, telles les personnes âgées, malgré la mise en place de filières gériatriques.
La dégradation visible et pernicieuse des services des urgences est d’autant plus préjudiciable qu’ils constituent une vitrine pour l’hôpital public. Ils jouissent en effet d’une excellente image auprès de la population, offrant vingt-quatre heures sur vingt-quatre à tout un chacun la possibilité d’être soigné par des professionnels qualifiés disposant d’un plateau technique parfois étendu.
Afin de remédier aux difficultés auxquelles doivent faire face les services des urgences, ne devrait-on pas se focaliser avant tout sur l’organisation du système de soins ? Il conviendrait d’améliorer l’articulation entre médecine de ville et hôpital : une telle évolution, esquissée par le Gouvernement dans le cadre du précédent projet de loi de financement de la sécurité sociale, est préconisée dans le rapport de 2007 de la Cour des comptes.
Dans cette même optique, il serait opportun de renforcer la permanence des soins en vue de désengorger les urgences. Dans son enquête sur l’état des lieux de la permanence des soins en médecine générale, le Conseil national de l’Ordre des médecins s’alarme de « la pénurie de médecins volontaires », de leur « vieillissement » et de « l’érosion du volontariat ». Il en résulte un affaiblissement notable de la permanence des soins, qui, aujourd’hui, n’est plus assurée à partir de minuit dans dix-neuf départements.
L’égalité d’accès aux soins, droit constitutionnel qui découle du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, n’est donc pas garantie. Pour lui redonner corps, il est fondamental d’envisager l’instauration d’une participation obligatoire des médecins libéraux à la permanence des soins, fondée sur un système de rotation.
M. le président. Mon cher collègue, il faut conclure !
M. René Teulade. Par ailleurs, les maisons de garde ont contribué à décharger les services des urgences. Il apparaît donc nécessaire d’assurer leur déploiement et leur pérennisation sur le territoire.
En outre, il semble acquis qu’il faille rééquilibrer le financement, afin qu’il ne constitue pas une incitation à augmenter le nombre de passages aux urgences pour des raisons purement pécuniaires.
M. le président. Il vous restera peu de secondes pour la réplique, mon cher collègue !
La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Les services des urgences constituent effectivement une vitrine pour l’hôpital : c’est souvent eux qui assurent le premier accueil des patients.
On constate une augmentation régulière de la fréquentation de ces services. Toutefois, il faut souligner qu’une large majorité d’entre eux fonctionnent bien, grâce au travail très remarquable des urgentistes et des personnels hospitaliers en général.
Il est néanmoins exact que, dans certains cas, apparaissent des situations de tension, de désorganisation. J’ai déjà eu l’occasion de le dire, il n’est pas acceptable de voir des patients attendre dans les couloirs sur des brancards : cela donne une image déplorable.
J’ai donc confié au professeur Carli une mission visant à établir un diagnostic précis sur la situation des différents services des urgences afin d’identifier les besoins éventuels en termes de renforcement d’effectifs.
Au-delà, nous devons travailler dans deux directions.
En amont, il faut faire en sorte d’améliorer l’organisation de notre système de soins, avec des maisons de garde et des pôles de soins de proximité, afin que nos concitoyens se rendent moins spontanément aux urgences.
En aval, une mobilisation de l’hôpital tout entier est nécessaire. Les difficultés ne concernent pas seulement, en effet, les services des urgences, qui s’épuisent souvent à trouver un lit pour leurs patients. C’est pourquoi j'ai préconisé la création d’une nouvelle fonction de gestionnaire de lits d’aval, afin de permettre une meilleure intégration des services des urgences dans l’ensemble hospitalier.
Vous avez raison, monsieur le sénateur, c’est tout un ensemble de mesures qu’il faut prendre ; le Gouvernement y est déterminé !
M. le président. La parole est à M. René Teulade, pour deux phrases de réplique.
M. René Teulade. Pourquoi pas plutôt une demi-phrase ? Ces conditions de travail sont épouvantables !
M. le président. Vous avez deux minutes pour la question et une minute pour la réplique, mon cher collègue ! La règle vaut pour tous.
M. René Teulade. Pour alimenter la réflexion collective, je voudrais vous livrer, madame la ministre, cette citation du conseiller d’État Didier Tabuteau :
« Les urgences sont au carrefour des drames de la vie courante comme des catastrophes. L’hôpital accueille les blessés, mais également les détresses sociales, les malades comme les populations en perdition. Ainsi, en dépit des restructurations hospitalières qui ont marqué les deux dernières décennies, l’hôpital […] redevient le lieu d’accueil et de refuge. Quel paradoxe que de voir les centres d’excellence de la médecine technique […], à la pointe de la science médicale, venir prendre le relais dans de nombreuses régions d’une médecine de ville en mutation. »
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques sur la situation des hôpitaux.
Avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Charles Guené.)
PRÉSIDENCE DE M. Charles Guené
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
5
Sécurisation de l'emploi
Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la sécurisation de l’emploi.
Nous poursuivons la discussion des articles.
Chapitre Ier (suite)
Créer de nouveaux droits pour les salariés
Section 1 (suite)
De nouveaux droits individuels pour la sécurisation des parcours
M. le président. Dans la suite de la discussion des articles, nous poursuivons les prises de parole sur l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. Yves Daudigny. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement à une idée reçue, la France a une culture conventionnelle en matière de relations du travail. Elle est plus ou moins mise à profit selon les gouvernements, et il est certes toujours plus facile de rester soi-même en ne faisant rien.
La négociation entre les partenaires sociaux est aujourd’hui favorisée. Il appartient au législateur de valoriser au mieux ces négociations, qui comportent, par définition, des compromis et ne peuvent exister que par eux.
Les dispositions de l’article 1er de ce projet de loi prévoient incontestablement de nouvelles adaptations favorables aux droits des salariés.
Au fond, les travaux de l’Assemblée nationale ont utilement contribué à améliorer le dispositif de cet article. Les apports de nos collègues députés sont de trois ordres : ils améliorent les prévisions initiales de l’accord national interprofessionnel inscrites dans le projet de loi ; ils clarifient la question importante, non traitée par l’accord, du régime d’Alsace-Moselle ; enfin, ils encadrent précisément la possibilité de désignation de l’organisme complémentaire.
Au titre des améliorations, notons que, par le biais de plusieurs amendements, nos collègues députés ont utilement ajouté aux modalités de mise en œuvre de la protection complémentaire santé l’information du salarié de la décision unilatérale de l’employeur, la mention du maintien de la garantie des droits dans le certificat de travail, le délai d’un mois imparti à l’organisme complémentaire pour proposer au salarié le maintien de ses droits après la cessation de son contrat de travail, l’assujettissement des contrats collectifs d’entreprise aux conditions applicables aux contrats dits responsables et solidaires.
À titre de clarification, compte tenu des difficultés d’articulation entre la généralisation de la complémentaire santé collective et les spécificités du régime local d’Alsace-Moselle, il est également prévu que seront définies des « adaptations » de la couverture des salariés relevant de ce régime.
Enfin, il convenait de clarifier une contradiction inscrite dans l’accord interprofessionnel, concernant la désignation de l’organisme complémentaire. Les partenaires sociaux ont laissé à la fois subsister, dans un même paragraphe, la mention du libre choix de l’entreprise et celle de la possibilité de recommander aux entreprises de s’adresser à un ou plusieurs organismes.
Les députés ont, à cet égard, utilement précisé les règles garantissant la transparence des appels d’offres pour les branches qui recommanderont ou prescriront un choix. Ils ont ainsi prévu une publicité préalable obligatoire, fixé les modalités garantissant le consentement éclairé des partenaires sociaux, ainsi que les règles relatives aux conflits d’intérêts et les modalités de suivi du contrat en cours.
Ces dispositions doivent être considérées pour ce qu’elles sont : un « plus » pour les salariés, inscrit dans un accord d’ensemble, sans préjuger de l’équilibre du système de protection sociale à recréer. Je me réfère sur ce point aux termes sans équivoque employés par le Gouvernement, pour lequel il reste encore à considérer de nouvelles règles de mutualisation, à préciser celles de l’octroi des avantages fiscaux et sociaux des différents contrats existants et à définir le contenu des contrats responsables et solidaires.
L’article 1er doit donc être resitué dans le cadre de la réflexion générale que le Gouvernement a engagée : le Président de la République a fixé à 2017 l’échéance pour la généralisation à tous d’une couverture complémentaire santé de qualité. Le Gouvernement a commandé au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie un rapport, qui doit être rendu l’été prochain.
Nous pourrons alors concrètement poser la question de l’articulation de notre système de sécurité sociale, entre un régime de base obligatoire fort, mais qui s’est malheureusement effrité au cours des dernières années, et un niveau complémentaire qui existe depuis la création de la sécurité sociale, en 1945.
Nous ne devons pas nous diriger vers une répartition des risques entre régime de base et régime complémentaire : à la sécurité sociale, les risques lourds, aux complémentaires santé, les autres risques ! Une telle orientation irait à l’encontre de l’histoire de notre protection sociale et serait dommageable pour la solidarité nationale. Restons-en à la logique du « complément » et n’entrons pas dans celle du « remplacement » ! Nous devons trouver un équilibre qui passe non pas par la sélection des risques ou par la prise en compte de l’état de santé de chaque individu, mais par une juste répartition des charges.
Grâce à la mutualisation, l’occasion nous est offerte, avec la généralisation des contrats collectifs d’entreprise, de défendre cette vision de la sécurité sociale.
Pour ces raisons, dans ces conditions et, surtout, dans cette perspective, l’article 1er du projet de loi peut et doit être approuvé.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, sur l'article.
M. René-Paul Savary. L’accord national interprofessionnel inverse la logique trentenaire qui avait prévalu lors des négociations précédentes.
Auparavant, les entreprises, en cas de difficultés, cherchaient à diminuer leurs charges, donc à réduire leur main-d’œuvre, et n’hésitaient pas à procéder à des licenciements.
Les syndicats, quant à eux, avaient pour objectif de continuer à protéger toujours plus les salariés et de maintenir à tout prix les acquis sociaux.
L’accord national interprofessionnel marque véritablement une rupture, en ce qu’il répond à une logique partenariale.
En ce qui concerne les employeurs, le principe est de tout faire, dans la mesure du possible, pour maintenir les emplois, et non pas les supprimer : il s’agit d’assurer un peu plus de sécurité.
En ce qui concerne les syndicats signataires, le principe est d’accepter des aménagements des conditions de travail, parfois moins avantageux pour les salariés, certes, mais aussi parfois moins pénalisants pour l’avenir en matière d’emploi : il s’agit d’aller vers davantage de flexibilité.
La logique suivie consiste à consentir un effort collectif, à élaborer un compromis fondé sur des droits, mais aussi des devoirs, des contreparties. C’est là, nous semble-t-il, un premier pas vers une modernisation du marché du travail.
Il sera en outre possible d’attacher ces droits et devoirs à la personne, et non pas à un statut : c’est une autre avancée significative.
La même logique doit inspirer les éventuelles modifications apportées par les articles du projet de loi et les amendements.
Pour en revenir à l’article 1er, la généralisation de la couverture complémentaire santé à toutes les entreprises doit donc obéir à cette logique : il faut garantir de la souplesse, et non pas créer une contrainte supplémentaire pour les entrepreneurs.
Cette avancée sociale engendrera, il faut le reconnaître, un coût supplémentaire pour les entreprises et elle restreindra un peu plus encore l’intérêt que présente le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi : attention à ne pas reprendre d’une main ce que l’on donne de l’autre.
Les entreprises ont bien évidemment intérêt, pour limiter l’absentéisme, à ce que leurs salariés soient correctement couverts socialement et aient ainsi la possibilité de se soigner. Faisons-leur donc un peu confiance !
C’est la raison pour laquelle je soutiens toutes les mesures visant à apporter de la souplesse aux entreprises et à les responsabiliser, et combats celles qui vont à l’encontre de cet objectif. Mon collègue Jean-Noël Cardoux défendra ultérieurement des amendements tendant à laisser aux entreprises la liberté du choix.
Monsieur le ministre, vous avez là l’occasion, si vous en avez la volonté, de donner un signe fort à notre groupe : si cette logique d’assouplissement peut contrarier l’aile gauche de la majorité, elle nous convient bien… Par le passé, nous avions d’ailleurs proposé des mesures tendant à instaurer davantage de flexibilité. Notre objectif commun à tous, me semble-t-il, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, est de favoriser le développement de l’emploi, pour répondre à la première des préoccupations de nos concitoyens.
Pour ce qui nous concerne, nous nous bornerons à présenter quelques amendements visant à consolider et à améliorer encore le dispositif du projet de loi, dans l’esprit qui a présidé à la conclusion de l’ANI. Nous espérons qu’une suite favorable leur sera réservée.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, sur l’article.
Mme Isabelle Pasquet. Les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen sont, eux aussi, très soucieux de l’état de santé de nos concitoyens, comme l’attestent les rapports remis, à l’occasion de l’élaboration des deux dernières lois de finances, par notre collègue Dominique Watrin en sa qualité de rapporteur pour avis des crédits de la mission « Santé ».
Le premier constat, que nous partageons, est que la dégradation de l’état de santé de nos concitoyens, sous la pression de facteurs environnementaux, sociétaux, professionnels ou économiques, n’est ni inéluctable ni acceptable.
Outre les coûts financiers qu’elle entraîne pour les comptes publics et sociaux, la baisse de la qualité de vie de nos concitoyens est d’autant moins acceptable que les progrès de la science et des connaissances devraient permettre d’augmenter considérablement l’espérance de vie en bonne santé des femmes et des hommes de notre pays.
Or, selon une étude réalisée, il y a quelques mois, par un grand quotidien national, 29 % de nos concitoyens avouent craindre une dégradation de leur santé dans les cinq ans à venir. Cette inquiétude, il nous faut l’entendre, la mesurer et la resituer dans son contexte, pour mieux la comprendre et pour tenter, collectivement, d’y apporter des réponses.
Le premier des facteurs d’inquiétude tient sans doute à la précarité ou à la peur de voir les conditions de vie ou de travail se détériorer davantage encore chaque année.
Comme le précisait un rapport du Haut Comité de la santé publique, « la précarité envahit peu à peu la vie quotidienne des Français. Elle s’est insinuée dans des domaines jusqu’alors considérés comme les bases de la cohésion sociale – l’emploi, l’école, le logement, la famille – qu’elle a radicalement contribué à transformer. Elle est devenue un phénomène que plus personne ne peut ignorer tant ses effets sont visibles. »
Il suffit d’ailleurs de regarder autour de nous pour voir combien jeunes et étudiants sont nombreux à renoncer aux soins ; j’ai déjà largement développé ce point ce matin. Cela peut avoir des conséquences dramatiques, dans la mesure où les jeunes constituent une population particulièrement concernée par les conduites à risques et difficile à toucher par les messages de prévention.
Ayant déposé, au nom de mon groupe, une proposition de résolution tendant à la création d’un observatoire des suicides et des conduites suicidaires en France, je sais aussi que les jeunes sont sans doute encore plus nombreux à renoncer à des soins psychologiques ou, tout du moins, visant à préserver la santé mentale.
Les conséquences de cette situation, nous les connaissons : la France compte parmi les pays où le taux de suicide chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans est le plus élevé, avec environ 600 décès par an et des milliers de tentatives, sans parler des maladies psychologiques qui touchent plus spécifiquement ce public, telle l’anorexie, dont souffriraient entre 30 000 et 40 000 jeunes, surtout des jeunes filles.
Force est de constater que notre système de santé et de protection sociale, victime d’une politique de réduction de l’offre de soins et d’accompagnement menée de façon continue depuis des décennies, n’est pas adapté aux besoins des jeunes en la matière.
Il faut trouver pour eux des solutions efficaces et solidaires. Il y va de leur intérêt, mais aussi de l’avenir de notre pays. La santé des jeunes d’aujourd’hui, c’est la santé, le dynamisme des travailleurs de demain. Il nous incombe de veiller à ce que la génération montante vive aussi bien, mieux même, que la nôtre.
Malheureusement, le dispositif de cet article, dont le champ est limité aux seuls salariés, ne permettra pas de relever le défi auquel nous devons collectivement faire face. Pourtant, des mesures simples pourraient être prises : recrutement de médecins, d’infirmiers et de psychologues scolaires, suppression du doublement de la taxe sur les contrats mutualistes ou, bien entendu – d’autres collègues reviendront sur cette question –, prise en charge à 100 % des dépenses de santé par la sécurité sociale.
Rien de tout cela n’est prévu dans l’article 1er, et votre texte, monsieur le ministre, à l’instar du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, ne comporte aucune mesure tendant à renforcer le financement solidaire de la sécurité sociale. Pourtant, celle-ci demeure la seule véritable protection des faibles, même si nous admettons aisément qu’il est nécessaire de la conforter, comme nous avions d’ailleurs vainement tenté de le faire lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, en proposant de soumettre à cotisations les revenus financiers des entreprises.
Au total, notre groupe considère que cet article 1er est largement insuffisant !
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. Sans répéter ce que vient de dire ma collègue Isabelle Pasquet, je souhaiterais revenir sur la question fondamentale de l’accès aux soins pour toutes et pour tous.
Monsieur le ministre, nous attendons que le Gouvernement nous réponde sur ce sujet. Selon l’étude d’impact jointe au projet de loi, « l’absence ou l’insuffisance d’assurance complémentaire est un facteur significatif de renoncement aux soins ». Dont acte ! Ce document comporte en outre des données chiffrées : « environ 15 % de la population adulte déclarait avoir renoncé à des soins au cours des douze derniers mois en 2008 pour des raisons financières, les plus concernés étant les soins dentaires (10 %) et, dans une moindre mesure, l’optique (4,1 %) ». Je ne pense pas que la situation se soit améliorée depuis 2008 !
Si cette analyse n’est pas fausse, elle n’est cependant que partielle. En effet, au-delà de la question de la couverture complémentaire, ce sont bien les lacunes, l’insuffisance ou la faiblesse de notre système de sécurité sociale qui posent problème. Pourtant, monsieur le ministre, vous considérez que le problème réside dans l’accès aux couvertures complémentaires santé, ce qui vous conduit logiquement à présenter un article dont l’objet est de favoriser le recours à ces contrats.
Or vous n’êtes pas sans savoir que ces derniers n’obéissent pas aux mêmes règles que la sécurité sociale. Celle-ci, faut-il le rappeler, repose sur un principe simple : les cotisations sont fonction des ressources, les prestations sont fonction des besoins. De leur côté, les mutuelles ou les contrats complémentaires proposés par les sociétés d’assurance obéissent à d’autres règles : leur financement dépend des capacités contributives et le fait que l’employeur y participe ne règle rien. Il est injuste que les cadres dirigeants, ceux qui bénéficient déjà des plus hautes rémunérations, s’acquittent d’une participation financière identique à celle qui est consentie par les salariés les moins bien rémunérés. Selon nous, il y a là une dérogation au programme élaboré par le Conseil national de la Résistance et au principe même de la sécurité sociale.
On présente le dispositif de l’article 1er comme équilibré, puisque financé à 50 % au moins par l’employeur et à 50 % au plus par le salarié. Toutefois, c’est oublier que, dans le système de la sécurité sociale, les employeurs prennent en charge 98 % des cotisations d’assurance maladie !
Un autre problème se pose : celui du panier de soins, c’est-à-dire du champ des dépenses de santé qui seront remboursées aux patients. Le projet de loi renvoie la fixation des détails de cette couverture à un décret. Tout juste sait-on que la couverture complémentaire de base devra garantir le remboursement à 100 % du tarif de base pour les consultations, les actes techniques et la pharmacie, du forfait hospitalier, et un remboursement à hauteur de 125 % du tarif de base pour les prothèses dentaires, ainsi qu’un forfait de 100 euros par an pour l’optique. Autrement dit, les prestations seront identiques, voire inférieures dans certains cas, à celles qui sont garanties aux bénéficiaires de la CMU-C.
Monsieur le ministre, accorder des exonérations de cotisations patronales pour que, au bout du compte, les salariés soient protégés a minima, avouez que c’est un comble !
En définitive, l’article 1er du projet de loi ouvre la voie à un nouveau marché, non encadré et plus inégalitaire : celui des sur-complémentaires. Les demandeurs devront satisfaire à deux conditions : remplir des critères sanitaires – ils devront répondre à un questionnaire de santé, une pratique interdite pour les contrats responsables – et, bien entendu, disposer de ressources financières suffisantes.
Confrontés aux remboursements trop partiels accordés par les organismes complémentaires de groupe, les salariés seront en fait invités à souscrire des sur-complémentaires. C’est le chien qui se mord la queue ! Plus on ouvre le champ des complémentaires, plus on affaiblit la sécurité sociale et plus il faut payer pour les complémentaires, voire pour des sur-complémentaires. Ce n’est pas ainsi que l’on réglera les problèmes sur le fond et dans la durée ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.
M. Jean Desessard. Nos collègues du groupe CRC ont beaucoup de choses à dire !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Certains des amendements que nous avions déposés, à la suite des députés du groupe GDR, afin de permettre aux stagiaires en entreprise de bénéficier de la couverture complémentaire d’entreprise ont été déclarés irrecevables sur le fondement de l’article 40 de la Constitution.
M. Philippe Dallier. Eh oui ! Il y a une Constitution, elle s’applique !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cela nous a surpris car, dans la mesure où ces contrats sont financés en partie par les employeurs et en partie par leurs bénéficiaires, nous pensions que la recevabilité financière d’une telle disposition ne soulèverait pas de difficulté. Puis, nous avons compris que l’application de l’article 40 portait non pas sur l’extension de la mesure elle-même, mais sur son corollaire, à savoir les exonérations de cotisations sociales consenties aux employeurs.
En effet, chaque fois qu’un employeur propose à ses salariés un contrat d’assurance complémentaire qu’il finance partiellement, il bénéficie d’exonérations de cotisations sociales. En somme, comme vient de le souligner mon collègue Dominique Watrin, pour développer la couverture complémentaire censée compléter la couverture obligatoire de base garantie par la sécurité sociale, on opère sur les ressources de cette dernière une ponction non négligeable.
De ce fait, monsieur le ministre, vous engendrez, contre toute attente et à rebours de l’objectif de réduction du déficit public que vous ne cessez de rappeler, un déficit social encore plus important, d’autant que vous ne prévoyez pas, pour compenser cet accroissement du déficit de notre régime de protection sociale, d’augmentation des cotisations sociales patronales.
C’est ainsi que, demain, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances pour 2014, vous pourrez constater le déficit du régime obligatoire de base, résultant notamment de cette mesure, et proposer d’accroître les prélèvements sociaux sur les ménages. Cet alourdissement pourra prendre la forme d’une augmentation de la CSG ou de la CRDS, principalement supportées par les ménages, voire, comme l’a annoncé le Président de la République, celle d’une hausse de la TVA. Ce surcroît de TVA viendrait se substituer à une partie des cotisations, afin de compenser le nouveau cadeau offert aux patrons.
Ce transfert de financement des entreprises vers les ménages par l’augmentation de la TVA ressemble à s’y méprendre à la TVA antisociale dont l’instauration était souhaitée par Nicolas Sarkozy et que nous avions pourtant combattue ensemble.
On voit donc bien que le dispositif de l’article 1er ne constitue pas un nouveau droit pour les salariés. Au contraire, il prépare un affaiblissement supplémentaire de la sécurité sociale, qui s’éloignera encore davantage de l’objectif fixé initialement par le Conseil national de la Résistance : la prise en charge intégrale des dépenses de santé. C’est un pas de plus vers la renonciation à l’universalité de l’assurance maladie !
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, sur l'article.
M. Jean-Noël Cardoux. Je dois avouer que, hier soir, après avoir entendu la réponse de M. le ministre aux orateurs de la discussion générale, j’étais plein d’espoir.
En effet, monsieur le ministre, vous avez affirmé que, contrairement à ce que nous soutenions, vous aviez rigoureusement retranscrit l’ANI dans l’article 1er du projet de loi. Relisant le texte de cet accord avant de m’endormir (Sourires.), j’ai retrouvé la phrase que vous aviez citée : « Toutefois, ils pourront, s’ils le souhaitent, recommander aux entreprises de s’adresser à un ou plusieurs organismes. » Le verbe « désigner » n’apparaissait nulle part. J’ai pensé que nous avions été écoutés et que nous allions parvenir à trouver un accord.
Mais, ce matin, le réveil a été douloureux. En effet, en écoutant les propos du rapporteur et les vôtres, monsieur le ministre, je me suis rendu compte que l’on maintenait l’intégration, d’une manière un peu détournée, de la clause de désignation à travers l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale.
Monsieur le ministre, vous avez fait valoir que l’Autorité de la concurrence n’a pas déclaré illégales de telles clauses de désignation. Cela est vrai, mais, quand on analyse de manière approfondie la position prise par l’Autorité de la concurrence, on constate que celle-ci a posé de nombreuses restrictions. En particulier, elle estime que la désignation « constitue la modalité la moins favorable au dynamisme de la concurrence », et parle même d’« opacité ».
De surcroît, l’Autorité de la concurrence préconise que la clause de désignation porte sur plusieurs organismes, sans quoi il y aurait un transfert massif de la couverture des mutuelles et des compagnies d’assurance vers des institutions de prévoyance. Quand on sait que, en 2012, 90 % des clauses de désignation visaient ces dernières, on est fondé à nourrir des craintes au sujet de la généralisation de ces clauses. Les mutuelles ont annoncé que cette généralisation risque de détruire 30 000 emplois en leur sein. Dans le contexte économique actuel, ce n’est pas la moindre des choses !
Enfin, les clauses de désignation risquent de soulever un problème de fond dans les relations entre les organisations syndicales de branche et les institutions de prévoyance : il y aura malheureusement des conflits d’intérêts, puisque l’acheteur et le vendeur de la prestation ne feront qu’un. Du reste, ce phénomène existe déjà actuellement et a donné naissance à un certain contentieux.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je conçois que la clause de désignation ne soit pas illégale. Permettez-moi néanmoins de rappeler les chiffres que j’ai indiqués hier lors de la discussion générale : l’enjeu n’est pas marginal, puisqu’il s’agit de l’ouverture d’un nouveau marché de prestations sociales représentant 35 milliards d’euros à l’échelle nationale, qui entraînera une perte de recettes fiscales de 20 milliards d’euros. Au total, ce sont donc 55 milliards d’euros qui sont en jeu !
S’agissant de montants aussi importants, que l’on puisse mettre en place un tel mécanisme sans assurer une transparence totale en ouvrant une concurrence globale nous laisse dubitatifs, d’autant que l’argument avancé par M. le ministre, selon lequel la clause de désignation aboutira à une meilleure mutualisation, n’est pas totalement pertinent à nos yeux. En effet, afin de récupérer les sommes en jeu, l’ensemble des acteurs de la prévoyance feront des efforts considérables pour offrir des produits compétitifs, de sorte que la mutualisation s’opérera d’elle-même en amont.
Monsieur le ministre, si vous tenez à la clause de désignation, maintenons-là ; mais suivez au moins l’une des recommandations de l’Autorité de la concurrence, consistant à prévoir que les branches désignent plusieurs organismes. À cet égard, nous avons déposé un amendement prévoyant que les branches devront désigner au moins trois organismes, ce qui permettrait de donner le choix entre une institution de prévoyance, un organisme d’assurance et une mutuelle.
Avec ce système, je pense que, malgré la clause de désignation, nous ouvririons encore plus la concurrence ; une telle démarche serait plus saine ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Gilbert Barbier. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.
Mme Laurence Cohen. Nous considérons que la sécurité sociale, comme le Gouvernement l’affirme dans l’étude d’impact jointe au projet de loi, constitue la base de notre système de protection sociale. Une base dont nous regrettons la réduction, projet de loi après projet de loi !
Monsieur le ministre, vous avez sans doute involontairement participé à cet affaiblissement en invitant les organisations syndicales et patronales à négocier, ou en acceptant qu’elles puissent le faire, sur une mesure tendant à augmenter la couverture complémentaire santé des salariés.
Que l’on ne s’y méprenne pas : nous ne sommes pas opposés à ce que les partenaires sociaux et le Gouvernement réfléchissent aux mesures à mettre en œuvre pour que les salariés, y compris les plus précaires, puissent accéder aux soins. Il devrait s’agir d’un objectif permanent et prioritaire de tous les gouvernements ; du reste, il nous semblait que c’était la mission confiée au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Par contre, nous nous opposons à la réponse qui a été trouvée, car elle ne tend pas à renforcer la sécurité sociale comme pilier de notre système, mais à renforcer les mécanismes de couverture complémentaire.
Nous partageons le constat dont vous partez : la sécurité sociale ne couvre pas toutes les dépenses de santé et ne répond pas à tous les besoins. Seulement, au lieu de chercher à renforcer son financement pour faire en sorte qu’elle redevienne le cœur de notre système, vous faites le choix de renforcer les complémentaires.
La couverture complémentaire repose, vous le savez, sur un financement radicalement différent de celui qui existe pour le régime obligatoire de base. Alors que la sécurité sociale est financée par les cotisations des patrons et des salariés, les assurances complémentaires sont, quant à elles, financées par une contribution volontaire des employeurs, qui bénéficient d’ailleurs à ce titre d’exonérations de cotisations sociales. En clair, la loi permet aux employeurs qui offrent une assurance complémentaire à leurs salariés de se soustraire en partie au financement de la sécurité sociale.
Cet appauvrissement organisé et volontaire de la sécurité sociale n’est pas le seul de ces mécanismes. Il est la conséquence d’une politique qui se traduit notamment par la multiplication des exonérations de cotisations patronales. C’est cette même logique, monsieur le ministre, qui a vu le gouvernement auquel vous appartenez refuser les amendements que notre groupe a portés lors de la dernière loi de financement de la sécurité sociale visant à soumettre à cotisations sociales les revenus financiers du capital qui y échappent aujourd’hui.
Si le MEDEF accepte, voire prône le choix des complémentaires, c’est parce qu’il est doublement gagnant.
Tout d’abord, il fragilise encore un peu plus la sécurité sociale en l’attaquant sur ce qui fait sa force : son universalité.
Ensuite, il est financièrement gagnant dans la mesure où, toutes les études le prouvent, les contrats obligatoires d’entreprise ne sont que très rarement des contrats mutualistes. Dans l’immense majorité des cas, ils sont proposés par des sociétés privées d’assurance, des assurances commerciales, à l’image de ce groupe d’assurance qui gère la sécurité sociale des agriculteurs et des paysans.
Le pactole généré par l’article 1er, car c’est bien de cela qu’il s’agit et non pas de droits nouveaux, est d’ores et déjà estimé par le MEDEF à plus de 4 milliards d’euros. Ces 4 milliards de recettes se cumuleront avec les 2,5 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales déjà consenties aux employeurs mettant en œuvre des contrats complémentaires d’entreprise, dont je vous rappelle qu’ils sont mécaniquement appelés à croître avec l’extension du nombre de salariés qu’ils concernent.
Le seul droit nouveau créé par l’article 1er est en réalité celui offert au MEDEF et aux sociétés d’assurance privées de disposer d’un nouveau marché, d’autant plus intéressant que l’adhésion y est obligatoire.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, sur l'article.
M. Jean Desessard. La complémentaire santé pour tous les salariés, c’est incontestablement une avancée. C’est pourquoi nous voterons cet article. Toutefois, je voudrais moi aussi alerter sur un point crucial : la défense de la sécurité sociale. J’ai d’ailleurs déjà évoqué cette question lors de la discussion générale.
Nous, écologistes, refusons une privatisation rampante de la santé et souhaitons préserver le modèle français de sécurité sociale. Depuis sa création, en 1945, il a fait ses preuves.
Rappelons le triple objectif des bâtisseurs de notre système actuel : l’unité de la sécurité sociale, la généralisation quant aux personnes et l’extension des risques couverts sous la double influence du rapport Beveridge de 1942 et du système bismarckien. On a voulu, en 1945, non seulement soutenir la solidarité et l’accès gratuit à la santé, mais aussi créer une unité administrative.
Afin de remettre les choses en perspective, je veux citer l’exposé des motifs de l’ordonnance du 4 octobre 1945 : « La sécurité sociale est la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. Trouvant sa justification dans un souci élémentaire de justice sociale, elle répond à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain » et des aléas de la vie.
Il ne s’agit pas aujourd’hui, en 2013, sous un gouvernement de gauche et j’ajouterai écologiste,…
M. Philippe Dallier. Voilà qui change tout ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. … de revenir en arrière, de multiplier les organismes et de privatiser l’accès à la santé.
La rigueur budgétaire ne doit pas être un prétexte pour privatiser peu à peu notre modèle de santé. Nous ne voulons pas d’une France à deux vitesses avec, d’un côté, ceux qui peuvent s’offrir le luxe de se payer une bonne couverture santé et, de l’autre, ceux qui devront se résigner à ne pas se soigner faute de moyens. La santé relève d’un véritable service public qu’il s’agit de sauvegarder et je dirai même, si ce n’est pas grossier, d’améliorer.
La sécurité sociale n’a pas forcément vocation à prendre en charge 100 % des dépenses de santé, et peut-être n’en a-t-elle pas aujourd’hui les moyens. Bien sûr, je peux entendre ces arguments. C’est pourquoi la généralisation de la complémentaire santé, financée à 50 % au minimum par l’entreprise, est aujourd’hui une avancée. Cependant soyons vigilants, mes chers collègues : respectons la place de la sécurité sociale par rapport aux complémentaires santé et méfions-nous de toute évolution vers une privatisation de notre système de santé ! (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Je ne suis pas intervenu au début de la présentation de cet article, car je souhaitais entendre chaque orateur au préalable. Je serai donc peut-être un petit peu long dans ma réponse, ce qui me permettra de m’économiser lors de la série d’amendements à venir. Je ne voudrais pas aboutir à une certaine répétition dans mon argumentation…
Le principe de base, c’est la sécurité sociale. Je le dis clairement pour ceux qui auraient un doute sincère. Je comprends d’ailleurs ce doute, car il existe dans le débat politique ou social des propositions qui tendent à faire diminuer la part de la solidarité de la sécurité sociale en matière de santé, au profit d’une forme d’individualisation de cette garantie. Ce n’est évidemment pas la vision du Gouvernement.
Nous, nous souhaitons solidifier la sécurité sociale, ce qui nécessite parfois de prendre un certain nombre de décisions pour assurer sa pérennité. Voilà le principe de base, que nous le fondions sur les valeurs issues de la Résistance ou sur celles d’aujourd’hui. Ce sont d’ailleurs peut être les mêmes valeurs qui ont poussé nos prédécesseurs à mettre en place ce dispositif et qui nous conduisent aujourd’hui à être convaincus qu’il faut le maintenir.
Au regard de la situation actuelle, l’existence d’une complémentaire santé est une avancée : elle permet une meilleure protection. Chacun le sait, ceux qui ne peuvent pas se payer cette complémentaire, qu’ils soient étudiants, retraités, chômeurs ou salariés, se trouvent souvent dans une situation extrêmement délicate. Songez également qu’à chaque fois le passage du statut de salarié au statut, si je puis dire, de chômeur, comme c’est souvent le cas aujourd’hui, fait perdre la complémentaire santé, parce qu’elle était attachée à l’entreprise. C’est un drame qui s’ajoute à celui que constitue déjà le chômage.
Cela explique les deux grandes propositions qui figurent dans cet article. La première est la portabilité, qui permet de conserver pendant douze mois la complémentaire santé dont on disposait au titre de son salariat. La seconde est l’extension à l’ensemble des salariés d’une complémentaire santé obligatoire. Je crois que chacun partagera le point de vue que ces dispositions représentent un progrès considérable pour les salariés : un progrès social, un progrès en termes de protection sanitaire et, au bout du compte, un progrès pour l’ensemble de notre société.
Si nous partageons le principe de la sécurité sociale comme base et d’une complémentaire pour tous comme progrès, un certain nombre de questions se posent.
Ce que nous proposons de faire pour les salariés ne risque-t-il pas d’être un obstacle à l’extension à tous de cette complémentaire santé ? La question a été fréquemment posée, ce que je comprends parfaitement, tout comme je comprends qu’on rappelle que l’objectif est la complémentaire universelle, quel que soit le statut de la personne. Oui, c’est toujours notre objectif, et le Président de la République a dit clairement au congrès de la mutualité qu’il fallait une complémentaire santé pour tous !
Cette avancée est un premier pas vers l’extension à tous de la complémentaire santé et ne constitue en rien un obstacle à celle-ci. Qui a voulu ce premier pas ? Les partenaires sociaux ! Et qui sont-ils ? Précisément ceux qui vivent l’entreprise et la relation au sein du salariat. Il était donc légitime que les partenaires sociaux qui parlent du contrat de travail appliquent au contrat de travail le progrès que représente la complémentaire santé. Reste que ce n’était pas à eux de traiter des autres aspects, des autres secteurs, des autres publics qui doivent pouvoir bénéficier à l’avenir de la complémentaire santé.
Sachez-le, les questions de financement ne seront pas un obstacle à l’extension de la complémentaire santé à toutes les catégories de la population.
Si l’on va jusque-là – je crois qu’au fond on est tous d’accord pour aller jusque-là –, se pose la question du dispositif. Quelle liberté laissons-nous aux partenaires sociaux ? Ce sont eux en effet qui vont, comme c’est déjà le cas dans les secteurs où elle existe, négocier la complémentaire santé. Ils vont en négocier le contenu – la loi ne contient que le panier minimum –, les modalités et, éventuellement, discuter de la question des organismes qui vont pouvoir apporter cette assurance aux entreprises et donc aux salariés. C’est tout le débat de la clause de désignation qui pèse sur votre assemblée.
À cet égard, je veux vous indiquer clairement la position du Gouvernement.
Je ne vais pas le répéter à l’envi : l’accord lui-même n’est pas clair et net. Il a d’ailleurs été écrit par les partenaires du côté patronal pour ne pas l’être. C’est parce qu’il n’est pas clair et net que les trois organismes patronaux, qui avaient une vision opposée, l’ont malgré tout signé. Tant ceux qui ne voulaient pas d’une clause de désignation que ceux qui en voulaient une disaient retrouver cette réalité dans l’accord. (M. Jean Desessard marque son étonnement.) Voilà l’explication de ce fameux paragraphe qui comprend trois phrases, dont l’une précise qu’il n’y a pas de clause de désignation alors que la dernière indique qu’il est possible d’avoir une clause de désignation.
Au fond, qu’ont voulu les partenaires sociaux ? Par le caractère nébuleux du texte, ils nous ont adressé un message clair : « À vous de faire ! » À nous, donc, au Gouvernement et au Parlement, de faire.
Je ne vous demande donc pas ce qui est conforme à la lettre de l’accord, puisqu’on s’accordera tous à dire qu’il a été écrit avec des ambiguïtés qui ont permis des différences d’appréciation du côté patronal. Je vous demande quel est le meilleur dispositif pour permettre aux entreprises, aux branches, aux partenaires sociaux de mettre en place ces complémentaires santé.
Certains proposent la liberté totale pour toutes les entreprises de choisir l’organisme. Pourquoi pas ! Bien entendu, le texte ne l’interdit pas ; il l’autorise totalement.
D’autres mettent en garde sur les différences de situation des entreprises.
Prenons un exemple simple : considérons deux entreprises d’une même branche et de la même taille. Dans la première, la pyramide des âges présente une moyenne basse. Autrement dit, son personnel est jeune.
M. Jean Desessard. Vous parlez du Sénat ? (Rires.)
M. Michel Sapin, ministre. Voulez-vous que je vous parle de la complémentaire santé des sénateurs ? Je pense que beaucoup souhaiteraient avoir la même ! (Sourires.)
L’entreprise dont la moyenne d’âge est très jeune présente très peu de risques. Elle sera donc extrêmement intéressante pour celui qui voudra garantir ces risques. D’ailleurs, la garantie se fera à un prix très faible. En revanche, pour la seconde entreprise, où la moyenne d’âge est plus élevée, la compagnie ou la mutuelle va analyser le risque comme étant plus élevé et donc lui appliquer un tarif plus cher.
On pourrait donc de se retrouver dans une situation où les entreprises seront soumises à des prix différents en fonction de ces risques « naturels », et non de leur manière de fonctionner. Une telle situation serait préoccupante, non seulement pour l’entreprise qui aurait à en assumer le coût, mais aussi pour les salariés, une partie restant à leur charge.
Il peut donc être intéressant, dans certaines branches, de mutualiser les risques. Jusqu’où ? On peut le faire sur un secteur géographique. On peut le faire entre deux, trois ou quatre organismes, en lançant un appel à mutualisation. On peut aussi aller jusqu’au bout de la mutualisation et envisager qu’un seul organisme garantisse toutes les entreprises de la branche.
Que vont faire les partenaires sociaux ? S’ils ont le sentiment que les risques ne sont pas trop différents d’une entreprise à l’autre, ils vont opter pour une grande liberté. Si les risques leur paraissent au contraire très différents, ils vont rechercher la mutualisation maximale.
Il faut donc leur laisser la liberté de négocier et de choisir le système le plus adapté à la situation, depuis la possibilité, pour chaque entreprise, de s’adresser à l’organisme de son choix jusqu’au choix d’un seul organisme pour l’ensemble de la branche. Tel est le premier principe que le Gouvernement vous propose.
Je ne veux pas entrer dans un débat juridique, je souhaite simplement rappeler que, dans l’avis qui lui a été opportunément demandé, l’Autorité de la concurrence, qui a succédé au Conseil de la concurrence, ne considère pas cette liberté comme illégale. D'ailleurs, comment pourrait-il en être autrement puisque, selon la jurisprudence tant du Conseil d’État, de la Cour de cassation que de la Cour de justice de l’Union européenne, ce dispositif est parfaitement légal ?
J’entrevois bien les arguments qui pourront m’être opposés : cette liberté totale ne risque-t-elle pas d’être contrainte, d’une certaine manière, par les liens pouvant exister entre telle ou telle branche et tel ou tel organisme – institut de prévoyance, compagnie d’assurance ou même mutuelle ? Le dispositif actuel permet-il que des organismes soient choisis, en toute transparence en fonction de leur meilleure offre ? Je vous rappelle que la meilleure offre, ce n’est pas simplement le prix !
Mme Catherine Procaccia. Il vaut mieux aussi regarder le contenu !
M. Michel Sapin, ministre. C’est aussi le contenu, la qualité de la garantie ! Et quand on apprécie une offre, ce n’est pas simplement au « moins-disant » – pour reprendre la terminologie des marchés publics – que l’on s’attache, c’est aussi au « mieux-disant » (Mme Maryvonne Blondin opine.), à celui qui apporte le plus de garanties pour le prix le plus faible, pour l’entreprise comme pour le salarié.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je sais que vous partagez tous cette préoccupation.
Mme Michelle Meunier. Oui !
M. Michel Sapin, ministre. Il faut non seulement laisser la plus grande liberté, mais aussi instituer la plus grande transparence et la plus grande concurrence, au bon sens du terme, pour permettre à tous les organismes capables de le faire – et pas seulement aux plus gros, qui recherchent le plus grand nombre de contrats possible – de présenter des offres qui soient examinées avec toute l’égalité de traitement nécessaire. Cette disposition est d'ailleurs prévue à l’alinéa 30 du présent article, qui vise à instituer la véritable transparence et la véritable concurrence qui n’existent pas encore dans ce domaine, mais qui sont conformes à la recommandation de l’Autorité de la concurrence.
Je me souviens de périodes anciennes dont Marie-Noëlle Lienemann doit se souvenir elle aussi, car nous les avons traversées ensemble. Nous avions alors mis en place un dispositif pour la transparence dans le domaine économique et contre la corruption. Des mesures concernaient en particulier le logement et la construction, et pas seulement du côté de La Défense…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’était la loi Sapin !
M. Michel Sapin, ministre. Il se trouve que, par les hasards de l’histoire, ce texte a en effet été appelé la « loi Sapin ».
Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez assurés que je tiens profondément à cette concurrence et à cette transparence. La sécurité sociale comme socle, la complémentaire pour tous les salariés – c’est une avancée considérable ! –, une mise en œuvre du dispositif laissant la liberté aux partenaires sociaux, qui ont quand même le droit d’user de leur intelligence pour choisir ce qu’il y a de plus adapté à leur situation propre, un principe de transparence et de concurrence : telle est la manière dont le Gouvernement a conçu l’ensemble du dispositif et l’a formalisé dans le projet de loi, conformément, du reste, à mes convictions. Cette proposition peut, par définition, être discutée, mais je sais qu’elle permet que l’équilibre global de l’accord soit respecté.
M. le président. L'amendement n° 217 rectifié, présenté par Mme Lienemann et MM. Leconte et Povinelli, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il s’agit d’un amendement d’appel, un peu provocateur puisqu’il tend à supprimer l’article 1er.
Bien évidemment, monsieur le ministre, je suis totalement favorable au progrès que constitue l’élargissement de l’accès aux soins à l’ensemble des salariés, à travers une première étape, celle de la complémentaire santé pour tous. Permettez-moi toutefois de faire deux remarques.
Premièrement, je vous ai bien entendu nous expliquer que le socle de la sécurité sociale est consolidé et qu’il va falloir aller vers la complémentaire santé pour tous. Certes, on peut, dans un premier temps, étendre l’accès aux complémentaires santé, mais la finalité doit être l’élargissement du socle de la sécurité sociale à des dépenses de santé devenues normales dans le monde contemporain. On pourrait parler des soins dentaires ; d’autres exemples sont possibles.
Deuxièmement, vous nous dites que la garantie sera la transparence. Comme vous, je crois aux vertus de la transparence, mais je crois aussi aux vertus de la régulation, voire de l’encadrement du marché.
En effet, le raisonnement que vous avez à fort juste titre développé sur la concurrence à l’intérieur d’une branche selon le nombre de personnes à risque dans l’entreprise est transposable aux branches entre elles. Dès lors, il me semble que la moindre des choses, dans cette phase transitoire, serait que l’on définisse un taux moyen de cotisation, des contrats standards et des mécanismes de compensation pour éviter que vous bénéficiiez ou non d’une optimisation, selon que vous serez puissants ou misérables dans une branche ou dans un secteur.
Une question me paraît encore plus importante : qui va payer ? J’ai bien entendu votre prise de position sur l’équilibre de cet accord général. Vous savez que, pour ma part, je ne le trouve pas équilibré. Vous affirmez en particulier que le projet de loi marque un progrès. C’est vrai, la mutuelle complémentaire pour tous est un progrès. Cependant, ce texte constitue-t-il un donnant-donnant compte tenu de ses mesures qui fragilisent le monde du travail ?
Non, car ce n’est pas un vrai « donnant » de la part du patronat ! En effet, la mutuelle santé est aujourd'hui financée à 50 % par les salariés et à 50 % par le patronat – en réalité, 57 % en moyenne pour les complémentaires santé payées par l’entreprise. Pour ma part, j’aurais aimé que l’on fixe un taux un peu supérieur… Les 50 % à la charge de l’entreprise vont être largement financés par l’État : les mutuelles ont calculé que, sur les 4 milliards d’euros devant être financés par les entreprises, seuls 2,7 milliards le seront effectivement, tandis qu’1,3 milliard d’allégements fiscaux grèveront le budget de l’État. Autrement dit, les entreprises n’assumeront qu’un peu plus d’un tiers de la charge globale. Où est le « donnant » ? Certainement pas du côté de l’entreprise ! Surtout si l’on considère que les 20 milliards d’euros de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi allégeront de 6 % la masse salariale, alors que la participation de l’employeur atteindra 0,8 % de celle-ci pour la complémentaire santé.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Si je salue le progrès, j’estime que la méthode n’est pas la meilleure. C’est pourquoi j’avais déposé cet amendement de suppression. Pour l’heure, je le retire, mais je garde mes réserves pour le reste du débat.
M. le président. L'amendement n° 217 rectifié est retiré.
M. Dominique Watrin. J’en reprends le texte, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 217 rectifié bis, présenté par M. Watrin, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 217 rectifié.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales. Comme l’a indiqué notre collègue Marie-Noëlle Lienemann, il s’agit d’un amendement d’appel, qui vise à ouvrir plus largement le débat sur la prise en charge des frais de santé.
M. le ministre nous a apporté à l’instant une réponse longue, argumentée et, selon moi, convaincante. C'est la raison pour laquelle j’allais, madame Lienemann, au nom de la commission, vous inviter à retirer votre amendement. Vous avez spontanément devancé mon appel.
Bien évidemment, j’adresse la même invitation à nos collègues du groupe CRC. Je considère en effet que l’ensemble des réponses aux questions ont été apportées. En outre, supprimer l’article 1er reviendrait finalement à supprimer la complémentaire santé dont chacun dans cet hémicycle a salué l’arrivée. Ce serait donc délibérément faire disparaître un avantage reconnu par tous.
À défaut de retrait, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Je crois avoir fait comprendre que j’étais favorable à l’article… (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Nous trouvons l’amendement de Mme Lienemann judicieux, un grand débat sur le socle que constitue la sécurité sociale étant effectivement nécessaire. Nous pensons d’ailleurs que ce débat de fond ne fait que commencer.
L’article 1er est présenté par le Gouvernement comme une avancée pour les salariés. C’est une avancée relative, qui s’inscrit, en réalité, dans la continuité des politiques, menées depuis des années, qui vont dans le sens de la déstabilisation et de la fragilisation de notre système de sécurité sociale.
Alors que l’article 1er organise, selon l’exposé des motifs du projet de loi, « la généralisation de la couverture complémentaire collective “santé” », force est de constater que le champ de la prise en charge de la sécurité sociale ne cesse de reculer, livrant au marché ce secteur tant convoité par les assurances ou les institutions de prévoyance. Ce processus accroît in fine les inégalités et désarticule le système de protection sociale, ouvrant la voie à la privatisation du système.
Les contrats collectifs obligatoires ont largement contribué à masquer les désengagements de la sécurité sociale dans la prise en charge des dépenses de santé, notamment pour les soins courants. Ils ont, de la même manière, facilité l’inflation des dépassements d’honoraires médicaux ou des frais de santé mal remboursés par la sécurité sociale, tout simplement en solvabilisant ces dépenses.
Enfin, cela a déjà été dit, nous savons que lier l’accès d’une complémentaire santé au contrat de travail revient aussi à fabriquer de l’exclusion. Alors même que l’accès aux soins se dégrade et qu’il est de plus en plus inégalitaire, cet accord va accroître la rupture de solidarité entre les salariés et les autres catégories de la population. Je pense aux retraités, aux chômeurs et aux précaires, aux personnes en rupture familiale, en situation de handicap ou bien encore aux fonctionnaires.
Marie-Noëlle Lienemann s’est exprimée pertinemment sur la question du financement. Je partage le même point de vue, que j’ai eu l’occasion de développer lors d’une intervention précédente. Sur le fond, nous sommes donc d’accord.
En conclusion, les mutuelles et encore moins les assurances privées ne peuvent remplacer la sécurité sociale. Celle-ci est au cœur de notre système de protection sociale et, malgré les désengagements successifs, elle reste le dernier rempart, un « socle », pour reprendre un terme utilisé précédemment, contre les effets ravageurs de la crise, des inégalités et des injustices sociales.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe CRC a repris cet amendement et qu’il vous demande, mes chers collègues, de l’adopter.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. En écoutant Mme Lienemann, je me demandais si une complémentaire santé pour tous n’était pas, tout simplement, une extension du champ du régime général de la sécurité sociale.
Puisque nous sommes en plein « choc de simplification », profitons-en : simplifions ! (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)
M. Jean Desessard. Ça veut dire qu’il est en accord avec l’amendement ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 217 rectifié bis.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe CRC et, l'autre, du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 171 :
Nombre de votants | 207 |
Nombre de suffrages exprimés | 205 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 103 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 185 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 569 rectifié est présenté par MM. Desessard et Placé, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 1
Après le mot :
salariés
insérer les mots :
et aux stagiaires
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 6.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Par cet amendement, nous proposons que l’ensemble des stagiaires soient couverts par une complémentaire santé, dans la mesure où ils contribuent par leur travail à la valeur ajoutée de l’entreprise.
Il convient de rappeler que 33 % des jeunes déclarent renoncer aux soins pour des raisons financières. Les articles 1er et 2, qui sont relatifs à la couverture complémentaire santé collective de branche ou d’entreprise, ont pour objectif de généraliser, à l’horizon de 2016, la complémentaire santé aux quatre millions de salariés non couverts actuellement.
Outre le fait qu’il s’agit là, on vient de le redire, d’une attaque larvée contre la sécurité sociale et sa philosophie universaliste et solidaire, puisque cette formule impose une couverture sociale professionnelle des risques de santé parallèle à celle offerte par la sécurité sociale, une telle mesure ouvre la porte à l’institutionnalisation d’une différenciation des niveaux de prise en charge des malades en fonction des branches d’activité et s’oppose de ce fait à une couverture universelle des assurés sociaux.
Par ailleurs, le cas de nombreuses personnes n’est pas envisagé dans le projet de loi, qui ne concerne que les salariés. Bon nombre de retraités, de professions indépendantes, de personnes sans emploi et d’étudiants ne sont pas considérés. Cette mesure est donc insuffisante pour permettre un réel accès aux soins.
Il est nécessaire de prendre en compte les jeunes. En effet, plus de 1,5 million de stages ont lieu chaque année en dehors du droit du travail. Un jeune sur quatre est au chômage, des centaines de milliers d’étudiants cumulent des mois de travail mal payés n’ouvrant droit à aucune protection sociale et de plus en plus de stages remplacent de vrais emplois.
Le Président de la République s’est engagé, on le sait, lors de sa campagne électorale du printemps 2012, à mieux encadrer les stages. Selon nous, cet encadrement devrait commencer par permettre aux stagiaires un accès à une couverture complémentaire de qualité, pour reprendre les mots qui étaient les siens il y a encore moins d’un an.
M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour présenter l’amendement n° 569 rectifié.
M. Jean-Vincent Placé. Cet amendement important, auquel mon collègue Jean Desessard est associé, vise à faire bénéficier les stagiaires de la couverture collective à adhésion obligatoire en matière de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident.
Dans la mesure où nous souhaitons généraliser la complémentaire santé, celle-ci doit s’appliquer le plus largement possible. Les CDD, même très courts, étant concernés par ce dispositif, pourquoi les stagiaires ne le seraient-ils pas ? Je ne souhaite pas faire ici l’amalgame entre salariés et stagiaires. Le stagiaire est en formation dans l’entreprise et dépend d’une université, d’une école ou d’un organisme de formation. C’est pourquoi d’ailleurs il reçoit une gratification et non pas un salaire. À mes yeux, une telle distinction protège le stagiaire. Il serait en effet très inquiétant de considérer le stagiaire comme un salarié de plein exercice que l’on peut exploiter à bas prix.
Toutefois, il faut bien voir la réalité quotidienne, à savoir la précarité dans laquelle sont plongés certains stagiaires. Vivant avec moins de 500 euros par mois, s’il ne touche que l’indemnité légale, l’étudiant doit arbitrer entre un logement décent, une alimentation correcte, les sorties, les frais liés à la scolarité et à la santé. Autant dire que, pour un jeune en pleine forme, la santé n’est pas une priorité. Pourtant, le jour où il est victime d’un accident ou d’une maladie, la situation devient vite très complexe s’il n’a pas pris de complémentaire santé individuelle. Faute de soins adaptés, il conservera d’un tel épisode des séquelles, parfois à vie.
Cette précarité est une réalité. Il est donc urgent de ne pas laisser les stagiaires de côté. Tel est le sens de cet amendement, qui nous semble extrêmement important.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Les auteurs de ces deux amendements identiques ont bien entendu raison d’appeler notre attention sur la situation parfois précaire des stagiaires. Malheureusement, je ne peux, au nom de la commission, qu’émettre un avis défavorable, dans la mesure où les stagiaires n’entrent pas dans le champ de l’accord, qui ne concerne que les salariés.
M. Jean-Vincent Placé. L’accord, rien que l’accord !
Mme Éliane Assassi. Qui est « historique » !
Mme Catherine Procaccia. Rien que l’accord ? Ce n’est pas toujours le cas !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Ces deux amendements identiques soulèvent la question des stagiaires, dont le sort sera également évoqué par d’autres amendements. Je me permets donc de donner dès à présent une réponse globale, afin de ne pas avoir à me répéter à chaque fois.
Les stagiaires rencontrent de vraies et graves difficultés, qui sont d’ailleurs de deux natures. Certains cherchent désespérément un stage et n’en trouvent pas,…
M. Jean Desessard. Eh oui !
M. Michel Sapin, ministre. … tandis que d’autres sont utilisés à des postes qui devraient revenir à des salariés. Ces deux situations sont anormales.
Mme Éliane Assassi. Nous sommes d’accord !
M. Michel Sapin, ministre. Les stagiaires ne sont pas salariés de l’entreprise. Ils ne peuvent donc bénéficier des mêmes droits que ces derniers, chacun voit bien pourquoi. Nous luttons justement pour que les stagiaires ne puissent pas rester trop longtemps au sein d’une même entreprise. Un stage qui dure six mois, puis encore six mois et à nouveau six mois, c’est une situation inacceptable ! Quand on est dans le long terme, on n’est pas stagiaire, mais salarié. Il faut réformer les choses, pour que les personnes concernées puissent bénéficier totalement des droits des salariés, non plus en tant que stagiaires, mais en tant que salariés.
Ainsi, si les problèmes posés sont réels, nous ne devons pas pour autant considérer les stagiaires comme des salariés. Et s’ils doivent être considérés comme des salariés, il faut les faire basculer du côté des salariés. C’est la raison pour laquelle il faut faire très attention à ne pas mélanger les deux statuts. Traitons les stagiaires comme des stagiaires dont les droits et les protections doivent être renforcés, y compris en termes de complémentaire santé, mais sans considérer qu’ils sont des salariés. Au bout du compte, une telle confusion ne serait d’ailleurs pas favorable aux stagiaires. Soit on considère que le stagiaire est un salarié, et il possède tous les droits qui s’attachent à ce statut, soit on estime qu’il est un stagiaire qui doit être protégé.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’opposera à l’introduction dans ce texte de toute mesure concernant les stagiaires, dans la mesure où celui-ci concerne uniquement les salariés.
En revanche – ceux qui ont suivi les travaux de l'Assemblée nationale le savent –, les groupes de l’Assemblée nationale, en particulier le groupe socialiste – mais il n’est pas interdit de travailler avec d’autres groupes au sein de la gauche –, vont faire des propositions pour améliorer le statut des stagiaires.
D’ailleurs, la question a été soulevée lors de la réunion du comité interministériel de la jeunesse et des propositions ont commencé à être élaborées en lien avec les organisations de jeunesse, et non pas seulement avec les organisations syndicales.
Nous progresserons donc, dans les mois qui viennent, sur la question des stagiaires, y compris sur la protection santé des stagiaires qui, en tant que tels, ont évidemment droit à des complémentaires santé. Mais ne souhaitant pas que soient introduites dans ce texte qui traite des salariés des dispositions concernant les stagiaires, je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J’aimerais obtenir une confirmation, parce que je ne comprends pas toujours très vite.
Monsieur le ministre, j’ai cru entendre que la question de la couverture des stagiaires serait très prochainement examinée dans le cadre d’un texte les concernant spécifiquement. (M. le ministre le confirme.)
Dans ces conditions, avec l’accord de mon collègue Jean-Vincent Placé, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 569 rectifié est retiré.
Monsieur Laurent, l’amendement n° 6 est-il maintenu ?
M. Pierre Laurent. Pour notre part, nous maintenons notre amendement, et je vais expliquer pourquoi.
J’ai bien entendu les réponses de M. le rapporteur et de M. le ministre, qui sont d'ailleurs un peu différentes. On nous dit que les stagiaires ne sont pas des salariés. Pour autant, ne pourrait-on, à l’occasion de ce texte, faire évoluer leur statut vers celui des salariés ?
Vous nous avez indiqué hier, monsieur le ministre, qu’il était possible, à l’occasion de la transcription de l’accord et tout en respectant celui-ci, d’introduire des améliorations. Nous avons ici une majorité pour le faire. Je ne pense pas que les organisations syndicales signataires soient opposées à ce progrès, sinon il faudra nous dire lesquelles.
Lorsque les conditions sont réunies pour accomplir un progrès, faisons-le ! Ou alors le seul argument qui vaut est celui qui a été avancé par M. le rapporteur : l’accord, rien que l’accord, et l’on ne peut toucher à rien ! Dès lors, le débat parlementaire est caduc.
Pourquoi ne pas faire un progrès quand on en a la possibilité ? C’est la raison pour laquelle nous maintenons notre amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre. Afin de lever toute ambiguïté, je vous confirme qu’une proposition de loi est en cours d’élaboration. Ce texte important sera considéré par le Gouvernement comme un élément de son programme législatif. La contrainte de la « niche » parlementaire, terme que je n’aime pas beaucoup, ne sera donc pas de mise.
Je vais être très clair : les stagiaires ne figurent pas dans l’ANI, mais reconnaissez que ce n’est pas l’argument que je vous ai opposé. Les organisations syndicales cosignataires sont les premières à demander des avancées en faveur des stagiaires et beaucoup de choses peuvent être faites plus largement avec l’ensemble des organisations syndicales et des organisations de jeunesse.
Attention, nous ne sommes pas dans le champ du salariat ! Il n’est bien entendu nullement interdit à des organisations syndicales de se préoccuper de la défense des stagiaires, mais il s’agit normalement – sauf en cas d’abus – d’étudiants. Les problèmes sont donc de nature différente. Par conséquent, il convient non pas de refuser un progrès pour les stagiaires, mais d’envisager la question dans son ensemble. Hormis la santé, d’autres problèmes se posent, qui ont d’ailleurs fait l’objet de nombreux amendements à l’Assemblée nationale.
Je le répète, il me paraît souhaitable d’engager une réflexion d’ensemble afin de définir un statut qui protège véritablement les stagiaires, en particulier de l’exploitation dont ils sont trop souvent victimes.
Mme Isabelle Pasquet. Il y a urgence !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je trouve chez vous une certaine constance, monsieur le ministre, puisque lorsque j’avais proposé d’intégrer les stagiaires dans les contrats de génération, vous m’aviez opposé les mêmes arguments. La différence, c’est que les groupes dont sont issus les auteurs de ces deux amendements ne m’avaient pas suivie à l’époque, ce qui prouve qu’on se préoccupe des stagiaires au gré des circonstances.
Sur la question de la complémentaire santé et de son extension aux stagiaires, qui, pour la plupart, sont des étudiants, je souligne que, si le problème de la couverture de sécurité sociale de base et de la complémentaire était réglé, peut-être n’y aurait-il pas besoin de proposer d’intégrer les stagiaires dans l’ANI.
M. Jean Desessard. Voilà !
Mme Catherine Procaccia. Je pense à certaines de nos recommandations, telles qu’une complémentaire réelle correspondant aux besoins des étudiants.
Enfin, je veux rappeler que c’est quand même l’ancienne majorité qui a fait voter une loi obligeant à rémunérer les stages de plus de deux mois. C’est bien nous qui avons fait avancer les choses ! Vous avez dit que les stagiaires peuvent enchaîner les périodes de six mois. Or – sauf si les décrets n’ont pas été publiés –, il me semble bien que c’est encore nous qui avons fait passer une loi interdisant qu’un même stagiaire puisse occuper un poste pendant plusieurs années consécutives.
M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour explication de vote.
M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le ministre, j’ai bien entendu vos arguments, qui ont d'ailleurs convaincu mon collègue Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Eh oui, que voulez-vous… (Sourires sur les travées du groupe écologiste.)
M. Jean-Vincent Placé. Sans vouloir être en contradiction avec lui ni discourtois à l’égard du Gouvernement, je préfère tenir que courir.
Mme Éliane Assassi. Exactement !
M. Jean-Vincent Placé. Siégeant pourtant depuis peu dans cette assemblée, j’ai trop souvent entendu le Gouvernement nous inviter à retirer nos amendements, au motif qu’ils seraient examinés dans un autre texte. Ce fut le cas lors d’un précédent collectif budgétaire, le ministre d’alors renvoyant au projet de loi de finances à venir nos amendements sur la fiscalité écologique.
Les progrès sociaux, les questions de réforme globale, fiscale, seront examinés ultérieurement, nous répond-on, alors qu’il s’agit parfois de dispositions que nous avions votées tous ensemble, y compris le groupe socialiste, lorsque nous étions dans l’opposition. Le projet de loi de finances venant, on nous dit alors que ces questions seront peut-être examinées dans un collectif qui aura lieu en juillet prochain. Il paraît qu’il n’y en aura plus, mais peut-être sera-t-il nécessaire d’en faire un à un moment…
Mon collègue Jean Desessard est plus convaincu que moi. Sans doute est-ce le fait de sa plus longue expérience.
M. Jean Desessard. Mais non ! Mais non !
M. Jean-Vincent Placé. Je peux vous assurer que notre numéro de duettistes n’était pas du tout préparé. (Sourires.)
Je ne vais pas manquer à la parole de mon collègue, puisqu’il a retiré l’amendement. Reste qu’étant un homme de synthèse et de compromis qui essaie, par tous les moyens possibles, de faire progresser nos positions politiques, d’y rallier les esprits, afin qu’elles se traduisent dans les faits, je voterai l’amendement proposé par nos amis du groupe CRC.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et, l'autre, du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 172 :
Nombre de votants | 208 |
Nombre de suffrages exprimés | 206 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 104 |
Pour l’adoption | 32 |
Contre | 174 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 5, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 1
Remplacer l’année :
2016
par l’année :
2015
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Si un mécanisme de renforcement de l’accès aux soins était adopté lors de nos débats, nous ne pourrions comprendre que la généralisation des complémentaires d’entreprise puisse n’être appliquée qu’à compter de 2016. En effet, la flexibilité voulue par le MEDEF et prévue dans le reste du texte sera immédiate ou presque, alors que ce qui est vendu comme une « grande avancée sociale » pour les salariés ne sera, elle, effective qu’en 2016, voire en 2018 pour les employeurs qui voudront jouer la montre.
De même, si le mécanisme que vous proposez est véritablement une avancée considérable, comme vous l’avez répété, monsieur le ministre, alors ce délai est trop long !
Trop long pour les 400 000 salariés qui n’ont rien – je reprends vos chiffres –, parce que n’ayant pas les moyens de se payer une complémentaire santé.
Trop long pour que nous ne doutions pas de la volonté du Gouvernement. Cette disposition apparaît seulement comme un moyen de favoriser l’acceptation des reculs sociaux contenus dans le projet de loi. Cela revient à se donner bonne conscience.
Nous avons déjà eu l’occasion d’expérimenter la méthode lors du débat sur le bonus-malus énergétique. Or l’interrogation est permise si l’on considère que ce dispositif n’a pas sa place dans un texte supposé sécuriser l’emploi.
Trop long encore, car en remettant à 2016 l’obligation de conclusion de ces accords, vous donnez le sentiment que l'ambition initiale est déjà fortement diminuée. Il est toujours dangereux de renier les espoirs que l'on suscite.
Voilà pourquoi nous proposons que l'article 1er, s’il venait à être modifié, soit applicable dès 2015.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Au regard de l'urgence que vous avez relevée à juste titre, mon cher collègue, on comprend le sens de votre amendement, qui vise à anticiper le bénéfice de la complémentaire santé au 1er janvier 2015. Cependant, il ne vous aura pas échappé que le projet de loi fixe un processus de négociation de douze mois au niveau de la branche et, en cas d’absence d’accord, de dix-huit mois au niveau des entreprises.
Ce temps en deux mouvements, si vous me passez l'expression, est largement nécessaire pour permettre d'aboutir à une mise en place au 1er janvier 2016, date qui nous semble réaliste. C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Monsieur le sénateur, le dispositif ne sera pas mis en œuvre « à compter de 2016 », mais au plus tard en 2016. Cela fait une grande différence !
Le processus de négociation qui vient d'être rappelé par M. le rapporteur est très important. Pour votre part, vous considérez que c’est l’accord de branche qui doit être recherché, car c’est là que se situent les marges de manœuvre entre les partenaires, particulièrement du côté syndical. L’argument que vous invoquez souvent selon lequel ce type d’accord est d’une autre nature et peut permettre d’aboutir à davantage de sécurité dans la négociation, je peux tout à fait le partager. Nous aurons d’ailleurs l’occasion d’y revenir à d’autres moments de l’examen de ce texte.
Reste qu’il faut du temps pour permettre un accord de branche, que je considère comme le meilleur procédé possible. Si l'on va trop vite, cet accord ne pourra pas être conclu ou il le sera dans de mauvaises conditions. C’est pourquoi le temps qui a été fixé est le plus adapté pour mettre en place, dans de bonnes conditions, cette avancée, terme que vous avez d’ailleurs repris à votre compte.
Sachez que cette disposition ne vient pas équilibrer un autre aspect de l'accord, qui serait en quelque sorte mauvais pour les salariés. Je comprends tout à fait que vous puissiez avoir une position différente – je respecte la démocratie, et donc les convictions de chacun –, mais je vous montrerai point par point que chaque article constitue une avancée pour les salariés. Il s'agit donc non pas d'un donnant-donnant, mais, comme je le dis souvent de façon peut-être quelque peu facile, d'un gagnant-gagnant. En l’espèce, nous pourrions tous être d'accord pour dire que les salariés vont y gagner.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Mme Catherine Procaccia. Encore !
Mme Éliane Assassi. Et l’on parle d’accord « historique » !
M. le président. Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 173 :
Nombre de votants | 165 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 627 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia, Troendle et Bruguière, MM. Savary et Dulait, Mme Deroche, MM. Cardoux, Husson et Pinton, Mme Giudicelli, MM. Buffet, Gilles et Cambon et Mme Debré, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le salarié bénéficiant à titre personnel ou en tant qu’ayant droit d’une assurance complémentaire santé à la date de signature de l’accord de branche bénéficie obligatoirement d'une dispense d'affiliation.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. À la demande de la commission, je rectifie mon amendement en remplaçant « obligatoirement » par « à sa demande ».
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 627 rectifié ter, présenté par Mmes Procaccia, Troendle et Bruguière, MM. Savary et Dulait, Mme Deroche, MM. Cardoux, Husson et Pinton, Mme Giudicelli, MM. Buffet, Gilles et Cambon et Mme Debré, et ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le salarié bénéficiant à titre personnel ou en tant qu’ayant droit d’une assurance complémentaire santé à la date de signature de l’accord de branche bénéficie à sa demande d'une dispense d'affiliation.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Catherine Procaccia. Certains salariés bénéficient déjà d’une couverture complémentaire santé grâce à leur conjoint ou à leurs parents. Nous souhaitons qu’ils puissent continuer à être assurés par cette complémentaire si celle-ci leur donne satisfaction. Nous voulons surtout éviter qu'ils paient deux fois sans que cela leur apporte quoi que ce soit.
Les salariés doivent eux aussi avoir un libre choix. Je laisse le soin au pouvoir réglementaire de fixer la liste des justificatifs que ceux-ci devront fournir pour montrer qu'ils sont effectivement couverts par une complémentaire santé.
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les salariés bénéficiant d’une couverture plus favorable auprès de leur conjoint peuvent ne pas souscrire à cette couverture collective.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à inscrire explicitement dans le projet de loi que les salariés bénéficiant déjà d’une couverture plus favorable auprès de leur conjoint ou conjointe ne seront pas obligés de souscrire à l’assurance collective de leur entreprise. Une telle disposition semble assez logique.
Lors des débats à l’Assemblée nationale, le rapporteur a estimé, comme le Gouvernement, que l’objet de cet amendement était satisfait par les dispositions prévues à l’article R. 242-1-6 du code de la sécurité sociale.
Je ne partage pas complètement cette interprétation. L’article 1er prévoit en effet qu’un décret fixera la liste des catégories de salariés pouvant être dispensés de l’obligation d’affiliation, sans faire mention ou référence à l’article précité.
Cette disposition réglementaire définit en réalité les catégories pour lesquelles la dispense d’affiliation ne fait pas obstacle à la qualification de régime obligatoire pour le bénéfice des exonérations sociales.
L’étude d’impact, elle, se veut plus précise, en indiquant que seront concernés par la possibilité de dispense d’affiliation « les salariés couverts en tant qu’ayants droit par le régime collectif de leur conjoint, des salariés apprentis ou à temps partiel pour lesquels la cotisation obligatoire représenterait une part excessive de leur revenu, ou encore des salariés assurés à titre obligatoire au régime complémentaire applicable en Alsace-Moselle ».
Il serait donc plus lisible de l’écrire directement dans le projet de loi. C’est ce que tend à prévoir cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Après la rectification apportée par Mme Procaccia, l’amendement n° 627 rectifié ter est désormais très proche de celui présenté par le groupe CRC. Tous deux sont relatifs aux possibilités de dispenser les salariés de l’obligation d’affiliation, en particulier lorsque le conjoint bénéficie déjà d'une complémentaire santé.
Les cas de dispense d’affiliation feront partie des négociations de branche et seront déterminés par décret. Il est constitutionnellement plus logique que ce type de mesures soit fixé par voie réglementaire. D’ailleurs, l’article R. 242-1-6 du code de la sécurité sociale permet cette dispense, notamment aux salariés « produisant tous documents d’une couverture individuelle souscrite par ailleurs pour le même type de garanties ».
Il me semble donc que les deux amendements sont déjà couverts par le droit en vigueur, que le Gouvernement a annoncé vouloir reprendre dans le nouveau cadre de la généralisation de la complémentaire santé.
Dans la mesure où ces amendements sont, d'un certain point de vue, satisfaits, j’invite leurs auteurs à les retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Procaccia, l'amendement n° 627 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le rapporteur, vous dites que mon amendement serait « d'un certain point de vue » satisfait. Si M. le ministre avait indiqué que ces salariés – pas simplement les conjoints, mais aussi les enfants – étaient déjà couverts, j’aurais peut-être retiré mon amendement. Mais la réponse n’étant pas claire, je le maintiens.
J’ai vu ce qui s’est passé avec les contrats groupe en matière de santé, qui existaient déjà avant l’ANI. Les entreprises ont fait ce qu'elles ont voulu et un certain nombre de salariés n’ont pas eu le choix. Ils ont dû payer deux complémentaires santé : l’une directement et l’autre indirectement par le biais du conjoint ou des parents.
Pour moi, la sagesse prévaut davantage au Sénat qu’au sein des organisations professionnelles pour négocier ce type de dispositions.
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre. Madame Procaccia, je pensais que vous attachiez autant d'importance à la parole du rapporteur qu’à la mienne. Vous voulez que je vous dise que les cas que vous avez évoqués ne « basculent » pas dans le dispositif collectif ? Oui, il existe aujourd'hui des dispenses qui sont justifiées par des modalités de protection ou par le nombre de personnes protégées !
Nous n’inventons pas tout, nous progressons, et c’est beaucoup. Progresser, c’est partir de la situation actuelle et des dispositions existantes. Je pense à la possibilité pour une branche de librement considérer qu'il y a un accord collectif, alors qu’il n’y en a pas.
Toutes les situations que vous décrivez sont déjà prévues par le droit en vigueur. Je pourrais répondre la même chose à propos de votre amendement, madame Cohen. Certes, je connais l’argument qui consiste à dire que, même si une disposition figure dans un décret, il serait encore mieux de l’inscrire dans la loi.
Mme Catherine Procaccia. Oui !
M. Michel Sapin, ministre. Je suis plutôt un protecteur de la Constitution de la Ve République. Pour moi, une bonne loi respecte la distinction entre le domaine législatif et le domaine réglementaire, et cela, bien entendu, en toute transparence, en permettant aux parlementaires de connaître le contenu du règlement.
Il y a déjà énormément de choses dans la partie législative du code du travail et, si l’on y regardait de plus près, on s’apercevrait que de nombreuses dispositions sont du domaine réglementaire. Ne chargeons pas la barque et faisons-nous confiance ! Les cas que vous signalez sont couverts par le dispositif, dans le sens souhaité par les deux amendements, qui sont ainsi satisfaits.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. M. le rapporteur vient d’indiquer que les cas de dispense feront partie des négociations de branche. Faire figurer en une phrase dans le code du travail l’un des deux dispositifs proposés par nos collègues évitera donc de nombreux débats au sein des branches. Mais lequel choisir ?
Je pense qu’écrire « bénéficiant d’une couverture plus favorable » donnerait lieu à interprétation. Quelqu’un devra déterminer le régime le plus favorable. Il vaudrait mieux préciser que, si un salarié bénéficie à titre personnel ou en tant qu’ayant droit d’une assurance complémentaire, il peut à sa demande – plutôt qu’obligatoirement – bénéficier d’une dispense d’affiliation.
Mme Catherine Procaccia. C’est le sens de la rectification qui vient d’être apportée à mon amendement !
M. Jean Desessard. Cette rédaction me semble plus objective. Je souscris donc à l’esprit de cet amendement, qui rejoint le vôtre, madame Cohen. Je suis donc prêt à le voter.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Madame Procaccia, si j’ai utilisé l’expression « d’un certain point de vue », ce n’était pas pour minimiser la portée de ce que je vous affirmais, mais pour dire que l’amendement, dès lors que son dispositif est couvert par le droit en vigueur – et il l’est –, devait être prolongé par la volonté du Gouvernement de le reprendre dans le cadre des décrets qui concerneront la généralisation de la couverture complémentaire santé.
M. le ministre vous a apporté la garantie que l’article R. 242-1-6 du code de la sécurité sociale permet la dispense, notamment aux salariés « produisant tous documents d'une couverture individuelle souscrite par ailleurs pour le même type de garanties ». Cela évite les tergiversations pour savoir comment inscrire cette disposition dans la loi, puisqu’il me paraît plus clair et plus simple d’avoir la garantie – elle nous a été donnée – que cette disposition sera reprise dans le décret à venir.
Compte tenu de ce que le ministre et moi-même avons dit, je maintiens donc ma demande de retrait des deux amendements.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 7 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 8, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
, étant entendu que la participation des salariés est proportionnelle aux revenus qu’ils perçoivent individuellement
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En toile de fond de cet amendement, il y a toujours nos réticences et nos inquiétudes quant à l’extension des couvertures complémentaires santé, telles qu’elles sont proposées, en raison de leurs effets négatifs, en particulier pour les plus modestes.
En effet, il est avéré que le poids de la couverture complémentaire sur le pouvoir d'achat des salariés est d'autant plus lourd que leur salaire est bas. Dans de telles conditions, les plus modestes sont pénalisés en matière d'accès aux soins, en raison de la nature même des assurances maladie complémentaires, puisque leur tarification n'est pas proportionnelle au revenu. Celle-ci est établie en fonction du risque et de la disposition à payer. C'est ainsi que, pour une couverture moins importante, les plus modestes ont généralement plus à payer que les autres affiliés.
Mais quelles que soient les régulations qui pourraient être imposées au marché de l'assurance maladie complémentaire, tout transfert d'euros de la sécurité sociale vers ce marché risque bien de rester profondément inégalitaire puisque le socle de remboursement par l'assurance maladie, lui, ne progresse pas. Dans ces conditions, prétendre que l'extension de la couverture complémentaire santé collective d’entreprise constitue une grande avancée sociale est, selon nous, abusif.
De fait, cette volonté d'extension est la conséquence d'une politique de désengagement de la sécurité sociale du financement des soins courants. Ceux-ci sont laissés au bon vouloir des mutuelles, des instituts de prévoyance et des assurances. Leur logique est différente de celle de la sécurité sociale, qui, au contraire, est égalitaire, solidaire – elle forme le socle –, et donc socialement plus juste puisque chacun, par ses cotisations, contribue à proportion de ses moyens et reçoit en fonction de ses besoins. Voilà ce que ne fera jamais une mutuelle !
Ainsi, pour limiter les effets, que nous jugeons pervers, de l'extension des complémentaires santé et perpétuer la logique et les valeurs de la sécurité sociale, nous souhaitons, avec cet amendement, compléter l'alinéa 3 de l’article 1er en précisant que, dans le cadre de la répartition de la charge des cotisations entre les employeurs et les salariés, ces derniers doivent cotiser proportionnellement à leurs revenus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cet amendement tend à ce que la participation des salariés soit proportionnelle aux revenus qu’ils perçoivent. Cette formulation est imprécise puisqu’elle englobe tous les revenus, et pas seulement les rémunérations perçues dans l’entreprise.
En pratique, les cotisations versées au titre des complémentaires santé, que les contrats soient individuels ou collectifs, sont rarement proportionnelles au revenu, car on se situe dans une logique assurantielle. Le contrat couvre un risque, et la cotisation est proportionnée à ce risque.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Au sens du code du travail, les revenus sont constitués des salaires et des primes. D’ailleurs, nous ne sommes pas les seuls à utiliser ce terme : on le trouve même à d’autres endroits du projet de loi, notamment à l’article 12. Il n’y a donc pas d’imprécision dans notre formulation.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 216 rectifié est présenté par MM. P. Leroy, César, Grignon, Doublet et D. Laurent.
L'amendement n° 625 rectifié est présenté par MM. Mazars et Barbier.
L'amendement n° 652 rectifié bis est présenté par MM. Husson et Masson, Mme Procaccia et MM. Bernard-Reymond et Adnot.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
Les amendements nos 216 rectifié et 625 rectifié ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour présenter l’amendement n° 652 rectifié bis.
Mme Catherine Procaccia. Je présenterai en même temps l’amendement n° 653 rectifié bis.
Les cosignataires de ces amendements estiment que prévoir une complémentaire santé pour tous ceux qui n’en bénéficiaient pas jusqu’à présent, c'est-à-dire environ 40 % des salariés, est une avancée. Toutefois, comme nous l’avons déjà dit, il convient de laisser aux entreprises la liberté de choisir le prestataire d’assurance. Nous sommes persuadés qu’elles pourront ainsi retenir le meilleur, pas seulement en termes de prix, mais aussi de besoins des salariés de l'entreprise, qui varient selon l’activité, au sein d’une même branche ou des régions.
C’est pourquoi l’amendement n° 652 rectifié bis vise – un peu radicalement – à supprimer l’intégralité de l’alinéa 4 et l’amendement n° 653 rectifié bis, qui est un amendement de repli, tend à supprimer la seule deuxième phrase de l’alinéa précité, en ne laissant plus aux partenaires sociaux que le soin de fixer les modalités de choix de l’assureur, sans entrer plus avant dans les détails.
M. le président. L'amendement n° 653 rectifié bis, présenté par MM. Husson et Masson, Mme Procaccia et MM. Adnot et Bernard-Reymond, est ainsi libellé :
Alinéa 4, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 254, présenté par Mme Lienemann et M. Povinelli, est ainsi libellé :
Alinéa 4, seconde phrase
Après le mot :
branche
insérer les mots :
, de solidarité entre actifs et retraités
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement tend à élargir aux retraités l’accès à l’assurance maladie complémentaire.
Aux termes de la loi Évin, lorsqu’on bénéficie d’une mutuelle dans son entreprise, le nouveau contrat doit procurer les mêmes garanties et le tarif global, unilatéralement modifié par l’assureur, ne peut excéder 150 % du tarif initial. À vrai dire, on ne sait pas vraiment 150 % de quoi. Est-ce du tarif du contrat de l’affilié ou de celui du contrat de l’entreprise ayant eu l’assuré en charge à un moment donné ?
Bref, il faut lever toute une série d’ambiguïtés, notamment sur les conditions du nouveau contrat à la date de la cessation d’activité. C’est pourquoi cette assurance complémentaire santé au profit des retraités doit être explicitement prévue dans le cadre des accords de branche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Sur les trois amendements qui restent en discussion, je ferai un sort particulier à l’amendement n° 254, qui n’est pas tout à fait de même nature.
L’alinéa 4 de l’article 1er prévoit que la négociation de branche porte sur les modalités de choix de l’assureur. Il laisse donc – nous l’avons dit à plusieurs reprises ce matin et sous diverses formes – une totale liberté aux partenaires sociaux quant aux modalités de gestion de la complémentaire santé. Je rappelle les trois voies qui sont offertes : la désignation d’un ou plusieurs organismes, la recommandation ou la liberté de choix de l’entreprise.
Cette décision – c’est important de le réaffirmer ici – revient aux partenaires sociaux et non au législateur. Il est donc tout à fait légitime qu’ils puissent négocier sur cette question.
Je précise aussi, afin que nous ayons pleinement conscience de la portée de ce que nous demandons, que la suppression de cet alinéa n’empêcherait en aucun cas les partenaires sociaux de recourir à la désignation ; la négociation sur le choix de l’assureur serait simplement facultative et non obligatoire dans ce cas.
La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 652 rectifié bis et 653 rectifié bis.
Quant à l’amendement n° 254, il soulève la question importante, sur laquelle nous pouvons nous attarder quelque peu, des retraités à l’égard de la complémentaire santé. Nous savons qu’il s’agit d’un vrai problème social, car la cotisation qu’ils doivent acquitter représente souvent une part très importante de leur budget.
Cette question me semble relever de la réflexion générale que le Gouvernement a engagée sur l’amélioration de la couverture complémentaire pour tous, tel que l’objectif en a été fixé par le Président de la République. Elle n’est donc pas de la responsabilité des négociations de branche, lesquelles concernent les actifs. En toute cohérence, l’ANI n’envisage pas le financement par les employeurs et les salariés de la complémentaire santé des retraités. C'est pourquoi j’invite notre collègue Marie-Noëlle Lienemann à retirer son amendement, même si la question qu’elle pose à travers celui-ci est d’importance prioritaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. S'agissant de l’amendement n° 254, qui pose une vraie question, je fais mien le raisonnement de la commission.
Nous traitons ici des salariés, mais cela ne doit pas être un obstacle. Nous souhaitons que tous les Français, quelle que soit leur situation par rapport au travail, puissent bénéficier d’une couverture complémentaire santé universelle. C’est ce vers quoi nous tendons, mais ce texte n’est qu’une première étape. Sous le bénéfice de ces observations, madame Lienemann, conformément à l’état d’esprit dans lequel nous travaillons, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement.
J’en viens aux amendements nos 652 rectifié bis et 653 rectifié bis.
En supprimant l’alinéa 4, madame Procaccia, contrairement à ce que vous souhaitez, vous allez dans le sens du renforcement de la clause de désignation qui existe par ailleurs. C’est la conséquence juridique de vos amendements, auxquels je suis défavorable.
Sur le fond, je le répète, je souhaite que les partenaires sociaux bénéficient d’une liberté de choix au sein d’un vaste panel d’organismes et que ce choix s’exerce dans la plus grande transparence.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’ai bien entendu les remarques formulées par le rapporteur et le ministre. Afin de ne pas gêner le Gouvernement, je vais donc retirer l’amendement n° 254. Je reste toutefois dubitative sur le fait que la question de la portabilité des droits des retraités ne puisse pas être évoquée dans les négociations de branche, car le paritarisme intervient sur les retraites. C’est d’ailleurs toute la difficulté de ces accords, qui sont emboîtés les uns dans les autres et manquent in fine de cohérence.
Globalement, je continue à penser que la meilleure solution serait l’élargissement du socle de la sécurité sociale.
M. le président. L'amendement n° 254 est retiré.
M. Dominique Watrin. J’en reprends le texte, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 254 rectifié, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, dont le libellé est strictement identique à celui de l'amendement n° 254.
La parole est à Mme Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je profite de l’amendement de Mme Lienemann pour souligner que les conséquences de l’ANI n’ont pas été bien mesurées pour tous les assurés qui ne sont pas salariés. Faute de mutualisation concernant les assurances, les plus fragiles, notamment les retraités, les artisans, les professions libérales, vont payer plus cher qu’aujourd'hui parce qu’ils seront en dehors d’un groupe.
Je ne remets nullement en cause le principe d’une complémentaire santé prévue par l’ANI, mais seulement les modalités de désignation des assureurs. Nous devons en mesurer toutes les conséquences.
S'agissant de la question posée par Mme Lienemann à travers cet amendement, il faudrait peut-être préciser que les retraités de la branche sont concernés, afin d’instituer une solidarité au sein de celle-ci. Il n’en demeure pas moins que tous ceux qui n’ont jamais été couverts par une complémentaire santé dans le cadre du salariat vont payer un surcoût d’assurance.
Cela étant, je retire les amendements nos 652 rectifié bis et 653 rectifié bis, puisque M. le ministre m’indique qu’ils ne permettront pas d’atteindre l’objectif recherché.
M. le président. Les amendements nos 652 rectifié bis et 653 rectifié bis sont retirés.
Je mets aux voix l'amendement n° 254 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 174 :
Nombre de votants | 173 |
Nombre de suffrages exprimés | 171 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 86 |
Pour l’adoption | 32 |
Contre | 139 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 10, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Les modalités selon lesquelles un salarié déjà couvert par un contrat souscrit à titre individuel peut refuser l’adhésion au contrat mentionné au présent article ;
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement porte sur la généralisation de la couverture complémentaire santé par rapport aux besoins spécifiques des salariés.
L’introduction de clauses de désignation d’un organisme d’assurance complémentaire dédié dans les accords de branche interdit au salarié de choisir librement son prestataire et donc de disposer de l’offre la plus adaptée à ses besoins. En effet, certains salariés peuvent être confrontés à des besoins spécifiques que le contrat d’entreprise ne pourra pas couvrir suffisamment ou totalement. Le niveau de protection proposé peut être largement inférieur aux attentes et aux nécessités des salariés.
Il est indispensable de s’assurer que la volonté des salariés de choisir le contrat qu’ils estiment le plus proche de leurs besoins soit pleinement respectée. Dans le cas contraire, la négociation avec le prestataire d’assurance complémentaire ne prendrait pas en compte des attentes spécifiques.
Le choix du ou des assureurs se fera par l’entreprise, et non plus au niveau de la branche et de la personne. Encore une fois, c’est l’employeur qui décide, au détriment des besoins personnels du salarié.
Une complémentaire santé généralisée ne peut s’entendre que comme accessible à l’ensemble des besoins de nos concitoyens.
De notre point de vue, le panier de soins pris en charge obligatoirement par la complémentaire de santé collective sera en dessous de celui de la CMU-C ; cette complémentaire n’ouvrira pas de nouveaux droits mais assurera un minimum de soins.
En outre, l’entreprise pourra décider de souscrire à une mutuelle qui couvre un panier de soins prédéterminé plus ou moins intéressant pour le salarié.
La couverture des soins de santé de l’assuré – soins médicaux, forfaits optiques ou dentaires, hospitalisation – sera prise en charge à un taux de remboursement différent d’une branche professionnelle ou d’une entreprise à l’autre, d’une catégorie professionnelle à une autre.
Le salarié aura le droit de souscrire à une seconde protection sociale complémentaire, si toutefois la mutuelle collective ne lui garantit pas un remboursement favorable de ses soins de santé. Cela induit une augmentation du coût de la prévoyance santé de l’assuré.
Pour plus d’efficacité, dans l’intérêt de la personne protégée, il nous paraît indispensable que le salarié confronté à des besoins spécifiques non couverts par le contrat collectif d’assurance santé de son entreprise puisse décider de ne pas souscrire à cette complémentaire. Il pourra dès lors adhérer à un contrat individuel d’assurance de santé qui couvre au mieux ses frais de santé.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Aux termes de cet amendement, les négociations de branche devront porter sur les modalités selon lesquelles un salarié déjà couvert par un contrat individuel peut refuser l’adhésion au contrat collectif.
Cela doit vous rappeler un débat que nous avons eu précédemment, au cours duquel j’ai essayé de vous convaincre, mais sans succès, que les dispenses d’affiliation seront fixées par décret et par les partenaires sociaux dans le cadre des négociations. C’est d’ailleurs ce que permet l’alinéa 6 de l’article, qui précise que les partenaires sociaux négocient sur « les cas dans lesquels la situation particulière de certains salariés peut justifier des dispenses d’affiliation à l’initiative du salarié ».
C'est la raison pour laquelle je vous demande de retirer votre amendement, ma chère collègue, car il est parfaitement satisfait par l’alinéa 6 de l’article 1er. J’ajoute que l’amendement qui a été adopté tout à l’heure, contre l’avis de la commission et du Gouvernement, entraîne d’une certaine manière la chute de celui-ci. Son retrait se justifie donc à double titre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Cohen, l'amendement n° 10 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Les modalités de prise en charge intégrale par l’employeur de la couverture des salariés en contrat à durée déterminée, des contrats à temps partiel, des apprentis, des stagiaires, ainsi que des salariés titulaires d’un contrat précaire ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Quelles que soient les sources auxquelles on se réfère, le constat est le même : 4 millions de salariés n’ont pas accès à une complémentaire collective cofinancée par leur employeur et 2 % d’entre eux n’ont tout simplement pas d’assurance complémentaire, ce qui représente près de 500 000 personnes. Au total, 4 % à 5 % de la population n’est donc pas couvert par une assurance complémentaire.
Cette situation déjà difficile pour les salariés percevant de faibles revenus est encore plus délicate pour les précaires, les jeunes et les retraités. Il est bien évident que, pour ces derniers, l’accès aux soins ou, tout du moins, à une complémentaire santé dont le coût est prohibitif pour les titulaires de contrats précaires, de contrats à durée déterminée et de petits contrats, n’est pas garanti.
L’accès aux soins passe aussi par une meilleure prise en charge par l’employeur des frais de ces mutuelles, qui ne peuvent être réservées à un nombre restreint d’assurés. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. L’adoption de cet amendement élargirait sensiblement le champ de l’article 1er tel que négocié par les partenaires sociaux. Le dispositif proposé vise en effet à ce que les négociations de branche portent sur la prise en charge intégrale par l’employeur de la couverture de certains salariés.
Selon les termes de l’accord, la participation des employeurs s’élève à la moitié du financement de la couverture complémentaire. Cet amendement est donc en décalage avec ce qu’ont négocié les partenaires sociaux. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 175 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 175 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 88 |
Pour l’adoption | 32 |
Contre | 143 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 11, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 9
Remplacer (deux fois) l'année :
2016
par l'année :
2015
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Cet amendement a pour objet de modifier la date d’application portant généralisation de la couverture complémentaire collective santé pour les salariés.
L’accord conclu le 11 janvier 2013, qualifié d’historique par le MEDEF, constitue un bouleversement favorisant la dérégulation du marché du travail au profit des entreprises, en bafouant les droits sociaux des salariés durement acquis au fil des années.
Créée en octobre 1945, la sécurité sociale ancrait alors son financement dans l’entreprise, tout en le faisant échapper aux règles du marché et de la concurrence, ainsi qu’à l’emprise de l’État. C’est pourquoi la généralisation de la couverture complémentaire au sein des entreprises ne nous semble pas constituer la meilleure mesure pour renforcer l’accès aux soins. Aller vers la généralisation de la prise en charge des soins à 100 % pour tous par l’assurance maladie est la garantie véritable de l’égalité d’accès aux soins.
Néanmoins, si l’article 1er, précisant les dispositions de la complémentaire collective santé, devait être adopté, pourquoi en retarder l’application au 1er janvier 2016 ? M. le ministre a certes répondu partiellement à cette question. Il n’empêche que sa généralisation, dès le 1er janvier 2015, nous semblerait plus appropriée, à charge pour les entreprises ou les branches professionnelles de mener les négociations nécessaires en 2013 et 2014.
Il me semble que l’on ne peut, d’un côté, vouloir généraliser la complémentaire santé et, de l’autre, en retarder sa mise en application. Tout doit être mis en œuvre pour ne pas perdre une année. La situation actuelle n’est bien évidemment pas tenable, et il est urgent d’y remédier.
Nous proposons donc cet amendement afin que les salariés bénéficient au plus vite, si possible dès 2015, d’une couverture santé collective conforme à la définition des contrats solidaires et responsables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Je me suis déjà exprimé assez longuement sur le sujet. J’aurai donc la même argumentation et la même conclusion : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Le Sénat s’est déjà prononcé sur cette question de la date, qui peut se retrouver à plusieurs endroits du texte. Mon avis sera donc toujours défavorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 531 rectifié, présenté par Mmes Schillinger et Printz et M. Ries, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le cas échéant, elle porte sur les adaptations dont fait l’objet la couverture des salariés relevant du régime local d’assurance maladie complémentaire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle défini à l’article L. 325-1 du code de la sécurité sociale, en raison de la couverture garantie par ce régime.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement porte sur le régime local d’Alsace-Moselle. Comme vous le savez, notre droit local est important, et nous souhaitons le faire perdurer. Je rappelle que l’Alsace-Moselle, qui jouit d’un statut particulier, dispose d’un régime excédentaire.
L’Assemblée nationale a pris en compte la situation spécifique des salariés relevant de ce régime local d’assurance maladie complémentaire. Cependant, si le texte dont nous discutons aujourd’hui énonce la nécessité, pour les négociations de branche, de prendre en compte la couverture complémentaire dont sont déjà bénéficiaires les ressortissants du régime local, il reste muet sur la négociation d’entreprise.
C’est cette omission que l’amendement qui vous est présenté vise à corriger.
M. le président. L'amendement n° 532 rectifié, présenté par M. Reichardt et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le cas échéant, elle porte notamment sur les adaptations dont fait l’objet la couverture des salariés relevant du régime local d’assurance maladie complémentaire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle défini à l’article L. 325-1 du code de la sécurité sociale, en raison de la couverture garantie par ce régime.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
M. Jean-Noël Cardoux. Notre collègue Reichardt étant absent, il m’a chargé de défendre son amendement. Je n’ai toutefois pas grand-chose à ajouter aux propos de Mme Schillinger puisqu’il s’agit du même amendement, à un mot près.
Je ne peux donc qu’inviter l’assemblée sénatoriale à le voter. Préservons cette unanimité régionale ! (Sourires.)
Mme Catherine Procaccia. Tout à fait !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Ces amendements, qui complètent les ajouts apportés par l’Assemblée nationale au régime local d’Alsace-Moselle, tendent à permettre aux négociations d’entreprise de prendre en compte la situation des salariés relevant de ce régime.
Je propose de privilégier l’amendement n° 531 rectifié, car ses auteurs ont supprimé le mot « notamment », qui est superflu. À ce détail près, les deux amendements sont identiques. Nous allons donc pouvoir unanimement nous retrouver.
Mme Catherine Procaccia. C’est tellement rare qu’il faut le souligner !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Cette question, qui n’avait pas échappé aux députés, avait d’ailleurs donné lieu, de mémoire, au même type d’unanimité.
Il appartient désormais aux sénateurs de tenir compte de l’histoire et de la tradition et de rendre les différents dispositifs compatibles.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 531 rectifié.
Mme Laurence Cohen. Si nous sommes rarement favorables aux régimes dérogatoires, cet amendement nous donne l’occasion de relever que le régime d’Alsace-Moselle présente de nombreux avantages : il se porte bien et les salariés participent à sa gestion. Il serait peut-être bon de s’en inspirer pour le régime général. (Mme Gisèle Printz applaudit.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 532 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° 570, présenté par MM. Placé et Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 13, à toutes les occurrences
Après le mot :
salariés
insérer les mots :
et les stagiaires
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Vincent Placé.
M. Jean-Vincent Placé. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 256, présenté par Mme Lienemann et M. Povinelli, est ainsi libellé :
Alinéa 13, seconde phrase
Après le mot :
informés
insérer les mots :
préalablement à la conclusion du contrat
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il est indispensable que les salariés soient informés préalablement à la conclusion du contrat complémentaire santé. Il faut éviter, par exemple, qu’ils n’en découvrent la mise en place lors du premier précompte de la cotisation trimestrielle. C’est le sens de cet amendement de précision.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Par cet amendement, Marie-Noëlle Lienemann souhaite que les salariés soient informés préalablement à la conclusion d’un contrat de complémentaire santé.
S’il est évidemment important que les salariés soient avisés une fois le contrat signé – d’ailleurs, c’est prévu par le texte –, il ne paraît guère réaliste de vouloir les prévenir au préalable.
Au demeurant, il est une clause qui devrait permettre de rassurer le bénéficiaire : le contrat n’emporte effet qu’une fois conclu et l’un des deux futurs signataires peut, au dernier moment, renoncer à y souscrire.
Dans ces conditions, la commission suggère le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Lienemann, l’amendement n° 256 est-il maintenu ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
Certains amendements sont, j’en conviens, de nature à modifier l’équilibre de l’accord, que, personnellement, je n’approuve pas. Mais, en l’occurrence, ce n’est pas le cas.
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Ce n’est pas ce que j’ai dit non plus!
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Une bonne information de tous à chaque étape du processus permettra au contraire que le dialogue social soit mené au sein de l’entreprise avec toute la sérénité, l’objectivité et la transparence – n’est-ce pas, monsieur le ministre ? – nécessaires.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement me semble très important pour le dialogue social dans l’entreprise. Le point de vue des salariés, qui peuvent avoir un avis à donner, doit peser avant la conclusion et la signature du contrat.
Mme Catherine Procaccia. Il y a des représentants pour cela !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 256.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. L’amendement n° 562, présenté par MM. Desessard et Placé, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Après le mot :
comprend
insérer les mots :
, pour le salarié et ses ayants droit,
La parole est à M. Jean-Vincent Placé.
M. Jean-Vincent Placé. Cet amendement vise à intégrer explicitement les ayants droit dans la couverture collective à adhésion obligatoire en matière de remboursements complémentaires de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, financés à 50 % au minimum par l’employeur.
Une telle précision a d’ailleurs été introduite par notre excellent rapporteur Claude Jeannerot, dont je salue le travail et l’investissement sur ce texte, à l’alinéa 28, qui concerne les garanties contre le risque décès, les risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d’incapacité de travail ou d’invalidité, en cas de cessation du contrat de travail. L’alinéa 28 est désormais ainsi rédigé : « Les dispositions du présent article sont applicables dans les mêmes conditions aux ayants droit du salarié qui bénéficient effectivement des garanties mentionnées au premier alinéa à la date de la cessation du contrat de travail. » Les écologistes avaient d’ailleurs souhaité en commission qu’une telle mention figure dans le projet de loi.
En effet, la référence aux ayants droit est primordiale : les enfants et l’époux ou l’épouse doivent pouvoir bénéficier des garanties. Ce dispositif introduit ainsi un précédent dans le projet de loi. Cela doit donner l’exemple pour la complémentaire santé.
Pourtant, en la matière, je m’inquiète sincèrement de ne pas voir les ayants droit mentionnés expressément. Certes, je pense qu’il s’agit plus d’un oubli que d’une volonté d’exclusion. Mais c’est tout de même grave, car les entreprises pourraient s’appuyer sur une lecture stricte du texte pour ne pas intégrer les ayants droit.
Les enfants n’ont-ils pas un droit irréfutable à la santé, notamment pour les soins optiques ou dentaires, eux qui aiment tant les sucreries ? Certes, je le dis avec le sourire. Mais pensez à ces enfants qui tombent gravement malades : leur maladie est un fardeau déjà lourd à porter ! Ne prenons donc pas de risque inutile. Évitons d’ajouter au poids de la douleur le poids financier des frais de santé, qui, compte tenu de tarifs parfois exorbitants, ne peuvent pas toujours être assumés par les parents.
Je sais que les ayants droit sont intégrés implicitement ; c’est l’usage de procéder ainsi. Toutefois, je préfère que l’on y fasse référence dans le présent projet de loi, le code du travail ou le code de la sécurité sociale. À défaut, nous laisserions la porte ouverte à toutes les dérives. Voilà bien longtemps, l’un des participants au Congrès de Vienne déclarait : « Si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant ». En l’espèce, je pense que cela irait encore mieux en l’écrivant !
Mes chers collègues, cet amendement, si vous me permettez l’expression, « ne mange pas de pain ». Je souhaiterais donc vivement qu’il soit adopté. C’est important pour un très grand nombre de salariés.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Notre collègue Jean-Vincent Placé peut sembler convaincant ; vouloir mentionner explicitement les ayants droit pour le bénéfice de la complémentaire santé est évidemment louable.
Toutefois, j’aimerais apporter une précision. Les contrats prévoient déjà la possibilité pour les salariés de prendre un contrat familial couvrant, s’ils le souhaitent, leurs ayants droit. Mais c’est toujours le salarié qui est titulaire du contrat ; il ne peut pas en être autrement. Il ne me semble donc pas utile de mentionner explicitement les ayants droit.
En outre, la formulation retenue pourrait laisser penser que les ayants droit sont nécessairement couverts, ce qui n’est pas le cas. Un certain nombre d’entre eux disposent par ailleurs d’une couverture complémentaire.
Surtout, et c’est sur ce point que je voudrais insister, il me paraît nécessaire de préserver la souplesse qui permet aux salariés et aux ayants droit de choisir la formule leur convenant le mieux en matière de couverture et de cotisation.
Par conséquent, même si nous pouvons en approuver les intentions, ce qui nous est proposé pose problème sur la forme et juridiquement.
La commission sollicite donc le retrait de l’amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Les partenaires sociaux peuvent parfaitement prévoir des clauses d’une telle nature. Cela fait partie de la liberté de la négociation contractuelle.
Néanmoins, il n’y a pas de lien entre les ayants droit et l’entreprise. Ce que M. Placé suggère doit donc rester une possibilité. Certaines branches y ont déjà eu recours. Mais nous ne pouvons pas en faire une obligation.
Le Gouvernement demande donc le retrait ou, à défaut, le rejet de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Je partage ce qui vient d’être indiqué : seul le salarié, en effet, est titulaire du contrat.
J’en profite pour interroger le Gouvernement. L’adhésion – en l’occurrence, c’en est bien une, puisqu’il y a participation, d’ailleurs obligatoire, de l’employeur – doit, sauf erreur de ma part, être exprimée sous la forme de cotisations familiales, pour ne pas créer de préjudices liés à la composition de la famille.
Pouvez-vous me le confirmer, monsieur le ministre ? J’en conclurais alors qu’il revient aux représentants des salariés dans l’entreprise de définir qui est susceptible de bénéficier du dispositif en tant qu’ayants droit. Si l’adhésion n’était pas exprimée sous la forme de cotisations familiales, cela créerait une inégalité devant l’impôt ; on tient compte de la participation familiale. Or, je le rappelle, l’adhésion est d’abord le fait de la qualité de salarié d’une entreprise.
Mme Catherine Procaccia. On voit bien que c’est un assureur ! (Sourires.)
M. Jean-François Husson. Je l’ai été ! Il n’y a pas de conflit d’intérêts ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 562.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. L’amendement n° 13, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 14
Supprimer les mots :
ou partielle
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Par cet amendement, nous entendons préciser que la couverture minimale doit s’appliquer à l’intégralité des dépenses liées à la participation de l’assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations des organismes de sécurité sociale, prévue au I de l’article L. 322-2 pour les prestations couvertes par les régimes obligatoires, au forfait journalier prévu à l’article L. 174-4, aux frais exposés, en sus des tarifs de responsabilité, pour les soins dentaires prothétiques ou d’orthopédie dento-faciale et à certains dispositifs médicaux à usage individuel admis au remboursement.
Autrement, cela reviendrait à mettre en place une couverture minimale inférieure à celle qui est prévue par la CMU complémentaire, ou CMU-C. Rappelons que l’accès à cette dernière est réservé aux plus démunis. De ce fait, on ne peut pas envisager une couverture plus basse.
Comme chacun peut le constater, ce niveau est clairement insuffisant pour permettre un réel accès aux soins. Il est donc évident que la couverture complémentaire ne doit en aucun cas être inférieure à la CMU-C.
Il est parfaitement envisageable, à défaut d’accord d’entreprise, que les entreprises fassent bénéficier leurs salariés d’une couverture collective de frais de santé respectant un panier de soins minimal, destiné au seul salarié, qui comprendrait 100 % de la base de remboursement des consultations, actes techniques et pharmacie en ville et à l’hôpital, le forfait journalier hospitalier, 125 % de la base de remboursement des prothèses dentaires et un forfait optique de 100 euros par an.
Bien entendu, le financement de cette couverture des frais de santé serait partagé à parts égales entre les salariés et les employeurs.
Ce n’est que dans ces conditions qu’un réel accès aux soins pourra être possible.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Les auteurs de cet amendement souhaitent que la couverture minimale comprenne la prise en charge totale des différents tickets modérateurs, du forfait hospitalier et de l’ensemble des dépenses de soins dentaires, d’optique et de certains autres dispositifs médicaux.
Il faut bien évaluer les conséquences financières majeures qu’aurait l’adoption de cet amendement sur les complémentaires, dont les dépenses ne pourraient par définition plus être contrôlées, puisqu’elles devraient couvrir entièrement les tarifs, parfois libres, qui sont pratiqués par les professionnels.
Les auteurs de cet amendement ne souhaitent pas, j’en suis convaincu, « solvabiliser » ainsi les tarifs pratiqués dans l’optique ou le dentaire. Vous voyez à quels excès nous pourrions aboutir.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Les auteurs de cet amendement n’ont effectivement pas bien mesuré les incidences d’un tel dispositif, qui pourrait même aller à l’encontre de leurs propres objectifs.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 176 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 14 rectifié est présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 563 rectifié est présenté par MM. Placé et Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 17
Remplacer les mots :
ou d’orthopédie dento-faciale
par les mots :
, d’orthopédie dento-faciale ou optiques
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 14 rectifié.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En principe, la CMU complémentaire est destinée à faciliter l’accès aux soins des personnes aux faibles ressources.
Mais le coût de la plupart de ces soins reste très élevé, et les foyers les plus défavorisés ou les travailleurs pauvres ne peuvent pas toujours payer.
Prenons les soins d’optique. Selon les indications fournies par l’assurance maladie, les allocataires de la CMU-C ont droit « à un équipement de lunettes », c’est-à-dire deux verres et une monture, par an.
Toutefois, un tel droit est très limité financièrement. Les allocataires sont dispensés du paiement des verres seulement lorsque ceux-ci entrent dans la limite des tarifs de la CMU complémentaire, qui sont extrêmement bas.
Par ailleurs, ne sont pas pris en compte les coûts liés à certaines prestations qualifiées trompeusement « de confort » : verres antireflets, verres incassables…
Et le montant maximum pris en charge par la CMU complémentaire pour la monture est ridiculement faible, puisqu’il est inférieur à 23 euros.
Enfin, il faut noter qu’il n’existe pas de prise en charge particulière pour les lentilles de correction.
Selon les chiffres des caisses générales de sécurité sociale, 38 % des allocataires de la CMU-C doivent supporter des frais élevés, 165 euros par dépense d’optique en moyenne.
Pour 69 % des familles concernées, une telle somme est impossible à financer, ce qui entraîne soit le report, soit l’annulation pure et simple de l’acte de soins.
Selon l’enquête annuelle Conditions de vie et aspirations des Français du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, le CRÉDOC, les 18 % des ménages disposant de moins de 900 euros par mois s’imposaient des restrictions de soins en 2010.
Le régime général de la sécurité sociale n’est pas très généreux non plus pour les remboursements : les lunettes de vue, monture et verres, sont remboursées à 60 %, sur la base de tarifs officiels fixés par liste des produits et prestations, variables selon l’âge du patient : moins de dix-huit ans ou plus de dix-huit ans.
Le gouvernement précédent avait déjà réduit ce taux ; il était de 65 % avant le 1er mai 2011.
Nous voulons remédier à une telle situation. C’est le sens de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 563 rectifié.
M. Jean Desessard. Il est surprenant de constater que les frais d’optique ne sont pas explicitement intégrés à la couverture santé minimale.
Selon le II de l’article, la couverture comprend « la prise en charge totale ou partielle des dépenses » liées aux « soins dentaires prothétiques ou d’orthopédie dento-faciale » et à « certains dispositifs médicaux à usage individuel admis au remboursement ».
Pour ma part, je considère que les frais d’optique ne relèvent pas du superflu. Compte tenu du prix des verres de lunettes, cela représente, nous le savons bien, une part importante du budget des ménages, surtout pour les plus précaires.
Aujourd’hui, on ne peut pas imaginer se passer de lunettes ou de lentilles quand on en a besoin. Au demeurant, dans une société comme la nôtre, où tout est informatisé, les risques de connaître une dégradation rapide de sa vue sont plus importants.
L’importance des frais d’optique est particulièrement liée à l’environnement du travail. C’est pourquoi il paraît tout à fait légitime de les intégrer dans la couverture financée au minimum à 50 % par l’employeur.
La question a été soulevée en commission. J’admets n’avoir pas bien saisi pourquoi les frais d’optique ne sont pas mentionnés. Sont-ils implicitement prévus dans les « dispositifs médicaux à usage individuel admis au remboursement » ? Si c’est le cas, autant le mentionner explicitement. Ou bien assume-t-on de ne pas vouloir les intégrer, en considérant que cela créerait des coûts supplémentaires ? À mon sens, une telle justification n’est pas recevable : comme l’a dit Mme Gonthier-Maurin, même la CMU-C prend en charge au moins une paire de lunettes par an.
La complémentaire santé obligatoire est une avancée à condition de ne pas être une complémentaire au rabais. À défaut, une fracture apparaîtrait entre les bénéficiaires d’une couverture « bas de gamme » proposée par l’entreprise et ceux qui pourraient s’offrir une complémentaire santé supplémentaire plus protectrice.
C’est donc pour lever une ambiguïté que je vous invite à adopter mon amendement, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Afin de rassurer notre collègue Jean Desessard, qui a raison de se préoccuper de la prise en charge des soins d’optique, je voudrais revenir sur les explications que j’ai essayé d’apporter en commission. Deux arguments militent contre l’adoption de ces deux amendements identiques.
Premièrement, si les précisions demandées sont justifiées sur le fond, elles ne sont pas nécessaires sur la forme. En effet, l’ANI a bien prévu un forfait optique pour couvrir de telles dépenses. Et le Gouvernement – je parle sous le contrôle de M. le ministre – a annoncé qu’il reprendrait par décret les éléments du panier de soins définis dans cet accord.
Deuxièmement, l’expression employée par les auteurs de ces deux amendements, celle de « soins optiques », n’est pas celle de l’assurance maladie. En revanche, les termes utilisés dans le projet de loi sont ceux du code de la sécurité sociale.
La commission réclame le retrait de ces deux amendements identiques, les préoccupations de leurs auteurs étant déjà prises en compte.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Je confirme les propos de M. le rapporteur.
Le dispositif visé par ces deux amendements identiques est d’ordre réglementaire, et non législatif. Le décret prévu à l’alinéa 18 définira évidemment le contenu du panier de soins. De telles préoccupations sont donc satisfaites.
En outre, le terme « lunettes » n’apparaît effectivement pas dans le code de la sécurité sociale. L’expression en vigueur est celle de « dispositif médical ». Ainsi, si je retire mes lunettes – là, je ne vous vois plus, même si je vous devine (M. le ministre retire ses lunettes.) –, ce que j’ai en main s’appelle un « dispositif médical ». (Sourires.)
Mme Catherine Génisson, rapporteur de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Comme les prothèses mammaires ! (Nouveaux sourires.)
M. Michel Sapin, ministre. Je vous laisse la responsabilité d’une telle comparaison, à laquelle je ne me serais pas permis de me livrer, madame la rapporteur ! (Mêmes mouvements.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Ayant écouté attentivement les explications qui nous ont été apportées, j’ai comparé l’ANI et la CMU-C pour les dépenses d’optique. Sauf erreur de ma part, les dépenses optiques figurant dans le panier de soins de la CMU-C se montent à 137 euros, tandis qu’un forfait optique de 100 euros par an est prévu par l’accord.
Mme Catherine Procaccia. Donc, c’est inférieur à la CMU-C.
M. Jean-François Husson. En effet, ma chère collègue.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 14 rectifié et 563 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l'avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 177 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 177 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 89 |
Pour l’adoption | 34 |
Contre | 143 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 560 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collombat, Mme Laborde et MM. Tropeano, Alfonsi, Barbier, Collin, Fortassin, Mazars, Plancade, Requier, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Il précise les conditions dans lesquelles, dans le cas prévu au I du présent article, les entreprises dont l’effectif est compris entre un et neuf salariés peuvent faire bénéficier leurs salariés de la couverture minimale obligatoire en assurant leur part de financement par une contribution forfaitaire au titre de garanties collectives souscrites par une association auxquelles leurs salariés adhèrent.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. La généralisation de la couverture complémentaire santé est, certes, une avancée intéressante, mais son application peut soulever un certain nombre de problèmes, notamment pour les plus petites entreprises.
Par cet amendement, nous souhaitons une prise en compte des difficultés spécifiques des TPE. Il s’agit de leur offrir la possibilité de recourir à un outil plus souple et plus efficace sans les astreindre aux contraintes des contrats collectifs.
Nous proposons que les entreprises de moins de dix salariés puissent participer au financement de la couverture santé obligatoire de leurs salariés via une contribution forfaitaire. Cela faciliterait leurs démarches administratives et leur éviterait de se réfugier dans le panier de soins le plus bas faute de moyens.
Une telle mesure serait adaptée à la taille et aux contraintes particulières des TPE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux salariés des très petites entreprises, de un à neuf salariés, d’adhérer à une association qui assurerait la couverture complémentaire collective.
J’ai beaucoup réfléchi quant à l’intérêt d’une telle disposition. J’ai cru comprendre que l’employeur verserait sa participation à l’association.
L’introduction d’un tiers dans une relation contractuelle, qui aurait des incidences juridiques, mérite, me semble-t-il, une expertise complémentaire.
À ma connaissance, il n’existe aujourd’hui dans l’ensemble du droit de la complémentaire santé que deux formes de contrats : les contrats individuels et les contrats collectifs. L’adoption de cet amendement reviendrait à en introduire une troisième sans préciser les conditions protectrices pour le salarié.
Enfin, selon ses auteurs, l’amendement aurait un autre intérêt, puisque l’entreprise verserait une contribution forfaitaire. Mais c’est déjà largement le cas : les cotisations de complémentaire santé sont souvent forfaitaires.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, dont les conséquences pourraient être éloignées des objectifs visés.
Nous souhaitons une adhésion obligatoire pour toutes les entreprises. Dans les très petites entreprises, ce sont les négociations de branche qui permettront de parvenir à une égalité de traitement entre tous les salariés ; tout le monde reconnaît qu’il s’agit d’un progrès.
Or, monsieur Collombat, l’adoption d’un tel amendement aurait pour effet d’exonérer les très petites entreprises d’une telle négociation. Cela me paraît extrêmement dangereux.
En outre, sauf erreur de ma part, compte tenu la rédaction de cet amendement, les garanties prévues dans le projet de loi pour tous les salariés employés dans une entreprise autre qu’une TPE ne pourraient pas s’appliquer. Par exemple, la garantie selon laquelle l’employeur doit couvrir au moins 50 % du financement disparaîtrait.
L’adoption de cet amendement créerait une complémentaire santé « au rabais » ; je suis certain que ce n’est pas ce que vous souhaitez, mais c’est ce à quoi l’on risquerait d’aboutir.
Nous voulons une couverture complémentaire pour toutes les entreprises, y compris les très petites, par le biais des négociations de branche.
Dans ces conditions, je vous suggère de retirer cet amendement, monsieur Collombat.
M. le président. Monsieur Pierre-Yves Collombat, l'amendement n° 560 rectifié est-il maintenu ?
M. Pierre-Yves Collombat. Non, je le retire, monsieur le président.
Je voulais juste rêver un peu. Je proposais de simplifier les formalités administratives et de garantir aux salariés des TPE les mêmes droits que dans les entreprises plus grandes avec une contribution forfaitaire inférieure.
Cela étant, je concède que le dispositif mériterait d’être un peu peaufiné. (Sourires.) C’est la raison pour laquelle j’accepte de retirer mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 560 rectifié est retiré.
Je suis saisi de vingt-huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 512 rectifié, présenté par MM. Cardoux et Milon, Mmes Bouchart, Bruguière, Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Savary, J.C. Leroy, Bas, P. Dominati, Lefèvre, Lenoir, Mayet, Sido et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Supprimer les mots :
au minimum
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
M. Jean-Noël Cardoux. Cet amendement vise simplement à rétablir la rédaction initiale de l’accord national interprofessionnel ; le financement de la couverture complémentaire santé est partagé à parité entre salariés et employeurs.
Je crois que les mots « au minimum » ont été ajoutés à l’Assemblée nationale. M. le ministre nous a expliqué que certaines dispositions de l’ANI avaient été mal rédigées par les partenaires sociaux et devaient être améliorées ou réécrites. Mais, en l’espèce, le partage à parité d’une charge ne pose aucune difficulté de rédaction. Il n’y a donc pas lieu de réécrire cette disposition pour traduire la pensée des partenaires sociaux.
Au demeurant, une telle répartition me semble tout à fait équitable dans le contexte actuel. En effet, les entreprises ont actuellement beaucoup de difficultés pour maintenir leur équilibre financier. Il ne serait pas opportun d’ajouter la possibilité d’augmenter leur contribution à ce qui est déjà – je reprends les termes de nos collègues – une « avancée considérable » en matière de couverture des salariés.
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 20
Remplacer les mots :
au minimum la moitié
par les mots :
l'intégralité
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Aux termes de l’article 1er du projet de loi, les entreprises décident unilatéralement de faire bénéficier d’une couverture minimale les salariés qui ne disposeraient pas d’une couverture collective à adhésion obligatoire en matière de remboursements complémentaires, c’est-à-dire qui ne seraient pas couverts par un accord de branche ou d’entreprise.
Le texte précise en outre que l’employeur assure au minimum la moitié du financement de cette couverture.
Sur le fond, il n’y a là rien de bien révolutionnaire. C’est en effet ce qui a déjà cours aujourd’hui pour les complémentaires santé collectives et obligatoires des entreprises, l’employeur prenant généralement en charge, en moyenne, 54 % du financement de celles-ci.
Cette participation minimale, fixée à 50 %, constituerait par conséquent un léger recul par rapport à ce qui existe actuellement.
En outre, il n’y a eu aucun démenti sur la question du panier de soins assuré par la complémentaire obligatoire. En réalité, le panier de soins serait, semble-t-il, très réduit et ne saurait compenser les déremboursements de la sécurité sociale. Par exemple, sauf erreur de ma part, les lunettes seraient remboursées 100 euros, contre 173 euros par la CMU-C ; les prothèses dentaires seraient, elles, remboursées à 125 %, soit 125 euros par an, contre 157 euros par la CMU-C. Si je me trompe, j’invite tout de suite nos collègues à rétablir la vérité.
Ces réalités sont subies par un grand nombre de nos concitoyens et constituent pour eux une source de vive inquiétude. Aussi, à ceux qui présentent comme une grande avancée sociale un dispositif qui ouvrira en définitive moins de droits que le plancher de la CMU-C, je réponds que cette affirmation doit être relativisée. Je m’y emploie à l’instant.
En ces temps de politiques d’austérité menées tant par le Gouvernement que par des directions d’entreprises, politiques ayant des conséquences sur l’accès aux soins des populations les plus fragiles – certaines d’entre elles sont d’ailleurs salariées de ces entreprises –, il nous semblerait socialement juste et économiquement supportable de prévoir un financement intégralement à la charge de l’employeur. (M. Jean-François Husson s’exclame.)
Mme Catherine Procaccia. Tout dans la nuance… (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les entreprises composées de plus de 300 salariés, la participation de l’employeur au financement de cette couverture complémentaire est intégrale.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Par cet amendement, je souhaiterais revenir sur les effets des exonérations de cotisations sociales pour les employeurs.
Vous le savez, les exonérations liées aux bas salaires incitent d’ores et déjà les employeurs à y recourir. Les premiers touchés sont les jeunes, mais aussi les femmes, avec des incidences négatives sur l’égalité entre les hommes et les femmes.
De telles exonérations ont donc des conséquences directes extrêmement néfastes sur la qualité de l’emploi. En outre, l’effet sur les comptes de la sécurité sociale des cotisations liées aux bas salaires est d’autant plus grand que les cotisations, vous le savez, sont proportionnelles et en partie progressives.
De réforme en réforme, on fait supporter de plus en plus de dépenses sociales, qui sont des dépenses vitales, par les salariés.
Toutes ces exonérations dont bénéficient, de manière inefficace et illégitime, les entreprises sont autant de moyens en moins pour le financement de la protection sociale et de la santé.
Pour toutes ces raisons, et dans la mesure où les plus grosses entreprises sont également celles qui bénéficient des exonérations de cotisations sociales affaiblissant la protection sociale et conduisant à de faibles remboursements pour certaines dépenses, il convient de prévoir une participation intégrale de l’employeur dans les entreprises de plus de 300 salariés.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La participation de l’employeur est intégrale pour les salariés dont la rémunération est égale ou inférieure au taux horaire du salaire minimum interprofessionnel de croissance majoré de 20 %.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Ainsi que M. le ministre l’a rappelé à plusieurs reprises, la couverture complémentaire santé pèse sur les salaires et, partant, sur le pouvoir d’achat, à plus forte raison s’agissant des bas salaires. Aujourd’hui, si l’on n’a pas de complémentaire santé, c’est par contrainte, et non par choix.
Les cotisations ne sont pas proportionnelles aux revenus, puisqu’elles sont calculées en fonction du risque et de la disposition à payer. Elles sont donc profondément inégalitaires, représentant au minimum quelque 300 euros par an et par salarié. Dès lors, ce sont des millions de personnes qui n’ont pas de couverture complémentaire, même au rabais, et qui ne peuvent pas avoir accès à des soins.
Voilà pourquoi nous proposons une participation intégrale des employeurs pour les salariés dont la rémunération est inférieure ou égale à 1,2 fois le SMIC : il n’est pas acceptable que les plus modestes d’entre nous soient si injustement pénalisés face au droit à la santé. D’ailleurs, certaines collectivités territoriales ont adopté un tel principe et cotisent à hauteur de 75 %, voire de 100 % pour leurs salariés.
Une telle mesure peut sembler radicale, mais il est de l’intérêt des employeurs d’avoir des salariés en bonne santé, d’autant que le niveau de la santé au travail dans notre pays n’est pas satisfaisant.
Or ce que la santé fait au travail et ce que le travail fait à la santé sont les deux faces d’une même médaille : c’est une condition de la compétitivité de nos entreprises !
En d’autres termes, la santé physique et psychologique des salariés est un facteur-clef de la compétitivité des entreprises. Les salariés étant acteurs de la performance des organisations, le progrès social peut être le moteur du progrès économique.
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective nationale de l'industrie textile du 1er février 1951.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. L’accord national interprofessionnel signé le 11 janvier dernier par les partenaires sociaux – en dehors, je le rappelle, de deux organisations syndicales majoritaires ! – prévoit, en son article 1er, d’étendre la couverture complémentaire des frais de santé à tous les salariés. Cela peut apparaître comme un premier pas vers la complémentaire santé pour tous annoncée par le Président de la République lors du congrès des mutuelles au mois d’octobre dernier.
Cependant, aux termes de l’article 1er, les complémentaires santé doivent être prises en charge à 50 % au moins par les entreprises et sont obligatoires pour les salariés, dont la moitié du coût restant est prélevé à la source.
Cette mesure n’aura aucun effet dans l’industrie textile, puisque la convention collective prévoit déjà la prise en charge de la moitié des frais de prévention santé. Selon nous, le caractère obligatoire de cette disposition, donc l’impossibilité pour les salariés de décider de leur mutuelle, aliène leur liberté de choisir leur couverture santé et, éventuellement, celle de leur famille. Ces contraintes doivent être prises en considération.
De même, il faut tenir compte de la pénibilité dans ce secteur d’activité. On le sait, si les salariés ne changent pas de poste, ils effectuent durant toute leur carrière les mêmes gestes répétitifs, qui les conduisent souvent à des souffrances physiques pouvant aller jusqu’au handicap.
Les cadences imposées en vue d’une productivité maximale et l’environnement souvent bruyant, parfois abrutissant, amplifient les risques et caractérisent la pénibilité de ce type de métiers. S’y ajoutent le travail de nuit, le travail posté aux trois huit, qui est encore en vigueur dans nombre d’entreprises du textile, où les femmes sont majoritaires.
Mme Catherine Génisson, rapporteur de la délégation aux droits des femmes. Eh oui !
M. Christian Favier. Je pourrais aussi mentionner l’exposition aux produits nocifs, comme les colorants – fort heureusement, c’est mieux réglementé aujourd’hui –, en teinturerie. Ce sont autant de facteurs de risques supplémentaires pour les salariés, qui peinent à atteindre l’âge de la retraite en bonne santé.
Dès lors, il nous semble essentiel de soulager les salariés de la part « mutuelle » qui leur revient. Aussi la couverture complémentaire santé prévue à l’article 1er doit-elle, à nos yeux, être intégralement prise en charge par l’employeur pour les salariés des industries du textile. Il s’agit de marquer une nouvelle avancée dans les droits des salariés de cette branche et de l’inscrire dans l’esprit du texte.
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des industries métallurgiques.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement tend à permettre aux salariés relevant de la convention collective des industries métallurgiques de déroger aux dispositions de l’alinéa 20, qui prévoient une prise en charge à 50 % seulement des frais de la couverture collective en matière de remboursement ou d’indemnisation de frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident.
Les salariés concernés connaissent des conditions de travail difficiles et usantes. Ils sont confrontés aux horaires décalés et alternés, au travail de nuit et du week-end. Au cours des dernières décennies, ils ont par ailleurs subi une intensification très forte de leur productivité, via le développement de la mécanisation et l’apparition de nouvelles technologies, dont les technologies numériques.
Tous ces éléments ont accru la pénibilité du travail, y compris sur le plan psychologique. Le stress au travail touche sans distinction toutes les catégories socioprofessionnelles. Aujourd’hui, nul ne peut contester les répercussions directes de cette situation sur l’état de santé des salariés, donc sur le volume des dépenses de santé directement liées au travail.
Une couverture complémentaire santé est indispensable pour ces salariés, pour leur permettre de faire face financièrement aux conséquences directes de leurs conditions de travail. C’est d’autant plus vrai que le champ des maladies professionnelles reconnues est restreint au regard des différentes atteintes à la santé pouvant résulter de leurs conditions de travail. C’est pourquoi la participation des employeurs au financement de ces cotisations est la simple reconnaissance du lien direct entre activité professionnelle et santé.
Dans les industries métallurgiques, de nombreuses entreprises ont déjà mis en place un régime complémentaire de santé avec une prise en charge totale ou partielle par les employeurs. En général, la participation de l’employeur est d’au minimum 50 %.
Avec l’instauration d’une prise en charge partielle de la couverture santé, le projet de loi ne se concrétisera pas par une amélioration pour une grande partie des salariés. En effet, les accords déjà conclus fixent des seuils le plus souvent au moins égaux, voire supérieurs au taux minimal qui figure dans le texte. Les salariés que j’ai rencontrés craignent donc de voir leur couverture santé révisée à la baisse.
J’évoquerai également les ayants droit de cette couverture. Dans la quasi-totalité des entreprises concernées, ces complémentaires de santé concernent non seulement le salarié lui-même, mais également sa famille, notamment son conjoint et ses enfants. Selon les cas, l’employeur peut participer directement au financement des cotisations des autres ayants droit. À défaut, le contrat peut prévoir des adhésions à des tarifs préférentiels.
Les employés du secteur sont loin de percevoir le dispositif instaurant légalement la prise en compte à 50 % de la complémentaire santé du seul salarié comme une avancée sociale. Ils redoutent même de voir certains employeurs dénoncer les accords existants pour se limiter à une stricte application de la loi.
De surcroît, certains salariés qui souhaiteront obtenir une couverture plus complète se verront dans l’obligation de cotiser encore plus qu’aujourd’hui.
Au total, les personnels de ces branches redoutent d’être moins couverts qu’aujourd’hui, avec une prise en compte partielle des dépenses. Notre amendement vise à remédier à la situation.
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des activités industrielles de boulangerie et pâtisserie du 13 juillet 1993.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Tout ce qui va dans le sens du progrès humain et des avancées sociales bénéficie naturellement de notre entier soutien. Ainsi, ce qui tend vers une totale couverture santé pour tous les salariés ne peut que nous satisfaire. C’est tout le sens de notre combat pour garantir l’accès aux soins pour tous dans le cadre national de la sécurité sociale, un accès qu’il faudrait d’ailleurs renforcer au lieu d’en réduire inexorablement la portée.
Ce préalable posé, nous voulons ajuster l’article 1er du projet de loi issu de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier dernier, qui concerne l’extension de la couverture complémentaire des frais de santé à tous les salariés, selon les secteurs d’activité où la mesure s’applique.
Aussi, en matière de régimes de prévoyance, il convient de prendre en compte la pénibilité spécifique du travail des personnels cadres et non-cadres des entreprises relevant des activités industrielles de boulangerie et de pâtisserie, dans le cadre de la convention collective ad hoc.
À la lecture de celle-ci, on constate que l’employeur prend en charge 100 % des frais de protection santé pour les cadres de la tranche A, contre seulement 50 % pour les cadres de la tranche B, alors que la prise en charge par l’employeur est de deux tiers pour les personnels non-cadres.
Mes chers collègues, vous en conviendrez, de telles disparités ne peuvent que concourir à entretenir le malaise des salariés de cette branche. Certaines catégories ne comprennent pas pourquoi ceux qui subissent de plein fouet la pénibilité du travail n’ont pas les mêmes avantages que ceux qui y sont moins exposés.
Il faut mesurer ce que signifie concrètement et au quotidien la pénibilité dans l’industrie de la boulangerie et de la pâtisserie, que ce soit dans les usines de production ou dans les boutiques, dans les zones commerciales ou dans les plateformes de distribution. Les cadences ne cessent de s’intensifier et les salariés se plaignent d’être obligés de courir en permanence pour pouvoir suivre le rythme : « On glisse sur les sols humides, on se brûle avec les plaques de four, on se coupe avec les coupe-pâte et les cutters. »
Mme Catherine Procaccia. Ces salariés doivent être contents que vous parliez ainsi de leur travail !
Mme Éliane Assassi. Ne vous inquiétez pas ! Ils sont au courant de cette réalité-là !
M. Dominique Watrin. Les chutes et les coupures sont les principales sources d’accidents du travail.
Les troubles musculo-squelettiques, plus connus sous le nom de TMS, constituent également un problème très important, qui affecte sérieusement la profession. Nous le savons, dans cette branche, de tels troubles touchent en particulier les membres supérieurs. On déplore spécifiquement des tendinites du poignet et de l’avant-bras.
Les TMS sont provoqués par la manutention des plaques de pains et des chariots de transport, ou encore par l’absence de rotation sur les postes, par le travail de nuit, qui est fréquent dans la profession, mais aussi par les cadences et les gestes répétitifs sur les lignes de fabrication. Imagineriez-vous travailler dans de telles conditions pendant sept heures tous les jours et durant toute votre carrière ?
Pour l’ensemble de ces raisons, les salariés cadres et non-cadres de la boulangerie et de la pâtisserie industrielle doivent être exonérés de leur cotisation santé, qui doit être intégralement prise en charge par l’employeur.
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage à sec, pressing et teinturerie du 17 novembre 1997.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement, et Christian Favier en a parlé voilà quelques instants, tend à permettre aux salariés relevant de la convention collective de la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage à sec, pressing et teinturerie du 17 novembre 1997 de déroger aux dispositions de l’alinéa 20.
En effet, le texte fixe à 50 % la participation de l’employeur sur la complémentaire santé, ce qui est loin, vous l’avouerez, d’être suffisant pour les salariés qui relèvent de cette convention collective.
Peut-être faut-il rappeler à ce titre que les salaires de ces personnels ne dépassent guère le SMIC pour la majorité de ceux qui ont un temps plein, quelle que soit l’ancienneté. Cela laisse imaginer ce que peut être la rémunération des ceux qui subissent le temps partiel.
Le secteur d’activité est également marqué par un fort niveau de recours aux contrats précaires.
Comme dans d’autres domaines, les salariés connaissent des conditions de travail difficiles. Ils subissent les horaires décalés ou alternés, le travail de nuit ou du week-end.
La particularité du secteur réside probablement dans l’exposition à des nuisances chimiques ou biologiques, sans oublier l’exposition au bruit et aux températures excessives. La pénibilité au travail s’en trouve accrue et la répétitivité des gestes expose plus spécialement ces personnels aux TMS.
Le port de charges lourdes est également l’une des caractéristiques de ces activités dans des métiers fortement féminisés.
Pour ces salariés, une protection complémentaire santé est devenue indispensable, afin de faire face aux dépenses suscitées pour partie par les conditions de travail. Voilà pourquoi la participation des employeurs au financement des cotisations doit être non pas limitée à 50 %, comme cela figure dans le texte, mais portée à 100 %. D’ailleurs, le poids de ces cotisations sera insupportable vu la faiblesse des salaires, à plus forte raison pour les personnes à temps partiel.
Dans ce secteur comme dans d’autres domaines, certaines entreprises ayant bien compris l’avantage que le dispositif pouvait représenter ont accepté de mettre en place des complémentaires santé pour leur personnel, couvrant non seulement les salariés eux-mêmes, mais aussi leur conjoint et leurs enfants. Ainsi, même avec une prise en charge partielle, la participation patronale se révèle supérieure au niveau qui est actuellement prévu par le texte !
Où sera donc, pour les salariés, l’avantage dont on nous rebat les oreilles pour faire avaliser le projet de loi ?
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de la boucherie, boucherie-charcuterie, boucherie hippophagique, triperie, commerces de volailles et gibiers du 12 décembre 1978, actualisée.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Plus des trois quarts des salariés bénéficient aujourd’hui d’une complémentaire santé dans le cadre de l’entreprise. La généralisation, qui est présentée comme une avancée sociale importante, ne concernera en réalité qu’une faible minorité de salariés, mais elle coûtera plus de 2 milliards d’euros supplémentaires, qui viendront s’ajouter aux 4 milliards d’euros de subventions dont bénéficient déjà, sous forme de déductions fiscales et sociales, les entreprises pour la mise en œuvre de la couverture santé là où elle existe.
Ce coût non négligeable sera assumé par l’État, c'est-à-dire par l’ensemble des contribuables, y compris ceux qui ne disposeront pas d’une assurance privée.
Mais, et nous le disons depuis le début du débat, le véritable coût de cette mesure phare de l’ANI reste le recul infligé à la sécurité sociale. Les vrais gagnants seront non pas les salariés, ni leur famille, mais bien les sociétés d’assurance.
Compte tenu des obligations prévues par l’accord, les salariés se verront contraints par les accords d’entreprise ou de branche de contribuer à un panier de soins réduit à des prestations inférieures à celles que peut proposer la CMU-C aujourd’hui. En outre, ces prestations seront inégales selon les moyens de l’entreprise, de la branche ou du secteur d’activité, avec une participation de l’employeur qui pourra être inférieure à ce qui se pratique déjà.
Puisque nous nous sommes sur un texte dit « de sécurisation » – et il est bien difficile de faire passer des amendements –, nous ne pouvons qu’aller dans le sens d’une plus grande sécurisation des salariés et de leur emploi. Aussi, à défaut de la prise en charge à 100 % des soins de santé par la sécurité sociale, seule véritable mesure de protection sociale, et parce qu’il nous semble indispensable d’introduire des droits nouveaux, nous ne pouvons que proposer la prise en charge à 100 % par l’employeur du financement de la complémentaire santé.
Il ne s’agit là que d’une mesure minimale de sécurisation et de rééquilibrage des droits des salariés face aux droits des employeurs. C’est le sens de notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des coopératives agricoles de céréales, de meunerie, d'approvisionnement, d'alimentation du bétail et d'oléagineux du 5 mai 1965.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Par cet amendement, nous entendons déroger à l’alinéa 20 de l’article 1er du projet de loi pour donner force de loi au financement intégral par l’employeur de la complémentaire santé des assurés relevant de la convention collective des coopératives agricoles de céréales, de meunerie, d’approvisionnement, d’alimentation du bétail et d’oléagineux du 5 mai 1965.
Ce texte régit sur l’ensemble du territoire métropolitain les rapports entre employeurs et salariés des coopératives agricoles et des unions de coopératives agricoles de céréales, de meunerie, d’approvisionnement, d’alimentation du bétail et d’oléagineux constitués conformément aux textes législatifs et réglementaires en vigueur, ainsi que des sociétés coopératives d’intérêt collectif agricoles ayant le même objet dans lesquelles ces coopératives agricoles ou unions de coopératives agricoles ont une participation prépondérante.
Le financement intégral par l’employeur de la couverture santé pour ces salariés favoriserait leur fidélisation et renforcerait l’attractivité de la branche. Actuellement, dans divers accords professionnels complémentaires de ces coopératives, régis par l’article L. 727-2 du code rural et par le livre IX du code de la sécurité sociale, la prise en charge de la cotisation par l’employeur se limite à 20 %.
Nous connaissons tous la réalité des activités des personnels de cette branche. La pénibilité de leur travail est reconnue sur la base de nombreux critères : position normale de travail, risque de maladies, tâches particulièrement salissantes, pénibles, dangereuses ou insalubres…
La prise en charge par l’employeur doit permettre de rendre les métiers de l’agriculture plus attractifs, notamment chez les jeunes. Le secteur manque en effet de main-d’œuvre qualifiée et souffre de l’idée reçue que les métiers agricoles sont moins respectables. Il faut donc fidéliser les salariés.
Par cet amendement, nous demandons que les personnels du secteur des coopératives agricoles de céréales, de meunerie, d’approvisionnement, d’alimentation du bétail et d’oléagineux puissent être dispensés de contribution au financement de leur complémentaire santé, pour les raisons que je viens d’évoquer et parce que la nécessité pour eux de travailler en bonne santé est un impératif de santé publique pour toute la société.
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des grands magasins et des magasins populaires du 30 juin 2000.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Par cet amendement, nous entendons déroger à l’alinéa 20 de l’article 1er du présent projet de loi pour donner force de loi au financement intégral par l’employeur de la complémentaire santé des assurés relevant de la convention collective des grands magasins et des magasins populaires du 30 juin 2000.
Cette convention règle les rapports entre les employeurs et les salariés des entreprises situées sur l’ensemble du territoire métropolitain et dans les départements d’outre-mer et exerçant les activités de grands magasins et magasins populaires définies sous les codes NAF 521H et 521E. Les codes NAF attribués par l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, aux employeurs constituent une présomption de classement.
Sont rattachés à cette convention collective l’ensemble des établissements et des sociétés de grands magasins et de magasins populaires n’exerçant pas une activité nettement différenciée de celle de grands magasins ou magasins populaires. Il s’agit notamment des magasins de ces sociétés qui n’ont pas une activité commerciale spécialisée, de leurs sièges sociaux et autres établissements administratifs, des centrales d’achat des sociétés de grands magasins ou de magasins populaires, des entrepôts rattachés à la date du 1er mars 1998 aux conventions collectives des grands magasins ou des magasins populaires. La convention collective de ce secteur concerne donc de nombreuses spécialités différentes, comme l’habillement, l’ameublement ou le bricolage.
La branche des grands magasins ou des magasins populaires représente plus de 40 700 salariés, dont 72 % de femmes.
Mes chers collègues, vous n’ignorez pas les réalités des activités des personnels de la branche. Les conditions de travail sont souvent précaires et marquées par la flexibilité, le temps partiel, les contraintes d’un travail répétitif et physiquement difficile, ainsi que par la pression du chiffre et l’exigence de la polyvalence. Ils sont soumis au quotidien à des contraintes très particulières, qui exigent de leur part un investissement très important.
Par cet amendement, nous demandons que les personnels du secteur des grands magasins et des magasins populaires puissent être dispensés de contribution au financement de leur complémentaire santé pour les raisons que je viens d’évoquer, et parce que la nécessité pour eux de travailler en bonne santé est évidemment un impératif de santé publique pour toute la société.
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Par cet amendement, nous voulons donner force de loi au financement intégral par l’employeur de la complémentaire santé des assurés relevant de la convention collective de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002.
Depuis les lois Aubry sur l’aménagement et la durée du temps de travail, ces salariés ont été parmi les plus sollicités, parmi ceux à qui l’on a demandé des efforts. L’hospitalisation privée en France correspond à environ 2 300 établissements à but lucratif ou non-lucratif et emploie environ 40 000 médecins et près de 165 000 infirmiers et cadres.
La convention collective de ce secteur concerne de nombreuses spécialités différentes : infirmiers de chirurgie, de médecine, d’oncologie, de bloc opératoire, infirmiers hygiénistes, de réanimation ou de soins intensifs, surveillants de bloc, de médecine...
Nous connaissons la réalité des activités des personnels de cette branche et leurs conditions de travail souvent très pénibles : travail de nuit, travail décalé, rythme intensif et travail dans l’urgence… Ces salariés sont soumis au quotidien à des contraintes très particulières, qui exigent un investissement individuel permanent. Le cœur de leur métier, c’est l’humain. Dans ce domaine, on ne peut pas économiser son investissement professionnel et, souvent, personnel. Ils doivent associer la grande technicité des actes médicaux avec une forte empathie envers leurs patients. C’est encore plus vrai dans l’accompagnement des personnes en fin de vie.
Par cet amendement, nous demandons que les personnels du secteur de l’hospitalisation privée puissent être dispensés de contribution au financement de leur complémentaire santé, pour les raisons que je viens d’évoquer et parce que la nécessité pour eux de travailler en bonne santé est un impératif de santé publique pour toute la société.
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de l'hôtellerie et de la restauration.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement concerne les salariés de la restauration et de l’hôtellerie. Il nous semble utile de leur témoigner plus de considération que n’en font malheureusement preuve les donneurs d’ordres du secteur.
Ces salariés occupent des emplois difficiles, physiquement usants, chaotiques, avec des horaires de travail imposés par leurs employeurs et par la profession. Nombre d’entre eux ont commencé très jeune leur activité professionnelle. Comment occulter le fait que, dans ces secteurs, travailler signifie débuter très tôt le matin, finir tard le soir, travailler le week-end et bien souvent pendant les périodes de vacances ? Vous le savez, c’est aussi dans ces secteurs que se concentrent les bas salaires.
Pensons également à ces femmes de ménage qui répètent chaque jour des gestes harassants dans les hôtels, des années durant. De surcroît, nous avons, les uns et les autres, été témoins de l’évolution de la situation : les travaux les moins valorisants sont de plus en plus exercés par des salariés immigrés, notamment par des sans-papiers.
Souvenons-nous, mes chers collègues, de la grève de ces employés sans-papiers des restaurants du groupe Costes ou de la Tour d’Argent. La mobilisation avait alors fait tâche d’huile dans ces professions très difficiles ; on avait compté jusqu’à six cents ou sept cents grévistes. Il y aurait aussi beaucoup à dire des conditions de travail de ces salariés : changements d’emploi du temps, absence de pauses, repas pris debout, non-paiement des congés…
Permettez-moi aussi d’évoquer les étudiants qui, en raison du coût prohibitif des études, travaillent, entre autres, chez McDonald’s, afin de mener leur cursus à son terme.
Oui, nous souhaitons que ces salariés ne se trouvent pas une fois de plus pénalisés dans leur droit à bénéficier de soins de qualité ! Je pense donc qu’il serait bon de faire assumer l’intégralité de la couverture complémentaire par l’employeur, afin d’apporter aux personnels un peu de sécurité dans l’exercice de leur activité.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Raffarin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Saisine du Conseil constitutionnel
M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi le 18 avril 2013, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, de la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des délégués communautaires, et modifiant le calendrier électoral.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
7
Sécurisation de l'emploi
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la sécurisation de l’emploi.
Nous poursuivons la discussion des articles.
Chapitre Ier (suite)
Créer de nouveaux droits pour les salariés
Section 1 (suite)
De nouveaux droits individuels pour la sécurisation des parcours
M. le président. Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de l'industrie du pétrole du 3 septembre 1985.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Par cet amendement, nous souhaitons que les salariés relevant de la convention collective nationale de l’industrie du pétrole du 3 septembre 1985 puissent bénéficier du financement intégral de leur complémentaire santé par leur employeur.
En effet, ces salariés connaissent bien souvent des conditions de travail contraignantes et difficiles. Tel est, par exemple, le cas de l’ingénieur pétrolier, qui passe de longs mois en mer sur des plateformes et qui est confronté à des conditions climatiques parfois extrêmes.
À cela s’ajoutent les risques liés au métier du secteur pétrolier. En effet, les accidents du travail y sont fréquents. Cette situation s’explique non seulement par la nature même de cette profession, mais aussi par la pénurie de travailleurs qualifiés que connaît cette branche capitale de l’économie.
Parallèlement à leurs effectifs permanents, les compagnies pétrolières ont de plus en plus recours à une main-d’œuvre contractuelle, ce qui rend d’autant plus difficiles les négociations collectives.
Pourtant, les qualités exigées sont nombreuses, notamment la mobilité et une grande réactivité. En outre, ces employés ont de lourdes responsabilités en raison des conséquences désastreuses que leur activité pourrait créer sur leur environnement ou des risques d’accident liés à un manque éventuel de vigilance.
Face à cette réalité, les compagnies de l’industrie pétrolière empochent des bénéfices extravagants. Ainsi, le groupe Total annonce un bénéfice de 7,8 milliards d’euros pour 2009, ce qui n’est rien en comparaison du record atteint en 2008, où il a réalisé le bénéfice le plus important jamais enregistré par une entreprise : 14 milliards d’euros !
Malgré le recul de la production d’hydrocarbures, Total a de nouveau engrangé des bénéfices record en 2012 : son bénéfice net ajusté a grimpé de 8 %, pour s’établir à 12,4 milliards d’euros.
D’un côté, les raffineries ferment et les pétroliers engrangent des bénéfices. De l’autre, on demande aux salariés de supporter les dépenses de santé ou de renoncer à se soigner. À nos yeux, cette situation est inadmissible.
Nous vous appelons donc à soutenir cet amendement, qui vise à faire peser la charge de la complémentaire santé sur l’employeur.
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de l'industrie pharmaceutique du 6 avril 1956.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’industrie pharmaceutique est emblématique du système économique libéral que nous subissons et qui crée chaque jour un peu plus d’inégalités sociales.
Les salariés de ce secteur ont été particulièrement touchés par la crise et, plus exactement, par les politiques des entreprises bénéficiaires qui licencient à tour de bras pour augmenter encore leur marge.
Les laboratoires pharmaceutiques sont de grands destructeurs d’emplois, alors même que le secteur est dynamique. L’exemple frappant de Sanofi montre à quel point les salariés sont sans cesse pris à rebrousse-poil, voire méprisés.
Alors que les dividendes du groupe sont en augmentation de 45 % par rapport à l’année écoulée et que le chiffre d’affaires s’élève à plus de 35 milliards d’euros, les licenciements se multiplient. La CGT des sites SWI – achats, finance, système d’information, ressources humaines, etc. – d’Ambarès et de Saint-Loubès en Gironde, d’Amilly dans le Loiret, de Lisieux dans le Calvados, de Tours, de Quetigny en Côte-d’Or et de Maisons-Alfort dans le Val-de-Marne, avait assigné la société, dénonçant des insuffisances et des irrégularités dans le projet de réorganisation et d’adaptation.
Ces syndicats soulignaient notamment l’absence de plan de reclassement. Le 5 avril dernier, ils ont été déboutés, mais pour un motif de recevabilité. La lutte continue donc pour eux.
En 2012, les plus importantes suppressions de postes dans l’industrie pharmaceutique ont été le fait d’AstraZeneca, de Takeda et de Novartis.
Face à une telle situation, vous prétendez renforcer les droits des salariés avec l’article 1er du projet de loi. Mais le renforcement des droits de salariés mérite, selon nous, une politique autrement plus ambitieuse.
En effet, au cours de ces dernières années, la couverture santé s’est fortement dégradée en France : le patient paie de plus en plus pour des prestations toujours plus faibles. Aussi, il convient de réorganiser une offre de soins de proximité, publique, et de régler définitivement la question des dépassements d’honoraires des médecins, avec la mise en place d’un seul secteur conventionné. Enfin, il faut nationaliser l’industrie pharmaceutique, le médicament n’étant pas un bien marchand.
Par cet amendement, qui est, vous l’aurez compris, un amendement de repli, tant on est loin des exigences sociales qui sont les nôtres et celles de milliers de salariés, nous demandons que l’employeur finance intégralement la couverture des assurés dont l’activité relève de la convention collective nationale de l’industrie pharmaceutique du 6 avril 1956.
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des industries de l'habillement du 17 février 1958.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à permettre aux salariés relevant de la convention collective nationale des industries de l’habillement de bénéficier d’une assurance complémentaire de santé entièrement prise en charge par l’employeur.
Cette disposition se justifie par les conditions de travail particulièrement difficiles dans cette branche, avec des cadences importantes, des gestes répétitifs et des positions qui vont à l’encontre du bien-être physique, entraînant des maux de dos fréquents. Les horaires de travail décalés et le travail de nuit ont des conséquences indéniables sur les conditions de travail des salariés.
Par ailleurs, la très forte concurrence des pays émergents dans ce secteur au cours de ces dernières années a entraîné une augmentation importante de la productivité. Les menaces pesant sur ce secteur, qui a vu de grandes entreprises disparaître, ne font qu’aggraver les conditions de travail déjà difficiles, en introduisant le facteur stress, qui est très nuisible à la santé des salariés.
L’ensemble de ces éléments a entraîné une pénibilité accrue, y compris sur le plan psychologique. Cette pénibilité, tant physique que psychologique, où le bruit des machines aggravant le stress, touche tous les salariés des entreprises de textile, quel que soit leur poste de travail.
Au regard de ces éléments, il est indéniable que ces conditions de travail difficiles ont une répercussion directe sur l’état de santé des salariés. Une couverture complémentaire santé leur est indispensable pour en supporter financièrement les conséquences sur leur état de santé. C’est d’autant plus vrai que le champ des maladies professionnelles ne couvre pas celui de toutes les atteintes à la santé.
À ce titre, la participation des employeurs au financement des cotisations est la simple reconnaissance du lien direct entre activité professionnelle et santé.
Pour ce qui concerne cette branche d’industrie, de nombreuses entreprises ont déjà mis en place un régime complémentaire de santé, pris en charge totalement ou partiellement par les employeurs.
En instaurant une prise en charge partielle de la couverture santé, le projet de loi ne constituera pas une amélioration pour une grande partie des salariés. En effet, les accords déjà conclus sont le plus souvent au moins égaux, voire supérieurs, au socle minimal inscrit dans le texte. Les salariés de ce secteur nous ont d’ailleurs fait part de leur inquiétude quant à la baisse de leur couverture santé et à la non-prise en charge de leur famille. Cette crainte se justifie d’autant plus par l’augmentation des frais de santé sans augmentation de salaire.
Pour toutes ces raisons, il nous paraît essentiel que les employeurs des industries de l’habillement fassent bénéficier l’ensemble de leurs salariés d’une couverture complémentaire en la finançant dans son intégralité. C’est ainsi que le texte dont nous discutons aujourd’hui constituera pour eux une petite avancée.
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. En préambule, je tiens à dire qu’il est affligeant de voir un hémicycle aussi vide pour un débat sur un texte censé être historique ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-François Husson. Ce n’est pas à nous qu’il faut le dire !
Mme Éliane Assassi. Trois sénateurs, ce n’est tout de même pas beaucoup !
M. Jean-Claude Lenoir. Dites-le à ceux qui ne sont pas là ! Nous, nous avons le mérite de vous écouter !
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas en haussant le ton que vous me ferez taire, monsieur Lenoir !
M. Jean-Claude Lenoir. Il y a des problèmes à régler au sein de la gauche !
Mme Éliane Assassi. Monsieur Lenoir, je n’ai pas peur des grosses voix !
M. Jean-Claude Lenoir. Nous avons beaucoup de mérite à rester pour vous écouter !
M. le président. Monsieur Lenoir, le mérite, c’est le silence !
M. Yves Daudigny. Voilà une excellente présidence !
M. Jean-Claude Lenoir. En effet, le président est excellent !
M. le président. Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Éliane Assassi. Par cet amendement, nous demandons que, par dérogation à l’alinéa 20, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire pour les salariés dont l’activité professionnelle relève de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983.
Les personnels dont je parle, comme ceux que nous avons déjà évoqués et ceux dont nous allons présenter la situation en défendant nos amendements suivants, exercent un métier pénible. Il s’agit là d’un fait reconnu.
Selon une étude de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, la pénibilité de ce travail se caractérise notamment par des gestes répétitifs, des stations debout prolongées, du piétinement, ainsi que de la manutention de charges. Dans un registre moins grave, l’Institut mentionne également le travail sur écran, les allergies cutanées et respiratoires, les contraintes posturales, les hautes températures ou, au contraire, le travail dans le froid, ainsi que les horaires de travail supérieurs à 39 heures.
L’étude conclut en ces termes : « Ceci doit amener une réflexion sur le maintien dans l’emploi des seniors et notamment des salariés les moins qualifiés et les plus exposés à la pénibilité, aussi bien au niveau de leur formation que de l’évolution de leurs compétences. »
Il est donc clair que cette branche constitue un cas particulier au regard de la pénibilité du travail.
Ainsi, il est difficile de croire que l’on demande à ces salariés de prendre en charge une partie de leur complémentaire, alors même qu’on leur a déjà demandé d’accepter la prolongation de leur durée de cotisation pour obtenir une retraite à taux plein.
Avec votre texte, monsieur le ministre, vous risquez de les prendre à rebrousse-poil ! En effet, les salariés de ce secteur commencent en moyenne avec un salaire brut de 1 420 euros. Comment feront-ils ?
Dans la restauration collective, déjà fortement précarisée par l’ANI, qui pénalise tous les salariés, en particulier les bas salaires, ils risquent de subir une déréglementation profonde de nos garanties collectives au regard de l’accord dit « de sécurisation de l’emploi » !
Voilà la politique de santé que vous avez à offrir aux salariés de Sodexo, qui ont manifesté en début d’année ! Dans le même temps, l’entreprise annonce 500 millions d’euros de bénéfices et propose aux salariés, lors des négociations annuelles obligatoires, 0 % d’augmentation, la suspension de la subrogation pour l’employé et l’augmentation des dividendes des actionnaires ! Combien de temps les salariés devront-ils supporter un tel mépris ?
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment visées par le décret du 1er mars 1962 c’est-à-dire occupant jusqu'à 10 salariés du 8 octobre 1990.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. Par cet amendement de repli, nous vous demandons, dans l’application de l’article 1er, notamment dans ses conséquences financières sur les salariés, de tenir compte de la pénibilité des conditions de travail d’un certain nombre d’entre eux.
Cet amendement vise plus particulièrement les ouvriers des entreprises du bâtiment employant jusqu’à dix salariés.
Les ouvriers du bâtiment et des travaux publics rencontrent des contraintes plus importantes que ceux des autres secteurs : intempéries, bruit, port de charges lourdes, gestes répétitifs, postures pénibles, travail debout… Plusieurs contraintes s’exercent souvent sur leur dos et les articulations de leurs membres supérieurs, entraînant lombalgies, sciatiques, hernies discales et tendinites souvent invalidantes, et provoquent de plus en plus souvent des inaptitudes médicales, bien avant l’ouverture des droits à la retraite.
Par ailleurs, la prévalence des maladies cardiaques est deux fois plus importante que la moyenne parmi les ouvriers du bâtiment. Ils développent en outre trois fois plus de cancers du poumon que la population générale et dix fois plus de cancers des voies aériennes supérieures.
Les efforts doivent toujours être supportés par les mêmes. Je prendrai l’exemple des fonds sociaux, qui, comme vous le savez, ont vocation à protéger les salariés en cas de maladie, d’incapacité de travail, d’invalidité, de dépendance, de décès ou à n’importe quel moment difficile de la vie.
Le fonds social « ouvriers » du BTP reste très excédentaire. La CGT s’en étonne régulièrement et constate que des salariés sont en grande difficulté sociale et que les besoins d’aides sont réels.
Depuis 2008, les excédants se chiffrent, tous les ans, en dizaines de millions d’euros. Ce surplus pourrait être utilisé pour améliorer les prestations ou renforcer la solidité financière du fonds. Malheureusement, il sert à réaliser des travaux du patrimoine immobilier de PRO BTP.
Tout le monde tire profit d’une telle affectation de résultats sauf les salariés ouvriers, ce qui est évidemment déplorable, sachant que les syndicats demandent depuis des années une harmonisation par le haut des régimes de protection sociale.
Force est de constater que certaines réserves d’argent qui pourraient être mises à profit pour les salariés ayant les conditions de travail les plus dures et participant pleinement à la croissance économique du pays sont oubliées.
Monsieur le ministre, nous vous demandons, par notre amendement, et à l’encontre des demandes du MEDEF, d’obliger l’employeur à financer intégralement la complémentaire santé de ces travailleurs.
M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des chaînes de cafétérias et assimilés du 28 août 1998.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de la coiffure et des professions connexes du 10 juillet 2006.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La coiffure est le deuxième secteur de l’artisanat en nombre d’entreprises : environ 60 000 entreprises sont réparties sur l’ensemble du territoire, représentant 117 000 salariés. La part des femmes dans le secteur est assez importante : elles représentent 83 % des employés.
La réalité du métier de coiffeur n’est pas toujours « glamour ». De nombreuses maladies professionnelles sont évoquées : allergies aux produits utilisés, problèmes respiratoires, troubles musculo-squelettiques, notamment aux poignets, aux coudes et aux jambes… L’environnement bruyant, dû notamment aux sèche-cheveux, est également source de fatigue et de stress. À cela s’ajoutent des temps de pause ou de repas souvent réduits pour faire face au flux de la clientèle. Autant d’éléments qui conduisent les salariés de ce secteur à consulter des spécialistes de la santé.
De plus, le niveau de salaire proposé dans ce secteur est souvent incompatible avec le coût élevé des loyers en centre-ville, ce qui explique d’ailleurs l’éloignement géographique des salariés de leur lieu de travail. Ces salaires faibles conduisent le plus souvent les salariés à faire l’impasse sur l’adhésion à une complémentaire santé.
Pour toutes ces raisons, les salariés relevant de la convention collective de la coiffure doivent, selon nous, pouvoir disposer d’une complémentaire santé financée intégralement par l’employeur, au regard des risques spécifiques en termes de santé que l’exercice de leur métier les conduit à assumer.
En raison des salaires extrêmement faibles de la profession, leur demander de financer, même pour moitié, une complémentaire obligatoire pourrait en effet fortement prendre leur pouvoir d’achat à rebrousse-poil.
Mme Catherine Génisson, rapporteur de la délégation aux droits des femmes. Le mot se justifie pour les coiffeurs ! (Sourires.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Au moment où la crise et les politiques menées par le Gouvernement amputent chaque jour un peu plus ce pouvoir d’achat, nous estimons qu’il n’est pas raisonnable de demander au salarié un effort financier supplémentaire.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à adopter cet amendement. Nous souhaitons que le Gouvernement engage une réflexion sur une modernisation des missions et des financements de la sécurité sociale, pour garantir à tous l’accès aux soins dans des conditions financières satisfaisantes.
M. le président. L'amendement n° 35, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de l'industrie de la salaison, charcuterie en gros et conserves de viandes du 29 mars 1972.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. S’il est un secteur d’activité où les conditions sociales sont loin d’être des plus favorables, c’est bien le secteur de la salaison, de la charcuterie en gros et de la conserve de viandes.
Ce secteur d’activité a souvent recours au travail posté ou au travail de nuit. Dans cette profession, le personnel est peu formé et voit sa qualification professionnelle très peu reconnue. Les « trois huit » font largement partie du paysage de ces entreprises.
La raison principale qui conduit les salariés de la branche à connaître des horaires de travail aussi atypiques est sans aucun doute le fait qu’il faut fournir à flux tendu les professionnels du commerce, c’est-à-dire les groupes de la grande distribution, qui ont besoin d’achalander leurs étals en temps réel.
L’autre contrainte du métier, nonobstant cette pratique généralisée des horaires décalés, est évidemment liée aux conditions générales de la profession. Les tâches sont répétitives et pénibles. Ce sont des travaux difficiles, ingrats, accomplis dans des conditions horaires qui sont loin d’être satisfaisantes ou, du moins, ordinaires.
Il nous semble alors parfaitement légitime de prévoir que ces professionnels disposent d’une couverture complémentaire obligatoire financée intégralement par l’employeur. Ce serait la moindre des choses !
Il s’agit en effet, de salariés qui du fait de leurs conditions de travail particulièrement pénibles, ont le plus souvent recours aux professionnels de santé, dans des conditions financières de moins en moins satisfaisantes, puisque de moins en moins prises en charge par la sécurité sociale.
Au nom de l’intérêt général, et en raison des conditions particulières de leur profession, ces salariés ne doivent pas avoir à subir des difficultés supplémentaires et à payer, souvent cher, une complémentaire santé.
C’est pourquoi nous vous invitons à adopter cet amendement, qui permettrait de consacrer des droits nouveaux pour les salariés relevant de ce secteur d’activité.
Il nous semble également que la couverture complémentaire constituerait ainsi le meilleur gage de l’effectivité d’une prévention médicale autour des risques de santé liés spécifiquement à ce secteur d’activité.
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de l'industrie des glaces, sorbets et crèmes glacées du 3 mars 2006.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Conformément à l’article 1er de l’accord du 11 janvier, le présent article prévoit la généralisation de la couverture complémentaire santé collective pour l’ensemble des salariés, qui doit entrer en vigueur au plus tard au 1er janvier 2016.
D’après les comptes nationaux de la santé, en 2010, 77 % des dépenses de soins et de biens médicaux était prise en charge par l’assurance maladie obligatoire, et 14 % de ces dépenses par une complémentaire santé.
Parallèlement, cette même année, plus de 95 % de la population française bénéficiait d’une couverture complémentaire santé alors que, au début des années quatre-vingt, seulement deux tiers des Français disposaient d’une telle couverture.
L’enjeu du présent article tient à la couverture des 414 000 salariés qui ne disposeraient à l’heure actuelle d’aucune couverture complémentaire. Selon les dispositions de cet article, l’employeur prend à sa charge au moins la moitié de cette complémentaire obligatoire. Si une telle mesure peut nous apparaître favorable, nous ne pouvons que douter de sa réelle portée.
Premièrement, en cas de défaut d’accord de branche, l’employeur pourra l’imposer. Deuxièmement, cette complémentaire pourra être extrêmement limitée, puisqu’elle n’atteint même pas le niveau de la CMU-C. Sans compter que ces dispositions ouvrent une rente pour le secteur assurantiel privé !
Sur le fond, ce qui constitue aujourd’hui une avancée n’est que la conséquence de la rétraction du périmètre d’intervention et de remboursement de la sécurité sociale.
En effet, aujourd’hui, sans complémentaire santé, le droit à la santé n’est pas réellement assuré, notamment en cas d’hospitalisation, ce qui conduit nombre de nos concitoyens à y renoncer.
Il est donc nécessaire de rendre la complémentaire santé obligatoire. Nous aurions pu, et nous estimons que cela aurait été plus intéressant, renforcer le périmètre de la sécurité sociale assurée par un organisme public. C’est, vous le concèderez, une vision bien différente.
Par cet amendement, nous souhaitons que l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de l’industrie des glaces, sorbets et crèmes glacées du 3 mars 2006.
La démarche qui nous amène à préconiser une couverture mutuelle obligatoire des salariés de cette industrie de la gourmandise financée à 100 % par l’employeur se fonde essentiellement sur la pénibilité des conditions de travail du secteur.
Cette pénibilité est d’ailleurs largement reconnue. Si l’on ajoute à cela que le secteur, parce que la grande distribution est son principal client, travaille à flux tendu, c’est-à-dire avec un recours régulier aux horaires atypiques, au travail de nuit et de week-end, on mesure aisément tout l’intérêt de faire disposer à ces salariés d’une couverture complémentaire santé financée intégralement par l’employeur.
M. le président. L'amendement n° 37, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de la sidérurgie du 20 novembre 2001.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des taxis parisiens salariés du 11 septembre 2001.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. La situation matérielle et les conditions de travail des chauffeurs de taxis se sont détériorées depuis de nombreuses années. Depuis 1973, après le décret du 2 novembre 1972 relatif à l’organisation de l’industrie du taxi, le nombre de chauffeurs hors convention collective n’a cessé de croître.
Cela a eu pour conséquence le non-respect des temps de repos, qui a bloqué le processus des embauches et s’est répercuté sur la continuité du service des taxis, par la suppression progressive des chauffeurs de relais, donc du salariat.
Cette situation imposée est créatrice d’insécurité juridique pour les chauffeurs.
En effet, la location de taxi entre dans le champ social des contrats de travail faisant l’objet d’une affiliation obligatoire pour les droits à l’assurance maladie précisée à l’article L. 311-3-7 du code de la sécurité sociale. Mais on leur impose des délais de carence pour les indemnités journalières.
Par ailleurs, l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales refuse l’affiliation de ces personnels au régime des employeurs et travailleurs indépendants, au motif que cette activité ne remplit pas les conditions de l’article R. 241-2 du code de la sécurité sociale.
Enfin, la chambre des métiers refuse l’inscription des chauffeurs locataires de taxis, car ils ne remplissent pas les conditions des articles 1er et 3 du décret du 10 juin 1983.
Un nombre important de chauffeurs de taxis subissent une situation très dommageable et sont obligés de travailler jusqu’à 70 heures par semaine pour pouvoir survivre.
Prévoir un financement intégral par l’employeur de la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des taxis parisiens salariés du 11 septembre 2001 ne serait que justice. En outre, cela rendrait le statut de taxi salarié un peu plus attractif !
M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de la manutention portuaire du 31 décembre 1993.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement tend au financement intégral par l’employeur de la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de la manutention portuaire du 31 décembre 1993.
Partout dans le monde, la manutention portuaire est une activité spécifique, soumise aux contraintes de plus en plus intensives de l’économie moderne. Elle a fait l’objet de plusieurs conventions internationales de l’Organisation internationale du travail, notamment la convention 137, telle que mise en œuvre par la législation française. L’instauration de ces règles n’a pas toujours été simple, tant sont grandes les exigences de flexibilité du patronat de la manutention portuaire, qui a toujours cherché à prendre à rebrousse-poil l’exigence de respect des métiers des salariés du secteur.
La convention collective nationale de la manutention portuaire du 31 décembre 1993 devait être le moyen de donner des garanties sociales à l’ensemble des personnels de la branche ; c’était l’objectif affiché. Les clauses de la convention s’appliquent à l’ensemble des personnels de la profession : ouvriers, mais aussi ingénieurs, cadres, agents de maîtrise et employés. La convention a pour objectif affiché de « tendre à assurer la stabilité de l’emploi de l’ensemble des catégories professionnelles » et de conjuguer le développement de l’activité et le progrès social.
L’amendement n° 39 est en pleine cohérence avec la volonté d’approfondir la démarche sociale qui est proclamée.
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des ouvriers du bâtiment de la région parisienne du 28 juin 1993.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Christian Favier.
M. Christian Favier. En tant que sénateur du Val-de-Marne, je souhaite attirer l’attention sur la convention collective des ouvriers du bâtiment de la région parisienne du 28 juin 1993, la convention collective 3 032.
Il existe trois conventions collectives, chacune étant applicable à des catégories professionnelles distinctes : les ingénieurs, les assimilés cadres et les ouvriers. Notre amendement porte sur la convention relative aux ouvriers. Les départements concernés sont Paris, la Seine-Saint-Denis, les Hauts-de-Seine, le Val-de-Marne, l’Essonne, les Yvelines et le Val-d’Oise.
La convention 3 032 s’applique également aux entreprises mixtes bâtiment et travaux publics, lorsque le personnel effectuant des travaux correspondant à une ou plusieurs activités du bâtiment représente au moins 60 % de l’ensemble du personnel de l’entreprise.
À l’appui de cet amendement tendant à prévoir la prise en charge intégrale par l’employeur de la couverture complémentaire, permettez-moi d’évoquer les conditions de travail des ouvriers concernés et les conséquences qu’elles ont sur leur santé. Outre la diversité et la complexité des intervenants et des techniques sur un même chantier, les contraintes de délai et d’espace et la spécificité de chaque projet, qui rend difficile l’organisation et renforce les aléas, les travailleurs du BTP sont soumis à un certain nombre de facteurs de risque physiques et chimiques.
À cet égard, la direction de l’animation, de la recherche, des études et des statistiques a publié pas moins de deux rapports, en décembre 2009 et en janvier 2010. Selon le premier rapport, en 2007, les salariés de la construction ont été les plus exposés aux accidents du travail : le nombre d’arrêts de travail dans le secteur est deux fois plus élevé que la moyenne nationale et un accident mortel sur quatre résulte d’une chute de hauteur. Le second rapport fait apparaître que l’état de santé du salarié est fortement lié à son parcours professionnel et que de mauvaises conditions de travail, comme une pénibilité ou des contraintes physiques, contribuent à altérer la santé tout au long de la vie.
Les travailleurs du bâtiment subissent une véritable surexploitation. L’adoption d’un tel amendement ne serait donc que justice !
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective du personnel ouvrier de l'industrie de fabrication des ciments du 2 février 1976.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Nous vous proposons que, par dérogation à l’alinéa 20 de l’article 1er du projet de loi, l’employeur prenne intégralement en charge la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective du personnel ouvrier de l’industrie de fabrication des ciments du 2 février 1976.
Cette industrie est pénible et affecte souvent gravement la situation sanitaire des employés, même si M. le ministre Michel Sapin nous a expliqué que l’ouvrier d’aujourd’hui n’était plus soumis aux mêmes risques que celui de 1976.
En effet, est-il un travail plus usant physiquement et plus risqué en matière sanitaire que celui qui consiste à manipuler des ciments constamment et durant des dizaines d’années ? Nous ne pouvons pas ignorer que ce métier est particulièrement traumatisant pour le corps. Que les stigmates soient visibles immédiatement ou après des dizaines d’années, ils sont souvent sévères, parfois handicapants.
Marqués dans leur chair, fréquemment victimes de blessures ou d’accidents, les travailleurs sont exposés à des risques que nous connaissons : ulcérations, infections de la peau, cancers beaucoup plus fréquents que dans le reste de la population. Pour ces salariés, qui travaillent avec leur corps, chaque année de travail pèse particulièrement lourd : plus les années passent, plus le simple fait de se lever et d’enfiler son bleu de travail est difficile.
En outre, ces conditions de travail s’accompagnent bien souvent d’une situation très précaire. Or, comme nous ne cessons de le répéter dans ce débat, la précarité sera aggravée si ce projet de loi est adopté dans sa rédaction actuelle ! Nous connaissons les formes de cette précarité. Dans ce secteur comme dans les autres, les contrats à durée indéterminée se font de plus en plus rares, remplacés par des contrats précaires, notamment des contrats intérimaires. Encore est-ce déjà beau dans ce milieu quand y ait un contrat, en particulier pour les travailleurs sans-papiers, dont le précédent gouvernement a encore renforcé la précarité, s’il cela était possible.
Un travail pénible, une grande précarité et des salaires souvent très bas… tous les ingrédients sont réunis pour une situation sanitaire très difficile, d’autant que la santé est l’un des premiers postes de dépense sacrifiés lorsque le salarié vit dans la précarité. Ces travailleurs ont une espérance de vie réduite par rapport aux autres, en raison de leur exposition à des matières dangereuses.
Il est du devoir de la Nation de porter assistance et secours aux salariés. Nous demandons simplement que soit reconnue la spécificité de toute une catégorie de salariés, qui ne peuvent pas se satisfaire d’une complémentaire santé financée seulement en partie par l’employeur, tout simplement parce qu’ils n’ont pas les moyens de financer l’autre partie.
Cet amendement, comme les précédents, n’est qu’un amendement de justice sociale. Il ne fait que rependre ce que, tous à gauche, nous avons toujours défendu : la protection sociale, arrachée de haute lutte par les salariés, et qui ne peut pas être découpée en tranches !
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 20
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective de la restauration rapide du 18 mars 1988.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement concerne les salariés de la restauration rapide, qui, comme vous le savez, sont bien souvent des jeunes. C’est donc encore une manière d’aborder la question de la situation sanitaire des jeunes, que nous avons déjà évoquée à plusieurs reprises aujourd’hui.
Si les emplois dans la restauration rapide sont bien souvent pourvus par des jeunes, étudiants voire lycéens, c’est parce qu’ils comportent une grande intensité et nécessitent une grande résistance physique, mais aussi parce qu’ils sont souvent très précaires.
L’employé d’une chaîne de restauration rapide, contrairement aux clichés qui entourent cette activité, fait souvent preuve d’une polyvalence réelle. Il doit supporter une cadence très élevée et être suffisamment endurant pour satisfaire les nombreux clients, notamment aux heures de pointe. En effet, le fait que les clients viennent pour la rapidité du service rend le travail extrêmement pressant.
Dans ce secteur, les horaires sont largement variables et il n’est pas rare, dans ces équipes, qui connaissent un turn-over très important, que les employés soient avisés des changements d’horaires la veille au soir pour le lendemain, ce qui n’est pas sans conséquences sur le rythme physiologique et la capacité à se reposer, alors que ces personnes occupent parfois d’autres petits boulots. Par ailleurs, un tel manque de prévisibilité complique une éventuelle vie de famille.
En outre, il faut bien mesurer que ces salariés restent debout pendant des durées prolongées et doivent souvent adopter des positions de travail inconfortables. Contrairement à des idées reçues, ils ont à porter des charges parfois lourdes et utilisent beaucoup leur force physique. C’est ainsi que, dans ces métiers, les blessures et même les troubles musculo-squelettiques sont beaucoup plus nombreux qu’on ne le croit : la pression est constante sur les genoux, les hanches, les bras, la nuque et le dos.
Fait peu connu, on estime qu’environ 20 % des employés du secteur de l’hôtellerie, de la restauration et des cafés souffrent de douleurs musculaires à la nuque, et un tiers d’entre eux de maux de dos ; ces proportions sont comparables à celles que l’on rencontre dans l’industrie et dans les mines, selon l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail.
Enfin, il faut se représenter que l’atmosphère de travail dans la restauration rapide se caractérise par des odeurs pénibles, de la chaleur et des nuisances sonores, qui contribuent de manière insidieuse à réduire les capacités auditives des salariés. Dans de très nombreux cas, les sols sont glissants, entraînant chutes et blessures.
Si les jeunes sont surreprésentés dans la restauration rapide, ceux qui sont un peu moins jeunes travaillent dans les mêmes conditions, et avec les mêmes risques, le plus souvent faute de pouvoir trouver un autre emploi. Ces salariés ont encore plus besoin du soutien de tous et de la solidarité d’entreprises que l’on nous vante tant. En l’espèce, il s’agit souvent des chaînes gagnant beaucoup d’argent en exploitant le travail le plus précaire.
Personne ne peut rester insensible aux dangers pour la santé et à la pénibilité qui caractérisent ces emplois. Il faut que les salariés relevant de la convention collective de la restauration rapide du 18 mars 1988 puissent voir leur complémentaire santé intégralement prise en charge par l’employeur ! C’est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces vingt-huit amendements ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le long voyage que nos collègues du groupe CRC nous ont offert au gré des différents corps de métier ne doit pas nous faire perdre de vue l’objet de notre débat. L’alinéa 20 de l’article 1er du projet de loi, qui dispose que l’employeur assure « au minimum la moitié du financement de cette couverture ».
M. Cardoux, auteur de l’amendement n° 512 rectifié, nous propose de supprimer les mots « au minimum ». Je lui rappelle que, dans les faits, les entreprises participent aujourd’hui en moyenne à hauteur de 56 % au financement de la complémentaire santé.
M. Jean-François Husson. C’est une moyenne !
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Les partenaires sociaux se sont mis d’accord sur une répartition par moitié ; ce n’est pas une distraction de leur part. Je vous confirme qu’il s’agit bien d’un minimum. D’ailleurs, je puis vous assurer qu’aucun signataire de l’accord, y compris dans le secteur patronal, n’a remis en cause la rédaction du projet de loi sur ce point : la part de 50 % est un minimum, l’entreprise pouvant donc aller au-delà.
Les autres amendements vont dans une direction opposée à celle de l’amendement de M. Cardoux, avec lequel ils sont irréconciliables. J’y vois un signe que le projet de loi dans sa rédaction actuelle, se situant à mi-chemin, est sans doute équilibré.
Nos collègues du groupe CRC, dans leurs amendements nos 15 à 42, proposent un financement intégral par l’employeur de la couverture complémentaire dans les entreprises de plus de 300 salariés et dans toutes les entreprises pour les salariés dont la rémunération est inférieure à 1,2 SMIC, ainsi que pour tous les salariés relevant des vingt-quatre conventions collectives qu’ils ont mentionnées.
Chers collègues du groupe CRC, vos amendements sont clairement contraires à l’équilibre trouvé par les partenaires sociaux, qui prévoit le financement par l’employeur de la moitié au moins de la couverture complémentaire. Je vous propose de nous en tenir à cet équilibre.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’ensemble des vingt-huit amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. La série d’amendements qui viennent d’être présentés vise différentes conventions collectives. Je suppose d'ailleurs que la nécessité de mettre en évidence l’ensemble des situations des salariés a conduit ses auteurs à choisir ces conventions à titre d’exemple, de manière peut-être aléatoire ; sinon, on comprendrait difficilement pourquoi, parmi toutes celles qui existent, certaines ont été citées et non d’autres… Cette absence d’exhaustivité nous amènerait du reste, si ces amendements étaient adoptés, à une situation quelque peu singulière.
En général, deux types d’arguments ont été invoqués : d'une part, ceux qui sont liés à la situation salariale, et, d'autre part, ceux qui sont relatifs au risque professionnel, c'est-à-dire aux conditions de travail et aux problèmes qu’elles induisent. Or, dans ce dernier cas, nous sommes sur un autre terrain : s'agissant des maladies professionnelles ou de la réparation des accidents du travail, le rôle des mutuelles est assez résiduel, puisqu’il ne concernerait, dans le droit commun, que la prise en compte des dépassements d’honoraires. Par conséquent, bien que la question soit légitime, il ne faut pas sortir du champ particulier du droit commun.
Pour le reste, M. le rapporteur l’a précisé, il s’agit bien d’un minimum de 50 %, ce qui signifie que des négociations sont possibles. C’est d’ailleurs ce qu’ont voulu les signataires de l’accord : fixer une base et permettre ensuite des discussions en fonction de la situation dans les entreprises. Naturellement, chacun ici souhaite que ce minimum soit un point de départ, qui permette d’avancer vers une couverture plus complète.
La ligne du Gouvernement est évidemment de respecter l’équilibre de l’accord et d’acter un progrès social tout de même considérable pour ceux qui, aujourd'hui, ne bénéficient encore d’aucune couverture complémentaire.
L’amendement n° 512 rectifié vise quant à lui à proposer une lecture plus restrictive de l’accord, puisque le minimum deviendrait un plafond.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote sur l'amendement n° 512 rectifié.
M. Jean-Noël Cardoux. Je suppose que, lors du vote, mon amendement sera bien distingué de ceux qui le suivent. J’ai d’ailleurs apprécié, monsieur le ministre, que vous ayez parlé pour ces derniers de « série d’amendements ». Pour notre part, nous sommes pour beaucoup plus modestes et nous n’en avons présenté qu’un seul.
Je le répète, il était quand même simple de transcrire l’ANI fidèlement, puisque la règle de répartition du financement, par moitiés égales, y était précisée explicitement. Il n’y a donc lieu ni à interprétations ni à tergiversations s’agissant de cette répartition paritaire.
Notre souci, au sein du groupe UMP, est tout simplement de ne pas charger les entreprises au-delà de ce qu’elles ont accepté lors de la négociation de l’ANI. En effet, les entreprises sont extrêmement vulnérables actuellement. Aussi, permettre de dépasser cette parité peut placer certains chefs d’entreprises dans des situations délicates vis-à-vis de leur personnel.
Pour ce qui concerne les autres amendements, je ne sais pas si je dois les qualifier d’inventaire à la Prévert ou de feuilleton à la Zola. Toutefois, compte tenu du nombre de professions qu’a fléchées le groupe CRC, de l’hôtellerie à la restauration en passant par la coiffure et les grandes industries, je me dis que si, par malheur, la Haute Assemblée suivait le raisonnement proposé, nous assisterions très rapidement au démantèlement de ce qui reste de l’industrie et de l’artisanat dans notre pays ! Ainsi, bien évidemment, le groupe UMP ne peut suivre nos collègues dans leurs propositions.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Je souhaite simplement reprendre le texte de l’accord national. En ce qui concerne la question dont nous débattons, celui-ci précise : « Le financement de cette couverture en frais de santé sera partagé par moitié entre salariés et employeurs ». Cette phrase ne comporte aucune incise. Il n'y a donc pas la moindre ambiguïté !
Vous évoquez une transcription fidèle, mais « fidèlement » veut dire « scrupuleusement, avec exactitude ». Je peux comprendre que vous souhaitiez aller au-delà de l’accord, mais dans ce cas, dites-le !
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Chers collègues, vous parlez d’inventaire à la Prévert, mais je crois qu’il s’agit plutôt d’un retour à la réalité du travail dans notre pays, qui n’est pas aussi simple que vous le pensez.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Voilà !
M. Dominique Watrin. Surtout, nous avons décrit, à travers des situations concrètes, l’amplitude des problèmes de santé qui se posent encore aujourd’hui au travail et qui expliquent pourquoi nous intervenons fortement sur cet article 1er.
Il est vrai que l’accord du 11 janvier dernier avait fixé des règles visant notamment à partager à égalité entre l’employeur et le salarié, cela a été dit, le financement de la protection complémentaire collective.
La rédaction de l’article qui est proposée dans ce projet de loi conduit à ce que l’employeur assure au minimum la moitié du financement. Toutefois, monsieur Cardoux, votre amendement tend à verrouiller cette règle en faisant en sorte que le montant de la cotisation du salarié soit de 50 %.
Je vous pose la question mes chers collègues : comment feront les salariés sous-payés des trop nombreuses branches professionnelles que nous venons d’évoquer, notamment celles dans lesquelles les minimas conventionnels courent régulièrement après le SMIC, pour faire face au paiement de cotisations à cette hauteur ? Et cette question se posera avec plus d’acuité encore pour le paiement de la couverture complémentaire des enfants ou des ayants droit de façon plus générale.
Je voudrais simplement vous rappeler ici la moyenne des participations au financement de la complémentaire santé. Les employeurs financent actuellement à 54 % en moyenne les complémentaires collectives obligatoires.
Chers collègues de la droite, je crois comprendre qu’il s’agit pour vous d’éviter que l’extension de la complémentaire santé ne soit une charge insupportable pour les entreprises.
Je me permets quand même de vous rappeler un point qui me paraît essentiel : le bon état sanitaire des salariés est l’un des facteurs les plus déterminants de la productivité. La France est l’un des pays les plus productifs du monde et l’un de ceux qui connaissent la plus forte amélioration de la qualité de la production dans l’entreprise. Cela signifie que la bonne santé de ces salariés est productrice de ressources pour l’entreprise.
Cessons de voir ces financements toujours comme des charges. Dans cette affaire, il y a une forme d’inélégance, pour ne pas dire autre chose, à ratiociner ainsi sur quelques euros de plus ou de moins à consacrer à l’abondement de la cotisation complémentaire santé.
Des salariés mieux soignés, c’est probablement moins d’absentéisme et moins d’accidents du travail. Et je pourrais aller encore plus loin et souligner que ce sont les profits de l’entreprise qui risquent fort de bénéficier de ces mesures.
La santé a peut-être un coût, mais elle a aussi un prix, tout à fait inestimable, et je ne crois vraiment pas bienvenu d’en rabattre sur la qualité des prestations servies.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je souhaitais juste préciser à M. Cardoux pourquoi je ne voterai pas son amendement.
Quand nous avons rencontré les représentants des artisans, qui tenaient beaucoup au principe d’une complémentaire pour tous, ils nous ont indiqué que, dans leur secteur, il était compliqué de recruter et que les salaires n’étaient pas élevés.
Pourquoi, alors qu’il y a un chômage important, le secteur de l’artisanat, des métiers de bouche et des boulangers peine-t-il à recruter ? Cette question mériterait peut-être d’être étudiée, monsieur le ministre. L’une des raisons de cette situation tient peut-être aux salaires insuffisants et aux conditions de travail…
Si on ne considère plus cette répartition paritaire comme un minimum, on porte préjudice, comme l’a dit mon collègue du groupe CRC, au salarié qui n’a déjà pas assez. Monsieur Cardoux, votre amendement tendrait donc à infliger au salarié une charge supplémentaire, alors même qu’il s’agit d’un secteur où la demande de travail baisse.
M. Jean-Noël Cardoux. Cela existe déjà chez les boulangers !
M. Jean Desessard. Je comprends bien que vous souhaitez laisser aux entreprises la liberté de le faire, mais, comme on dit souvent, lorsqu’il y a liberté pour le patron et liberté pour le salarié, c’est plutôt le patron qui décide.
Voilà pourquoi je ne voterai pas votre amendement.
M. Jean-Noël Cardoux. C’est le texte de l’accord !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 178 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 309 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 17.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 179 :
Nombre de votants | 209 |
Nombre de suffrages exprimés | 195 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 98 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 175 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote sur l’amendement n° 19.
M. Christian Favier. Le MEDEF a entrepris une bataille sans précédent contre les acquis des salariés. Il est navrant que ce gouvernement soit associé, au travers de ce projet de loi, à une régression historique du droit du travail. Si certains aspects de ce texte vont dans le bon sens, la majorité de ses dispositions sont a contrario une aubaine pour le patronat, qui réussirait, si l’accord était transcrit dans la loi, le coup inespéré de détricoter en toute légitimité le droit du travail.
Dès son article 1er, le projet de loi donne le ton en faisant planer une menace sur les garanties collectives nationales en tant que socle applicable à chaque salarié. Son objet est de favoriser les accords d’entreprise, voire le gré à gré, en oubliant l’inégalité due au lien de subordination du salarié vis-à-vis de son employeur.
Présentée comme une avancée sociale, la notion de généralisation de la couverture complémentaire santé pose bien des questions, nous avons eu l’occasion d’en débattre, quant au champ qu’elle recouvre. Elle est en effet directement liée à notre système de protection sociale et au niveau des prestations, qui s’amenuise au fil du temps, à contre-courant des orientations originelles de la sécurité sociale, qui visait à garantir la prise en charge des frais de santé par l’assurance maladie obligatoire, afin d’assurer une égalité de traitement entre tous nos concitoyens.
Nous sommes bien loin d’une telle situation, à la suite des renoncements successifs, des déremboursements des forfaits hospitaliers, des restrictions de prise en charge des actes médicaux, qui ont contraint les familles et les salariés à se protéger mieux en ayant recours, quand leur situation financière le permettait, à une complémentaire santé.
Tous les salariés et toutes les familles ne peuvent pourtant y souscrire, compte tenu des difficultés de plus en plus grandes qu’ils rencontrent pour subvenir à leurs besoins. Il n’est pas anodin de constater que plus de 30 % des Français renoncent à se soigner faute de moyens. Dès lors, plutôt que d’inciter, voire d’obliger, nos concitoyens à financer une complémentaire santé – assurance ou mutuelle –, il faudrait d’abord renforcer l’assurance maladie obligatoire, ce qui serait un signal fort envoyé principalement aux foyers modestes. Par les temps qui courent, c’est un tel geste qui est attendu de la part de la gauche, plutôt que des renoncements permanents face au MEDEF.
Dans le cas de l’industrie textile, dont les accords de branche prévoient la prise en charge à 50 % au moins de la couverture santé par l’employeur, quelle avancée l’adoption de ce texte permettra-t-il ? Aucune ! Pourtant, il convient de tenir compte de la pénibilité du travail, désormais reconnue, dans ce secteur d’activité. Car le bruit dans les ateliers, certaines postures, les températures mal contrôlées, le port de charge dans certains domaines de l’activité, le travail posté, sont autant d’éléments objectifs de pénibilité et, surtout, de facteurs de risques.
C’est pourquoi la prise en charge d’au moins 50 % de la protection santé par l’employeur nous semble, pour cette catégorie de salariés, totalement insuffisante, compte tenu des contreparties très lourdes qui leur sont demandées. La seule avancée réelle que ce texte pourrait apporter aux salariés de cette branche serait le financement intégral de la couverture santé par l’employeur, ce qui les déchargerait de leur part restante, eu égard, précisément, à la reconnaissance de la pénibilité de leur travail.
C’est pourquoi les parlementaires du groupe CRC vous demandent, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, qui vise l’ouverture concrète d’un droit supplémentaire et équitable pour les salariés de la branche textile.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l'amendement n° 20. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. Jean Desessard. Au cas où nous n’aurions pas bien compris !
Mme Éliane Assassi. Oui, c’est important !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Aujourd’hui, l’accord interprofessionnel sur la sécurisation de l’emploi, dont ce projet de loi est la traduction, est dépeint comme un accord gagnant-gagnant. Un examen attentif montre que la réalité est moins évidente.
En effet, les seuls points positifs pour les salariés seraient la généralisation de la couverture complémentaire des frais de santé, ainsi que la création de droits rechargeables à l’assurance chômage et d’un compte personnel de formation. Nous reviendrons ultérieurement sur ces deux derniers points.
Pour ce qui concerne la couverture complémentaire des frais de santé, si l’on peut a priori se féliciter du principe d’une généralisation des contrats collectifs, qui, à prestations égales, sont moins coûteux pour les salariés que des contrats individuels, puisque l’employeur participe à leur financement, on ne peut que regretter le manque d’ambition de l’accord interprofessionnel.
Ma première remarque portera sur les délais nécessaires pour conclure un accord. En vertu du calendrier prévu par les signataires, il faudra attendre parfois jusqu’à trois ans pour bénéficier de ce droit.
Par ailleurs, le panier de soins a été établi sur une base minimaliste très éloignée de ce que couvrent généralement les contrats collectifs déjà en cours : remboursement sur la base des tarifs conventionnels pour les consultations, les actes techniques, les médicaments et le forfait hospitalier, prise en charge des prothèses dentaires à hauteur de 125 % de la base de remboursement de la sécurité sociale, soit actuellement un peu moins de 94 euros, et un forfait optique de 100 euros par an.
Au vu de ces chiffres, nous comprenons aisément que les remboursements seront très loin de couvrir la dépense réelle. Par exemple, pour une prothèse dentaire facturée 900 euros, le remboursement total de la sécurité sociale et de la complémentaire de santé, avec l’application de ce panier minimal, ne dépassera pas 169 euros. Quand on connaît les salaires dans les métiers de la métallurgie, on sait que le reste à charge sera difficilement supportable.
Ensuite, il faut noter le caractère obligatoire de ces couvertures complémentaires, qui obligera certains salariés à abandonner le contrat individuel qu’ils avaient librement choisi, voire à cumuler deux contrats, puisque les conjoints et les enfants ne seront pas obligatoirement pris en charge.
La conséquence directe sera une baisse de leur pouvoir d’achat, ainsi qu’une diminution de leur couverture sociale globale. Le danger est grand qu’ils reportent leurs soins essentiels, comme c’est déjà trop souvent le cas. Attention donc à la baisse sensible de l’état de santé général de la population !
Un autre point de désaccord concerne la discrimination qui s’ensuivra dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Ces employés risquent en effet de ne pas être couverts par un accord collectif de santé, car il faudra d’abord obtenir un accord de branche étendu, qui n’est nullement garanti. Une telle situation pourra devenir, dans les mains des employeurs, un moyen de chantage contre les représentants des personnels : si vous n’acceptez pas l’accord de branche que nous vous présentons, vous n’aurez pas de prise en charge de la complémentaire santé ! Dans la réalité, ce nouveau droit bénéficiera directement au patronat des assurances, au détriment des mutuelles de santé.
Notons également que cet accord exclut la prévoyance, renvoyée à des négociations qui ne s’ouvriront qu’à l’issue de la généralisation de la couverture en frais de santé.
En fait, et c’est là probablement le point principal, la mise en place et l’extension des couvertures complémentaires se fait le plus souvent au détriment de la sécurité sociale. Les remboursements de base deviennent ridicules, il suffit de se référer à ce qui se passe pour l’optique et les soins dentaires.
Chaque annonce d’un déremboursement de médicament par la sécurité sociale s’accompagne d’un transfert de charges équivalent sur les complémentaires de santé, qui se livrent une guerre sans merci pour capter des assurés et utilisent tous les artifices du marketing pour s’attirer la sympathie de ceux qui deviennent ainsi des consommateurs.
Aujourd’hui, il est nécessaire de donner toute sa place au débat sur la santé : c’est un défi qui est actuellement loin d’être relevé ! Nous avons la possibilité, au travers de l’adoption de cet amendement, de rééquilibrer ce texte, en exigeant des employeurs du secteur de la métallurgie qu’ils financent intégralement la couverture complémentaire de leurs salariés.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l'amendement n° 22.
Mme Éliane Assassi. Avant de défendre cet amendement, je ne peux pas m’empêcher de souligner que nous vivons ce soir un grand moment du travail parlementaire.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Ah oui !
M. Jean Desessard. Un long moment aussi !
Mme Éliane Assassi. Peut-être long, mon cher collègue, mais assez surprenant quand même, puisque nous travaillons sur un texte…
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Historique !
Mme Éliane Assassi. Vous me l’enlevez de la bouche, monsieur le rapporteur ! Un texte historique, donc, qui appelle depuis tout à l’heure tous les superlatifs.
Pour que les citoyennes et les citoyens soient informés de la façon dont le Sénat débat de leur avenir, il faut relever que sont présents ce soir dans l’hémicycle trois collègues de l’UMP, dont le président de séance, un collègue du groupe écologiste, un collègue de l’UDI-UC, onze collègues du groupe socialiste, dont deux rapporteurs, un membre du RDSE et dix membres du groupe CRC, dont la présidente de la commission des affaires sociales. Je pense que le monde du travail appréciera et que le MEDEF savourera !
Revenant sur cet amendement n° 22, je souligne que la question sous-jacente qui est posée est relativement simple, c’est la généralisation des contrats complémentaires santé. Mais est-ce vraiment une avancée sociale pour les salariés, et plus précisément pour ceux qui relèvent de la convention collective de la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage à sec, pressing et teinturerie du 17 novembre 1997, qui sont visés dans cet amendement ?
À première vue, instaurer l’obligation d’une complémentaire santé pour les salariés pris en charge pour moitié par les employeurs semble effectivement une mesure devant donner satisfaction aux salariés. C’est d’ailleurs sur cette avancée que se sont appuyés les signataires de l’accord pour le présenter comme un accord donnant-donnant, voire gagnant-gagnant.
Malheureusement, sur le terrain, la réalité est tout autre.
Tout d’abord, toutes les entreprises de tous les secteurs d’activité ne seront pas concernées, tant s’en faut. Les entreprises de petite taille, non soumises aux négociations obligatoires et non couvertes par un accord de branche, seront exclues du périmètre d’application et n’auront donc aucune obligation de mettre en place les complémentaires santé. Or, dans le secteur d’activité qui nous intéresse, la convention collective de la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage à sec, pressing et teinturerie, la petite entreprise est la norme.
Évidemment, il existe de grandes entreprises qui œuvrent auprès des établissements de santé, par exemple, que ce soit pour la location ou l’entretien du linge, mais, là encore, il n’est pas rare que ces entreprises soient divisées en établissements différents, afin de rester en deçà de l’effectif de cinquante salariés et ainsi contourner certaines obligations du code du travail.
M. Jean Desessard. Eh oui !
Mme Éliane Assassi. Or il est facile aujourd'hui de mesurer que des accords sur les complémentaires santé sont déjà souvent en place dans les grandes entreprises. Les laissés-pour-compte sont les TPE, qui ne seront pas soumises à cette obligation, comme cela vient d’être dit.
Nous pouvons donc, à juste titre, nous poser la question de la portée de cette « avancée sociale ».
Un autre point qui nous interpelle est le choix de la mutuelle. Le patronat se frotte les mains aujourd'hui – les courriers reçus dans les permanences d’élus le confirment – car il va capter et récupérer tous ces adhérents au détriment des mutuelles de santé.
En effet, l’employeur aura le choix de l’assureur, et les accords déjà en place nous montrent que, le plus souvent, le choix se porte sur les sociétés d’assurance. Alors qu’elles sont porteuses de valeurs de solidarité, les mutuelles seront ainsi écartées.
M. Jean-François Husson. C’est faux !
Mme Éliane Assassi. Certes, les organisations syndicales pourront demander que les sociétés choisies soient respectueuses d’une certaine éthique, mais cela fait rarement bon ménage avec la concurrence libre et non faussée.
Il est à noter d’ailleurs que les petites sociétés d’assurance s’inquiètent, elles aussi, de la tournure que va prendre ce sujet et elles ont bien conscience qu’elles ne résisteront pas longtemps devant les rouleaux compresseurs que seront les grandes sociétés telles Allianz, Axa, etc. (M. Jean-François Husson s’exclame.)
Une autre question qui mérite d’être soulevée est l’exclusion de ce dispositif des quinze millions de retraités, des trois millions de chômeurs et des cinq millions d’agents des fonctions publiques.
C’est donc également l’avenir des mutuelles qui est en jeu. Elles sont aujourd'hui, par cet accord, ramenées au rang de simples prestataires de service parmi d’autres. Or chaque famille d’organismes complémentaires – mutuelles, institutions de prévoyance et sociétés d’assurance – a sa propre légitimité, sa propre identité.
Avant d’être intégré dans le présent projet de loi, ce sujet aurait, selon nous, mérité un débat préalable avec tous les acteurs ; on peut regretter que cela n’ait pas été le cas.
Cet accord fait également l’impasse sur ce que l’on appelle généralement les « gros risques », qui relèvent de garanties de prévoyance comme le décès, l’incapacité, l’invalidité.
Il n’est pas dit un mot sur la dépendance, qui devrait être au cœur de ce projet de loi. Or une partie non négligeable de ces risques peut être la conséquence directe des conditions de travail de ces personnels.
En conclusion, l’accord présenté aujourd'hui est véritablement un accord au rabais, qui ne peut être validé en l’état ; c’est un accord gagnant-gagnant pour le patronat, mais certainement pas pour les salariés !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 23.
Mme Laurence Cohen. L’enchaînement des amendements peut paraître fastidieux, mais le groupe CRC considère que, au travers de l’exposé des motifs par lequel nous justifions chacun de nos amendements, nous faisons entrer dans l’hémicycle une partie de la vie des gens.
Il est important que, au Sénat, on puisse entendre que, en France, aujourd’hui – une France en crise politique, sociale et économique – des gens souffrent, et que le présent accord, qui devrait normalement servir à modifier, à améliorer les choses, va finalement, selon nous, aggraver les conditions de vie de milliers de salariés.
C’est la raison pour laquelle, au groupe CRC, nous sommes opiniâtres et nous défendons des amendements. Nous pensons, peut-être naïvement, que si nous arrivons ainsi à faire évoluer dans un sens positif, même petitement, ce projet de loi qui est mauvais, nos efforts n’auront pas été vains.
En effet, ce texte affiche la sécurisation des parcours, mais, comme nous l’avons vu tout au long de ces débats, il favorisera au contraire la précarité et la flexibilité.
Ensemble, à gauche, on aurait pu en tout cas penser que serait adoptée une avancée extraordinaire, à savoir la prise en charge à 100 % par la sécurité sociale de tous les frais de santé, y compris ceux qui sont très mal remboursés, tels que les frais dentaires, les frais de matériels optiques et auditifs.
Tel n’est pas le cas ; le choix qui est fait est diamétralement opposé, et c’est pourquoi nous continuons à défendre nos amendements, qui sont importants si l’on veut sortir de cette spirale infernale.
Au-delà de l’atteinte grave aux principes de la sécurité sociale par une privatisation, en quelque sorte, de cette protection sociale, cet accord, contrairement à ce qui nous a été dit, n’ouvre pas vraiment de droits nouveaux. C’est un peu un dialogue de sourds, mais il est vrai que les droits nouveaux ne s’appliqueront qu’à une infime minorité et que la participation fixée pour l’employeur pourra être inférieure à ce qui se pratique en moyenne aujourd’hui.
C’est une mesure inégalitaire, puisque la prise en charge sera différente en fonction des moyens des branches d’activité ou des entreprises. C’est ce que nous avons voulu montrer, mes chers collègues, en vous dépeignant un certain nombre de professions.
C’est une atteinte au pouvoir d’achat des salariés, qui n’auront d’autre choix qu’une contribution qu’ils n’auront pas demandée, pour un panier de soins minimal, afin de coûter moins cher aux employeurs, avec des prestations inférieures à la prise en charge actuelle de la CMU-C.
Les salariés n’auront aucune garantie de maintien de leur rémunération après prélèvement de la part salariale, alors que les employeurs percevront, eux, de l’État l’équivalent de deux milliards d’euros supplémentaires pour la conclusion de ces contrats obligatoires.
Compte tenu, mes chers collègues, de l’importance des sommes d’argent public versées aux entreprises au travers des exonérations sociales et fiscales, auxquelles viennent s’ajouter 20 milliards d’euros au titre du crédit d’impôt compétitivité emploi, nous considérons véritablement que les entreprises devraient prendre en charge la totalité des complémentaires.
C’est la raison pour laquelle nous y insistons et nous y insisterons encore au moins tout au long de la soirée.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° 24.
Mme Isabelle Pasquet. Je vais poursuivre nos explications concernant les conventions collectives.
Le monde agricole traverse une crise économique et sociale qui pèse lourdement sur les travailleurs du secteur et qui hypothèque gravement la mise en œuvre d’une agriculture respectueuse des hommes et des milieux et garantissant la sécurité alimentaire.
Des paysans en nombre croissant connaissent des situations de précarité et de désespoir et voient leurs conditions de travail, ainsi que la vie de leurs familles, se détériorer.
Il importe aussi de rendre les métiers de l’agriculture plus attractifs, notamment auprès des jeunes. Vous n’ignorez pas que ce secteur souffre d’un manque de main-d’œuvre qualifiée et de cette idée reçue que les métiers agricoles sont moins respectables.
Depuis 1945, le monde agricole en France a vu la diminution considérable de la petite paysannerie de subsistance et l’avènement des fermes modernes gérées par les paysans- agriculteurs, cultivateurs, éleveurs que l’administration française nomme les exploitants agricoles.
En à peine plus d’un demi-siècle, la population française a connu de profondes mutations économiques, démographiques, sociologiques. C’est particulièrement vrai dans le monde agricole : aujourd’hui, il n’y a guère plus d’un million d’exploitants agricoles en France, représentant à peine 4 % de la population active, alors que les actifs agricoles étaient dix millions en 1945.
Aucun autre secteur économique n’a connu une régression d’emplois aussi massive. Celle-ci est directement liée à la révolution verte, à la mécanisation et à l’emploi d’engrais de synthèse dans l’agriculture, qui ont conduit à une hausse importante de la productivité et à une concentration des terres au sein de quelques grandes fermes et exploitations agricoles.
Le danger de la volatilité des cours est aussi une grande difficulté pour le monde agricole en général et pour les coopératives en particulier. Non seulement les prix des matières premières agricoles subissent des variations de grande ampleur d’une saison à l’autre, mais, de plus, les cours sont d’une grande « volatilité » et oscillent fortement dans des périodes brèves. C’est un casse-tête pour des coopératives qui doivent gérer et vendre des stocks.
Il faut aussi tenir compte de la pénibilité de ce travail, qui est reconnue, je le disais déjà tout à l’heure en défendant cet amendement, sur la base de nombreux critères : la position normale de travail, le risque de maladie, les tâches particulièrement salissantes, pénibles, dangereuses ou insalubres.
Il y a là matière à décider d’une prise en compte financière intégrale de la complémentaire santé des salariés par l’employeur, qui, par la nature même des emplois et des lieux dans lesquels s’exercent ces emplois, connaît les risques auxquels s’exposent les personnels.
Aussi, monsieur le président, mes chers collègues, par cet amendement, nous souhaitons, sinon rendre ce dispositif efficace pour les salariés dans leur face à face avec leurs employeurs, au moins nous rapprocher, en y incluant des éléments de justice sociale, de l’esprit gagnant-gagnant, tant vanté par les signataires de cet accord.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Je voudrais profiter de cette explication de vote pour donner quelques éléments sur la nécessité d’une concurrence bien organisée dans le monde agricole, comme elle existait auparavant, par exemple au travers de la loi de 1966 instituant l’obligation d’assurance des personnes non salariées contre les accidents et les maladies professionnelles dans l’agriculture.
Lorsque, par cette loi, a été organisé, entre tous les prestataires – sociétés d’assurance, mutuelles… –, le système de couverture des risques, il en est résulté une offre diverse et des coûts très faibles pour les exploitants agricoles. Or le législateur a décidé, pour je ne sais quelle raison, de faire entrer tous ces dispositifs dans un système assurantiel unique, sous l’autorité de l’État. Globalement, le coût moyen de la cotisation a connu une inflation, puisqu’il a au minimum triplé, voire quintuplé.
Monsieur le ministre, même si nous n’aborderons certainement pas cette question ce soir, mais plutôt demain, je tiens à dire qu’il est nécessaire de laisser ouverte la concurrence entre les intermédiaires, quels que soient leur forme et leur statut – institutions de prévoyance, mutuelles, avec les différents dispositifs du code de la mutualité auquel elles peuvent être rattachées, et sociétés d’assurance.
Chère collègue, puisque vous avez également évoqué la question de la santé, sachez que les salariés des professions agricoles et des industries agro-alimentaires sont en général plutôt moins malades que ceux du régime général. C'est la raison pour laquelle, là aussi, à niveau égal de remboursement et de prestations, leurs cotisations sont inférieures.
Il en va de même pour la prévoyance, de nombreux métiers du monde agricole n’étant pas, contrairement à ce que vous avez dit, très exposés, mis à part les salariés travaillant notamment dans les exploitations agricoles. Dans ces cas, les salariés courent un risque, qui est aussi le plus élevé, celui de l’invalidité, couvert par la prévoyance et non par l’assurance santé.
Je tenais à le dire, car je suis tout de même assez surpris d’entendre affirmer depuis maintenant plusieurs heures que ce monde est proche de la fin. Même si je sais bien que nous connaissons des difficultés et que nous traversons une crise, il faut, me semble-t-il, regarder la situation avec lucidité et optimisme.
Offrir aux salariés, qui ont des revenus plutôt faibles, la chance d’avoir une complémentaire santé groupe qui serait obligatoire représente de toute façon un avantage, dès lors que l’entreprise participe au moins à hauteur de 50 %. Par ailleurs, la part de la cotisation de mutuelle payée par le salarié est également défiscalisée. Mes chers collègues, essayons de travailler utilement ensemble et gagnons du temps pour faire avancer le schmilblick !
M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote sur l'amendement n° 25.
M. Christian Favier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais commencer par m’associer complètement aux propos de ma collègue Éliane Assassi quant au triste spectacle que représente l’absence quasi-généralisée des élus de l’opposition ce soir dans notre assemblée sur un débat d’une telle importance. Il s’agit là, évidemment, d’un acte de mépris à l’égard du monde salarié qui ne me surprend pas venant de la droite. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-François Humbert. Cessez les agressions !
M. Christian Favier. Sans doute nombre d’entre nos collègues de l’opposition sont-ils plus occupés à préparer leurs déclarations de patrimoine qu’à venir travailler ici sur un projet comme celui-ci ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-François Husson. Vous n’êtes pas les mieux placés pour donner des leçons sur ce sujet !
Mme Éliane Assassi. Sur les questions de patrimoine, si !
M. le président. Mes chers collègues, je vous demande de vous en tenir au sujet qui nous occupe.
M. Jean Desessard. Le patrimoine ? (Sourires.)
M. Christian Favier. Nous vous proposons, avec cet amendement, de ne pas nous en remettre à des négociations de branche pour couvrir à 100 % le régime complémentaire de la complémentaire santé des assurés relevant de la convention collective des grands magasins et des magasins populaires.
Nous souhaitons en effet donner force de loi au financement intégral par l’employeur de la couverture complémentaire des salariés de cette branche, et ce pour diverses raisons.
Je pense notamment à la réalité des activités des personnels de cette branche et à leurs conditions de travail précaires : flexibilité, temps partiel, contraintes de travail lorsque la tâche est répétitive ou physiquement difficile, pression du chiffre, exigence de polyvalence.
On le sait, ces personnels sont soumis au quotidien à des contraintes très particulières qui exigent de leur part un investissement individuel continu. Les métiers du commerce et de l’habillement évoluent en permanence, notamment avec le développement de nouvelles technologies – gestion des stocks, informatique, commerce en ligne –, mais aussi avec les mutations des modes de consommation.
La particularité de ces travailleurs tient au fait qu’ils cumulent différentes formes de pénibilité : leur travail est physiquement difficile ; ils sont confrontés à des comportements parfois agressifs de la part de certains clients ; ils sont en permanence sous pression, en particulier de leur employeur.
Par conséquent, ils souffrent de nombreuses douleurs physiques et de pathologies, telles que les troubles musculo-squelettiques, voire, quand la pression est trop forte, de troubles psychologiques, comme des dépressions.
À la pénibilité pathologique, s’ajoute la répétitivité des tâches, en particulier pour les caissières, dont le travail se rapproche, dans une certaine mesure, de celui des travailleurs à la chaîne.
Les travailleurs se plaignent régulièrement de souffrir de problèmes de santé récurrents. Mis à part la fatigue, ils évoquant des douleurs multiples au niveau des poignets, des épaules, du dos et de la nuque, qui mènent régulièrement à l’apparition de tendinites.
Ils sont également confrontés à des formes de pénibilité temporelle. Leur vitesse de pointage est généralement chronométrée. Ce contrôle permanent les pousse à accélérer au maximum.
Par ailleurs, difficultés supplémentaires, leurs horaires fluctuent énormément et ils doivent régulièrement travailler le samedi, parfois même le dimanche. Ils sont engagés en général sur un contrat de 18 heures. Quand l’employeur a besoin de personnel supplémentaire, ce qui est fréquemment le cas, il leur demande de venir plus souvent. Étant en CDD et ayant un temps partiel, la plupart d’entre eux n’auront d’autre choix que d’accepter et de se plier aux injonctions de leur employeur.
Dès lors, le temps partiel, qui, a priori, devrait permettre de mieux concilier la vie privée et la vie professionnelle, devient plutôt contraint et pénalisant, car les travailleurs doivent véritablement s’adapter à une seule exigence : le temps de l’entreprise.
Dans cette branche, il y a 89 % de contrats à durée indéterminée et 32 % de salariés à temps partiel. Il y a là, me semble-t-il, matière à décider d’une prise en compte financière intégrale de la complémentaire santé des salariés par l’employeur.
Ainsi, par cet amendement, nous souhaitons sinon rendre ce dispositif efficace pour les salariés dans leur face à face avec leurs employeurs, au moins nous rapprocher, en y incluant des éléments de justice sociale, de l’esprit gagnant-gagnant vanté par le Gouvernement et les organisations syndicales signataires.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 180 :
Nombre de votants | 175 |
Nombre de suffrages exprimés | 161 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 81 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 141 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l'amendement n° 26.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaitais revenir à l’occasion de cette explication de vote sur quelques raisons justifiant la nécessité d’un financement intégral par l’employeur de la couverture complémentaire des salariés de l’hospitalisation privée.
La première raison tient au caractère même des métiers exercés par les professionnels de santé et par celles et ceux qui apportent par leur activité leur concours au fonctionnement des structures d’hospitalisation privée.
À l’évidence, l’exposition de ces personnels à de multiples risques sanitaires n’est pas à démontrer. Elle l’est d’autant moins que les conditions d’exercice de ces professions ne cessent de se détériorer, tant la gestion comptable de notre système de soins a fini par prendre le pas sur toute autre considération.
L’impossibilité constante et incontestable pour ces personnels de prendre librement leurs journées de repos, que ce soit dans le cadre des congés payés ou dans celui de l’aménagement et la réduction du temps de travail depuis les lois Aubry, renforce significativement les facteurs de risques en ajoutant la fatigue aux risques pathogènes.
Il y a là matière à décider d’une prise en compte financière intégrale de la complémentaire santé des salariés par l’employeur. En effet, par la nature même des emplois et des lieux dans lesquels ils sont exercés, l’employeur connaît les risques auxquels sont exposés les personnels, et cela quelles que soient par ailleurs sa vigilance et son implication dans la prise en compte des questions d’hygiène et de sécurité au sein de son établissement.
La seconde raison tient à la précarité de plus en plus grande des salariés de ce secteur. Nous savons bien que cette précarité n’est pas une invention quand se multiplient les réorganisations de services, opérées sur fond de rentabilité, les fusions-acquisitions au nom d’un actionnariat déconnecté des besoins territoriaux en matière de soins, les concentrations et les fermetures pures et simples d’établissements sous l’égide des agences régionales de santé, dont la mission est très clairement l’apurement, à n’importe quel prix, des comptes de la sécurité sociale.
Je crois donc utile que ces salariés puissent au moins bénéficier d’une prise en charge intégrale par leurs employeurs de leur couverture complémentaire, y compris en termes de portabilité, pour faire face à la maladie pendant le temps de transition précédant le retour à l’emploi, dans l’hypothèse d’une rupture de contrat de travail.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° 29. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme Isabelle Pasquet. Cette explication de vote est très importante, mes chers collègues, car l’industrie pharmaceutique est le secteur économique qui regroupe les activités de recherche, de fabrication et de commercialisation des médicaments pour la médecine humaine ou vétérinaire. C’est l’une des industries les plus rentables et importantes économiquement au monde.
Comme vous le savez, cette activité est exercée par les laboratoires pharmaceutiques et les sociétés de biotechnologie.
Si la droite s'est pleinement occupée, ces dernières années, de remplir les caisses des laboratoires pharmaceutiques, comme l'a démontré le rapport de la commission d'enquête présidée par notre ancien collègue François Autain, nous souhaitons, quant à nous, nous occuper des travailleurs du secteur, surtout au vu du contexte économique.
En effet, la casse industrielle bat son plein dans notre pays et l’industrie pharmaceutique n'est pas en reste. On peut même dire que l'industrie pharmaceutique est l'une des branches professionnelles qui, ces dernières années, a détruit le plus d'emplois. Qu’il s’agisse de la production, de la recherche, des métiers de la promotion, du tertiaire ou de la logistique, aucun métier de cette branche n'a été épargné.
Toutefois, pour ceux qui ont la chance de conserver leur emploi, les conditions de travail sont particulièrement difficiles. Je ne parlerai pas des risques évidents que présente la manipulation de produits chimiques. En revanche, un aspect des conditions de travail des salariés du secteur pharmaceutique est peu connu : le bruit.
En effet, dans les installations de production pharmaceutique, les équipements et les procédés utilisés émettent des bruits perturbants. En outre, les surfaces sont dures et lisses, de sorte que le son rebondit sur elles et se diffuse dans la pièce. Or le son affecte les travailleurs de nombreuses manières. Cette perturbation sonore est source de fatigue, de stress et de problèmes de communication. Elle a des répercussions non seulement sur la productivité et sur la sécurité, mais aussi sur la santé des travailleurs.
Les absences pour maladie et une rotation importante du personnel sont des conséquences objectives de ces conditions de travail dégradées.
C'est pourquoi, compte tenu des éléments dont je viens de vous faire part, le groupe CRC votera cet amendement, qui tend à mettre à la charge de l'employeur le financement de la couverture complémentaire pour ces salariés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 181 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 30.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement est très important ; c’est pourquoi je tiens à le justifier. Il vise, en effet, une meilleure prise en charge des pathologies liées à l'activité du secteur de l'habillement.
Les employeurs ont en effet le devoir et l'obligation de protéger leurs salariés. En finançant intégralement les frais relatifs à leur couverture complémentaire, ils enverront un signal fort à ces derniers. Ils leur permettront de bénéficier d’un suivi médical qu'ils peuvent avoir négligé – je pense à ceux qui sont les moins rémunérés –, en renonçant aux soins, comme de nombreux salariés le font déjà aujourd'hui.
La prévention médicale devrait être une priorité, ce qui passe notamment par le financement intégral de la couverture complémentaire pour les salariés de certaines branches particulièrement exposées, comme c'est le cas dans les industries de l'habillement.
En effet, cet amendement vise à prendre en compte la pénibilité des conditions de travail dans les industries de l'habillement – cela a été plusieurs fois répété et je ne m’étendrai donc pas sur ce point. Une priorité doit être accordée à une meilleure prise en charge des pathologies liées aux conditions de travail difficiles.
La bonne santé des salariés est profitable à tous, y compris aux employeurs. En effet, en assurant une couverture totale de santé aux salariés de ce secteur, les employeurs leur permettront un meilleur accès aux soins ainsi qu’une meilleure prévention des maladies musculo-squelettiques et des pathologies liées au stress en particulier.
Par ailleurs, ce suivi médical régulier permettrait d'améliorer les conditions de travail pour ces salariés qui bénéficieraient ainsi d'une meilleure prévention et d'une prise en charge au plus tôt des pathologies les plus graves, ce qui diminuerait d'autant le taux d'absentéisme.
Il est donc de l'intérêt de tous de financer intégralement cette couverture et de permettre ainsi un accord gagnant-gagnant.
Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que le secteur textile emploie majoritairement des femmes qui, comme vous le savez, mes chers collègues, connaissent, en leur défaveur, un écart salarial de 24 % par rapport aux hommes. Elles sont également plus touchées que ces derniers par les maladies musculo-squelettiques, comme l’a rappelé mon collègue Christian Favier.
Ainsi, une meilleure couverture maladie permettrait une meilleure prévention des maladies chez ces femmes qui ne disposent, pour certaines d'entre elles, que d'un SMIC ou de salaires assez faibles.
L'égal accès aux soins de nos concitoyens est une priorité dans les politiques publiques, et il est donc nécessaire d'aider au financement de la couverture maladie dans le secteur de l'habillement.
Je vous rappelle que, actuellement, 52 % des salariés bénéficient déjà d'une prise en charge de leur complémentaire santé. Ce sont aux autres salariés, les 48 % restant, que doivent s'adresser ces nouvelles dispositions. Elles doivent en effet concerner les salariés des industries de l'habillement, pour qu’il y ait un signal fort. Le financement intégral de la couverture complémentaire par leur employeur en est un. Il faut garder à l'esprit que, pour de nombreux salariés, ce texte ne comportera aucune avancée sociale si l'employeur ne finance qu'à hauteur de 50 % leur couverture complémentaire, puisque c'est déjà le cas pour eux.
Pour toutes ces raisons, le groupe communiste, républicain et citoyen auquel j'appartiens votera cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l'amendement n° 31.
Mme Éliane Assassi. L’article qui nous occupe semble constituer une véritable avancée, mais il ne règle pas le problème de la prise en charge par la société, au nom de la solidarité, de l’ensemble des personnes actives ou non.
D'ailleurs, pour la Mutualité française, le projet d'accord conclu entre les partenaires sociaux, qui ne concerne que les salariés, constitue une première étape dans cette voie.
Pour le collectif interassociatif sur la santé – le CISS –, que je cite, « nombre d'étudiants, de retraités, de professions indépendantes, de personnes sans emploi […] resteront confrontés aux difficultés d'accès aux contrats individuels de complémentaire santé ».
Dès lors, le président de la Mutualité française, Etienne Caniard, souligne qu’il faudra éviter de « consolider un système dual avec une couverture complémentaire facilement accessible pour les salariés et des contrats individuels inabordables pour ceux qui en ont le plus besoin ».
C'est bien là ce qui nous préoccupe. Il serait préférable – nous ne cessons de le dire – d'opter pour un modèle de société dans lequel la sécurité sociale assure une prise en charge à 100 %.
Comme le note le rapport de l'IRDES, l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé, de juillet 2012, « aujourd'hui, dans un contexte de baisse de la participation de l'assurance maladie aux dépenses de santé, les enjeux autour de la couverture complémentaire santé et de la prévoyance sont au cœur du débat public. En effet, bénéficier d'une complémentaire santé permet d'accéder plus facilement à des soins et d'y renoncer moins souvent pour des raisons financières ».
Ce constat a conduit les pouvoirs publics à mettre en place plusieurs dispositifs destinés à pallier les défaillances de notre système de sécurité sociale en facilitant l'accès à une complémentaire santé individuelle et la diffusion des complémentaires santés collectives.
Je pense ici, notamment, à l'exonération – bien entendu sous certaines conditions – de charges sociales des contributions employeur au financement de la complémentaire santé d'entreprise en 1985, à la loi Évin de 1989 prévoyant une portabilité des contrats de complémentaire santé d'entreprise lors du passage à la retraite ou de la perte d'emploi, à la loi Madelin de 1994 favorisant l'accès des travailleurs indépendants à la complémentaire santé, à la mise en place de la couverture maladie universelle complémentaire offrant un accès gratuit à la complémentaire santé aux ménages les plus pauvres en 1999, à la loi Fillon de 2003 réservant les exonérations de charges aux complémentaires santé collectives obligatoires et, enfin, à l'instauration de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé prévoyant une aide financière à la souscription d'une complémentaire santé sous condition de ressources en 2004.
Malgré cette abondante législation, nous constatons aujourd'hui que le problème de la couverture de nos concitoyens est d’une actualité inquiétante.
Mes chers collègues, vous comprendrez que face à ce constat social inacceptable d'un pays qui ne sait plus soigner ses citoyens, l'amendement que nous vous proposons est une goutte d'eau dans un océan. Cependant nous y tenons particulièrement, au nom de la défense des droits des salariés à qui vous allez imposer ce projet de loi.
C'est pourquoi nous voterons cet amendement qui, par dérogation à l'alinéa 20, tend à ce que l'employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983.
M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote sur l'amendement n° 32.
M. Christian Favier. Cette explication de vote concerne la prise en charge de la complémentaire santé des travailleurs du BTP. Vous le savez, le Haut Conseil du financement de la protection sociale a rappelé que le financement de la protection sociale était assuré à 77 % par les revenus du travail et à seulement 2 % par le capital.
Nous sommes d'ailleurs farouchement opposés aux formes de rémunération – participation, intéressement, actionnariat – qui échappent à toutes les cotisations sociales et donnent droit à des avantages fiscaux considérables pour les employeurs.
Selon les technocrates de Bercy et les idéologues du libéralisme, le grand responsable de la crise de l'emploi serait le coût du travail. Pour les entreprises qui délocalisent leurs activités ou qui exploitent, grâce à une Europe de régression sociale, des travailleurs à bas coûts, notre pays ne serait pas suffisamment attractif. C'est souvent le cas des entreprises du secteur du BTP, où le statut des salariés détachés permet un véritable dumping social.
Ainsi, pour le sujet qui nous intéresse, un rapport d'information très intéressant de notre collègue Francis Grignon, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 18 octobre 2006, a mis en exergue de graves problèmes.
Il indique que le détachement de travailleurs peut s’accompagner du maintien du rattachement des salariés au régime de protection sociale de leur pays d’origine. Cela signifie que le salaire d’un ouvrier étranger intervenant sur un chantier français continue d’être affecté des cotisations de son pays d’origine, dont le niveau est souvent beaucoup plus bas que celui des cotisations françaises. Il peut en résultat un différentiel de l’ordre de 30 % du salaire brut, comme c’est le cas entre la France et la Pologne.
C’est pourquoi, avant de parler d’attractivité du territoire, parlons d’abord de l’attractivité du BTP. À cet égard, il faut effectivement s’interroger sur les raisons qui conduisent malheureusement beaucoup de jeunes à se détourner de ce secteur qui, pourtant, embauche. Ce n’est pas sans lien, évidemment, avec la pratique de bas salaires, de conditions de travail difficiles et du manque de reconnaissance de la pénibilité. En outre, arrivés à la retraite, ce ne sont plus des travailleurs pauvres mais de pauvres retraités.
Vous nous proposez un accord qui va prétendument améliorer le sort des salariés. Nous vous répondons qu’il faudrait d’abord commencer par porter l’exigence d’une Europe sociale forte qui ne se fasse pas au détriment des travailleurs.
Quand vous leur imposez l’ANI, les travailleurs du secteur revendiquent une protection sociale innovante à dimension humaine au service de tous les salariés. Je pense, par exemple, au fait de porter la rente, la pension ou le complément de salaire à 100 % du salaire brut à la suite d’un accident quel qu’il soit, de prendre en charge la totalité du coût des consultations et des frais de santé – optiques, dentaires, pharmaceutiques, hospitaliers –, d’attribuer un capital décès ou d’autres mesures concernant le congé de paternité.
L’amendement que nous vous proposons d’adopter constitue un minimum pour ces ouvriers. Son adoption permettrait à ceux qui sont exposés à des conditions de travail particulièrement difficiles dans le bâtiment et les travaux publics, aux effets dévastateurs pour la santé, de pouvoir prétendre à une couverture complémentaire intégralement prise en charge par l’employeur.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 182 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote sur l'amendement n° 33.
M. Jean Desessard. À cette heure-ci, une petite explication de vote ne peut pas faire de mal ! (Sourires.)
M. Pierre Laurent. Cet amendement vise les salariés des cafétérias, un secteur symbolique de la pénibilité et de la précarité qui touche un très grand nombre de salariés. D’une manière générale, au-delà même de ce secteur, nous devons absolument tenter de corriger le déséquilibre profond de ce texte, dans lequel, au nom de la flexisécurité, la flexibilité l’emporte sur la sécurité dans quasiment tous les domaines.
On nous a répondu, à propos de cette série d’amendements, que cet accord était équilibré et qu’il fallait maintenir le financement partagé par moitié de la couverture santé, reprenant en cela l’argument avancé par M. le ministre, cet après-midi, d’un accord en tous points gagnant-gagnant.
En la matière, nous sommes, à mon sens, dans la situation inverse. Derrière l’apparente égalité d’un financement à 50-50 de la complémentaire santé, nous nous engageons dans une rupture très profonde du système de protection sociale de notre pays.
Il n’y a pas, à la vérité, de continuité entre la couverture de la sécurité sociale et celle de la complémentaire santé. La sécurité sociale relève d’un système de solidarité nationale. Autrement dit, c’est un système profondément solidaire. La complémentaire santé sera, elle, dominée par la logique de marché. D’ailleurs, si nous écoutions la droite, nous irions plus loin encore en faisant sauter la clause de désignation ! Néanmoins, même avec cette clause, c’est la logique de marché qui dominera dans la présentation des offres de complémentaire santé.
Comme la couverture offerte par la sécurité sociale se dégrade déjà et que ni le budget de la sécurité sociale que nous avons voté à l’automne ni le prochain budget ne laissent augurer une amélioration, nous serons dans une situation de plus en plus difficile. Les salariés devront alors choisir entre payer toujours plus – ce que la dégradation de leur situation financière ne leur permettra pas de faire – ou réduire leur complémentaire santé et le niveau de soins.
En fait, ce système va entraîner l’ensemble de la protection sociale vers le bas. C'est la raison pour laquelle nous le jugeons extrêmement inquiétant. Il faudrait au minimum le corriger en généralisant le financement intégral de la complémentaire santé envisagée par les employeurs. C’est vrai pour les salariés des cafétérias concernés par cet amendement ; c’est vrai aussi, à nos yeux, pour l’ensemble des salariés, comme nous avons essayé de le démontrer au travers de l’ensemble de nos amendements.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote sur l'amendement n° 35.
M. Dominique Watrin. En pointant spécifiquement, par nos amendements, chaque convention collective, en évoquant dans cet hémicycle, comme nous l’avions fait lors du débat sur les retraites, la pénibilité des métiers et les risques sur la santé supportés par les salariés, nous souhaitons engager une prise de conscience sur la réalité des situations. Le vécu au sein des entreprises doit nous aider à évaluer concrètement les droits promis aux salariés.
Cette couverture complémentaire serait, selon le MEDEF et le Gouvernement, une grande victoire pour les salariés, en quelque sorte un nouvel acquis. Nous pouvons légitimement nous interroger sur ce qu’il en est vraiment : concrètement, quelle est la situation ?
La sécurité sociale, de portée universaliste, rembourse de moins en moins de soins ou de médicaments, et de moins en moins complètement. Nombre de nos concitoyens renoncent ainsi à se soigner, n’ayant pas les moyens financiers d’accéder aux soins, quand bien même ils disposent d’un emploi. Notre pays compte en effet des millions de travailleurs pauvres.
Nous sommes d’accord avec le constat selon lequel il ne faut plus que l’obstacle financier soit rédhibitoire pour les salariés dans leur accès aux soins. Néanmoins, reconnaissez-le, mes chers collègues, la couverture complémentaire étendue qui nous est proposée permet habilement d’éviter de poser la question, que nous estimons urgente et prioritaire, de la couverture offerte par la sécurité sociale. Ce type de manœuvre n’est d’ailleurs pas rare.
Si la sécurité sociale permettait une couverture suffisante, la question des mutuelles ne se poserait pas en ces termes. Rendre obligatoire la couverture complémentaire santé vise en réalité bien souvent à masquer les défaillances du système public en termes de service public de santé. Comme je l’ai montré, c’est un peu l’histoire du serpent qui se mord la queue : plus on développe les complémentaires et plus on affaiblit la sécurité sociale, plus il faut de complémentaires voire de sur-complémentaires !
En outre, cette complémentaire santé sera financée pour moitié par les salariés, alors que les problèmes de santé qu’ils rencontrent sont très souvent les conséquences de leurs conditions de travail. Or, dans le cadre de la sécurité sociale, je le répète, les cotisations maladie sont prises en charge à 98 % par les employeurs. Dans ces conditions, il paraîtrait normal que ce soit l’employeur qui finance intégralement cette couverture complémentaire.
Au travers de cet amendement, les sénateurs de mon groupe souhaitent donc que, pour les professions relevant plus particulièrement de la salaison, de la charcuterie en gros et de la conserve de viande, dont les conditions de travail sont particulièrement pénibles, cette couverture complémentaire soit financée à 100 % par l’employeur.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 183 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n’a pas adopté.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° 36.
Mme Isabelle Pasquet. Je voudrais prendre un exemple pratique pour illustrer la pertinence de cet amendement relatif à la situation des salariés de l’industrie des glaces, sorbets et crèmes glacées.
Ces salariés travaillent dans des conditions difficiles, le plus souvent la nuit, pour respecter la chaine du froid. La pénibilité de ces emplois justifie de fait une protection spécifique.
La lecture de la convention collective de ce secteur nous indique d’ailleurs que les partenaires sociaux sont parfaitement conscients des risques professionnels et des problèmes de santé publique pouvant découler de ces conditions de travail.
Déjà, en 2010, lors du débat sur les retraites, nous avions tenté de convaincre la majorité de l’époque de cette spécificité et de la nécessité des aménagements auxquels il fallait procéder. Nous nous inscrivons donc dans la continuité de ces efforts, en demandant que les salariés relevant de cette convention collective bénéficient d’une couverture complémentaire de santé, financée à 100 % par les employeurs.
Il s’agirait d’ailleurs, en quelque sorte, d’une mesure de prévention, puisque, malheureusement, ces salariés peuvent être amenés, plus que d’autres, à engager de fortes dépenses de santé du fait même de leurs conditions de travail. L’instauration d’une couverture complémentaire financée à 100 % leur permettrait d’être remboursés de ces frais et rendrait ainsi possible la mise en place d’une nécessaire prévention.
Monsieur le ministre, vous nous direz peut-être qu’il faut adopter le présent texte en l’état pour respecter les négociations ayant abouti, le 11 janvier dernier, à la signature de l’accord national interprofessionnel. Nous pensons, pour notre part, que la représentation nationale doit jouer pleinement son rôle et qu’elle ne peut se désintéresser de toutes les questions relevant pour partie des partenaires sociaux.
Le présent texte est absolument déséquilibré. Il est d’ailleurs frappant de voir que les quelques mesures positives contenues dans ce projet de loi sont celles qui vont entrer en vigueur le plus tard, notamment la couverture santé obligatoire. Cette dernière mesure témoigne d’ailleurs d’une volonté d’affichage : pour louable qu’elle soit, elle ne concernera qu’un nombre limité de personnes, et la couverture acquise restera extrêmement faible.
Nous craignons que ce dispositif ne justifie, à terme, de nouveaux reculs du champ de remboursement de la sécurité sociale, qui, seule, a une portée universelle. Nous ne croyons pas que la garantie de droit à la santé, en tant que service public, puisse reposer sur des assurances privées. Raison pour laquelle nous prônons une véritable sécurité sociale pour tous, salariés, étudiants, chômeurs...
Pour l’heure, et par cet amendement, nous demandons – il s’agit d’un minimum – que les salariés relevant de la convention collective des sorbets et des glaces, dont les conditions de travail sont extrêmement pénibles, disposent d’une couverture complémentaire santé financée à 100 % par les employeurs. Ces derniers sont d’ailleurs parfois peu scrupuleux et, tous ici, nous avons en tête le cas dramatique de l’usine Pilpa de Carcassonne. La direction du glacier a confirmé, il y a quelques semaines, la fermeture de l’usine, mais a révisé les modalités de reclassement de son plan social, sans convaincre les salariés.
Nous adressons depuis ces travées un signal fraternel aux salariés en lutte dans cette entreprise, et nous espérons que les dispositions de cet amendement sauront emporter votre adhésion.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 38.
Mme Laurence Cohen. Dans la continuité de mon intervention précédente, je voudrais rappeler la situation faite aux travailleurs du taxi parisien.
Il existe trois catégories de chauffeurs : environ 800 salariés, 7 000 locataires et 8 000 artisans.
Les salariés sont pénalisés par une mauvaise convention collective. Ainsi ne sont-ils payés, par exemple, qu’en fonction de la durée des courses, alors qu’ils passent la moitié de leur temps à attendre le prochain client.
Par ailleurs, la profession de chauffeur de taxi est emblématique du salariat caché, qui se traduit ici par la pratique de la location. La place prise par les sociétés de taxis pratiquant la location révèle l’importance de la crise qui secoue non seulement cette partie de la profession mais aussi l’ensemble des chauffeurs de taxis, notamment les travailleurs indépendants, dits « artisans », touchés par la baisse des recettes conditionnant leurs revenus.
De nombreuses jurisprudences, notamment celle de la Cour de cassation de décembre 2000, ont requalifié les contrats de location en contrat de travail en soulignant, s’il en était besoin, la nécessité d’une profonde réforme de la profession. Cette situation est d’autant plus désolante qu’elle s’apparente à un retour en arrière.
En effet, la pratique de la location est antérieure à 1936. C’est sous le Front populaire qu’a été signée la convention collective des taxis de la Seine du 24 juin 1936 qui a mis fin à la location, en établissant un contrat collectif de travail pour les chauffeurs.
Jusque dans les années soixante-dix, la branche du taxi a su trouver un certain équilibre en dépit des difficultés économiques, des difficultés de circulation, et de leurs conséquences.
À partir de 1973, après la réforme du 2 novembre 1972 relative à l’organisation de l’industrie du taxi, la situation matérielle et les conditions de travail des chauffeurs se sont détériorées.
L’adoption de notre amendement, qui vise à ce que l’employeur finance intégralement la couverture complémentaire des salariés relevant de la convention collective des taxis parisiens, permettra tout simplement de rendre plus attrayante cette convention collective.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 184 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 39.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote sur l'amendement n° 40.
M. Christian Favier. Selon les chiffres de l’INSEE de 2010, le secteur du bâtiment et des travaux publics, qui représente 8,6 % de la masse salariale du régime général, est l’un des plus importants de l’économie française.
La branche professionnelle du BTP compte 479 627 entreprises regroupant 1,4 million de salariés. Malgré le recul de l’activité, on dénombre davantage d’établissements en 2010 qu’en 2009.
Avant de passer au vote de notre amendement, qui vise à améliorer la situation des ouvriers de ce secteur, permettez-moi, dans la continuité de mon intervention précédente, de rappeler un certain nombre de faits militant en faveur de son adoption.
On le sait, les ouvriers du bâtiment et des travaux publics sont soumis à des contraintes physiques plus importantes que ceux des autres secteurs d’activité : plus d’un ouvrier de la construction sur trois travaille à l’extérieur plus de vingt heures par semaine et se trouve donc exposé aux intempéries ; ils sont trois sur quatre dans ce cas chez les couvreurs et deux sur trois chez les ouvriers des travaux publics et du gros œuvre ; quelque 63 % des ouvriers, principalement ceux du gros œuvre, ainsi que les couvreurs dans le second œuvre, portent des charges plus de deux heures par semaine et un sur cinq au moins vingt heures.
Ils sont également contraints d’effectuer des gestes répétitifs plus de dix heures par semaine, c’est-à-dire plus que dans les autres secteurs. Ils utilisent des outils transmettant des vibrations aux membres supérieurs, ainsi que des machines ou engins très sonores, en particulier lors des opérations de démolition.
Leurs conditions de travail sont fatigantes : travail debout, postures pénibles plusieurs heures dans la semaine – bras en l’air, à genoux ou en torsion, cumul de contraintes pour le dos et les articulations des membres supérieurs.
Dans le secteur de la construction, huit ouvriers sur dix sont exposés au moins à un produit chimique, contre six sur dix dans l’industrie. Il s’agit souvent d’expositions prolongées, par exemple au ciment. Ils sont également plus exposés que les autres ouvriers aux produits cancérogènes, reprotoxiques et mutagènes.
La situation des intérimaires du bâtiment est encore moins enviable : ils sont soumis à des contraintes identiques, voire plus fortes dans de nombreux cas, sans avoir pour autant la même latitude dans l’organisation du travail, ni le même pouvoir de décision.
Par ailleurs, le secteur des travaux public et du bâtiment demeure celui qui présente le plus haut niveau de risque d’accidents. Les chutes de hauteur, depuis les toitures, verrières ou échafaudages, restent la principale cause d’accidents graves et de décès : en 2010, elles ont été responsables de 19 056 accidents avec arrêt, de 2 150 accidents avec incapacité permanente et de 33 décès.
Avant de passer au vote de notre amendement, il me semblait essentiel de rappeler ces quelques faits.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 40.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 185 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 41.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 186 :
Nombre de votants | 177 |
Nombre de suffrages exprimés | 163 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 82 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 143 |
Le Sénat n’a pas adopté.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote sur l’amendement n° 42.
M. Pierre Laurent. Puisque nous arrivons au terme de cette soirée, j’espère que nous pourrons adopter cet amendement. Cela nous permettrait de terminer une note positive et récompenserait le travail du groupe CRC. (Sourires.) Ce ne serait d'ailleurs que justice, puisque cet amendement vise les salariés de la restauration rapide, dont je vous ai déjà parlé.
Vous le savez, mes chers collègues, ce secteur, qui emploie de nombreux jeunes, est marqué par une très grande flexibilité. Il s’agit, en outre, d’une des branches où l’on retrouve les abus les plus inacceptables au regard du droit du travail : CDD renouvelés à l’envi, absence de droits syndicaux, salaires comprimés, hyper-flexibilité, et j’en passe.
Ces salariés sont souvent des étudiants, ou bien d’anciens étudiants qui ont d’abord tenté de mener de front les études et un emploi et qui, n’y parvenant pas, continuent à travailler dans ce secteur.
Je vais vous citer l’exemple d’une employée d’une chaîne de restauration rapide dans le Nord-Pas-de-Calais. Étudiante, cette jeune femme doit financer ses études. Or la bourse à laquelle elle a droit n’est pas suffisante, et ses parents ne peuvent subvenir à ses besoins.
Elle se voit contrainte d’exercer un emploi, à des conditions, évidemment, non négociables. Les horaires « aménagés » pour les étudiants correspondent, en réalité, à la tranche allant de dix-neuf heures à minuit. Ensuite, il faut tout ranger et nettoyer. Bref, c’est le travail d’une journée, en pleine nuit. Ajoutez à cela que, bien souvent, les heures supplémentaires ne sont pas payées, que la pression psychologique est constante, que les tâches demandées sont très diverses et correspondent, en réalité, à la maîtrise de plusieurs postes de travail. Le tout se passe, en outre, dans une ambiance délétère.
S’il n’accepte pas cette pression, le salarié n’a qu’à prendre la porte ; il est contraint à la démission. Un turn over important est l’un des modes de fonctionnement de ce type d’entreprises.
Cette situation n’est pas une vue de l’esprit. Elle est dénoncée par les syndicats de la restauration rapide. Dans ces entreprises, les conditions du dialogue social, si souvent évoqué dans notre débat sur ce texte, sont la plupart du temps totalement déplorables.
On ne compte plus les pressions exercées à l’encontre des quelques organisations syndicales qui osent remettre en cause le dogme de la rentabilité maximale, qui est la loi dans le secteur, ou contre les salariés qui tentent de se syndiquer. Je ne prendrai qu’un exemple pour l’illustrer. Le mois dernier, McDonald’s a autorisé l’intervention des forces de l’ordre pour expulser le représentant syndical d’un de ses franchisés des Bouches-du-Rhône, lors de l’élection des représentants du personnel.
Monsieur le ministre, vous ne cessez de parler d’un texte « équilibré ».
M. Pierre Laurent. Vous devez comprendre que, aujourd’hui comme hier, dans ce secteur comme dans beaucoup d’autres, les relations entre le salarié et l’employeur ne sont pas équilibrées.
Dans ces conditions, et parce que la logique commande que le législateur, quand il s’attache au droit du travail, corrige ce déséquilibre au profit du salarié, nous nous voyons contraints de demander la prise en charge totale de la complémentaire santé par les entreprises de ce secteur. J’espère que, cette fois, nous y parviendrons.
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
8
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 19 avril 2013, à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la sécurisation de l’emploi (n° 489, 2012-2013) ;
Rapport de M. Claude Jeannerot, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 501, 2012-2013) ;
Texte de la commission (n° 502, 2012-2013) ;
Avis de M. Gaëtan Gorce, fait au nom de la commission des lois (n° 494, 2012-2013).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le vendredi 19 avril 2013, à zéro heure vingt-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART